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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/197/2021

ATA/294/2022 du 22.03.2022 ( FPUBL ) , REJETE

Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;EMPLOYÉ PUBLIC;FONCTIONNAIRE;RAPPORTS DE SERVICE DE DROIT PUBLIC;VIOLATIONS DES DEVOIRS DE SERVICE;RÉSILIATION;MOTIF;RECONVERSION PROFESSIONNELLE;PROPORTIONNALITÉ
Normes : Cst.29.al2; LEPM.1.al1; RPAC.20; RPAC.21.al1; RPAC.22; LPAC.21.al3; LPAC.22; LPAC.2B; RPAC.46A.al2; RPAC.46.al3; Cst.36.al3; Cst.5.al2
Résumé : Recours d’une infirmière contre une décision de résiliation de ses rapports de service pour motifs fondés. Dans la mesure où la recourante n'a pas su améliorer les insuffisances relevées dans la pratique de son métier et du respect des protocoles applicables, malgré plusieurs mises en garde et demandes de modification, le recours est rejeté. La procédure de reclassement mise en place par les HUG est acceptable compte tenu des circonstances.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/197/2021-FPUBL ATA/294/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 22 mars 2022

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Orlane Varesano, avocate

contre

HÔPITAUX UNIVERSITAIRES DE GENÈVE
représentés par Me Anne Meier, avocate



EN FAIT

1) Madame A______, née le ______ 1967, a été engagée par les Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) en qualité d'infirmière, dès le 1er mars 2010.

Après avoir achevé ses études de médecine à l'université de Priština (Kosovo) en 1995, elle est venue s'installer à Genève en 1997. Faute de reconnaissance de son diplôme de médecin en Suisse, elle est devenue infirmière, après avoir obtenu un bachelor en soins infirmiers le 10 novembre 2009.

2) Le 21 mai 2010 a eu lieu le premier entretien d'évaluation et de développement des compétences (ci-après : EEDC) de Mme A______. Elle avait alors partiellement atteint l'objectif visant à « s'intégrer à l'équipe pluridisciplinaire », devant « accepter les remarques faites par ses collègues », et atteint celui visant à « acquérir les bases de fonctionnement du service ». Certains aspects de sa fonction étaient satisfaisants, d'autres peu satisfaisants. Les critères relatifs à la fonction étaient également satisfaisants ou à améliorer.

3) Lors de l'EEDC suivant du 7 décembre 2010, une partie des objectifs étaient atteints (acquérir les connaissances spécifiques au service de chirurgie thoracique, améliorer la gestion du dossier informatisé du patient [ci-après : DPI]). Ceux restants (mieux gérer son stress, accepter les remarques de ses collègues) étaient partiellement atteints. Les aspects liés à la fonction l'étaient également. Les critères liés à la fonction étaient globalement satisfaisants, trois de ceux-ci devant être améliorés. La poursuite de la collaboration était préconisée.

Selon le bilan de son responsable hiérarchique, « Mme A______ [avait] su acquérir les connaissances de base en chirurgie thoracique. Elle devra[it] les approfondir afin de mieux faire face aux exigences du service, notamment en période de charge de travail soutenue. Mme A______ présent[ait] toujours des difficultés à entendre les remarques sur la qualité de son travail, ceci en évoquant la qualité du travail de ses collègues ».

4) D'après l'EEDC du 2 novembre 2011, Mme A______ avait atteint les objectifs, à l'exception de celui consistant à « faire des transmissions plus synthétiques et plus précises ». Les aspects liés à la fonction étaient satisfaisants, voire très satisfaisants. Les critères d'évaluation étaient remplis, à l'exception de celui relatif à l'organisation du travail qui restait à améliorer. Le bilan était favorable à sa nomination.

Sa responsable hiérarchique estimait qu'« au cours de ces derniers mois, Mme A______ a[vait] su montrer ses capacités et sa ténacité dans son apprentissage au sein du service. Elle a[vait] fait de grands progrès au niveau de sa prise en charge des patients mais aussi dans sa relation à l'équipe. Au travers de ses différents remplacements dans les services, elle a[vait] acquis certaines compétences dans les différentes disciplines chirurgicales et entrevo[yait] les subtilités des différents services. Ses efforts n'[avaient] pas été vains et [elle l'engageait] à continuer dans ce sens ».

5) Par arrêté du 2 février 2012, Mme A______ a été nommée fonctionnaire dès le 1er mars 2012 en qualité d'infirmière diplômée.

6) Par courrier du 31 octobre 2013, les HUG ont confirmé à Mme A______ son transfert dès le 1er février 2014 de l'unité 4BL à l'unité 0FL du service d'orthopédie au sein du département de chirurgie.

7) Selon l'EEDC du 10 septembre 2014, Mme A______ avait partiellement atteint l'objectif consistant à « faire des transmissions plus structurées ». Les aspects liés à la fonction étaient satisfaisants. Les critères d'évaluation l'étaient aussi pour la plupart, à l'exception de trois qui restaient à améliorer. L'évaluation globale était bonne.

D'après le bilan de Madame C______, infirmière responsable d'unité (ci-après : IRES), « après sept mois passés au 0FL, [elle ne pouvait] que féliciter Mme A______ pour la rapidité de son intégration dans l'unité. Elle s'[était] donné les moyens d'acquérir des compétences en orthopédie, discipline qu'elle ne connaissait pas encore, et qu'elle redoutait un peu à son arrivée. Elle [était] flexible, s'adapt[ait] aux situations de soins et donn[ait] satisfaction aux patients qu'elle soign[ait]. Grâce à son expérience, elle a[vait] pu promouvoir auprès de ses collègues le travail en secteurs, et en binômes et suggérer des pistes d'amélioration. [Elle la remerciait] pour son investissement au 0FL ».

8) Au terme de l'entretien du 7 décembre 2016, l'évaluation globale de Mme A______ était bonne. Toutefois, « Mme A______ sembl[ait] avoir perdu l'intérêt qu'elle portait à l'orthopédie, à son arrivée au 0FL en février 2014. Moins investie dans la prise en charge de patients, elle a[vait] tendance à minimiser certains problèmes. Elle ne s'impliqu[ait] pas dans le mandat de référent pharmacie qui lui a[vait] été confié. Sachant qu'elle aim[ait] travailler en horaire du soir, ses collègues la sollicit[aient] souvent pour des changements d'horaires, qu'elle accept[ait]. [Elle lui proposait] de réfléchir à l'image qu'elle renvo[yait] aux patients, à ses collègues et de songer à un nouveau projet professionnel qui l'épanouirait davantage. D'ici là elle devra[it] se donner les moyens d'atteindre les objectifs fixés et retrouver sa motivation professionnelle ».

Pour sa part, Mme A______ avait alors reconnu qu'elle « se sent[ait] moins motivée qu'à son arrivée. L'orthopédie n'était certes pas son premier choix, après le service de chirurgie thoracique d'où elle venait, mais elle pensait s'épanouir ici. Depuis l'avènement de l'ortho-gériatrie, la charge en soins s'[était] alourdie et les délais d'hospitalisation allongés. Elle reconnai[ssait] que le travail [était] plus dur, tant physiquement que moralement. Elle envisage[ait] un transfert dans une autre unité sans savoir exactement où elle souhaiterait aller ».

Un suivi avec Madame B______, responsable des ressources humaines (ci-après : RH) a ainsi été mis en place afin d'assister Mme A______ dans la recherche de son projet personnel.

9) Le 2 novembre 2018, Mme C______ a convoqué Mme A______ pour un entretien de service prévu le 26 novembre 2018, en présence de Mme B______.

10) Selon le compte rendu y relatif, adressé à Mme A______ le 29 novembre 2018, les faits reprochés en lien avec l'événement du 4 octobre 2018 et celui du 28 mars 2018 concernant des défauts de surveillance sur des patientes ayant subi respectivement un enclouage du fémur gauche après une fracture de celui-ci et une coronarographie, étaient précisés.

S'agissant du 4 octobre 2018, les problèmes suivants concernant la prise en charge de la patiente à « J1 post opératoire » étaient reprochés à Mme A______ : elle devait connaître parfaitement les effets secondaires et les surveillances de la morphine, car elle en dispensait quotidiennement dans l'unité depuis quatre ans ; elle ne s'était pas souciée de la diurèse de la patiente, sachant que la morphine s'éliminait par voie urinaire et que la patiente était en insuffisance rénale chronique ; elle n'avait engagé aucune action lorsqu'elle avait constaté la saturation à 91 %, sachant que la morphine était un dépresseur respiratoire et elle n'avait documenté aucune surveillance pour sa patiente de 17h28 à 21h17. Mme A______ avait expliqué le déroulement de la journée. Selon Mme C______, en tant qu'infirmière expérimentée, Mme A______ aurait dû être en mesure de hiérarchiser les soins, de sorte à différer les pansements à faire ou les partager avec une collègue pour privilégier le suivi de cette patiente. Elle aurait également apprécié que Mme A______ vienne lui parler de cette situation, ce qu'elle n'avait pas fait. Pour sa part, Mme A______ attendait que Mme C______ la convoque à ce sujet, ce qu'elle n'avait pas fait. Elle était étonnée d'être convoquée en entretien de service. Aucun défaut de surveillance ne pouvait lui être reproché car elle avait bien vu et surveillé la diurèse de la patiente. Le médecin était passé à 19h07 et avait indiqué que la patiente était stable et devait suivre une chimiothérapie la semaine suivante.

Concernant le 28 mars 2018, il était reproché à Mme A______ : un défaut de surveillance, un problème de hiérarchisation des priorités, le non-respect de la procédure, ainsi que le manque de documentation et de transmission. Ces faits avaient fait l'objet d'un entretien entre Mmes C______ et A______ le jour même. La prise en charge de cette patiente, de retour de coronarographie, impliquait un risque majeur d'hémorragie et la pose d'un bracelet artériel. Selon le rapport dans le DPI ledit bracelet devait être dégonflé de 2 ml toutes les trente minutes et enlevé trois heures après. Un pansement sec devait alors être apposé. Mme A______ avait pris les paramètres vitaux à 15h37, sans documenter quoi que ce soit d'autre, puis ne les avait plus pris jusqu'à 21h38. Elle n'avait fait sa transmission dans le DPI qu'à 22h38 et n'avait pas enlevé le bracelet à cette patiente, qui était restée avec l'artère radiale comprimée jusqu'à 00h50. L'infirmière de nuit avait suivi ses consignes et fait un pansement compressif alors qu'il fallait faire un pansement sec. Mme A______ avait indiqué qu'elle n'avait pas été avertie que la patiente portait un bracelet radial alors que c'était la première fois qu'elle voyait ce dispositif. Ni le protocole ni la seringue pour dégonfler le bracelet n'avaient été remis. Toutefois, pour Mme C______, le problème n'était pas de ne pas savoir ou connaître un dispositif, mais de ne pas avoir pris connaissance du DPI pour trouver les informations et le protocole nécessaires, ainsi que documenté la prise en charge pour la relayer à ses collègues. Mme A______ avait admis ne pas avoir commencé à dégonfler le ballonnet à temps. Elle assumait ses responsabilités, mais il n'y avait pas eu de danger pour la patiente.

Mme A______ avait indiqué se sentir sous pression et sous surveillance, tandis qu'il y avait plusieurs exemples de dysfonctionnements dans l'unité, qu'elle souhaitait quitter. Mme B______ était à sa disposition pour un entretien en vue d'une prochaine mobilité, selon les postes disponibles et de ses postulations.

Au titre de détermination de l'employeur, il était indiqué que, pour ces deux situations, des dysfonctionnements qui n'étaient pas admissibles en tenant compte des prestations attendues d'une infirmière confirmée, avaient été constatés. Ceux-ci portaient sur la surveillance, la documentation et les transmissions obligatoires sur le plan médico-légal, garantes de la continuité des soins et qui reflétaient la qualité du travail de Mme A______. Ces faits étaient susceptibles d'engendrer une sanction.

Les objectifs suivants étaient fixés à Mme A______ : améliorer la surveillance des patients, améliorer la documentation dans le DPI et les transmissions, hiérarchiser les priorités, respecter les procédures et prendre l'initiative de se renseigner à la source en cas de procédure, appareil non connu.

11) Dans ses observations du 10 décembre 2018, Mme A______ a demandé à pouvoir changer de service et l'annulation de l'entretien de service précité.

S'agissant des faits du 4 octobre 2018, il était faux d'indiquer que les ressources étaient alors adaptées à la charge des soins. Ce jour-là, la charge de travail était augmentée et il n'y avait pas de possibilité de déléguer les soins. Il ne s'agissait pas uniquement de prendre en compte le nombre de patients à prendre en charge, mais également la qualité, leur pathologie et l'importance des soins à prodiguer. La patiente en question présentait plusieurs comorbidités. Elle contestait ne pas avoir documenté les soins alors qu'elle avait validé la case « non-administré » à la fin des soins après 21h00 concernant la dose de morphine de 16h00. Elle avait alors ouvert une transmission ciblée, dans laquelle elle avait fait un résumé de la problématique, de ses actions et des résultats de cette transmission. Tandis qu'elle reportait la transmission, elle avait été interrompue et perturbée par une altercation avec Monsieur D______. Ce dernier en avait parlé à Mme C______ le lendemain, avant qu'elle n'ait elle-même eu le temps de le faire. Lorsqu'elle l'avait fait, Mme C______ lui avait répondu en avoir déjà été informée. Elle avait exécuté tous les soins selon la feuille de route de planification des soins, protocolée dans le DPI. Elle avait procédé aux contrôles nécessaires.

Quant aux faits du 4 mars 2018, elle contestait ne pas avoir documenté l'état de santé de la patiente car les surveillances, les soins et les transmissions (orales et informatiques) avaient été effectuées et validées selon la planification des soins, définis dans le protocole du DPI. L'état clinique de la patiente n'avait pas été mis en danger. La patiente avait été remontée après l'opération sans avoir été annoncée, sans informations et transmission pour son équipement, sans seringue adaptée pour dégonfler le brassard et sans protocole de surveillance. Ce type de surveillance était très rare dans un service d'orthopédie. Elle avait demandé de l'aide auprès de ses collègues qui n'avaient pas pu lui répondre car personne ne connaissait la procédure ni l'équipement. Elle s'était renseignée auprès de son ancienne unité, ce qui expliquait le retard dans la mise en place des soins, mais n'avait pas eu de conséquences néfastes sur la patiente.

Aucun des deux événements n'avait fait l'objet de dénonciations au groupe d'incidents selon la directive. Après avoir pris du recul sur celles-ci, elle s'engageait à : améliorer la surveillance des patients, améliorer la documentation dans le DPI et les transmissions, prendre l'initiative de se renseigner à la source en cas de procédures et d'appareils non connus, et demander à la hiérarchie de dispenser des formations à l'interne des HUG.

Étaient jointes des copies du DPI concernant la patiente concernée par l'événement du 4 août 2018 pour la période du 3 au 7 octobre 2018.

12) Dans ses déterminations du 17 décembre 2018, Mme C______ a relevé que les allégations de Mme A______ concernant le nombre de collaborateurs présents le 4 octobre 2018 étaient erronées. La charge de travail était stable. Il y avait quinze patients pour une capacité de vingt-deux lits avec un personnel complet. La typologie des patients accueillis était prise en considération. L'unité 0FL était une unité de soins de chirurgie aiguë de soins et d'ortho-gériatrie, dont les patients nécessitaient, à la suite d'une intervention, une prise en charge avec une surveillance étroite. Elle n'avait pas eu connaissance d'une altercation entre M. D______ et Mme A______. Au vu de l'expérience et de l'ancienneté de Mme A______, il était attendu d'elle qu'elle donne un sens aux soins planifiés, soit capable d'analyser la situation et d'adapter les soins à l'évolution de l'état clinique du patient. Ces événements n'avaient pas été dénoncés au groupe incident car il n'était pas compétent à cette fin. En revanche, Mme A______ pouvait lui signaler le processus de prise en charge entre la salle de coronarographie et l'unité 0FL pour l'améliorer.

13) Le même jour, Mme B______ a informé Mme A______ qu'aucune sanction ne serait prise à son encontre, compte tenu de ses engagements visant à améliorer la surveillance des patients et la documentation clinique, ainsi que de prendre l'initiative de se renseigner, tout en démontrant son intérêt pour des formations continues. Elle lui rappelait qu'en tant que professionnelle, elle conservait la liberté de faire elle-même une déclaration d'incident, si une procédure devait selon elle être revue et améliorée par le groupe de gestion des incidents. Elle l'invitait également à prendre contact avec elle concernant sa demande de changement de service.

14) Le 18 février 2019, Mme A______ a transmis à Mme B______ son dossier de candidature, en manifestant son intérêt pour un poste d'infirmière auprès de la clinique de E______.

Malgré le soutien de Mme B______, cette candidature n'a pas été retenue, car Mme A______ devait améliorer sa communication et son savoir-être.

15) Par courriel du 14 mars 2019, Mme C______ a indiqué à Mme A______ qu'elles effectueraient un point de situation chaque semaine afin d'apprécier son activité par rapport aux objectifs fixés. Il lui était recommandé de faire une auto-évaluation avant chaque entretien, prévus les 18 et 26 mars, 1er, 10 et 16 avril 2019.

16) Le 7 juin 2019, Mme B______ a sollicité d'autres responsables RH afin de rechercher un poste de trois mois avec validation d'objectifs en réadaptation pour Mme A______.

17) Par courriel du 14 septembre 2019, Mme A______ a informé Mme B______ avoir annulé un entretien auprès de l'hôpital F______, prévu le 12 septembre 2019.

18) Par pli du 20 décembre 2019, Mme B______ a confirmé à Mme A______ son transfert au sein de l'unité 2EK du département de chirurgie dès le 1er janvier 2020 jusqu'au 31 mars 2020.

Durant cette période des objectifs lui seraient fixés et feraient l'objet d'un point de situation régulier avec sa hiérarchie. En cas de bilan positif au terme du délai de trois mois, son transfert serait confirmé. En cas contraire, l'affectation provisoire pourrait être interrompue en tout temps. À cette fin, Mme A______ était autorisée à diminuer son taux d'activité à 80 % dès le 1er janvier 2020.

19) Par courriels des 30 janvier, 17 février et 1er mars 2020, Madame G______, IRES de l'unité 2EK, a fait un résumé à Mme A______ des constats faits lors des « matinées cliniques » des 24 janvier, 10 et 27 février 2020.

Globalement, si certains points avaient été améliorés progressivement, la désinfection du matériel n'était pas encore effectuée de manière rigoureuse et précise. L'identité des patients n'était pas contrôlée suffisamment. Les soins à faire en chambre devaient être améliorés, en particulier en cas de geste invasif avec du matériel adéquat. La tenue de ses dossiers devait l'être également. Mme A______ lui avait alors indiqué que certains de ses collègues étaient « agressifs dans leur verbal et non verbal », se sentir « beaucoup plus compétente que bon nombre de ses collègues », que la prise en charge des patients de l'unité était toujours adéquate, que l'unité, les soins et le fonctionnement lui convenaient parfaitement, et disait « ne pas vouloir revenir dans son ancienne unité ».

Il s'agissait de la dernière « matinée clinique » prévue jusqu'au bilan de compétences fixé le 10 mars 2020.

20) Du 5 au 15 mars 2020, Mme A______ a été en arrêt maladie.

21) Le bilan des compétences de Mme A______, reporté au 30 mars 2020, effectué en présence de Mmes G______, B______ et Monsieur H______, a été jugé insuffisant.

En résumé, « sa prise en charge des patients ne correspond[ait] pas à ce jour aux attentes de l'institution, En effet, sa pratique met[tait] en évidence un manque de fiabilité, une insuffisance en lien avec la sécurité et la qualité des soins. Mme A______ a[vait] bénéficié de trois matinées cliniques, des retours à la fois écrits et oraux, du soutien et de l'encadrement par deux infirmières référentes ainsi que de [sa] collègues et [d'elle-même]. Cependant Mme A______ n'a[vait] pas démontré sa capacité à améliorer sa prise en soins si un répondant n'[était] pas là pour garantir les bonnes pratiques professionnelles et assurer une prise en charge sécuritaire de ses soins. Malgré les retours des matinées cliniques effectuées avec Mme A______, les objectifs [étaient] non atteints : concernant une remise en question profonde de sa posture d'infirmière et une approche des soins réflexive qui permett[ait] de créer des liens cliniques. Aussi, au vu de ce bilan insuffisant, le transfert de Mme A______ ne [pouvait] être validé et maintenu en l'état. Elle retrounera[it] au 0FL dans les plus brefs délais. Mme A______ sembl[ait] en souffrance avec le vécu actuel de la situation dans l'unité et vivre difficilement son transfert, ce qu'elle verbalis[ait] lors de [leur] entretien ».

22) À partir du 6 avril 2020, Mme A______ a réintégré l'unité 0FL.

23) Par courrier du 23 avril (recte : 8 mai) 2020, Mme G______ a convoqué Mme A______ à un entretien de service prévu le 8 mai 2020 et reporté au 26 mai 2020, en présence de Mme B______.

24) Par courriel du 14 mai 2020, Madame I______, IRES ad intérim de l'unité 0FL, a transmis ses observations à Mme A______ concernant sa réintégration dans l'unité.

Ses collègues se questionnaient à propos des données cliniques non documentées dans le DPI concernant le dossier d'un patient. Les éléments manquants ne répondaient pas aux exigences de documentation clinique et ne contribuaient pas à rétablir le lien de confiance avec l'équipe.

25) Selon le compte rendu relatif à l'entretien de service du 26 mai 2020, après un résumé des faits qui s'étaient déroulés depuis le 26 novembre 2018, ainsi qu'un rappel des comptes rendus des « matinées cliniques » des 24 janvier, 10 et 27 février 2020, du bilan de compétences du 30 mars 2020 et de l'entretien de service du 26 novembre 2018, « des constats récurrents, dans deux unités de soins (0FL orthogériatrie et 2EK réadaptation orthopédique) et quatre IRES différentes, relat[aient] des prises en charge par Mme A______ qui [n'étaient] pas de qualité et qui ne correspond[aient] pas aux critères de sécurité en vigueur dans l'institution, cela pouvant mettre en danger les patients et ne permettant pas d'établir un lien de confiance, avec les équipes et les IRES. Les lacunes professionnelles relevées [étaient] répétitives et les compétences ne correspond[aient] pas au niveau attendu d'une infirmière ». Sans présager de sa nature, ces faits étaient susceptibles d'engendrer une sanction.

26) a. Faisant suite à un courriel de Mme A______ du 27 mai 2020, Mme B______ lui a confirmé le même jour que, compte tenu des constats récurrents, elle était en accord avec la décision de Mme I______ de limiter temporairement ses tâches à celles prodiguées par les aides-soignantes, jusqu'à réception de ses observations. Elle avait également pris acte du fait qu'étant en désaccord avec cette mesure, Mme A______ était rentrée chez elle. Compte tenu des circonstances et de sa présence à l'entretien de la veille prise sur son jour de récupération, elle lui confirmait que cette journée ne serait pas comptabilisée en heures négatives.

b. Le lendemain, Mme A______ lui a répondu ne pas accepter que les informations importantes concernant sa situation professionnelle lui soient transmises tardivement en la mettant « dans une position de pression et d'inconfort de devoir répondre à la dernière minute sans avoir le temps de réfléchir aux décisions et aux répercussions ». Sa réaction aurait été différente si elle avait disposé des informations nécessaires en temps utile. Elle se sentait très mal.

27) Par courrier du 28 mai 2020, Mme B______ a confirmé à Mme A______ qu'elle retrouverait son taux d'activité à 100 %, après avoir accepté de le diminuer à 80 % lors de son transfert à l'unité 2EK.

28) Du 28 mai au 14 novembre 2020, Mme A______ a été en arrêt de travail pour cause de maladie.

29) Dans ses observations du 16 juin 2020, Mme A______ a demandé à pouvoir obtenir le soutien psychologique demandé depuis le mois de février 2020, et son transfert dans une nouvelle unité, en étant évaluée sans délai ni mise en garde particulière.

Elle n'avait pris connaissance des observations de Mme C______ du 17 décembre 2018 qu'à fin mai 2020, lorsqu'elle avait consulté son dossier. Ce n'était que le 12 janvier 2020, à réception du courrier du 20 décembre 2019 de Mme B______, qu'elle avait pris conscience « d'être sur la sellette ». Alors qu'elle venait d'accepter une réduction de son taux d'activité à 80 %, elle s'était « sentie piégée », comprenant que les conséquences de l'entretien de service du 26 novembre 2018 continuaient de lui nuire.

Elle n'avait pas bénéficié des conditions nécessaires pour faire ses preuves dans un nouveau service n'ayant aucun a priori sur sa personne. Malgré ses nombreux appels à l'aide, sa hiérarchie n'avait mis en place aucun soutien psychologique, alors qu'elle était en situation de grande détresse. L'entretien de service du 26 mai 2020 était la conséquence de la position d'échec dans laquelle elle avait été placée dès le début de la procédure.

Était notamment jointe une attestation médicale de la doctoresse J______, médecin psychiatre, du 16 juin 2020, indiquant qu'au mois de janvier 2020, Mme A______ avait « vécu une situation professionnelle particulièrement déstabilisante et à laquelle elle n'a[vait] pas pu faire face. Durant cette période, Mme A______ n'était pas en mesure de réagir comme elle l'aurait fait en temps normal, pour se confronter aux difficultés qu'elle rencontrait au travail ».

30) Par courriel du 6 juillet 2020 concernant la mesure de reclassement de Mme A______, Mme B______ a sollicité d'autres responsables RH afin de savoir si un poste était disponible pour l'intéressée dans un autre service.

Les réponses étaient négatives, y compris pour un poste d'infirmière auprès du département diagnostique et radiologie, pour lequel la candidature de Mme A______ ne correspondait pas aux critères. S'agissant du domaine de la psychiatrie, faute d'intérêt particulier de la part de l'intéressée, sa demande n'était pas considérée. Vu l'annulation de l'entretien du 12 septembre 2019 par Mme A______, l'hôpital F______ n'envisageait pas de la revoir.

31) Le 19 août 2020, Mme B______ a convoqué Mme A______ à un entretien prévu le 27 août 2020.

Selon le courrier de Mme B______ du 4 septembre 2020 s'y rapportant, Mme A______ a alors été informée que ses observations n'étaient pas de nature à remettre en cause la détermination de sa hiérarchie. Ses commentaires ne remettaient pas en cause les défauts de prestations cités dans l'entretien de service, mais principalement le déroulement des séquences. Les motifs invoqués par sa hiérarchie lors de l'entretien de service du 26 mai 2020 avaient été dûment établis et étaient constitutifs d'un motif fondé de résiliation. La procédure de reclassement n'avait pas abouti. Mme A______ était tenue de collaborer. Sur demande, ses candidatures seraient appuyées. Un nouveau point de situation serait effectué au mois d'octobre 2020.

32) Par pli du 8 octobre 2020, Mme B______ a convoqué Mme A______ à un entretien prévu le 26 octobre 2020, reporté au 12 novembre 2020.

33) Le 13 octobre 2020, Mme A______ a réitéré ses demandes formulées dans son courrier du 16 juin 2020, en soulignant qu'il appartenait aux HUG de protéger sa personnalité et sa santé, ainsi que de lui proposer un poste correspondant aux critères permettant une véritable évaluation de ses prestations.

34) Mme B______ lui a répondu, le 15 octobre 2020, que les HUG estimaient avoir fait le nécessaire puisqu'elle avait rencontré l'infirmier du service de santé du personnel, lequel l'avait adressée à la psychologue du service de santé pour une consultation. S'agissant de la procédure de reclassement, aucun poste disponible et lui correspondant n'avait pu être identifié. Bien que Mme A______ eût fait des suggestions dont elle avait tenu compte, elle ne lui avait pas fait part de démarches de postulation en cours.

35) Selon certificat médical du 27 octobre 2020, la capacité de travail de Mme A______ serait de 30 % dès le 15 novembre 2020.

36) Le 29 octobre 2020, Mme A______ a été informée que son droit aux vacances serait réduit proportionnellement, vu son absence supérieure à cinq mois.

37) Par courrier du 13 novembre 2020, faisant suite à l'entretien de la veille, Mme B______ a rappelé à Mme A______ que la tentative de reclassement s'était soldée par un échec. Sa postulation pour un poste d'infirmière au département diagnostic n'avait pas été retenue, comme elle ne disposait pas des prérequis nécessaires. Compte tenu de l'accompagnement fourni dans le cadre de la mobilité professionnelle antérieure à la recherche d'un poste pour un reclassement, les possibilités correspondant aux attentes de Mme A______, à savoir la recherche d'un poste d'infirmière dans les soins non aigus, comprenant moins de soins techniques et dans un contexte bienveillant, avaient été épuisées. Dès le mois d'avril 2019, Mme A______ avait été mise en contact avec le secteur de la mobilité professionnelle pour un accompagnement dans ses démarches qui n'avaient pas abouti. Les besoins importants en personnel infirmier liés à la crise sanitaire n'étaient pas compatibles avec la démarche de reclassement portant sur une perspective à long terme et non pas sur la recherche d'une mission temporaire. Une reprise thérapeutique, selon le certificat médical de reprise à un taux d'activité de 30 %, ne pouvait être effective au vu des éléments précités.

38) À partir du 15 novembre 2020, Mme A______ a derechef été en incapacité de travail totale.

39) Par décision du 3 décembre 2020, déclarée exécutoire nonobstant recours et sur demande de Mme B______ du 17 novembre 2020, les HUG ont résilié les rapports de service de Mme A______ pour le 31 mars 2021, en la libérant de son obligation de travailler.

La procédure de reclassement n’ayant pas abouti, Mme A______ était licenciée pour motif fondé, soit pour insuffisance de prestations ayant conduit à une inaptitude à remplir les exigences du poste et la disparition durable d'un motif d'engagement au sein du département de chirurgie et des HUG. Le solde de ses jours de vacances étaient inclus dans cette période. Son salaire lui serait versé jusqu’au 31 mars 2021 pour solde de tout compte.

40) Par acte du 19 janvier 2021, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée, en concluant principalement à son annulation, ainsi qu’à sa réintégration, et subsidiairement, en cas de refus de réintégration, au versement de son salaire jusqu’à l’échéance des rapports de service, à celui correspondant au solde de ses jours de vacances et d’une indemnité pour licenciement infondé correspondant à vingt-quatre mois du dernier traitement. À cet égard, elle sollicitait des HUG la production de son décompte actualisé. Préalablement, elle demandait l’audition des parties et de témoins.

Il n’existait pas de motif fondé, dès lors qu’elle possédait les compétences professionnelles nécessaires au poste d’infirmière et compatibles avec le bon fonctionnement du service. Elle contestait tout défaut de prestations. Depuis son engagement, elle travaillait efficacement et rapidement, ce qui ressortait de tous les EEDC effectués. Ses qualités relationnelles avaient également été relevées. L’entretien de service du 26 novembre 2018, dont elle avait contesté les reproches n’avait pas été suivi de sanction. Elle avait néanmoins admis qu’elle pouvait progresser dans le domaine des transmissions, en complétant le DPI plus rapidement et de manière plus précise et structurée, ce qu’elle s’était appliquée à faire. Seuls des progrès ressortaient du bilan de la dernière « matinée clinique » du 27 février 2020. Les uniques reproches qui pouvaient être retenus contre elle, à l’issue de ce transfert, étaient ceux de ne pas avoir désinfecté l’intérieur d’un brassard et de ne pas remplir les transmissions de manière suffisamment rapide et précise.

La décision litigieuse violait les principes de la proportionnalité et de la bonne foi. Un avertissement formel ou une sanction disciplinaire pour les faits qu’elle avait reconnus aurait dû lui être adressé. Au lieu de rechercher la vérité et de favoriser le bon fonctionnement de l’équipe, les HUG cherchaient à mener à terme la procédure de résiliation des rapports de service, ne laissant aucune chance à son transfert dans l’unité 2EK de fonctionner, en créant un a priori négatif et contesté, alors même que l’entretien de service n’avait pas abouti à une sanction et qu’à teneur du dossier, rien ne permettait de considérer que cette situation n’était pas réglée. Ainsi, à défaut de réintégration, son salaire devrait lui être versé jusqu’à l’échéance des rapports de service, ainsi qu’une indemnité pour licenciement infondé et son salaire correspondant aux jours de vacances restants.

À l'appui de ses écritures, étaient notamment jointes les pièces suivantes :

-                 trois courriels datés du 5 mars 2020 de trois médecins des HUG, travaillant alors auprès de l'unité 0FL, indiquant avoir été pleinement satisfaits de leur collaboration avec elle, de la qualité de son travail et de son contact avec les patients ;

-                 plusieurs réponses négatives à des offres de service, reçues aux mois de juillet/septembre 2019, et octobre/novembre/décembre 2020.

41) Les HUG ont conclu au rejet du recours.

La recourante voulait réduire les reproches formulés à son encontre à deux points soulevés lors de la dernière matinée clinique dans l’unité 2EK du 27 février 2020, alors que ceux-ci étaient plus nombreux vu les éléments du dossier, et pour certains, d’une certaine gravité. Les EEDC de la recourante comprenaient également tous des points à améliorer. De façon récurrente, des objectifs lui étaient fixés en vue de l’amélioration de ses transmissions (orales ou écrites), sur l’organisation de son travail, sur le fait d’entendre et d’accepter les remarques qui lui étaient faites sans se justifier, sur ses connaissances professionnelles et sur son engagement dans la fonction. Ces remarques étaient communes à tous ses évaluateurs depuis sa prise d’emploi aux HUG. La prise en charge des patients par la recourante ne correspondait pas aux attentes de l’institution. Sa pratique mettait en évidence un manque de fiabilité, une insuffisance en lien avec la sécurité et la qualité des soins. Quant à sa collaboration avec l’équipe soignante, il existait un manque de communication récurrent et un manque de confiance de l’équipe dans les transmissions effectuées par elle. Elle avait aussi violé les devoirs du personnel en ne respectant pas les procédures institutionnelles, notamment la désinfection du matériel ou le contrôle de l’identité des patients. Alors que l’unité 2EK où elle travaillait lorsque les faits s’étaient déroulés, était une unité de soins de chirurgie aigüe de soins et d’orthogériatrie, elle ne semblait pas à même de prendre la mesure des reproches formulés, en les minimisant systématiquement.

Elle prétendait à tort avoir contesté les reproches formulés à son encontre lors de l’entretien de service du 26 novembre 2018. Il ressortait en effet de ses observations à la suite de celui-ci qu’elle en avait reconnu certains et qu’elle s’était engagée à améliorer la surveillance des patients, la documentation dans le DPI et les transmissions, à prendre l’initiative de se renseigner à la source et à demander à sa hiérarchie de faire des formations intra-HUG. Ainsi, il avait alors été renoncé à une sanction. Elle n’avait pourtant jamais mis en œuvre les engagements pris, notamment concernant la surveillance des patients et la documentation clinique. Elle n’avait jamais pris de dispositions concrètes pour sa formation continue, ce qui avait contribué à l’échec de son reclassement. Elle avait bénéficié d’un accueil et d’un encadrement à son arrivée dans l'unité 2EK, qui visait à lui permettre d’apprendre le bon fonctionnement de celle-ci et les particularités des soins qui y étaient prodigués. Elle avait été invitée à modifier son comportement, les points à améliorer lui avaient été signalés à plusieurs reprises, oralement et par écrit, et elle avait bénéficié du soutien et de l’encadrement de sa hiérarchie et de ses collègues dans les deux unités où ces manquements avaient été constatés. Elle avait également été mise en contact avec l’infirmier du service de santé du personnel et avait été adressée à la psychologue du service de santé pour une consultation. Si certains points avaient été améliorés, d’autres du même type avaient surgi et d’autres n’avaient jamais été corrigés. Les évaluations mettaient systématiquement en avant une absence de remise en question et sa difficulté à entendre les remarques.

Les HUG avaient œuvré activement à son reclassement en prenant différentes mesures. Après l’entretien de service du 26 novembre 2018 et à la suite des engagements qu’elle avait pris, des mesures avaient été prises pour permettre son transfert, après l’échec de sa postulation dans un autre service. Un entretien d’embauche avait été organisé spécialement pour elle le 12 septembre 2019 à l’hôpital F______, auquel elle ne s’était pas rendue. À la suite de l’échec de son intégration dans l’unité 2EK et à l’issue de l’entretien de service du 12 mai 2020, une procédure de reclassement avait été entamée, à laquelle la recourante avait été associée. Aucun poste disponible et correspondant n’avait pu être trouvé. Ils avaient tenu compte de ses suggestions, mais elle ne leur avait pas fait part de démarches de postulation en cours.

Ils s’opposaient à sa réintégration.

42) La recourante a répliqué en persistant dans ses conclusions et précédents développements.

43) Les 1er et 8 juin, 5 et 12 octobre et 2 novembre 2021 ont eu lieu des audiences d'enquêtes au cours desquelles les parties ont été entendues, ainsi que les témoins sollicités par celles-ci.

a. Pour Mme A______, ses relations avec ses collègues et sa hiérarchie étaient très bonnes. Il n'y avait jamais eu aucune plainte de patients à son égard. La première tension avec Mme C______ était apparue le 5 octobre 2018. Ce n'était que le 2 novembre 2018 qu'elle lui avait remis la convocation pour l'entretien de service du 26 novembre 2018 et qu'elle avait alors découvert que les événements du 26 mars 2018 seraient également évoqués à cette occasion. Ceux-ci avaient toutefois déjà été discutés à ce moment-là entre Mme C______ et elle, de sorte qu'elle les pensait réglés. Lors des événements des 26 mars et 4 octobre 2018, elle avait une charge de travail élevée. Elle confirmait contester les faits reprochés le 4 octobre 2018, en admettant qu'elle aurait pu être plus précise s'agissant de ses annotations dans l'échéancier, bien que cela n'aurait rien changé pour la patiente. Toutes les informations nécessaires avaient été transmises à l'équipe suivante, oralement et sur le DPI. Elle réfutait ne pas avoir recensé ce qui s'était passé entre 17h28 et 21h17. Elle avait introduit les données dans l'ordinateur à la fin de son service vers 21h30, après que la patiente avait été descendue aux soins intensifs.

Dès qu’elle avait découvert vers 20h00 que la patiente décompensait, elle avait aussitôt placé le masque à oxygène et appelé le médecin, qui était arrivé du bureau d’en face. Elle avait ensuite demandé à son collègue, M. D______, d’apporter le chariot d’urgence. Puis, elle avait contacté la réanimation, qui était arrivée en quelques minutes et avait pris en charge la patiente, laquelle avait ensuite été déplacée au service des soins intensifs. Elle avait averti la Dresse K______ lorsqu’elle remontait du bloc opératoire à l’étage. Puis, elle a déclaré l'avoir avertie lorsqu’elle avait pris la mesure et lui avait transmis les données. Celle-ci lui avait alors dit qu’elle comprenait et qu’elle allait vite remonter à l’étage. Après que la patiente eut été descendue aux soins intensifs, elle avait eu une discussion avec M. D______. Le lendemain, Mme C______ lui avait répondu que M. D______ l’en avait informée et qu’elle allait la convoquer pour en discuter. Après l’événement, M. D______ lui avait dit la trouver trop calme et qu’elle aurait dû appuyer sur le bouton d’urgence. En tant qu'IRES de l’autre unité, il ne devait alors plus être présent. Il lui avait dit qu’il était resté plus longtemps à cause d’elle.

Le 26 mars 2018, elle était de service l'après-midi. La patiente avait été accueillie par ses collègues à son arrivée entre 15h30 et 16h00. Une patiente ayant subi une coronarographie ne devait pas arriver dans une unité de chirurgie orthopédique, mais aurait dû être hospitalisée dans une unité de cardiologie. Selon les informations qu'elle avait reçues ce jour-là, la patiente allait bien et l'attendait pour la tournée de l'après-midi, laquelle pouvait commencer entre 16h00 et 17h00. Elle avait commencé sa tournée par cette patiente et avait alors découvert que
celle-ci portait un bracelet radial. Il était très rare qu'un tel bracelet soit posé, mais il fallait toujours avoir un pansement compressif pour une artère. Après la coronarographie, le patient devait être muni d'un protocole, figurant sur une feuille, avec laquelle il remontait à l'étage. Tel n'avait pas été le cas en l'occurrence. La patiente n'avait pas cette feuille, ni la seringue pour dégonfler le ballonnet. Après avoir examiné les paramètres vitaux de la patiente, elle avait demandé à ses collègues si quelqu'un savait comment manipuler le bracelet radial et où était la seringue. Elle n'avait jamais manipulé elle-même un bracelet radial, mais savait qu'il fallait le dégonfler régulièrement avec la seringue. En revanche, elle ignorait la quantité d'air à retirer. Aucun de ses collègues n'avait su lui répondre. Le service de cardiologie lui avait répondu qu'elle devait suivre le protocole qui était probablement resté en salle d'intervention. Le service d'intervention lui avait ensuite expliqué que le protocole se trouvait sur l'intranet des HUG et que quelqu'un allait lui apporter la seringue. Lors de la tournée de 20h00, l'aide-soignante était revenue avec la bonne seringue et elles avaient ainsi dégonflé le bracelet radial. Il n'y avait pas eu beaucoup de conséquence pour la patiente qui ne s'était jamais plainte. Lors de la transmission, les collègues du matin lui avaient dit que la patiente avait subi une coronarographie et que le pansement compressif devait être contrôlé régulièrement. Elle n'avait vu le bracelet radial que vers 18h00 lorsqu'elle avait fait sa tournée. Elle n'avait pas immédiatement fait chercher une petite seringue car la patiente allait bien et ne montrait aucun signe inquiétant. Il était exact qu'elle aurait dû l'enlever à 18h00. Mais elle n'avait pas pu le faire comme elle n'avait pas la seringue. Le service d'intervention ne lui avait pas dit qu'il était urgent de dégonfler le bracelet si la patiente allait bien. Lorsqu'elle avait vu la patiente vers 16h00, elle ne l'avait pas examinée et n'avait pas soulevé le duvet pour voir quel type de pansement elle avait. Elle avait continué à la surveiller entre 18h00 et 20h00, heure à laquelle elle avait commencé à dégonfler le bracelet radial. Elle avait complété l'échéancier comme il le fallait. Il lui arrivait de cocher les échéances à la fin de son service. Elle contestait avoir donné des informations vagues et erronées. En réalité, elle ne se rappelait pas si elle avait vu le bracelet radial vers 16h00 ou avant 18h00, mais, faute d'avoir le protocole, elle ignorait comment procéder. La transmission à l'équipe de nuit avait été faite oralement et elle avait laissé « une petite trace » dans le DPI. À partir de 20h00, heure à laquelle elle avait reçu le protocole, elle savait qu'il fallait dégonfler le bracelet radial toutes les trente minutes et enlever le pansement. Si à 22h00, elle n'avait pas effectué le dernier dégonflement ou averti l'équipe de nuit qu'il fallait enlever le pansement dans la demi-heure, c'était probablement parce qu'elle avait été occupée avec d'autres patients et qu'il ne lui avait pas été possible de faire le dégonflement toutes les trente minutes. Il appartenait à l'infirmière d'évaluer si le pansement compressif devait être maintenu ou un pansement sec appliqué. Il était vrai que si un acte devait intervenir toutes les trente minutes, il devait être accompli à cette cadence, indépendamment de la tournée de soins. Elle considérait qu'il y avait bien eu une surveillance et qu'elle avait inscrit tous ses actes dans le DPI. Elle ignorait que les informations concernant le dégonflement du bracelet radial figuraient dans le DPI de la patiente, alors qu'elle y avait accès depuis son arrivée.

Elle n'avait connu les conditions liées à son transfert à l'unité 2EK qu'après l'avoir accepté. Elle y avait reçu un accueil froid, directif et autoritaire car ses collègues avaient été informés du contexte de son transfert. Elle était sous pression psychologique tous les jours et elle allait au travail avec la boule au ventre. Les « matinées cliniques » qui lui avaient été organisées étaient en principe réservées aux stagiaires et étudiants, mais pas aux infirmières expérimentées. Selon elle, son échec avait été établi dès le départ. À une occasion, Mme G______ ne l'avait pas avertie d'une « matinée clinique » en avance, alors qu'elle aurait dû en être informée une semaine auparavant. Entre 2019 et 2020, cinq collègues dont trois infirmières avaient été licenciés à l'initiative de Mme C______. L'absence de mesure et de sanction à son encontre après l'entretien de service du 26 novembre 2018 avait, selon elle, contrarié Mme C______ et incité celle-ci à lui adresser d'autres reproches. Après l'entretien de service du 26 novembre 2018, il y avait eu des séances de compte-rendu à la suite desquelles Mme C______ lui avait dit que les objectifs avaient été atteints et qu'il ne restait que celui du changement de service.

Elle persistait à contester les autres actes qui lui étaient reprochés.

Depuis son licenciement, sa situation personnelle et professionnelle était difficile. Elle demeurait sans emploi, mais accomplissait des missions temporaires. Elle avait envoyé des lettres de candidature partout mais toutes étaient revenues négatives, après renseignements pris auprès des HUG. Elle avait effectué des stages non rémunérés, pour lesquels elle avait obtenu des certificats élogieux. Elle n'était pas allée à l'entretien d'embauche auprès de l'hôpital F______, ce dont elle avait informé Mme B______, pour des raisons personnelles, liées à l'hospitalisation d'un membre de sa famille à cet endroit. Hormis cet obstacle, le poste auprès de l'hôpital F______ correspondait à ses attentes. Elle n'avait jamais manifesté à Mme B______ son désintérêt pour la psychiatrie. Elle ne l'avait pas informée de sa postulation en psychiatrie car elle avait l'impression que cela n'avait aucune utilité. La formation continue qu'elle avait demandée lui avait été refusée par Mme C______, car il n'y avait plus de place. L'autre formation proposée avait été annulée. Elle avait gardé une copie de tous les courriels de Mme B______ lui indiquant qu'elle n'avait pas les compétences requises.

Lors de l'audience du 5 octobre 2021, Mme A______ a déposé une attestation de stage auprès de la Fondation pour l'accueil et l'hébergement de personnes âgées du 15 septembre 2021, indiquant notamment qu'elle s'était « très bien adaptée à la prise en charge des résidents », « ses activités en tant que stagiaire [leur avaient] donné entière satisfaction », elle avait également « entretenu de très bons rapports tant avec les résidents, qu'avec ses collègues de travail et sa hiérarchie ».

b. Les HUG ont expliqué le fonctionnement du DPI, en précisant notamment que l'absence ou l'heure de validation du soin ne correspondait pas toujours à l'heure effective où le soin avait été accompli. La validation pouvait intervenir plus tard, à la fin du service.

Mme B______ leur avait confirmé que Mme A______ avait formulé une demande de mobilité, soit de changer d'unité et d'aller en réadaptation, mais pas de demande de formation continue.

S'agissant de l'affirmation de Mme A______ selon laquelle cinq collègues de l'unité avaient été licenciés par Mme C______ entre 2019 et 2020, Mme B______ avait retrouvé deux cas de licenciement, soit une infirmière encore en période probatoire et un infirmier qui avait fait l'objet auparavant d'un report de nomination. D'autres licenciements avaient été identifiés pour la même période à l'échelle du département de chirurgie et du personnel soignant, mais concernaient d'autres unités.

c. Mme C______, responsable de Mme A______ du 1er février 2014 au 1er octobre 2019, a expliqué que son rôle était d’assurer la qualité des soins et la sécurité des patients. Elle supervisait une équipe d’infirmières et
d’aides-soignantes. Elle avait une vision complète du patient, de son entrée jusqu’à sa sortie, avec le plan d’intervention quand il était électif. Le DPI permettait de vérifier le travail accompli par les infirmières et les aides-soignantes, dans l’intérêt du patient et pour établir les besoins de formation continue de l’équipe. L’échéancier était établi dans le DPI par les médecins concernant les prescriptions, par les infirmières et aides-soignantes s’agissant des soins prodigués, étant précisé que l’aide-soignante travaillait sur délégation de l’infirmière. Il était important que l’acte soit noté dans le DPI au plus près de son accomplissement. La règle voulait que l’acte soit inscrit immédiatement, avant de passer au patient suivant. La personne qui inscrivait les données dans le DPI restait responsable en cas d’urgence. Le DPI permettait d’avoir une vision d’ensemble du patient et de sa prise en charge mais aussi de vérifier que les soins et les examens avaient été correctement planifiés, puis exécutés à l’heure prévue.

L’entretien de service du 26 novembre 2018 avait pour objet deux problématiques de prise en charge de patients par Mme A______, lors desquelles des défauts de surveillance avaient été relevés. Concernant les faits du 4 octobre 2018, il était reproché à Mme A______ de n’avoir indiqué aucune information sur l’état clinique de la patiente entre 17h28 et 21h17 dans le DPI, alors que tel aurait dû être le cas. Lorsque Mme A______ avait détecté une saturation à 91 %, elle devait prévenir le médecin, seul compétent pour décider d’augmenter l’oxygénation. Compte tenu du fait que la patiente n’était alors qu’à 2 l/mn, avait des comorbidités, était à J+1 post opératoire, sous morphine, et avait uriné en dessous de la norme, Mme A______ aurait dû alerter le médecin à 17h28, en appelant celui de garde. Dans l’ordre, il convenait de contacter le médecin d’étage, le chirurgien, l’orthogériatre, le médecin de garde, le chef de clinique ou le 144. De la qualité de la transmission effectuée dépendait la rapidité avec la quelle le médecin allait venir. La Dresse K______ était un médecin externe au service, qu’elle ne connaissait pas et dont elle ignorait les raisons de la présence le 4 octobre 2018 à 17h28. Selon elle, la Dresse K______ devait avoir écrit ce qui lui avait été rapporté sans avoir vu la patiente ni le dossier, sinon le volume d’urine l’aurait alertée. Si Mme A______ avait appelé le médecin à ce moment-là, il y en aurait eu une trace sous forme de note de suite. Le médecin aurait dû intervenir immédiatement sur la base des données qui lui avaient été transmises et elle n’aurait alors pas inscrit des paramètres vitaux dans la norme. Si la Dresse K______ était intervenue à la suite d’un appel urgent, elle l’aurait certainement noté et elle n’aurait en tout cas pas écrit que les paramètres vitaux étaient dans la norme. Elle avait su le lendemain par M. D______ ce qui était arrivé à la patiente. Mais Mme A______ ne lui en avait pas parlé. Une situation comme celle-ci devait être spontanément rapportée. M. D______ lui avait parlé d'une réanimation dans le service. C’était parce qu’il était présent dans le couloir qu’il en avait eu connaissance, de même que l’alerte n’avait pas été donnée et que les collègues de l’étage n’avaient pas été prévenus. Lorsqu’un patient était trouvé inconscient, il fallait appuyer sur le bouton réanimation, lequel alertait les collègues. Lorsque l’équipe de réanimation était arrivée, elle ignorait pour quelle chambre elle venait. Ce jour-là, seuls quinze patients sur les vingt-deux pouvant être accueillis étaient présents. Trois infirmières et deux aides-soignantes étaient présentes, soit le personnel pour vingt-deux patients. Il n’y avait pas de surcharge de travail dans l’unité.

Les reproches au sujet du deuxième événement étaient semblables, alors que ceux-ci portaient sur une coronarographie, opération peu fréquente en chirurgie orthopédique mais qui demandait une attention accrue. Mme A______ lui avait expliqué qu’il y avait ce jour-là « du bazar et du cheni », mais qu’elle avait pris les paramètres vitaux de la patiente qui étaient en ordre. Or, s’agissant d’une coronarographie, la prévention du risque d’hémorragie, par un point de compression de l’artère fémorale, respectivement un bracelet pneumatique de l’artère radiale, nécessitait une inspection. L’indication selon laquelle tous les paramètres étaient normaux ne correspondait pas au protocole qui s’appliquait à une patiente dont on devait périodiquement dégonfler le bracelet. Rien n’avait été inscrit à ce sujet dans le DPI, alors que le compte-rendu opératoire y figurait et qu’il appartenait à l’infirmière d’agender les contrôles et de faire une transmission des suites de l’examen.

Selon elle, les deux incidents étaient de la même gravité. Si le décès de la patiente du 4 octobre 2018 n’avait jamais été reproché à Mme A______, le défaut de surveillance avait entraîné la décompensation. Mme A______ n’avait jamais admis aucune responsabilité ni aucune erreur. Bien qu’elle eût proposé de l’aide à Mme A______, celle-ci n’était pas venue au second feedback et avait changé son horaire pour le troisième, sans se soucier du rendez-vous qu’elle avait. Mme A______ ne se remettait jamais en question et incriminait ses collègues. Elle n’avait jamais reçu de plaintes de patients au sujet de Mme A______ depuis qu’elle avait intégré le service en 2014.

d. Monsieur L______, infirmier aux HUG, a indiqué avoir régulièrement travaillé avec Mme A______ et ne pas avoir eu de problème de confiance. Selon lui, Mme A______ était investie et engagée dans son travail, à l’écoute des patients et répondait à leurs besoins de façon adéquate. Elle s’était montrée disponible à l’égard des collègues quand ils avaient besoin d’elle. Elle faisait les transmissions comme tous les collègues, de manière normale. Dans la mesure du possible, ils renseignaient le DPI aussitôt après le soin ou la mesure. En raison des interruptions, ils n’arrivaient pas systématiquement à les inscrire immédiatement, de sorte qu’elles étaient souvent différées après les soins au patient. La mesure d’indicateurs vitaux était en revanche inscrite immédiatement. En cas de surcharge, ils s’efforçaient d’inscrire les signes vitaux et les médicaments dispensés dès que le soin était fini. En revanche, les autres indications recueillies ou les actes non prioritaires comme les changements de pansement étaient reportés dans le DPI après la tournée de tous les patients. La documentation dans le DPI était très importante et devait être faite avec rigueur car elle permettait de faire une bonne transmission à l’équipe suivante. L’identité du patient lui était demandé la première fois et ne l’était pas à nouveau, sauf en cas de transfusion ou de prise de sang. Il n’estimait pas avoir une vision d’ensemble sur le travail de Mme A______ qu’il voyait en moyenne trois jours par semaine.

e. Madame M______, infirmière aux HUG de 2002 à 2017, a indiqué qu'elle collaborait avec Mme A______ comme avec tous ses autres collègues et lui faisait confiance. Elle n’avait pas de souvenir particulier sur les transmissions faites. Les paramètres vitaux étaient en principe inscrits au fur et à mesure dans le DPI. Idéalement, il fallait tout noter immédiatement. En cas d’urgence, il était toujours possible de joindre un médecin.

f. Madame N______, ayant travaillé aux HUG comme infirmière de 2014 à 2020 et à l'unité 2EK depuis septembre 2020, a déclaré que sa collaboration avec Mme A______ se passait globalement bien. Elles avaient entretenu des rapports très courtois, très polis et très professionnels. Elle avait entièrement confiance en Mme A______ et dans le travail de celle-ci. Mme A______ s’investissait dans son travail et faisait des transmissions très ciblées et lui transmettait les informations nécessaires. Elle-même notait les paramètres vitaux et les médicaments administrés aussitôt qu’elle avait fait le geste. S’agissant des transmissions ciblées, elle les faisait lorsqu’elle avait le temps, soit à la fin de sa tournée, mais le plus souvent à la fin de son horaire. Lorsque les équipes se succédaient, elle avait pu constater que le travail était fait, ainsi que l’absence de plaintes de la part des patients à propos du travail de Mme A______.

g. Madame O______, IRES travaillant aux HUG depuis 1996, a indiqué avoir travaillé avec Mme A______ d’avril à septembre 2015, période durant laquelle elle était IRES ad intérim et remplaçante de Mme C______. Elle avait alors une vue d’ensemble sur le travail de Mme A______, lequel était normal et lui inspirait confiance. Elle n’avait jamais eu à reprendre son travail ou lui faire de remarque, ni reçu de plaintes de patients. Comme pour les autres collègues, il lui arrivait parfois de lui demander que des protocoles soient respectés, tels que l’inscription dans le DPI des données relatives au patient lors de son entrée.

h. Mme G______, IRES de Mme A______ du 1er janvier au 31 mars 2020, a expliqué que, lors des « matinées cliniques », elle prenait la transmission de Mme A______, la suivait dans ses soins avant de faire un point de situation avec elle. Elle avait constaté des insuffisances sur des points essentiels dans le travail de Mme A______, comme le respect des consignes chirurgicales, l’identito-vigilance, la documentation sur le DPI et dans la logique des soins, en citant des exemples de patients. La « matinée clinique » était une pratique courante dont elle avait l’expérience. Elles avaient été instaurées pour Mme A______ car il y avait des objectifs à atteindre dans le cadre du transfert de service et que les deux référents et des médecins lui avaient rapporté des épisodes qui les avaient préoccupés. Un médecin lui avait rapporté le cas d’une patiente opérée de l’épaule que Mme A______ avait soulevée en la prenant par les aisselles, ce qui avait occasionné des douleurs et nécessité une radiographie de contrôle. Mme A______ avait bénéficié d’un bon encadrement de la part des référentes, qui lui faisait un compte rendu quotidien. Malgré ceux-ci, les problèmes revenaient, raison pour laquelle les « matinées clinques » étaient organisées. Elle n’avait aucun a priori ni aucune information sur le transfert de Mme A______. Elle savait uniquement qu’il y avait des objectifs à atteindre pour que le transfert soit validé. Les objectifs qu’elle fixait lors des « matinées cliniques » n’avaient pas de lien avec ceux fixés par les RH. Mme A______ lui disait être à l’aise et avoir de bons rapports avec l’équipe. Elle avait évoqué quelques tensions avec une référente sur la fin de l’encadrement. L’équipe avait, quant à elle, l’impression que Mme A______ se tenait un peu à l’écart. Mme A______ était posée et respectueuse lors des retours qu’elle lui faisait. Elle admettait les événements problématiques qu’elle lui rapportait, mais elle donnait toujours des explications qui n’étaient pas satisfaisantes, en se justifiant et minimisant. Les insuffisances de cette importance l’avaient questionnée venant de la part d’une infirmière expérimentée. Au sein de l’unité 2EK, Mme A______ avait quatre patients à charge, soit moins que dans l’unité 0FL et des cas moins « lourds ».

i. Madame P______, infirmière à l'unité 2EK, a indiqué que sa collaboration avec Mme A______ n'était pas fluide, car celle-ci était froide et distante. Elle s'était aperçue d'une erreur importante de la part de Mme A______ concernant la programmation d'un médicament. Une comparaison avec la prescription du médecin lui avait permis de détecter l'erreur. Ses collègues lui avaient dit avoir
eux-mêmes constaté des erreurs. Certains patients manifestaient leur mécontentement lorsqu'ils apprenaient que c'était Mme A______ qui s'occuperait d'eux, se plaignant d'un manque de douceur. En général, l'unité était relativement stable. Elle-même travaillait comme infirmière aux HUG depuis 2003 et dans cette unité depuis trois ans et demi. Le DPI était leur outil de référence et sa mise à jour se faisait en temps réel. Les mesures et les soins étaient agendés et inscrits lorsqu'ils avaient été exécutés.

j. Madame Q______, infirmière à l'unité 2EK, a expliqué qu'elle savait que cela ne se passait pas très bien avec Mme A______ dans l'unité. Lorsqu'elle lui succédait, elle effectuait toujours des vérifications, n'ayant pas en Mme A______ la confiance nécessaire pour travailler. Cela résultait de deux ou trois épisodes dont elle ne se souvenait plus du détail. Elle avait également entendu d'autres événements qui s'étaient produits dans l'unité la concernant, rapportés par d'autres collègues. Elle demandait l'identité du patient en fonction de l'acte médical à accomplir, notamment pour une prise de sang ou l'administration de médicaments, mais pas pour un pansement. L'accès au DPI était disponible dès le début de la tournée.

k. Mme B______ a confirmé qu'en 2019 et 2020, au sein de l'unité dirigée par Mme C______, trois situations, dont celle de Mme A______, avaient abouti à des licenciements. Dans chacune de ces trois situations, Mme C______ avait constaté des dysfonctionnements dont elle avait informé sa hiérarchie et les RH, conformément à ses attributions. Aucune sanction n'avait été prise à la suite de l'entretien de service du 26 novembre 2018 car Mme A______ avait pris des engagements et demandé une mobilité professionnelle. Celle-ci lui avait dit qu'elle souhaitait un environnement de travail moins technique, moins aigu et moins stressant. La proximité avec son domicile était également un facteur. Concernant la procédure de reclassement, elle avait sollicité l'intégralité de ses collègues RH. Sa demande et toutes les réponses étaient au dossier. Elle avait vu Mme A______ a plusieurs reprises pour expliquer le processus et la motiver à être proactive dans la recherche d'un emploi. Elle avait un peu peiné à accompagner Mme A______ dans ce processus car elle n'arrivait pas toujours à savoir ce qui l'intéressait vraiment. Elle n'avait eu de retour que sur une postulation interne. Elle avait eu l'impression de devoir beaucoup la motiver, sans forcément avoir de résultat, et qu'elle restait dans le déni des remarques qui lui avaient été faites dans le cadre des entretiens de service. À la demande du syndicat qui la représentait, Mme A______ avait bénéficié d'un soutien psychologique du service de santé. Elle n'avait pas été contactée au sujet de Mme A______ par de potentiels employeurs extérieurs. Mme A______ lui avait dit ne pas être intéressée par la psychiatrie, de sorte qu'elle avait déjà indiqué à sa collègue RH de psychiatrie qu'elle n'avait pas de formation ni d'intérêt particulier pour ce domaine.

l. Mme K______, ancienne médecin stagiaire au sein de l'unité 2EK durant le mois d'octobre 2018, n'avait aucune souvenir du cas spécifique de la patiente concernée par l'événement du 4 octobre 2018. Le report des mesures concernant la tension artérielle et la fréquence cardiaque était de la responsabilité des infirmiers. Les indications figurant dans le DPI sous son nom n'avaient pu être introduites que par elle-même, à moins que l'ordinateur ne soit resté ouvert sur son compte. Concernant la valeur de saturation relevée à 18h00, celle-ci pouvait ne pas être préoccupante suivant différents critères. Sans connaître l'état du patient, il n'était pas possible, à la seule vue du graphique, de parler de désaturation. La mesure à 70 % correspondait en revanche clairement à une désaturation. Ce qu'elle avait inscrit à 19h17 était congruent avec le mesures enregistrées dans le DPI, étant précisé qu'il y avait le risque qu'au moment d'écrire, elle tenait compte des paramètres enregistrés et des observations faites lors de la visite plus tôt dans la journée, soit avant la mesure de 18h00. Sur la base du dossier et de l'extrait qui lui étaient soumis, il ne lui était pas possible de dire quand exactement elle avait observé ce qu'elle avait écrit à 19h17. Si la patiente était oxygéno-dépendante, elle ne modifierait pas ses observations sur les mesures jusqu'à 18h00. Elle ne pouvait pas dire si dans le cas d'espèce, le terme « stable » se référait à l'examen clinique de la patiente ou à l'examen des valeurs figurant dans le DPI. Il était possible que la note qu'elle avait inscrite à 19h17 ce jour-là ait correspondu à une visite dans l'après-midi. Elle confirmait que l'âge, le poids et la médication étaient en général des facteurs pouvant influencer l'appréciation de la saturation. Ces informations la rendraient plus attentive à l'évolution de la saturation.

44) a. Dans leurs observations des 14 juillet, 26 octobre et 3 décembre 2021, les HUG ont maintenu leur position.

Les éléments du dossier et les auditions confirmaient que la recourante avait violé plusieurs devoirs du personnel, de manière récurrente, malgré les engagements qu'elle avait pris. Malgré la gravité de certaines de ces violations, elle n'avait jamais pris conscience de l'insuffisance de ses prestations et du risque de mise en danger des patients en découlant, puisqu'elle persistait à dire qu'elle ne comprenait pas ce qui lui était reproché.

Le 26 mars 2018, la recourante n’avait pas respecté les prescriptions médicales préconisant une surveillance post-opératoire, puisqu’elle ne s'était pas occupée de la patiente entre 15h17 et 20h55 et avait induit en erreur la collègue qui lui avait succédé en indiquant à cette dernière qu’il fallait mettre un pansement compressif au lieu d’un pansement sec.

Le 4 octobre 2018, elle avait documenté une saturation en oxygène à 91 % sous 2l/ml et avait pris les mesures à 19h51, 20h14 et 21h17. Il ressortait de ces mesures que la saturation, déjà très basse à 17h28, avait continué à chuter de manière importante, puisqu’une saturation en oxygène à 70 % sous 2l/ml avait été enregistrée à 21h17. Elle avait modifié la version qu’elle avait spontanément donnée lors de l’entretien de service du 28 novembre 2018, puisqu’elle prétendait désormais avoir elle-même appelé la Dresse K______, ce qu’elle n’avait jamais allégué auparavant. Il était toutefois peu crédible que la Dresse K______ ait examiné la patiente avant de rédiger sa note de suite de 19h17. Les éléments du dossier portaient au contraire à croire que la note avait été rédigée par la Dresse K______ sur la base des indications contenues dans le DPI en début de tournée, soit en début d’après-midi, avant la mesure de saturation de 17h28.

Les excuses avancées par Mme A______ pour expliquer ses manquements ainsi que la fluctuation dans ses explications ne faisaient que démontrer l’absence de remise en question de sa part et le fait qu’elle ne prenait pas conscience de ses manquements ni de leur gravité. Le fait qu’elle estimait pouvoir faire fi des protocoles de soin en les appliquant à son gré démontrait qu’elle avait une posture qui pouvait se révéler dangereuse pour les patients. Il était contesté que, lors des séances de debriefing de la recourante avec Mme C______ à la suite de l’entretien de service du 26 novembre 2018, celle-ci lui aurait dit que les objectifs avaient été atteints. La recourante s’était également contredite au sujet de ses demandes de formation, prétendant, d’une part, les avoir soumises à Mme B______, puis, d’autre part, à Mme C______.

S’agissant d’un prétendu congé représailles, la recourante avait également changé sa version lorsque Mme B______ avait confirmé qu’en 2019 et 2020, il y avait eu trois situations qui avaient abouti à des licenciements de personnes travaillant dans l’unité dirigée par Mme C______.

b. Ils ont également produit diverses pièces complémentaires, soit :

-                 une copie de la directive interne sur les standards minimums pour la pratique des soins infirmiers et obstétricaux en vigueur depuis le 6 mars 2001 ;

-                 le planning des infirmières et aides-soignantes de l'unité 0FL pour la période du 26 mars au 1er avril 2018 ;

-                 le rapport médical du 26 mars 2018 de la patiente ayant subi une coronarographie ;

-                 les captures d'écran du DPI du 26 mars 2018 ;

-                 les captures d'écran du DPI du 4 octobre 2018 ;

-                 des échanges de courriels du 12 septembre 2019 entre Mme B______ et Madame R______, responsable des ressources humaines du département de réadaptation et gériatrie de l’hôpital F______, indiquant que Mme A______ avait renoncé à ce poste « pour plusieurs raisons », en particulier la distance par rapport à son domicile et le fait qu'elle attendait une « meilleure proposition » ;

-                 le planning des infirmières et aides-soignants de l'unité 0FL de la semaine du 1er au 7 octobre 2018.

45) a. Dans ses observations des 16 août, 3 et 20 décembre 2021, la recourante a persisté dans ses conclusions et son argumentation.

L'instruction avait permis de montrer, concernant les faits du 4 octobre 2018, qu'elle avait bien donné l'alerte. Dès lors que la Dresse K______ lui avait indiqué qu’elle viendrait voir cette patiente dès qu’elle sortirait du bloc opératoire, il ne se justifiait pas de rechercher l’intervention d’un autre médecin. Il n'était pas fondé de lui reprocher un défaut de prise en charge de la patiente. Mme C______ avait confirmé que le décès de cette patiente ne lui avait jamais été reproché. L'instruction montrait que les mesures et soins à effectuer l'avaient bien été selon l'échéancier, que les indications y relatives avaient bien été fournies et qu'une transmission ciblée avait bien été effectuée. Le caractère approximatif, voire contradictoire, des déclarations de Mme C______ ajoutait à l'impression générale que celles-ci ne reposaient sur aucun fondement. Demeurait donc le reproche qu'elle n'aurait pas indiqué dans le DPI les informations relatives aux soins prodigués et aux paramètres des mesures prises immédiatement après les soins. Si cela n'était pas optimal d'un point de vue organisationnel, il convenait de considérer qu'il s'agissait d'une situation d'urgence. La prise en charge de la patiente n'en avait pas été moins adéquate. Tous les soignants avaient expliqué que, bien que le principe fût d'introduire les données DPI immédiatement après les soins, en pratique, ils ne parvenaient pas toujours à le faire en raison soit de la surcharge de travail, soit de problèmes liés à l'informatique. Ils avaient tous indiqué que, très souvent, ils n'avaient d'autre choix que de procéder à l'inscription des informations dans le DPI après la tournée, voire à la fin de la visite médicale, et non pas juste après les soins aux patients.

Concernant les faits du 25 mars 2018, l'instruction avait montré qu'il n'était pas fréquent en chirurgie orthopédique de recevoir des patients ayant subi une coronarographie. La patiente n'était pas censée être placée dans une unité d'orthopédie qui n'était pas spécialisée pour ce type de surveillance. Il lui avait été reproché de ne pas savoir donner la priorité aux actions à mener alors qu’elle n’avait pas eu le choix que d’effectuer la visite avec les médecins et qu’elle ne pouvait laisser des pansements ouverts sur des plaies post-opératoires. Tandis que le début de la tournée avait été retardé, elle l’avait débutée par cette patiente, parce qu’elle avait le sens des priorités. Les HUG semblaient voir des contradictions là où il n’y en avait pas. Ses déclarations étaient conformes à celles de la Dresse K______. Il n’était pas admissible de remettre en question ses déclarations sur la base de suppositions. Elle persistait à contester tout défaut de surveillance.

À la suite de l'entretien de service, contrairement à ce qu'avait indiqué Mme C______, des séances de débriefing avaient été organisées avec celle-ci afin de travailler sur ses objectifs. Elles avaient eu lieu de manière orale, sous forme de discussion, sur proposition de Mme C______, laquelle lui avait finalement indiqué que les objectifs avaient été atteints. À aucun moment, il ne lui avait été proposé de suivre une formation continue. Peu avant son transfert, elle avait soutenu une autre infirmière licenciée, laquelle se trouvait sous les ordres de Mme C______. Son licenciement intervenait en raison d'inimitiés personnelles.

S’agissant de son expérience au sein de l’unité 2EK, il apparaissait disproportionné qu’une évaluation portant sur un mois et demi de travail effectif et fondée sur trois « matinées cliniques », dans une unité différente de celle dans laquelle elle intervenait précédemment et dans un contexte de méfiance, puisse compter davantage que dix ans d’expérience au sein des HUG, sans qu’aucun reproche ne lui ait été fait quant à sa pratique d’infirmière. Il n’y avait jamais eu de plaintes de patients à son égard concernant les soins prodigués ou son comportement. Les HUG tentaient également de généraliser les propos des collègues de l’unité 2EK, lesquels contredisaient ceux de ses précédents collègues. Il ressortait également des déclarations des infirmières de l’unité 2EK qu’il s’agissait d’une unité stable, de sorte que les collègues se connaissaient très bien, ce qui pouvait expliquer que les mêmes vérifications n’étaient pas effectuées lorsqu’elles succédaient à des anciennes collègues. Au surplus, ce type de vérification faisait partie du travail d’infirmier.

Au surplus, ses nombreuses postulations n’avaient pas été soutenues, malgré le bon déroulement de ses entretiens d’embauche.

b. Elle a notamment produit un certificat de travail établi par la Clinique S______, au sein de laquelle elle avait effectué un stage du 28 juin au 29 juillet 2021. Il en ressortait notamment qu’elle avait « toujours accompli avec beaucoup de sérieux et de conscience professionnelle les tâches qui lui [avaient] été confiées à [leur] pleine et entière satisfaction » ; qu’elle bénéficiait de leur « entière confiance » ; « son efficacité et son professionnalisme, sa sensibilité, son empathie » avaient particulièrement appréciés ; elle avait « entretenu d’excellents rapports de travail tant avec ses supérieurs et ses collègues qu’avec [leurs] patients ». Cela confirmait encore que la résiliation des rapports de service était infondée et disproportionnée.

46) Sur quoi, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) À titre préalable, la recourante a sollicité la comparution personnelle des parties et l'audition de témoins, requête que les HUG ont également formulée.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

b. En l'espèce, les HUG ont produit le dossier de la recourante, qui a pu le consulter. En outre, les écritures des parties et les pièces produites par leurs soins, ainsi que leur audition et celle des différents témoins cités par elles, ont permis d'apporter à la chambre de céans les éléments suffisants pour lui permettre de trancher le litige.

Au vu de ce qui précède, il a été fait droit aux offres de preuves des parties. La chambre de céans considère également que le dossier est complet, lui permettant ainsi de statuer en toute connaissance de cause.

3) L'objet du litige porte sur la conformité au droit de la résiliation des rapports de service pour motif fondé, prononcée le 3 décembre 2020 par les HUG en raison de plusieurs insuffisances de prestations de la part de la recourante, ayant induit une inaptitude à remplir les exigences du poste et la disparition durable d'un motif d'engagement au sein du département de chirurgie et des HUG.

4) Dans un premier grief, la recourante conteste l'existence de motifs fondés pour justifier son licenciement.

a. Les HUG sont les établissements publics médicaux du canton de Genève (art. 1 al. 1 de la loi sur les établissements publics médicaux du 19 septembre 1980 - LEPM - K 2 05). Les membres de leur personnel sont soumis à la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) et à son règlement d’application du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.01), sous réserve des dispositions particulières figurant dans la LEPM, ainsi qu'au statut du personnel des HUG du 16 décembre 1999 (ci-après : statut). En outre, les dispositions du statut sur le traitement des fonctionnaires des HUG reprennent respectivement celles du RPAC et de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l’État, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait - B 5 15).

b. Les membres du personnel sont tenus au respect de l'intérêt de l'État et doivent s'abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice (art. 20 RPAC). Selon l'art. 21 let. a RPAC, les membres du personnel se doivent, par leur attitude : d’entretenir des relations dignes et correctes avec leurs supérieurs, leurs collègues et leurs subordonnés; de permettre et de faciliter la collaboration entre ces personnes (let. a) ; d’établir des contacts empreints de compréhension et de tact avec le public (let. b) ; de justifier et de renforcer la considération et la confiance dont la fonction publique doit être l’objet (let. c). Aux termes de l'art. 22 al. 1 RPAC, les membres du personnel se doivent de remplir tous les devoirs de leur fonction consciencieusement et avec diligence. Ils doivent se tenir au courant des modifications et des perfectionnements nécessaires à l’exécution de leur travail; ils peuvent, à cet effet, demander ou être appelés à suivre les cours de perfectionnement prévus à l’art. 12 RPAC (art. 22 al. 5 RPAC).

Les art. 20, 21 et 22 du statut reprennent ces dispositions pour les appliquer aux devoirs du personnel des HUG.

c. Conformément à l'art. 21 al. 3 LPAC, l'autorité compétente peut résilier les rapports de service du fonctionnaire pour un motif fondé. Il y a motif fondé au sens de l'art. 22 LPAC, lorsque la continuation des rapports de service n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration, soit notamment en raison de : l'insuffisance des prestations (let. a) ; l'inaptitude à remplir les exigences du poste (let. b) ; la disparition durable d'un motif d'engagement (let. c).

Le motif fondé, au sens de l'art. 22 LPAC, n'implique pas l'obligation pour l'employeur de démontrer que la poursuite des rapports de service est rendue difficile, mais qu'elle n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration (ATA/1679/2019 du 19 novembre 2019). L'intérêt public au bon fonctionnement de l'administration cantonale, déterminant en la matière, sert de base à la notion de motif fondé, lequel est un élément objectif indépendant de la faute du membre du personnel. La résiliation pour motif fondé, qui est une mesure administrative, ne vise pas à punir mais à adapter la composition de la fonction publique aux exigences relatives au bon fonctionnement de celle-ci (ATA/1471/2017 du 14 novembre 2017).

d. Il s'agit de situations incompatibles avec le bon fonctionnement du service. Le premier cas de figure visé par la loi est aisé à saisir. Le second concerne par exemple un collaborateur incapable de s'adapter à un changement dans la manière d'exécuter sa tâche. Il en va ainsi de collaborateurs incapables de se former à de nouveaux outils informatiques. Le troisième cas concerne par exemple des collaborateurs frappés d'invalidité et, dès lors, durablement incapables de travailler (Rapport de la commission ad hoc sur le personnel de l'État chargée d'étudier le projet de loi modifiant la LPAC du 29 septembre 2015, PL 7'526-F, p. 3).

L'élargissement des motifs de résiliation des rapports de service, lors de la modification de la LPAC entrée en vigueur le 31 mai 2007, n'implique plus de démontrer que la poursuite des rapports de service est rendue difficile, mais qu'elle n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration (ATA/783/2016 du 20 septembre 2016). L'intérêt public au bon fonctionnement de l'administration cantonale, déterminant en la matière, sert de base à la notion de motif fondé, lequel est un élément objectif indépendant de la faute du membre du personnel. La résiliation pour motif fondé, qui est une mesure administrative, ne vise pas à punir mais à adapter la composition de la fonction publique dans un service déterminé aux exigences relatives au bon fonctionnement dudit service (ATA/1471/2017 du 14 novembre 2017 ; ATA/674/2017 du 20 juin 2017 ; MGC 2005-2006/XI A 10420).

Selon une jurisprudence constante, le fait de ne pas pouvoir s'intégrer à une équipe ou de présenter des défauts de comportement ou de caractère tels que toute collaboration est difficile ou impossible est de nature à fonder la résiliation des rapports de travail, quelles que soient les qualités professionnelles de l'intéressé (ATA/1476/2019 du 8 octobre 2019 consid. 8a ; ATA/674/2017 du 20 juin 2017 consid. 17a et les arrêts cités). L'adoption à l'égard des patients d'un ton autoritaire et trop directif, des propos infantilisants, des gestes brusques provoquant de la douleur, un manque de considération et d'écoute, voire une attitude humiliante, qui ont donné lieu à plus d'une dizaine de plaintes en trois ans, des difficultés de collaboration avec l'équipe soignante, notamment par rapport aux informations à communiquer, au retard d'informations données et au besoin de répétition des informations, constituent un motif fondé de résiliation (ATA/1782/2019 du 10 décembre 2019 consid. 11). Alors même que la relation avec les patients était bonne, des difficultés relationnelles répétées avec les collègues et la hiérarchie, émaillées d'incidents et d'emportements, mis en évidence par les évaluations successives et ayant fait l'objet d'entretiens, de rappels et d'accompagnements, pris dans leur ensemble, constituent un motif fondé de résiliation (ATA/1521/2019 du 15 octobre 2019 consid. 6 et 7). Malgré de bonnes qualités relationnelles avec les patients, le constat de difficultés importantes et de nombreux critères professionnels problématiques dans deux services distincts, dûment attestés et illustrés par les EEDP, constituent un motif fondé de résiliation (ATA/1280/2019 du 27 août 2019 consid. 9). Des manquements comportementaux récurrents vis-à-vis de la hiérarchie et des collègues, malgré de nombreux rappels à l'ordre et des changements de secteur, et des graves lacunes de nettoyage constituent un motif fondé de résiliation, malgré la constance et la qualité des prestations depuis le début des relations de travail (ATA/1042/2016 du 13 décembre 2016 consid. 10 et 11). Le fait de minimiser à plusieurs reprises l'importance de manquements peut contribuer à rompre le lien de confiance (ATA/634/2016 du 26 juillet 2016 consid. 6). Une altercation entre collègues suivie d'un coup porté, à la vue des patients, constitue un motif admissible de révocation (ATA/301/2016 du 12 avril 2016 consid. 5). D'importants problèmes d'attitude, un ton cassant, des propos déplacés, le dénigrement de certains collègues, en ne les reconnaissant pas dans leurs compétences, défauts ressortant de toutes les évaluations, fondent la résiliation des rapports de service (ATA/909/2015 du 8 septembre 2015 consid. 9).

e. Des manquements dans le comportement de l'employé ne peuvent constituer un motif de licenciement que lorsqu'ils sont reconnaissables également pour des tiers. Il faut que le comportement de l'employé perturbe le bon fonctionnement de l'entreprise (en l'espèce, du service) ou qu'il soit propre à ébranler le rapport de confiance avec le supérieur (arrêt du Tribunal administratif fédéral A-897/2012 du 13 août 2012 consid. 6.3.2 ; ATA/1577/2019 du 29 octobre 2019 ; Valérie DÉFAGO GAUDIN, Conflits et fonction publique : instruments, in Jean-Philippe DUNAND/ Pascal MAHON [éd.], Conflits au travail, 2015, p. 161-162).

f. Selon le Tribunal fédéral, la violation fautive des devoirs de service n'exclut pas le prononcé d'un licenciement pour motif fondé (dit licenciement ordinaire ou administratif). Si le principe même d'une collaboration ultérieure est remise en cause par une faute disciplinaire de manière à rendre inacceptable une continuation du rapport de service, un simple licenciement, dont les conséquences sont moins graves pour la personne concernée, peut être décidé à la place de la révocation disciplinaire, étant précisé que toute violation des devoirs de service ne saurait être sanctionnée par la voie de la révocation disciplinaire. Cette mesure revêt l'aspect d'une peine et a un caractère plus ou moins infamant. Elle s'impose surtout dans les cas où le comportement de l'agent démontre qu'il n'est plus digne de rester en fonction. Dans la pratique, la voie de la révocation disciplinaire est rarement empruntée (arrêt du Tribunal fédéral 8C_203/2010 du 1er mars 2011 consid. 3.5 ; ATA/674/2017 du 20 juin 2017 consid. 14d).

g. En l'occurrence, il ressort du dossier de la recourante que, dès son engagement le 1er mars 2010, des difficultés relationnelles avec ses collègues et à accepter les remarques formulées concernant son travail, ont été relevées dans ses EEDC des 21 mai et 7 décembre 2010. De même, selon les EEDC des 2 novembre 2011 et 10 septembre 2014, une amélioration de la qualité de ses transmissions était déjà attendue. Si ses évaluations étaient globalement bonnes, plusieurs objectifs, dont ceux précités, restaient systématiquement partiellement atteints ou à atteindre. Tandis que la plupart des critères d'évaluation étaient satisfaisants, certains demeuraient également à améliorer.

Il apparaît ainsi que, malgré les qualités relevées par ses supérieures hiérarchiques lors de ses EEDC, la recourante a démontré, dès le début de son parcours professionnel auprès des HUG, des faiblesses dans les rapports avec ses collègues et le contenu de ses transmissions.

Malgré des efforts et une progression soulignée dans ses EEDC des 10 septembre 2014 et 7 décembre 2016 par Mme C______, la recourante a commencé à montrer une perte d'intérêt pour son activité au sein de l'unité 0FL, se manifestant par une diminution de son investissement dans la prise en charge de patients et une tendance à minimiser certains problèmes. Dans le cursus de la recourante, cette période marque le début de la mise en place d'un suivi par les RH au début de l'année 2017, afin de l'assister dans sa recherche d'un nouveau projet professionnel permettant de raviver sa motivation dans l'exercice de son métier d'infirmière.

Les éléments figurant au dossier montrent qu'ultérieurement, ces circonstances ont mené à l'entretien de service du 26 novembre 2018, en référence à deux événements ayant eu lieu en date des 28 mars et 4 mars 2018. Le premier portait sur la surveillance et la prise en charge du pansement d'une patiente ayant subi une coronarographie ; l'autre, sur la surveillance d'une patiente sous morphine après avoir subi une intervention et présentant plusieurs comorbidités. À cet égard, les enquêtes ont permis de démontrer que, contrairement aux allégations de la recourante, ses collègues inscrivaient dans le DPI, de manière générale, au plus tard à la fin de la tournée des patients les informations les concernant, à l'exception des paramètres vitaux, reportés immédiatement. Or, l'examen du DPI des patientes susmentionnées, versés à la procédure par les HUG, démontre un défaut de documentation durant plusieurs heures alors que les intéressées devaient faire l'objet d'une surveillance attentive, compte tenu de leurs états cliniques respectifs. Que ce soit pour l'enlèvement tardif du bracelet radial – alors que le protocole figurait dans le DPI –, suivi de la pose d'un pansement compressif au lieu d'un pansement sec – exécuté sur la base des transmissions de la recourante –, que pour les valeurs indiquant une désaturation de la patiente, prévisible suivant le taux d'oxygénation et la diurèse constatés en fonction des comorbidités de la patiente, il a été montré que c'est effectivement un défaut d'indications ou une lacune dans les mentions reportées dans le DPI qui n'ont pas permis une réaction adéquate en temps voulu. Si, dans les deux cas, le comportement de la recourante n'a pas provoqué le décès de la patiente concernée, il n'en demeure pas moins que celui-ci aurait pu avoir de graves conséquences qu'elle ne saurait minimiser. À cela s'ajoute que la recourante se prévaut à tort d'une surcharge de travail due à un manque de personnel les 26 mars et 4 octobre 2018, tel que l'attestent les plannings des infirmières produits par les HUG pour les dates en question.

Alors que la recourante semblait manifester une amorce de prise de conscience par son engagement du 10 décembre 2018, consécutif à l'entretien de service du 26 novembre 2018, elle n'y a pas donné la suite attendue au début de l'année 2019, malgré le suivi de Mme C______ et en persistant dans son souhait de transfert. En dépit du courrier de Mme B______ du 17 décembre 2018 l'informant de la renonciation à toute sanction en raison de son engagement visant à améliorer la surveillance des patients et la documentation clinique, ainsi que de prendre l'initiation de se renseigner, tout en démontrant son intérêt pour des formations continues, et du fait que sa candidature du 18 février 2019 à un poste d'infirmière auprès de la clinique de E______ avait été écartée en raison de sa communication et de son savoir-être, la recourante n'a pas été en mesure d'améliorer ses prestations pour répondre aux objectifs fixés. Nonobstant ces éléments, ajoutés à son refus de se rendre à l'entretien d'embauche du 12 septembre 2019, Mmes C______ et B______ ont persisté à la soutenir, ce qui a permis d'aboutir à son transfert auprès de l'unité 2EK à partir du 1er janvier 2020.

Par courrier du 20 décembre 2019, soit plus d'un an après l'entretien de service du 28 novembre 2018, Mme B______ a derechef prévenu la recourante qu'une période de trois mois lui était accordée pour réaliser les objectifs attendus, à défaut de quoi son affectation provisoire pourrait être interrompue en tout temps. Ainsi, la recourante prétend à tort qu'elle ignorait, selon ses termes, encore subir les suites de l'entretien de service du 26 novembre 2018, puisque ledit transfert en était précisément la conséquence.

Par la suite, la recourante a à nouveau manifesté son mécontentement quant au soutien mis en place par l'intermédiaire de « matinées cliniques » ayant eu lieu les 30 janvier, 17 février et 1er mars 2019, alors que celles-ci visaient à lui assurer un encadrement propice à la réalisation de ses objectifs. En dépit de cette mesure, la nouvelle IRES de la recourante a également constaté des lacunes dans la surveillance et les soins apportés aux patients, étayés d'exemples concrets et confirmés de manière détaillée par écrit. Alors que des améliorations étaient observées, des lacunes demeuraient. Si la recourante se plaignait parfois du comportement de ses collègues pour justifier ses propres erreurs, elle disait néanmoins ne pas vouloir retourner dans l'unité 0FL. L'absence de la recourante durant la période du 5 au 15 mars 2020 n'a pas empêché le report du bilan de compétences du 10 au 30 mars 2020, dont le résultat a été jugé insuffisant. Le compte rendu y relatif reprend les insuffisances constatées dans son travail par plusieurs de ses supérieurs hiérarchique et collègues, lesquelles sont, pour la plupart, identiques aux constats effectués dès le début de son parcours professionnel auprès de HUG, notamment quant à sa faculté à accepter les remarques et à la qualité des transmissions effectuées. Elle ne saurait ainsi invoquer que seuls des progrès avaient été relevés lors de la dernière « matinée clinique » du 27 février 2020. Les trois courriels, produits par la recourante, datés du 5 mars 2020 de médecins ayant travaillé avec elle auprès de l'unité 0FL ne permettent pas de contredire l'évolution négative de son travail depuis le début de l'année 2017, alors qu'une baisse de motivation de sa part – qu'elle avait admise – avait été observée lors de l'EEDC du 7 décembre 2016. De plus, son transfert auprès de l'unité 2EK avait bien été effectué à sa demande, alors que l'insuffisance de ses prestations avait abouti aux faits des 28 mars et 4 octobre 2018.

En ces circonstances, l'évolution professionnelle de la recourante pour la période du 7 décembre 2016 au 31 mars 2020 montre que celle-ci, bien que mise en garde à plusieurs reprises et appelée à modifier sa pratique, n'a pas su améliorer les insuffisances régulièrement relevées dans sa pratique de son métier d'infirmière et du respect des protocoles applicables. Si des améliorations ont pu être observées et qu'elle n'a fait l'objet d'aucune plainte formelle de patients, il reste que ses actes auraient pu avoir de graves conséquences et qu'elle n'a pas été en mesure d'atteindre les objectifs fixés. Ainsi, des améliorations temporaires ont été suivies de nouvelles détériorations, mettant en lumière des carences relevées dès les premiers EEDC de la recourante.

Finalement, c'est à juste titre que les HUG soulignent la propension de la recourante à nier ou minimiser ses carences et à déplacer la responsabilité des dysfonctionnements sur les patients et les collègues, ce qui ressort également de ses déclarations et écritures dans le cadre de la procédure par-devant la chambre de céans.

Par conséquent, l'existence de motifs fondés a été établie par les HUG. Les HUG pouvaient ainsi, sans excès ni abus de leur pouvoir d'appréciation, conclure que les rapports de service ne pouvaient être poursuivis, et licencier la recourante pour motif fondé. Ce grief doit ainsi être écarté.

Par ailleurs, la recourante a échoué à prouver une quelconque inimitié de la part de Mme C______, alors que celle-ci avait déjà effectué ses EEDC des 10 septembre 2014 et 7 décembre 2016, et que les licenciements dont elle fait état, sont sans rapport avec sa propre cause et concernaient des cas différents.

5) La recourante laisse entendre qu'aucune suite n'aurait été donnée à ses propres plaintes.

a. Aux termes de l'art. 2B LPAC, il est veillé à la protection de la personnalité des membres du personnel, notamment en matière de harcèlement psychologique et de harcèlement sexuel. Des mesures sont prises pour prévenir, constater et faire cesser toute atteinte à la personnalité. Les modalités sont fixées par règlement. Le statut prévoit une disposition similaire (art. 2 al. 2 du statut).

Le règlement des HUG relatif à la protection de la personnalité, en particulier en matière de harcèlement psychologique et de harcèlement sexuel du 6 mai 2010 (règlement du Conseil d'administration : HUGO.RH.DG.0016 ; ci-après : le RPP) est entré en vigueur le 2 juin 2010. Depuis cette date, le membre du personnel des HUG qui se plaint d'une atteinte à sa personnalité doit saisir préalablement le médiateur (art. 9 RPP), qui est indépendant de l'institution, bien que rattaché administrativement au président du conseil d'administration (art. 6 al. 1 RPP). Après la phase de médiation proprement dite (art. 10 et 11 RPP), s'ouvre une phase décisionnaire dans laquelle le médiateur instruit la cause, puis établit un rapport à l'attention de l'autorité d'engagement (en l'espèce, le conseil d'administration ; art. 10 al. 1 LPAC), qui prend alors une décision contre laquelle un recours auprès de la chambre administrative est ouvert (art. 13 ss et 21 RPP). Il existe ainsi, à teneur de ce règlement interne, une procédure menant à une décision au sens de l'art. 4 al. 1 LPA, prise par une autorité administrative (art. 5 let e LPA en relation avec l'art. 5 al. 1 LEPM ; ATA/493/2021 du 11 mai 2021 consid. 6).

b. In casu, la recourante n'indique pas avoir entrepris de démarches dans ce sens.

Partant, le grief est irrecevable, la chambre de céans n'étant pas compétente pour en connaître.

6) La recourante fait également valoir que la procédure de reclassement la concernant aurait été conduite de manière non conforme.

a. L'autorité est tenue, avant la résiliation, de proposer des mesures de développement et de réinsertion professionnels et de rechercher si un autre poste au sein de l'administration cantonale correspond aux capacités de l'intéressé, les modalités étant fixées par règlement (art. 21 al. 3 LPAC). L'art. 46A RPAC et l'art. 48A du statut règlent le reclassement. Ils exigent entre autres que les éléments constitutifs d'un motif fondé soient dûment établis lors d'entretiens de service.

Un reclassement selon l'art. 21 al. 3 LPAC est proposé pour autant qu'un poste soit disponible au sein de l'administration et que l'intéressé au bénéfice d'une nomination dispose des capacités nécessaires pour l'occuper. Des mesures de développement et de réinsertion professionnels propres à favoriser le reclassement sont proposées (art. 46A al. 2 RPAC). L'intéressé est tenu de collaborer. Il peut faire des suggestions (art. 46A al. 3 RPAC).

b. Le principe du reclassement, applicable aux seuls fonctionnaires, est une expression du principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.). Il impose à l'État de s'assurer, avant qu'un licenciement ne soit prononcé, qu'aucune mesure moins préjudiciable pour l'administré ne puisse être prise (arrêt du Tribunal fédéral 1C_309/2008 du 28 janvier 2009 consid. 2.2 ; ATA/1343/2015 du 15 décembre 2015 ; ATA/585/2015 du 9 juin 2015).

c. L'employeur a l'obligation préalable d'aider l'intéressé et de tenter un reclassement, avant de prononcer la résiliation des rapports de service d'un agent public au bénéfice d'une nomination : il s'agit tout d'abord de proposer des mesures dont l'objectif est d'aider l'intéressé à retrouver ou maintenir son « employabilité », soit sa capacité à conserver ou obtenir un emploi, dans sa fonction ou dans une autre fonction, à son niveau hiérarchique ou à un autre niveau. Avant qu'une résiliation ne puisse intervenir, différentes mesures peuvent être envisagées et prendre de multiples formes. À titre d'exemples, on pense au certificat de travail intermédiaire, au bilan de compétences, à un stage d'évaluation, aux conseils en orientation, aux mesures de formation et d'évolution professionnelles, à l'accompagnement personnalisé, voire à « l'outplacement » (arrêt du Tribunal fédéral 8C_697/2017 du 11 octobre 2018 ; MGC 2005-2006/XI A 10421).

d. Selon la jurisprudence, lorsque la loi prescrit à l'État de ne pas licencier une personne qu'il est possible de reclasser ailleurs, elle ne lui impose pas une obligation de résultat, mais celle de mettre en oeuvre tout ce qui peut être raisonnablement exigé de lui (ATA/679/2017 du 20 juin 2017 consid. 7c ; ATA/298/2016 du 12 avril 2016 consid. 5b ; ATA/128/2015 du 3 février 2015 consid. 4). En outre, le reclassement est illusoire s'il revient, en fin de compte, à reporter dans un autre service les problèmes de comportement reprochés au fonctionnaire concerné (arrêt du Tribunal fédéral 8C_839/2014 du 5 mai 2015 consid. 7.1 ; ATA/1193/2017 du 22 août 2017). L'employeur se doit non seulement de protéger ses intérêts financiers, mais principalement ceux des patients qu'il accueille et auxquels il doit offrir toutes les garanties quant au personnel soignant (ATA/1143/2018 du 30 octobre 2018 consid. 9b). L'absence de procédure de reclassement a été admise dans le cas d'une gérante sociale d'un immeuble avec encadrement pour personnes âgées, au vu de ses très importants problèmes de communication et de comportement, durant une période de sept ans, avec l'ensemble des catégories d'interlocuteurs, tant internes qu'externes à son institution, qu'elle avait pu côtoyer dans le cadre de son activité professionnelle (ATA/1576/2019 du 29 octobre 2019 consid. 14). Elle l'a également été compte tenu de l'attitude générale inappropriée de l'intéressé sur son lieu de travail, insuffisamment respectueuse de la sphère personnelle d'autrui, et de comportements inappropriés à l'égard de certaines collaboratrices, ayant conduit à un avertissement et la fixation d'objectifs visant à l'améliorer, en vain, la continuation des rapports de service n'étant plus compatible avec le bon fonctionnement du département intimé (ATA/674/2017 du 20 juin 2017 consid. 19). Toutefois, seules les circonstances particulières, dûment établies à satisfaction de droit, peuvent justifier une exception au principe légal du reclassement et faire primer l'intérêt public et l'intérêt privé de nombreux employés de l'État sur l'intérêt privé, pourtant important, de la personne licenciée (ATA/1060/2020 du 27 octobre 2020 consid. 9c ; ATA/1579/2019 du 29 octobre 2019 consid. 12h).

En revanche, la chambre de céans a jugé récemment que le seul fait de diffuser à une reprise par un courriel – contenant un portrait de le recourante pour le moins peu apte à susciter l'intérêt des destinataires pour sa candidature, laquelle n'a d'ailleurs rencontré aucun succès – une demande de postes disponibles, ne répond pas aux exigences minimales en termes de reclassement. De même, les changements de service ne constituent pas des mesures de reclassement (ATA/367/2021 du 30 mars 2021 consid. 6b).

e. En l'espèce, environ un an et demi s'est écoulé entre les deux entretiens de service dont a fait l'objet la recourante, les 28 novembre 2018 et 26 mai 2020.

Durant ce laps de temps, la recourante a pu bénéficier d'un suivi particulier de pas moins de quatre IRES différentes, afin de lui permettre de réaliser les objectifs fixés. En dépit de cette mesure, elle n'a pas su remettre en question son comportement sans incriminer sa hiérarchie, les patients ou ses collègues.

La recourante a également été régulièrement suivie par la responsable RH. Cette dernière l'a soutenue dans son souhait de transfert, y compris après qu'elle avait refusé de se rendre à un entretien d'embauche pour des raisons peu claires, tenant tantôt à une problématique de distance du lieu de travail par rapport à son domicile, tantôt à la présence d'un proche dans l'établissement en question. Cela étant, force est de constater que, quel qu'en soit le motif, un tel comportement dénote d'un manque de collaboration et de bonne volonté. Après le bilan de compétences du 30 mars 2020 et l'entretien de service du 26 mai 2020, Mme B______ a persisté dans ses démarches, en ouvrant une procédure de reclassement en faveur de la recourante. Au cours de celle-ci, elle a recherché des postes auprès des autres responsables RH.

En parallèle, la recourante ne contredit pas ne pas l'avoir tenue informée de ses démarches. Si elle soulève le manque de soutien de la part de la responsable RH concernant le poste vacant en psychiatrie, elle ne conteste pas lui avoir précédemment fait part de son désintérêt pour ce domaine. Finalement, la recourante n'a aucunement démontré ses allégations selon lesquelles Mme B______ aurait fourni des renseignements défavorables à de potentiels employeurs.

Compte tenu des circonstances du cas d'espèce, de la nature des actes reprochés à la recourante, de la durée des démarches effectuées tant par sa hiérarchie que la responsable RH pour lui permettre d'atteindre ses objectifs et de trouver un autre poste satisfaisant, malgré son manque de collaboration, il y a lieu de retenir qu'in casu, la procédure de reclassement a été correctement suivie par les HUG.

Dès lors, la résiliation des rapports de service de la recourante n'est pas contraire au droit.

7) Dans un second grief, la recourante estime que son licenciement viole les principes de la proportionnalité et de la bonne foi.

a. Les rapports de service étant soumis au droit public, la résiliation est enfin assujettie au respect des principes constitutionnels, en particulier ceux de la légalité, de l'égalité de traitement, de la proportionnalité et de l'interdiction de l'arbitraire.

Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 5 al. 2 Cst., se compose des règles d'aptitude – qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1P. 269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c).

b. En l'occurrence, le licenciement est propre à atteindre le but fixé, à savoir garantir le bon fonctionnement des HUG. Il est nécessaire aux fins de garantir la qualité des soins aux patients – les relations entre professionnels et avec la hiérarchie à cette fin étant aussi importantes – et proportionné au sens étroit au vu notamment des nombreuses évaluations fixant des objectifs, en l'espèce non atteints. Ainsi, si certes les conséquences pour la recourante sont assurément importantes, l'intérêt public poursuivi est de nature à imposer cette solution. En outre, les divers comportements inadéquats de la recourante, qui malgré de nombreuses remarques, divers entretiens, un suivi personnalisé et des discussions avec les RH, n'ont abouti à aucune remise en question professionnelle ni à une prise de conscience de la part de la recourante.

Par conséquent, la résiliation des rapports de service ne viole pas le principe de la proportionnalité et n'est pas arbitraire. Ce grief doit être écarté.

Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté et la résiliation litigieuse des rapports de service confirmée. Les conclusions en réintégration – au demeurant, expressément refusée par les HUG – et en indemnisation sont partant sans objet.

8) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 19 janvier 2021 par Madame A______ contre la décision des Hôpitaux universitaires de Genève du 3 décembre 2020 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge de Madame A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les
art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Orlane Varesano, avocate de la recourante, ainsi qu'à Me Anne Meier, avocate des Hôpitaux universitaires de Genève.

Siégeant : M. Mascotto, président, M. Verniory, Mmes Payot Zen-Ruffinen, Lauber et Michon Rieben, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :