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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4055/2015

ATA/408/2016 du 13.05.2016 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4055/2015-FORMA ATA/408/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 mai 2016

en section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Michel Valticos, avocat

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE

 


EN FAIT

1. Madame A______, née le ______ 1987, a obtenu, en juin 2008, une maturité professionnelle artistique délivrée par l’école cantonale d’art du Valais. Sa moyenne générale s’élevait à 5. Elle avait obtenu 5,2 en droit.

2. Elle a, par la suite, exercé la profession de « designer » dans le domaine de l’architecture d’intérieur, tant en Suisse qu’à l’étranger, notamment à Londres.

3. Ayant souhaité compléter sa formation par des études de droit, elle s’est inscrite, dans le délai échéant le 15 décembre 2014, aux « examens d’admission pour les candidats non porteurs d’un certificat de maturité » auprès de la faculté de droit (ci-après : la faculté) de l’Université de Genève (ci-après : l’université).

4. Mme A______ s’est présentée à la session d’examens organisée en 2015.

5. Par courrier du 20 mai 2015, l’université a notifié à Mme A______ le relevé de ses notes d’examens.

Elle avait obtenu :

- 3 à l’examen écrit de français du 28 mars 2015,

- 3,5 à l’examen écrit de langue du 25 avril 2015 et

- 4,75 à l’oral du 9 mai 2015.

Le total de 11,25 points étant inférieur aux 12 nécessaires, la candidate n’était pas admise à l’université. Elle pouvait se présenter aux examens une seconde fois, lors d’une session ultérieure.

6. Le 5 juin 2015, le professeur B______, professeur ordinaire au département d'histoire du droit et des doctrines juridiques et politiques de la faculté, a reçu Mme A______. Il lui a expliqué les notes obtenues aux examens écrits et lui a remis copie de ses travaux avec les annotations des différents correcteurs.

Celles-ci seront détaillées dans la partie en droit en tant que de besoin.

7. Le 18 juin 2015, Mme A______ a fait opposition à la décision du 20 mai 2015.

Elle a conclu à ce que les notes des examens de français et de langue soient modifiées de manière à ce que la moyenne générale atteigne 4 au moins et à ce qu’elle soit admise à suivre des études de droit à l’université.

Ses notes étaient arbitraires par rapport aux travaux rendus. La sévérité avec laquelle les épreuves avaient été corrigées allait à l’encontre du but de celles-ci, consistant à s’assurer que le candidat à des études juridiques dispose des capacités suffisantes de raisonnement et de synthèse.

8. Par courrier du 15 juillet 2015, la commission des oppositions de la faculté (ci-après : la commission) a transmis à l’intéressée les observations, sur l’opposition, des correcteurs extérieurs, soit Monsieur C______ et Madame  D______, ainsi que la réponse du Prof. B______.

M. C______ maintenait les notes attribuées à la candidate.

Mme D______ indiquait que le travail ayant été « corrigé, lu et relu et discuté avec les jurés, la note attribuée [lui] paraissait correspondre à la prestation fournie ».

Le Prof. B______ maintenait son évaluation.

Les deux premiers relevaient que seules certaines personnes, au bénéfice d’une formation particulière, étaient habilitées à procéder à de telles évaluations. À ce titre, les évaluations de son propre travail effectuées par la candidate dans son opposition étaient sans pertinence.

9. Le 30 juillet 2015, Mme A______ a fait valoir ses arguments à l’encontre des pièces produites.

10. Le 22 octobre 2015, la commission a rejeté l’opposition de Mme A______.

Une note sévère, voire même très sévère ne suffisait pas à constituer une correction arbitraire d’un examen.

Il était exact, contrairement à ce que laissaient entendre les deux correcteurs non membres du corps professoral de la faculté de droit, que la procédure habilitait l’opposante à critiquer les notes litigieuses sans que son opposition ne doive se limiter à des questions de forme.

Toutefois, s’agissant de l’examen écrit de français, indépendamment de la bonne maîtrise du français, singulièrement de la structure des phrases, dont avait fait preuve la candidate, l’introduction était très générale et ne résumait pas les idées principales du texte, contrairement aux consignes. Par ailleurs, la réflexion n’était pas suffisamment rigoureuse et accordait une importance trop grande à des expériences personnelles. Enfin, les adjectifs utilisés étaient trop souvent hyperboliques, voire inappropriés. Une évaluation insuffisante n’avait rien de choquant et semblait justifiée. La note de 3 n’était pas arbitraire.

Il ressortait des observations faites par les correcteurs en charge de l’examen écrit de langue que le résumé en français du texte anglais effectué par la requérante ne mentionnait pas l’ancrage constitutionnel de l’égalité salariale entre hommes et femmes existant dans la constitution depuis 1981 et sa concrétisation législative survenue quinze ans plus tard. Par ailleurs, l’explication de la date du 10 mars, choisie pour la manifestation, tendant à symboliser le nombre de jours de travail supplémentaires nécessaires à une femme désireuse de gagner autant qu’un homme (19 %), n’avait pas été correctement résumée. Le travail de l’opposante ne faisait pas ressortir les deux types de discriminations salariales dont étaient victimes les femmes au travail. Enfin, les explications relatives à la méthode statistique développée par le Professeur E______ et le programme informatique LOGIB, soutenu par le bureau fédéral de l’égalité, étaient imprécises, pour ne pas dire confuses. Une évaluation inférieure à la moyenne n’avait rien de choquant et semblait justifiée. La note de 3,5 n’était pas arbitraire.

11. Par acte du 20 novembre 2015, Mme A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée.

Elle a conclu à son annulation, à la modification des notes des examens de français et de langue de manière à ce que la moyenne générale atteigne 4,0 au moins et à ce qu’il soit dit qu’elle était admise à suivre des études de droit à la faculté. Les conclusions étaient prises sous suite de « frais et dépens ».

a. Le principe de l’interdiction de l’arbitraire avait été violé dans le cadre de la correction de l’examen de français.

Il avait été demandé aux candidats, dans une brève introduction, de dégager et expliquer les idées principales du texte sans le citer, ni le paraphraser. Elle avait par la suite pour consigne d’exposer, dans la partie essentielle de son travail, ses réflexions personnelles à ce sujet. L’exposé ne devait pas dépasser plus de deux ou trois pages.

Elle avait rédigé une introduction dans laquelle elle avait repris le thème principal du texte, à savoir « défendre les animaux, cela ne veut pas dire dédaigner les hommes ». Son introduction avait été brève, mais résumait en une phrase l’idée principale du texte : « En se préoccupant du sort des animaux, l’homme serait-il devenu apathique aux autres horreurs humaines ? ».

Dans sa seconde partie, elle avait exposé ses réflexions personnelles, agrémentées d’exemples vécus, comme demandé dans la consigne, au demeurant peu claire. Son raisonnement et son esprit de synthèse n’avaient été que partiellement critiqués. Les reproches des correcteurs ne concernaient essentiellement que son style. Il avait été déploré qu’elle n’ait pas suffisamment axé la réflexion sur le texte. Cette critique était inacceptable et arbitraire dès lors que la consigne exigeait l’exposé des réflexions personnelles du candidat. La commission et les correcteurs avaient pris en compte des critères de notation différents (« style hyperbolique, mauvais emploi des adjectifs ») de ceux prévus dans le cadre de la directive et avaient reproché à l’intéressée de s’être laissée aller à des réflexions trop personnelles et illustrées, alors même que la consigne demandait un tel exercice. De telles critiques ne justifiaient pas la note dérisoire et quasiment éliminatoire de 3, ce d’autant moins qu’elle avait obtenu 4,75 à l’examen oral, ce qui témoignait de ses aptitudes à suivre des études de droit. À considérer que le style rédactionnel soit un critère de notation, il ne justifiait pas un abaissement de la note. Ce seul motif imposait de reconnaître que la note était arbitraire et devait être augmentée.

L’autorité intimée s’était laissée guider, dans sa correction, par des motifs sans rapport avec la nature de l’évaluation demandée, à l’instar de l’orthographe et de la synthèse, ce qui était aussi arbitraire.

La note de 3 correspondant à un travail non seulement insuffisant, mais mauvais, apparaissait en conséquence totalement insoutenable au regard des consignes et du travail rendu. L’examen avait pour but d’appréhender des capacités du candidat à suivre des études universitaires et non son aptitude à l’agrégation au collège de France.

b. L’évaluation de l’examen de langue était arbitraire.

Sur les quatre points qu’il lui était reproché d’avoir omis, seuls deux n’avaient effectivement pas été traités. Le choix de la date du 10 mars pour la manifestation avait été correctement expliqué, contrairement à ce que retenait la commission. Le programme LOGIB ne représentait qu’un élément auxiliaire du texte, de sorte que l’oubli ne pouvait pas être sanctionné. Elle n’avait commis que deux erreurs dans la synthèse, raison pour laquelle la note de 3,5 était injuste et insoutenable.

Son style rédactionnel avait été pris en compte dans l’établissement de la note finale, alors même que cela ne constituait pas un critère de jugement.

Seules les deux erreurs de synthèse, au demeurant mineures, pouvaient être retenues. Elles ne pouvaient en aucun cas justifier une soustraction de 2,5 points, mais tout au plus d’un seul, notamment en comparaison du nombre d’informations qu’elle avait correctement retranscrites. Une telle sévérité dans la correction était insoutenable puisqu’elle ne reposait sur aucun critère. L’autorité intimée s’était laissé guider dans sa correction par des motifs sans rapport avec la nature de l’évaluation qui lui était demandée, ce qui était arbitraire. Ledit travail méritait 4,5, voire 5.

c. Le résultat final violait l’interdiction de l’arbitraire. Elle obtenait un score très proche de la moyenne qui lui aurait permis de suivre les cours de droit. La sévérité avec laquelle les épreuves avaient été corrigées allait à l’encontre du but de celles-ci, consistant à s’assurer que le candidat aux études juridiques disposait des capacités suffisantes de raisonnement et de synthèse. Au-delà des notes
elles-mêmes, les critères de correction adoptés étaient contraires aux consignes données aux candidats que la recourante avait parfaitement respectées. Les corrections violaient de façon choquante le sentiment du droit et de l’équité, et constituaient une violation du principe de l’interdiction de l’arbitraire. Un tel résultat paraissait d’autant plus arbitraire qu’il était proche de la moyenne et que seules des fautes, dans l’ensemble mineures, lui avaient été reprochées. Les conséquences de l’échec étaient considérables puisqu’elle se voyait privée de suivre des études de droit alors qu’elle en avait les capacités et que les notes obtenues ne reflétaient assurément pas le travail fourni. La note de 5,2 obtenue, en droit, lors de la maturité professionnelle démontrait d’ailleurs qu’elle possédait les aptitudes nécessaires à cette fin. Une augmentation de 0,5 du travail de français et de 0,25 du travail de langue, soit des corrections minimales par rapport aux corrections effectuées et à la valeur objective des examens, lui permettrait d’entreprendre ces études, à charge pour les enseignants de la faculté de droit de juger de ses aptitudes, tant sur le plan juridique que rédactionnel. À défaut, la lourde sanction résultant de cet échec apparaissait critiquable sous l’angle du principe de la proportionnalité.

12. Par réponse du 21 décembre 2015, la faculté de droit s’en est rapportée à justice quant à la recevabilité du recours et a conclu, au fond, au rejet de celui-ci.

La recourante se limitait à substituer sa propre évaluation des examens de français et de langue à celle des examinateurs, sans démontrer en quoi les notes attribuées à ses examens seraient choquantes, voire arbitraires. Elle persistait dans les termes de la décision sur opposition du 22 octobre 2015.

13. Par réplique du 14 janvier 2016, la recourante a contesté ne pas avoir démontré en quoi les notes attribuées à ses examens étaient choquantes, voire arbitraires. La faculté n’avait pas eu le loisir d’étudier les développements contenus dans son acte de recours auquel elle renvoyait.

En réponse à une question du juge délégué, elle a précisé ne pas s’être inscrite, avant le terme du 15 décembre 2015, pour la session d’examens organisée en 2016.

La doyenne de la faculté avait refusé que la réussite de nouveaux examens pour les non porteurs de maturité lors de la session 2016, puisse valider une inscription avec effet rétroactif et ainsi se présenter, dès la session d’été 2016, aux examens de la faculté de droit. Un échange de correspondances des 2 novembre, 10 décembre et 22 décembre 2015, en témoignait.

Compte tenu de son âge et de sa situation personnelle, elle n’était pas en mesure de différer d’une année supplémentaire son inscription à l’université et suivait assidument les cours pour se présenter aux examens de première année à la session de juin 2016, pour autant que son recours soit favorablement accueilli.

14. Une audience de comparution personnelle s’est tenue le 28 avril 2016. La recourante a indiqué bénéficier d’une bourse pour l’année 2015-2016 exclusivement. Le report d’un an serait lourd de conséquences. Les parties ont persisté dans leurs conclusions.

À l’issue de l’audience, la cause a été gardée à juger.

15. À la demande du juge délégué, la faculté de droit a précisé, le 6 mai 2016, la composition de la commission d’admission de la faculté.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 43 de la loi sur l'université du 13 juin 2008 - LU - C 1 30, art. 91 du statut de l’université du 16 mars 2011, entré en vigueur le 28 juillet 2011 [ci-après : le statut] ; art. 36 al. 1 du règlement relatif à la procédure d’opposition au sein de l’université de Genève - RIO-UNIGE ; art. 19 du règlement interne relatif à l’admission à l’Université de Genève des candidats non-porteurs d’un certificat de maturité [ci-après : règlement] ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. La commission en charge de l’admission (ci-après : la commission d’admission) des étudiants sans maturité de la faculté de droit est composée d’au moins trois membres du corps enseignant de chaque unité principale d’enseignement et de recherche (ci-après : UPER) concernée. La majorité de ses membres appartient au corps professoral (art. 4 al. 1 règlement). Elle a été désignée par le collège des professeurs de la faculté de droit (art. 4 al. 2 règlement). Les examens écrits ont été soumis à l’appréciation de deux examinateurs au moins dont l’un est membre du corps professoral en application de l’art. 70 al. 2 du statut.

3. Le litige porte sur le refus d’admission de la recourante, non titulaire d’un diplôme de maturité, à la faculté de droit de l’université, singulièrement sur le résultat de deux examens.

4. Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents.

En matière d’examens, le pouvoir de l’autorité de recours est extrêmement restreint, sauf pour les griefs de nature formelle, qu’elle peut revoir avec un plein pouvoir d’examen. En effet, selon la jurisprudence, l'évaluation des résultats d'examens entre tout particulièrement dans la sphère des décisions pour lesquelles l'administration ou les examinateurs disposent d'un très large pouvoir d'appréciation et ne peut faire l'objet que d'un contrôle judiciaire limité (ATA/592/2015 du 9 juin 2015 consid. 4b ; ATA/861/2014 du 4 novembre 2014 consid. 8 ; ATA 669/2014 du 26 août 2014 consid. 3 ; ATA/131/2013 du 5 mars 2013 consid. 5).

Cette retenue respecte la jurisprudence du Tribunal fédéral, qui admet que l'autorité judiciaire précédente fasse preuve d'une certaine retenue (« gewisse Zurückhaltung »), voire d'une retenue particulière (« besondere Zurückhaltung »), lorsqu'elle est amenée à vérifier le bien-fondé d'une note d'examen
(ATF 136 I 229 consid. 5.4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_54/2014 précité consid. 5.6 ; 2C_632/2013 du 8 juillet 2014 consid. 3.2 ; 2D_6/2013 du 19 juin 2013 consid. 3.2.2). Notamment, dans le cadre de l’évaluation matérielle d’un travail scientifique, il existe des marges d’appréciation, qui impliquent forcément qu’un même travail ne soit pas apprécié de la même manière par les spécialistes. Les tribunaux peuvent faire preuve de retenue tant qu’il n’y a pas d’éléments montrant des appréciations grossièrement erronées (ATF 136 I 229 consid. 5.4.1). Cependant, faire preuve de retenue ne signifie pas limiter sa cognition à l'arbitraire. Une telle limitation n'est compatible ni avec l'art. 29a de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ni avec l'art. 110 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005
(LTF - RS 173.110), qui garantissent pour tous les litiges l'accès à au moins un tribunal qui peut contrôler exhaustivement les questions de fait et de droit (arrêts du Tribunal fédéral 2D_54/2014 précité consid. 5.6 ; 2C_180/2013 du 5 novembre 2013 consid. 8.1).

La chambre de céans ne revoit l'évaluation des résultats d'un examen qu'avec une retenue particulière, parce qu'une telle évaluation repose non seulement sur des connaissances spécifiques mais également sur une composante subjective propre aux experts ou examinateurs ainsi que sur une comparaison des candidats. En outre, à l'instar du Tribunal fédéral (ATF 136 I 229 consid. 6.2 ; 131 I 467 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_38/2011 du 9 novembre 2011 consid. 4.1), et par souci d'égalité de traitement, la juridiction de céans s'impose cette retenue même lorsqu'elle possède les connaissances spécifiques requises qui lui permettraient de procéder à un examen plus approfondi de la question, comme c'est le cas en matière d'examens d'avocats ou de notaires (ATA/915/2015 du 8 septembre 2015 ; ATA/141/2015 du 3 février 2015 ; ATA/694/2013 du 15 octobre 2013 consid. 4 ; ATA/364/2007 du 31 juillet 2007, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 2C_501/2007 du 18 décembre 2008).

En principe, elle n'annule donc le prononcé attaqué que si l'autorité intimée s'est laissée guider par des motifs sans rapport avec l'examen ou d'une autre manière manifestement insoutenable (ATF 136 I 229 consid. 6.2 ; ATF 131 I 467 consid. 3.1 ; ATA/141/2015 précité ; ATA/131/2013 du 5 mars 2013 consid. 6b).

5. L’université est ouverte à toute personne remplissant les conditions d’immatriculation et d’inscription (art 16 al. 1 LU). Le statut fixe notamment les titres, tels que maturité gymnasiale, diplôme de fin d’études délivré par une haute école spécialisée (HES) ou autre, donnant droit à l’immatriculation ainsi que les conditions permettant à des personnes qui ne possèdent pas un tel titre d’être admises à l’immatriculation (art 16 al. 3 let. a LU).

6. L’art. 55 al. 4 du statut précise à quelles conditions les candidats qui ne possèdent pas l’un des titres précité peuvent être admis à l’immatriculation, soit notamment, « faire preuve des aptitudes nécessaires, selon les modalités fixées dans un règlement interne tenant compte des exigences spécifiques à chaque UPER (art. 55 al. 4 let. d statut).

7. Le règlement, dans sa version d’août 2014, précise que, pour la faculté de droit, le candidat non-porteur d’un certificat de maturité doit se présenter à trois examens (art. 1 let. a). Les art. 10, 11 et 14 en décrivent les modalités.

Aux termes de l’art. 14, pour l’admission en faculté de droit, il est prévu :

- un examen écrit comportant le résumé et le commentaire personnel d'un texte, choisi par le candidat parmi plusieurs textes différents qui lui sont soumis et portant sur un sujet de sciences humaines ;

- un examen écrit portant sur la compréhension d'un texte traitant d'un sujet de sciences humaines, rédigé en langue étrangère; le candidat a le choix entre un texte en allemand ou en anglais ;

- un examen oral sur un sujet spécial choisi par le candidat lui-même et accepté par la commission d'admission.

8. Les directives de la faculté de droit de janvier 2016 relatives auxdits examens précisent que ces épreuves d’admission ne sont pas conçues pour juger des connaissances du candidat, mais doivent permettre d’apprécier son aptitude à accomplir des études universitaires, et des études de droit en particulier, avec des chances suffisantes de succès. L’objectif est notamment de déterminer si le raisonnement et l’esprit de synthèse du candidat correspondent à ceux qu’exigent les études de droit.

Concernant les examens écrits, il est détaillé que l’examen de français est un commentaire de texte. Le candidat a le choix entre deux textes portant sur des sujets de sciences humaines. Il est appelé à en dégager et expliquer les idées principales et à exposer, de manière claire et cohérente, sur deux à trois pages, ses réflexions personnelles à leur sujet.

Pour l’examen de langue, le candidat a le choix entre un texte allemand et un texte anglais d’environ quatre pages dactylographiées. Il est appelé à en faire un résumé et non une traduction intégrale, en français, sur environ deux pages manuscrites et éventuellement à répondre, en français, à quelques questions posées en allemand ou en anglais sur ce texte.

9. En l’espèce, la recourante se plaint d'avoir fait l'objet d'une évaluation arbitraire lors de ses examens de français et de langues.

Une décision est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. lorsqu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou lorsqu’elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité (ATF 138 I 49 consid. 7.1 p. 51 et arrêts cités). À cet égard, le Tribunal fédéral ne s’écarte de la solution retenue par l’autorité cantonale de dernière instance que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable, qu’elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, si elle a été adoptée sans motif objectif ou en violation d’un droit certain (ATF 136 III 552 consid. 4.2 p. 560 ; 132 III 209 consid. 2.1 p. 211 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_227/2012 du 11 avril 2012). L’arbitraire ne résulte pas du seul fait qu’une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu’elle serait préférable. Pour qu’une décision soit annulée pour cause d’arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 138 III 378 consid. 6.1 p. 380 ; 138 I 49 consid. 7.1 p. 51 ; 137 I 1 consid. 2.4 p. 5 ; ATF 136 I 316 consid. 2.2.2 p. 318 ; ATF 134 II 124 consid. 4.1 p. 133 et les arrêts cités).

Appelée à examiner le caractère arbitraire d’une décision, la chambre de céans suit le raisonnement du Tribunal fédéral en la matière (ATA/661/2012 du 25 septembre 2012 consid. 5 et arrêts cités).

10. L’examen écrit de français avait pour consigne, sous l’intitulé « commentaire d’un texte selon l’art. 12 let. a du règlement interne relatif à l’admission à l’Université de Genève des candidats non-porteurs d’un certificat de maturité du 25 février 1977 » de, « dans une introduction, dégagez et expliquez les idées principales du texte, sans le citer, ni le paraphraser. Puis, dans la partie essentielle de votre travail, exposez vos réflexions personnelles à ce sujet ». Il était demandé de présenter « un exposé bien construit et clairement rédigé ».

En l’espèce, les correcteurs ont fait les observations suivantes :

a. M. C______ a mentionné, sur le travail de la recourante, que « l’introduction était trop générale. Les idées principales du texte n’étaient pas résumées dans l’introduction, contrairement aux consignes données. La maîtrise du français était bonne ».

b. Mme D______ a relevé que « l’introduction était bien maladroite. Elle n’introduisait guère le sujet, restait trop partielle et générale, et ne résumait pas les grandes lignes du texte, contrairement à la consigne. Par ailleurs, la réflexion n’était pas suffisamment axée sur l’ensemble du texte proposé. Elle manquait de rigueur et ne quittait guère le niveau des exemples. La deuxième partie était plus intéressante, qui racontait une expérience personnelle, mais elle était anecdotique eu égard au sujet à traiter. Il s’agissait là d’un autre type de texte que celui demandé ici. L’expression était embarrassée et bien affaiblie par l’emploi constamment hyperbolique des adjectifs. Enfin, le vocabulaire laissait bien à désirer (emploi fautif, déplacé) ».

L’épreuve de la recourante faisait l’objet de plusieurs annotations dans le texte, à l’instar de la mention « voc » à côté des adjectifs « fragile, délicat, outré, apathique, inexorable » ou de la mention « hyperbole » à côté des termes « effroyable, abominable, scandaleuse ». Le terme « vomitive » faisait l’objet de la remarque « voc déplacé ». Le terme « torture » était accompagné de la remarque « à définir ». Par ailleurs, au début du texte, l’étudiante avait repris le titre de l’article, soit « défendre les animaux, cela ne veut pas dire dédaigner les hommes ». Elle commençait son texte par les termes « la torture envers les animaux révolte bon nombre d’entre nous ». L’expert avait mis en lien « défendre les animaux » et « la torture » en indiquant qu’il s’agissait d’un « saut ».

c. Le Prof. B______ a effectué des corrections dans le texte. À côté de l’introduction, il a relevé un manque de structure et un résumé peu convaincant. Il a mentionné un point d’interrogation aux côtés de « la censure n’existe pas ou plus ». Il a mentionné que le style était à améliorer lorsque l’intéressée a fait référence à la conscience morale et a supprimé le terme « morale ». La phrase « il est encore flagrant que la douleur humaine face à la mort de ces milliers d’innocents et d’enfants lors de ces offensives est vomitive » a fait l’objet d’une interrogation à côté du terme « flagrant » et « offensive », le terme « vomitive » étant souligné. Les termes « overdose d’informations ingérées » a vu le premier de ceux-ci rayé.

d. En l’espèce, il ressort de l’analyse des observations des trois experts que l’introduction était insatisfaisante. Le texte soumis par la recourante ne résumait pas les idées principales du texte, comme demandé par la consigne. L’intéressée n’indique d’ailleurs pas en quoi les critiques émises à l’encontre de son introduction seraient infondées.

Concernant la « partie essentielle », selon les termes de la consigne, la candidate devait « exposer ses réflexions personnelles ». Cette consigne est conforme aux directives et à l’art. 14 du règlement qui fait mention d’un « commentaire personnel ». Cette partie du travail n’a pas fait l’objet de critiques de la part de M. C______. Mme D______ a relevé qu’il s’agissait moins de réflexions que d’exemples personnels pour certains plutôt anecdotiques, compte tenu du sujet à traiter. Le Prof. B______ a peu annoté la partie essentielle du travail. Contrairement à ce qu’allègue la recourante, il lui était demandé ses réflexions personnelles sur le sujet. Il n’était pas demandé d’exemples. Toutefois, le principe de l’illustration par l’exemple n’a, en soi, pas été critiqué. La qualité desdits exemples a été remise en cause, tout comme leur trop grande importance quantitative par rapport aux réflexions personnelles attendues. Cette critique s’inscrit parfaitement dans le cadre de l’examen, conformément à la consigne donnée, aux textes règlementaires applicables et dans l’objectif défini par les directives, soit de déterminer si le raisonnement et l’esprit de synthèse du candidat correspondent à ceux qu’exigent les études de droit.

La recourante relève que certaines critiques émises font appel à d’autres critères d’évaluation à l’instar des remarques sur le choix du vocabulaire ou sur son style et que son examen était exempt de fautes d’orthographe ou de grammaire. Il sera cependant relevé que la consigne exigeait une rédaction « clairement rédigée ». Par ailleurs, le but précité, mentionné dans les directives, est précédé du terme « notamment ». À ce titre, des appréciations portant sur le choix des termes employés, qu’ils soient inadéquats ou imprécis, entrent parfaitement dans l’objectif général défini par le statut soit l’appréciation de l’aptitude à accomplir des études universitaires, en particulier de droit.

Compte tenu du large pouvoir d’appréciation de l’autorité intimée, du pouvoir d’appréciation restreint de la chambre de céans, du fait que les experts ont été invités à réévaluer une nouvelle fois l’examen et qu’ils ont maintenu leur appréciation et de l’argumentation qui précède, l’autorité intimée n’a pas mésusé de son pouvoir d’appréciation en estimant l’évaluation du travail querellé insuffisante. A fortiori, cette appréciation n’apparaît pas arbitraire.

11. L’examen de langue avait pour consigne de devoir choisir soit le texte allemand, soit le texte anglais pour en faire un résumé en français sur environ deux pages manuscrites « et non pas traduit intégralement ».

Mme A______ a opté pour le texte anglais.

En l’espèce, les correcteurs ont fait les observations suivantes :

a. M. C______ a indiqué sur l’épreuve corrigée que plusieurs éléments manquaient. Il a précisé dans le texte à quel endroit ceux-ci n’avaient pas été mentionnés, à l’instar des références à la Constitution et à la loi, d’un écart salarial de 19 % ou de la précision que la méthode du Prof. E______ valait pour les entreprises de plus de cinquante employés. Au titre de commentaire général, il a mentionné que la fin manquait de précision et relevé, à côté de la traduction faite par l’étudiante, que sa dernière phrase conclusive n’était pas dans le texte.

b. Aucune correction de Mme D______ n’a été versée au dossier.

c. Le Prof. B______ a annoté la totalité du texte de l’étudiante de remarques telles que : « Constitution 1981 – loi quinze ans plus tard », « différence salariale (illisible) = 19 % », « jour supplémentaire qu’une femme doit travailler pour gagner l’équivalent de l’homme », « et les 40 % ? », « deux types de discrimination + aide ? », « certification d’égalité salariale ? », « LOGIB = BFEG ? », « avantage des certifications + LOGIB ? ».

d. En l’espèce, la recourante ne conteste pas que deux des quatre points relevés par la commission n’ont pas été abordés dans son épreuve. Elle indique toutefois avoir correctement mentionné le choix de la date de la manifestation du 10 mars. La chambre de céans relèvera toutefois que la citation faite par Mme A______ de son propre travail dans son acte de recours n’est pas conforme au texte original. Ce dernier indique « La date du 10 mars a été choisie en fonction du nombre de jours étant nécessaires à une femme afin de rattraper cette différence salariale par rapport à un homme ». Dans son recours, l’intéressée fait référence à « la » différence. Or, c’est précisément parce que la candidate n’avait pas défini la différence de salaire que le Prof. B______ a insisté dans ses observations sur la définition de cette différence, soit 19 %. M. C______ a par ailleurs mentionné que la recourante se trompait lorsqu’elle affirmait que le Prof. E______ avait mis au point un système informatique calculant les inégalités salariales. Il s’agissait d’une méthode statistique. Il était par ailleurs erroné de prétendre que les entreprises pouvaient en tout temps utiliser ce programme comme outil d’évaluation. Contrairement à ce que soutient la recourante, la correction repose sur des motifs objectifs et détaillés par les correcteurs. Les critiques relèvent une mauvaise compréhension du texte, soit précisément ce qui doit être évalué, conformément à l’objectif de l’examen décrit par l’art. 14 let. b du règlement.

Compte tenu du large pouvoir d’appréciation de l’autorité intimée, du pouvoir d’appréciation restreint de la chambre de céans, du fait que les experts ont été invités à évaluer une nouvelle fois l’examen et qu’ils ont maintenu leur appréciation et de l’argumentation qui précède, la note de 3,5, insuffisante, ne relève pas d’un abus du pouvoir d’appréciation de l’autorité intimée et, par voie de conséquence, n’est pas arbitraire.

12. Le dernier grief de la recourante, à savoir l’arbitraire du résultat global, ne résiste pas à l’examen, compte tenu de ce qui précède et singulièrement du fait que les notes insuffisantes de l’étudiante aux deux premiers des trois examens ne sont pas arbitraires.

La recourante oppose sa propre notation à celles des examinateurs en procédant à une évaluation de ses propres travaux, ce qui lui permettrait de remplir les conditions d’immatriculation. Toutefois, la commission disposant d’un très large pouvoir d’appréciation dans son évaluation des résultats et apportant des explications circonstanciées quant à son appréciation des deux examens concernés, rien ne permet de considérer que l’autorité intimée s’est laissée guider par des considérations sans rapport avec les examens ou les prestations de la recourante, ou encore que son appréciation, ou les notes attribuées à ceux-ci, serait partiale ou arbitraire.

13. La recourante évoque, à la dernière ligne de son argumentation, une violation du principe de la proportionnalité. Elle ne motive toutefois pas cet argument.

Dans l’exercice de ses compétences, toute autorité administrative est tenue de respecter le principe de la proportionnalité, qui découle tant de l’art. 36 al. 3 Cst. que, de manière plus générale, de l’art. 5 al. 2 Cst., qui commande que la mesure étatique en cause soit nécessaire et apte à atteindre le but prévu et qu’elle soit dans un rapport raisonnable avec l’atteinte aux droits des particuliers qu’elle entraîne (ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 140 II 194 consid. 5.8.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8D_1/2014 du 4 février 2015 consid. 5.3.2 ; ATA/1193/2015 du 3 novembre 2015 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 ; ATA/832/2013 du 17 décembre 2013).

En l’espèce, compte tenu de ce qui précède, et en l’absence de toute motivation spécifique, ce grief est infondé pour autant qu’il soit recevable.

14. Enfin, les informalités constatées sur la première page des examens écrits quant à la mention du règlement ne sont pas de nature à modifier le résultat qui précède, s’agissant d’imprécisions sans conséquences.

15. Le recours sera rejeté.

16. Un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée, pas plus qu'à l’université, qui dispose d'un service juridique compétent pour traiter ce type de procédure (art. 87 al. 2 LPA ; ATA/1336/2015 du 15 décembre 2015).

 


 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 novembre 2015 par Madame A______ contre la décision sur opposition de l’Université de Genève du 22 octobre 2015 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Madame A______ un émolument de CHF 400.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral :

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, s’il porte sur le résultat d’examens ou d’autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d’exercice d’une profession (art. 83 let. t LTF) ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Michel Valticos, avocat de la recourante ainsi qu'à l'Université de Genève.

Siégeants : Mme Junod, présidente, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.


 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :