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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/251/2015

ATA/600/2015 du 09.06.2015 ( PROF ) , REJETE

Descripteurs : AVOCAT ; INSCRIPTION ; INDÉPENDANCE DE L'AVOCAT ; SECRET PROFESSIONNEL ; CONFLIT D'INTÉRÊTS
Normes : LLCA.4 ; LLCA.5.al2 ; LLCA.6 ; LLCA.7 ; LLCA.8 ; LLCA.9 ; LLCA.10.al1 ; LLCA.12 ; LLCA.13.al1 ; LPAv.14 ; LPAv.21 ; Cst.8 ; Cst.27 ; Cst.29
Résumé : Dans une précédente jurisprudence (ATA/181/2015), la chambre administrative avait estimé que les conditions de l'inscription au registre cantonal des avocats d'une personne titulaire d'un brevet d'avocat suisse et employée à plein temps par un cabinet d'avocats international, dont aucun associé n'était inscrit au registre cantonal des avocats, n'étaient pas réalisées. Bien que cette personne et son employeur aient pris diverses mesures en vue de lui permettre de pratiquer, outre son activité salariée, la profession d'avocate au barreau de Genève en qualité d'indépendante, certains obstacles organisationnels subsistaient, ne permettant pas de garantir son indépendance. Cette jurisprudence est applicable même si la personne titulaire du brevet d'avocat suisse qui requiert son inscription est un associé du cabinet d'avocats international.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/251/2015-PROF ATA/600/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 juin 2015

2ème section

 

dans la cause

 

 

Monsieur A______
représenté par Me Maurice Harari, avocat

contre

 

COMMISSION DU BARREAU

 



EN FAIT

1) Monsieur A______, ressortissant Suisse et avocat suisse, diplômé universitaire en droit après avoir poursuivi des études dans des universités suisses (obtention d’un doctorat en droit) et américaines, a été admis à la pratique du barreau dans l’État de New York où il a exercé le métier d’avocat durant quelques années. Il a également obtenu, en 2005, le droit de pratiquer le barreau en Angleterre au titre de « solicitor ».

2) En 2001, il a rejoint, comme collaborateur, l’étude américaine B______ (ci-après : B______), ayant son siège à Chicago Illinois, constituée depuis de nombreuses années sous la forme juridique d’une« limited liability partnership » (ci-après : LLP).

3) En 1993, B______ a ouvert un bureau d’avocats à Genève, que M. A______ a rejoint en 2003 en qualité de collaborateur.

Les avocats actifs au sein du bureau genevois de B______, déploient principalement leurs activités en qualité de conseil dans des procédures d’arbitrages internationaux en Suisse et dans le cadre de transactions commerciales.

4) Le 18 décembre 2006, M. A______ a obtenu de la commission du barreau (ci-après : la commission) d’être inscrit au tableau des avocats étrangers de l’Union Européenne.

5) En mars 2009, il a rejoint une étude formée d’avocats inscrits au barreau de Genève et, par décision du 7 novembre 2011, la commission l’a inscrit au registre cantonal des avocats instauré par l’art. 21 de la loi sur la profession d’avocat du 26 avril 2002 (LPAv - E 6 10) (ci-après : le tableau).

6) En 2012, M. A______ a quitté l’étude d’avocats genevoise précitée, pour retourner travailler, en qualité d’associé, au sein du bureau genevois de B______, dans les locaux que cette étude occupe à l’adresse ______ à Genève.

7) Le 11 juin 2012, il a écrit à la commission pour lui demander l’enregistrement de ce changement professionnel et de modifier en ce sens son inscription au tableau.

Il a effectué cette démarche de concert avec Madame C______, collaboratrice au sein de son étude, qui se trouvait dans la même situation que lui, et dont le cas, similaire au sien, fait l’objet d’un contentieux parallèle.

8) Le bureau genevois de B______ est composé, en sus de M. A______ et de Mme C______, de Me D______, associé de B______, avocat inscrit au barreau de l’Illinois aux USA, de Me G______, collaboratrice de B______ et avocate aux barreaux de Virginie et du district de Columbia aux USA, ainsi que de Me F______, collaboratrice de B______ et avocate au barreau de H______ en Colombie.

9) Le 15 juin 2012, la commission a écrit à M. A______. Elle considérait que son inscription au tableau était contraire aux exigences légales assurant l’indépendance de l’avocat, ainsi qu’à la jurisprudence découlant d’un arrêt rendu le 11 mars 2008 par le Tribunal administratif, devenu depuis lors la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Elle ne pouvait donc modifier son inscription au tableau dans le sens demandé. Elle avait l’intention de procéder à sa radiation et lui accordait un délai pour se déterminer sur ce point.

L’avocat devait être en mesure de pratiquer en toute indépendance et ne pouvait être employé que par des personnes, elles-mêmes inscrites dans un registre cantonal. La chambre administrative avait, dans l’arrêt précité, énoncé les conditions requises pour pouvoir exercer en qualité d’avocat au sein d’une société de capitaux en rapport avec l’exigence d’indépendance de l’avocat. Ces conditions avaient été reprises par la commission et figuraient dans une circulaire du 4 avril 2011 qu’elle avait émise. En l’occurrence, M. A______ n’avait pas informé la commission du transfert de son activité d’avocat au sein de B______, alors qu’il en avait l’obligation. Or la poursuite d’une telle activité, déployée au sein d’une entité organisée selon un droit étranger, ne pouvait obtenir l’agrément de la commission car elle ne respectait pas les exigences légales rappelées dans la circulaire du 4 avril 2011. Son inscription ne pouvait être maintenue et il serait procédé à sa radiation d’ici au 6 juillet 2012, à moins qu’il ait pris des dispositions pour se conformer à la loi.

10) M. A______ a mandaté un avocat et a sollicité qu’il soit sursis à la radiation de son inscription jusqu’à ce qu’il se soit déterminé et que la commission ait statué.

11) Le 26 juin 2012, la commission a rejeté sa requête, l’inscription de l’avocat au tableau ne pouvait être maintenue. Il n’exerçait plus à son ancienne adresse et son inscription au sein de B______ n’était pas possible.

12) Dans deux courriers des 24 août 2012 et 28 septembre 2012, M. A______ s’est déterminé sur le courrier d’intention de la commission, concluant au maintien de son inscription au motif que le refus de celle-ci constituait une atteinte à son droit d’exercer une activité et, partant, une violation de sa liberté économique.

B______ n’était pas assimilable à une société de capitaux. Ses membres avaient une responsabilité illimitée. Entretemps, par arrêt du 7 septembre 2012, le Tribunal fédéral avait considéré comme conforme au droit l’existence d’études d’avocats constituées sous la forme d’une société anonyme, pour autant que leur organisation garantisse aux avocats pratiquant en leur sein d’exercer leur activité de manière structurellement indépendante. Suivant cette jurisprudence, la commission se devait de procéder à une analyse concrète de l’indépendance institutionnelle des avocats de B______ à Genève. En l’espèce, rien dans l’organisation actuelle de ce cabinet ne portait préjudice à l’indépendance des avocats du bureau genevois. Les intérêts de ses clients étaient entièrement protégés, tant du point de vue des modalités d’acceptation et d’exécution du mandat que de celui de la responsabilité de l’avocat.

À sa lettre du 24 août 2014, M. A______ a joint un courrier signé par Me I______, « General Counsel » de B______. Celui-ci fournissait des informations au sujet du fonctionnement de l’étude précitée. Le seul but de celle-ci était la pratique du droit. Un « partnership » au sens du droit de l’Illinois était une association de deux ou plusieurs personnes qui avaient pour but d’exercer comme copropriétaires une activité commerciale à des fins lucratives. Lorsqu’une telle entité était constituée sous la forme d’une LLP, toute obligation qu’elle soit de nature contractuelle, délictuelle ou autre, née dans le cadre d’une LLP, ne liait que la société. L’associé n’était pas personnellement responsable (sur la seule base de sa qualité d’associé ou du fait d’agir en tant que tel) directement ou indirectement, par le biais d’une contribution ou de tout autre manière, pour une obligation de ce type. Cependant, les règles du barreau de l’Illinois disposaient que, lorsqu’une étude d’avocats était constituée sous forme de LLP, le client avait le droit, en cas de désaccord, de se retourner à la fois contre celle-ci et contre l’associé responsable. Les associés individuels de B______ devaient tous être avocats titulaires du brevet requis en vertu des règles de sa juridiction. Seuls les avocats du bureau genevois titulaires de diplômes de droit suisses étaient autorisés à fournir des conseils en droit suisse à leurs clients. Chacun des avocats était supervisé dans sa juridiction respective par les organisations indépendantes des barreaux, qui garantissaient l’observation des règles applicables dans la pratique judiciaire de chaque juridiction. B______ disposait d’une police d’assurance de responsabilité professionnelle couvrant tous les avocats de ses bureaux. Les règles de gouvernance et les procédures de l’étude étaient définies dans le « partnership agreement of B______ ». Chaque associé possédait des droits dans la société qui ne prenaient pas la forme de parts sociales ou d’actions. Ces droits ne pouvaient être vendus par les associés ni utilisés à titre de garantie. Chaque avocat restait indépendant et avait la faculté de décider s’il souhaitait ou non accepter le mandat d’un client, que ce soit d’un nouveau client présenté à B______ ou envoyé par un autre associé de B______. Les avocats du bureau de Genève agissaient en accord avec les règles professionnelles de conduite de leur propre juridiction et restaient indépendants de l’influence d’autres membres de l’étude. En outre, il était interdit aux associés d’être mandatés par des clients en conflit d’intérêts avec d’autres clients de l’étude. La firme disposait d’un système standardisé qui garantissait qu’aucun nouveau client ne puisse mandater un avocat de B______ si un conflit pouvait exister avec un autre de leurs clients. La supervision de cette question incomberait au chef du bureau de Genève. Lorsqu’un client recourait au service de plusieurs bureaux de B______, la supervision était menée conjointement par les bureaux et associés respectifs.

13) Le 5 octobre 2012, le conseil de M. A______ a rappelé la teneur de ses précédents courriers mais a requis de la commission qu’elle suspende l’instruction de la cause jusqu’à ce que la chambre de céans ait statué sur un recours interjeté par une avocate d’une autre LLP exploitant des bureaux à Genève contre une décision de la commission refusant son inscription au tableau.

14) Le 12 novembre 2012, M. A______ a été entendu par la commission.

15) Par courrier du 21 novembre 2012, la commission a accepté de rétablir provisoirement l’inscription au barreau de M. A______, accédant à la requête de son conseil.

16) Le 20 décembre 2012, la commission a accepté de suspendre l’instruction de la cause dans l’attente de l’arrêt qui devait être prononcé dans une cause similaire.

17) Le 2 janvier 2014, la commission a écrit à M. A______. Par arrêt du 6 décembre 2013 (2C_433/2013), le Tribunal fédéral, avait rejeté le recours de l’avocate contre l’arrêt de la chambre administrative (ATA/178/2013 du 19 mars 2013). L’instruction de la cause était donc reprise.

18) Le 24 février 2014, M. A______ s’est déterminé sur la portée de l’arrêt du Tribunal fédéral qui venait d’être rendu. En outre, il a requis un délai pour formuler une nouvelle demande de modification de son inscription au tableau.

L’arrêt du Tribunal fédéral précité validait partiellement la pratique de la commission, mais sans l’avoir évaluée sous l’angle du respect du principe de proportionnalité. Cet arrêt préfigurait un retour vers une tendance à une interprétation stricte de la loi fédérale sur la libre circulation des avocats du 23 juin 2000 (LLCA - RS 935.61) en contraste avec la jurisprudence antérieure relative à la pratique de l’avocature au sein de sociétés de capitaux. Le Tribunal fédéral avait rejeté le recours en se fondant sur le fait que la recourante avait un statut de collaboratrice au sein de la LLP et non pas d’associée. On ne pouvait dès lors pas transposer sans autre les considérants de l’arrêt au cas d’espèce. En outre, le Tribunal fédéral n’avait pas abordé la question de savoir ce qu’était exactement une LLP. Or, une telle structure constituait non pas une société de capitaux mais une société de personnes. Dans son propre cas, il avait apporté la preuve de son indépendance par les éléments figurant dans son courrier du 24 octobre 2012. Un refus de l’inscrire au tableau ne prendrait pas en considération l’apport de cette preuve. En outre, une telle mesure violerait le principe de la proportionnalité. La commission avait changé sa pratique par peur de ne pas pouvoir efficacement remplir sa mission de surveillance lorsque les avocats inscrits au tableau dépendaient de structures étrangères. Toutefois, une telle restriction, dans son cas, violerait ses droits fondamentaux.

Au-delà de cela, il était désireux de continuer à exercer de manière ininterrompue son activité professionnelle et était disposé à adapter sa requête pour se conformer aux exigences nouvellement posées par la commission. Il requérait dès lors son inscription au barreau à titre individuel et en son nom propre, afin d’exercer la représentation en justice en Suisse, de façon formellement et matériellement indépendante de B______. Il sollicitait un délai pour présenter une requête dans ce sens à la commission et demandait que celle-ci sursoit à statuer sur la requête dont elle était déjà saisie, pendant ce temps.

19) Le 30 mai 2014, M. A______ a transmis à la commission, rempli et signé, le questionnaire « relatif à la modification d’inscription » qu’il requérait, accompagné de l’attestation correspondant à la conclusion d’une assurance RC, mettant en exécution le projet annoncé dans son courrier du 24 février 2014. Avec ce questionnaire, il lui a transmis une copie de la convention passée entre B______ et lui-même.

20) Dans cette convention, datée du 27 mai 2014, après avoir rappelé que M. A______ était employé au sein du bureau de Genève de B______ en tant qu’associé depuis le 1er mars 2012, les parties étaient convenues de ce qui suit :

1. « J______ consent à l’inscription à titre individuel de Dr. A______ au registre des avocats genevois et donne son accord à l’exercice par Dr. A______ de la représentation de parties en justice en Suisse à titre d’indépendant et accessoire à la relation de travail qui les lie.

2. J______ reconnaît et admet qu’à compter du mois de juin 2014, Dr. A______ sera inscrit au registre des avocats genevois en son propre nom et ne sera pas habilité à représenter des parties en justice en Suisse en qualité d’avocat associé au sein de J______.

3. J______ s’engage à respecter les obligations professionnelles et déontologiques de Dr. A______, notamment ses obligations d’indépendance et de maintien du secret professionnel. J______ n’interviendra en aucun cas dans la gestion des dossiers de l’activité indépendante accessoire de Dr. A______.

4. Dr. A______ conservera, séparément des dossiers de J______ et sous clé, les dossiers traités dans le cadre de son activité indépendante accessoire. Lui seul aura accès à ces dossiers, à l’exclusion de tout autre avocat et employé de J______.

5. Par ailleurs, l’association de Dr. A______ au sein du bureau de Genève de J______ continuera, les termes de son contrat d’association demeurent valables ».

21) Le 5 juin 2014, la commission s’est adressée au conseil de M. A______. Dans le formulaire annexé à la requête, celui-ci indiquait que ses locaux n’étaient pas occupés par d’autres entreprises. Or, l’adresse professionnelle qu’il mentionnait, soit Grand-Rue 23, était identique à celle de la société B______. La commission requérait de savoir comment était organisée l’étude du requérant, au regard des exigences d’indépendance institutionnelle et matérielle posées par la jurisprudence.

22) Le 20 juin 2014, M. A______ a répondu à la commission. Il avait pris les mesures nécessaires pour exercer son activité d’avocat à titre accessoire dans le respect du principe d’indépendance tel que défini par la jurisprudence du Tribunal fédéral. Des dispositions avaient été prises pour s’assurer contractuellement de la non-interférence de B______ dans la gestion de ses dossiers et du respect du secret professionnel. Une séparation physique des dossiers des uns et des autres était prévue par le biais de tiroirs fermant à clé, dans lesquels seraient placés ses dossiers personnels et auxquels il aurait seul accès, ce qui permettrait de parfaire encore cette indépendance. B______, dont les autres membres à Genève n’étaient pas titulaires du brevet d’avocat suisse ou européen, n’était active que dans le domaine de l’arbitrage international. Il n’y avait aucune véritable proximité entre l’activité de représentation de l’employeur et de celle de l’employé, exercée à titre indépendant. Il n’y avait dès lors pas un risque accru en termes de défaut d’indépendance. Les dispositions prises aboutissaient à mettre à sa disposition, au sein de l’étude, un numéro de téléphone et une adresse e-mail personnels exclusivement utilisés par lui-même dans le cadre de ses contacts avec ses clients. Seules ses coordonnées apparaissaient sur le papier à en-tête d’avocat qu’il allait utiliser. Il disposait de comptes bancaires distincts ouverts dans une banque de la place, exclusivement voués à l’exercice de son activité accessoire et indépendante d’avocat.

23) Le 16 septembre 2014, la commission a procédé à une visite de l’étude. Selon le procès-verbal de transport sur place rédigé à cette occasion, M. A______ a exposé d’une manière générale aux membres de celle-ci toutes les mesures prises pour qu’il n’y ait pas de confusion possible entre l’activité qu’il déployait à titre d’avocat individuel et celle qu’il déployait au sein de B______. Les différents faits constatés à cette occasion seront repris en tant que de besoin dans la discussion du présent cas.

24) Le 15 octobre 2014, M. A______ a formulé des observations.

Il persistait dans les termes de sa requête. Le transport sur place avait permis de confirmer que les mesures prises garantissaient l’exercice d’une activité d’avocat à titre accessoire, dans le plein respect du principe d’indépendance. Il insistait sur trois points :

Tout d’abord le fait que la réception soit la même pour les clients B______ et les clients de son étude ne remettait pas en cause la séparation des activités des uns et des autres. Il était usuel que des avocats inscrits au registre louent ou sous-louent des bureaux dans des locaux d’une autre étude dont ils étaient indépendants, tout en utilisant la même réception. Le partage de locaux ne posait pas de problème dans la mesure où les associés de B______ exerçaient le même type d’activité que la sienne.

Deuxièmement, le fait qu’il n’ait pas exclu de traiter certains dossiers pour des clients de B______ comme indépendant, afin d’offrir un service complet aux clients n’était pas incompatible avec la garantie de l’indépendance. Le seul fait qu’un risque abstrait puisse être envisagé n’empêchait pas l’inscription au tableau. S’il y avait un risque de conflit d’intérêt, il était évident qu’il prendrait toutes les mesures pour ne traiter que des mandats qu’il pourrait gérer en toute indépendance et ce vis-à-vis de clients dûment informés au préalable de la situation et du caractère indépendant du mandat. Troisièmement, concernant le contrôle d’éventuels conflits d’intérêt, le procès-verbal rapportait qu’il y avait nécessité qu’un tel contrôle soit effectué à double. Dans son cas, le contrôle de l’absence de conflit d’intérêt s’effectuerait facilement, directement et unilatéralement par lui-même, par la consultation du registre informatisé des clients de B______. Il n’aurait dont aucun besoin ni obligation de communiquer le nom de ses clients à cette société pour effectuer cette tâche.

25) Le 8 décembre 2014, la commission a rejeté la demande d’inscription à titre d’indépendant déposée par M. A______. Elle a également procédé à la radiation de son nom du tableau. Pour pouvoir être inscrit, l’avocat devait être en mesure de pratiquer en toute indépendance. Il ne pouvait donc être employé que par des personnes elles-mêmes inscrites dans un registre cantonal. La nécessité d’une pratique indépendante ressortait tant de l’art. 8 al. 1 let. d LLCA que de l’art. 12 let. b et c LLCA. En outre, l’avocat était soumis au secret professionnel pour toutes les affaires qui lui ont été confiées par ses clients dans l’exercice de sa profession. Selon la législation cantonale, il ne pouvait s’associer ou avoir des locaux communs qu’avec des personnes exerçant la même activité professionnelle.

L’indépendance comportait deux aspects. Tout d’abord, un aspect dit institutionnel lié à la manière dont l’avocat devait organiser son activité pour qu’il puisse se consacrer entièrement à la défense des intérêts de ses clients, sans être influencé par des circonstances étrangères à la cause. En outre, l’inscription au tableau devait être refusée lorsque sans investigation approfondie, il apparaissait avec une certaine vraisemblance que l’avocat demandant son inscription, du fait de sa situation particulière, ne remplissait pas la condition de l’indépendance.

Sous l’angle de l’indépendance institutionnelle, le Tribunal fédéral, dans un arrêt du 6 décembre 2013, avait confirmé le refus de la commission d’inscrire au tableau une avocate qui exerçait au sein d’un cabinet juridique organisé sous la forme d’une LLP. Les associés d’une telle structure n’étaient pas admis à pratiquer le barreau en Suisse. Ils n’étaient, partant, inscrits ni dans un registre cantonal, ni dans le tableau public des avocats des État membres de l’UE ou de l’AELE, autorisant à exercer la représentation en justice en Suisse de manière permanente. Ils n’étaient donc pas soumis à la surveillance disciplinaire d’une autorité cantonale suisse. Dès lors, un avocat engagé par une LLP ne présentait pas les mêmes garanties en termes d’indépendance que s’il était employé par un ou plusieurs avocats inscrits dans un registre cantonal. Un avocat qui souhaiterait exercer à titre indépendant à côté de son travail salarié devait prendre toute disposition pour qu’aucun lien avec son employeur ne puisse être reconnu. Cela passait par une organisation de son étude permettant de concrétiser cette indépendance.

Dans le cas de M. A______, les exigences en matière de pratique indépendante n’étaient pas réalisées. celui-ci exerçait son activité au sein des locaux de B______ qui était une étude d’avocat internationale, dont il était l’un des associés. L’entrée et la réception était commune aux deux études. Sous réserve de l’utilisation d’un ordinateur personnel et de l’entreposage des dossiers dans un espace réservé, il n’existait aucun distinction entre le traitement de la clientèle de B______ et celle liée à l’activité indépendante du requérant. Ce dernier n’excluait pas de traiter certains dossiers pour des clients de B______ au titre de leur activité d’indépendant, afin d’offrir un service complet aux clients. Il existait donc un risque certain de confusion entre l’activité exercée pour le compte de la firme et celle exercée à titre d’indépendant par le requérant. Dès lors, les exigences posées par la jurisprudence, selon lesquelles l’avocat qui exerçait la profession comme indépendant à côté de son travail salarié devait veiller à ce qu’aucun lien avec son employeur ne puisse être reconnu, n’étaient pas réunies.

M. A______ ne pouvait tirer aucun droit à l’inscription au tableau du fait que son nom y figurait. La commission se devait de tenir compte de l’évolution du droit et de la jurisprudence dans la gestion du registre des mandataires. Cela pouvait conduire à la radiation d’une inscription au registre cantonal, si constat était fait qu’elle ne remplissait plus les conditions légales. Cela constituait une atteinte certes grave à la liberté économique, mais la commission se devait de s’assurer que les avocats remplissaient en tout temps les conditions requises pour être inscrits au registre. Le recourant ne pouvait tirer aucun droit du principe de la bonne foi, même s’il avait été régulièrement inscrit depuis 2006. Lorsqu’il avait intégré B______ et avait requis la modification de son inscription, la commission s’était assuré du respect des exigences légales et constaté qu’il ne pouvait pas être inscrit, son activité se déployant désormais au sein d’une société étrangère organisée sous la forme d’une LLP. Le fait que le 21 novembre 2012, le bureau ait admis à titre provisoire son inscription dans le registre ne lui conférait aucun droit, ce d’autant plus que la jurisprudence avait encore été précisée dans le sens de la position présentement adoptée.

26) Par acte déposé le 26 janvier 2015 au greffe de la chambre administrative, M. A______ a recouru contre la décision du 8 décembre 2014 de la commission précitée, il a conclu à ce que préalablement son inscription au tableau et sur le site internet du pouvoir judiciaire soit rétablie jusqu’à droit jugé sur son recours. Sur le fond, il a conclu à l’annulation de ladite décision en tant qu’elle rejetait sa demande d’inscription à titre indépendant, et en tant qu’elle prononçait sa radiation du registre cantonal des avocats. La chambre administrative devait constater qu’il réunissait les conditions pour le maintien de son inscription dans ledit registre et ordonner à la commission de procéder à la modification de cette inscription dans le sens requis.

Dans la décision attaquée, la commission non seulement refusait son inscription au registre des avocats, mais prononçait la radiation de l’inscription existante. Or une telle radiation ne pouvait être prononcée que par une décision motivée explicitement, tenant compte des arguments qu’il avait présentés dans ses courriers des 24 août 2012, 28 septembre 2012 et 24 février 2014. En outre, la commission avait statué sur sa requête du 24 février 2014 complétée le 30 mai 2014 tendant à son inscription à titre indépendant sur le registre cantonal. Cette requête ne remplaçait cependant pas sa requête initiale formulée le 11 juin 2012 sollicitant son inscription au registre des avocats comme associé de B______, et ne l’avait pas rendue « caduque ». La décision attaquée ne constituait qu’une décision partielle et il attendait que la commission statue encore sur sa requête initiale.

Le bureau genevois de B______, ouvert depuis 1993, était composé à la date du dépôt du recours, de Me C______, collaboratrice de B______, actuellement inscrite au registre cantonal à l’instar de lui-même, qui avait fait l’objet d’une décision parallèle à celle qui le frappait et avait également déposé un recours parallèle, de Me D______, associé de B______ et avocat au barreau de l’Illinois, de Me E______, collaboratrice de B______ et avocate au barreau de l’État de Virginie et du district de Columbia aux États-Unis, ainsi que de Me F______, collaboratrice de B______ et avocate au barreau de H______ (Argentine). Tous les associés de B______ étaient avocats et étaient par conséquent soumis aux règles légales et déontologiques applicables à la profession d’avocat selon leur législation respective. À l’instar de sa collègue, le recourant envisageait de mener son activité d’avocat inscrit au tableau dans les locaux qu’il occupe aux fins de son activité principale pour B______ situé
______ à Genève. Il avait passé un contrat avec la firme afin de définir les conditions de l’exercice de son activité indépendante et fourni toutes explications supplémentaires à ce sujet dans son courrier du 20 juin 2014. Il avait fait en sorte que son étude se distingue de B______, de la désignation de celle-ci à l’entrée d’immeuble, jusqu’à l’organisation interne de son office.

Sur le fond, les éléments sur lesquels la commission s’était fondée pour refuser son inscription au registre à titre d’avocat indépendant étaient erronés ou injustifiés. S’il ne contestait pas avoir demandé son inscription au tableau pour l’exercice d’une activité d’avocat accessoire à partir des mêmes locaux que ceux qu’il occupait en sa qualité d’associé et collaborateur de B______, cela n’engendrait aucun risque de confusion entre ses activités indépendantes et celles qu’il exerçait pour le compte de cette firme.

La consultation des travaux préparatoires à l’adoption de l’art. 8 al. 1 let. d LLCA mettait en évidence que le législateur avait fait expressément et consciemment le choix de ne pas introduire dans la loi une restriction voulue par certains milieux quant à la possibilité pour l’avocat d’appartenir à des études d’avocats internationales tout en poursuivant parallèlement son activité d’avocat indépendant. L’interprétation que la commission faisait de la disposition de la LLCA précitée était trop restrictive et allait à l’encontre de ce que voulait l’auteur de la loi.

Concrètement, il était faux de retenir que l’exercice de l’activité accessoire d’avocat qu’il entendait mener dans les mêmes locaux que ceux qu’il occupait en qualité d’associé de B______ créait un risque de confusion. Même si le Tribunal fédéral s’était montré peu favorable au maintien d’une adresse professionnelle unique pour l’activité indépendante de l’avocat également employé, la présomption d’absence d’indépendance devait demeurer réfragable et l’exigence d’indépendance structurelle devait toujours fait l’objet d’une analyse concrète.

Dans son cas, il n’y avait aucun risque d’atteinte à son indépendance et de violation du secret professionnel, contrairement à ce que la commission avait retenu. En effet, il avait réglé cette question par convention précise avec la firme d’avocats qui l’employait. Les trois étrangers exerçant leur activité dans cette firme à ses côtés étaient soumis à des règles strictes en matière de respect du secret professionnel, équivalant à celles prévues par la loi suisse, dont il énonçait le contenu. La LLCA n’interdisait pas à la même personne de cumuler les professions d’avocat et de notaire, si bien qu’un notaire ou un avocat notaire pouvait librement partager des locaux avec d’autres notaires et avec d’autres avocats, alors que la source du secret professionnel n’était pas la même. Le Tribunal fédéral, lorsqu’il avait admis qu’une étude d’avocats soit organisée sous la forme d’une personne morale, avait laissé ouverte la question de l’admissibilité d’une activité dans le cadre d’un partenariat multidisciplinaire.

Lui-même avait le statut d’associé, et non d’employé du bureau genevois de B______. Il était inadéquat de comparer son cas avec celui d’un salarié dont l’employeur, un tiers non avocat, aurait une présence substantielle et tangible dans les locaux communs, qui se manifesterait notamment par la présence des supérieurs de l’employé. En d’autres termes, s’il pouvait formellement être désigné comme un salarié de l’étude américaine qui n’était pas inscrite dans un registre cantonal, il n’en demeurait pas moins qu’il était libre et indépendant, non seulement dans l’exercice de son éventuelle activité accessoire mais également dans celui de son activité principale au sein de la firme. Le fait que l’entrée et la réception des locaux soient communes n’avait aucune incidence, dans la mesure où il recevait ses clients dans ses propres bureaux et qu’il traitait ses dossiers de manière totalement distincte de ceux de la clientèle de B______. Il était faux de prétendre qu’il n’y avait aucune distinction dans le traitement de sa clientèle et celle de cette firme. Le fait qu’il n’excluait pas de traiter des dossiers pour le compte de clients qui seraient également ceux de B______ ne pouvait être considéré comme un indice sur une absence d’indépendance de sa part. Si le cas se présentait, il ferait en sorte de n’accepter le mandat que s’il n’y avait aucun risque de confusion.

Le refus de l’inscrire comme avocat indépendant constituait une atteinte à sa liberté économique, garantie par la constitution, et n’avait pas de base légale suffisante. L’art. 8 al. 1 let. d LLCA ne pouvait constituer une base légale autorisant la commission à refuser l’inscription. Dès lors, la décision ne reposait pas sur une base légale formelle et elle était contraire au droit. Il n’y avait aucun intérêt public à ce refus, lequel violait le principe de la proportionnalité. La commission voudrait lui imposer d’exercer son activité d’avocat inscrit au tableau dans des locaux totalement séparés. Cela impliquerait une charge financière nouvelle et disproportionnée pour une activité accessoire. En outre, cela lui occasionnerait des déplacements inutiles et une perte de productivité ou une perte de temps préjudiciable aux intérêts de ses clients. Ces éléments constitueraient des entraves telles qu’ils risqueraient de le conduire à devoir renoncer à déployer cette activité accessoire, ce qui équivalait de fait à lui interdire celle-ci.

Finalement, la décision était contraire au principe d’égalité de traitement, au regard de l’autorisation accordée à des avocats non associés de partager des locaux, ou à des avocats et notaires à en faire de même, voire à exercer au sein d’une société anonyme dans les cantons qui l’autorisaient. Il relevait la situation des avocats de l’association suisse des locataires (ci-après : ASLOCA), également traitée par le Tribunal fédéral, lesquels étaient autorisés, avec l’agrément de la commission, à déployer une activité pour leur employeur tout en déployant une activité parallèle à titre d’indépendants dans les mêmes locaux. Cette situation pouvait, ainsi que le relevait le Tribunal fédéral, créer une tension sous l’angle de l’indépendance de l’avocat, mais ne remettait pas en question l’inscription desdits avocats sous l’angle des conditions personnelles qui doivent être réunies.

27) Le 3 février 2015, la commission a pris position sur le recours de M. A______. Elle se référait à sa décision du 8 décembre 2014 et transmettait son dossier.

28) Le 20 février 2015, les parties n’ayant pas requis d’autres actes d’instruction, elles ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile, devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 6 al. 1 et 2 et 14 LLCA ; art. 14 et 49 LPAv - E 6 10 ; art. 132 al. 2 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 al. 1 et 2, 60 al. 1 let. a, 62 al. 1 let. a et 64 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant invoque une violation de son droit d'être entendu, car il considère que la décision de la commission de le radier du registre cantonal, qui accompagnait le refus de modifier sa demande d’inscription comme indépendant audit tableau, souffre d’un défaut de motivation. En outre, il relève que la commission n’a pas statué sur sa requête initiale d’être inscrit audit tableau comme associé de B______ et semble en tirer l’argument que, n’ayant pas argumenté sur la compatibilité de l’application des principes restrictifs qu’elle applique aux sociétés de capitaux exploitant des bureaux d’avocats à une entité organisée sous la forme d’une LLP de l’Illinois, la commission n’avait pas le droit de prononcer une telle radiation.

3) Avant d’aborder l’argumentation précitée, il y a lieu de préciser l’objet du présent contentieux.

Pour pratiquer la représentation en justice en Suisse sans autre autorisation, un avocat doit être inscrit à un registre cantonal des avocats (art. 4 LLCA). Il en résulte que chaque canton doit instituer un registre des avocats qui dispose d’une adresse professionnelle sur le territoire cantonal et qui remplisse les conditions matérielles d’exercice de la profession, au sens des art. 7 LLCA (conditions de formation) et 8 LLCA (conditions personnelles). Le registre est tenu par l’autorité chargée de la surveillance des avocats (art. 5 al. 2 LLCA). L’avocat titulaire d’un brevet d’avocat qui entend pratiquer la représentation en justice doit demander son inscription au registre du canton dans lequel il a son adresse professionnelle (art. 6 al. 1 LLCA). Selon l'art. 6 al. 2 LLCA, l’autorité de surveillance l’inscrit s’il remplit, notamment, les conditions prévues à l'art. 8 LLCA.

Dans le canton de Genève, à teneur de l’art. 14 LPAv, la commission du barreau exerce les compétences dévolues à l’autorité de surveillance des avocats, ainsi que les compétences qui lui sont attribuées par la présente loi. En particulier, c’est elle qui gère le registre cantonal des avocats instauré par l’art. 21 LPav (ci-après : le tableau) et c’est à elle que les avocats intéressés doivent transmettre leur demande d’inscription (art. 21 al. 1 LPav). Il en va de même du registre des avocats membres de l’Union européenne (ci-après : UE) ou de l’Association européenne de libre-échange (ci-après : AELE), ainsi que du registre des avocats étrangers non membres de ces deux zones économiques (art. 22 et 23 LPav).

4) Le principe de la bonne foi entre administration et administré, exprimé aujourd’hui aux art. 9 et 5 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), exige que l’une et l’autre se comportent réciproquement de manière loyale. Si l’administration doit s’abstenir de toute attitude propre à tromper l’administré et ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d’une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 129 I 161 consid. 4 p. 170 ; 129 II 361 consid. 7.1 p. 381 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_534/2009 du 2 juin 2010 ; 9C_115/2007 du 22 janvier 2008 consid. 4.2 ; ATA/141/2012 du 13 mars 2012 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 193 n. 568), le principe s’applique également à l’administré. En particulier, le principe de la bonne foi comporte une exigence de loyauté qui interdit tant à l’autorité qu’elle administre d’adopter un comportement contradictoire (ATF 136 I 254 ; Thierry TANQUEREL op. cit., p. 197 n. 580).

5) En l’espèce, il ressort clairement des pièces du dossier que le recourant a modifié en cours de procédure la requête initiale du 11 juin 2011, en lui faisant parvenir le 30 mai 2014, après l’avoir annoncé le 24 février 2014, une nouvelle requête par laquelle il sollicitait, non plus son inscription au tableau au titre d’avocat associé la firme américaine, mais comme avocat indépendant partageant des locaux avec celle-ci, à l’activité de laquelle il était associé. Il ne peut plus, en vertu du principe précité, soutenir valablement devant la chambre de céans qu’il n’a jamais renoncé à sa requête initiale, et prétendre attendre de la commission qu’elle statue sur cet aspect de sa requête. La décision du 8 décembre 2014 constitue donc une décision finale qui clôt la procédure engagée par le recourant le 11 juin 2012.

6) Au-delà de cela, le recourant considère que la décision de la commission qui prononce sa radiation comporte non seulement un défaut de motivation qui viole son droit être entendu, mais encore qui ne prend pas en considération les arguments qu’il a a invoqué dans les différents courriers qui lui adressaient en 2012 et, en dernier lieu, le 24 février 2014.

La jurisprudence du Tribunal fédéral en matière de droits constitutionnels a également déduit du droit d’être entendu le droit d’obtenir une décision motivée. L’autorité n’est toutefois pas tenue de prendre position sur tous les moyens des parties ; elle peut se limiter aux questions décisives, mais doit se prononcer sur celles-ci (ATF 138 I 232 consid. 5.1 p. 237 ; 137 II 266 consid. 3.2 p. 270 ; 136 I 229 consid. 5.2 p. 236 ; 134 I 83 consid. 4.1 p. 88 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_2/2012 du 19 avril 2012 consid. 3.1 ; 2C_455/2011 du 5 avril 2012 consid 4.3 ; 2D_36/2011 du 15 novembre 2011 consid. 2.1 ; 1C_424/2009 du 6 septembre 2010 consid. 2 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., 2011, p. 521 n. 1573). Il suffit, du point de vue de la motivation de la décision, que les parties puissent se rendre compte de sa portée à leur égard et, le cas échéant, recourir contre elle en connaissance de cause (ATF 136 I 184 consid. 2.2.1 p. 188 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_997/2011 du 3 avril 2012 consid. 3 ; 1C_311/2010 du 7 octobre 2010 consid. 3.1 ; 9C_831/2009 du 12 août 2010 et arrêts cités ; ATA/844/2012 du 18 décembre 2012).

En l’occurrence, la décision de la commission du 8 décembre 2014, qui comporte onze pages, permet amplement au recourant de comprendre les raisons ayant conduit cette instance, après avoir refusé l’entrée en matière sur la requête du recourant en modification de son inscription, à procéder à la radiation de son inscription actuelle du registre cantonal, celle-ci constituant, de l’avis de la commission, la conséquence juridique légale du rejet de celle-là.

7) Le recourant soutient remplir les conditions d'inscription au tableau lui permettant d’exercer sa profession comme indépendant, en particulier bénéficier de l'indépendance exigée par la loi et respecter les règles professionnelles qui en découlent en matière de secret professionnel et d'absence de conflit d'intérêts.

8) a. Pour être inscrit au registre cantonal, l’avocat doit notamment être en mesure de pratiquer en toute indépendance ; il ne peut être employé que par des personnes elles-mêmes inscrites dans un registre cantonal (art. 8 al. 1 let. d LLCA).

L'art. 12 LLCA énonce les règles professionnelles auxquelles l'avocat est soumis. Celui-ci doit notamment exercer son activité professionnelle en toute indépendance, en son nom personnel et sous sa propre responsabilité (let. b) et éviter tout conflit entre les intérêts de son client et ceux des personnes avec lesquelles il est en relation sur le plan professionnel ou privé (let. c).

L'avocat est en outre soumis au secret professionnel pour toutes les affaires qui lui sont confiées par ses clients dans l'exercice de sa profession ; cette obligation n'est pas limitée dans le temps et est applicable à l'égard des tiers (art. 13 al. 1 1ère phrase LLCA).

Dans le canton de Genève, l’avocat inscrit au registre ne peut s’associer ou avoir des locaux communs qu’avec des personnes exerçant la même activité professionnelle (art. 10 al. 1ère phrase LPAv).

b. L'indépendance est un principe essentiel de la profession d'avocat (arrêt du Tribunal fédéral 2C_889/2008 du 21 juillet 2009 consid. 3.1.2) ; elle est la clé de voûte de la pratique du barreau sur laquelle s'appuient les piliers de la profession que sont le secret professionnel, l'interdiction des conflits d'intérêts, la probité de l'avocat et la fidélité dans l'exécution du mandat (Philippe MEIER/Christian REISER, Commentaire romand, 2010, p. 62 n. 28 ad art. 8 LLCA ; François BOHNET/Vincent MARTENET, Droit de la profession d’avocat, 2009, p. 545 n. 1301).

L'indépendance comme condition de l'inscription (art. 8 al. 1 let. d LLCA) est dite institutionnelle : l'avocat doit s'organiser de manière à pouvoir exercer son activité de façon indépendante. L'art. 12 let. b LLCA énonce la règle de l'indépendance matérielle, selon laquelle l'avocat doit veiller, dans chaque affaire qui lui est confiée, à exercer son activité de manière indépendante, en évitant notamment tout conflit d'intérêts (ATF 138 II 440 consid. 3 p. 443). La notion d’indépendance forme un tout, même si elle a été traitée dans la loi dans deux dispositions différentes (ATA/111/2008 du 11 mars 2008 ; François BOHNET/Vincent MARTENET, op. cit. p. 278 n. 627).

L'indépendance institutionnelle, au sens de l'art. 8 al. 1 let. d LLCA, doit garantir que l'avocat puisse se consacrer entièrement à la défense des intérêts de ses clients, sans être influencé par des circonstances étrangères à la cause. Il en va de la confiance du public dans la profession (ATF 138 II 440 consid. 5 p. 445).

Le fait que la condition de l'indépendance institutionnelle, qui doit exister préalablement à l'inscription, est doublée de la règle professionnelle de l'indépendance, qui s'impose à l'avocat inscrit, a pour conséquence de réduire quelque peu les exigences relatives à la première : il n'est pas nécessaire pour être inscrit que toute atteinte à l'indépendance soit d'entrée de cause exclue ; l'inscription doit être refusée seulement lorsque, sans investigations approfondies, il apparaît avec une certaine vraisemblance que l'intéressé, du fait de sa situation particulière, ne remplit pas la condition de l'indépendance (ATF 130 II 87 consid. 5.2 p. 103 s. ; 138 II 440 consid. 3 p. 444).

c. Le Tribunal fédéral considère que, sous l'angle de l'indépendance institutionnelle, dans le cas d'un avocat pratiquant cette profession parallèlement à une activité salariée, l'art. 8 al. 1 let. d 2ème phrase LLCA, aux termes de laquelle l'avocat ne peut être employé que par des personnes elles-mêmes inscrites dans un registre cantonal, ne signifie pas nécessairement que l'intéressé ne soit pas en mesure de pratiquer en toute indépendance et ne puisse dès lors se faire inscrire au registre. En effet, le texte de l'art. 8 al. 1 let. d LLCA n'est clair qu'au premier abord. À une interprétation littérale, il faut préférer celle qui se fonde sur le sens de la norme et la volonté du législateur. Or, l'intention du législateur n'était pas d'exclure l'inscription au registre - faute d'indépendance institutionnelle - dans tous les cas où l'avocat requérant est employé par une personne qui n'est elle-même pas inscrite, mais de le faire seulement dans la mesure où un tel engagement comporte le risque que l'intéressé subisse des influences extérieures dans l'exercice de sa profession (arrêt du Tribunal fédéral 2C_433/2013 du 6 décembre 2013 connu du recourant, puisqu’il l’a commenté dans ses écritures du 30 mai 2014;ATF 130 II 87 consid. 4.3.3 p. 97, consid. 5.2 p. 102 s. ; ATF 138 II 440 consid. 6 p. 446, consid. 14 p. 453, consid. 15 p. 455, consid. 17 p. 456). Ainsi, l'art. 8 al. 2 2ème phrase LLCA crée une présomption que l'indépendance fait défaut s'agissant de mandats présentant un lien quelconque avec l'engagement de l’avocat salarié, comme lorsque l'avocat défend les intérêts de son employeur ou de clients de ce dernier (ATF 138 II 440 consid. 14 p. 453 s. ; ATF 130 II 87 consid. 5.1.1 p. 100, consid. 5.2 p. 103 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_433/2013 précité). L'intéressé peut renverser la présomption en donnant toutes les informations utiles sur son engagement, de nature à établir clairement que son employeur ne peut exercer aucune influence sur la gestion des mandats (ATF 130 II 87 consid. 6.1 et 6.2 p. 104 s. ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_433/2013 du 6 décembre 2013  ; 2A_124/2005 du 25 octobre 2005 consid. 2.2 et les références citées). Tel est le cas lorsque l’activité de l’avocat est à tous points de vue séparée de celle qu'il exerce comme employé, de sorte que l'engagement n'interfère pas avec l'exercice indépendant de cette profession (ATF 138 II 440 consid. 6 p. 446 ; ATF 130 II 87 consid. 5.2 p. 103, consid. 6.3.2 p. 107 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_433/2013 du 6 décembre 2013).

d. L'art. 8 al. 1 let. d LLCA doit néanmoins être interprété de façon à ne pas empiéter de manière trop excessive sur la liberté du commerce dont bénéficie l'avocat. Lorsqu'un avocat est employé d'une personne non inscrite au tableau à côté de son activité indépendante, il y a une présomption de dépendance, que l'avocat peut renverser pour demander son inscription. Pour ce faire, il doit démontrer que ses clients n'ont aucun lien avec son employeur et que ce dernier ne dispose d'aucun pouvoir d'instruction ou de droit de regard sur les mandats d'avocat de son employé. À cela s'ajoute que l'avocat ne peut pas accepter de mandats contre ou en faveur de son employeur dans un litige impliquant des clients de ce dernier. Enfin, il faut que les locaux dans lesquels l'avocat exerce sa profession soient séparés de ceux de l'employeur (ATF 130 II 270 consid. 6 in RDAF 2005 I 526 ; Benoît CHAPPUIS, La profession d'avocat, Tome I, Le cadre légal et les principes essentiels, 2013, p. 64 ss.).

9) Dans un arrêt du 17 février 2015 (ATA/181/2015), la chambre administrative a confirmé un refus de la commission d’autoriser l’inscription comme avocate indépendante au tableau d’une avocate salariée d’un cabinet international d’avocats spécialisés dans l’arbitrage, constitué en société organisée selon le droit du Delaware (États-Unis d’Amérique) sous la forme d’une LLP gérée par une société holding constituée sous la même forme. À l’instar du recourant, la requérante, titulaire d’un brevet d’avocat suisse, cherchait à s’inscrire au tableau pour exercer à Genève une activité d’avocate indépendante, parallèlement à la poursuite de son activité au sein du bureau genevois du cabinet international précité. Elle était désireuse de pratiquer dans les locaux dudit cabinet.

Selon la chambre administrative, les conditions préconisées par l’art. 8 al. 1 let. d LLCA n’étaient pas réunies malgré les mesures prises par l’intéressée dans le but d’organiser son activité de manière indépendante (notamment par le biais d’une convention qu’elle avait passée avec son employeur visant à permettre l’exercice indépendant de son activité dans les locaux). Les associés de la LLP n’étaient pas soumis aux exigences de la LLCA, ni à la surveillance de la commission. La procédure de vérification d’éventuels cas de conflit d’intérêts mise en place conduisait à ce que l’employeur pouvait avoir connaissance de l’identité, voire à d’autres données relatives à des clients privés de la requérante, si bien que le secret professionnel n’était pas garanti. De plus, l’intervention de l’employeur dans la procédure de sélection des mandats ne permettait pas d’exclure que celui-ci ne puisse exercer une influence sur la gestion des mandats de l’avocate, obtenus par son activité indépendante. De même, le fait que la requérante exerçait ses activités indépendantes dans les locaux de son employeur et qu’elle utilise la même infrastructure pour le traitement des affaires de son employeur et de ses propres clients ne permettait pas de garantir son indépendance structurelle, voire le respect du secret professionnel.

10) En l'espèce, la situation du recourant présente d’importantes similitudes à celle traitée dans l’arrêt de la chambre administrative précité. Le recourant est titulaire d'un brevet d'avocat suisse mais déploie une activité d’avocat au sein d’une étude d’avocats internationale ayant des locaux à Genève, étude qui appartient à un cabinet d'avocats international ayant son siège aux États-Unis, organisé sous la forme juridique d’une LLP, et dont l’essentiel de l’activité concerne le domaine de l'arbitrage ou du commerce international. De manière similaire, il requiert une inscription au tableau dans le but d’être autorisé à déployer, parallèlement à son activité au sein de l’étude internationale et dans les mêmes locaux, une activité d’avocat inscrit au tableau consistant en la représentation, en son nom, sous sa propre responsabilité et pour son propre compte, de tierces parties devant les autorités et tribunaux suisses. De même, à cette fin, il justifie l’indépendance de son activité par une convention réglant les rapports qu’il allait entretenir avec l’étude internationale en question pour l’exercice de cette activité indépendante aux côtés de son activité au sein bureau du cabinet américain.

La seule différence dans sa situation, par rapport à celle qui prévalait dans l’ATA/178/2015 réside dans le fait qu’il n’est pas employé mais associé de l’étude constituée en LLP. En revanche, le fait qu’il figure déjà au tableau des avocats genevois ne change rien à la situation. Cette donnée s’explique par l’activité antérieure qu’il a exercée au sein d’une étude de la place et par le consentement de la commission à maintenir cette inscription jusqu’à droit connu dans la présente procédure. Toutefois, l’existence de cette inscription antérieure ne confère aucune légitimité supplémentaire à son inscription. La requête qu’il a formée devant la commission ne vise pas à faire simplement enregistrer un changement d’adresse professionnelle ou un transfert de son activité dans une autre étude composée d’avocats inscrits au tableau, voire l’ouverture d’une étude indépendante dans des locaux propres. Elle est fondée sur un état de fait nouveau, soit la volonté de pratiquer une activité d’avocat inscrit au barreau de Genève dans des locaux partagés avec une étude d’avocats étrangers non soumis à la LLCA, à laquelle il est associé. Cette requête implique un réexamen complet de de cette nouvelle situation au regard des conditions personnelles au sens de l’art. 8 LLCA, qui doivent exister pour que le droit de s’inscrire au tableau lui soit reconnu, sans qu’il puisse s’appuyer sur l’existence de son inscription antérieure.

11) Malgré la différence précitée, la situation exposée par le recourant ne diverge que peu de celle qui prévalait dans l’arrêt précité. L’existence d’une convention passée entre le recourant et ses associés dans le but de formaliser et organiser l’indépendance de sa pratique au sein du cabinet dans lequel il entend exercer celle-ci, n’est pas un élément décisif lui permettant d’apporter la preuve d’une garantie concrète d’indépendance (ATF 2A_124/2001 consid 2.2). Le recourant entend exercer son activité d’avocat inscrit au tableau à partir d’une étude d’avocats avec lesquels il est associé, ou dont il est l’employeur mais qui ne sont pas inscrits au registre cantonal des avocats. Ces derniers ne sont donc pas soumis aux exigences de la LLCA et le fait qu’ils soient soumis à des standards professionnels élevés n’y change rien.

Dans un tel contexte, la gestion des conflits d’intérêts potentiels reste problématique sous l’angle de l’indépendance. Même si le recourant, associé de l’étude américaine, peut par lui-même effectuer des recherches dans la base de données de l’étude pour détecter les risques de tels conflits, il ne lui sera pas possible dans le cas de l’examen à effectuer, de ne pas devoir, selon les cas, contacter ses associés ou leurs collaborateurs, dans le cadre de ces contrôles. Il existe donc un risque qu’au travers de ces démarches, l’identité voire l’objet des mandats que des clients entendraient lui confier dans le cadre de son activité indépendante, soit ainsi communiqués ou accessibles à des personnes, avocats ou auxiliaires, non soumises à la LLCA, du fait de sa double activité d’avocat associé au sein de l’étude américaine et d’avocat indépendant inscrit au tableau.

Lors du transport sur place de la commission, le recourant a indiqué qu’il n’excluait pas de traiter des dossiers pour le compte de clients qui seraient également mandants de l’étude américaine. Il soutient, tout en admettant que la jurisprudence fédérale est très restrictive quant à la possibilité pour un avocat indépendant de représenter en justice les clients de son employeur, que cette question n’avait pas être tranchée au regard de l’exigence d’indépendance structurelle au sens de l’art. 8 al. 1 let. d LLCA, mais avec celle d’indépendance matérielle au sens de l’art. 12 let. b LLCA. Son raisonnement ne peut être suivi. Si le recourant, inscrit au tableau, venait, comme il l’admet, à accepter en qualité d’avocat autorisé à pratiquer à Genève, un mandat d’un client de l’étude américaine aux activités de laquelle il est associé, un risque existerait qu’il ne puisse mener l’entier de de ses activités en complète indépendance, soit en faisant abstraction des autres mandats menés par le bureau américain auquel il est associé. Sur ce point, le risque de défaut d’indépendance résulte déjà du défaut d’indépendance structurelle imposé par l’art. 8 al. 1 let. d LLCA. Le fait que le recourant exerce à la fois comme associé du bureau d’avocats américains et comme avocat indépendant dans les mêmes locaux crée un risque de confusion qui contrevient à la condition imposée par cette disposition, avant tout problème d’indépendance matérielle.

12) Dans l’ATA/181/2015 précité, la commission avait retenu que l’organisation interne de l’étude ne permettait pas d’admettre que l’indépendance structurelle soit assurée par les dispositions prises dans les locaux de celle-ci et la chambre administrative avait confirmé son point de vue. Dans la décision attaquée, la commission est arrivée aux mêmes conclusions sur la base des constats qu’elle fait lors du transport sur place du 16 septembre 2014.

En l’espèce, même si le nom du recourant figure au bas de l’immeuble sur une plaque distincte de celle de l’étude américaine, même s’il envisage dans ses rapports avec sa clientèle privée d’utiliser un papier à lettre distinct ainsi qu’un ordinateur personnel, même s’il reçoit ses clients personnels dans son bureau et que les dossiers de ceux-ci sont entreposés dans un espace réservé, il n’empêche que sa pratique professionnelle se déploiera au sein des locaux de l’étude dont il est par ailleurs l’associé, sans entrée, réception ou bureaux distincts de celle-ci. Dans ces circonstances, une telle organisation, quelles que soient les garanties d’indépendance que la direction de B______ peut formellement fournir, ne peut empêcher un risque certain de confusion entre son activité propre et celle qu’il déploie pour le compte de de la firme américaine.

Au vu des éléments qui précèdent, la commission était donc fondée à refuser l’inscription du recourant au registre genevois des avocats, dans la mesure où la condition de la pratique de la profession en toute indépendance au sens de l’art. 8 al. 1 let. d LLCA n’est pas réalisée.

13) Le recourant se plaint encore d'une atteinte à sa liberté économique et d'une violation du principe de l'égalité de traitement.

14) a. Selon l'art. 27 Cst., la liberté économique est garantie (al. 1) ; elle comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique lucrative privée et son libre exercice (al. 2). Cette liberté protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu (ATF 131 I 333 et les références citées). Toute activité lucrative privée exercée à titre professionnel, qui vise à l’obtention d’un gain ou d’un revenu, bénéficie de la garantie de la liberté économique (ATF 117 Ia 440 ; 116 Ia 118  ; ATA/500/2001 du 7 août 2001). La protection de l’art. 27 Cst. s’étend non seulement aux indépendants, mais encore aux employés salariés lorsqu’ils sont atteints dans leurs droits juridiquement protégés (ATF 112 Ia 318, 319).

À l’instar de toutes les libertés publiques, la liberté économique n’a pas valeur absolue et peut être restreinte aux conditions de l’art. 36 Cst. Aux termes de cette disposition, une restriction d’un droit fondamental est admissible si elle repose sur une base légale qui doit être de rang législatif en cas d’atteinte grave (al. 1), est justifiée par un intérêt public ou par la protection d’un droit fondamental d’autrui (al. 2) et respecte le principe de la proportionnalité (al. 3).

Selon la jurisprudence, faire dépendre l'inscription au registre cantonal des avocats l'indépendance institutionnelle constitue une limitation de la liberté économique au sens de l'art. 27 Cst., laquelle est également valable pour l'activité d'avocat soumise au monopole (arrêt du Tribunal fédéral 2C_433/2013 du 6 décembre 2013 et les références citées).

b. Il est indéniable que la décision litigieuse constitue une restriction à la liberté économique du recourant ; elle ne lui interdit cependant pas toute activité économique en lien avec sa formation, mais uniquement de pratiquer la représentation devant les autorités et tribunaux suisses en qualité d'avocat indépendant, dans le cadre et en fonction de l’organisation qu’il expose. Une telle atteinte est fondée sur l'art. 8 al. 1 let. d LLCA, qui ne permet pas l'inscription au registre cantonal des avocats si l'une des conditions personnelles mentionnées, en particulier celle de l'indépendance de l'avocat, fait défaut. Cette norme constitue une base légale suffisante et l’absence d’indépendance est avérée en l’espèce. La nécessité de sauvegarder l'indépendance des avocats obéit à un intérêt public. Enfin, cette limitation de la liberté économique du recourant ne s'avère pas disproportionnée eu égard au but poursuivi.

Ce grief sera par conséquent écarté.

15) a. Une décision ou un arrêté viole le principe de l’égalité de traitement garanti par l’art. 8 Cst. lorsqu’il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu’il omet de faire les distinctions qui s’imposent au vu des circonstances, c’est-à-dire lorsque ce qui est semblable n’est pas traité de manière identique et lorsque ce qui est dissemblable ne l’est pas de manière différente. Cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. La question de savoir si une distinction juridique repose sur un motif raisonnable peut recevoir une réponse différente selon les époques et suivant les conceptions, idéologies et situations du moment (ATF 138 V 176 consid. 8.2 ; 131 I 1 consid. 4.2 ; 129 I 346 consid. 6 ; Vincent MARTENET, Géométrie de l’égalité, 2003, p. 260 ss).

b. Selon la jurisprudence, un justiciable ne saurait en principe se prétendre victime d’une inégalité de traitement au sens de l’art. 8 Cst lorsque la loi est correctement appliquée à son cas, alors même que dans d’autres cas, elle aurait reçu une fausse application ou n’aurait pas été appliquée du tout (ATF 136 I 65 consid. 5.6 p. 78 ; 127 II 113 consid. 9a p. 121 ; 122 II 446 consid. 4 p. 451 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_304/2011 du 9 janvier 2012 consid. 5.3 ; 2C_72/2008 du 21 mai 2008 consid. 6.2 ; ATA/352/2012 du 5 juin 2012 consid. 7 ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, 2006, vol. 2, p. 502/503 n. 1025-1027 ; Vincent MARTENET, op. cit., p. 260 ss ; Pierre MOOR, Droit administratif, 1994, vol. 1, p. 314 ss n. 4.1.1.4).

Cependant, cela présuppose de la part de l’autorité dont la décision est attaquée la volonté d’appliquer correctement, à l’avenir, les dispositions légales en question et de les faire appliquer par les services qui lui sont subordonnés. En revanche, si l’autorité persiste à maintenir une pratique reconnue illégale ou s’il y a de sérieuses raisons de penser qu’elle va persister dans celle-ci, le citoyen peut demander que la faveur accordée illégalement à des tiers le soit aussi à lui-même, cette faveur prenant fin lorsque l’autorité modifie sa pratique illégale (ATF 136 I 65 précité consid. 5.6 p. 78 ; 127 II 113 précité consid. 9a p. 121 ; 125 II 152 consid. 5 p. 166 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_304/2011 du 9 janvier 2012 ; 1C_426/2007 du 8 mai 2008 consid. 3 et 4 ; ATA/270/2012 du 8 mai 2012 consid. 14).

Encore faut-il qu’il n’existe pas un intérêt public prépondérant au respect de la légalité qui conduise à donner la préférence à celle-ci au détriment de l’égalité de traitement (ATF 115 Ia 81 consid. 2 p. 82/83 ; 99 Ib 377 consid. 5 p. 383), ni d’ailleurs qu’aucun intérêt privé de tiers prépondérant ne s’y oppose (ATF 108 Ia 212 consid. 4 p. 213).

Toutefois, si l’illégalité d’une pratique est constatée à l’occasion d’un recours contre le refus d’un traitement illégal, le juge n’admettra le recours que s’il peut être exclu que l’administration changera sa politique (ATF 115 Ia 81 consid. 2 p. 82/83 ; 112 Ib 381 consid. 6 p. 387 ; ATA/432/2008 du 27 août 2008 consid. 5). Il présumera, dans le silence de l’autorité, que celle-ci se conformera au jugement qu’il aura rendu quant à l’interprétation correcte de la règle en cause (arrêt du Tribunal fédéral 1C_304/2011 du 9 janvier 2012 consid. 5.3).

En rapport avec ce grief, le recourant considère qu’il n’est pas juste de ne pas le soumettre au même régime que celui accordé à des avocats qui partagent les charges de bureaux communs ou à des avocats qui exercent leur pratique privée dans les mêmes locaux que ceux d’une association dont ils défendent les intérêts des membres, tels les avocats de l’ASLOCA qui défendent leurs membres devant les juridiction spécialisées en matière de bail.

Leur situation n’est cependant pas comparable. Il s’agit dans ces différents cas de structures professionnelles d’avocats qui sont tous inscrits au tableau et soumis, les uns et les autres, tant à la LLCA qu’à la surveillance de la commission. Tel n’est pas le cas de tous les avocats de l’étude américaine à laquelle le recourant est associé, qui fait l’objet d’une organisation dépassant les frontières de la Suisse, si bien que l’autorité de surveillance peut exiger d’eux qu’ils se conforment et justifient d’une pratique indépendante (ATF 139 III 249 consid 1).

Ce grief sera également rejeté.

16) Selon l’art. 9 LLCA, l’avocat qui ne remplit plus l’une des conditions d’inscription est radié du registre cantonal des avocats. En l’occurrence, c’est ce qu’a fait la commission après avoir constaté que la condition imposée par l’art. 8 al. 1 let. d LLCA faisait défaut. Vu l’issue du recours sur ce point, ce volet de sa décision ne peut être que confirmé.

17) Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 1’500.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

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PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 26 janvier 2015 par Monsieur A______ contre la décision de la commission du barreau du 8 décembre 2014 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de procédure de CHF 1'500.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Maurice Harari, avocat du recourant, ainsi qu'à la commission du barreau.

Siégeants : M. Verniory, président, M. Thélin, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :