Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/2605/2017

ATA/875/2019 du 07.05.2019 sur JTAPI/436/2018 ( ICCIFD ) , REJETE

Descripteurs : DROIT FISCAL ; IMPÔT CANTONAL ET COMMUNAL ; IMPÔT FÉDÉRAL DIRECT ; EFFET SUSPENSIF ; DÉLAI ; OBJET DU LITIGE ; DÉDUCTION DU REVENU(DROIT FISCAL) ; PRÉVOYANCE PROFESSIONNELLE LIÉE ; FINANCEMENT(PRÉVOYANCE PROFESSIONNELLE)
Normes : LPA.66.al1; LPA.74; LPA.75; LIFD.33.al1.lete.par1ère phrase; OPP 3.7; LIPP.31.letc; LPP.82; LPP.5.al1; LHID.9.al2.lete; OPP 3.7.al4; LIFD.22.al1; LIFD.38; LIFD.36; LIPP.45
Résumé : Le recourant est en retraite anticipée depuis le 1er janvier 2015, si bien qu'il n'exerce formellement plus d'activité lucrative depuis cette date. Ayant versé sa cotisation au 3ème pilier lié postérieurement à la date effective de sa prise de retraite, le recourant ne peut pas déduire de son revenu le montant de sa cotisation pour l'année 2015. Recours rejeté dans la mesure où il est recevable.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2605/2017-ICCIFD ATA/875/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 7 mai 2019

4ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 7 mai 2018 (JTAPI/436/2018)


EN FAIT

1) Monsieur A______ (ci-après : le contribuable), né en 1951, est domicilié dans le canton de Genève.

De son union avec Madame A______, en 1989, sont nés trois enfants : B______, C______ et D______, nés respectivement en 1990, 1993 et 1995.

2) Par jugement du 14 janvier 2010 (JTPI/138/2010), le Tribunal de première instance (ci-après : TPI) a notamment autorisé les époux A______ à vivre séparés, instauré entre les parents une garde partagée sur C______ et D______ et a condamné M. A______ à verser à son épouse une contribution d'entretien mensuelle de CHF 3'500.-, allocations familiales non comprises.

3) Dans sa déclaration fiscale 2015, M. A______ a indiqué être retraité et avoir perçu de E______ Sàrl (ci-après : E______) un salaire brut de CHF 1.-, ainsi que des rentes de la prévoyance professionnelle pour lui-même et pour ses enfants. Il a fait valoir en déduction CHF 6'739.- au titre des cotisations au troisième pilier lié (3ème pilier A), des primes d'assurance-maladie versées pour ses enfants à hauteur de CHF 13'119.-, des intérêts et une dette hypothécaire en faveur de F______ de G______, à H______ (Vaud), à hauteur de, respectivement, CHF 18'914.- et CHF 803'000.-. Enfin, il a conclu à l'octroi de deux charges de famille pour ses enfants D______ et C______.

Dans la rubrique « Observations », le contribuable a précisé que D______ avait quitté officiellement son domicile en mars 2015 pour habiter chez sa mère. Par ailleurs, à la mi-février 2015, il avait renoncé à tout salaire envers E______ et demandé une rente du deuxième pilier anticipée de manière rétroactive au 1er janvier 2015, le poste salaire, en CHF 1.- étant fictif et ne visant qu'à permettre la prise en compte de la cotisation LPP au troisième pilier lié, payée le 24 mars 2015.

4) Le 12 octobre 2016, M. A______ a écrit à l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) indiquant qu'il avait déclaré par erreur la totalité de la dette et des intérêts hypothécaires afférents à l'immeuble sis à I______ (Vaud), qu'il détenait en copropriété avec son épouse. Seule la moitié de ces montants devait être prise en considération, à savoir CHF 9'457.- pour les intérêts et CHF 401'500.- pour la dette hypothécaire.

5) Le 2 février 2017, donnant suite à une demande de renseignements de l'AFC-GE du 20 décembre 2016 M. A______ a produit les factures de primes d'assurance-maladie 2015 de ses enfants, les factures de téléphone portable 2015 de sa fille D______ ainsi que des confirmations de paiements e-finance relatifs à des dépenses pour D______ (frais pour son voyage de maturité par exemple).

6) Par bordereaux du 20 février 2017, l'AFC-GE a taxé M. A______ pour l'année 2015 en lui accordant, pour l'impôt fédéral direct (ci-après : IFD), deux charges de famille pour C______ et D______, ainsi qu'une déduction pour primes d'assurances d'un montant global de CHF 3'100.-. Pour l'impôt cantonal et communal (ci-après : ICC), elle lui a octroyé une demi-charge de famille pour D______ et une charge de famille pour C______, ainsi que la déduction des primes d'assurance-maladie de ce dernier à hauteur de CHF 6'089.-. Les intérêts et la dette hypothécaires ont été acceptés à concurrence des montants mentionnés dans la lettre du 12 octobre 2016. En revanche, L'AFC-GE n'a pas admis les cotisations au troisième pilier A, pour le motif que l'intéressé n'avait cotisé ni à l'assurance-vieillesse et survivants (ci-après : AVS) ni à la LPP en 2015.

7) Le 20 mars 2017, M. A______ a élevé réclamation contre les bordereaux précités, concluant à la déduction des cotisations au troisième pilier lié (CHF 6'739.-), à la déduction des primes d'assurance-maladie de sa fille D______ (CHF 5'918.40), à la prise en considération du versement de la contribution d'entretien due à son épouse (CHF 10'500.-) et à la déduction dans leur intégralité des intérêts hypothécaires de l'immeuble sis à I______ (CHF 9'457.-).

Il a notamment joint une lettre, accompagnée d'une formule du 20 février 2015 adressées à la J______ (ci-après : la caisse de prévoyance), dans lesquelles il a demandé une prestation anticipée de vieillesse anticipée au 1er janvier 2015. Il a également remis différents documents de l'office des poursuites (ci-après : OP), ainsi qu'un courrier de la caisse de prévoyance du 14 novembre 2016 informant M. A______ que dès le 1er décembre 2016 sa rente mensuelle du 2ème pilier serait versée à l'OP.

8) Par décisions du 8 mai 2017, l'AFC-GE a rejeté la réclamation.

Seules les personnes cotisant à l'AVS sur le revenu d'une activité lucrative étaient autorisées à constituer un troisième pilier lié, ce qui n'était plus le cas de M. A______.

Les contributions d'entretien pour les mois de janvier à mars 2015 n'étaient pas déductibles, puisqu'elles n'avaient pas été versées à Mme A______ en 2015. Cette dernière avait engagé une procédure de poursuite en avril 2015 pour leur non-paiement, et la saisie sur les rentes de l'intéressé était intervenue courant 2016.

Dans la mesure où D______ n'était plus domiciliée chez M. A______, les primes d'assurance-maladie payées pour elle n'étaient plus déductibles, mais il avait droit à une charge de famille (pour l'IFD) et à une demi-charge (pour l'ICC).

Dès lors que l'intéressé était codébiteur de la dette hypothécaire et copropriétaire de l'immeuble de I______ à raison de 50 %, la déduction de la dette et des intérêts était admise dans la même proportion.

9) Par acte du 13 juin 2017, M. A______ a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre les décisions précitées, concluant à ce que l'AFC-GE lui accorde les déductions refusées au stade de la taxation.

Il a repris, en les développant, les arguments exposés dans ses précédentes écritures.

10) Après deux prolongations de délai dont le dernier avait été fixé au 6 octobre 2017, l'AFC-GE a conclu, le 9 octobre 2017, au rejet du recours, reprenant les arguments exposés dans sa décision sur réclamation.

11) Le 11 décembre 2017, M. A______ a répliqué, persistant dans ses conclusions.

12) Le 5 janvier 2018, soit deux jours après le délai accordé par le TAPI, l'AFC-GE a dupliqué, persistant dans ses conclusions.

13) Par jugement du 7 mai 2018, le TAPI a admis partiellement le recours de M. A______ et renvoyé le dossier à l'AFC-GE pour nouvelle décision de taxation dans le sens des considérants.

Selon la déclaration fiscale 2015, l'intéressé n'avait pas fait valoir en déduction de cotisations AVS. Il n'avait déclaré qu'un salaire de CHF 1.-, montant qu'il reconnaissait comme étant fictif. Ainsi qu'il ressortait de la rubrique « Observations », il ne l'avait, en effet, mentionné qu'en vue de pouvoir défalquer de son revenu les cotisations au troisième pilier lié. En outre, le 20 février 2015, il avait sollicité de la caisse de prévoyance une rente de vieillesse avec effet rétroactif au 1er janvier 2015, rente qu'il avait obtenue. M. A______ était certes demeuré affilié à l'AVS, étant donné qu'il avait pris une retraite anticipée avec effet rétroactif au 1er janvier 2015, mais, il ne remplissait plus la condition d'exercice d'une activité lucrative à compter de cette date. C'était donc à juste titre que l'AFC-GE avait refusé de déduire de son revenu les cotisations au troisième pilier lié.

À propos de la problématique de la déduction de la totalité des primes d'assurance-maladie payées en 2015 en faveur de sa fille majeure D______, et s'agissant de l'IFD, le contribuable avait obtenu une déduction pour prime d'assurance équivalente au cumul du montant global maximum de CHF 1'700.- prévu par la loi et du montant supplémentaire de CHF 1'400.- (2 x CHF 700.-) pour ses deux enfants. Il avait ainsi obtenu la déduction maximale autorisée par le droit pour un père ne vivant pas en ménage commun avec la mère de ses enfants. Sur le plan de l'ICC, le grief était admis.

Sur le point de la prise en considération du versement de la contribution d'entretien due à son épouse pour les mois de janvier à mars 2015 et indépendamment de la question de savoir si le versement à l'OP de la rente saisie valait paiement de la contribution d'entretien, tel qu'exigé par la jurisprudence, ce n'était de toute manière qu'en 2017 que l'OP avait reçu sur son compte la somme de CHF 24'220.-. L'intéressé admettait ne pas s'être acquitté en 2015 de la pension alimentaire due à son épouse, si bien qu'il ne pouvait quoi qu'il en soit pas la défalquer de son revenu pour l'exercice 2015, mais seulement durant l'exercice où le paiement effectif avait eu lieu. Contrairement à ce que M. A______ faisait valoir en substance dans ses écritures, cette solution ne contrevenait ni au principe de neutralité fiscale ni à celui de la concordance. En effet, en 2015, Mme A______ n'avait pas été imposée sur une pension alimentaire, ainsi qu'il découlait de ses avis de taxations, transmis au TAPI par l'AFC-GE sous le couvert du secret fiscal. Le grief était écarté.

Enfin, M. A______, dès lors qu'il détenait l'immeuble de I______ en copropriété avec son épouse, ne pouvait déduire que la moitié des intérêts hypothécaires y afférents et non leur intégralité. La décision sur réclamation était conforme à la jurisprudence du Tribunal fédéral et ne constituait ainsi pas une spécificité cantonale. L'intéressé ne pouvait pas se prévaloir du fait que, par hypothèse, il aurait pu défalquer l'intégralité des charges hypothécaires dans le canton de Vaud. En effet, au vu de sa souveraineté fiscale, le canton de Genève n'était lié ni par des dispositions légales d'un autre canton, ni par la pratique du canton de Vaud. Le grief était mal fondé.

14) Par acte daté du 7 juin 2018, mais remis à la poste le 8 juin 2018, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, concluant à la déduction des cotisations au troisième pilier lié (CHF 6'739.-) payées en 2015, à la déduction de la contribution d'entretien due à son épouse pour les mois de janvier à mars 2015, soit CHF 10'500.-, montant intégralement recouvré depuis le 29 août 2017, ainsi qu'à la déduction de la totalité des intérêts hypothécaires dus solidairement et conjointement avec son épouse pour l'emprunt contracté pour la résidence secondaire de I______, dans le canton de Vaud, soit CHF 18'914.-, tel qu'admis par l'autorité fiscale vaudoise. Enfin, l'effet suspensif concernant l'exigibilité de la part contestée de l'impôt devait être octroyé et il devait être exonéré de tous les frais et dépens.

Sa situation médicale devait être prise en considération, et un délai de trois mois devait lui être octroyé pour compléter son recours.

L'absence de respect des délais impartis par le TAPI tant pour la réplique que pour la duplique de l'AFC-GE jetait un doute sur la validité du jugement émis le 7 mai 2018. Le TAPI n'avait pas relevé ce manquement dans son jugement.

15) Le 19 juin 2018, le TAPI a produit son dossier dans formuler d'observations.

16) Le 27 juillet 2018, l'AFC-GE a conclu au rejet du recours, ainsi qu'au maintien de ses décisions, à l'exception de la déduction des primes d'assurance-maladie payées en faveur de la fille majeure du recourant, ce point ayant été admis par le TAPI.

Aucun argument nouveau susceptible d'influer sur le sort du litige n'avait été avancé, et aucune nouvelle pièce déterminante n'avait été produite.

17) Le 9 août 2018, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 14 septembre 2018 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, ensuite de quoi la cause serait gardée à juger.

18) Le 12 septembre 2018, l'AFC-GE a indiqué qu'elle n'avait aucune observation à formuler, se réservant le droit de répondre à d'éventuelles observations du recourant.

19) Le 14 septembre 2018, le recourant a persisté dans ses conclusions et conclu à la production par l'AFC-GE de l'intégralité du dossier portant référence A/2605/2017.

Le refus de déduction de la dernière cotisation due était choquant car il aboutissait de facto à une double imposition (une imposition dans le cadre de son revenu ordinaire et une imposition sous forme de prestation en capital).

C'était une déficience de l'application informatique mise à disposition par l'AFC-GE qui l'avait amené à déclarer un salaire fictif de CHF 1.- en 2015 afin de permettre de soumettre sa déclaration fiscale, et non une quelconque intention malicieuse.

S'agissant de la problématique du refus de déduction de la contribution d'entretien due à son épouse, il acceptait l'analyse du TAPI, qui avait jugé sa démarche prématurée concernant l'exercice 2015, mais il persistait dans ses demandes visant à l'exonération fiscale de la totalité des montants qu'il avait consacrés à la contribution d'entretien due à son épouse, quelle que soit la forme sous laquelle celle-ci avait été perçue. Les deniers de la première saisie ayant été finalement virés par l'OP au conseil juridique de son épouse le 27 août 2017, il ferait donc valoir dans sa déclaration 2017 la totalité des contributions d'entretien liées à cette saisie.

La chambre administrative devait toutefois l'orienter sur l'obligation qu'il pourrait avoir de déclarer comme revenus les rentes qu'il n'avait pas pu percevoir à la suite des saisies dont elles avaient fait l'objet. Subsidiairement, la chambre administrative devait se déterminer sur le caractère potentiellement fallacieux pour les autorités fiscales des certificats de rente émis par la caisse de prévoyance pour les années 2016 et 2017 lesquels indiquaient un montant de CHF 62'112.- perçu alors qu'il faisait l'objet de saisies sur ce montant.

Sur la question de la déduction des intérêts hypothécaires, il admettait que la pratique de l'AFC-GE antérieure à 2012 n'était pas conforme aux normes fédérales prévalant actuellement en la matière. Il déplorait toutefois que cette adaptation de la pratique fiscale genevoise aux normes fédérales n'ait pas été accompagnée d'un effort de communication auprès des contribuables directement concernés. Dans la mesure où il ressortait d'échanges récents avec son épouse que l'AFC-GE ne l'avait pas informée de ses décisions par rapport aux biens immobiliers dont elle était copropriétaire à 50 %, notamment en matière de déduction des intérêts hypothécaires, la chambre administrative devait enjoindre à l'AFC-GE de revoir les diverses taxations de son épouse depuis que la déductibilité de la totalité des intérêts hypothécaires qu'il payait avait été limitée à sa part de copropriété, soit 50 %, et de faire bénéficier, avec son accord, son épouse, membre de cette communauté conjugale, de la déductibilité pour le solde.

20) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 7 al. 2 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 145 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2) La loi prévoyant que le recours suspend les effets du jugement querellé (art. 66 al. 1 LPA), le chef de conclusions tendant à l'octroi de l'effet suspensif est sans portée. Le prononcé du présent arrêt rend, au demeurant, le chef de conclusions précité sans objet.

3) Dans la mesure où l'AFC-GE a joint à son écriture du 27 juillet 2018 l'entier de son dossier dans la présente cause, la conclusion du recourant en ce sens est sans objet. Il en est de même s'agissant de sa demande de pouvoir compléter son argumentation compte tenu de son écriture finale du 14 septembre 2018.

4) Le recourant se plaint que le TAPI n'a pas relevé les manquements de l'AFC-GE par rapport aux dépôts tardifs de ses écritures du 9 octobre 2017 et 4 janvier 2018.

a. Selon les art. 73 al. 1 LPA, l'autorité qui a pris la décision attaquée et toutes les parties ayant participé à la procédure de première instance sont invitées à se prononcer sur le recours. La juridiction peut autoriser une réplique et une duplique si ces écritures sont estimées nécessaires (art. 74 LPA).

L'art. 75 LPA précise que dans les cas prévus aux art. 73 et 74 LPA, la juridiction administrative fixe les délais dans lesquels les parties doivent produire leurs écritures.

b. En l'occurrence, c'est de manière conforme au droit que le TAPI n'a pas tiré de conséquence du non-respect des délais fixés à l'AFC-GE pour produire ses écritures, dès lors que la loi ne prévoit aucune sanction en cas de non-respect de ces délais (ATA/63/2019 du 22 janvier 2019 consid. 2c ; ATA/264/2018 du 20 mars 2018 et les références citées), sous réserve d'un comportement emportant défaut de collaboration au sens des art. 22 et 24 LPA.

5) a. L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. Il correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible. La contestation ne peut excéder l'objet de la décision attaquée, c'est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l'autorité inférieure s'est prononcée ou aurait dû se prononcer. L'objet d'une procédure administrative ne peut donc pas s'étendre ou qualitativement se modifier au fil des instances, mais peut tout au plus se réduire dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés. Ainsi, si un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions traitées dans la procédure antérieure (ATA/299/2019 du 19 mars 2019 consid. 2a ; ATA/854/2018 du 21 août 2018 consid. 2a).

b. En l'espèce, les décisions de l'AFC-GE du 8 mai 2017 et le jugement du TAPI attaqué portent uniquement sur la taxation 2015 du recourant, si bien qu'il n'appartient pas à la chambre de céans - qui est une autorité judiciaire de recours non habilitée de par la loi à délivrer des avis de droit - de renseigner le recourant sur l'obligation qu'il pourrait avoir de déclarer comme revenus les rentes qu'il n'avait pas pu percevoir à la suite des saisies dont elles avaient fait l'objet en 2016 et 2017. Pour la même raison, il ne sera pas discuté des certificats de rentes émis par la caisse de prévoyance pour les années 2016 et 2017.

Dans sa réclamation du 20 mars 2017, le recourant a contesté quatre points. Le refus de déduire la cotisation versée au troisième pilier lié, le refus de déduire le montant de la contribution d'entretien due à son épouse, le refus de déduire la totalité des primes d'assurance-maladie payées en 2015 en faveur de sa fille majeure et enfin le refus de déduire l'intégralité des intérêts hypothécaires concernant l'immeuble sis à I______.

S'agissant de la problématique de la déduction des primes d'assurance-maladie payées en 2015 en faveur de sa fille majeure, le TAPI a admis le recours du recourant sur ce point et l'AFC-GE en a pris acte. Dès lors, ce point ne fait plus partie de l'objet du litige.

Dans sa dernière écriture du 14 septembre 2018, le recourant déclare expressément « accepte[r] l'analyse du TAPI, qui juge sa démarche prématurée concernant l'exercice 2015, (...) » et qu'il « fera[it] valoir dans sa déclaration fiscale 2017 la totalité des contributions d'entretien liées à cette saisie, soit sept mois à CHF 3'500.-, ou CHF 24'500.- ». Il en découle que ce point n'est plus contesté par le recourant à ce stade de la procédure.

Pour ce qui est des intérêts hypothécaires relatifs au bien immobilier sis à I______, dans sa dernière écriture, le recourant « veut bien admettre que c'était la pratique de l'AFC-GE antérieure à 2012 qui n'était pas conforme aux normes fédérales prévalant actuellement en matière de déductibilité des intérêts hypothécaires (...) ». Comme pour la question des contribution d'entretien, le recourant ne remet ainsi pas en cause l'appréciation du TAPI, étant précisé que sa demande d'enjoindre à l'AFC-GE de revoir les diverses taxations de son épouse sort du cadre du présent litige, étant relevé au surplus que son épouse n'est pas partie à la présente procédure.

Au vu de ces considérations, le litige porte désormais uniquement sur le refus de déduction de la cotisation versée le 24 mars 2015 au troisième pilier lié (CHF 6'739.-).

6) a. Les questions de droit matériel sont résolues en fonction du droit en vigueur lors des périodes fiscales litigieuses (arrêts du Tribunal fédéral 2C_835/2012 du 1er avril 2013 consid. 8 ; 2A.568/1998 du 31 janvier 2000 ; ATA/1154/2017 du 2 août 2017 consid. 2 ; ATA/780/2013 du 26 novembre 2013 consid. 2 et les références citées).

b. L'imposition concerne l'exercice fiscal 2015. Sont ainsi applicables : en matière d'IFD, les dispositions de la LIFD, et en matière d'ICC, celles de la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 (LHID - RS 642.14) et de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08).

c. La question étant traitée de la même manière en droit fédéral et en droit cantonal harmonisé, le présent arrêt traite simultanément des deux impôts, comme cela est admis par la jurisprudence (ATF 135 II 260 consid. 1.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_662/2014 du 25 avril 2015 consid. 1 ; 2C_394/2013 du 24 octobre 2013 consid. 1.1 ; ATA/1419/2017 du 17 octobre 2017 consid 2b ; ATA/1417/2017 du 17 octobre 2017 consid. 2b).

7) a. Selon l'art. 33 al. 1 let. e 1ère phr. LIFD, en relation avec l'art. 7 de l'ordonnance sur les déductions admises fiscalement pour les cotisations versées à des formes reconnues de prévoyance du 13 novembre 1985 (OPP 3 - RS 831.461.3), sont déduits du revenu les primes, cotisations et montants versés en vue de l'acquisition de droits contractuels dans des formes reconnues de la prévoyance individuelle liée.

L'art. 31 let. c LIPP prévoit que sont déduits du revenu les versements dans un but de prévoyance et les revenus des capitaux d'épargne dans la mesure des versements du contribuable en vue d'acquérir des droits contractuels dans une institution reconnue de prévoyance individuelle liée, au sens et dans les limites du droit fédéral.

b. L'art. 82 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 (LPP - RS 831.40) consacre la base légale topique en matière de prévoyance individuelle liée. Ainsi, la possibilité de se constituer une prévoyance individuelle liée dépend de l'assujettissement à l'AVS (art. 5 al. 1 LPP). En conséquence, une personne non assujettie à l'AVS ne peut pas, du point de vue du droit interne, prétendre à la déduction fiscale des cotisations au 3ème pilier A (art. 33 al. 1 let. e 1ère phr. LIFD ; art. 9 al. 2 let. e LHID ; ATF 140 II 364 consid. 2 in RDAF 2015 II 71).

c. Selon la doctrine, sont seules autorisées à se constituer un 3ème pilier A, les personnes qui, cumulativement, exercent une activité lucrative et sont assurées à l'AVS. L'art. 82 LPP, qui régit les formes de prévoyance individuelle liée, s'applique en effet uniquement au salariés et aux indépendants qui sont également assurés à l'AVS en raison du renvoi de l'art. 5 al. 1 LPP, celui-ci se justifiant par le fait que, selon le concept constitutionnel, ce sont les trois piliers coordonnés entre eux qui permettent à l'assuré de maintenir de manière appropriée son niveau de vie antérieur (Gladys LAFFELY MAILLARD in Yves NOËL/Florence AUBRY GIRARDIN, Commentaire romand de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct, 2ème éd., 2017, ad. art. 33 LIFD n. 71).

Au cours de l'année de cessation de l'activité lucrative ou de la survenance de l'âge-terme, l'assuré peut déduire la totalité de la contribution annuelle à laquelle il a droit selon l'art. 7 al. 1 let. a ou b (art. 7 al. 4 OPP 3), pour autant que son versement ait lieu avant la cessation de l'activité lucrative ou l'échéance de la prestation due à la survenance de l'âge-terme légal (Gladys LAFFELY MAILLARD in Yves NOËL/Florence AUBRY GIRARDIN, op. cit.).

d. L'administration fédérale des contributions (ci-après : AFC-CH) a édicté une circulaire n° 18 du 17 juillet 2008, disponible à l'adresse https://www.bsv.admin.ch/bsv/fr/home/assurances-sociales/bv/grundlagen-und-gesetze/grundlagen/gebundene-selbstvorsorge.html, qui précise que toute déduction suppose une activité lucrative du contribuable. En cas d'interruption passagère de l'activité lucrative (service militaire, chômage, maladie, etc.), le droit à la déduction subsiste. En cas de cessation de l'activité lucrative, le versement des cotisations n'est plus possible, même si l'âge prévu pour le versement des prestations de vieillesse n'est pas encore atteint (par ex. en cas de retraite anticipée, de cessation de l'activité lucrative en raison de maternité, d'invalidité complète sans capacité de gain résiduelle ; p. 3).

Les prestations en capital de la prévoyance liée sont imposées séparément du reste du revenu conformément à l'art. 22 al. 1 LIFD en relation avec l'art. 38 LIFD. Elles sont soumises à un impôt annuel entier calculé sur la base de taux représentant le cinquième des barèmes inscrits à l'art. 36 LIFD (p. 7).

e. En l'espèce, dans sa déclaration fiscale 2015, le recourant a indiqué être retraité et avoir perçu de E______ un salaire brut de CHF 1.-. Il a précisé, dans la rubrique « Observations », qu'à la mi-février 2015, il avait renoncé à tout salaire envers E______ et demandé une rente du deuxième pilier anticipée de manière rétroactive au 1er janvier 2015, le poste salaire, en CHF 1.- étant fictif et ne visant qu'à permettre la prise en compte de la cotisation LPP au troisième pilier lié, payée le 24 mars 2015.

Conformément à ce que prévoient la doctrine et la jurisprudence fédérale, la possibilité de déduire le montant de la cotisation payée au troisième pilier lié n'est possible que pour un contribuable qui exerce une activité lucrative et est assuré à l'AVS. Par ailleurs, il faut que le versement de sa contribution ait lieu avant la cessation de l'activité lucrative.

Or, le recourant est en situation de retraite anticipée, effective depuis le 1er janvier 2015, si bien qu'il n'exerçait formellement plus d'activité lucrative dès cette date. Il a d'ailleurs perçu de la part de la caisse de prévoyance, le 24 mars 2015, un montant de CHF 15'528.- représentant ses rentes de vieillesse pour les mois de janvier à mars 2015, comme l'atteste un extrait de son compte bancaire joint à son écriture du 14 septembre 2018.

Par ailleurs, le versement du montant de sa cotisation au troisième pilier lié d'un montant de CHF 6'739.- a été effectué le 24 mars 2015, soit à une date postérieure à la cessation formelle de son activité lucrative.

Compte tenu de ces éléments, le recourant ne remplit pas les conditions posées par la loi, la doctrine et la jurisprudence pour pouvoir déduire de son revenu sa cotisation au troisième pilier lié d'un montant de CHF 6'739.- pour l'année 2015.

Quant à la question d'une double imposition, l'avoir de troisième pilier lié du recourant a été imposé en capital séparément du reste du revenu, comme le commandent les art. 22 al. 1 et 38 LIFD, ainsi que l'art. 45 LIPP, si bien qu'on ne saurait suivre son argumentation lorsqu'il soutient que son capital a été imposé également dans le cadre de sa taxation sur le revenu. D'ailleurs, cette séparation d'imposition ressort des bordereaux ICC et IFD du 18 avril 2016 qu'il a joints à son écriture du 14 septembre 2018.

Les griefs seront écartés.

8) Au vu de ce qui précède, l'AFC-GE, confirmée en cela par le TAPI, était fondée à ne pas prendre en considération la déduction sollicitée par le recourant d'un montant de CHF 6'739.- représentant sa cotisation 2015 au troisième pilier lié.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

9) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, dans la mesure où il est recevable, le recours interjeté le 8 juin 2018 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 7 mai 2018 ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : M. Verniory, président, Mmes Payot Zen-Ruffinen et Cuendet, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :