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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3734/2014

ATA/327/2016 du 19.04.2016 ( AIDSO ) , REJETE

Recours TF déposé le 18.05.2016, rendu le 20.05.2016, IRRECEVABLE
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3734/2014-AIDSO ATA/327/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 avril 2016

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Pierre-Bernard Petitat, avocat

contre

HOSPICE GÉNÉRAL



EN FAIT

1. Monsieur A______, né le ______ 1969, est originaire du Cameroun et est au bénéfice d'un permis B.

Le 11 décembre 1999, il a épousé Madame B______, également ressortissante camerounaise, bénéficiaire d'un permis C.

Trois enfants sont issus de cette union: C______, né le ______ 1998, D______, né le ______ 2001 et E______, née le ______ 2004.

2. À compter du 1er juin 2001, la famille a bénéficié de prestations d'aide financière versées par l'Hospice général (ci-après: l'hospice).

3. Mme B______ et M. A______ se sont séparés en 2006.

Par jugement de divorce du 30 novembre 2009, le Tribunal de première instance (ci-après: TPI) a prononcé le divorce des époux, accordant la garde et l'autorité parentale des trois enfants à leur mère et réservant un large droit de visite à leur père.

4. À partir du 1er octobre 2006, M. A______ a perçu de l’hospice des prestations d'aide financière couvrant son seul entretien.

5. Le 19 mai 2008, M. A______ a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité (ci-après: AI) auprès de l'office cantonal des assurances sociales (ci-après: OCAS) suite à des problèmes de santé, principalement d'ordre cardiaque.

6. Le 21 octobre 2008, M. A______ a conclu un contrat de bail portant sur un appartement de deux pièces sis 1______, route de F______ à Carouge. Le loyer était pris en charge par l'hospice.

7. Les 24 avril 2009, 2 juin 2010, 11 janvier 2012 et 15 avril 2013 notamment, M. A______ a signé le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l'hospice général », aux termes duquel il s'engageait entre autres à donner immédiatement et spontanément à l’hospice tout renseignement et toute pièce nécessaire à l'établissement de sa situation personnelle, familiale et économique, tant en Suisse qu'à l'étranger, en particulier toute information sur toute forme de revenus, ainsi qu'à informer immédiatement et spontanément l'hospice de tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant de ses prestations d'aide financière, notamment de toute modification de sa situation personnelle, familiale et économique, tant en Suisse qu'à l'étranger.

8. Le ______ 2013 est née H______ à I______ (France), issue de la relation entre M. A______ et Madame J______, née le ______ 1975 au Cameroun et domiciliée 2______, rue de K______ à Annemasse (France).

9. Le 12 août 2013, lors d'un entretien avec le responsable de son dossier à l'hospice, M. A______ a annoncé la naissance de sa fille, exposant que Mme J______ et lui-même n'habitaient pas ensemble.

10. Le 22 août 2014, le service des enquêtes de l'hospice a livré un rapport de contrôle relatif à la situation de M. A______.

Un contrôleur s'était rendu chez l'intéressé les 30 juillet et 22 août 2014, mais personne n'avait répondu. Le 22 août 2014, le contrôleur s'était entretenu avec le concierge de l'immeuble, lequel lui avait appris que M. A______ ne résidait plus dans son appartement depuis plus d'une année. À sa connaissance, il habitait avec sa nouvelle compagne et leur enfant.

11. Par décision du 15 septembre 2015, l'hospice a mis fin au droit à des prestations d'aide financière de M. A______ à compter du 1er octobre 2014, au motif qu'il avait été constaté qu'il n'avait plus sa résidence effective dans le canton de Genève depuis environ une année, mais qu'il vivait avec sa compagne en France voisine. La décision mettait également un terme au subside partiel de l'assurance-maladie versé en complément de ses prestations d'aide financière.

La décision était exécutoire nonobstant opposition.

12. Le 23 septembre 2014, M. A______ a formé opposition contre la décision de l'hospice précitée, concluant à son annulation et à la restitution de l'effet suspensif.

Comme déjà annoncé à l'hospice, il avait une fille avec Mme J______, toutefois ils ne vivaient pas ensemble. Il était domicilié et dormait régulièrement dans son appartement à Carouge, tandis que Mme J______ vivait à Annemasse. Par convention du 14 août 2013, les parents avaient convenu de partager la garde de leur fille. Il lui arrivait toutefois de se rendre dans cette dernière ville pour rendre visite à sa fille et à la mère de celle-ci. Son état de santé l'obligeait par ailleurs à résider sur le territoire suisse et il lui était impossible de demander l'aide sociale en France puisqu'il n'y résidait pas.

13. Par décision sur opposition du 7 novembre 2014, l'hospice a confirmé sa décision sur le fond et a rejeté la requête de restitution de l'effet suspensif de M. A______.

Les explications de M. A______ selon lesquelles il avait sa résidence effective à Genève et ne se rendait en France que pour rendre visite à sa fille et à la mère de celle-ci s'opposaient au témoignage recueilli par le contrôleur de l'hospice lors de son passage à son domicile, ainsi qu'aux pièces de son dossier. Il apparaissait que tous les actes de la vie quotidienne, à savoir ses opérations bancaires, ses paiements postaux, ses achats (médicaments et autres) étaient effectués en zone frontalière ou en France. De plus, seul le fait qu'il n'ait pas sa résidence effective à Carouge pouvait justifier le fait qu'il ait indiqué à son assistante sociale le 30 juin 2014 trouver contraignant de se rendre deux fois par mois au centre d'action sociale (ci-après: CAS) de Carouge pour les besoins de la gestion de ses frais médicaux.

14. Par acte du 4 décembre 2014, M. A______ a formé recours contre cette décision sur opposition auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après: la chambre administrative) concluant à son annulation et à la restitution de l'effet suspensif.

S'il n'était pas constamment dans son appartement, il y résidait et y dormait habituellement. Il vivait et effectuait ses courses dans le quartier, comme le prouvait les attestations produites de divers commerçants et voisins. Il se rendait souvent à Annemasse pour voir sa fille et la mère de celle-ci, et il lui arrivait d'y dormir, mais il n'avait aucune intention de s'établir en France, dans la mesure où il était obligé de résider en Suisse pour des raisons médicales et qu'il dépendait de l'aide sociale dans l'attente d'une décision de l'AI. Il n'était d'ailleurs nullement démontré qu'il avait le centre de ses relations personnelles et professionnelles en France.

Il émettait des réserves sur les déclarations prétendument effectuées par le concierge de l'immeuble, dans la mesure où ce dernier n'habitait pas sur place. À l'évidence, ses réponses lui avaient été suggérées par l'enquêteur, ce que lui avait d'ailleurs été confirmé le concierge.

S'agissant des achats et paiements bancaires ou postaux effectués à Chêne-Bourg ou Thônex, ils existaient déjà avant même qu'il se rende souvent à Annemasse. Son ex-épouse et leurs enfants habitaient à Chêne-Bourg et il s'y rendait pour exercer son droit de visite. Il faisait des achats à la pharmacie L______ de Chêne-Bourg depuis 2005, à la pharmacie M______ à Chêne-Bourg depuis 2014, mais aussi dans une pharmacie à Carouge parfois. Plusieurs de ses médecins traitants exerçaient par ailleurs dans la région de Chêne-Bourg. Il avait continué à effectuer une partie de ses opérations bancaires et postales à Chêne-Bourg, alors qu'il était domicilié à Carouge, même si cela était devenu plus fréquent depuis qu'il se rendait à Annemasse, et plus encore depuis la naissance de son enfant. Il n'avait en outre jamais trouvé contraignant de se rendre deux fois par mois au CAS de Carouge.

Il a notamment joint à son recours diverses attestations manuscrites datées de novembre ou décembre 2014, pour la plupart établies selon le même modèle, de personnes indiquant qu’il résidait à Carouge, une attestation de la pharmacie N______ à Carouge, indiquant qu'un dossier à son nom existait dans leur officine, ainsi que deux attestations de la pharmacie M______ et de la pharmacie L______, toutes deux à Chêne-Bourg, affirmant qu'il était un client régulier. Il a également produit deux attestations manuscrites de commerçants de Carouge attestant qu’il était un de leur client et une attestation de Madame O______, attestant lui avoir rendu plusieurs fois visite dans son appartement de Carouge, la dernière fois étant le 15 novembre 2014. Il a encore produit ses relevés bancaires pour les mois de novembre et décembre 2010 et pour avril 2012, lesquels révélaient plusieurs retraits au bancomat de Chêne, ainsi que des extraits de son livret de récépissés postaux de l'année 2011, desquels il ressortait que sur quarante-cinq paiements, trois avaient été faits en Ville de Genève, dix l'avaient été à Carouge, et trente-deux l'avaient été à Thônex.

15. Par courrier du 8 décembre 2014, l'hospice a indiqué ne pas s'opposer à la demande de restitution de l'effet suspensif sollicitée par M. A______.

16. Par décision du 11 décembre 2014, la présidence de la chambre administrative a accordé la restitution de l'effet suspensif au recours et réservé le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond.

17. Dans sa réponse sur le fond du 19 février 2015, l'hospice a conclu au rejet du recours.

Le 23 janvier 2015, le service des enquêtes avait livré un nouveau rapport de contrôle duquel il ressortait les éléments suivants : les 15 janvier 2015 à 11h45, 16 janvier 2015 à 7h15, 19 janvier 2015 à 7h15, 21 janvier 2015 à 7h30 et 13h15 et 23 janvier 2015 à 7h30, personne n'avait répondu à la porte de l'appartement de M. A______ lorsque le contrôleur s'était présenté. Interrogé par ce dernier le 15 janvier 2015, le concierge de l'immeuble avait à nouveau affirmé que M. A______ ne logeait pas dans son appartement. Il venait toutefois pour relever son courrier. Lors d'un entretien téléphonique le 21 janvier 2015, l'intéressé avait indiqué au contrôleur qu'il avait subi une attaque cardiaque et qu'il devait rester chez lui au calme. Lors d'un entretien au service des enquêtes de l'hospice le 23 janvier 2015, M. A______ avait précisé qu'il logeait 50 % du temps dans son appartement à Carouge avec sa compagne et leur enfant et les autres 50 % dans l'appartement de sa compagne à Annemasse. Il ne pouvait être seul à cause de ses problèmes de santé. Sa compagne avait fait une demande de naturalisation en France et était obligée de rester sur le territoire français, bien qu'ils souhaitaient emménager ensemble sur Genève et s'y marier. Il devait par ailleurs emmener tous les matins son enfant à la crèche depuis Annemasse, car sa compagne commençait le travail à 7h30. Suite à une visite domiciliaire effectuée le même jour, il avait été constaté la présence de deux grands lits doubles dans la chambre. Il y avait très peu d'affaires dans l'armoire, et l'intéressé avait indiqué que ses effets personnels et documents privés se trouvaient chez sa compagne. Dans la cuisine, seules quelques denrées alimentaires non périssables étaient présentes. L'intéressé avait indiqué prendre tous ses repas chez sa compagne le soir, car il devait suivre un régime strict et cette dernière s'occupait de préparer ses repas.

Il ressortait de l'examen du livre jaune de la poste de M. A______ que depuis mars 2013, la plupart de ses paiements étaient effectués à la poste de Thônex. Pour la période du 15 janvier au 7 novembre 2014, sur vingt-quatre paiements effectués, dix-neuf avaient été faits à la poste de Thônex, un à celle de Chêne-Bourg et quatre à celle de Carouge.

L'examen des relevés de compte auprès de la P______ (ci-après: P______) de l'intéressé pour l'année 2014 montrait encore qu'il retirait généralement en une seule fois les prestations d'aide financière juste après leur versement. Tous les retraits et le seul versement effectués sur ledit compte avaient eu lieu à l'agence de Chêne, en dehors de deux retraits effectués à Carouge et à l'hôpital. Tous les achats effectués au moyen de sa carte Maestro avaient par ailleurs été effectués en France, à l'exception de deux achats effectués en Suisse dans un magasin de chaussures, respectivement une station essence.

Ainsi, la visite domiciliaire effectuée ne laissant planer aucun doute sur le fait que l'appartement n'était pas occupé de manière effective, le fait que ses effets personnels et ses documents privés se trouvent chez sa compagne, que ses paiements à la poste et ses retraits d'argent se fassent à proximité d'Annemasse et non de son domicile étaient de nature à confirmer la décision de l'hospice. La force probante des attestations manuscrites produites par M. A______ était par ailleurs douteuse, dans la mesure où elles ne donnaient pour certaines aucune indication permettant d'identifier leur auteur. Le fait qu'il ait un dossier auprès de la pharmacie N______ à Carouge ne prouvait pas qu'il s'y rendait encore régulièrement. À l'inverse, il était attesté que le recourant était un client régulier des pharmacies de Chêne-Bourg, soit à proximité d'Annemasse et non pas dans le quartier de Carouge.

18. Lors de l'audience de comparution personnelle du 30 mars 2015, M. A______ a formellement contesté ne pas habiter à Carouge. Suite à ses problèmes cardiaques, il ne supportait plus de vivre seul. De ce fait, lui-même et Mme J______ vivaient une partie de leur temps à Annemasse et les autres jours à Genève. Il passait selon lui plus de temps à Genève avec elle, qu'à Annemasse.

M. A______ a par ailleurs contesté les propos mis dans sa bouche par l'enquêteur dans son rapport du 23 janvier 2015. Il lui arrivait parfois de déposer sa fille dans sa crèche située au Q______ à Annemasse mais non de manière systématique. Mme J______ travaillait à 70 % en qualité d'assistante de soins à domicile à Annemasse. S'il ne possédait que peu de vêtements, c'était en raison de ses faibles moyens et d'une grande perte de poids. Il effectuait ses paiements à Thônex, car il avait gardé cette habitude du temps de son premier mariage, pendant lequel il habitait à Chêne-Bourg. De plus, ses médecins exerçaient à Chêne-Bourg. Le concierge actuel de son immeuble ne résidait pas dans l'immeuble, ce qui expliquait qu'il le croise rarement.

Lorsqu'il passait la nuit à Carouge, sa compagne venait accompagnée de leur fille H______ ainsi que de sa fille issue d'une précédente relation, R______, âgée de neuf ans. À ces occasions, sa compagne préparait de la nourriture qu'elle prenait pour le repas du soir. Ils faisaient ainsi rarement des courses à Carouge, surtout pour le petit-déjeuner. S'il n'avait que très peu de denrées alimentaires en stock dans son appartement de Carouge, c'est qu'il n'avait pas le droit de consommer, pour des raisons médicales, des denrées ayant plus de deux jours. Lorsque l'enquêteur était venu en janvier 2015, il avait pu lui montrer tous les médicaments qu'il devait prendre, ce qui prouvait qu'il habitait à Carouge. Il avait ses médicaments dans son appartement, mais également dans son sac. Il lui arrivait d'exercer son droit de visite sur l'un ou l'autre de ses trois grands enfants à son domicile ou à Annemasse. Sa compagne et son bébé étaient également présents et tout se passait bien.

Il contestait ne pas avoir été présent dans son appartement le 23 janvier 2015 à 7h30. Lorsqu'il s'était rendu avec le contrôleur dans son appartement, ce dernier lui avait fait remarquer que cela sentait l'encens. Il avait alors expliqué que c'était parce qu'il avait prié le matin même. Il ne se rappelait toutefois pas s'il était dans son appartement les 16 et 19 janvier 2015.

19. Lors de l'audience de comparution personnelle et d'enquêtes du 4 mai 2015, Monsieur S______, contrôleur au service des enquêtes de l'hospice, a été entendu en qualité de témoin. Avant d'effectuer les contrôles des 30 juillet et 22 août 2014, il avait eu accès aux données générales et financières de l'intéressé, mais il n'avait pas eu accès au dossier complet de l'intéressé. Il était au courant qu'il avait eu un enfant, mais ne savait pas si c'était en Suisse ou en France. Lors de ces contrôles, il avait sonné à la porte, mais personne ne lui avait répondu. C'est à cette occasion qu'il avait rencontré le concierge. Par la suite, il avait effectué six nouveaux contrôles impromptus entre le 15 et le 23 janvier 2015, mais personne n'avait répondu dans l'appartement. Il avait alors contacté téléphoniquement le concierge. Le 21 janvier 2015, il avait reçu un appel de M. A______ désireux de changer l'heure de la convocation prévue le 23 janvier 2015. Celui-ci lui avait précisé qu'il avait subi une attaque et devait rester au calme « à la maison ». C'était le terme exact qu'il avait employé. Après cet appel, il avait effectué le même jour un second contrôle à 13h15, mais M. A______ n'était pas dans son appartement. S'agissant de la visite faite dans l'appartement le 23 janvier 2015, son impression était qu'il n'était pas occupé. Il sentait le renfermé, était poussiéreux, contenait peu d'habits et il n'y avait pas de denrées périssables dans le frigo. Les médicaments qui lui avaient été présentés par M. A______ sortaient de son sac. Lorsqu'ils avaient pénétré dans l'appartement, il n'y avait pas d'odeurs d'encens. En revanche, M. A______ avait allumé un bâtonnet avant qu'ils ne commencent la visite.

Mme J______, également entendue en qualité de témoin lors de l'audience, a indiqué qu'elle habitait Annemasse dans un appartement de trois pièces plus cuisine. M. A______ passait voir sa fille de lui-même, dans son appartement, au retour de la crèche. Il lui arrivait d'amener ou d'aller chercher sa fille à la crèche. Si elle n'était pas là, il venait chercher sa fille dans l'appartement. Lorsqu'elle ne travaillait pas le week-end, elle se rendait dans l'appartement de M. A______ à Carouge. Il ne vivait pas chez elle, mais venait souvent, et plus régulièrement encore depuis son opération. À une époque, elle faisait tous les repas de M. A______, pour le midi et le soir, car il devait suivre un régime strict. Depuis le mois de février, elle ne lui préparait plus systématiquement ses repas. Il venait manger chez elle deux à trois fois par semaine et mangeait chez lui les autres jours. Ce dernier mois, il était venu trois à quatre fois par semaine à son domicile et parfois il y dormait. Elle ne disposait d'aucun habit pour elle-même ou pour ses filles dans l'appartement de M. A______. Lorsqu'elle se rendait dans l'appartement de celui-ci, elle faisait les courses à Annemasse et préparait les repas sur place. Elle s'y rendait du vendredi au dimanche, lorsqu'elle ne travaillait pas le week-end. En 2012, les enfants de M. A______ venaient le voir à son appartement, mais actuellement c'était moins le cas, car ils étaient très occupés le week-end.

Mme O______, également entendue en qualité de témoin, a quant à elle indiqué qu'elle ne voyait pas souvent M. A______, mais qu'ils se téléphonaient régulièrement. Elle lui avait rendu visite pour la dernière fois en décembre 2014 dans son appartement à Carouge.

M. A______ a enfin rectifié un point de ses déclarations du 30 mars 2015. Il n'avait jamais indiqué qu'il passait plus de temps avec Mme J______ dans son appartement à Genève que dans le sien à Annemasse, mais qu'il passait plus de temps à Genève qu'à Annemasse.

20. Lors de l'audience de comparution personnelle et d'enquêtes du 15 juin 2015, Monsieur T______ a été entendu en qualité de témoin. Il était le concierge de l'immeuble sis 1______, route de F______ à Carouge mais n'habitait pas sur place. Il travaillait tous les matins de 8h00 à 12h00. Depuis septembre 2014, il ne travaillait plus dans l'immeuble pour raison de santé. C'était une entreprise qui le remplaçait. Au début, il rencontrait souvent M. A______ dans l'immeuble, puis dans les deux années ayant précédé sa cessation d’activité, il l'avait moins vu. Il le voyait de temps en temps dans l'allée venir chercher son courrier puis s'en aller. Parfois, il montait dans son appartement, mais le plus souvent il repartait après avoir vidé la boîte aux lettres. Il lui arrivait de rencontrer M. A______ accompagné d'une dame et d'un petit enfant. Pendant que M. A______ était absent, il y avait eu des réclamations auprès de la régie de la part de locataires, car il y avait beaucoup de monde qui habitait dans son appartement et qui faisait du bruit le soir. Il avait personnellement constaté un jour la présence de trois personnes sur le balcon de M. A______, alors que ce dernier n'était pas là.

M. A______ a pour sa part contesté avoir fait l'objet de plaintes auprès de la régie.

21. Dans ses observations du 22 juillet 2015, M. A______ a indiqué que l'OCAS avait décidé de lui octroyer une rente entière AI, à compter du 1er juin 2011.

Il a rappelé qu'il se rendait régulièrement chez sa compagne à Annemasse et que celle-ci se rendait de manière irrégulière chez lui à Carouge, chacun tenant à conserver son domicile respectif pour les raisons déjà énoncées. Il estimait toutefois passer plus de temps dans son appartement à Carouge qu'à Annemasse.

Il fallait par ailleurs apprécier les deux rapports de contrôle de l'hospice des 22 août 2014 et 23 janvier 2015 avec une grande réserve, puisqu'ils contenaient des contrevérités démontrées sur des éléments importants, tel que le fait que le concierge aurait déclaré en janvier 2015 que M. A______ n'habitait toujours pas dans l'appartement, alors que ce dernier ne travaillait plus dans l'immeuble depuis septembre 2014. De plus, il n'avait jamais déclaré qu'il amenait sa fille tous les matins à la crèche, ce qui avait d'ailleurs été confirmé par Mme J______. La visite domiciliaire était par ailleurs relatée de manière très peu objective par l'enquêteur, de manière à donner l'impression que l'appartement n'était pas habité. Or, Mme J______ avait confirmé se rendre assez régulièrement dans cet appartement. S'il avait peu d'habits, c'est qu'il avait perdu beaucoup de poids et avait donc jeté ses anciens vêtements. Il était par ailleurs présent dans son appartement le 23 janvier 2015 à 7h30, lors du soi-disant contrôle effectué.

Il se sentait par ailleurs harcelé par l'hospice dont les enquêteurs interrogeaient les voisins de Mme J______ et venaient sonner à son domicile le soir vers 22h00.

22. Dans ses observations du 30 juillet 2015, l'hospice a relevé que les déclarations du recourant quant à sa présence dans son appartement ou chez sa compagne avaient fluctué au fil de la procédure. Il avait indiqué dans son recours dormir habituellement à Carouge, mais se rendre régulièrement chez Mme J______, où il lui arrivait de dormir. Puis, il avait indiqué lors de son audition par le service des enquêtes de l'hospice qu'il logeait la moitié du temps avec Mme J______ et leur enfant à Carouge et l'autre moitié du temps à Annemasse. Cette version avait toutefois été contredite par Mme J______, amenant M. A______ à rectifier ses propos.

Les déclarations de M. A______ étaient par ailleurs erronées s'agissant des personnes amenées à séjourner dans son appartement, soit notamment ses trois grands enfants. Il avait annoncé à l'hospice les avoir reçus entre douze et dix-sept fois par mois entre octobre 2014 et juin 2015, ce qui était en contradiction avec les propos tenus par Mme J______ et lui-même lors de leur audition. L'annonce des visites avait pour but de réclamer des frais de séjour temporaire pour enfants, soit une participation supplémentaire de CHF 20.- par jour et par enfant, lorsqu'il exerçait son droit de visite.

L'audition du concierge venait par ailleurs conforter le fait que M. A______ ne résidait pas de manière effective dans son appartement à Carouge.

23. Dans un courrier du 24 août 2015, M. A______ a contesté le contenu des observations de l'hospice, relevant notamment à nouveau qu'il fallait apprécier avec une grande retenue les rapports de l'enquêteur de l'hospice. S'agissant des jours durant lesquels il exerçait son droit de visite sur ses grands enfants, ils étaient annoncés à l'avance à l'hospice et pouvaient donc se dérouler parfois différemment.

24. Par courrier du 27 août 2015, l'hospice a formellement démenti faire preuve de harcèlement envers M. A______, contestant notamment l'intervention du service des enquêtes en France, ou au domicile du l'intéressé à 22h00.

Les propos de M. A______ selon lesquels les rapports de l'enquêteur de l'hospice seraient partiaux et réalisés avec peu de conscience professionnelle étaient également formellement contestés.

25. Dans un courrier adressé spontanément le 17 septembre 2015 au juge délégué, l'hospice a indiqué que des éléments nouveaux déterminants pour l'issue de la procédure venaient d'être découverts.

M. A______ avait effectué plusieurs voyages au Cameroun pendant la période litigieuse, sans en avoir informé l'hospice. Si les bénéficiaires de l'aide sociale avaient le droit de voyager, ils devaient en informer l'hospice. La jurisprudence considérait d'ailleurs que le fait de ne pas annoncer une absence de Genève constituait une violation de l'obligation de renseigner.

26. Lors de l'audience de comparution personnelle du 12 octobre 2015, l'hospice a indiqué que si l'obligation de signaler les déplacements à l'étranger ne figurait pas sur les documents devant être signés par les bénéficiaires de prestations dans lesquels ils s'obligeaient à collaborer, cela relevait de l'engagement général d'informer l'hospice de tout fait nouveau de nature à entrainer une modification du montant des prestations. Il n'appartenait pas à l'hospice de financer ces séjours.

M. A______ a pour sa part affirmé avoir annoncé tous ses voyages à l'hospice, ce que ce dernier a formellement contesté. De plus, ses voyages étaient dus à ses problèmes de santé. Il se rendait au Cameroun pour se faire prodiguer des soins naturels. Il a par ailleurs précisé qu'il conservait son passeport chez Mme J______.

À l'issue de la l'audience, le juge délégué a imparti un délai aux parties pour la production de différents documents.

27. Par courrier du 19 octobre 2015, M. A______ a produit une copie de son passeport camerounais.

28. Le 30 octobre 2015, l'hospice a produit une copie du journal figurant dans le dossier de M. A______ couvrant la période allant de janvier 2013 au jour de l'envoi.

29. Le 5 novembre 2015, M. A______ a produit un chargé de pièces complémentaire contenant notamment les factures de ses différents voyages au Cameroun et une attestation médicale attestant d'un suivi au Cameroun par un docteur naturopathe.

30. Dans ses observations finales du 4 décembre 2015, l'hospice a persisté dans ses conclusions, réaffirmant que M. A______ ne l'avait jamais informé de ses voyages.

31. Dans ses observations finales du 7 décembre 2015, M. A______ a contesté la teneur du journal produit par l'hospice. S'agissant de ses déplacements au Cameroun, ils avaient toujours été communiqués à l'hospice et autorisés par son médecin traitant. S'il devait être considéré qu'il s'était domicilié en France, cela aurait pour conséquence qu'il n'aurait plus droit à sa rente AI,dans la mesure où il n'existait pas d'accord entre la Suisse et le Cameroun à ce sujet.

32. Le 10 décembre 2015, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Le recours porte sur le refus de l’hospice de continuer à octroyer au recourant une aide financière à partir du 1er octobre 2014, au motif qu'il n'a plus sa résidence effective dans le canton de Genève depuis environ une année.

3. Selon l'art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), quiconque est dans une situation de détresse et n'est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit d'être aidé et assisté et de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine (ATF 135 I 119 consid. 5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_56/2012 du 11 décembre 2012 consid. 1.1 ; ATA/1337/2015 du 15 décembre 2015 consid. 2a).

L’aide sociale est soumise au principe de subsidiarité, lequel est rappelé par l’art. 12 Cst. La personne dans le besoin doit avoir épuisé les possibilités d’auto-prise en charge, les engagements de tiers et les prestations volontaires de tiers (ATA/1337/2015 précité consid. 2b ; ATA/1223/2015 du 10 novembre 2015 consid. 2b ; Felix WOLFFERS, Fondement du droit de l’aide sociale, 1995, p. 77).

4. Dans le canton de Genève, l'art. 12 Cst. a trouvé une concrétisation dans la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04), dont le but est de prévenir l’exclusion sociale et d’aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel
(art. 1 al. 1 LIASI), ainsi que de soutenir les efforts des bénéficiaires de la loi à se réinsérer sur le marché du travail et dans la vie sociale en général. Elle a également pour objectif de garantir à ceux qui se trouvent dans la détresse matérielle et morale des conditions d’existence conformes à la dignité humaine (art. 1 al. 2 LIASI). Ses prestations sont fournies sous forme d’accompagnement social, de prestations financières et d’insertion professionnelle (art. 2 LIASI).

L'hospice est l'organe d'exécution de la LIASI (art. 3 al. 1 LIASI).

Les prestations financières sont subsidiaires à toute autre source de revenu (art. 9 al. 1 LIASI) et leurs bénéficiaires doivent faire valoir sans délai leurs droits auxquels l’aide est subsidiaire et doivent mettre tout en œuvre pour améliorer leur situation sociale et financière (art. 9 al. 2 LIASI ; ATA/817/2015 du 11 août 2015 consid. 5c ; ATA/117/2015 du 27 janvier 2015 consid. 4).

5. À teneur de l'art. 11 al. 1 LIASI, ont droit à des prestations d'aide financière prévues par cette loi, les personnes qui : a) ont leur domicile et leur résidence effective sur le territoire du canton de Genève ; b) ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien et c) répondent aux autres conditions de la loi. Ces trois conditions sont cumulatives.

La notion de domicile est, et demeure, en droit suisse, celle des art. 23 et 24 du Code civil suisse du 10 décembre l907 (CC - RS 210), soit le lieu où une personne réside avec l’intention de s’y établir ou le lieu où se situe le centre de ses intérêts (ATF 134 V 236 consid. 2.1 ; P.-H. DESCHENAUX/P.-H. STEINAUER, Personne physique et tutelle, 4ème éd., 2001, p. 112). Deux éléments doivent être réalisés pour la constitution du domicile volontaire : le premier, la résidence, soit un séjour effectif d'une certaine durée en un endroit déterminé, est objectif et externe, tandis que le second, soit la volonté de rester dans un endroit de façon durable, est subjectif et interne (ATF 134 V 236 consid. 2.1 ; 127 V 237 consid. 1; 119 II 167 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 5A.398/2007 du 28 avril 2008 consid. 3.2). Ce n'est pas la durée du séjour à cet endroit qui est décisive, mais bien la perspective d'une telle durée (arrêts du Tribunal fédéral 5A.398/2007 du 28 avril 2008 consid. 3.2 ; 5A.34/2004 du 22 avril 2005 consid. 3.2). Du point de vue subjectif, ce n'est pas la volonté interne de la personne concernée qui importe, mais les circonstances reconnaissables pour des tiers, qui permettent de déduire qu'elle a cette volonté (ATF 133 V 309 consid. 3.1 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 5A.398/2007 du 28 avril 2008 consid. 3.2). Il convient d’examiner si la personne en question a fait du lieu où elle se trouve le centre de ses intérêts personnels et vitaux et si elle y a ses attaches les plus étroites (P.-H. DESCHENAUX/P.-H. STEINAUER, op. cit., p. 114 ss). L’importance des relations d’une personne avec un lieu donné ne se détermine ainsi pas en fonction d’éléments formels, mais de l’ensemble des circonstances concrètes (ATA/480/2012 du 31 juillet 2012 consid. 7d ; ATA/535/2010 du 4 août 2010).

Les prestations d'aide financière peuvent être réduites, suspendues, refusées ou supprimées notamment lorsque le bénéficiaire ne répond pas ou cesse de répondre aux conditions de la LIASI (art. 35 al. 1 let. a LIASI).

6. Le demandeur doit fournir gratuitement tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d'aide financière (art. 32 al. 1 LIASI). Le bénéficiaire doit immédiatement déclarer à l’hospice tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du maintien des prestations d’aide financière qui lui sont allouées ou leur suppression (art. 33 al. 1 LIASI).

Le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l’hospice » concrétise cette obligation de collaborer en exigeant du demandeur qu'il donne immédiatement et spontanément à l'hospice tout renseignement et toute pièce nécessaire à l'établissement de sa situation personnelle, familiale et économique tant en Suisse qu'à l'étranger (ATA/425/2014 du 12 juin 2014 consid. 6a).

Les prestations d'aide financière peuvent notamment être supprimées lorsque le bénéficiaire refuse de donner les informations requises (art. 7 et 32 LIASI), donne des indications fausses ou incomplètes ou cache des informations utiles (art. 35 al.1 let. d LIASI).

Celui qui ne renseigne pas correctement, selon les modalités prévues par la loi, perd le bénéfice des prestations d'aide sociale, l'inaccomplissement des conditions d'octroi d'une prestation pouvant découler précisément d'un manquement à une obligation de collaborer (Clémence GRISEL, L'obligation de collaborer des parties en procédure administrative, 2008, n. 836).

7. Pour le recourant, l'hospice retient à tort qu'il ne résidait plus effectivement dans son appartement à Carouge, mais chez sa compagne en France voisine.

Sur ce point, le fait que l’intéressé effectue le plus souvent ses paiements à la poste de Thônex et que la plupart de ses retraits ou versements bancaires aient lieu à l'agence de Chêne, et non à proximité de Carouge, ne permet pas à lui seul de conclure que le recourant ne résiderait pas de manière effective dans son appartement. En effet, il ressort des pièces produites par le recourant que tel était déjà le cas entre 2010 et 2013. Il en va de même du fait qu'il a effectué la majorité de ses achats au moyen de sa carte Maestro en France et non en Suisse. Ces éléments constituent toutefois un indice dans ce sens, dès lors que la fréquence des opérations bancaires et postales dans la région de Chêne et Thônex, voire en France ont augmenté depuis la naissance de son enfant et ses déplacements à Annemasse, ce qu'il admet lui-même dans son recours.

En revanche, ces indices, couplés aux constats du service des enquêtes de l'hospice et aux déclarations du concierge de l'immeuble sis 1______, route de F______ à Carouge, apportent des éléments concrets sur le lieu de résidence effective du recourant.

Ainsi que cela ressort des rapports de contrôle des 22 août 2014 et 23 janvier 2015 dont la teneur a été confirmée par l’enquêteur de l’hospice devant la chambre de céans, le recourant n’était jamais présent dans l'appartement de Carouge lors des dix visites effectuées à des dates et des heures différentes. En particulier, le contrôleur s'est rendu à deux reprises chez le recourant le 21 janvier 2015, tout d’abord à 7h30 puis à 13h15, sans que celui-ci ne s’y trouve, alors que l’intéressé lui avait annoncé le même jour, lors d'un entretien téléphonique survenu entre ces deux visites, qu'il avait subi une attaque cardiaque et qu'il devait rester chez lui au calme. Par la suite, lors de la visite domiciliaire qu’il a pu effectuer le 23 janvier 2015, le contrôleur a constaté qu'il y avait très peu d'affaires dans l'armoire de l'intéressé, que l'appartement sentait le renfermé et était poussiéreux et que seul quelques denrées alimentaires non périssables étaient présentes dans la cuisine, soit des signes d’une non occupation réelle de l’appartement de Carouge. Les explications données à ce sujet par le recourant selon lesquelles il ne pourrait consommer, pour des raisons médicales des produits ouverts depuis plus de deux jours, non étayées par certificat médical ne sont guère crédibles. Il est par ailleurs surprenant qu'aucun effet personnel appartenant à l'un des quatre enfants du recourant ou à sa compagne et à la fille de celle-ci n'ait été aperçu dans l'appartement par le contrôleur, dans la mesure où le recourant affirme y recevoir ces différentes personnes chez lui plusieurs fois par mois. Par ailleurs, les déclarations du concierge de l'immeuble du recourant jusqu'en septembre 2014, confortent les éléments ressortant du rapport établi par le service des enquêtes de l'hospice. Selon son témoignage, il apercevait beaucoup moins le recourant depuis 2012 et lorsqu'il le croisait, il le voyait le plus souvent prendre son courrier puis s'en aller, même s'il lui arrivait parfois de monter dans son appartement. Il a encore précisé que certains locataires s'étaient plaints à la régie du fait que beaucoup de monde habitaient dans l'appartement du recourant en son absence et faisaient du bruit le soir. À cela s’ajoute le fait que le recourant admet avoir opté pour conserver ses effets personnels et ses documents privés, notamment son passeport, au domicile de sa compagne plutôt que dans son propre appartement. Couplés les uns aux autres, tous ces éléments permettent de retenir que le recourant réside à titre principal, non pas dans l’appartement de Carouge financé par l’hospice, mais auprès de sa compagne et mère de sa dernière fille à Annemasse.

Les attestations produites par le recourant, ne permettent pas d’inverser cette appréciation. Le fait que l’intéressé soit client d'un cordonnier ou qu'il dispose d'un dossier auprès d'une pharmacie de Carouge, ne prouve en rien qu'il réside dans cette commune, ce d'autant plus que deux autres attestations émanant de pharmacies à Chêne-Bourg attestent qu'il est un client régulier de celles-ci. Par ailleurs, les attestations signées, selon les dires du recourant, par des voisins sont peu précises et ne donnent aucune indication sur la réelle qualité de voisin de leur signataire et sur l’intensité des rapports qu’ils entretiennent avec le recourant. Enfin, le fait que Mme O______ confirme avoir rendu visite à M. A______ dans son appartement de Carouge n’est pas suffisant pour établir que ce dernier y résidait effectivement et de manière continue.

Par ailleurs, les déclarations du recourant au sujet de son lieu d'habitation effectif ont fluctué tout au long de la procédure. Il a ainsi successivement prétendu dormir habituellement à Carouge et de manière occasionnelle à Annemasse, avant d'indiquer passer la moitié de son temps à Carouge avec sa compagne et l'autre moitié de son temps à Annemasse. Il a finalement modifié à nouveau ses déclarations, suite à l'audition de Mme J______ contredisant ses propos, en alléguant cette fois qu'il passait plus de temps à Genève qu'à Annemasse. Ces différentes versions, parfois confuses et contradictoires, sont ainsi de nature à ne pas admettre la véracité des allégations de l’intéressé.

Enfin, comme le relève la jurisprudence, ce n'est pas la volonté interne de la personne concernée qui importe, mais les circonstances reconnaissables pour des tiers, qui permettent de déduire qu'elle a la volonté de résider effectivement dans un lieu. Au vu de ses importants problèmes de santé, qui ne sont d'ailleurs pas contestés, et de sa situation financière, il ne fait aucun doute que le recourant souhaitait subjectivement conserver son domicile à Genève. C'est d'ailleurs ce qu'il allègue dans ses écritures. Or, il ressort des nombreux éléments du dossier susmentionnés, que le recourant ne réside pas effectivement et objectivement de manière prépondérante dans l'appartement de la rue de Carouge

Il doit ainsi être retenu que lorsque la décision litigieuse a été rendue, le recourant ne résidait plus de manière effective dans l'appartement sis 1______, route de F______ à Carouge, ce qu'il a omis d'indiquer à l'hospice. En agissant ainsi, le recourant a gravement violé son devoir d’informer l’hospice, qui a été amené à servir des prestations à l’intéressé auxquelles il n’avait pas droit, dans la mesure où sa résidence effective, au sens de l’art. 11 al. 1 let. a LIASI, n’est plus dans le canton de Genève, étant rappelé qu’il ne pouvait ignorer ses obligations en la matière, ayant signé à plusieurs reprises les formulaires lui rappelant ses engagements. Constatant cela, l'hospice était ainsi fondé à mettre fin à ses prestations d'aide financière à compter du 1er octobre 2014.

8. La décision sur opposition rendue le 7 novembre 2014 par l’hospice est conforme au droit, sans qu'il soit nécessaire d'examiner si les nombreux voyages du recourant au Cameroun ont effectivement été annoncés à l'hospice et, dans la négative, s'ils pouvaient justifier l'arrêt des prestations d'aide financière.

9. Le recours sera ainsi rejeté.

Compte tenu de la nature du litige, il ne sera pas perçu d'émolument (art. 87 al. 1 LPA ; art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Aucune indemnité ne sera par ailleurs allouée vu l’issue du litige (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 4 décembre 2014 par Monsieur A______ contre la décision sur opposition de l'Hospice général du 7 novembre 2014 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pierre-Bernard Petitat, avocat du recourant, ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :