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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3979/2020

JTAPI/27/2022 du 12.01.2022 ( LCI ) , REJETE

REJETE par ATA/521/2022

Descripteurs : ZONE AGRICOLE;REMISE EN L'ÉTAT;RÉTABLISSEMENT DE L'ÉTAT ANTÉRIEUR;PROPORTIONNALITÉ;PESÉE DES INTÉRÊTS;DÉLAI RAISONNABLE
Normes : LAT.16.al1; LaLAT.20; LCI.1.al7; Cst.5.al2; Cst.36.al3; LCI.129.lete; LCI.130; LCI.132.al1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3979/2020 LCI

JTAPI/27/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 12 janvier 2022

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Julien PACOT, avocat, avec élection de domicile

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______ et Madame B______ sont propriétaires des parcelles n° 1______ et 2______ de la commune de C______, situées en zone agricole, depuis le 23 décembre 2008. Ces parcelles leur ont été offertes en donation par le père de M. A______, qui les avait acquises, respectivement en date des 4 janvier 1973 et 30 août 1976.

2.             Le 12 novembre 1976, le département des constructions et des technologies de l'information (ci-après : DCTI) a autorisé, sur la parcelle n° 1______ précitée, à la demande du père des actuels propriétaires, l'édification d'un chalet « week-end » d'une surface de 21 m3 (DD 3______).

3.             Par décisions des 16 août 1979 et 13 mars 1981, le département a autorisé la construction d'une remise agricole pour petites machines et outils de jardin, d'une surface de 3 m sur 6.50 m, sur les parcelles n° 1______ et 2______.

4.             Suite à la demande d'autorisation de construire de M. A______, requérant, portant sur la reconstruction d'une habitation et dépendance, le DCTI l'a, par décision du 12 juin 2003, informé que le projet ne pourrait pas être autorisé en raison des dimensions des agrandissements demandés.

M. A______ a soumis un nouveau projet au DCTI qui a fait l'objet d'un refus identique le 9 décembre 2005, pour les mêmes motifs.

5.             Par décision du 6 février 2007, après plusieurs réunions avec M. A______ et son mandataire, le département a refusé de délivrer l'autorisation de construire sollicitée le 24 juin 2006 portant sur un changement d'affectation, ainsi que sur la transformation et réunion d'un chalet avec dépendance. Le projet consistait en un changement complet d'affectation d'un week-end, soit une habitation temporaire et d'une dépendance en habitation principale, leur transformation et leur réunion. Or, le requérant n'exerçait pas la profession d'agriculteur et la construction projetée n'était pas destinée à une activité agricole. Enfin, les constructions d'ores et déjà érigées sur la parcelle avaient déjà été agrandies, à une date inconnue, notamment par l'adjonction d'un sous-sol et l'agrandissement du week-end, dont la surface avait été portée de 21 m2 à 28.3 m2. Ainsi, les limites fixées par l'art. 42 de l'ordonnance sur l’aménagement du territoire du 28 juin 2000 (OAT - RS 700.1) seraient en tout état de cause dépassées (DD 4______).

6.             Par décision du 7 septembre 2007, la commission cantonale de recours en matière de constructions a rejeté le recours formé par M. A______ et son père contre cette décision car ne pouvant être mis au bénéfice de la dérogation de l'art. 24c de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700).

On peut lire dans cette décision qu'il ressortait des plans déposés par le département que la construction initiale datait de 1976 (dossier 3______-2) et qu'à l'examen des plans de la construction initiale, l'identité de la construction n'était pas respectée puisqu'à l'origine, il y avait deux bâtiments alors que ces bâtiments avaient été réunis et qu'un sous-sol avait été agrandi, qu'une fosse avait été créée et qu'un escalier extérieur était créé également. A l'origine il n'existait qu'un seul bâtiment de 7 m de long sur 3 m de large. La surface du bâtiment était d'environ 21 m2 et le grand bâtiment, de 28 m2, avait été construit sans autorisation. Aucun élément ne permettait de mettre en doute la bonne foi de l'administration dont la violation avait été soulevée par les recourants. Notamment, le dossier déposé par le département confirmait les difficultés qu'il exposait avoir rencontrées à obtenir des renseignements de la part du recourant. Aucun document n'était d'ailleurs produit à propos de l'autorisation de construire du grand bâtiment, qui avait été agrandi sans autorisation à l'exception des plans déposés aux fins de la demande refusée.

7.             Par arrêt du 20 juillet 2008, le Tribunal administratif (ci-après : TA) a confirmé ce refus.

Il ressort notamment de cet arrêt que lors de l'audience de comparution personnelle des parties qui s'était tenue le 18 janvier 2008, M. A______ avait certifié devant les juges que contrairement aux allégués du DCTI, il ne voulait pas y habiter de manière permanente.

8.             Lors d'un contrôle effectué sur place le 13 février 2009, un collaborateur du département a pu constater que le chalet « week-end » était en cours de démolition, sans qu'une autorisation de démolir n'ait été sollicitée.

9.             Par courrier du 27 février 2009, le département a interpellé M. A______ afin qu'il puisse faire valoir ses éventuelles observations à ce sujet, cette situation constituant une infraction à l'art. 1 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05).

Aucune suite n'a été donnée à ce courrier.

10.         Le 26 juin 2020, le département du territoire (ci-après : le DT) a écrit à M. A______ que le service ayant repris le traitement des procédures en infraction, le département souhaitait procéder à une visite de la parcelle le 26 août suivant.

11.         Suite à cette visite sur place, lors de laquelle un constat a été établi et des photographies prises, le département a informé M. A______ le 25 septembre 2020 avoir pu constater que des constructions (bâtiment principal servant de logement, véranda, cuisine d'été ouverte, piscine semi-enterrée, jeu d'enfants, tente, couvert à voitures, roulotte, remise à outils, serre tunnel et palissade en bois) avaient été érigés sur la parcelle sans autorisation. Un délai de dix jours était imparti à M. A______ pour transmettre ses observations.

12.         Par courrier du 8 octobre 2020, sous la plume de son conseil, M. A______ a exposé qu'il n'avait pas eu pleinement conscience de ses actes, sa situation personnelle et financière ne lui ayant pas permis d'agir autrement. Il a demandé de pouvoir continuer à jouir des structures nécessaires au logement familial mais s'est engagé à procéder à la suppression de la cuisine d'été ouverte, de la piscine semi-enterrée, des jeux d'enfants et des palissades en bois, avec un délai au 30 avril 2021 pour le faire. S'agissant de la tente, du couvert à voitures, de la roulotte et de la remise à outils, il s'est engagé à déposer une demande d'autorisation de construire, en tant qu'il en avait besoin pour l'entretien de sa parcelle. Enfin, la serre tunnel était présente depuis plus de trente ans, de sorte qu'elle devait être mise au bénéfice de la prescription acquisitive.

13.         Par décision du 23 octobre 2020, le département a exigé que M. A______ procède à la remise en état du terrain naturel dans un délai de six mois, en supprimant et évacuant le bâtiment comprenant le logement de sa famille (A), de la véranda, extension du bâtiment de logement (B), de la cuisine d'été ouverte (avec aménagement d'une dalle pour la cuisine et la terrasse) (C), de la piscine semi-enterrée (D), de la tente (débarras + remise des machines) (F), du couvert à voitures (G), de la roulotte (H), de la remise à outils (I) et des palissades en bois (H).

Pour le surplus, il lui était loisible de déposer une requête en autorisation de construire, dans un délai de trente jours, s'il souhaitait essayer de régulariser la situation.

14.         Une rencontre est intervenue entre le département et le conseil de M. A______ le 12 novembre 2020 et par courriel du 16 novembre 2020, ce dernier a récapitulé les demandes formulées lors de cette entrevue à savoir : demande de report au 31 janvier 2021 s'agissant des installations qui seraient régularisées, qu'il soit confirmé que l'ordre de remise en état serait suspendu le temps de l'instruction de ladite demande en autorisation de construire, demande d'octroi d'un délai au 30 juin 2023 afin de procéder à la remise en état, au vu des circonstances déjà expliquées au DT, demande de clarification du point A de la décision entreprise (sort du logement familial) dès lors que cette dernière indiquait sa suppression et son évacuation - dans la mesure où à l'origine deux petits bâtiments, plus que trentenaires, avait toujours existé et qu'il était dès lors envisageable de rétablir l'état initial - et sollicité la confirmation que le département accepte qu'il soit autorisé à remettre en était les deux petits bâtiments, tels qu'ils figuraient à ce jour au cadastre sur la parcelle n° 1______.

15.         Dans sa réponse du 24 novembre 2020, le DT a demandé de préciser la nature de la demande en autorisation de construire qui serait déposée, a refusé la demande de délai au 30 juin 2023 pour l'ordre de remise en état, au vu de l'ancienneté de l'infraction et enfin, ordonné que les deux petits bâtiments retrouvent leurs dimensions, gabarits et affectations conformément à leur état avant ladite transformation.

16.         Par acte du 25 novembre 2020, complété le 7 décembre 2020, M. A______, sous la plume de son conseil, a recouru contre la décision du 23 octobre 2020 auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant principalement à l'annulation de la décision du 23 octobre 2020 et à ce que la cause soit renvoyée auprès du DT afin qu'il statue dans le sens des considérants, à savoir qu'il prolonge le délai afin de déposer la demande de régularisation au 31 janvier 2021, qu'il confirme que l'ordre de remise en état sera suspendu le temps de l'instruction de ladite demande de régularisation et qu'il octroie un délai au 30 juin 2023 afin de procéder à la remise en état des constructions et installations ; le tout sous suite de frais et dépens.

Le délai de six mois imparti pour la remise en état était arbitraire et totalement inexigible au vu de l'ampleur et du coût important des travaux, ainsi que de la situation personnelle du recourant. A cet égard, le recourant a fait état d'un revenu mensuel net moyen de CHF 13'421.- par mois pour un solde disponible, après prise en charge des charges de sa famille, de CH 1'269.-. Il produirait par-devant le tribunal le devis estimatif des coûts de remise en état.

L'ordre de remise en état portant sur le point A était arbitraire en tant qu'il n'était pas clair, s'agissant de la nature et de l'étendue des bâtiments autorisés à l'origine sur la parcelle n° 1______. Par sa décision du 6 février 2007, le département avait montré qu'il avait connaissance des travaux entrepris sur les bâtiments d'origine et qu'il les avait acceptés. Le recourant concluait, s'agissant du point A, qu'il soit condamné à remettre en état les deux bâtiments précités tels qu'ils figuraient, ce jour, au cadastre sur la parcelle n° 1______, à savoir une surface 29 m2 pour le bâtiment n° 788 et de 21 m2 pour le bâtiment n° 815, étant précisé que le sous-sol pourrait être conservé vu l'écoulement de la prescription trentenaire.

17.         Dans ses observations du 18 février 2021, le DT a conclu au rejet du recours.

Hormis le fait que le recourant – contrairement à ce qu'il affirmait – était tout à fait conscient du fait que les travaux mis en œuvre n'étaient pas conformes au droit, puisque l'autorisation qu'il avait sollicitée avait été rejetée par le TA en dernière instance, il devait également s'attendre à ce que l'autorité intimée, une fois informée de la situation, allait exiger de sa part une remise en état rapide des parcelles, sises en zone agricole. Le recourant indiquait par ailleurs lui-même qu'une grande partie des constructions érigées étaient démontables rapidement. Le délai imparti de six mois apparaissait par ailleurs tout à fait raisonnable pour que le recourant entreprenne les démarches utiles pour trouver rapidement un logement pour lui et sa famille, étant précisé qu'avant que la décision ne soit rendue, cela faisait plus de quatre mois que l'autorité intimée l'avait interpellé. Il disposait par ailleurs d'un solde disponible de plus de CHF 3'000.-, selon le calcul effectué par le DT, ce qui lui laisserait le temps et l'argent nécessaire pour entreprendre les travaux de remise en état, étant précisé qu'il avait démontré pouvoir en exécuter lui-même une partie.

Contrairement à ce qu'affirmait le recourant, le département n'avait eu connaissances des travaux entrepris sur les bâtiments d'origine que dans le cadre de la demande d'autorisation de construire de 2006. Quoiqu'il en était, le recourant ne pouvait se prévaloir de la bonne foi à cet égard dès lors que ceux-ci avaient été entièrement démolis pour faire place aux constructions actuelles, édifiées sans autorisation. Au vu du précédent refus à l'égard de cette demande autorisation de construire, le recourant ne pouvait pas ne pas savoir que ces constructions étaient illégales et qu'en agissant de la sorte, il allait en définitive mettre l'autorité intimée devant le fait accompli. L'intérêt public lésé, soit la préservation de la vocation agricole, était particulièrement important. Cela dit, il était vrai que dans le cadre des échanges que le département avait eu avec le recourant à la suite de la notification de la décision entreprise, il lui avait été confirmé qu'un retour à une situation antérieure, avec la reconstitution d'un chalet "week-end" et d'une remise proposant des dimensions, gabarits et affectations conformes au bâtiment d'origine, serait tolérée.

18.         Par réplique du 31 mars 2021, le recourant a relevé qu'il ne pouvait être exigé de lui qu'il prenne d'ores et déjà ses dispositions en été 2020 afin d'anticiper un éventuel ordre de démolition, avant la notification de la décision officielle du département. Depuis le dernier échange d'écritures, il avait procédé à des appels d'offre et invité plusieurs entreprises à soumissionner. Selon le devis estimatif de l'entreprise générale Vila Nova du 5 mars 2021, soit la proposition la plus économique, les travaux nécessaires afin de respecter la décision querellée, exception faite des constructions et installations régularisables, représenteraient un coût de près de CHF 400'000.-. De toute évidence, le recourant ne disposait pas d'une somme aussi importante. Il était ainsi évident qu'il ne pourrait pas engager l'entreprise afin de procéder aux travaux nécessaires, dès lors que ceci était financièrement inexécutable, ce qu'il impliquait qu'il devrait entreprendre personnellement les mesures requises de sa part. Il avait par ailleurs déposé la demande d'autorisation de construire le 30 mars 2021 portant sur la régularisation des éléments susceptibles d'être mis en conformité. Dans la mesure où il travaillait toute la semaine, subvenant seul aux besoins de sa famille, il ne lui restait que le week-end pour procéder aux travaux de remise en état et pouvait difficilement obtenir l'aide de ses amis, vivant tous en France, en pleine période de pandémie du Covid-19. Preuve de l'arbitraire de la durée de six mois fixée par l'autorité intimée était le fait que depuis la notification de la décision querellée, ce délai était bientôt écoulé et que les premiers coups de pioche pour la démolition des installations venaient à peine de sonner.

19.         Dans sa duplique 27 avril 2021, le DT a relevé que le recourant savait que les travaux qu'il avait entrepris étaient illégaux au vu de l'arrêt du TA rendu en 2008. Sachant que plus de sept mois s'étaient écoulés depuis que l'ordre de remise en état lui avait été signifié, il ne pouvait que s'étonner du peu de démarches entreprises par le recourant, la demande d'autorisation de construire n'ayant notamment toujours pas été déposée. Le montant de CHF 400'000.- devisé était clairement disproportionné, étant précisé qu'il ressortait du devis produit par le recourant qu'un certain nombre de travaux prévus visaient à offrir aux bâtiments un confort allant bien au-delà de ce qui pouvait être attendu d'un chalet "week-end", voire éventuellement d'une remise agricole.

20.         Par écriture spontanée du 5 mai 2021, le recourant a contesté le fait que sa demande d'autorisation de construire élaborée n'aurait pas été déposée, preuve en était la quittance de dépôt du 30 mars 2021 produite en annexe.

21.         Le 2 septembre 2021, le tribunal a tenu une audience de comparution personnelle des parties. Le recourant a produit, conformément à la demande du tribunal, des photographies montrant l'avancée actuelle des travaux de remise en état ainsi que des justificatifs des recherches de solutions de relogement. S'agissant de la remise en état, le recourant a exposé que les parties annexes (piscine, palissade, couvert) avaient été enlevées. La cuisine d'été était en cours d'enlèvement, et seul l'intérieur du chalet n'avait pas encore été touché vu qu'il y vivait avec sa famille. Ils n'avaient pas encore retrouvé de logement car le marché était difficile. Sur demande du tribunal, il a indiqué être employé de banque et que sa femme ne travaillait pas. Il avait d'abord autant cherché à acheter qu'à louer mais la charge serait moins importante à l'achat et il faudrait qu'il utilise une partie de son deuxième pilier.

Le conseil du recourant a produit la décision de refus du DT du 20 juillet 2021 concernant la régularisation de l'atelier, du couvert et de la tente et a exposé que vu cette décision, les coûts de remise en état seraient plus élevés. Leur souhait était de revenir à la situation de 2007 où, si certes une décision de refus d'autorisation de construire avait été rendue, aucun ordre de remise en état n'avait été prononcé alors qu'un inspecteur était venu sur place. Or la décision querellée parlait d'évacuation totale. De leurs discussions postérieures avec le DT, il en était ressorti qu'il fallait revenir à la situation de 2007. Le représentant du DT a indiqué pour sa part que malgré les décisions de refus dont M. A______ avait fait l'objet, il était encore allé plus loin en effectuant de nouveaux travaux. Ce n'était pas parce que le DT n'avait pas ordonné la remise en l'état à l'époque qu'aujourd'hui, on pouvait revenir à la situation de 2007. Enfin, sur demande du tribunal, le conseil du recourant a confirmé que la conclusion du recours tendant à la prolongation du délai pour déposer la demande de régularisation paraissait sans objet.

Au terme de l'audience, le tribunal a imparti aux parties un délai au 1er octobre 2021 pour déposer leurs éventuelles déterminations sur cette audience, ensuite de quoi la cause serait gardée à juger.

22.         Le DT a indiqué, par courrier du 28 septembre 2021, persister dans ses écritures et conclusions.

23.         Le 1er octobre 2021, le recourant a quant à lui pris des « conclusions précisées » concluant principalement à l'annulation de la décision du 23 octobre 2020 et à ce que la cause soit renvoyée auprès du DT afin qu'il statue dans le sens des considérants, à savoir qu'il confirme que l'ordre de remise en état sera suspendu le temps de l'instruction de la procédure C/5______ [recte : A/5______] concernant la demande de régularisation, qu'il octroie un délai au 30 juin 2023 afin de procéder à la remise en état des constructions et installations, et qu'il ordonne la remise en état s'agissant du logement familial (point A) dans le sens des considérants, c'est-à-dire à la lumière de sa pièce 20 ; le tout sous suite de frais et dépens.

Préalablement à la décision de refus d'autorisation de construire du 6 février 2007, il existait sur la parcelle du recourant deux bâtiments, tels que figurés sur les plans du 7 juin 2006 produits sous pièce 20. Il résultait des pièces que le département avait, depuis juin 2006 à tout le moins, une bonne connaissance de l'état existant des bâtiments à cette époque et que, hormis le refus de demande d'autorisation de construire, il n'avait pas pris de mesures particulières visant à s'opposer à cet état existant, témoignant ainsi d'une certaine tolérance, voire d'acceptation, à cet égard. Dans le cadre de la présente procédure, une incertitude régnait au sujet de la portée de l'ordre de remise en état en ce qu'il concernait le bâtiment principal constituant le logement familial de la famille A______. Dès lors, suite à l'audience du 2 septembre 2021, les parties avaient convenu d'organiser une séance sur place afin que le département bénéficie d'une vision plus concrète de la situation des bâtiments et tenter de déterminer plus précisément l'étendue la remise en état exigée. Cette séance avait eu lieu le 24 septembre suivant, et le département s'était montré emprunté car il avait déclaré avoir perdu les plans relatifs à la DD 4______ à laquelle il faisait référence dans ses écritures et qui servaient apparemment de fondement à l'ordre de remise en état.

Sous l'angle de la proportionnalité, si la décision de refus de mise en conformité du 20 juillet 2021 était confirmée, un recours ayant été formé à son encontre (procédure C/5______ [recte : A/5______]), elle aurait une incidence importante pour le recourant en termes financiers puisqu'elle impliquerait une augmentation des coûts de remise en état. Il confirmait ainsi sa position consistant à affirmer que la remise en état ne pouvait être requise dans le délai imparti par le département et qu'un délai au 30 juin 2023 était nécessaire.

Le recourant ne pouvait accepter, et le tribunal ne le devrait pas non plus, que le département soutienne raisonnablement que la remise en état puisse intervenir à l'aune d'un plan - daté du 6 juillet 1976 - illisible et imprécis. On ne pouvait non plus requérir la remise en état des bâtiments sur la parcelle du recourant en se fondant sur un permis de construire dont les plans n'existent plus. C'était la raison pour laquelle le recourant requérait que la remise en état soit ordonnée conformément à une situation précise, à savoir l'existante tel qu'il résultait des plans du 7 juin 2006.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             La zone agricole est régie par les art. 16 et 16a LAT, ainsi que par les art. 20 ss de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30). Ces dispositions définissent notamment les constructions qui sont conformes à la zone, soit qu’elles sont nécessaires à l’exploitation agricole, soit qu’elles servent au développement d’une activité conforme. Selon l'art. 16 al. 1 LAT, les zones agricoles servent à garantir la base d’approvisionnement du pays à long terme, à sauvegarder le paysage et les espaces de délassement et à assurer l’équilibre écologique; elles devraient être maintenues autant que possible libres de toute construction en raison des différentes fonctions de la zone agricole et comprennent: les terrains qui se prêtent à l’exploitation agricole ou à l’horticulture productrice et sont nécessaires à l’accomplissement des différentes tâches dévolues à l’agriculture (let. a) et les terrains qui, dans l’intérêt général, doivent être exploités par l’agriculture (let. b).

En principe, seules les constructions dont la destination correspond à la vocation agricole du sol peuvent y être autorisées, le sol devant être le facteur de production primaire et indispensable (ATF 125 II 278 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 1C_27/2008 du 25 juin 2008 consid. 2.1 et les références citées ; ATA/8/2009 du 13 janvier 2009).

Que l'on se situe dans une zone à bâtir ou dans une zone impropre à la construction, telle qu'une zone agricole, l'art. 22 al. 1 LAT exige qu'une autorisation de construire soit délivrée par l'autorité compétente pour la création ou la transformation de toute construction ou installation (Frédéric BERNARD/Florian EGGER, Changement d'affectation d'un bâtiment et autorisation administrative, AJP/PJA 1/2021, p. 52). Il y a notamment transformation au sens de l'art. 22 LAT même lorsque sans modifier son aspect extérieur, on procède au changement d'affectation d'une construction ou d'une installation (ATF 139 II 134 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C:150/2016 du 20 septembre 2016 consid. 9.1).

4.             Selon l'art. 1 al. 1 LCI, sur tout le territoire du canton nul ne peut, sans y avoir été autorisé, élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail (let. a) ; modifier même partiellement le volume, l'architecture, la couleur, l'implantation, la distribution ou la destination d'une construction ou d'une installation (let. b) ; modifier la configuration du terrain (let. d) ; aménager des voies de circulation, des places de parcage ou une issue sur la voir publique (let. e).

Aucun travail ne doit être entrepris avant que l'autorisation n'ait été délivrée (art. 1 al. 7 1ère phrase LCI).

5.             En l’espèce, il n’est pas contesté que les installations litigieuses ne sont pas destinées à l'agriculture – le recourant n'étant par ailleurs pas agriculteur –, de sorte qu'elles ne peuvent pas être considérées comme conformes à la zone agricole en vertu des dispositions précitées. Aucune dérogation des art. 24 ss LAT ne s'applique en l'espèce, de sorte que les constructions litigieuses citées sous points A à H dans la décision querellée ne sont pas autorisables en zone agricole, ce qui n'est en soit pas contesté non plus.

Seul doit être examiné si c'est à bon droit que l'autorité intimée a prononcé l'ordre de remise en état du terrain naturel et la suppression et l'évacuation des installations érigées illégalement.

6.             Lorsque l'état d'une construction, d'une installation ou d'une autre chose n'est pas conforme aux prescriptions de la LCI, des règlements qu'elle prévoit ou des autorisations délivrées en application de ces dispositions légales ou réglementaires, le département peut notamment en ordonner la remise en état, la réparation, la modification, la suppression ou la démolition (art. 129 let. e et 130 LCI). Les propriétaires ou leurs mandataires, les entrepreneurs et les usagers sont tenus de se conformer aux mesures ordonnées par le département en application des art. 129 et 130 LCI (art. 131 LCI). Le département notifie aux intéressés, par lettre recommandée, les mesures qu'il ordonne. Il fixe un délai pour leur exécution, à moins qu'il n'invoque l'urgence (art. 132 al. 1 LCI).

7.             De jurisprudence constante, pour être valable, un ordre de mise en conformité doit respecter les conditions cumulatives suivantes :

- l'ordre doit être dirigé contre le perturbateur ;

- les installations en cause ne doivent pas avoir été autorisées en vertu du droit en vigueur au moment de leur réalisation ;

- un délai de plus de trente ans ne doit pas s'être écoulé depuis l'exécution des travaux litigieux pour la zone à bâtir ; la situation diffère hors de la zone à bâtir, puisque depuis avril 2021, le Tribunal fédéral a renoncé à appliquer aux constructions illégales situées en zone agricole le délai de péremption de trente ans, à l’échéance duquel l’État ne peut plus exiger la démolition d’une installation pour rétablir une situation conforme au droit (arrêt 1C_469/2019 du 28 avril 2021, publié sous ATF 147 II 309) ;

- l'autorité ne doit pas avoir créé chez l'administré concerné, que ce soit par des promesses, par des infractions, des assurances ou encore un comportement des conditions telles qu'elle serait liée par la bonne foi ;

- l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit doit l'emporter sur l'intérêt privé de l'intéressé au maintien des installations litigieuses (ATA/1030/2018 du 2 octobre 2018 consid. 6c ; ATA/1411/2017 du 17 octobre 2017 consid. 4a et les références citées).

8.             Dans l'arrêt récent 147 II 309 précité, le Tribunal fédéral a précisé qu'à l'inverse de ce qui prévaut pour les zones à bâtir, l'obligation de rétablir un état conforme au droit ne s'éteignait pas après trente ans s'agissant de bâtiments et installations érigés illégalement en dehors de la zone à bâtir (consid. 4 et 5). En particulier, s'il peut certes être tenu compte de situations exceptionnelles par le biais de solutions spécifiques, notamment par la fixation d'un délai de remise en état plus long, une utilisation illégale, qui contrevient au principe fondamental en matière d'aménagement du territoire de la séparation des zones à bâtir des zones non constructibles, ne doit pas se poursuivre indéfiniment sur la base du simple écoulement du temps (arrêts 1C_60/2021 du 27 juillet 2021 consid. 3.2.1 ; ATF 147 II 309 précité consid. 5.5 et 5.6).

La passivité de l'autorité qui n'intervient pas immédiatement à l'encontre d'une construction non autorisée n'est en règle générale pas constitutive d'une autorisation tacite ou d'une renonciation à faire respecter les dispositions transgressées. La tolérance des autorités n'est retenue que dans des circonstances exceptionnelles. Seul le fait que l'autorité aurait sciemment laissé le propriétaire construire de bonne foi l'ouvrage non réglementaire pourrait obliger cette autorité à tolérer ensuite l'ouvrage en question (ATA/700/2014 du 2 septembre 2014 consid. 4c).

9.             En l'espèce, les quatre premières conditions nécessaires à la validité d'un ordre de mise en conformité sont réalisées. Le recourant, qui a lui-même fait procéder aux travaux litigieux et qui est actuellement propriétaire des parcelles sur lesquelles ils ont été réalisés, admet par ailleurs qu'ils n'ont pas été autorisés au moment de leur exécution. Il ne soulève par ailleurs pas – à juste titre – la prescription trentenaire au vu la jurisprudence récente du Tribunal fédéral précitée, devenu la nouvelle pratique (cf. arrêt 1C_60/2021 précité), dès lors qu'un changement d'affectation illégal d'une construction ou d'une installation sise en zone agricole ne saurait se voir appliquer le délai de péremption de trente ans à l'échéance duquel l'Etat ne peut plus exiger le rétablissement de la situation conforme au droit. Il en va du respect du principe cardinal de stricte séparation entre la zone à bâtir et non à bâtir. La troisième condition est donc également remplie.

S'agissant de la quatrième condition, on ne voit pas comment le recourant peut tirer avantage du principe de la bonne foi. Aucun élément du dossier ne laisse en effet apparaitre que l'autorité intimée aurait d'une quelconque manière créé chez le recourant, par des promesses, des informations, des assurances ou un comportement, des conditions telles qu'elle serait liée par le principe de la bonne foi et n'a à aucun moment montré par son comportement qu'elle tolérait cette situation illégale. Au contraire, le département a expressément refusé les travaux de changement d'affectation en habitation principale en 2007 – décision de refus devenue définitive suite à l'arrêt du TA –, et comme le département le relève à juste titre, le recourant l'a mis devant le fait accompli en procédant tout de même à des travaux sans autorisation. De toute manière, les travaux qui avaient été constatés en 2009 ont été dans l'intervalle démolis par le recourant – également sans autorisation – pour faire place aux travaux, bien plus conséquents, constatés par le département en août 2020.

10.         Ne reste qu'à déterminer si l'intérêt privé du recourant l'emporte sur l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit.

11.         Le principe de la proportionnalité, garanti par les art. 5 al. 2 et 36 al. 3 Cst., exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive. En outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 126 I 219 consid. 2c et les références citées). Les critères de l'aptitude et de la subsidiarité sont particulièrement concernés lorsqu'un ordre de démolition est envisagé. Ils impliquent en effet de déterminer si une – ou plusieurs – autre mesure administrative pourrait être préférée, cas échéant en combinaison (ATA/463/2021 du 27 avril 2021).

Lorsque des constructions ou des installations illicites sont réalisées en dehors de la zone à bâtir, le droit fédéral exige en principe que soit rétabli un état conforme au droit. Le principe de la séparation de l'espace bâti et non bâti, qui préserve différents intérêts publics, est de rang constitutionnel ; il fait partie intégrante de la notion d'utilisation mesurée du sol de l'art. 75 al. 1 Cst. (cf. Message du Conseil fédéral du 20 janvier 2010 relatif à une révision partielle de la LAT, FF 2010 964 ch. 1.2.1, et 973 ch. 2.1 ; arrêts 1C_60/2021 du 27 juillet 2021 consid. 3.1 ; ATF 147 II 309 consid. 5.5.). Cette séparation doit par conséquent, en dehors des exceptions prévues la loi, demeurer d'application stricte (ATF 132 II 21 consid. 6.4). S'ajoute à cela que la remise en état poursuit encore d'autres intérêts publics, à savoir la limitation du nombre et dimensions des constructions en zone agricole ainsi que le respect du principe de l'égalité devant la loi (ATF 132 II 21 consid. 6.4 ; arrêts 1C_60/2021 précité consid. 3.1; 1C_76/2019 du 28 février 2020 consid. 7.1 et les références citées).

12.         La proportionnalité au sens étroit implique une pesée des intérêts. C'est à ce titre que l'autorité renonce à ordonner la remise en conformité si les dérogations à la règle sont mineures, si l'intérêt public lésé n'est pas de nature à justifier le dommage que la démolition causerait au maître de l'ouvrage, si celui-ci pouvait de bonne foi se croire autorisé à construire ou encore s'il y a des chances sérieuses de faire reconnaître la construction comme conforme au droit qui aurait changé dans l'intervalle (...). Le postulat selon lequel le respect du principe de la proportionnalité s'impose même envers un administré de mauvaise foi est relativisé, voire annihilé, par l'idée que le constructeur qui place l'autorité devant le fait accompli doit s'attendre à ce que cette dernière se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que des inconvénients qui en découlent pour lui (arrêt 1C_60/2021 précité consid. 3.1 ; ATF 123 II 248 consid. 4a; Nicolas WISARD/Samuel BRÜCKNER/Milena PIREK, op. cit, p. 218).

De manière générale dans l'examen de la proportionnalité, les intérêts des propriétaires sont, à juste titre, mis en retrait par rapport à l'importance de préserver la zone agricole d'installations qui n'y ont pas leur place. Le Tribunal fédéral a déjà énoncé concernant le canton de Genève, que « s'agissant de constructions édifiées dans la zone agricole dans un canton déjà fortement urbanisé où les problèmes relatifs à l'aménagement du territoire revêtent une importance particulière, l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit l'emporte sur celui, privé, du recourant à l'exploitation de son entreprise sur le site litigieux » (arrêt du Tribunal fédéral 1C_446/2010 du 18 avril 2011, consid. 5.1.1 et les références citées ; ATA/1370/2018 du 18 décembre 2018 consid. 10 ; ATA/303/2016 du 12 avril 2016 consid. 9).

Sous l'angle de la proportionnalité, on peut prendre en compte le fait que les frais de démolition et de remise en état des lieux engendreraient des charges excessives que l'intéressé ne serait pas en mesure de prendre en charge (arrêts du Tribunal fédéral 1C_370/2015 du 16 février 2016 consid. 4.4 ; 1C_537/2011 du 26 avril 2012). Néanmoins, un intérêt purement économique ne saurait avoir le pas sur l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit (arrêt du Tribunal fédéral 1C_544/2014 du 1er avril 2015 consid. 4.2). Donner de l'importance aux frais dans la pesée des intérêts impliquerait de protéger davantage les graves violations et mènerait à une forte et inadmissible relativisation du droit de la construction. C'est pourquoi il n'est habituellement pas accordé de poids particulier à l'aspect financier de la remise en état (Vincent JOBIN, Construire sans autorisation - Analyse des arrêts du Tribunal fédéral de 2010 à 2016, VLP-ASPAN, Février 1/2018, p. 16 et les références citées).

13.         Il ressort de ce qui précède que l'intérêt public au maintien de la zone agricole à Genève est considérable et, par principe, prime sur celui des particuliers. S'agissant de la situation financière du recourant, à l'instar de l'autorité intimée, le tribunal retient qu'elle n'apparait pas aussi obérée qu'il veut l'affirmer puisque son revenu mensuel net moyen s'élève à CHF 13'421.- et qu'il a eu les moyens de construire – comme cela ressort des photographies figurant au dossier du DT – un logement confortable et spacieux pour lui et sa famille, avec véranda, terrasse comprenant une cuisine d'été, avec piscine extérieure semi-enterrée, et que le recourant a au demeurant démontré pouvoir exécuter lui-même une bonne partie des travaux de remise en état.

S'agissant du seul devis produit à la procédure par le recourant, d'un montant de CHF 400'000.-, le tribunal de céans constate qu'il est non seulement imprécis, car ne détaillant pas les postes et ne donnant que des prix en bloc (non au m2), mais, surtout, manifestement excessif. En effet, si on ramenait le montant devisé aux m2 de la surface de la construction qui pourrait être autorisée, on parviendrait à un prix d'à tout le moins CHF 10'000.-/m2 ; ce devis vise par ailleurs à offrir aux bâtiments un confort allant bien au-delà de ce qui peut être attendu d'un chalet week-end.

En ce qui concerne les coûts de la remise en état, il ne saurait de toute manière en tirer grief au vu de son comportement, le recourant n'ayant cessé de réaliser des travaux sans autorisation, et faisant par ailleurs fi des décisions, tant de l'autorité intimée que des juridictions qu'il a saisies. Le recourant était en effet tout à fait conscient que les travaux qu'il a effectués n'étaient pas conformes au droit. En juin 2003, le recourant avait déjà demandé l'autorisation pour la reconstruction d'une habitation et dépendance, refusée par le DCTI au motif que le projet ne pourrait pas être autorisé en raison des dimensions des agrandissements demandés. Il a tout de même réalisé des travaux d'agrandissement sans droit, constatés par le département dans le cadre de la procédure d'autorisation de construire sollicitée le 24 juin 2006. Par décision du 6 février 2007, après plusieurs réunions avec le recourant et son mandataire, le département a refusé de délivrer l'autorisation de construire portant sur un changement complet d'affectation, soit une habitation temporaire et d'une dépendance en habitation principale, leur transformation et leur réunion. Cette décision de refus a clairement signifié au recourant qu'en zone agricole, il ne lui était pas possible de venir édifier un bâtiment devant servir à son habitation principale, décision devenue exécutoire suite à l'arrêt du TA de 2008 qui a rappelé que le chalet « week-end » érigé sur ces parcelles avait pour seul but de passer des moments de détentes. Lors de son audition devant le TA, le recourant avait d'ailleurs certifié que contrairement aux allégués du DCTI, ils ne voulaient pas y habiter de manière permanente. Il devait donc également s'attendre à ce que le département, une fois informé de la situation, exige de sa part la remise en état des parcelles, qui sont situées en zone agricole. Or malgré l'arrêt du TA, le recourant a procédé, en 2009, à la démolition du chalet « week-end », ce sans autorisation, et a réitéré son comportement depuis lors en procédant sciemment à de nouveaux travaux de construction conséquent non autorisés - et qu'il savait non autorisables au vu des décisions rendues précédemment par les autorités et juridictions -, d'un bâtiment principal servant de logement, d'une véranda, d'une cuisine d'été ouverte et d'une piscine semi-enterrée. Le tribunal de céans ne peut donc faire droit à la demande du recourant de revenir à la situation telle qu'elle résulterait des plans du 7 juin 2006, non autorisés, au risque de cautionner le maintien d'une situation illicite réalisée en l'absence de considération des dispositions légales en vigueur et des décisions des autorités et des juridictions.

Cette solution se justifie d'autant plus du fait que ce comportement est gravement contraire aux intérêts publics protégés par la loi. Au surplus, il sera rappelé au recourant que celui qui place l'autorité devant le fait accompli doit s'attendre à ce qu'elle se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que des inconvénients pouvant en découler pour lui. Donner de l'importance aux frais dans la pesée des intérêts impliquerait de protéger davantage les graves violations et mènerait à une forte et inadmissible relativisation du droit de la construction. C'est pourquoi il n'est habituellement pas accordé de poids particulier à l'aspect financier de la remise en état (Vincent JOBIN, Construire sans autorisation - Analyse des arrêts du Tribunal fédéral de 2010 à 2016, VLP-ASPAN, Février 1/2018, p. 16 et les références citées).

Par ailleurs, le recourant a bénéficié pendant de nombreuses années des installations non autorisées, alors que celles-ci n'auraient jamais dû être réalisées à cet endroit (cf. arrêt 1C_60/2020 précité consid. 3.4.2). L'approche restrictive du Tribunal fédéral quant au principe de séparation entre l'espace bâti et l'espace non bâti qui devait demeurer d'application stricte a encore été confirmée dans l'ATF 147 II 309 précité qui écarte l'application de la prescription trentenaire en zone agricole.

Au vu de ce qui précède, il n'existe aucune mesure moins incisive qu'une remise en état pour rétablir une situation conforme au droit et l'intérêt public au respect de la zone agricole dans le canton de Genève et a fortiori, au respect des zones protégées, doit l'emporter sur l'intérêt privé du recourant de continuer à profiter des aménagements litigieux. L'ordre de remise en état apparaît ainsi constituer une mesure adéquate et apte à atteindre le but visé et est ainsi conforme au principe de la proportionnalité. La cinquième et dernière condition est donc également remplie.

14.         Le délai de six mois fixé par l'autorité intimée est par ailleurs tout à fait raisonnable et une prolongation du délai de remise en conformité ne pourrait en l'espèce de toute manière pas être admise, car cette exception n'est applicable, à teneur du récent arrêt du Tribunal fédéral cité plus haut, que si l’intéressé a agi de bonne foi, ce qui en l’espèce n’est pas le cas. Quoi qu'il en soit, bien que ce délai a été de fait prolongé aujourd'hui – en raison de la présente procédure initiée par le recourant – à dix-sept mois, le tribunal constate l’absence de mesures concrètes prises par le recourant.

Le grief tiré de l'inexigibilité de la remise en état dans le délai imparti tombe donc à faux.

15.         Enfin, l'ordre de remise en état s'agissant du bâtiment comprenant le logement familial est on ne peut plus clair, la décision querellée indiquant qu'il s'agit de sa suppression et de son évacuation. Le DT, suite aux discussions avec le recourant et son conseil, a indiqué être prêt à revenir à la dernière situation autorisée au père du recourant en 1976, soit un chalet « week-end » et d'une remise proposant des dimensions, gabarits et affectations conformes aux bâtiments d'origine, soit les constructions réalisées sur la base d'autorisations de construire délivrées. Encore dans sa réponse du 24 novembre 2020 au conseil du recourant, le DT a ordonné que les deux petits bâtiments retrouvent leurs dimensions, gabarits et affectations conformément à leur état avant ladite transformation. Ceci a encore été à toutes fins utiles précisé par le représentant du DT à l'audience de comparution personnelle qui avait été demandée par le recourant aux fins, notamment, de clarification. Pour rappel, seules ont été autorisées l'édification d'un chalet « week-end » d'une surface de 21 m3 sur la parcelle n° 1______ précitée (DD 3______), dossier produit à la procédure, ainsi que la construction d'une remise agricole pour petites machines et outils de jardin, d'une surface de 3 m sur 6.50 m sur les parcelles n° 1______ et 2______. Le recourant ne peut faire valoir de bonne foi, comme il le fait, qu'il ne saurait revenir à cette situation alors que c'est lui qui a réalisé tous les travaux subséquents, ce sans droit.

Il ressort de ce qui précède que le grief d'arbitraire quant à la nature de l'ordre de remise en état s'agissant du logement familial sera également écarté.

16.         Entièrement mal fondé, le recours est rejeté et la décision confirmée.

17.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 1'500.- ; il est partiellement couvert par l’avance de frais de CHF 900.- versée à la suite du dépôt du recours.

Vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 25 novembre 2020 par Monsieur A______ contre la décision du département du territoire du 23 octobre 2020 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant, un émolument de CHF 1'500.-, lequel est partiellement couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Michèle PERNET, présidente, Bénédicte MONTANT et Aurèle MÜLLER, juges assesseurs

Au nom du Tribunal :

La présidente

Michèle PERNET

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière