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Décisions | Chambre civile

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C/29399/2019

ACJC/837/2021 du 08.06.2021 sur JTPI/14751/2020 ( OO ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/29399/2019 ACJC/837/2021

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 8 JUIN 2021

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______ [GE], appelante d'un jugement rendu par la 14ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 27 novembre 2020, comparant par Me Alain BERGER, avocat, boulevard des Philosophes 9, 1205 Genève, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié c/o Monsieur C______, ______ [GE], intimé, comparant en personne.

 

 


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/14751/2020 du 27 novembre 2020, le Tribunal de première instance s'est déclaré incompétent à raison du lieu pour connaître de la requête commune de divorce formée le 23 décembre 2019 par A______ et B______ (ch. 1 du dispositif), a constaté en conséquence que ladite requête était irrecevable (ch. 2), compensé les frais judiciaires - arrêtés à 600 fr. - avec l'avance fournie par A______ et les a répartis par moitié entre les parties (ch. 3), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5).

B.            a. Par acte déposé le 15 janvier 2021 au greffe de la Cour de justice, A______ appelle de ce jugement, reçu le 30 novembre 2020, dont elle sollicite l'annulation.

Principalement, elle conclut à ce que la compétence ratione loci des tribunaux genevois soit constatée pour connaître de la requête commune de divorce formée par les époux le 23 décembre 2019 et à ce que la procédure soit renvoyée au Tribunal pour instruction au fond de ladite requête.

A titre subsidiaire, elle conclut à ce que la procédure soit renvoyée au Tribunal avec instruction de procéder à l'audition des parties sur la compétence ratione loci.

En tout état, elle conclut à ce que les frais judiciaires d'appel soient répartis par moitié entre les parties et les dépens compensés.

Elle produit des pièces, soit des courriers adressés au Tribunal par le conseil de A______ avant que la cause n'ait été gardée à juger (pièces 44 à 46) et un article de doctrine intitulé "La constitution d'un domicile en droit international privé" de Florian CHAUDET (pièce 47).

b. Par courrier du 9 mars 2021 à la Cour, B______ a indiqué "appuyer l'appel" déposé par son épouse contre le jugement entrepris.

c. Par avis du 12 mars 2021, la Cour a informé les parties que la cause était gardée à juger.

C.           Les éléments suivants résultent de la procédure:

a. A______, née [A______] le ______ 1972 à D______ (Italie), de nationalité française, et B______, né le ______ 1971 à E______ (Russie), de nationalités belge et russe, se sont mariés le ______ 2001 à Monaco.

Est issu de cette union F______, né le ______ 2006 à D______.

B______ est également le père d'un autre enfant, soit G______, née le ______ 2011 de sa relation avec H______, domiciliée à I______ (Russie).

Les époux n'ont pas conclu de contrat de mariage, mais ont déclaré se soumettre au régime légal français.

b. Fin 2001, les époux se sont installés à Genève, où ils ont acquis en copropriété en avril 2002 un appartement avec parking, sis avenue 1______ [no.] ______.

A______ est titulaire d'un permis C depuis 2008 à Genève, et domiciliée officiellement dans le canton à l'adresse susmentionnée (selon les attestations de l'Office cantonal de la population et des migrations (ci-après: l'OCPM) des 3 décembre 2019 et 28 septembre 2020).

c. Les époux se sont séparés en février 2009.

B______ a par la suite définitivement quitté Genève pour s'établir à J______ (Autriche), sa domiciliation en tel lieu n'étant pas contestée.

En septembre 2009, A______ s'est installée avec l'enfant F______ à D______. Selon les déclarations de A______, ce déménagement à D______ n'était que provisoire et uniquement dicté par l'état de santé de son père, atteint de la maladie d'Alzheimer, dont elle entendait s'occuper.

d. B______ est un violoniste internationalement connu qui donne des concerts très fréquemment dans le monde entier.

A______ n'exerce aucune activité lucrative et se consacre à l'éducation de son fils.

A teneur de sa déclaration fiscale 2019, A______ possède en Suisse un compte bancaire auprès de la banque K______, dont le solde au 31 décembre 2019 s'élevait à 44 fr. Elle a par ailleurs produit au Tribunal des bordereaux de taxation incomplets concernant les années 2018 et 2019, ainsi que la facture d'acompte pour l'année fiscale 2020. Hormis un décompte final pour les impôts cantonaux et communaux pour l'année 2018, qui fait état d'un paiement partiel, aucune preuve de paiement des impôts n'a été fournie. Il ressort de ces documents que l'Administration fiscale genevoise envoie ses communications à l'adresse italienne de A______.

Par donation de son époux le 4 novembre 2016, A______ est devenue seule propriétaire de l'appartement sis, avenue 1______ [no.] ______, à Genève, dont les charges de copropriété s'élevaient à 52'345 fr. 35 pour l'année 2017 et ses charges mensuelles comprenant le chauffage à 1'766 fr. en 2018.

Elle était inscrite en tant que membre "passif" du [club sportif] L______ à Genève pour les années 2017 à 2020.

e. F______ est scolarisé en école privée à D______ depuis 2009. A______ a allégué avoir l'intention de revenir en Suisse et d'y faire scolariser son fils. De ce fait, F______ a été provisoirement inscrit à l'école privée "M______" de Genève pour l'année scolaire 2020-2021. Il a toutefois fréquenté le [Lycée] N______ de D______ en qualité d'externe pour l'année scolaire en question.

F______ était membre du [club sportif] L______ de 2017 à 2020.

Le Tribunal a retenu que F______ était domicilié à D______, conformément aux déclarations du conseil de A______ dans ses plaidoiries finales.

f. Le 23 décembre 2019, les époux ont déposé au greffe du Tribunal une requête commune en divorce avec accord complet, assortie d'une convention sur les effets accessoires du divorce.

g. Le Tribunal a tenu une audience de comparution personnelle des parties le 3 mars 2020, à laquelle seul le conseil de A______ a assisté. Ce dernier a déclaré que sa mandante avait été retenue en Italie en raison d'un refroidissement de son fils qui n'aurait pas pu passer la frontière au vu des contrôles effectués aux frontières du fait de la crise sanitaire. Quant à B______, il craignait, pour des motifs identiques, d'être retenu d'une frontière à l'autre et de ne pouvoir faire face à ses obligations de ce fait.

h. A l'issue de l'audience, le Tribunal a imparti à A______ un délai pour qu'elle lui communique toutes pièces susceptibles d'éclaircir la question de son domicile et une date à laquelle les époux pourraient être entendus.

i. Par courrier d'avocat au Tribunal du 25 mai 2020, A______ a demandé une prolongation du délai précité notamment parce que son père était "récemment" décédé en Italie.

j. Suite à une prolongation d'office du délai précité en vertu de la réglementation en lien avec la crise sanitaire, puis à la requête susvisée de A______, celle-ci a déposé un chargé de pièces complémentaire au Tribunal le 14 juillet 2020. Elle a informé le Tribunal être disponible en tout temps pour une audience de comparution personnelle des parties et a proposé deux dates convenant à son époux, soit les 29 septembre ou 10 octobre 2020.

k. Le Tribunal a cité les parties à comparaître le 29 septembre 2020, en invitant A______ à compléter ses pièces d'ici au 22 septembre 2020.

l. Par courrier du 21 septembre 2020, A______ a informé le Tribunal de ce que son époux était atteint du Covid-19, sollicitant pour ce motif le report de l'audience appointée et du délai pour produire des pièces à une date "bien ultérieure".

m. Par ordonnance du 23 septembre 2020, reçue le lendemain par A______, le Tribunal a maintenu l'audience du 29 septembre 2020 et l'ordonnance de comparution personnelle de celle-ci, afin qu'elle puisse s'exprimer sur la question de son domicile, dispensé B______ de comparaître personnellement à l'audience, et prolongé une "ultime fois" au 29 septembre 2020 le délai imparti à A______ pour produire ses bordereaux de taxation des années 2018 et 2019, ainsi que l'attestation de scolarisation de F______ pour l'année scolaire 2020-2021.

n. Lors de l'audience du Tribunal du 29 septembre 2020, le conseil de A______ s'est présenté seul et a déposé un chargé de pièces complémentaire. Il a indiqué que A______ s'était rendue à Monaco pour se recueillir sur la tombe de feu son père et n'avait appris qu'à ce moment qu'elle ne pourrait se rendre en Suisse ensuite sans se mettre en quarantaine. Son conseil a encore précisé ignorer qu'il était possible de solliciter une dérogation à l'obligation de quarantaine pour assister à une audience.

Il a plaidé et persisté dans les conclusions de sa mandante, soit à l'audition des parties et à ce que le Tribunal se déclare compétent, à tout le moins sur le principe du divorce et les effets qui ne concernent pas l'enfant, eu égard au domicile genevois de A______.

o. A l'issue de l'audience, le Tribunal a limité la procédure à la question de sa compétence à raison du lieu et gardé la cause à juger sur la recevabilité de la demande commune de divorce à cet égard.

D.           Dans le jugement entrepris, le Tribunal a retenu que ni les époux, ni l'enfant n'étaient domiciliés à Genève. S'agissant de A______, celle-ci était domiciliée à D______ (Italie) et non à Genève. En effet, elle n'avait donné aucune indication quant à un changement de résidence suite au décès de son père, l'Administration fiscale genevoise lui adressait des communications à son adresse en Italie, son fils n'avait jamais été officiellement domicilié à Genève et, bien que A______ déclarait la scolarisation de son fils en Italie comme provisoire, elle n'avait pas attesté par pièce la scolarisation de son fils à Genève, mais seulement l'inscription provisoire de celui-ci dans une école privée de Genève pour la rentrée scolaire 2020-2021. A______ n'exerçant aucune activité lucrative et se consacrant à l'éducation de son fils, il fallait admettre que le centre de son existence était au lieu de résidence de l'enfant, soit en Italie, puisque c'est là que se focalisaient un maximum d'éléments concernant sa vie personnelle.

Le fait que A______ soit propriétaire d'un appartement à Genève et qu'elle y soit officiellement domiciliée ne constituait pas un élément à lui seul déterminant pour retenir un domicile à Genève. L'absence de mise en location de cet appartement - au demeurant insuffisamment prouvée - et les abonnements de son fils et d'elle-même au [club sportif] L______ n'étaient pas suffisants pour établir que l'essentiel de la vie personnelle de A______ se déroulait en Suisse.

Enfin, le Tribunal a retenu que A______ ne pouvait se prévaloir d'un domicile séparé de son fils, dans la mesure où elle ne s'était pas rendue à l'audience du Tribunal du 3 mars 2020 au motif qu'il était malade et qu'il ne pouvait passer la frontière italo-suisse pour cette raison. Les explications de A______ selon lesquelles elle ne s'était pas renseignée s'agissant des conditions de quarantaine au retour de son voyage à Monaco peu avant l'audience du Tribunal du 29 septembre 2020 ne rendaient pas vraisemblable son installation à Genève, canton frontalier et international, où la population était généralement bien informée des restrictions aux voyages découlant de la crise sanitaire.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC), dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse, au dernier état des conclusions de première instance, est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

En tant qu'il constate l'incompétence ratione loci du Tribunal, le jugement entrepris constitue une décision finale (art. 236 al. 1 CPC), rendue dans une affaire non patrimoniale puisqu'elle porte, selon l'état des dernières conclusions en première instance, sur le prononcé du divorce et des effets accessoires de celui-ci, dont certains sont sans valeur patrimoniale (attribution des droits parentaux, droit de visite) alors que d'autres présentent une telle valeur. La voie de l'appel est dès lors ouverte (art. 308 al. 2 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 5A_591/2020 du 17 novembre 2020 consid. 1).

1.2 L'appel, écrit et motivé, a été interjeté dans le délai légal de 30 jours - étant précisé que les délais d'appel sont suspendus du 18 décembre au 2 janvier inclus (art. 145 al. 1 let. c CPC) -, et respecte la forme prescrite (art. 311 al. 1 CPC). Il est dès lors recevable.

1.3 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

2.             L'appelante allègue des faits nouveaux et produit de nouvelles pièces devant la Cour.

2.1.1 Le tribunal examine d'office s'il est compétent à raison du lieu (art. 59 al. 2 let. b et 60 CPC).

Le devoir de vérification d'office s'étend en principe aussi aux faits pertinents pour la recevabilité. Il n'incombe certes pas au juge d'opérer des recherches approfondies, du moins dans les causes soumises à la maxime des débats (art. 55 al. 1 CPC); toutefois, s'il a connaissance de faits - allégués par les parties, notoires ou connus de lui - qui s'opposent à la recevabilité de la demande, il doit d'office en tenir compte (arrêt du Tribunal fédéral 4A_100/2016 du 13 juillet 2016 consid. 2.1.1 non publié aux ATF 142 III 515).

2.1.2 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuves nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

Dans les causes de droit matrimonial concernant les enfants mineurs, où les maximes d'office et inquisitoire illimitée s'appliquent, tous les nova sont admis, même si les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC ne sont pas réunies (ATF
144 III 349 consid. 4.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_685/2018 du 15 mai 2019 consid. 3).

2.2 En l'espèce, les pièces 44 à 46 produites en appel par l'appelante figuraient déjà au dossier de première instance, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'y revenir. La pièce 47 est recevable, même si la parution de cet article de doctrine est antérieure au jugement entrepris.

3.             Est litigieuse la compétence ratione loci des juridictions genevoises pour connaître de la requête commune en divorce, plus précisément l'existence d'un domicile à Genève de l'appelante.

3.1 En matière internationale, le for est régi par la loi fédérale sur le droit international privé du 18 décembre 1987 (LDIP - RS 291) sous réserve des traités internationaux (art. 1 al. 1 et 2 LDIP).

Selon l'art. 59 LDIP, les tribunaux suisses du domicile de l'époux défendeur (let. a) ou les tribunaux suisses du domicile de l'époux demandeur, si celui-ci réside en Suisse depuis une année ou est suisse (let. b), sont compétents pour connaître d'une action en divorce ou en séparation de corps.

Les fors prévus en matière de divorce par l'art. 59 LDIP ont un caractère impératif (art. 6 LDIP a contrario). L'époux défendeur ne peut ainsi accepter tacitement un for qui ne respecterait pas les conditions de cette disposition (en ce sens : Bucher, in Commentaire romand, Loi sur le droit international privé, Bucher [éd.], 2011, n. 6 ad art. 59 LDIP).

En cas de divorce sur requête commune au sens de l'art. 111 CC, il n'y a pas de défendeur dont la protection est prise en compte par les exigences additionnelles de l'art. 59 let. b LDIP. Celles-ci n'ont pas à être observées en pareil cas; il suffit que l'un des époux ait son domicile en Suisse (Bucher, op. cit., n. 7 ad art. 59 LDIP).

3.2 Aux termes de l'art. 20 al. 1 let. a LDIP, une personne physique a son domicile dans l'Etat dans lequel elle réside avec l'intention de s'y établir. Cette définition du domicile doit être interprétée en relation étroite avec celle de l'art. 23 al. 1 CC (ATF 120 III 7 consid. 2a; 119 II 167 consid. 2b). Elle comporte deux éléments : l'un objectif, la présence physique en un lieu donné; l'autre subjectif, l'intention d'y demeurer durablement (ATF 119 précité).

L'élément objectif - la présence physique en un lieu déterminé - n'implique pas nécessairement que le séjour ait déjà duré un certain temps; si la condition subjective - la manifestation de l'intention de s'établir durablement en un lieu déterminé - est remplie par ailleurs, la constitution d'un domicile peut se produire dès l'arrivée dans un nouveau pays de séjour. Aussi, pour déterminer si une personne réside en un lieu donné avec l'intention de s'y établir ce n'est pas la durée de son séjour à cet endroit qui est décisive, mais bien la perspective d'une telle durée (arrêt du Tribunal fédéral 5A_30/2015 du 23 mars 2015 consid. 4.1.1 et la jurisprudence citée).

Cependant, l'intention d'une personne de s'établir durablement en un lieu déterminé ne s'examine pas de façon subjective, au regard de sa volonté interne, mais à la lumière de circonstances objectives, reconnaissables pour les tiers, permettant de conclure à l'existence d'une telle intention. Ce n'est pas la volonté interne de l'intéressé qui importe, mais exclusivement la manifestation extérieure de cette volonté; les circonstances de fait objectives qui la manifestent de manière reconnaissable pour les tiers ont une portée juridique autonome. Ces circonstances ne doivent dès lors pas être considérées comme de simples indices de fait, servant à établir l'intention subjective de l'intéressé. Pour qu'une personne soit domiciliée à un endroit donné, il faut donc que des circonstances de fait objectives manifestent de manière reconnaissable pour les tiers que cette personne a fait de cet endroit, ou qu'elle a l'intention d'en faire, le centre de ses intérêts personnels, sociaux et professionnels. De plus, il n'est pas indispensable qu'une personne ait l'intention de demeurer pour toujours ou pour un temps indéterminé dans un certain lieu, mais il suffit qu'elle fasse de cet endroit le centre de son existence, quand bien même elle aurait l'intention de transférer plus tard son domicile ailleurs (ATF 119 II 64 consid. 2b/bb; arrêt du Tribunal fédéral 5A_30/2015 du 23 mars 2015 consid. 4.1.2 et la jurisprudence citée).

Lorsqu'il s'agit de déterminer le domicile d'une personne, le lieu indiqué par celle-ci n'est pas toujours décisif. Il faut, au contraire, se fonder sur l'endroit que sa conduite effective désigne comme le centre de ses intérêts personnels et professionnels. Une personne qui séjourne à l'étranger peut avoir un domicile en Suisse lorsqu'elle a en Suisse le centre de son existence, de ses relations, de ses intérêts idéaux et matériels, et de sa vie domestique, l'établissement de la famille jouant à cet égard un rôle important. En revanche, les permis d'établissement ou de séjour, le dépôt des papiers et l'exercice des droits politiques ne sont pas déterminants à eux seuls. Lorsqu'une personne séjourne en deux endroits différents et qu'elle a des relations avec ces deux endroits, le domicile se trouve au lieu avec lequel elle a les relations les plus étroites, compte tenu de l'ensemble des circonstances (ATF 125 III 100 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 9C_345/2010 du 16 février 2011 consid. 3.2).

Celui qui invoque l'existence d'un domicile déterminé doit le prouver (art. 8 CC). Lorsque se pose la question de la compétence du juge, celui-ci doit en principe établir les faits d'office (Staehelin, Basler Kommentar, Zivilgesetzbuch I, art. 1-456 ZGB, n. 28 ad art. 23 CC).

La compétence à raison du lieu des juridictions suisses doit être acquise à la date de l'ouverture de l'action (ATF 116 II 9 consid. 5; arrêt du Tribunal fédéral 5A_659/2011 du 5 avril 2012 consid. 2.2.2).

3.3 En l'espèce, il n'est pas contesté que l'époux est domicilié à l'étranger et que depuis septembre 2009, l'appelante s'est installée auprès de son père à D______, avec son fils, qui y est depuis lors scolarisé. Elle a affirmé que son souhait de rester dans cette ville était uniquement lié au fait qu'elle devait s'occuper de son père.

Au moment déterminant du dépôt de la requête commune de divorce, soit le 23 décembre 2019, le père de l'appelante était en vie et F______ était scolarisé à D______. A peine âgé de 3 ans lorsqu'il est parti pour D______ avec sa mère, F______ a donc vécu en Italie la majeure partie de sa vie ainsi que toute sa scolarité. L'appelante étant sans activité lucrative et s'occupant principalement de l'éducation de son fils, il apparaît que le centre de vie de celle-ci était à D______. L'appelante n'a au surplus pas allégué avoir des liens sociaux ou familiaux étroits et entretenus dans le temps avec quiconque à Genève. Ainsi, après plus de 10 ans de vie à D______, l'intention de l'appelante de rester domiciliée à Genève n'était pas reconnaissable pour les tiers, notamment pour l'Administration fiscale genevoise qui adressait ses courriers à l'adresse italienne de l'appelante.

De plus, lors du dépôt de son appel, soit près d'une année après le décès de son père survenu tel qu'allégué au printemps 2020 - sans que la preuve et la date de son décès n'aient été apportées -, l'appelante n'a pas fait état d'un changement prochain de résidence à Genève. Elle n'a pas démontré que F______ aurait effectivement suivi son année scolaire 2020-2021 dans l'école privée genevoise dans laquelle il était provisoirement inscrit - s'étant contentée d'indiquer en appel qu'aucune place ne s'était libérée pour lui -, ni qu'il serait valablement inscrit dans une école genevoise pour l'année scolaire suivante.

Quant aux impôts que l'appelante paierait ou non depuis près de vingt ans à Genève, il ne s'agit pas d'un indice en lui-même déterminant. Il en va de même de l'inscription de la mère et de son fils au [club sportif] L______ depuis plusieurs années. L'appelante ne possède par ailleurs que la modique somme de 44 fr. sur son unique compte bancaire en Suisse, ce qui paraît peu compatible avec un domicile effectif à Genève.

L'appelante a ainsi fait et continue de faire de D______ le centre de ses intérêts, de ses relations personnelles et sociales et ce, de manière objectivement reconnaissable pour les tiers. L'intensité des liens avec ce lieu l'emporte sur les liens existants avec Genève, ville qui ne saurait dès lors être considérée comme son domicile au sens de l'art. 59 let. a LDIP. L'accord des parties sur la compétence des autorités genevoises n'y change rien, les fors prévus en matière de divorce ayant un caractère impératif (cf. supra consid. 3.1).

3.4 En conséquence, en l'absence de domicile à Genève de l'une ou l'autre des parties, le premier juge a retenu à juste titre que les juridictions genevoises étaient incompétentes à raison du lieu pour connaître de la requête commune de divorce des parties.

Enfin, s'agissant du mineur F______, il n'est pas contesté que sa résidence habituelle est à D______, si bien que le Tribunal n'est pas non plus compétent pour statuer sur son sort (cf. art. 85 LDIP et art. 1 de la Convention de La Haye du 5 octobre 1961 concernant la compétence des autorités et la loi applicable en matière de protection des mineurs).

3.5 Etant incompétentes pour statuer sur le principe du divorce, les autorités genevoises le sont également pour statuer sur les effets accessoires de celui-ci.

4.             Malgré sa conclusion subsidiaire tendant au renvoi de la procédure au Tribunal pour audition des parties sur la question de la compétence ratione loci des autorités genevoises, l'appelante n'a pas expliqué quels éléments supplémentaires elle aurait pu fournir au premier juge par son audition. Elle a par ailleurs obtenu plusieurs prolongations de délai lui permettant de produire toutes les pièces utiles. Ainsi, compte tenu des éléments dont il disposait et de la possibilité donnée aux parties de produire des pièces, le Tribunal n'était pas tenu de procéder à la comparution personnelle des parties ou d'ordonner des mesures d'instruction complémentaires afin de statuer sur la question de sa compétence à raison du lieu.

L'appelante n'a au surplus pas démontré par pièces ses impossibilités de comparaître personnellement aux audiences du Tribunal des 3 mars et 29 septembre 2020 et était en tous les cas valablement représentée par son conseil lors des audiences précitées.

Enfin, s'agissant de l'intimé, sa comparution personnelle n'était pas nécessaire au vu de son domicile à l'étranger, ce qui n'a pas été contesté.

Partant, le Tribunal était fondé à ne pas procéder à l'audition des parties avant de se déclarer incompétent à raison du lieu.

Le jugement attaqué sera dès lors confirmé.

5.             Les frais judiciaires d'appel seront fixés à 800 fr. (art. 17 et 35 RTFMC) et compensés avec l'avance de même montant fournie par l'appelante, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC). Pour des motifs d'équité liés à la nature du litige et l'intimé ayant "appuyé" l'appel de son épouse, ils seront répartis à parts égales entre les parties (art. 107 al. 1 let. c CPC). L'intimé sera condamné à verser 400 fr. à l'appelante au titre de frais judiciaires (art. 111 al. 2 CPC).

Il ne sera pas alloué de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 15 janvier 2021 par A______ contre le jugement JTPI/14751/2020 rendu le 27 novembre 2020 par le Tribunal de première instance dans la cause C/29399/2019.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Déboute les parties de toutes autres ou contraires conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 800 fr. et les met à la charge de chacune des parties par moitié.

Compense les frais judiciaires d'appel de 800 fr. avec l'avance versée par A______, acquise à l'Etat de Genève.

Condamne B______ à verser à A______ 400 fr. à titre de frais judiciaires d'appel.

Dit qu'il ne sera pas alloué de dépens.

Siégeant :

Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Jean REYMOND, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.