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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1232/2015

ATA/623/2016 du 19.07.2016 ( FPUBL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE; FONCTIONNAIRE; COMMUNE; RÉSILIATION; INDEMNITÉ(EN GÉNÉRAL); PROCÉDURE ADMINISTRATIVE; AUTONOMIE COMMUNALE; AUTORITÉ COMMUNALE; AUTORITÉ DE RECOURS; OPPORTUNITÉ; POUVOIR D'APPRÉCIATION; ANNULABILITÉ; LICENCIEMENT ADMINISTRATIF ; COMMISSION DE RECOURS(EN GÉNÉRAL)
Normes : LPA.6 ; LPA.7 ; LPA.11.al1 ; LPA.53 ; LPA.60.al1 ; LPA.61 ; LPA.65 ; LPA.66 ; LOJ.132 ; LAC.44 ; LAC.48 ; LAC.107 ; ancien statut de la commune de Versoix.13 ; ancien statut de la commune de Versoix.33 ; ancien statut de la commune de Versoix.36 ; ancien statut de la commune de Versoix.40 ; ancien statut de la commune de Versoix.42 ; ancien statut de la commune de Versoix.86 ; LPAC.31
Résumé : Procédure concernant le licenciement d'un fonctionnaire communal par le conseil administratif. En première instance, le fonctionnaire a recouru contre son licenciement auprès d'une commission communale de recours prévue par le statut du personnel alors en vigueur. Cette commission communale a jugé que le licenciement était contraire au droit, estimé que la réintégration n'était pas possible et condamné la commune au versement d'une indemnité. Le fonctionnaire a recouru devant la chambre administrative, concluant au constat qu'il était toujours fonctionnaire de la commune. Le conseil administratif a également recouru auprès de la chambre administrative, au nom de la commune. Après avoir constaté que la commission communale de recours devait être considérée comme une juridiction administrative, compte tenu en particulier de son indépendance, la chambre administrative a déclaré recevable le recours du conseil administratif. Elle a rejeté le recours du fonctionnaire et partiellement admis celui de la commune. Le conseil administratif de la commune n'ayant pas correctement appliqué le statut en ne mentionnant pas les manquements reprochés au fonctionnaire dans les entretiens d'évaluation, la commission de première instance avait à juste titre constaté une violation du droit. Toutefois, compte tenu de la jurisprudence en la matière et de la période relativement courte pendant laquelle le recourant avait été employé de la commune (trois ans moins des arrêts maladie), la chambre administrative a réduit le montant de l'indemnité allouée au fonctionnaire.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1232/2015-FPUBL ATA/623/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 juillet 2016

 

dans la cause

 

COMMUNE DE A______
représentée par Me François Membrez, avocat

et

M. B______
représenté par Me Corinne Corminboeuf Harari, avocate

contre

COMMISSION DE PRÉAVIS DU CONSEIL MUNICIPAL DE LA COMMUNE DE A______



EN FAIT

1) Le 8 juillet 2010, M. B______, né le ______ 1955, a été engagé par la commune de A______ (ci-après : la commune) à compter du
1er août 2010 en qualité de responsable du service social, jeunesse et sécurité
(ci-après : le service) à 100 %, en fonction IV, catégorie f/2½ de l’échelle des traitements.

2) Le 6 juillet 2011, il a fait l’objet d’un entretien d’appréciation et de développement (ci-après : EAD), en présence de M. C______, conseiller administratif, alors maire de la commune, et de M. D______, secrétaire général. Ceux-ci ont estimé qu’il convenait de reporter de six mois la nomination de M. B______.

3) Le 8 juillet 2011, la commune a confirmé à M. B______ la teneur de l’entretien d’évaluation, ainsi que la prolongation de la période d’essai pour une durée de six mois. La commune restait cependant positive quant à l’exercice de sa fonction au sein de l’administration communale et souhaitait que la période d’essai supplémentaire lui permette de trouver définitivement ses marques à la direction de son service.

4) Le 16 janvier 2012 a eu lieu un nouvel EAD, également mené par
MM. C______ et D______.

5) Le 18 janvier 2012, le conseil administratif a nommé M. B______ fonctionnaire à compter du 1er février 2012. Son salaire progressait à la fonction IV, catégorie f/3 de l’échelle des traitements.

6) Le 26 juin 2012, M. B______ a une nouvelle fois été évalué, toujours par MM. C______ et D______.

7) Le 20 décembre 2012, la commune a accordé à l’intéressé la prime de
CHF 1'000.- prévue par le statut du personnel de la commune du 23 juin 1997 et entré en vigueur le 1er janvier 1998 (ci-après : le statut), le remerciant pour son travail.

8) Du 5 au 19 mars 2013, M. B______, suivi par le Dr E______, médecin généraliste, s’est trouvé en incapacité totale de travailler pour cause d’accident. Dès le 20 mars 2013, son incapacité de travail a été réduite à 50 %.

9) Du 25 au 27 mars 2013, l’intéressé, toujours suivi par le Dr E______, s’est à nouveau trouvé totalement incapable de travailler, cette fois pour cause de maladie. Son incapacité de travail a été réduite à 75 % à partir du 28 mars 2013, à 50 % à compter du 2 avril 2013 et à 20 % dès le 8 avril 2013.

10) Le 29 avril 2013, l’intéressé a suivi une première séance de « coaching » avec Mme F______, que cette dernière a qualifiée de constructive grâce à sa participation engagée et à son investissement personnel. Ils avaient ensemble reformulé l’objectif principal du « coaching », soit de « mieux comprendre les doléances reçues au regard de la mission décrite dans le cahier des charges (à construire) et des attentes formulées », au nombre de trois – assurer le suivi et l’avancement des dossiers en cours, reprendre la position de chef de service ainsi que clarifier les présences et les absences.

11) Du 10 mai au 14 juillet 2013, M. B______ a été mis en arrêt de travail total par la Dresse G______, psychiatre et psychothérapeute.

12) Le 28 juin 2013, la commune a imparti à M. B______ un délai au
10 juillet 2013 pour être entendu par écrit. Il avait requis avec insistance de la police municipale, dont il était le supérieur hiérarchique, des renseignements de nature confidentielle contenus sur une base de données réservée à la police et au Pouvoir judiciaire sur une ou des personnes avec lesquelles il était en conflit privé, ce qui était strictement interdit et passible de sanctions disciplinaire. Ses aptitudes à gérer son service s’étaient fortement détériorées ces derniers temps. Il n’avait malheureusement pas suivi le « coaching » comme prévu.

13) Le 8 juillet 2013, la commune a refusé, pour des raisons de calendrier, de reporter le délai au 15 juillet 2013, comme sollicité par l’intéressé par l’intermédiaire de son conseil, nouvellement constituée.

14) Le 10 juillet 2013, M. B______ s’est déterminé.

À son grand regret, depuis fin février 2013, ses problèmes de santé, de nature différente, qui s’étaient cumulés, avaient eu des répercussions sur sa capacité de travail et sur son aptitude à gérer son service dans les meilleures conditions. Il avait dû annuler la deuxième séance de « coaching » prévue pour le 13 mai 2013 en raison d’une rechute de son état de santé, lequel s’était amélioré depuis quelques jours, de sorte à pronostiquer une reprise du travail à temps partiel dès le 1er août 2013. Le suivi du « coaching » pourrait alors être repris, permettant son retour dans les meilleures conditions possibles.

Il avait eu recours à la base de données de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) à une seule occasion afin d’obtenir des informations relatives à une seule personne. Il pensait que la nature du renseignement recherché était de nature publique. Lors d’une discussion informelle le 15 avril 2013, M. C______ avait attiré son attention sur la teneur de la législation sur l’information du public, l’accès aux documents et la protection des données personnelles, qui excluait l’usage de ladite base de données à des fins privées. Il s’était alors engagé à ne plus y recourir pour des recherches exorbitantes à son activité professionnelle, promesse qu’il avait depuis lors respectée.

15) Par décision du 12 juillet 2013, la commune a infligé un blâme à l’intéressé, dont l’ignorance était intolérable, vu sa position, et qui n’avait pas eu la prudence de se renseigner avant de consulter la base de données de l’OCPM à des fins personnelles.

16) Le même jour, la commune a indiqué envisager la résiliation de l’engagement de M. B______ et lui a imparti un délai au 21 août 2013 pour exercer son droit d’être entendu, par écrit ou oralement.

Ses problèmes de santé n’étaient pas en cause. Il avait été constaté qu’il n’avait pas les compétences professionnelles pour tenir ses fonctions. Il n’assumait pas le suivi des projets liés à son service, faisait preuve d’un déficit de communication auprès de la hiérarchie, de ses subordonnés et des partenaires et avait des problèmes relationnels avec les partenaires de la mairie (écoles, gendarmerie, autres services de l’État tels que l’Hospice général). Les dossiers transmis au conseil administratif étaient mal préparés. Souvent, les dossiers n’étaient pas suivis en raison d’un manque flagrant de motivation. Il avait une forte incapacité à se remettre en question. Étaient relevés, à titre d’exemple, un oubli dans le cadre de l’élaboration du message « liaison à froid » pour les restaurants scolaires, le non-suivi du projet « café rencontre H______ » malgré la demande du conseiller administratif délégué, le manque de suivi du « projet I______ » secteur H______, ainsi que l’absence de suivi du dossier de l’office médico-pédagogique (ci-après : OMP).

17) Le 30 juillet 2013, la commune a informé M. B______ du fait qu’il était libéré de son obligation de travailler pendant la procédure administrative, dans le cas où son incapacité de travail viendrait à prendre fin totalement ou partiellement.

18) Dans sa détermination du 20 août 2013, l’intéressé a contesté la plupart des reproches formulés à son encontre et demandé à la commune la reprise de son activité et de la procédure de « coaching », ce qui lui permettrait de définir les objectifs à atteindre à court ou moyen terme et à l’issue de laquelle il y aurait lieu de procéder à une évaluation formelle de ses prestations. Il renonçait à contester le blâme, relativement sévère, afin de permettre la reprise la plus harmonieuse possible des rapports de service et le rétablissement d’un plein rapport de confiance.

Il n’existait encore aujourd’hui aucun cahier des charges formel concernant son poste. Son service incorporait à la fois le social et la jeunesse – lesquels, dans un bon nombre de communes, étaient regroupés dans des services indépendants l’un de l’autre –, et la sécurité – laquelle, dans la plupart des communes genevoises, même plus petites, formait un service en soi. Ses responsabilités étaient donc nombreuses et extrêmement différentes, ce qui rendait son poste passionnant mais également très exigeant. Il avait cependant les compétences de les assumer, comme le confirmait l’évaluation de juin 2012 et la prime octroyée en décembre 2012.

En dépit de ses difficultés personnelles survenues début février 2013 et de ses problèmes de santé, il avait tout fait pour continuer à faire face au mieux à ses obligations professionnelles et avait demandé à son médecin de retourner au travail au plus vite, à tort, vu le « burnout » qui s’en était suivi. La situation pendant les sept derniers mois n’était pas appropriée pour mesurer ses capacités professionnelles.

Des reproches avaient été formulés pour la première fois le 11 avril 2013, soit le fait qu’il se soit confié à certains collaborateurs ou collègues concernant ses problèmes personnels, le fait que certains de ses collaborateurs s’adressaient directement à M. C______ pour des questions de sa compétence et le manque de suivi de certains dossiers, sans plus de précisions, ce qui avait conduit à la mise en place du « coaching », avec pour but l’amélioration de la situation. Les faits reprochés ne pouvaient être nouveaux, seuls quelques jours s’étant écoulés entre la première séance de « coaching » et l’incapacité de travail du 8 mai 2013. Des faits conduisant à la mise en place d’un « coaching » ne pouvaient justifier un licenciement, dont les conditions n’étaient en tout état de cause pas remplies.

Le projet de message « liaison à froid » préparé, complet et bien présenté, avait été adopté en quelques minutes par le conseil administratif. Il avait suivi le projet « café rencontres H______ » et avait convoqué tous les intervenants concernés le 8 mai 2013, séance à laquelle il n’avait malheureusement pas pu assister en raison de son « burnout », survenu ce jour-là. Le « projet I______ » était un dossier particulier dans lequel il n’était pas aisé de comprendre les attentes et l’implication de M. C______. Il s’était occupé du dossier OMP jusqu’à son terme. Il était minutieux et préparait soigneusement ses dossiers. Il avait réussi à entretenir des relations cordiales et à communiquer régulièrement avec les différents chefs de services avec lesquels il était amené à collaborer, ses collaborateurs et ses supérieurs hiérarchiques. Il était possible, compte tenu du flux régulièrement tendu du service et de ses arrêts maladie, qu’il n’ait pas toujours disposé du temps que chacun de ses collaborateurs aurait souhaité se voir accorder. Cette situation ne pourrait toutefois qu’être améliorée une fois sa pleine et entière capacité de travail recouvrée. Il ne manquait aucunement d’intérêt et de motivation pour ses activités. Il était parfaitement en mesure de se remettre en question, comme le démontrait sa disponibilité pour suivre le programme de « coaching ».

19) Le 2 septembre 2013, le conseil administratif a informé M. B______ de l’ouverture d’une enquête administrative, à l’issue de laquelle, en cas de confirmation de l’incapacité de ce dernier de gérer son service, il envisageait la résiliation de son engagement. L’enquête serait menée par le conseil administratif in corpore.

Ses difficultés personnelles n’étaient pas en cause. Les insuffisances professionnelles étaient antérieures à l’année 2012. Sa nomination avait déjà été retardée de six mois en raison de doutes sur sa compétence. C’était principalement à partir de l’été 2012 qu’il avait progressivement semblé incapable de gérer son service et la situation semblait encore se détériorer.

20) Le 13 septembre 2013, M. B______ a persisté dans sa position et n’a sollicité l’audition d’aucun témoin.

Si ses supérieurs hiérarchiques avaient constaté une baisse de ses prestations durant le second semestre 2012, ils n’auraient pas manqué de prévoir une évaluation intermédiaire. On ne voyait pas comment la situation pouvait encore se détériorer alors qu’il avait été absent pour maladie, puis libéré de son obligation de travailler. Le conseil administratif ne pouvait pas pallier l’absence d’évaluation par la tenue soudaine d’une audience d’instruction. L’enquête ne répondait pas aux exigences d’objectivité et d’impartialité, les personnes entendues se trouvant prises dans un conflit de loyauté entre la volonté de décrire objectivement les faits et celle de ne pas déplaire aux élus de la commune.

21) Le 15 octobre 2013, le conseil administratif in corpore a procédé aux auditions prévues.

a. M. B______ a confirmé certains éléments déjà exposés et répondu aux reproches formulés par la commune.

La dernière séance de son service datait de septembre ou octobre 2012. La séance prévue pour janvier 2013 n’avait pas pu avoir lieu, pour cause de surcharge d’activités. Il était également responsable des séances hebdomadaires de coordination, notamment avec l’assistante sociale et la police municipale. La convention pour la petite enfance était presque terminée. S’agissant de l’établissement d’un règlement concernant l’octroi de subventions aux pompes funèbres, il avait trouvé un modèle d’une autre commune et souhaitait obtenir des informations supplémentaires de la personne en charge dans cette commune, raison pour laquelle les choses étaient restées en suspens. La police municipale avait dû finaliser le règlement concernant l’attribution de macarons aux enseignants pour les places de parking dans les écoles, sous sa supervision. Il n’avait pas été régulier dans la production des mémos faisant suite aux rencontres effectuées avec des partenaires de la mairie sur des dossiers en cours. Il avait toutefois eu des échanges oraux au gré des rencontres avec M. C______ à la mairie. Il entretenait de nombreux contacts avec les partenaires subventionnés du service, qu’il rencontrait fréquemment. Certains voulaient avoir un contact direct avec le conseil administratif. Il n’avait pas perçu qu’il y avait des prises de contact directes au-delà du nécessaire avec M. C______. S’il avait, après des discussions parfois tendues avec certains partenaires extérieurs, utilisé des termes tels que « il nous emmerde », il l’avait fait porte fermée dans les locaux du service avec des membres du service. Il n’avait jamais tenu de tels propos à l’extérieur. L’échéancier des subventions existait déjà à son arrivée et était géré par sa secrétaire, Mme J______. Il n’avait pas le sentiment qu’il y ait des problèmes à ce sujet. Il avait pris des initiatives, suivi sans reproche le dossier concernant les restaurants scolaires et s’était notamment impliqué dans le projet de mise en place d’une antenne OMP. Il avait fait des efforts pour prendre les contacts nécessaires, auprès d’environ deux cent cinquante personnes, afin de comprendre le fonctionnement des institutions communales et de celles de partenaires.

b. Selon M. D______, l’intéressé, qui percevait le deuxième plus haut salaire de la mairie, n’avait globalement pas répondu aux attentes. Certaines tâches avaient été retirées du service, soit avant son arrivée, soit pendant son activité. Des ressources avaient été amenées régulièrement. Il y avait des problèmes relationnels et des lacunes. Le collaborateur avait tendance à se réfugier auprès d’autres personnes concernant les informations à fournir au final et n’était jamais venu avec une planification des effectifs. Il y avait un problème dans la transmission des informations entre M. B______ et lui-même. Les relations avec des partenaires, tels que la gendarmerie ou des conseils d’établissement, passaient mal. Il y avait eu beaucoup de plaintes. M. C______ et lui-même en avaient parlé avec l’intéressé lors de ses évaluations et d’une réunion spécifique à ce sujet dans le courant de l’année 2012. Malgré les recommandations, M. D______ n’avait pas ressenti beaucoup de progrès. Selon son sentiment, M. B______ n’était pas la bonne personne à la bonne place. À deux reprises, avant les arrêts de travail, un membre du service de l’intéressé l’avait appelé pour l’informer que son supérieur n’était pas présent à un rendez-vous car il avait mal dormi. L’évaluation de juin 2012 avait visé à encourager l’intéressé.

c. Mme K______, assistante sociale au sein du service, a expliqué avoir elle-même eu l’idée des séances internes du service, lesquelles avaient ensuite été organisées de manière suffisamment fréquente, sans qu’elle sache comment cela avait été mis en place de manière concrète.
M. B______ lui avait transmis régulièrement toutes les informations nécessaires au bon fonctionnement du service et lui donnait les instructions utiles. Il avait également joué un rôle de protecteur. Il était la seule personne avec
elle-même à avoir les compétences métier au sein de la mairie. Il jouait bien son rôle de supérieur, en manifestant une présence et un intérêt. Il tenait compte des informations qu’elle lui donnait. Les échanges qu’ils avaient lui permettait d’avoir des idées parfois différentes de ses idées initiales et ainsi de faire avancer les dossiers. Elle était contente de l’interaction avec son chef de service. Elle n’avait pas constaté de problème. Elle savait que dans d’autres secteurs, un certain nombre de choses devaient être finalisées, ce qui pouvait prendre du temps. Tout était en ordre pour ses propres dossiers. Elle avait parfois entendu des plaintes d’autres membres du service, concernant plutôt des détails, les projets se réalisant. Elle n’avait pas constaté que M. B______ se serait exprimé de manière inadéquate.

d. Selon Mme J______, elle-même et Mme K______ avaient demandé la tenue de séances internes du service et M. B______ avait accepté. Elle préparait les ordres du jour et les soumettait à son responsable avant la convocation. Ces séances étaient l’occasion d’assurer une coordination. Le suivi des séances devait notamment être effectué par M. B______. Or, à l’instar de la convention avec les pompes funèbres, tel n’avait pas toujours été le cas. Dotée d’un fonctionnement plutôt autonome, elle savait jusqu’où elle pouvait aller sans l’intervention de son supérieur. M. B______ lui laissait cette latitude. Il était débordé et n’avait pas toujours le temps pour elle. Elle devait parfois s’imposer pour obtenir des réponses à ses questions. Elle aurait parfois souhaité plus de suivi ou d’interactions entre les membres du service. Il accordait du temps à d’autres collègues au travers des séances hebdomadaires, ce qui n’était pas le cas pour elle. Elle se sentait isolée. Il y avait une surcharge générale et récurrente de travail dans le service. Lorsque M. B______ était entré en fonction, elle lui avait transmis un certain nombre d’informations. Elle avait dû lui réexpliquer certaines choses, parfois oubliées. Sur certains sujets, les oublis étaient récurrents et sur d’autres, occasionnels. Elle avait par exemple dû lui expliquer plusieurs fois les éléments concernant les allocations d’écoles primaires, ce qui devenait lassant et contrariant. Elle avait l’impression de ne pas être écoutée. Ils avaient collaboré pour le premier budget, puis il avait préparé le deuxième seul, avec ses recommandations. Elle suivait l’ensemble des factures du service mais c’était lui qui sortait les comptes ligne par ligne pour les pointer ensemble. Elle avait dû lui faire part de problèmes qui se posaient à un moment donné. Il y avait alors eu deux réunions, l’une à deux, et l’autre avec Mme K______, dont le but visait à trouver des améliorations pour le fonctionnement du service. S’il arrivait à tout le monde de ressentir du mécontentement vis-à-vis des partenaires,
M. B______ avait eu à quelques reprises une réaction disproportionnée par rapport à cette frustration, à savoir des crises de colère forte, seul dans son bureau, adressées à elle-même ou à d’autres membres de l’équipe. Elle avait été interpellée par quelques partenaires, lesquels faisaient valoir que les dossiers n’avançaient pas et que l’intéressé n’était pas à l’écoute.

e. Selon M. L______, chef de poste de la police municipale, il n’y avait pas eu assez de séances internes du service. Les collaborateurs assuraient le suivi des décisions et les relances. M. B______ prenait peu d’initiatives et manquait de « leadership ». M. L______ avait demandé certains accès, qu’il avait mis six mois voire un an à obtenir, ce qui avait impliqué du retard dans le travail. Il recevait des instructions, mais concernant des interventions ponctuelles dans l’urgence, et non des instructions d’ordre général. Il n’y avait pas de cadre précis. Il préparait lui-même toute la vision générale de la sécurité et de la stratégie. Des décisions du conseil administratif étaient prises de manière erronée en raison d’informations non transmises à ce dernier par M. B______. Depuis l’arrivée de celui-ci, quatre ou cinq dossiers concernant les procédés de réclame s’étaient perdus, ce qui engendrait un surcroît de travail. Son chef n’avait pas les compétences nécessaires pour superviser le service des agents de police municipaux (ci-après : APM), ce dont ils s’étaient entretenus. Lui-même avait demandé à l’intéressé de faire remonter l’information à M. C______. En dépit d’une séance ayant eu lieu plus d’une année auparavant, rien n’avait ensuite changé. Il y avait eu des lacunes concernant notamment la transmission des dossiers, ce qui avait entraîné du retard dans la réponse aux demandeurs. Il y avait eu un manque d’anticipation et de planification générale, voire des fortes tensions avec un APM, qui n’avait finalement plus voulu voir M. B______, dont la façon de parler n’était pas correcte. La personne en charge du recrutement des APM à la Ville de Genève, avec laquelle il y avait une collaboration, avait été surprise de certains propos de l’intéressé. Un ancien APM avait également eu des problèmes de communication avec M. B______. Le règlement concernant les macarons était à son sens bâclé car M. B______ avait son idée et avait « verrouillé » le document. Il avait eu le sentiment de ne pas être écouté. Son responsable préparait très peu les séances, durant lesquelles il faisait à chaque fois une crise de nerfs, utilisant des termes vulgaires.

22) Dans ses observations du 1er novembre 2013, M. B______ a contesté les éléments exposés par M. D______ et M. L______ – lequel avait présenté de nombreux points incorrects et avait pu être influencé par sa volonté d’obtenir le poste de chef de service ou d’adjoint au chef de service –, et précisé s’être rendu disponible pour Mme J______ lorsque des situations exigeaient son intervention. Il a persisté à considérer qu’un licenciement serait infondé, reprenant et précisant son argumentation précédente.

Avant son arrivée, le poste de chef du service était occupé par une personne en incapacité de travail depuis plusieurs mois. Il avait une compétence solide en matière de protection des mineurs et s’était impliqué pour acquérir une connaissance des activités liées au domaine public et à la circulation routière. Si certaines tâches avaient été transférées à d’autres services, ce n’était pas pour le décharger mais pour des raisons d’organisation. C’était suite à une véritable planification des effectifs que des postes avaient été créés ou renforcés. Il avait le sentiment d’avoir développé d’excellentes relations avec de nombreux intervenants, même s’il avait été amené à prendre des décisions ou à soutenir des positions qui avaient déplu à certains. Il contestait avoir eu des problèmes de communication avec un APM. Il avait essayé au mieux de valoriser les personnes avec lesquelles il travaillait. S’il avait pu faire preuve d’un certain énervement, cela n’avait jamais été contre un employé de la mairie en particulier. Il avait reconnu cette faiblesse, sur laquelle il travaillait désormais. Il avait fait de nombreuses heures supplémentaires au service de la commune.

23) Par décision exécutoire nonobstant recours du 6 novembre 2013, le conseil administratif a résilié l’engagement de M. B______, avec effet au 28 février 2014, du fait de son comportement et au motif qu’il n’était pas capable d’assumer ses responsabilités hiérarchiques. Cette décision était prononcée en application des articles 13, 33 et 86 du statut.

Le conseil administratif l’a libéré de son obligation de travailler.

24) Par courrier du 14 novembre 2013, M. B______ a interpellé le conseil administratif. Il envisageait de recourir contre cette décision, mais il existait une contradiction entre la voie de droit mentionnée dans celle-là et celle prévue par le statut. Ce dernier prévoyait en effet, en cas de licenciement, un recours auprès de la commission de préavis (ci-après : la commission), à savoir une autorité de recours au sens de l’art. 42 du statut.

25) Le 18 novembre 2013, le conseil municipal de la commune a adopté un nouveau statut du personnel (ci-après : le nouveau statut), lequel est entré en vigueur le 1er février 2014.

26) Le 20 novembre 2013, le conseil administratif a répondu que la voie du recours à la commission était caduque. Seule celle du recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) était ouverte.

27) Par acte posté le 9 décembre 2013, M. B______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative, concluant préalablement à la restitution de l'effet suspensif au recours, et principalement à la transmission du recours à la commission.

28) Le 31 janvier 2014, la chambre administrative a déclaré irrecevable le recours interjeté le 9 décembre 2013 par M. B______ (ATA/51/2014 du
31 janvier 2014). Elle a transmis son recours à la commune de A______ afin qu’elle constitue diligemment la commission et que cette dernière instruise et juge l’affaire en première instance.

29) Le 10 mars 2014, le président du conseil municipal de la commune a informé M. B______ que dans sa séance du 3 mars 2014, ledit conseil avait tiré au sort deux de ses membres pour siéger à la commission. Cette commission était composée de cinq membres, soit le président du conseil municipal qui la présidait, de deux conseillers municipaux et deux personnes au bénéfice du statut de fonctionnaire de la commune choisies par le fonctionnaire.

30) Le 26 mars 2014, M. B______ a informé le président du conseil municipal qu’il n’avait pas de motif de récusation à faire valoir et qu’il avait choisi les deux personnes qu’il souhaitait voir siéger au sein de la commission.

31) Le 27 mai 2014, la commission a rejeté la demande de restitution de l’effet suspensif au recours déposée par M. B______ le 9 décembre 2013.

32) Le 4 décembre 2014, la commission a tenu une audience de comparution personnelle. Outre M. B______, elle a entendu M. C______, lequel représentait la commune.

33) Le 21 janvier 2015, la commission a entendu Mme M______ en qualité de témoin.

Elle était conseillère sociale en insertion professionnelle et travaillait pour la commune de A______. M. B______ était son supérieur hiérarchique. Elle était entrée en fonction en décembre 2011, à 50 %, et avait été bien accueillie. À son arrivée, elle avait reçu beaucoup d’informations, la mairie ayant un fonctionnement complexe pas toujours facile à comprendre. Depuis le 1er mars 2014, suite au départ de son supérieur, son taux d’activité était passé à 80 % « car les besoins sont là ».

M. B______ dirigeait son équipe par des réunions régulières de service et des rencontres. Elle le voyait chaque semaine et savait qu’il avait également des réunions avec l’assistante sociale (Mme K______). Il envoyait des courriels et communiquait par les autres moyens usuels. Les séances étaient fixées d’entente entre elle et son supérieur. Ces séances étaient très régulières. Pour les séances de service, il y avait un ordre du jour et un procès-verbal. Pour les séances de coordination de la N______ (antenne communale d’insertion socio-professionnelle), les séances étaient plus informelles.

M. B______ connaissait bien le système social genevois. Elle recevait de lui les instructions et le soutien nécessaires. Il savait écouter et il répondait aux questions qu’elle lui posait. Si elle avait constaté des lenteurs, plutôt que des oublis, les échéances étaient respectées. Beaucoup de choses fonctionnaient et s’il y avait quelques manquements, tel était aussi le cas dans d’autres services. Elle ne pouvait dissocier ces manquements du fonctionnement général de la mairie.

Les relations de travail au sein du service étaient bonnes. Le service était toutefois très éclaté. Le fonctionnement, hérité du passé, était très individualisé. Il manquait peut-être une gestion globale, chacun ayant ses propres documents sur le réseau. Mme K______ avait ses documents et elle les siens, sans liens entre eux. Le service s’était toutefois peu à peu professionnalisé.

Les relations avec les partenaires du service étaient bonnes. Elle n’avait rien de particulier à en dire du fait qu’elle travaillait la plupart du temps hors du service (la N______ étant décentralisée). Elle n’avait pas le souvenir que
M. B______ se soit emporté sur son lieu de travail, envers quelqu’un de la mairie ou quelqu’un de l’extérieur.

Le contexte, en raison d’une maladie grave de la cheffe de service et la gestion ad intérim assurée par une collaboratrice, avait certainement complexifié l’entrée en fonction de M. B______. Les problèmes de santé de ce dernier avaient eu une influence sur son travail. Elle avait constaté chez lui des problèmes de mémoire ou de concentration. Son énergie pour donner des impulsions était émoussée. Elle avait constaté cela dans les derniers mois avant le départ de son responsable.

Il ressort du procès-verbal que Mme M______ a fait précéder de silences certaines de ses réponses suite aux questions portant sur le respect par
M. B______ des échéances et sur le fait de savoir s’il s’était emporté sur son lieu de travail.

34) Le 27 février 2015, la commission a rendu une décision dont le dispositif était rédigé comme suit :

« La commission de préavis prononce :

1. Admet, dans la mesure où il est recevable, le recours de M. B______ du 9 décembre 2013,

2. Annule la décision de résiliation de l’engagement du prénommé du
6 novembre 2013,

3. Constate que M. B______ n’est plus fonctionnaire de la ville de A______,

4. Condamne la ville de A______ au versement d’un montant de 232’500.- francs à M. B______ à titre de compensation,

( ) ».

Au vu des éléments du dossier, elle n’était « pas convaincue de l’incompétence » de M. B______ au poste de chef de service.

35) Par acte déposé le 16 avril 2015, la commune, représentée par son conseil administratif, a recouru contre cette décision auprès de la chambre administrative. Elle a conclu, « sous suite de dépens », à son annulation et à la confirmation de sa décision du 6 novembre 2013.

Elle a fait grief à la commission d’avoir violé l’art. 86 du statut et l’art. 61 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985
(LPA - E 5 10), d’avoir constaté de manière inexacte les faits pertinents et d’avoir violé l’art. 48 let. r de la loi sur l’administration des communes du 13 avril 1984 (LAC - B 6 05). En appliquant par analogie la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05), la commission avait violé les
art. 86 et 38 à 42 du statut.

Ce recours a été enregistré sous la cause n° A/1232/2015.

36) Par acte déposé le 16 avril 2015, M. B______ a également recouru contre cette décision auprès de la chambre administrative. Il a conclu « sous suite de dépens », en tant que de besoin, à la confirmation de l’annulation de son licenciement et au constat qu’il était toujours fonctionnaire de la commune et que, dès lors, il avait toujours droit à son traitement.

La commission avait, à raison, considéré que son licenciement n’était pas justifié. Elle avait annulé la décision de licenciement sans en tirer la conséquence qui s’imposait, soit le constat qu’il était toujours fonctionnaire au sein de la commune. La LPAC n’était pas applicable et le statut, lequel ne renvoyait pas à la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220), ne contenait aucune lacune susceptible d’être comblée.

Divers événements étaient intervenus au sein de la commune après le prononcé de son licenciement. Fin novembre 2013, la commune avait publié sur son site une annonce selon laquelle elle était à la recherche d’un responsable du service social et jeunesse uniquement, l’aspect sécurité des tâches qui incombait au service qu’il dirigeait en étant soustrait. La presse locale avait dénoncé des dysfonctionnements au sein de la mairie de la commune, mis en cause le comportement de M. D______ et révélé la relation personnelle entre
M. C______ et l’une des personnes entendues comme témoin dans la procédure le concernant. Mme J______ avait par ailleurs quitté le service, lequel s’était trouvé amputé de certaines tâches. Elle avait en effet été déplacée dans un autre département emportant avec elle des tâches qui relevaient jusqu’alors du service.

Ce recours a été enregistré sous la cause n° A/1234/2015.

37) Le 22 mai 2015, la commune a répondu au recours de M. B______. Elle a principalement conclu à son irrecevabilité, subsidiairement à son rejet.

38) Ce même 22 mai 2015, M. B______ a répondu au recours de la commune. Il a principalement conclu à son irrecevabilité, subsidiairement à son rejet.

Dans le courrier qui accompagnait sa réponse, il a indiqué qu’il souhaitait, à titre préjudiciel, voir la question de la recevabilité du recours de la commune être tranchée avant une éventuelle jonction des causes.

39) Le 16 juin 2015, le juge délégué a ordonné la jonction des causes
nos A/1232/2015 et A/1234/2015, sous le n° A/1232/2015.

40) Le 26 juin 2015, M. B______ a commenté la réponse de la commune du 22 mai 2015.

41) Le 25 juillet 2015, la commission a transmis son dossier. Elle n’avait pas d’observation à formuler.

42) Le 11 septembre 2015, M. B______ a persisté dans ses arguments et conclusions.

43) Le 14 septembre 2015, la commune a également persisté dans ses conclusions.

44) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

45) Pour le reste, les arguments des parties seront repris, en tant que de besoin, dans la partie en droit ci-après.

EN DROIT

1) La chambre administrative examine d'office sa compétence, qui est déterminée par la loi et ne peut être créée par accord entre les parties (art. 11 al. 1 et 2 LPA ; ATA/326/2016 du 19 avril 2016 consid. 1 et les arrêts cités).

2) La compétence de la chambre administrative résulte de l’art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05). La chambre administrative est ainsi l’autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (al. 1). Le recours est ouvert contre les décisions des autorités et juridictions administratives au sens des art. 4, 5, 6 al. 1 let. d et 57 LPA, sauf exceptions prévues par la loi (art. 132 al. 2 LOJ) ou lorsque le droit fédéral ou une loi cantonale prévoit une autre voie de recours (art. 132 al. 8 LOJ).

3) À teneur de l’art. 7 LPA, ont qualité de partie les personnes dont les droits ou les obligations pourraient être touchés par la décision à prendre, ainsi que les autres personnes, organisations ou autorités qui disposent d'un moyen de droit contre cette décision.

4) Selon l’art. 60 al. 1 LPA, ont qualité pour recourir les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée (let. a), toute personne qui est touchée directement par une loi constitutionnelle, une loi, un règlement du Conseil d’État ou une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce que l’acte soit annulé ou modifié (let. b), le Conseil d’État, s’agissant de décisions émanant des organes des communes, établissements et corporations de droit public, en tant qu’il allègue un conflit de compétence (let. c), les organes compétents des communes, établissements et corporations de droit public lorsqu’ils allèguent une violation de l’autonomie que leur garantit la loi et la constitution (let. d), ou encore les autorités, personnes et organisations auxquelles la loi reconnaît le droit de recourir (let. e).

La jurisprudence a précisé que les let. a et b de la disposition précitée doivent se lire en parallèle : ainsi, le particulier qui ne peut faire valoir un intérêt digne de protection ne saurait être admis comme partie recourante, même s’il était partie à la procédure de première instance (ATA/1059/2015 du 6 octobre 2015 consid. 3b et les nombreux arrêts cités).

5) La recevabilité du recours déposé le 16 avril 2015 par la commune de A______, représentée par son conseil administratif, est contestée par
M. B______. Ce dernier estime en effet qu’une autorité, en l’espèce le conseil administratif, relevant d’une certaine collectivité ne peut pas agir contre une autorité, en l’espèce la commission, relevant de la même collectivité.

a. L’art. 6 LPA prévoit que sont réputées juridictions administratives le Tribunal administratif de première instance (let. a), la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (let. b), la chambre administrative de la Cour de justice
(let. c), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (let. d), le Conseil d’État lorsque le droit fédéral ou cantonal le désigne comme autorité de recours (let. e), les autres autorités que le droit fédéral ou cantonal charge du contentieux administratif en les désignant comme autorités de recours (let. f).

L’art 107 al. 2 LAC, lequel a repris à l’identique le libellé de l’art. 86 A al. 2 après des modifications de la LAC entrées en vigueur le 21 novembre 2015, prévoit que le statut du personnel communal peut instituer une instance de recours spéciale pour connaître des litiges relatifs à son application.

La commune de A______ a fait usage de cette possibilité. L’art. 42 du statut prévoit en effet que le fonctionnaire peut recourir contre la sanction qui lui est infligée auprès de l’autorité de recours, laquelle est la commission si la sanction infligée est une réduction du traitement pour l’année à venir, le licenciement ou encore le licenciement immédiat. S’agissant du nouveau statut entré en vigueur le 1er février 2014, il n’est pas applicable au cas d’espèce. En effet, si ce nouveau statut prévoit que les membres du personnel y sont soumis dès son entrée en vigueur, il ne contient aucune règlementation particulière concernant les dispositions procédurales. Dans la mesure où la décision de licenciement a été prononcée alors que le statut (du 23 juin 1997) était en vigueur et que tel était toujours le cas lorsque M. B______ a déposé son premier recours contre cette décision, il convient d’appliquer le statut (du 23 juin 1997) pour résoudre le présent litige (ATA/54/2014 du 31 janvier 2014 consid. 9c).

b. La commune a la personnalité morale mais tel n’est pas le cas des autorités : ces dernières ne peuvent donc pas en tant que telles ester en justice ; seule le peut la collectivité elle-même. Il en découle qu’une autorité relevant d’une certaine collectivité ne peut pas agir contre une autre autorité relevant de la même collectivité : c’est l’exclusion de principe des conflits juridictionnels
intra-organiques (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3ème éd., 2011, p. 754 n. 5.7.3.1 a. et les arrêts cités). Seules sont légitimées les collectivités publiques en tant que telles et non les autorités ou branches de l’administration dépourvues de la personnalité juridique : en effet, le régime des voies de recours ne saurait permettre aux différents organes d’une collectivité donnée de faire trancher leurs divergences de vues par voie juridictionnelle
(ATF 123 II 542 consid 2e in RDAF 1998 I 551).

c. Si au vu de ce qui précède, la recevabilité du recours de la commune, représentée par son conseil administratif, n’est pas évidente, il convient de tenir compte de ce qui suit.

Dans un arrêt qui concernait le recours déposé auprès de lui par une autorité cantonale, le Tribunal fédéral a eu l’occasion de préciser que la jurisprudence concernant la recevabilité du recours en matière de droit public retient que la collectivité publique, en tant qu’employeur, n’agit certes pas au même titre qu’un particulier dans une contestation découlant de rapports de travail régis par le droit public, mais qu’elle a néanmoins un intérêt spécifique digne de protection à l’annulation ou à la modification d’une décision d’un tribunal favorable à son agent. Dans ce domaine, un canton a donc la qualité pour recourir. Selon la jurisprudence toutefois, conformément à la légitimation fondée sur l’art. 89
al. 1 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), seule une collectivité publique comme telle (voire une autre personne morale de droit public) peut se prévaloir de cette disposition, mais pas une autorité ou une branche de l’administration dépourvue de la personnalité juridique, à moins d’avoir une procuration expresse lui permettant d’agir au nom de la collectivité publique en cause. Peu importe à cet égard que l’autorité ait ou non rendu la décision administrative à l’origine de la procédure. Les corporations de droit public sont en principe représentées seulement par leurs autorités supérieures, en l’occurrence le Conseil d’État dudit canton (ATF 141 I 253 consid. 3.2 et 3.3).

Le recours judiciaire est le recours adressé à une juridiction administrative, soit une autorité indépendante de l’administration, extérieure à celle-ci. Il peut s’agir d’un tribunal au sens strict, appartenant au pouvoir judiciaire, ou d’une commission de recours, si celle-ci est véritablement indépendante, tant dans sa composition que dans le fait qu’elle ne peut recevoir d’instructions de l’exécutif (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 427
n. 1284).

d. Dans le cas d’espèce, en recourant auprès de la chambre de céans contre la décision de la commission, la commune a agi en sa qualité d’employeur. Son recours a été déposé par le conseil administratif, lequel a agi dans le cadre des compétences que lui reconnaît le droit cantonal. Selon l’art. 48 let. a LAC, le conseil administratif est en effet compétent pour administrer la commune ainsi que, selon l’art. 48 let. n LAC, pour défendre les intérêts de la commune dans les procès qu’elle a ou qui lui sont intentés et de prendre les mesures nécessaires.

Pour le reste, la commission est une autorité indépendante du conseil administratif et du conseil municipal. Comme l’a déjà relevé la chambre de céans, le président du conseil municipal et les deux conseillers municipaux qui en font partie, ne sont pas dans ce cadre des émissaires du conseil municipal qui opineraient selon les instructions de ce dernier, mais des membres d’une autorité devant conserver l’impartialité prévue par les art. 15 ss LPA (ATA/51/2014 précité consid. 8). Cette commission compte par ailleurs en son sein deux membres choisis par le fonctionnaire parmi le personnel communal.

Le recours de la commune, dont il faut admettre qu’elle est partie à la procédure et qu’elle a un intérêt digne de protection à faire valoir, sera en conséquence déclaré recevable, celui-ci ayant au surplus été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 LOJ et art. 62 al. 1 let. a LPA).

e. Le 22 mai 2015, M. B______ a, sans y conclure formellement, exprimé le souhait de voir la question de la recevabilité du recours de la commune être tranchée à titre préjudiciel avant la jonction des causes. Cette requête est devenue sans objet au vu de ce qui précède.

6) Dans sa réponse du 22 mai 2015, la commune conclut principalement à l’irrecevabilité du recours de M. B______.

a. Elle expose que ce dernier, assisté d’une avocate, a pris une conclusion tendant à la confirmation de l’annulation de son licenciement par la commission et que, ce faisant, il a conclu, en premier lieu, à la confirmation de la décision litigieuse. Elle relève que M. B______ a, dans le même temps conclu, en second lieu, à ce qu’il soit constaté qu’il était toujours fonctionnaire de la commune et qu’il avait toujours droit à son traitement. Cette dernière conclusion devait être qualifiée de constatatoire, ce qui rendait normalement son recours irrecevable, d’autant qu’il ne ressortait pas clairement de ce recours qu’il sollicitait l’annulation de la décision attaquée.

Elle soutient ensuite que M. B______ ne s’était pas prononcé clairement, ni dans ses conclusions, ni dans son écriture, sur le sort du chiffre 3 du dispositif de la décision attaquée, de sorte qu’on ne comprenait pas ses fins avec certitude. De plus, il ne se positionnait pas sur le chiffre 4 de ce même dispositif. On pouvait déduire de l’absence d’une détermination claire sur ces deux éléments du dispositif, que M. B______ recherchait cumulativement la confirmation de l’annulation de son licenciement, sa réintégration en tant que fonctionnaire pour percevoir son traitement et le versement en sa faveur d’une indemnité.

Tant les conclusions de M. B______ que le reste de ses écritures empêchaient la chambre de céans et la commune de comprendre les fins du recourant. L’absence de conclusions suffisantes ne pouvant être réparée que dans le délai de recours, celui de M. B______ devait être déclaré irrecevable.

b. Selon l’art. 65 LPA, l’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (al. 1). L’acte de recours contient également l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. À défaut, la juridiction saisie impartit un bref délai au recourant pour satisfaire à ces exigences, sous peine d’irrecevabilité (al. 2).

Les conclusions prises ont pour effet de délimiter l’objet du litige,
c’est-à-dire le rapport juridique à raison duquel le recourant élève ses prétentions. Sauf règle contraire, l’autorité saisie ne pourra donc pas sortir du cadre ainsi tracé par le recourant lui-même pour lui allouer quelque chose à quoi il n’a pas prétendu – application de la maxime de libre disposition. De son côté, le recourant ne peut prendre de conclusions qui sortent du cadre défini par l’objet de la procédure, lequel est le rapport juridique fixé par la décision contestée : seules les prétentions tranchées par la décision dans son dispositif pourront être réexaminées. Le recourant n’a par ailleurs pas la possibilité de se limiter à des conclusions en constatation s’il a la faculté de prendre des conclusions formatrices (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, op. cit., p. 807 s. n. 5.8.1.4).

c. En l’espèce, l’objet du litige porte sur la conformité au droit de la décision de la commission du 27 février 2015, laquelle a annulé la décision de résiliation de l’engagement de M. B______ prononcée par le conseil administratif le
6 novembre 2013, constaté qu’il n’était plus fonctionnaire de la commune et condamné cette dernière au versement d’un montant de CHF 232'500.- à titre de compensation.

M. B______ a désigné, sur la page de garde de son recours, quelle est la décision attaquée. Il a versé cette pièce à la procédure avec son recours. Ce dernier contient un exposé des motifs et un argumentaire développés sur plusieurs pages.

Les conclusions de M. B______ visent à confirmer l’annulation de son licenciement, puis à constater qu’il est toujours fonctionnaire de la commune et qu’en conséquence il a toujours droit à son traitement. De telles conclusions demeurent dans le cadre défini par l’objet de la procédure et du dispositif de la décision litigieuse dans la mesure où ce dispositif porte précisément sur l’annulation de la décision de licenciement le concernant et sur les conséquences de cette annulation, le recourant contestant ce dernier point. Il estime en effet que la commission n’a pas tiré de cette annulation la conséquence qui s’imposait, soit le constat qu’il est toujours fonctionnaire au sein de la commune (recours de
M. B______ du 16 avril 2015, p. 33 ch. 9).

Il est vrai que M. B______ n’a pas déposé de conclusion portant sur le chiffre 4 du dispositif de la décision litigieuse, à savoir le versement d’un montant compensatoire en sa faveur. On ne voit toutefois pas pourquoi il aurait dû procéder de la sorte, un montant compensatoire n’ayant plus de sens si, comme il y conclut, la chambre de céans devait constater qu’il est toujours fonctionnaire de la commune. Les développements de la commune prêtant à M. B______ l’intention d’obtenir cumulativement la confirmation de l’annulation de son licenciement, sa réintégration en tant que fonctionnaire pour percevoir son traitement et le versement d’un montant compensatoire tombent à faux, rien dans le recours déposé par M. B______ ne permettant de penser qu’il prétendrait à un tel cumul.

S’agissant enfin de la conclusion de M. B______ portant sur le constat qu’il est toujours fonctionnaire de la commune, elle découle de sa première conclusion : dès lors qu’il a d’abord conclu à la confirmation de l’annulation de son licenciement, il était fondé à contester les conséquences que la commission avait tiré de cette annulation et à conclure à une autre conséquence, en l’espèce au constat qu’il est toujours fonctionnaire de la commune.

Les fins du recourant sont dès lors claires et ses conclusions sont recevables.

d. Pour le reste, il n’est pas contesté que M. B______ est partie à la procédure et qu’il a un intérêt digne de protection à faire valoir. Son recours ayant été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, il est recevable.

7) La commune fait tout d’abord grief à la commission d’avoir violé l’art. 86 du statut. Dans un deuxième grief, la commune reproche à la commission d’avoir violé l’art. 61 al. 2 LPA.

a. Selon la commune, il ne revenait pas à la commission d’examiner si
M. B______ était dans la capacité ou non d’exercer ses fonctions. En tant qu’autorité judiciaire de recours, elle devait vérifier si le statut avait été correctement appliqué et si les droits de procédure du fonctionnaire avaient été respectés par le conseil administratif. En se substituant à ce dernier dans la question de savoir si le fonctionnaire était ou non dans la capacité ou non de gérer son service, elle avait violé l’art. 86 du statut.

La décision de la commission était d’autant plus étonnante qu’elle se fondait, en se substituant au conseil administratif, sur les EAD effectués par ce dernier. S’agissant des EAD, celui du 6 juillet 2011 n’avait pas été favorable au fonctionnaire et il n’avait pas permis de le confirmer à son poste. Une prolongation de la période d’essai de six mois avait d’ailleurs été décidée. Lors de l’évaluation suivante, intervenue le 16 janvier 2012, la commune n’avait eu le choix que de procéder à la nomination ou de mettre un terme aux rapports de service. Ne voulant pas se résoudre à cette possibilité, elle avait insisté sur les améliorations attendues et essayé d’encourager son fonctionnaire. Elle ne devait dès lors pas être punie d’avoir voulu donner une chance à M. B______.

L’évaluation du 26 juin 2012 constituait une appréciation ponctuelle visant une nouvelle fois à encourager M. B______. Les objectifs fixés consistaient en des tâches ordinaires relevant de son cahier des charges et non en de nouveaux projets. Ceci démontrait que des améliorations « devaient encore avoir lieu ». Au contraire de ce qui était attendu, ses prestations avaient commencé à se dégrader fortement à partir de la rentrée 2012.

La commission n’avait en outre pas tenu compte des témoignages recueillis pendant l’enquête administrative ou devant elle. Enfin, elle avait elle-même admis que le fonctionnaire avait rencontré des problèmes puisqu’elle avait renoncé à ordonner sa réintégration.

Enfin, en sa qualité de juridiction administrative, la commission n’était pas compétente pour apprécier l’opportunité de la décision de licenciement portée devant elle. Elle n’avait pas examiné si le conseil administratif avait excédé son pouvoir d’appréciation ou mal apprécié les faits. Elle avait au contraire recherché elle-même si le fonctionnaire avait été ou non compétent et statué en opportunité.

b. L’art. 86 du statut prévoit que le conseil administratif peut résilier l’engagement de tout fonctionnaire dont le comportement, l’inaptitude ou l’incapacité, attestés lors des entretiens annuels d’appréciation, justifient son renvoi. La procédure prévue aux articles 38 à 42 du statut est applicable par analogie (al. 1). Cette résiliation peut être remplacée par la démission du fonctionnaire si celui-ci consent à la donner après y avoir été invité (al. 2). Demeure réservée, selon la gravité des motifs, la procédure de licenciement immédiat pour justes motifs (al. 3).

Les EAD sont définis à l’art. 36 du statut. Chaque année, les fonctionnaires ont un entretien individuel avec leur responsable hiérarchique. Cet entretien permet de faire le bilan de la période écoulée au niveau des connaissances, compétences et efficacité professionnelles, et comportement au travail. Il sert également à déterminer ensemble les axes de développement sur lesquels les collaborateurs porteront leurs efforts durant la période à venir. Sur la base de ces entretiens périodiques, l’administration cherche la meilleure adéquation entre ses besoins en personnel et les souhaits d’évolution des fonctionnaires, en procédant aux changements d’affectations nécessaires et réalisables.

Les art. 38 à 42 du statut traitent des sanctions. Le conseil administratif a seul la compétence de prononcer le licenciement (art. 39 ch. 5) après qu’une enquête ait été ordonnée et effectuée par le même conseil administratif (art. 40).

À teneur de l’art 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a) ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Selon l’art. 61
al. 2 LPA, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi. La question de l’opportunité ne se pose qu’une fois que celle de la conformité au droit est résolue positivement (Thierry TANQUEREL, op. cit, p. 172 n. 519).

8) Dans le cas d’espèce, la décision litigieuse énumère tant les dispositions légales que statutaires pertinentes, en particulier l’art. 86 du statut, de même que les faits qui ont permis à la commission de parvenir à sa conclusion. Cette décision fait ainsi état du cahier d’ouverture du poste de chef de service du
4 février 2010 auquel a répondu le recourant, de son contrat de travail, des EAD des 6 juillet 2011 et 16 janvier 2012, de la décision de la commune de prolonger la période d’essai du recourant du 8 juillet 2011, de la décision de la commune de nommer le recourant au statut de fonctionnaire du 18 janvier 2012, de la fiche d’appréciation du 26 juin 2012, de la décision de la commune d’attribuer au recourant une prime de CHF 1'000.-, ou encore de l’ensemble des certificats médicaux présentés par le recourant dès le 5 mars 2013. Cette décision fait par ailleurs état des témoignages recueillis durant l’enquête administrative et devant la commission.

Dans sa décision litigieuse, la commission a mentionné « les notes » que les supérieurs de M. B______ avaient attribué aux différents critères évalués dans les EAD. Elle en a déduit « que, partant, les évaluations effectuées [ ] ne démontr[aient] pas une incapacité, mais tout au plus des difficultés ciblées ». Ce faisant, elle a donc conclu que, contrairement à la condition posée par l’art. 86
al. 1 du statut, ces EAD n’attestaient pas d’un comportement, d’une inaptitude ou d’une incapacité justifiant le renvoi du recourant. Dans sa décision du 27 février 2015, la commission n’a donc pas jugé en opportunité mais conclu à une violation du droit par le conseil administratif, en l’occurrence de l’art. 86 du statut. Certes, les termes utilisés par la commission, à savoir qu’elle n’était « pas convaincue de l’incompétence du recourant au poste de chef du service » peuvent prêter le flanc à la critique. Il faut toutefois se souvenir que la commission était composée de personnes qui n’étaient pas nécessairement des professionnels du droit. La décision litigieuse fait néanmoins expressément état d’une résiliation contraire au droit dans le considérant portant sur le montant de l’indemnité due à
M. B______ (décision litigieuse, p. 7, consid. 6).

9) Il convient donc, à ce stade, de vérifier si le conseil administratif a ou non violé l’art. 86 du statut, étant rappelé qu’outre cette disposition il a fondé sa décision de résiliation de l’engagement du 6 novembre 2013 sur les art. 13 et 33 du statut.

a. L’art. 13 du statut prévoit que l’attitude des fonctionnaires vis-à-vis de la population doit toujours être exemplaire et empreinte de courtoisie. De même, ils entretiennent des relations dignes et marquées de respect avec les autres membres du personnel, quelle que soit leur position hiérarchique et leur fonction.

Selon l’art. 33 du statut, les fonctionnaires qui, selon l’organigramme établi par le conseil administratif, assument des responsabilités hiérarchiques doivent donner à leurs collaborateurs toutes les instructions utiles à leurs tâches, et les motiver à en assurer la réalisation ; déterminer l’organisation du travail, y compris les horaires journaliers adaptés à la bonne marche du service ; informer régulièrement le conseiller administratif responsable et le secrétaire général sur les activités du service, les congés et vacances accordés au personnel ainsi que le bilan des entretiens d’appréciation.

b. Le premier EAD a eu lieu le 6 juillet 2011. Sous la rubrique « appréciation qualitative du responsable », cinq critères ont été jugés « ok pour la fonction ». Deux critères, à savoir volume des prestations et comportement, ont été jugés à cheval entre « insuffisant » et « ok pour la fonction ». M. B______ avait une bonne connaissance des champs social et sécurité et avait progressé dans la pratique. D’autres domaines, tel que le budget, restaient à acquérir. Il était « consciencieux d’assurer la qualité » et transmettait mieux l’information aux partenaires. Il devait clarifier la répartition du volume des prestations dans le service et intégrer le volume des prestations budgétaires liées aux partenariats. Sa capacité d’initiative et sa flexibilité étaient en bonne progression. Sa relation avec le conseil municipal était bonne, mais il devait améliorer sa communication avec les partenaires sociaux.

Au vu notamment de l’importance du poste occupé par M. B______, la commune a décidé, en juillet 2011, de reporter sa nomination de six mois.

Un nouvel EAD a eu lieu le 16 janvier 2012. Sous la rubrique « appréciation qualitative du responsable », tous les critères, à savoir connaissances professionnelles, qualité et volume des prestations, initiative/flexibilité, comportement/coopération, organisation du travail et qualité de direction ont été jugés à cheval entre « ok pour la fonction » et « point fort du collaborateur ». Les connaissances professionnelles de M. B______ progressaient. Il faisait son travail consciencieusement et avec précision, avait atteint son rythme de croisière et avait une meilleure répartition interne du volume des prestations. La progression depuis la dernière évaluation était effective et l’exercice de la fonction était satisfaisant.

Le conseil administratif a nommé M. B______ fonctionnaire à compter du 1er février 2012.

M. B______ a ensuite été évalué le 26 juin 2012. Les critères qualité et volume des prestations, comportement avec le public et avec la hiérarchie, engagement/motivation/développement, gestion du personnel/délégation, planification/organisation, information/communication, prise de décision et gestion de projets étaient jugés « bon ». Le critère connaissances professionnelles était jugé à cheval entre « bon » et « excellent ». Enfin, trois critères étaient jugés à cheval entre « satisfaisant » et « bon », à savoir l’autonomie/flexibilité, l’initiative/esprit d’entreprise et l’esprit d’équipe. La stabilité en tant que chef de service par rapport à la mairie et en externe était acquise et la prise de rôle était reconnue.

La commune a accordé à l’intéressé une prime de performance (art. 47 du statut) de CHF 1'000.- en le remerciant pour son travail.

Aucun autre EAD n’a eu lieu avant que la commune n’informe
M. B______, le 12 juillet 2013, de son intention de résilier son engagement, puis qu’elle décide de le licencier.

c. Au vu de ce qui précède, pas une seule fois un seul des critères soumis à évaluation n’a été jugé insuffisant. Les critères les plus mal notés figuraient dans la première EAD de juillet 2011 où ils ont été jugés à cheval entre « insuffisant » et « ok pour la fonction ». M. B______ en a tenu compte positivement puisqu’à teneur de l’EAD suivant de janvier 2012, ces mêmes critères ont été jugés à cheval entre « ok pour la fonction » et « point fort du collaborateur ». Il ressort pourtant de la décision de résiliation de l’engagement du 6 novembre 2013 prononcée par le conseil administratif, que M. B______ n’aurait pas été capable d’assumer ses responsabilités hiérarchiques (art. 33 du statut). Il aurait eu des réactions disproportionnées, des problèmes de communication à l’interne et à l’extérieur de l’administration et se serait montré colérique, contrevenant ainsi à l’art. 13 du statut. Ladite décision mentionne également une gestion insuffisante de différents projets, en raison d’un manque de compétences et de motivation de la part de M. B______, ainsi que de nombreuses lacunes dont son service aurait souffert. Il aurait en outre fait preuve d’un manque d’anticipation dans la planification des besoins du service. Or, de tels manquements ne figurent pas dans les EAD dont le contenu a été détaillé ci-dessus.

d. La recourante fait valoir que lorsqu’a eu lieu l’EAD du 16 janvier 2012, à l’issue des six mois de prolongation de la période d’essai, la commune n’avait le choix que de procéder à la confirmation de la nomination ou de mettre un terme aux rapports de service. Elle explique n’avoir pas voulu se résoudre à cette possibilité et, souhaitant encourager M. B______, aurait mis l’accent sur les améliorations encore attendues. Ces explications ne sont pas pertinentes. Même à supposer que M. B______ n’aurait pas été en mesure d’effectuer certaines des tâches qui lui incombait à satisfaction, éléments qui ne figurent pas dans les EAD, il revenait à ses supérieurs hiérarchiques, en l’occurrence à
MM. C______ et D______, de rédiger lesdits EAD en conformité avec la réalité et d’y mentionner les lacunes du fonctionnaire qu’ils évaluaient. La commune, représentée par son conseil administratif, ne peut pas après coup se prévaloir de ses propres manquements pour tenter de justifier le licenciement du recourant.

La recourante prétend par ailleurs que le recourant serait apparu incapable de gérer son service principalement à partir de la rentrée de septembre 2012. Si tel avait été le cas, il appartenait à ses supérieurs hiérarchiques de prendre sans délai toutes les mesures utiles pour remédier à cette situation, l’incapacité alléguée mettant en péril un service important pour le bon fonctionnement de la commune. Or, il ne ressort pas du dossier que de telles mesures auraient été prises avant qu’un « coaching » ne soit décidé en avril 2013, période durant laquelle il aurait quoi qu’il en soit été difficile d’évaluer M. B______ en raison de ses absences attestées pour raison d’accident puis de maladie. On ne comprend par ailleurs pas pourquoi, si le recourant avait été, comme le prétend la commune, incapable de gérer son service, elle lui a malgré tout accordé une prime de
CHF 1'000.- le 20 décembre 2012. Selon l’art. 47 du statut, le versement de cette prime n’avait en effet rien d’automatique puisqu’elle « peut être versée en tenant compte des prestations fournies lors de l’année écoulée ou d’une circonstance exceptionnelle ».

e. Au vu de ce qui précède, le conseil administratif a violé l’art. 86 du statut, les EAD n’attestant d’aucune insuffisance professionnelle ni d’aucun des manquements figurant dans sa décision du 6 novembre 2013, sans que cette absence soit justifiée par les circonstances du cas d’espèce.

f. Les griefs de la commune fondés sur une violation par la commission des art. 86 du statut et 21 al. 2 LPA seront en conséquence écartés.

10) La commune fait par ailleurs grief à la commission d’avoir constaté de manière inexacte les faits pertinents.

a. S’agissant des EAD, et comme cela vient d’être examiné, ils ne contenaient aucun élément susceptible d’attester de manquements justifiant un licenciement.

b. Pour ce qui concerne les témoignages recueillis lors de l’enquête administrative, puis devant la commission, ils confirmeraient, selon la commune l’existence de manquements professionnels chez M. B______. La commune soutient que tant les supérieurs hiérarchiques de M. B______, à savoir
MM. C______ et D______, que ses collègues auraient mis en évidence de nombreuses lacunes de ce dernier quant à la qualité de son travail et dans son comportement. Elle s’appuie en particulier sur les déclarations de
M. D______ lors de l’enquête administrative, ce dernier ayant déclaré que le recourant n’avait pas répondu aux attentes, qu’il avait des problèmes relationnels et des lacunes et qu’il manquait de réactivité. Il rencontrait par ailleurs des problèmes pour transmettre l’information et ses relations se passaient mal avec certains partenaires. Les témoins K______, J______ et L______ avaient aussi fait état de manquements. Quant au témoignage de Mme M______ devant la commission, il mettait en évidence des problèmes de concentration et de mémoire.

c. À teneur des procès-verbaux d’audition versés à la procédure, lesquels sont détaillés ci-dessus dans la partie en fait (ch. 21 et 33), il ressort qu’outre le recourant et MM. C______ et D______, Mmes J______, K______ et M______, ainsi que M. L______ ont été entendus comme témoins.

M. L______ a fourni un témoignage clairement négatif à l’égard de son supérieur hiérarchique. Ce dernier manquait de « leadership », ne prenait pas d’initiative et n’avait pas les compétences pour superviser les APM. La planification générale était lacunaire et le recourant manquait d’anticipation. Les séances étaient très peu préparées et le recourant y faisait chaque fois une crise de nerfs, utilisant des termes vulgaires.

Mme J______ a fait état de problèmes dans la transmission des informations au sein du service, le suivi des ordres du jour qui incombait au recourant n’étant pas toujours fait. Elle s’était sentie isolée ou pas écoutée, le recourant ne lui accordant pas le temps nécessaire. Elle avait constaté des oublis chez son supérieur. Ce dernier avait eu des réactions disproportionnées, des crises de colère forte, seul, adressées à elle-même ou à des membres de l’équipe. Des partenaires s’étaient par ailleurs plaints de retards auprès d’elle. Il ressort toutefois du procès-verbal de son audition du 15 octobre 2013 que Mme J______, en énumérant les faiblesses de son supérieur, a ponctué ses propos de nombreux « parfois » ou de « n’était pas toujours fait », les problèmes rencontrés n’ayant ainsi pas un caractère aussi constant ou récurrent que ceux relevés par
M. L______.

Mme K______ a fourni un témoignage très positif. Si elle a confirmé avoir eu elle-même l’idée des séances internes du service, elle a pour le reste expliqué avoir reçu de son chef toutes les informations et instructions utiles. Celui-ci tenait par ailleurs compte des informations qu’elle lui transmettait et il avait bien joué son rôle de supérieur. Elle avait parfois entendu des plaintes d’autres membres du service, concernant plutôt des détails, les projets se réalisant. Elle n’avait pas constaté que son responsable se serait exprimé de manière inadéquate.

Mme M______ a fourni un témoignage positif à l’égard de son chef, même s’il elle n’a pas caché certaines lenteurs. Les éventuels dysfonctionnements devaient toutefois être mis en lien avec ceux de la mairie. Elle a pour le reste qualifié de bonnes les relations de travail au sein du service et avec les partenaires, étant précisé que son poste de travail était décentralisé. Elle n’avait pas souvenir que le recourant se serait emporté. Si, comme le souligne la commune, Mme M______ a en effet relevé que M. B______ avait connu des problèmes de mémoire ou de concentration, elle omet de préciser que ce témoin les a attribués à ses problèmes de santé et qu’elle ne les avait constatés que dans les derniers mois avant son départ. Pour le reste, la transmission des informations était bonne.

d. S’agissant des témoignages de MM. C______ et D______, ils sont négatifs envers le recourant. La commune insiste sur le fait qu’en leur qualité de responsables hiérarchiques, ils étaient mieux à même que quiconque d’évaluer les compétences du recourant. Si on peut suivre la recourante dans ce raisonnement, on ne comprend toujours pas pourquoi les manquements qui auraient justifié le licenciement n’ont pas été mentionnés dans les EAD. Si comme l’ont déclaré MM. C______ et D______ lors de l’enquête administrative ou devant la commission, le recourant était à ce point incapable de gérer son service, il leur revenait, compte tenu de la systématique particulière du statut applicable au cas d’espèce, d’établir la réalité de cette situation dans les EAD avant d’ouvrir une enquête administrative. Il ressort en effet du statut que l’enquête administrative est une procédure distincte des EAD. L’art. 86 du statut, auquel se réfère le conseil administratif dans sa décision du 6 novembre 2013, prévoit, comme cela a été examiné en détail ci-dessus, que les manquements reprochés au fonctionnaire doivent être attestés par les EAD. Cette disposition renvoie ensuite aux art. 38 à 42 du statut, l’art. 40 prévoyant que le licenciement ne peut être prononcé qu’après l’enquête ordonnée et effectuée par le conseil administratif. Il convenait donc d’évoquer les éventuels manquements dans les EAD, de déterminer « les axes de développement » sur lesquels M. B______ devait porter ses efforts puis, si les manquements persistaient, de vérifier, dans le cadre de l’enquête administrative, si le licenciement se justifiait ou non. Il convient enfin de souligner que c’est le conseil administratif lui-même qui a fondé sa décision sur l’art. 86 et non sur l’art 39 du statut, disposition qui lui permettait de sanctionner son chef de service en prononçant, s’il estimait que cela se justifiait, son licenciement (al. 5), voire son licenciement immédiat (al. 6).

e. Dans sa décision litigieuse, la commission a retenu que les témoignages recueillis lors de l’enquête administrative, puis devant elle, ne faisaient pas ressortir une incompétence, à tout le moins comme décrite par la commune et que s’il pouvait certes être relevé des lacunes organisationnelles, celles-ci n’étaient pas suffisamment étayées pour justifier la décision du conseil administratif. Au vu desdits témoignages, il n’y a pas lieu de remettre en cause la position de la commission, laquelle était par ailleurs, du fait qu’elle était composée de personnes habitant ou travaillant dans la commune, particulièrement à même d’en estimer et d’en considérer la portée exacte.

f. Par surabondance, il faut retenir que le recourant avait fait état, lors de l’EAD du 26 juin 2012, du caractère multitâches et du volume de son travail, éléments qui rendait ce dernier ardu. Mme J______, dans son témoignage du
15 octobre 2013, avait elle aussi signalé une surcharge générale et récurrente de travail dans le service. Ce problème de surcharge devait avoir quelques fondements, puisqu’il est apparu que le poste qu’occupait M. B______ au sein de la commune a été considérablement allégé suite à son licenciement.

g. Le grief d’une constatation inexacte des faits pertinents sera en conséquence écarté.

11) La commune soulève ensuite le grief d’une violation de l’art. 48 let. r LAC. Elle expose que la commission n’avait pas la compétence d’examiner en opportunité, à la place du conseil administratif, si M. B______ était dans la capacité ou non d’exercer ses fonctions. En tant qu’autorité judiciaire de recours, elle devait vérifier si le conseil administratif avait agi conformément au statut et à la loi. Or, elle n’avait constaté aucune irrégularité ou violation du droit dans tout le processus de résiliation de l’engagement. En intervenant elle-même a posteriori pour substituer ses motifs à ceux du conseil administratif, la commission avait violé l’art. 48 let. r LAC.

a. Selon l’art. 48 let. r LAC, le conseil administratif, le maire, après consultation de ses adjoints ou un adjoint dans le cadre de ses fonctions déléguées au sens de l’art. 44, sont chargés, dans les limites de la constitution et des lois, d’engager et de nommer le personnel de l’administration municipale, de fixer son salaire, de le contrôler et de le révoquer conformément au statut du personnel.

b. En application de l’art. 42 du statut, la commission est l’autorité compétente pour juger de la conformité au droit d’un licenciement prononcé par le conseil administratif. En outre, et comme cela a déjà été examiné plus haut, la commission n’a pas jugé en opportunité mais bel et bien constaté une violation du droit, le conseil administratif n’ayant pas agi conformément au statut.

Ce grief doit en conséquence lui aussi être écarté.

12) M. B______ fait grief à la commission de ne pas avoir tiré de l’annulation de la décision de licenciement prononcée par le conseil administratif la conséquence qui s’imposait, soit le constat qu’il était toujours fonctionnaire de la commune.

a. Selon lui, la commission s’était à tort référée à l’art. 31 LPAC. Cette disposition, qui interdit à l’autorité de recours d’imposer la réintégration d’un employé dont le licenciement était injustifié, n’était en effet pas applicable au cas d’espèce.

Ce système de l’interdiction de l’imposition de la réintégration était appliqué par plusieurs communes du fait que la LAC leur permettait de le prévoir dans leur réglementation. L’impossibilité d’imposer une réintégration était aussi admise lorsque le statut du personnel d’une commune renvoyait aux règles du CO. Ce système instaurait toutefois une exception au principe selon lequel, lorsqu’une décision administrative était injustifiée, elle devait être réformée ou annulée sur recours. Ce système d’interdiction de l’imposition de la réintégration ne pouvait donc pas être considéré comme un principe généralement applicable à toutes les décisions de licenciement prises par une collectivité publique, même si la législation pertinente ne le prévoyait pas. La commission avait appliqué sans réserve le système de l’art. 31 LPAC, considérant implicitement que le statut comprenait une lacune qu’il y avait lieu de combler. Or, tel n’était pas le cas. Même à considérer, ce qu’il contestait, qu’une lacune devait être comblée, rien ne justifiait de la combler en instaurant l’interdiction d’imposer la réintégration plutôt qu’en fixant un devoir de la collectivité de faire tout son possible pour réintégrer ou reclasser le fonctionnaire. La commune n’ayant ni fait le choix de reprendre l’art. 31 LPAC ni de renvoyer au CO, l’annulation de la décision de licenciement ne pouvait avoir que pour conséquence le constat qu’il était toujours fonctionnaire de la commune et partant qu’il avait toujours droit à son traitement.

Le fait qu’il avait été éloigné des affaires pendant plusieurs mois n’y changeait rien, et même s’il fallait retenir qu’il n’était plus possible de le réintégrer à son poste, la commune devait à tout le moins tenter de lui en proposer un autre correspondant à ses qualifications.

b. Selon l’art. 53 al. 1 LPA, une décision est exécutoire lorsque :

a. elle ne peut plus être attaquée par réclamation ou par recours,

b. le recours ou la réclamation n’a pas d’effet suspensif,

c. l’effet suspensif a été retiré.

L’art. 53 al. 2 LPA prévoit que nul ne peut user des prérogatives que lui confère une décision avant que celle-ci ne soit exécutoire.

À teneur de l’art. 66 LPA, sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l’autorité qui a pris la décision attaquée n’ait ordonné l’exécution nonobstant recours (al. 1). En cas de recours contre une loi constitutionnelle, une loi ou un règlement du Conseil d’État, le recours n’a pas effet suspensif (al. 2). Toutefois, lorsqu’aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (al. 3).

L’art. 107 al. 1 LAC, lequel a repris à l’identique le libellé de l’art. 86 A
al. 1 après les modifications de la LAC entrées en vigueur le 21 novembre 2015, prévoit qu’en cas de recours contre une résiliation des rapports de service, le statut du personnel peut prévoir une réglementation analogue à celle de l’art. 31 LPAC.

À teneur de l’art. 31 LPAC, dans sa version en vigueur lors du prononcé de la décision litigieuse par la commission le 27 février 2015, peut recourir à la chambre administrative pour violation de la loi tout membre du personnel dont les rapports de service ont été résiliés (al. 1 ). Si la chambre administrative retient que la résiliation des rapports de service est contraire au droit, elle peut proposer à l'autorité compétente la réintégration (al. 2). En cas de décision négative de l'autorité compétente, la chambre administrative fixe une indemnité dont le montant ne peut être inférieur à un mois et supérieur à vingt-quatre mois du dernier traitement brut à l'exclusion de tout autre élément de rémunération ; concernant un employé, l'indemnité ne peut être supérieure à six mois (al. 3).

c. En l’espèce, le statut ne dit rien s’agissant des effets de l’annulation par la commission d’une décision de licenciement. Le statut ne se réfère en particulier ni au CO ni à la LPAC. La conclusion que tire le recourant de ce silence du statut ne peut toutefois pas être suivie.

Par décision du 27 février 2015, la commission a annulé la décision exécutoire nonobstant recours du conseil administratif du 6 novembre 2013. Elle n’a toutefois pas constaté la nullité de cette décision. Dans la mesure où le 27 mai 2014, la commission a rejeté la demande de restitution de l’effet suspensif au recours déposé par M. B______, la décision du conseil administratif a continué à déployer ses effets. Bien que la commission ait annulé la décision de licenciement, cette annulation n’est à ce jour pas encore entrée en force en raison des recours déposés devant la chambre de céans le 16 avril 2015. En conséquence, la décision du conseil administratif continue de déployer ses effets. Entre le prononcé de la décision de licenciement et l’entrée en force de l’annulation de cette décision, subsiste une période pendant laquelle le lien entre le fonctionnaire injustement licencié et la commune demeure rompu. Les effets de la décision en annulation prononcée par la commission ne se déploieront qu’à partir du moment où celle-là entrera en force. Même si, dans le présent arrêt, elle confirme l’annulation du licenciement, la chambre de céans ne peut dès lors pas constater, comme le prétend le recourant, qu’il serait toujours fonctionnaire de la commune puisque tel n’est pas le cas.

d. Dans sa décision litigieuse, après avoir admis le recours de
M. B______ en tant qu’il contestait la décision de résiliation de son engagement, la commission a indiqué « se pencher sur la réintégration du recourant à son ancien poste ». Elle a relevé que dans la mesure où il occupait une fonction de cadre supérieur au sein de l’administration communale, sa réintégration devait être considérée avec le plus grand soin. Suite à une réorganisation, le poste qu’occupait M. B______ n’existait plus, tout comme une fonction similaire dans la commune. Au surplus, il avait été éloigné des affaires depuis une période prolongée. La commission renonçait dès lors « à proposer à la commune de A______ la réintégration au sens de l’art. 31 al. 2 LPAC ». Il était cependant attribué, à titre d’indemnité pour tout préjudice résultant de la résiliation contraire au droit, la somme de CHF 232'500.- à la charge de la commune.

Comme cela a été examiné au considérant 5 du présent arrêt, il y a lieu d’admettre que la commission est une juridiction administrative. Instituée par le statut, il s’agit d’une juridiction de niveau communal qui engage la commune. Comme cela a également déjà été relevé, elle est composée de personnes qui connaissent bien la commune, soit car elles vivent sur son territoire et y exercent des fonctions délibératives, soit car elles travaillent au sein de son administration.

Les communes disposent d'une très grande liberté de décision dans la définition des modalités concernant les rapports de service qu'elles entretiennent avec leurs agents (ATA/449/2016 du 31 mai 2016 consid. 5a et les références citées). Ainsi, l'autorité communale doit bénéficier de la plus grande liberté d'appréciation pour fixer l'organisation de son administration et créer, modifier ou supprimer les relations de service nécessaires au bon fonctionnement de celle-là, questions relevant très largement de l'opportunité et échappant par conséquent au contrôle de la chambre administrative (ATA/890/2015 du 1er septembre 2015 consid. 5b et les arrêts cités).

Ce pouvoir discrétionnaire ne signifie pas que l'autorité est libre d'agir comme bon lui semble. Elle ne peut ni renoncer à exercer ce pouvoir, ni faire abstraction des principes constitutionnels régissant le droit administratif, notamment ceux de la légalité, de la bonne foi, de l'égalité de traitement, de la proportionnalité et de l'interdiction d'arbitraire (ATA/653/2015 du 23 juin 2015 consid. 4 ; ATA/439/2014 du 17 juin 2014 consid. 6b). Dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, elle est notamment liée par les critères qui découlent du sens et du but de la réglementation applicable, de même que par les principes généraux du droit (ATF 107 Ia 202 consid. 3 ; 104 Ia 201
consid. 5f et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 2P.177/2001 du
9 juillet 2002 consid. 2.2 ; ATA/653/2015 du 23 juin 2015 consid. 4 ; ATA/439/2014 du 17 juin 2014 consid. 6b).

En l’espèce, en l’absence de toute référence soit à la LPAC soit au CO et dans le contexte juridique décrit précédemment, dès lors qu’elle n’entendait pas constater la nullité de la décision du conseil administratif mais l’annuler, on ne peut reprocher à la commission de s’être interrogée sur la réintégration ou non de
M. B______. Elle a renoncé à proposer cette solution au conseil administratif sans arbitraire puisqu’elle a procédé à l’examen des particularités du cas d’espèce en se fondant sur des éléments objectifs (évolution du poste, éloignement professionnel). En l’absence de toute référence, on ne peut pas non plus lui reprocher de s’être tournée vers la LPAC, ce cadre légal lui permettant de trancher en faveur d’une solution cohérente. Enfin, la solution retenue par la commission, même si cela n’est pas déterminant, correspond à la solution retenue par la commune dans le nouveau statut qu’elle a adopté et qui est entré en vigueur le 1er février 2014. L’art. 85 du nouveau statut prévoit en effet le système de la non-réintégration et de l’indemnité.

e. Au vu de ce qui précède, la conclusion du recourant visant à faire constater qu’il est toujours fonctionnaire de la commune doit ainsi être rejetée.

13) Dans un dernier grief, la commune reproche à la commission d’avoir violé les art. 86 et 38 à 42 du statut en appliquant la LPAC par analogie. Elle relève que ni ces dispositions statutaires, ni aucune autre, ne prévoient que la LPAC serait applicable en cas d’annulation par la commission d’une décision de résiliation de l’engagement d’un fonctionnaire. La commission avait dès lors, après avoir renoncé à la réintégration de M. B______, décidé à tort de lui octroyer une indemnité sur la base de la LPAC.

Pour les motifs exposés au considérant précédent, et dans la mesure où la chambre de céans confirme l’annulation du licenciement prononcé à tort contre M. B______, la commune ne peut se plaindre de ce qu’à défaut de devoir accepter de compter à nouveau ce dernier parmi les membres de son personnel, une indemnité soit versée au recourant. La solution retenue par la commission permet de ce point de vue de tenir compte des intérêts de la commune tout en indemnisant M. B______ pour le licenciement contraire au droit dont il a été la victime.

S’agissant du montant de l’indemnité, soit CHF 232'500.-, il a été fixé par la commission, juridiction communale dont il convient de respecter l’autonomie, « pour tout préjudice résultant de la résiliation contraire au droit des activités professionnelles de M. B______ ». Si l’octroi d’un montant conséquent se justifie compte tenu de la violation du droit dont a été victime le recourant de la part du conseil administratif et au vu de son âge – il a aujourd’hui 61 ans – ce montant, lequel correspond à « plus de vingt mois » du salaire de
M. B______ (écriture de la commune du 14 septembre 2015, p. 4) apparaît toutefois comme trop élevé au regard de la durée pendant laquelle il a travaillé pour la commune. Entré au service de cette dernière en juillet 2010, il a été libéré de son obligation de travailler en juillet 2013, étant précisé que dès le mois de mars 2013 il a été souvent absent pour cause d’accident puis de maladie. Le montant fixé par la commission apparaît également disproportionné par rapport aux limites que la commune s’est fixée elle-même dans son nouveau statut, lequel peut également servir de référence en l’absence de toute autre. Le nouveau statut prévoit en effet une indemnité maximale pouvant aller jusqu’à vingt-quatre mois (art. 85 al. 2). Compte tenu de l’ensemble des circonstances, une indemnité correspondant à quinze mois du dernier traitement brut du recourant pour tout préjudice résultant de la résiliation contraire au droit de ses activités professionnelles sera fixée.

Le grief de la commune, en ce qu’elle conteste l’octroi d’une indemnité, sera en conséquence partiellement accepté.

14) Au vu de ce qui précède, le recours de la commune sera partiellement admis s’agissant du montant de l’indemnité. Le recours de M. B______ sera rejeté, la conclusion de ce dernier en confirmation de l’annulation de son licenciement ne pouvant pas avoir à elle seule de portée.

15) Un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la commune, qui n’obtient que très partiellement gain de cause (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

Un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de M. B______, son recours étant rejeté. Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 avril 2015 par la commune de A______ contre la décision de la commission de préavis du conseil municipal de la commune de A______ du 27 février 2015 ;

déclare recevable le recours interjeté le 16 avril 2015 par M. B______ contre la décision de la commission de préavis du conseil municipal de la commune de A______ du 27 février 2015 ;

au fond :

admet partiellement le recours de la commune ;

rejette le recours de M. B______ ;

fixe à quinze mois de son dernier traitement brut l’indemnité due à M. B______ pour tout préjudice résultant de la résiliation contraire au droit de ses activités professionnelles ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de la commune de A______ ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge de M. B______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les
art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me François Membrez, avocat de la commune de A______, à Me Corinne Corminboeuf Harari, avocate du recourant, ainsi qu'à la commission de préavis du conseil municipal de la commune de A______.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Junod, M. Dumartheray, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :