Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/341/2016

ATA/901/2016 du 25.10.2016 ( PROF ) , REJETE

Recours TF déposé le 02.12.2016, rendu le 08.05.2018, REJETE, 2C_393/2016, 2C_1098/2016
Descripteurs : AVOCAT ; AUTORITÉ DE SURVEILLANCE ; AUTORISATION D'EXERCER ; INSCRIPTION ; REGISTRE PUBLIC ; SOCIÉTÉ ANONYME ; QUALITÉ POUR RECOURIR ; INDÉPENDANCE DE L'AVOCAT ; SAUVEGARDE DU SECRET ; SECRET PROFESSIONNEL ; LIBERTÉ ÉCONOMIQUE ; PESÉE DES INTÉRÊTS ; LOI FÉDÉRALE SUR LE MARCHÉ INTÉRIEUR
Normes : LPA.60.al1; LLCA.6.letc; LLCA.8.al1.letd; LLCA.12.letb; LLCA.12.letc; LLCA.13.al1; LPAv.12.al1; Code suisse de déontologie FSA.15; Cst.27.al2; CO.319ss; LMI.2.al4; LMI.3; Cst.36.al3
Résumé : Recours de deux associés d'une Étude d'avocats contre une décision de la commission du barreau leur refusant l'agrément pour l'exercice de la profession d'avocat, sous la forme d'une société d'avocats, alors que l'un des associés n'est pas titulaire du brevet d'avocat suisse ou étranger. Dans la mesure où la convention d'actionnaires et les statuts de la société anonyme octroient à l'associé non avocat le droit d'obtenir des informations sur toutes les affaires de la société couvertes par le secret professionnel de l'avocat, le principe de l'indépendance et le respect du secret professionnel de l'avocat ne sont pas garantis. En considérant que la société de capitaux devait être contrôlée par des avocats inscrits, la commission n'a pas imposé une restriction disproportionnée. La condition imposée est apte à assurer l'indépendance et le respect du secret professionnel de l'avocat. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/341/2016-PROF ATA/901/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 25 octobre 2016

1ère section

 

dans la cause

 

Mme A______

et

M. B______

contre

COMMISSION DU BARREAU



EN FAIT

1. Le 3 juin 2015, Mme A______ et M. B______, avocats inscrits au barreau genevois, ont sollicité de la commission du barreau (ci-après : la commission) l’agrément pour l’exercice de la profession d’avocat sous la forme d’une société de capitaux sous la raison sociale C______ SA, ce pour l’ensemble des – actuels et futurs – avocats et avocats-stagiaires exerçant en qualité d’indépendants, respectivement employés au sein du bureau genevois de l’Étude C______ (ci-après : l’Étude) – laquelle avait aussi des bureaux à Zurich (Suisse) et Doha (Qatar) – et inscrits au registre cantonal.

L’attention de la commission était par ailleurs attirée sur le fait que l’un des dix-huit associés de l’Étude, M. D______, n’était pas titulaire d’un brevet d’avocat suisse ou étranger. Celui-ci était un spécialiste mondialement reconnu en arbitrage international, plus particulièrement concernant les litiges d’investissements ; il conseillait et représentait des parties en justice dans ces domaines et était l’auteur de nombreuses publications.

Mme A______ et M. B______, associés au sein de l’Étude, sollicitaient de la commission, dans la mesure où telle ne serait pas déjà la nouvelle pratique de celle-ci, un infléchissement de la règle genevoise interdisant strictement l’actionnariat d’une société d’avocats à toute personne non titulaire d’un brevet d’avocat suisse ou étranger jugé équivalent. Ils précisaient, à toutes fins utiles, que M. D______ n’exerçait aucun mandat d’administrateur de sociétés (hors nouvellement le cas de C______ SA), ni d’intermédiation financière à quelque titre que ce soit, l’éventuel agrément le concernant pouvant au demeurant être expressément soumis à l’abstention de toute activité d’intermédiaire financier et/ou d’administrateur de société, domaines pouvant être considérés à risque sous l’angle de la protection du secret professionnel de l’avocat.

Étaient notamment joints à leur demande leur requête du 10 avril 2015 à l'autorité de surveillance des avocats du canton de Zurich pour l'agrément de la profession d'avocat sous la forme d'une société de capitaux et ses annexes, soit un projet de statuts de C______ SA, un projet de convention d’actionnaires, un projet de règlement d’organisation, un projet de modèle de contrat de travail pour associé, ainsi qu'une lettre complémentaire de l’Étude du 4 mai 2015 à l'autorité de surveillance des avocats du canton de Zurich confirmant que les membres du comité de direction de l’Étude seraient exclusivement des avocats inscrits au registre cantonal, une décision de ladite autorité du 7 mai 2015 constatant la satisfaction des conditions légales pour l'exercice de la profession d'avocat sous la forme d'une société de capitaux, de même qu'une publication de la Feuille officielle suisse du commerce (ci-après : FOSC) du 26 mai 2015 attestant de la transformation de C______ Sàrl (recte : société en nom collectif) constituée le 21 avril 2015 à Zurich en C______ SA, avec siège à Zurich.

Il ressortait des statuts de C______ SA que le conseil d'administration était composé d'un ou de plusieurs membres qui devaient être actionnaires et majoritairement des avocats inscrits à un registre des avocats en Suisse (§ 10 des statuts). Chaque membre du conseil d'administration pouvait exiger des informations sur toutes les affaires de la société. Lors des séances, tous les membres du conseil d'administration ainsi que les personnes chargées de la gestion étaient tenus de fournir ces renseignements (§ 12 des statuts). Selon le chiffre 2 de la convention d'actionnaires, au moins trois quart des associés devaient être des avocats inscrits à un registre des avocats en Suisse. Chaque associé avait droit à une voix pour ce qui concernait les affaires de la société. Les associés avaient, à propos de la SA, les mêmes droits d'information et de consultation que les membres du conseil d'administration de la SA. Ils s'engageaient à respecter le secret professionnel qui incombait aux avocats inscrits à un registre des avocats suisse, même s'ils n’étaient pas eux-mêmes inscrits en tant qu'avocats. Enfin, selon le chiffre 6 de la convention d'actionnaires, la personne responsable des mandats confiés à un avocat ne pouvait être qu'une personne inscrite à un registre des avocats suisse. Les personnes qui n’étaient pas inscrites à un registre des avocats suisse ne disposaient pas du pouvoir d'instruction dans le cadre des mandats confiés à un avocat.

2. Le 9 juin 2015, Mme A______ et M. B______ ont remis à la commission une décision du 4 juin 2015 de l’autorité de surveillance des avocats du canton de Zurich précisant que C______ SA remplissait les conditions relatives à la surveillance des avocats et indiquant que les inscriptions au registre des avocats du canton de Zurich des requérants de même que des autres avocats actifs mentionnés dans la liste présentée étaient adaptées au regard de cette étude d’avocats.

3. Par décision du 14 décembre 2015, la commission a rejeté la demande d’agrément déposée par Mme A______ et M. B______ en vue du maintien des inscriptions au registre cantonal des avocats exerçant au sein du bureau genevois de l’Étude après création d’une société anonyme.

Face à l’absence d’une règlementation légale claire, la commission avait été amenée à revoir régulièrement les conditions d’exercice de l’activité au sein d’une société de capitaux. Si elle s’était référée jusqu’alors à une jurisprudence cantonale, l’examen des différentes requêtes avait toutefois mis en lumière un certain nombre de difficultés. Elle relevait ainsi que la présence à côté d’avocats inscrits à un registre d’avocats suisse de personnes tierces consacrait l’association multidisciplinaire et se heurtait à la loi qui interdisait aux avocats de s’associer avec d’autres personnes.

L’exercice de la profession d’avocat sous le couvert d’une personne morale ne pouvait pas être ouvert à des personnes non inscrites à un registre d’avocats suisse et seule une société dont le capital social était intégralement détenu en tout temps par des avocats inscrits dans un registre cantonal permettait le respect des principes cardinaux de l’indépendance et du secret professionnel.

En l’occurrence, il ressortait des statuts et de la convention d’actionnaires que trois quart des associés au moins devaient être des avocats inscrits à un registre des avocats en Suisse. Le cercle actuel des actionnaires comprenait un associé qui pratiquait au sein du cabinet genevois et qui n’était pas inscrit à un registre cantonal des avocats suisse. Dans ces conditions, l’organisation retenue pour l’exercice de la profession d’avocat inscrit au registre genevois sous le couvert de C______ SA ne permettait pas le respect des conditions légales.

4. Par acte expédié le 29 janvier 2016 au greffe de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), Mme A______ et M. B______ ont formé recours contre cette décision. Ils ont conclu préalablement à ce que la chambre administrative constate et dise l’effet suspensif du recours. Au fond, ils ont conclu principalement à l'admission du recours dans le sens de l’acceptation de la demande d’agrément déposée le 3 juin 2015 auprès de la commission en vue du maintien des inscriptions du registre cantonal des avocats et avocats-stagiaires exerçant au sein du bureau genevois de C______ SA après création d’une société anonyme, aux conditions fixées par les statuts, le règlement d’organisation, la convention d’actionnaires, ainsi que le contrat de travail pour associés de C______ SA soumis à la commission, et cela fait, à l'annulation de la décision querellée. Ils ont conclu subsidiairement à ce que la chambre administrative admette le recours, dans le sens de la demande d'agrément déposée le 3 juin 2015, sous la réserve d’une modification des statuts, de la convention d’actionnaires, du règlement d’organisation et du contrat de travail pour associés de C______ SA visant à assurer que tout mandat relevant du domaine monopolistique de l’avocat ou d’une activité couverte par le secret professionnel soit confié à un avocat inscrit à un registre cantonal et que toute personne qui l’assiste dans l’exécution de ce mandat soit considérée comme son auxiliaire, qu’elle soit ou non associée de l’Étude, que cette condition dise que les recourants, ainsi que les avocats et avocats-stagiaires exerçant au sein du bureau genevois de C______ SA, soient autorisés à demeurer inscrits au registre cantonal des avocats après modification du but statutaire de C______ SA de manière à inclure l’exercice de mandats d’arbitre, pratiqué de manière compatible avec les règles de la profession d’avocat, enfin fasse obligation à C______ SA de soumettre à la commission, pour agrément, toute modification ultérieure de la situation de fait concernant l’actionnariat de C______ SA sur laquelle reposerait l'arrêt de la chambre administrative, le tout « sous suite de frais et dépens ».

Il convenait d'accorder à l’Étude l'agrément pour l'exercice de la profession d'avocat sous la forme d'une société de capitaux dans le canton de Genève en vertu des principes de la liberté économique et de la libre circulation des avocats sur le territoire suisse. L'autorité de surveillance des avocats du canton de Zurich avait constaté que l'organisation de l’Étude C______ SA répondait aux critères requis s'agissant de la pratique de la profession d'avocat. C'était d'ailleurs ce qui lui avait permis d'inscrire au registre du canton de Zurich les avocats du bureau zurichois de C______ SA. Malgré cela, la commission avait prononcé une décision contraire. Sa décision aurait pour conséquence que les avocats inscrits à un registre cantonal d'un canton autorisant l'organisation d'une étude sous la forme d'une société anonyme comprenant un actionnaire non avocat pourraient venir plaider à Genève, alors que les avocats inscrits au registre cantonal genevois auraient pour choix soit de renoncer à toute organisation d'une société anonyme d'avocats sous cette forme, soit de rejoindre une étude organisée sous cette forme, mais domiciliée dans un autre canton. Une telle conséquence n'avait pas été voulue par le législateur fédéral. Elle introduirait des distorsions sur un marché intérieur que l'Assemblée fédérale avait précisément voulu unifier.

L'indépendance des avocats employés par l’Étude était garantie. Les garanties en termes d'indépendance étaient données de la même manière que si elles l’avaient été pour un ou plusieurs avocats inscrits au registre cantonal. L'agrément pour l'exercice de la profession d'avocat ne saurait lui être nié, au motif que son organisation ne respectait pas les conditions légales pour l'exercice de la profession d'avocat. Conformément à la loi, à la jurisprudence fédérale et à la doctrine, l'autorité de surveillance des avocats du canton de Zurich avait accordé à C______ SA son agrément pour l'exercice de la profession d'avocat et avait inscrit les avocats du bureau zurichois de ladite société au registre cantonal des avocats. Cette autorité s'était basée sur les statuts de la société, son règlement d'organisation, la convention d'actionnaire et le contrat de travail pour associé. Ces documents attestaient que C______ SA était bien « contrôlée » et « dominée » par des avocats inscrits, y compris en présence de M. D______ en tant qu'associé et actionnaire de la société. L'indépendance des avocats employés par la société s'avérait manifestement garantie de la même manière que s'ils étaient engagés uniquement par des avocats inscrits. La décision attaquée contrevenait aux principes de la jurisprudence fédérale auxquels précisément elle se référait. Les qualités de M. D______ n'avaient pas été examinées, concrètement, comme l'exigeait pourtant le Tribunal fédéral. Toute la carrière du précité avait été et restait au service du droit. En raison justement de la confiance qu'il avait suscité auprès de l'office fédéral de la justice, M. D______ avait été choisi par la direction du département fédéral de justice et police (ci-après : DFJP) pour conseiller et représenter la Suisse dans un litige hautement sensible. Un contrôle de sécurité élargi à son égard avait été pratiqué et aucune réserve n'en avait résulté. L'intérêt public ne pouvait être invoqué pour refuser l'agrément à l’Étude sous prétexte que M. D______ pourrait mettre en péril l'indépendance de la société par sa présence au sein des actionnaires. De plus, il était disproportionné de lui refuser l'autorisation d'exercer sa profession à titre d'indépendant, dans la mesure où M. D______ était aussi bien, voire mieux formé qu'un professionnel au bénéfice d'une autorisation. Toujours sous l’angle de la proportionnalité de la décision, l’Étude comptait plus de quarante avocats et avocats-stagiaires dépendant de l'agrément de la commission. En outre, les statuts de la société, son règlement d'organisation, la convention d'actionnaires et le contrat de travail pour associé garantissaient objectivement l'indépendance au sens où l'entendaient le Tribunal fédéral et la chambre administrative en donnant toutes les informations utiles sur son engagement, en établissant clairement que l’employeur ne pouvait exercer aucune influence sur la gestion des mandats. Enfin, l'indépendance de l’Étude vis-à-vis du seul associé non-avocat, respectivement de ses dix-sept associés avocats inscrits, était garantie. Le risque d'une mainmise du seul associé non-avocat sur la société ne saurait être retenu. Pas plus que l'indépendance des avocats collaborateurs employés ne serait mise en péril par M. D______.

L’Étude répondait à l'exigence d'une société anonyme pleinement contrôlée par une majorité d'avocats inscrits. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l'indépendance était satisfaite lorsque l'organisation mise en place présentait les mêmes garanties sous l'angle de l'indépendance qu'un engagement par un ou plusieurs avocat(s) inscrit(s). La jurisprudence cantonale citée par la commission avait été mal interprétée. À teneur de la jurisprudence de la chambre administrative, les critères observés par l'autorité de surveillance zurichoise respectaient le droit fédéral, le critère de la majorité d'avocats inscrits, et non d'une intégralité, étant expressément défini. Selon la doctrine, le critère de la majorité d’avocats inscrits était également suffisant. De plus, la commission, dans une décision du 23 janvier 2012, s'était déjà prononcée favorablement quant à la présence d'une personne non-avocate au sein de l'actionnariat d'une société anonyme d'avocats. En l'occurrence, d'une part, une majorité d'avocats inscrits au registre cantonal prévalait au sein de l’Étude sur le nombre de personnes non inscrites s'agissant des décisions de la société, puisque dix-sept des dix-huit associés actionnaires étaient des avocats inscrits. Tant au regard de cette situation que sur la base des documents fondant la société, les critères observés par la chambre administrative et l'autorité de surveillance des avocats du canton de Zurich étaient par conséquent remplis. D'autre part, précisément sur la base de la conformité à ces critères, et en accord avec la jurisprudence et la doctrine, l'autorité zurichoise avait accordé son agrément à C______ SA pour la pratique de la profession d'avocat.

La décision attaquée violait également le principe de l'égalité de traitement, car dans la décision précitée, la commission avait donné son agrément pour l'exercice de la profession d'avocat sous la forme d'une société de capitaux à une étude dont l'actionnariat comprenait la présence d'une personne non avocate. Or, les critères retenus dans cette décision étaient en l'occurrence également remplis dans le cas d'espèce, à la fois concernant la formation de M. D______ mais également concernant la société, qui était déjà au bénéfice d'un agrément de l'autorité de surveillance des avocats du canton de Zurich.

Enfin, le secret professionnel était protégé au sein de l’Étude comme l'avait constaté le DFJP, ainsi que le département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (ci-après : DDPS), et comme l'avait également constaté l'autorité de surveillance des avocats du canton de Zurich en accordant son agrément. De plus, M. D______ respectait dans sa pratique quotidienne de l'arbitrage les principes de diligence, de défense de conflits d'intérêts et de confidentialité. La convention d'actionnaire de la société prévoyait en outre le respect du secret professionnel, même pour ceux qui n'étaient pas inscrits en tant qu'avocats.

À l'appui de leur recours, Mme A______ et M. B______ ont produit notamment des documents relatifs à la formation professionnelle de M. D______, une déclaration de sécurité du DDPS concernant M. D______ du 24 juin 2015, ainsi que la décision de la commission du 23 janvier 2012.

5. Le 7 mars 2016, la commission a conclu au rejet du recours et à la confirmation de sa décision du 14 décembre 2015.

Le Tribunal administratif, devenu depuis lors la chambre administrative, avait fixé dans sa jurisprudence les conditions pour la pratique de la profession d'avocat en qualité d'employé d'une société de capitaux, à savoir en particulier :

- aucune décision ne devait être prise par une majorité de personnes qui n'étaient pas inscrites à un registre cantonal d'avocats ;

- les avocats inscrits devaient constituer la majorité des voix et du capital-actions au sein de l'assemblée générale ;

- les décisions reposant sur l'art. 704 de de la loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 (Livre cinquième : Droit des obligations - CO - RS 220) ne pouvaient être prises que par une majorité de personnes inscrites au registre ;

- un quorum statutaire devait être exigé pour que la majorité adoptant une décision soit composée majoritairement d'avocats inscrits au registre ;

- s'agissant du conseil d'administration, la majorité adoptant une décision devait être composée d'avocats inscrits, y compris pour les décisions prises par voie de circulation ;

- en dehors d’un avocat inscrit à un registre d’avocat suisse, seul pouvait être admis comme actionnaire de la société anonyme d'avocats l'avocat exerçant à l'étranger qui était soumis aux mêmes règles professionnelles et déontologiques que les avocats exerçant dans l'État d'accueil et ce, pour l'ensemble des activités qu'il exerçait sur le territoire de celui-ci.

Depuis lors, cette jurisprudence posait des problèmes pour être appliquée telle quelle, notamment en ce qui concernait les règles de quorum fixées.

En effet, le registre du commerce (ci-après : RC) s'était depuis lors déterminé sur les statuts qui lui avaient été soumis, concernant des études d'avocats organisées sous la forme de sociétés de capitaux, et avait rejeté les dispositions statutaires prévoyant que l'assemblée générale n'était valablement constituée que lorsque la majorité des actions et des voix représentées étaient détenues par des personnes inscrites à un registre d'avocats en Suisse. Le RC considérait qu'il était contraire à la loi de renforcer le processus décisionnel en instaurant des exigences imposant des critères personnels et intrinsèques aux détenteurs de droits de sociétariat, les règles sur le quorum ne pouvant avoir pour objectif que d'exiger la présence d'une proportion minimale du capital-actions. De plus, soumettre la validité d'une décision à la condition qu'elle soit prise à une majorité des voix représentées par des avocats inscrits à un registre cantonal n'était pas compatible avec le principe selon lequel le droit de votre de chaque actionnaire se déterminait en fonction de la valeur nominale des actions qu'il détenait. La liste des exceptions prévues par la loi portant sur ce principe ne laissait pas de place à des critères personnels et intrinsèques aux détenteurs de droits de sociétariat. Ainsi, la jurisprudence cantonale n'était pas applicable dans la pratique, dès lors que les règles qu'elle préconisait ne pouvaient pas être mises en œuvre.

En l'occurrence, et quelles que soient les règles de quorum ou de majorité fixées, la condition relative à la composition de l'actionnariat n'était pas réalisée, puisque l'un des actionnaires n'était pas avocat et n'était à ce titre ni inscrit à un registre cantonal d'avocats ni avocat exerçant à l'étranger soumis aux mêmes règles professionnelles et déontologiques que les avocats exerçant dans l'État d'accueil. Les autres qualités de cet actionnaire étaient sans effet, seule la qualité d'avocat inscrit étant déterminante, qualité qui lui faisait défaut.

Dans sa jurisprudence, le Tribunal fédéral avait admis le principe de l'organisation d'une Étude d'avocats sous forme de société de capitaux, mais n'avait pas tranché expressément la question de savoir si et à quelles conditions une organisation multidisciplinaire (multidisciplinary partnership), dont les participations seraient également détenues par des non avocats, pourrait être également conforme au principe d'indépendance. Il avait toutefois retenu que le fait qu'un avocat soit employé d'une Étude d'avocats organisée sous la forme d'une société entièrement contrôlée par des avocats inscrits n'était pas différente de celle d'un avocat employé par un avocat inscrit au registre et que, ce faisant, l'effet de la relation de travail était le même que si les avocats de la société étaient engagés directement par un avocat inscrit au registre.

La commission avait ainsi été amenée à revoir les conditions posées à l'exercice de la profession au sein d'une société de capitaux et considérait que seules les sociétés de capitaux entièrement contrôlées par des avocats inscrits à un registre suisse permettaient de satisfaire à l'exigence légale d'indépendance institutionnelle requise par la loi et la garantie du respect des règles professionnelles au sein même de la société, ainsi que le strict respect du secret professionnel.

La liberté d'accès au marché n'était pas absolue, puisqu'elle pouvait être restreinte au lieu de destination de la prestation, sous certaines conditions prévues par la loi. S'agissant du fondement même de la profession d'avocat, l'intérêt public à la protection de l'indépendance et du secret professionnel de l'avocat était à l'évidence prépondérant, de sorte que l'exigence posée par la commission pour la pratique de la profession sous couvert d'une société de capitaux devait être admise. Cette condition s'imposait d'ailleurs à tout avocat qui demandait à être inscrit au registre des avocats du canton de Genève. La décision de l'autorité de surveillance du canton de Zurich donnant son agrément portait sur une règle fédérale uniforme applicable à tout le territoire suisse et ne saurait prévaloir. En effet, si tel était le cas, une autorité cantonale qui aurait erré dans l'application d'une règle fédérale uniforme pourrait imposer sa décision dans l'ensemble de la Suisse. L'on ne pouvait exclure que ceci ait amené, dans le cas particulier, l'enregistrement des avocats de C______ SA dans un premier temps dans le canton ayant une pratique non conforme à la règle fédérale uniforme, même avec une présence sensiblement moins importante dans ce canton, afin de se faire enregistrer ultérieurement au lieu principal de son activité, dans le canton de Genève, qui ne pourrait alors refuser cette inscription ou y imposer des charges dans le but de faire respecter la règle fédérale. La loi fédérale sur le marché intérieur du 6 octobre 1945 (LMI - RS 943.02) ne saurait avoir comme but d'appliquer une décision cantonale qui ne résultait ni de la loi, ni de la jurisprudence du Tribunal fédéral et qui n'avait pas tenu compte des intérêts publics prépondérants prévus par une loi fédérale telle que la loi fédérale sur la libre circulation des avocats du 23 juin 2000 (LLCA - RS 935.61). La charge consistant à exiger que seuls les avocats pouvaient être actionnaires de la société de capitaux apparaissait dès lors conforme à un intérêt public prépondérant et pouvait par conséquent être imposée pour la pratique de la profession d'avocat sous la forme de société de capitaux.

6. Le 24 mars 2016, le juge délégué a transmis à Mme A______ et M. B______ la réponse de la commission, leur fixant un délai au 3 mai 2016 pour répliquer, la cause étant ensuite gardée à juger.

7. Par décision du 8 avril 2016 (ATA/296/2016), la présidence de la chambre administrative a dit que le recours n'était accompagné ni de l'effet suspensif, ni de mesures provisionnelles.

Cette décision a été confirmée par le Tribunal fédéral dans son arrêt du 3 juin 2016 (2C_393/2016).

8. Le 3 mai 2016, Mme A______ et M. B______ ont répliqué, persistant dans leurs conclusions.

Par décision du 23 janvier 2012, la commission avait accordé son agrément au maintien de l'inscription au registre cantonal à des avocats employés par une Étude désormais constituée en société anonyme, dont l'un des associés n'était pas avocat. Les faits ressortant de cette décision étaient semblables au cas d'espèce.

De plus, la commission n'avait pas effectué de pesée d'intérêts des éléments concrets en présence, qui imposeraient de retenir que l'indépendance et le secret professionnel de l'avocat étaient prépondérants et autant antinomiques à la liberté économique de l’Étude et à son accès au marché intérieur. D'autre part, la commission n'avançait pas non plus que l'organisation de l’Étude mettait concrètement en danger le secret professionnel et l'indépendance des avocats employés par la société. Il apparaissait difficilement concevable que le seul associé non-avocat exercerait une mainmise et menacerait l'indépendance des autres associés et collaborateurs de l'Étude, soit quarante-cinq avocats inscrits au registre cantonal genevois. L'organisation de l’Étude avait été établie précisément afin de garantir cette indépendance, se basant sur les critères posés par la jurisprudence de la chambre administrative et celle de l'autorité de surveillance des avocats du canton de Zurich. Les garanties quant à la sauvegarde de l'intérêt public avaient été données. Enfin, l'activité économique et professionnelle de l’Étude dans le canton de Genève, et, par conséquent, de tous les employés qui en dépendaient, était en jeu.

La convention d'actionnaires de C______ SA prévoyait que les actions de la société anonyme étaient détenues en mains communes par les associés, chaque associé détenant une part égale sur les actions déterminée par calcul. Elle prévoyait également que chaque associé avait droit à une voix pour ce qui concernait les affaires de la société. Au regard des principes dégagés par la doctrine et la jurisprudence applicable, et au vu de l'organisation de la société, le seul associé non-avocat, représentant environ 5 % de l'actionnariat, ne saurait constituer un risque, concret, d'atteinte ni à l'indépendance ni à une pratique consciencieuse du métier d'avocat pour les avocats employés par C______ SA. Au vu des proportions du cas d'espèce, c'était une majorité d'avocats inscrits qui contrôlaient la société. Le contrôle effectif de la société par des avocats inscrits était ainsi garanti.

Enfin, la qualité d'avocat inscrit n'était pas un élément déterminant en soi, comme l'avait d'ailleurs retenu la commission dans sa décision du 23 janvier 2012. Tous les critères posés par la jurisprudence du Tribunal fédéral avaient été respectés, comme l'attestait la décision de l'autorité de surveillance des avocats du canton de Zurich du 4 juin 2015.

9. Le 11 mai 2016, le juge délégué a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile, devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ces points de vue (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 49 de la loi sur la profession d’avocat - LPAv - E 6 10).

2. Aux termes de l'art. 60 al. 1 LPA, ont qualité pour recourir les parties à la procédure ayant abouti à la décision attaquée (let. a), ainsi que toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu’elle soit annulée ou modifiée (let. b). Les let. a et b de cette disposition doivent se lire en parallèle. Ainsi, le particulier qui ne peut faire valoir un intérêt digne de protection ne saurait être admis comme partie recourante, même s’il était partie à la procédure de première instance (ATA/623/2016 du 19 juillet 2016 consid. 4 ; ATA/602/2016 du 12 juillet 2016 consid. 1b).

Selon la jurisprudence, le recourant doit avoir un intérêt pratique à l'admission du recours, soit que cette admission soit propre à lui procurer un avantage, de nature économique, matérielle ou idéale (ATF 138 II 162 consid. 2.1.2 ; 137 II 30 consid. 2 ; 137 II 40 consid. 2.6.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_152/2012 du 21 mai 2012 consid. 2.1 ; ATA/684/2016 du 16 août 2016 consid. 2b).

En l'espèce et à la lecture de la décision attaquée, il n'est pas limpide de savoir qui en sont les destinataires, soit les requérants, l'Étude elle-même, C______ SA ou encore M. D______.

S'il est vrai que les recourants sont les requérants de la demande d'agrément formulée le 3 juin 2015, qu'ils font partie du conseil d'administration de C______ SA, au bénéfice de la signature collective à deux, et qu'ils sont cités dans la liste des avocats du bureau genevois de l'Étude et inscrits au registre cantonal, la chambre de céans ignore toutefois s'ils ont agi en tant que représentants du bureau genevois de l'Étude, en tant que représentants de C______ SA ou encore en leurs noms personnels.

Malgré cela, la question de la qualité pour recourir des recourants peut souffrir de rester indécise au vu de ce qui suit.

3. L'objet du litige consiste à déterminer si l’Étude peut recevoir l'agrément pour l'exercice de la profession d'avocat, sous la forme d'une société de capitaux, alors que l'un de ses associés n'est pas titulaire du brevet d'avocat suisse ou étranger.

4. a. Aux termes de l’art. 6 al. 1 LLCA, l’avocat titulaire d’un brevet d’avocat cantonal qui entend pratiquer la représentation en justice doit demander son inscription au registre du canton dans lequel il a son adresse professionnelle. L’autorité de surveillance l’inscrit s’il remplit les conditions prévues aux art. 7 et 8 LLCA (art. 6 al. 2 LLCA). L’avocat doit notamment être en mesure de pratiquer en toute indépendance ; il ne peut être employé que par des personnes
elles-mêmes inscrites dans un registre cantonal (art. 8 al. 1 let. d LLCA).

L'art. 12 LLCA énonce les règles professionnelles auxquelles l'avocat est soumis. Celui-ci doit notamment exercer son activité professionnelle en toute indépendance, en son nom personnel et sous sa propre responsabilité (let. b) et éviter tout conflit entre les intérêts de son client et ceux des personnes avec lesquelles il est en relation sur le plan professionnel ou privé (let. c).

Il est en outre soumis au secret professionnel pour toutes les affaires qui lui sont confiées par ses clients dans l'exercice de sa profession ; cette obligation n'est pas limitée dans le temps et est applicable à l'égard des tiers (art. 13 al. 1
1ère phr. LLCA).

b. À teneur de l’art. 14 LPAv, la commission du barreau exerce à Genève les compétences dévolues à l’autorité de surveillance des avocats par la LLCA, ainsi que les compétences qui lui sont attribuées par la LPAv.

Selon l'art. 10 LPAv, l’avocat inscrit au registre ne peut s’associer ou avoir des locaux communs qu’avec des personnes exerçant la même activité professionnelle (al. 1 1ère phr.). L’exercice de la profession d’avocat sous la forme d’une société de capitaux est soumis à l’agrément de la commission du barreau, qui s’assure du respect des exigences du droit fédéral (al. 2).

c. Repris de l'art. 13 LLCA, l'art. 12 al. 1 LPAv prévoit que l’avocat est soumis au secret professionnel – également prévu par l’art. 321 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) et protégé notamment par les
art. 171 et 264 du Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007
(CPP - RS 312.0), l’art. 163 du Code de procédure civile suisse du 19 décembre 2008 (CPC - RS 272) et l’art. 32 LPA – pour toutes les affaires qui lui sont confiées par ses clients dans l’exercice de sa profession ou dont il a connaissance dans l’exercice de celle-ci. Le secret professionnel subsiste également après les relations contractuelles de l'avocat et de son client, qu'elles aient cessé en raison de l'exécution du mandat, de sa résiliation ou pour d'autres motifs (art. 15 du Code suisse de déontologie FSA ; François BOHNET/Vincent MARTENET, Droit de la profession d’avocat, 2009, n. 1’818 p. 750 ; n. 1’845 p. 759 ; n. 1'913-1’914 p. 780 et 781 et les références citées).

Le secret professionnel reconnu à l’avocat constitue une exception fondamentale dans l’ordre juridique suisse. En ce qu’il est absolu, il donne en effet à l’avocat, contrairement à tout autre citoyen, la possibilité de refuser de renseigner les autorités, que ce soit par témoignage ou remise de documents. Lorsqu’il concerne une procédure judiciaire, le secret professionnel doit dans tous les cas être respecté, aucune restriction ne pouvant toucher « à l’essence même de la mission de défense qui (…) constitue le fondement du secret professionnel des avocats » (Benoît CHAPPUIS, Le secret de l’avocat – Quelques questions actuelles, Revue de l’avocat 2/2016, p. 55 et les références citées).

5. L'indépendance est un principe essentiel de la profession d'avocat (arrêt du Tribunal fédéral 2C_889/2008 du 21 juillet 2009 consid. 3.1.2 ; Benoît CHAPPUIS, La profession d’avocat, Tome I, 2016, p. 92) ; elle est la clé de voûte de la pratique du barreau qui se repose sur les piliers de la profession que sont le secret professionnel, l'interdiction des conflits d'intérêts, la probité de l'avocat et la fidélité dans l'exécution du mandat (Philippe MEIER/Christian REISER in Michel VALTICOS/Christian REISER/Benoît CHAPPUIS [éd.], Commentaire romand de la loi sur les avocats, 2010, n. 28 ad art. 8 LLCA ; François BOHNET/Vincent MARTENET, op. cit., p. 545 n. 1301 ; ATA/600/2015 du 9 juin 2015 consid. 8b).

L'indépendance comme condition de l'inscription (art. 8 al. 1 let. d LLCA) est dite institutionnelle : l'avocat doit s'organiser de manière à pouvoir exercer son activité de façon indépendante. L'art. 12 let. b LLCA énonce la règle de l'indépendance matérielle, selon laquelle l'avocat doit veiller, dans chaque affaire qui lui est confiée, à exercer son activité de manière indépendante, en évitant notamment tout conflit d'intérêts (arrêts du Tribunal fédéral 2C_560/2015 du 11 janvier 2016 consid. 3.1 ; 2C_433/2013 du 6 décembre 2013 consid. 3 non publié in ATF 140 II 102 ; ATF 138 II 440 consid. 3 = JdT 2013 I 135). La notion d’indépendance forme un tout, même si elle a été traitée dans la loi dans deux dispositions différentes (ATA/600/2015 précité consid. 8b ; ATA/111/2008 du 11 mars 2008 ; François BOHNET/Vincent MARTENET, op. cit., p. 278 n. 627).

L'indépendance institutionnelle, au sens de l'art. 8 al. 1 let. d LLCA, doit garantir que l'avocat puisse se consacrer entièrement à la défense des intérêts de ses clients, sans être influencé par des circonstances étrangères à la cause. Il en va de la confiance du public dans la profession (arrêt du Tribunal fédéral 2C_433/2013 précité consid. 3 non publié in ATF 140 II 102 ; ATF 138 II 440 consid. 5 = JdT 2013 I 135).

Le fait que la condition de l'indépendance institutionnelle, qui doit exister préalablement à l'inscription, est doublée de la règle professionnelle de l'indépendance, qui s'impose à l'avocat inscrit, a pour conséquence de réduire quelque peu les exigences relatives à la première : il n'est pas nécessaire pour être inscrit que toute atteinte à l'indépendance soit d'entrée de cause exclue ; l'inscription doit être refusée seulement lorsque, sans investigations approfondies, il apparaît avec une certaine vraisemblance que l'intéressé, du fait de sa situation particulière, ne remplit pas la condition de l'indépendance (arrêt du Tribunal fédéral 2C_433/2013 précité consid. 3 non publié in ATF 140 II 102 ; ATF 138 II 440 consid. 3 = JdT 2013 I 135 ; 130 II 87 consid. 5.2 5 = JdT 2013 I 135 ; ATA/600/2015 précité consid. 8b).

Faire dépendre l'inscription de l'indépendance institutionnelle constitue une limitation de la liberté économique (art. 27 al. 2 Cst.), laquelle vaut aussi pour l'activité d'avocat soumise au monopole. Pour cette raison aussi, il n'y a pas lieu d'étendre les exigences relatives à l'indépendance institutionnelle au-delà de ce qui est nécessaire (arrêt du Tribunal fédéral 2C_433/2013 précité consid. 3 non publié in ATF 140 II 102 ; ATF 138 II 440 consid. 4 = JdT 2013 I 135).

6. Sous l’angle de l’indépendance institutionnelle, le Tribunal fédéral distingue deux situations : d'une part, celle de l'avocat qui pratique ce métier à côté d'une activité salariée et, d'autre part, celle de l'avocat qui exerce sa profession comme employé (ATF 140 II 102 consid. 4). Seule la deuxième situation sera ici discutée, l’objet du présent litige ayant trait à la problématique de l’indépendance d'avocats travaillant au sein d’une personne morale.

a. Dans le cadre de rapports de travail (art. 319 ss CO), l’avocat qui est l'employé d'une étude doit, conformément à ses obligations contractuelles (art. 321a CO : devoir de diligence et de fidélité), sauvegarder les intérêts de son employeur, ainsi que des clients de ce dernier. Il se trouve dans une relation de subordination vis-à-vis de son employeur et est en principe tenu d'observer les directives et instructions particulières de celui-ci (art. 321d CO), pour autant qu'elles n'entrent pas en conflit avec les règles professionnelles que l'avocat doit respecter, notamment l'exigence d'indépendance de l'art. 12 let. b LLCA (ATF 140 II 102 consid. 4.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 5C.116/2005 du 29 novembre 2005 consid. 3.3.3). Il peut même sembler approprié que l'avocat employeur donne des instructions à son collaborateur, lorsqu'il dispose d'une plus grande expérience que ce dernier et que c'est pour cette raison que le client lui a confié le mandat (Walter FELLMANN, Anwaltsrecht, 2010, n. 282).

b. Ainsi, l'avocat salarié n'est pas seulement censé dépendre de son employeur, mais il est par définition dans une relation de subordination vis-à-vis de lui. La règle de l'art. 8 al. 1 let. d 2ème phr. LLCA prend ici tout son sens : en exigeant que l'employeur de l'avocat requérant son inscription soit lui-même inscrit dans un registre cantonal, elle fait en sorte que le premier étant soumis à la LLCA et à la surveillance disciplinaire, il ne mésuse pas de sa position hiérarchique pour influencer son collaborateur dans un sens contraire aux intérêts du client. En vertu de la LLCA, l'employeur de l'avocat est en particulier tenu de résilier le mandat en cas de conflit d'intérêts. C'est ainsi le statut de son employeur qui garantit l'indépendance de l'avocat employé (ATF 140 II 102 consid. 4.2.1 ; 138 II 440 consid. 7 = JdT 2013 I 135).

7. L'art. 8 al. 1 let. d 2ème phr. LLCA envisage le cas où l'avocat salarié est employé par une étude organisée sous la forme traditionnelle d'une entreprise individuelle ou d'une société de personnes, dont respectivement l'exploitant et les associés sont eux-mêmes inscrits au registre des avocats.

Une évolution plus récente a conduit à ce que des avocats s'associent pour la pratique du barreau, en constituant une personne morale dont ils sont les employés.

a. Cette situation a d’abord fait l’objet de deux arrêts rendus par le Tribunal administratif (ATA/201/2008 du 29 avril 2008 et ATA/111/2008 précité), dont la chambre de céans a repris les attributions au 1er janvier 2011. Dans ces arrêts, le Tribunal administratif a considéré que l’ancienne teneur de l’art. 10 al. 2 LPAv ne respectait pas le principe de la force dérogatoire du droit fédéral et était contraire à la LMI, ainsi qu’à la LLCA.

Selon lesdits arrêts, une société anonyme d’avocats était apte à garantir l’indépendance de ceux-ci, au sens des art. 8 et 12 LLCA, pour autant que les avocats inscrits constituent la majorité des voix, tant au sein de l’assemblée générale qu’au sein du conseil d’administration. Aucune décision ne pouvait être prise par une majorité de personnes qui ne soit pas inscrite à un registre cantonal d’avocats. Dans tous les cas, la société de capitaux devait adopter la forme d’une personne morale de droit suisse.

À la suite de ces arrêts, la LPAv a été modifiée par le Grand Conseil. Son ancien art. 10 al. 2, qui prévoyait que l’association d’avocats ne pouvait revêtir la forme de société de capitaux, a été amendé et a, depuis lors, la teneur actuelle citée ci-dessus.

b. Dans un arrêt du 12 janvier 2010 (ATA/14/2010), le Tribunal administratif a admis un recours contre une décision faisant interdiction à un avocat de déployer son activité sous le couvert d'une société de capitaux, car il en était le seul actionnaire et le seul administrateur. Se référant aux ATA/201/2008 et ATA/111/2008 précités, le Tribunal administratif a considéré que lorsqu’une société de capitaux a, pour actionnaire et administrateur unique, un avocat inscrit au registre, la qualité de l’indépendance n’apparaissait pas être atteinte, mais au contraire renforcée par rapport aux études constituées en sociétés de capitaux dont une partie de l’actionnariat, voire des administrateurs, n’était pas inscrite dans ce registre (ATA/14/2010 précité consid. 3a).

c. Le Tribunal fédéral a ensuite eu l’occasion de se pencher sur la question, rendant un arrêt de principe le 7 septembre 2012 (ATF 138 II 440 = JdT 2013 I 135).

Dans cette affaire, il s'agissait de onze avocats associés au sein d'un bureau de Saint-Gall, qui envisageaient de poursuivre leur activité en intégrant une étude dont le support juridique était une société anonyme de droit suisse. Ces avocats demandaient qu'il soit constaté qu'ils pouvaient demeurer inscrits au registre cantonal avec cette nouvelle organisation.

Le Tribunal fédéral a fait droit à cette conclusion, en considérant que la question de l'indépendance requise ne devait pas dépendre de la forme juridique adoptée, mais de l'organisation mise en place dans le cas concret. Le choix de la société anonyme ou d'une autre forme juridique comme support d'une étude d'avocats n'empêchait pas les avocats concernés de se faire inscrire dans un registre cantonal – même si la personne morale n'y figurait pas elle-même – pour autant que leur indépendance soit garantie de la même manière que s'ils étaient engagés par des avocats inscrits. Lorsque la société anonyme était entièrement contrôlée par des avocats inscrits, les garanties sous l'angle de l'indépendance institutionnelle étaient les mêmes que lorsqu'un avocat était engagé par un autre avocat lui-même inscrit. En l'occurrence, la société anonyme était et resterait entièrement contrôlée par des avocats inscrits dans un registre cantonal : seuls des avocats inscrits pouvaient devenir associés et les actions étaient soumises à des restrictions de transmissibilité ; le conseil d'administration était composé uniquement d'actionnaires ; outre le but de la société, les statuts ainsi qu'une convention d'actionnaires garantissaient que la direction de celle-ci soit assurée par des avocats inscrits. Dans ces conditions, les exigences d'indépendance posées par l'art. 8 al. 1 let. d LLCA étaient satisfaites (ATF 138 II 440 consid. 17, 18, 22 et 23 = JdT 2013 I 135).

Cette disposition n’exclut pas d’emblée les sociétés d’avocats pour autant que ces dernières ne soient pas exposées à des influences extérieures ou à des dépendances propres à entraver la défense des intérêts de leurs clients (Christian REISER, La société anonyme d’avocat, sismologie d’une rupture, in Regards de marathoniens sur le droit suisse, 2015, p. 539).

Sous l’angle du rôle des réviseurs et contrôleurs spéciaux, le Tribunal fédéral a considéré que les sociétés d’avocats avec personnalité ne pouvaient pas être tenues pour interdites simplement parce que dans ces organisations, le secret professionnel nécessitait éventuellement certains accommodements. En raison du strict devoir de confidentialité des réviseurs et contrôleurs spéciaux, on ne pouvait retenir que le choix de constituer une société avec personnalité compromette sérieusement le secret nécessaire à l’exercice de la profession d’avocat (ATF 138 II 440 consid. 21 = JdT 2013 I 135).

Le Tribunal fédéral ne s'est en revanche pas prononcé sur la question de savoir si et, le cas échéant, à quelles conditions le fait que des personnes autres que des avocats inscrits détiennent des droits de participation dans la personne morale (dont l'activité pouvait être pluridisciplinaire, « Multidisciplinary Partnership ») était conciliable avec la règle d'indépendance de l'art. 8 al. 1 let. d LLCA (ATF 138 II 440 consid. 23 = JdT 2013 I 135).

8. Après le prononcé de l’arrêt précité du Tribunal fédéral, la commission a procédé à un resserrement de sa pratique par rapport aux ATA/201/2008 et ATA/111/2008 précités. Désormais, l’exercice de la profession d’avocat sous le couvert d’une personne morale ne peut être ouvert à des personnes non inscrites à un registre d’avocats suisse et seule une société dont le capital social est intégralement détenu en tout temps par des avocats inscrits dans un registre cantonal permet le respect des principes cardinaux de l’indépendance et du secret professionnel.

9. Dans une jurisprudence récente, la chambre administrative a rejeté le recours d'une Étude d'avocats constituée en société anonyme qui avait sollicité de la commission son agrément pour l'exercice de la profession d'avocat sous la forme d'une société de capitaux, alors qu'un des trente-neuf associés de l'Étude, expert-fiscal diplômé, n'était pas inscrit à un barreau cantonal (ATA/848/2016 du 11 octobre 2016).

10. En l'espèce, il ressort de l'extrait du registre du commerce du canton de Zurich publié sur le site www.zefix.ch et produit par les recourants que M. D______ est membre du conseil d'administration de C______ SA au bénéfice de la signature collective à deux. Toutefois, ce dernier ne dispose pas d'un brevet d'avocat suisse ou étranger et n'est donc pas inscrit comme avocat dans un registre en Suisse.

Tant la convention d'actionnaires de la société que les statuts octroient aux parties à la convention, de même qu'aux membres du conseil d'administration le droit d'obtenir des informations sur toutes les affaires de la société (ch. 2.7 de la convention d’actionnaires et § 12 des statuts). Le règlement d'organisation en fixe les modalités (point 3.7 du règlement).

Il ressort de la convention d’actionnaires et du règlement d'organisation que des dispositions tendent expressément à limiter l’influence des associés
non-inscrits ou non titulaires du brevet d’avocat dans la gestion des mandats réservés aux avocats inscrits, en ne les autorisant pas à donner des instructions et en affirmant que les règles professionnelles et déontologiques l’emportent (notamment ch. 6 de la convention d'actionnaires et point 3.3 du règlement). Il ne les empêche toutefois pas de prendre connaissance ou d’obtenir des informations à cet égard.

Le conseil d’administration peut d’ailleurs modifier ce règlement d’organisation, aux conditions de quorum déterminées par ce dernier (§ 12 des statuts et point 3.2 du règlement). Certes, le règlement prévoit qu'une décision est valable lorsque la majorité des membres avocats inscrits à un registre des avocats en Suisse du conseil d’administration est présente (point 3.5 du règlement). Il n’en demeure moins qu’un tel règlement constitue un document interne à la société, non opposable à des tiers.

Ainsi, l’associé non inscrit, de par sa qualité de partie à la convention d'actionnaires et membre du conseil d’administration, bénéficie d’une position particulière, lui donnant accès à des informations couvertes par le secret professionnel de l’avocat quand bien même il ne pourra faire valoir la protection qui y est propre. En effet, il est difficilement concevable que sa position lui permette de se prévaloir de l’art. 321 al. 1 CP comme auxiliaire de l’avocat, si bien qu’il ne pourra pas faire valoir cette protection à l’égard de tiers, notamment à l’égard des autorités. Le seul fait que M. D______ soit arbitre international et que dans sa pratique, il respecte les principes de diligence, de l'interdiction de conflits d'intérêts et de confidentialité, n’est pas susceptible de garantir une protection suffisante, dans la mesure où il n’obtient pas les informations confidentielles en sa qualité d'arbitre mais bien en sa qualité de partie à la convention d'actionnaires et membre du conseil d’administration.

C______ SA a voulu imposer au sein de sa structure des règles professionnelles équivalentes à celles du métier d’avocat, en astreignant les associés et les membres du conseil d’administration ou de la direction, non-inscrits au registre cantonal, à respecter des règles conçues pour limiter leur influence dans les mandats réservés aux avocats et dans la prise de décision de la société. Les personnes concernées ne se trouvent toutefois pas dans la même situation que si elles étaient légalement tenues de les observer et, n’étant pas inscrites dans un registre cantonal, elles ne sont pas soumises à la surveillance disciplinaire d’une autorité (cantonale) suisse.

En définitive, et quelles que soient les mesures prises afin de limiter leur influence, la présence même de ces personnes au sein de l’actionnariat, de la direction et/ou du conseil d’administration d’une société de capitaux fait obstacle à la certitude du respect du secret professionnel par ceux pouvant être désignés comme l’« employeur ».

Une autorité pénale pourrait, par exemple en cas de convocation ou de perquisition, exiger et obtenir les informations de la part de cet associé non inscrit, sans que ce dernier puisse y opposer le secret professionnel de l’avocat, puisqu’il n’est justement ni avocat, ni auxiliaire des associés inscrits.

Dans ces conditions, on ne saurait dire qu’une société anonyme d’avocats contrôlée par une majorité d’avocats inscrits, que ce soit même à 95 %, présente les mêmes garanties en termes d’indépendance que si la société était entièrement contrôlée par un ou plusieurs avocats inscrits dans un registre cantonal. Le fait que M. D______ ait fait l'objet d'un contrôle de sécurité élargi de la part du DDPS ne modifie en rien ce qui précède. Partant, la condition dont l’art. 8 al. 1 let. d 2ème phr. LLCA fait dépendre l’inscription au registre d’un avocat salarié n’est pas remplie dans le cas d’espèce.

La commission n’a ainsi pas violé le droit en exigeant que l’exercice de la profession d’avocat soit accompli sous le couvert d’une personne morale contrôlée entièrement par un ou plusieurs avocats inscrits.

11. Les recourants se prévalent également de la LMI.

a. L'art. 2 al. 4 1ère phr. LMI prescrit que toute personne exerçant une activité lucrative légale est autorisée à s'établir sur tout le territoire suisse afin d'exercer cette activité conformément aux dispositions en vigueur au lieu du premier établissement et sous réserve de l'art. 3 LMI.

Il découle de l'art. 2 al. 4 1ère phr. LMI qu'un avocat doit pouvoir s'établir dans un autre canton pour exercer sa profession conformément aux dispositions du canton de provenance. L’organisation de l’activité de l’avocat comprend en particulier la possibilité d’exercer sous la forme d’une personne morale.

Dans une décision du 5 octobre 2006, l'autorité de surveillance des avocats du canton de Zurich a déterminé dans quelle mesure les statuts d’une société anonyme d’avocats devaient être adaptés pour garantir l’indépendance de ceux-ci au sens des articles 8 et 12 LLCA et a posé plusieurs principes. Les statuts de la société recourante sont conformes à ces principes et elle est autorisée en la forme d’une personne morale dans le canton de Zurich où se trouve son siège social. Elle devrait par conséquent être autorisée de la même manière dans le canton de Genève en application de l’art. 2 al. 4 LMI. Toutefois, l’agrément lui a été refusé parce que la société recourante n’était pas contrôlée entièrement par des avocats inscrits. Ce refus était basé sur l’art. 10 al. 2 LPAv et sur l’interprétation par la commission des art. 8, 12 et 13 LLCA. Dès lors, il convient d'examiner si un tel refus satisfait aux exigences de l'art. 3 LMI.

b. Selon l’art. 3 al. 1 LMI, la liberté d’accès au marché ne peut être refusée à des offreurs externes. Les restrictions, qui prennent la forme de charges ou de conditions, ne sont autorisées que si elles s’appliquent de la même façon aux offreurs locaux (let. a), sont indispensables à la préservation d’intérêts publics prépondérants (let. b) et répondent au principe de la proportionnalité (let. c). L’art. 3 al. 2 LMI précise les restrictions qui ne répondent pas au principe de la proportionnalité. Ce principe n’est notamment pas respecté lorsqu’une protection suffisante des intérêts publics prépondérants peut être obtenue au moyen des dispositions applicables au lieu de provenance (let. a) ou lorsqu’une protection suffisante des intérêts publics prépondérants peut être garantie par l’activité que l’offreur a exercée au lieu de provenance (let. d).

c. Le refus opposé à l'octroi de l’agrément requis se fonde sur l'art. 10
al. 2 LPAv qui impose la condition du respect des exigences du droit fédéral de manière identique aux avocats genevois et à ceux qui viennent d'un autre canton. Cette condition respecte donc l'art. 3 al. 1 let. a LMI.

d. Il faut aussi que la restriction soit indispensable à la préservation d'intérêts publics prépondérants (art. 3 al. 1 let. b LMI), notion qui recoupe celle que la jurisprudence a dégagée en matière de restriction à la liberté économique (Message du Conseil fédéral du 24 novembre 2004 relatif à la révision de la LMI, FF 2005 421, p. 441). L'intérêt public prépondérant est celui qui, par son importance, l'emporte sur les autres, ce qu'il faut établir grâce à une pesée des intérêts en présence (Manuel BIANCHI DELLA PORTA in Vincent MARTENET/Christian BOVET/Pierre TERCIER [éd.], Commentaire romand du Droit de la concurrence, n. 8 à 11 ad art. 3 LMI).

e. En l'occurrence, la commission fait valoir le souci de préserver l’indépendance des avocats, ainsi que la protection du secret professionnel. Il s’agit là de buts de police légitimes, dans la mesure où ils contribuent à la protection du public et à une bonne administration de la justice. Ainsi, et tel qu’il a déjà été développé ci-dessus, exiger de l’avocat l’exercice de son activité au sein d’une structure garantissant par les qualités de son employeur la certitude du respect du secret professionnel est un intérêt public qui doit ici être qualifié de prépondérant.

f. Les restrictions doivent, enfin, respecter le principe de la proportionnalité (art. 3 al. 1 let. c LMI). L'art. 3 al. 2 LMI énumère les restrictions ne répondant pas au principe de la proportionnalité. En tant qu'atteinte à la liberté économique garantie par l'art. 27 Cst., toute restriction à la liberté d'accès au marché doit en outre respecter, de manière générale, le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.). L'observation de ce dernier doit donc aussi être examinée librement dans le cadre de la LMI.

Le principe de la proportionnalité exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude) et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité) ; en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et il exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts; ATF 142 I 76 consid. 3.5.1 et les arrêts cités).

g. En l'espèce, en considérant que la société de capitaux devait être entièrement contrôlée par des avocats inscrits, la commission n’a pas imposé une restriction disproportionnée. La condition imposée est apte à assurer l’indépendance de l’avocat et le respect du secret professionnel. Aucune mesure moins incisive ne peut être prise, dans la mesure où seuls les avocats inscrits sont légalement tenus aux règles professionnelles et peuvent se prévaloir de la protection qui leur est propre, notamment s’agissant du secret professionnel. Enfin, l’intérêt à garantir l’indépendance de l’avocat et l’efficacité de la protection du secret professionnel l’emporte sur l’intérêt des avocats à s’associer sous la forme d’une personne morale interprofessionnelle comprenant des tiers, étant précisé que la décision de la commission du 23 janvier 2012, sous l'angle de l'égalité de traitement, et la décision de l'autorité de surveillance des avocats du canton de Zurich du 4 juin 2015 ne modifient en rien ce qui précède, dans la mesure où elles ne lient pas la chambre de céans.

En conclusion, l’interprétation de la commission des art. 8, 12 et 13 LLCA ne viole pas le principe de proportionnalité et, par conséquent, le refus d’accorder l’agrément litigieux aux recourants sur la base de l’art. 10 al. 2 LPAv s’avère conforme à l’art. 3 LMI.

12. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 1’500.- sera mis à la charge des recourants qui succombent, pris conjointement et solidairement (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, en tant qu’il est recevable, le recours interjeté le 29 janvier 2016 par Mme A______ et M. B______ contre la décision de la commission du barreau du 14 décembre 2015 ;

met à la charge de Mme A______ et M. B______, pris conjointement et solidairement, un émolument de procédure de CHF 1’500.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Mme A______ et M. B______, à la commission du barreau, à la commission de la concurrence (COMCO), ainsi qu’à l’ordre des avocats.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :