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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2895/2014

ATA/585/2015 du 09.06.2015 ( FPUBL ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2895/2014-FPUBL ATA/585/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 juin 2015

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Christian Tamisier, avocat

contre

D______

 



EN FAIT

1. Madame A______, née B______, le ______ 1956, a été engagée, à plein temps, en qualité d’hôtesse d’accueil I à l’C______ (ci-après : C______) au D______ (ci-après : D______), à compter du 1er décembre 1981. Son traitement brut initial annuel s’élevait à CHF 31'009.-, soit mensuellement CHF 2'584.10.

Lors de son engagement, elle a signé un document attestant qu’elle avait pris connaissance des dispositions légales relatives au secret le plus absolu qu’elle devait conserver sur toutes les déclarations, documents, opérations et communications dont elle aurait connaissance.

2. Selon l’analyse des prestations effectuée le 25 janvier 1982, l’intéressée correspondait aux exigences du poste.

3. Le 1er octobre 1982, Mme A______ a été transférée au poste de dactylo II, attachée à l’administration de l’enregistrement et des successions de l’C______.

4. Des analyses de prestations ont été effectuées les 2 novembre 1982, 8 novembre 1983 et 13 novembre 1984. L’intéressée correspondait aux exigences du poste, à l’exception des rapports professionnels de la dernière évaluation qualifiés de « passables » et ayant justifié la prolongation de la période probatoire de six mois, selon correspondance du 19 novembre 1984.

5. L’analyse des prestations du 27 mars 1985 étant satisfaisante, Mme A______ a été nommée fonctionnaire le 1er mai 1985.

6. Sa candidature ayant été retenue au poste de secrétaire de direction de l’administration de l’enregistrement et des successions et du timbre de l’C______, elle y a été transférée à compter du 1er juin 1986.

7. Les évaluations des 10 octobre 1994 et 16 février 2006 étaient bonnes, celle du 10 décembre 2009 pouvant être qualifiée de très bonne.

8. À compter du 1er novembre 2010, Mme A______ a travaillé au service juridique et exonération de l’C______ en qualité de secrétaire II à 90 %, en classe 11, position 22. Son traitement annuel brut, à 90 %, était de CHF 96'197.-, soit mensuellement CHF 7'399.80.

Selon le cahier des charges, l’intéressée devait assurer les travaux d’un « secrétariat des collaborateurs et du chef du service juridique ». Ses activités principales consistaient notamment à réceptionner, enregistrer dans la main-courante l’ensemble des décisions et correspondance des instances judiciaires, préparer les dossiers pour celles-ci, scanner la jurisprudence genevoise et fédérale relative à l’C______, répondre aux appels téléphoniques et communiquer tout renseignement administratif aux contribuables ou mandataires, notamment sur l’état d’avancement de leur dossier. En matière de compétences-clé, de bonnes connaissances des activités des différents services de l’C______ étaient exigées.

9. Le 29 février 2012, Madame F______ a adressé au directeur de l’C______ une dénonciation qui n’a été reçue que le 22 mars 2012.

Mme A______ exploitait des informations confidentielles de l’C______, tels que des bilans, documents et des actes fiscaux. La fonctionnaire de l’C______ lui avait remis les bilans 2010 des sociétés de son ex-compagnon, Monsieur G______ et de sa belle-sœur, Madame H______. Mme A______ fouillait les dossiers des contribuables à des fins privées ou pour rendre un service à des tiers.

10. Un entretien de service s’est tenu le 14 juin 2012, en présence du directeur général de l’C______, Monsieur I______, de la cheffe du service juridique de l’C______, Madame J______ et de Monsieur K______, directeur des ressources humaines (ci-après : RH) du D______.

Il était principalement reproché à l’intéressée d’avoir enfreint le secret de fonction, violé le secret fiscal, reçu Mme H______ sur son lieu de travail, accompagné celle-ci chez le médecin pendant les heures de travail et accompli, pour celle-ci, des tâches administratives pendant son temps de travail.

Selon les explications de Mme A______, Mme H______ était en litige avec M. L______, l’époux de celle-là dans le cadre du tea-room « S______ ». Mme A______ avait souhaité aider Mme H______, qui rencontrait des difficultés, notamment financières. Mme A______ avait demandé à son mari, fin 2010-début 2011, de s’associer avec Mme H______ afin de l’aider. M. L______ avait investi de l’argent. Dès la perception de l’argent par Mme H______, les difficultés avaient commencé. Les parties étaient en procès. Mme A______ n’avait jamais imprimé, remis ou montré à Mme H______ des pièces comptables appartenant à M. G______.

11. Par courrier du 29 juin 2012, Mme A______ a formulé des observations sur le procès-verbal de l’entretien précité.

12. Le 13 septembre 2012, s’est tenu, en présence des mêmes personnes, un complément à l’entretien de service du 14 juin 2012 afin d’aborder un autre incident, survenu à la fin de l’année 2009, et évoqué en fin d’entretien le 14 juin 2012. Celui-ci impliquait Mme A______ et Madame M______, apprentie au D______.

a. Mme A______ a expliqué que fin 2009, début 2010, elle s’était rendue dans le bureau de Madame N______, au service du registre fiscal. Elle avait demandé à cette dernière de convoquer Mme M______. Mme A______ avait sollicité de l’apprentie qu’elle paye le loyer qu’elle devait à son mari, en l’espèce, sous-bailleur, dû pour la sous-location d’un appartement près de la place T______ à Genève. Mme A______ avait brandi le passeport de l’apprentie devant Mmes M______ et N______ en indiquant à celle-ci qu’à défaut de paiement des loyers en retard, elle ne lui rendrait pas son passeport. Mme A______ avait, par la suite, été convoquée, avec Mme M______, dans le bureau de Madame O______ du service des RH. Celle-ci lui avait indiqué que ce comportement n’était pas acceptable et qu’elle devait rendre le passeport.

b. En réponse à la question du directeur des RH menant l’entretien du 13 septembre 2012, Mme A______ a indiqué ne pas avoir rendu le passeport à Mme M______. Elle ignorait ce qui s’était passé avec ce document qu’elle avait donné à son époux.

M. I______ s’est dit choqué par ce qu’il considérait être des « méthodes de voyou », indiquant à l’intéressée qu’il existait des mécanismes légaux pour recouvrer une créance. Il ressort du procès-verbal de l’entretien du 13 septembre 2012 que Mme A______ « ne comprend pas ces réactions et estime qu’il est normal de pouvoir exiger le paiement d’une dette ».

c. À l’issue de l’entretien, M. I______ a remis à Mme A______ une décision lui infligeant un blâme pour avoir reçu Mme H______ à titre privé, à plusieurs reprises et pour des périodes prolongées, pendant les heures de travail, à sa place de travail dans les locaux de l’C______, alors même que son supérieur hiérarchique lui avait demandé de faire cesser ces visites et d’adopter un comportement irréprochable. L’intéressée avait donc sciemment agi, alors même qu’elle savait qu’elle ne devait pas se comporter de la sorte, ce qui constituait une faute grave. Dans la mesure où elle exerçait son activité depuis plus de trente ans, sans qu’aucun autre reproche ne lui eût été formulé et qu’aucun antécédent ne figurait dans son dossier, la sanction disciplinaire se limitait à un blâme.

13. Par courrier du 3 octobre 2012, l’C______ a adressé un résumé de l’entretien du 13 septembre 2012 à Mme A______. Elle avait la possibilité de faire part d’éventuels commentaires.

Il lui était rappelé son obligation de respecter ses devoirs de service et de démontrer un comportement irréprochable en toutes circonstances.

De nouveaux manquements pourraient appeler le prononcé d’une sanction disciplinaire plus grave.

14. Mme A______ n’a pas formulé d’observations.

15. Par courrier du 5 avril 2013, l’C______ a ouvert une procédure en rappel d’impôts et une procédure pénale pour soustraction d’impôts, pour l’impôt fédéral direct (ci-après : IFD) et les impôts cantonaux et communaux (ci-après : ICC) 2003 à 2010, ainsi qu’une procédure en tentative de soustraction concernant l’ICC et l’IFD 2011 à l’encontre de Mme A______ et de son époux.

Il leur était reproché de n’avoir pas déclaré des produits de sous-location, un bien immobilier sis à l’étranger, ainsi que des éléments de fortune.

16. Le 27 novembre 2013, l’C______ a informé l’intéressée et son époux que les procédures étaient terminées. Les bordereaux de rappel d’impôts pour les années 2003 à 2010 et amendes pour les mêmes années leur étaient notifiés.

17. Le 24 février 2014, s’est tenu un entretien de service. Il a porté sur les faits en lien avec Mme M______, ceux à l’origine du blâme du 13 septembre 2012, ainsi que sur les rappels d’impôts pour un montant de CHF 46'027.- et l’amende de CHF 23'013.-, non contestés.

L’employeur envisageait de résilier les rapports de service pour motif fondé. Il a dispensé Mme A______ de l’obligation de travailler à compter du jour de l’entretien de service.

18. Mme A______ a été incapable de travailler à compter du 24 février 2014.

19. Le 19 mars 2014, sous la plume d’un avocat, Mme A______ s’est déterminée à la suite de l’entretien du 24 février 2014.

L’incident avec Mme M______ était connu de l’C______ lors de l’entretien de service du 13 septembre 2012. L’administration avait pourtant décidé de ne pas le traiter. Il s’agissait d’une affaire privée dont un fait ponctuel, déplacé et regrettable, connu par la direction depuis longtemps, avait eu lieu à mauvais escient sur le lieu de travail. Cela aurait nécessité, en temps normal, une simple remise à l’ordre. Il n’était pas tolérable qu’il soit utilisé comme un fait prétendument nouveau pour alourdir le dossier de Mme A______.

L’ouverture de la procédure de contrôle fiscal faisait suite à une dénonciation de Mme H______. Mme A______ n’avait pas déclaré le chalet dont elle s’était portée acquéreuse en 2003 pour permettre à sa fille, née en 1991, lourdement handicapée, âgée de douze ans au moment des faits et placée en institut spécialisé quatre jours par semaine, de bénéficier d’un environnement calme, sain et reposant, comme le lui avaient conseillé ses médecins de l’époque. Mme A______ reconnaissait avoir commis une faute qu’elle avait toujours assumée. Elle n’avait contesté ni les faits, ni les rappels d’impôts, ni l’amende. Elle s’était acquittée immédiatement du montant de celle-ci et avait trouvé un arrangement avec AFC pour le remboursement échelonné des montants dus au titre de rappels. Elle avait l’intention de déclarer ce bien à la majorité de son fils, né en 1995. Il s’agissait d’une omission temporaire qui n’avait pas eu d’incidence sur la qualité du travail fourni, ni sur ses aptitudes à réaliser son travail, voire sur la bonne marche du service.

Elle ne comprenait pas pourquoi seule la sanction ultime, à savoir la résiliation des rapports de service, semblait être envisageable, alors que Mme A______ pouvait se prévaloir d’excellentes évaluations, ainsi que de bons états de service. Aucune pesée des intérêts n’avait été effectuée entre le reproche fondé sur une déclaration fiscale déficiente, non contestée, et ce que Mme A______ avait pu apporter pendant trente-trois ans au service par ses connaissances professionnelles, ses aptitudes et son engagement volontaire. La décision violait le principe de la proportionnalité.

20. Par décision du 26 mars 2014, l’C______ a ouvert une procédure de reclassement.

21. Un entretien s’est tenu le 16 avril 2014 dans le cadre de ladite procédure. Le représentant de l’C______ a indiqué que le service de santé avait été sollicité pour se prononcer sur l’aptitude de l’intéressée à effectuer des recherches, celle-ci indiquant ne pas être en mesure d’en accomplir pour raisons médicales.

22. Par courrier du 9 mai 2014, le Docteur P______, spécialiste FMH en médecine du travail et chef de service au service de santé du personnel de l’État, a informé l’C______ que Mme A______ était inapte à conduire une activité professionnelle sur une période estimée par le médecin traitant de trois à six mois, la durée étant à préciser de façon plus exacte en fonction de l’évolution. Elle était inapte à participer à la procédure de reclassement et n’était pas non plus apte à se présenter à une quelconque réunion autre que celle imposée par la procédure de reclassement.

23. Le 4 juin 2014, un procès-verbal de clôture de la procédure de reclassement a été dressé « à la suite du non-aboutissement des démarches ». Il n’a été signé que par M. K______.

24. Le 23 juin 2014, le Conseiller d’État en charge du D______ (ci-après : le Conseiller d’État) a informé Mme A______ que la hiérarchie de celle-ci lui avait demandé de résilier les rapports de service. Une décision lui serait notifiée en temps opportun, compte tenu de son incapacité de travail.

25. Le 25 août 2014, le Conseiller d’État a résilié les rapports de service de Mme A______. Les motifs à l’origine de la décision étaient connus de la fonctionnaire, puisqu’ils lui avaient été communiqués notamment lors de l’entretien de service du 24 février 2014. Par ailleurs, les démarches de reclassement n’avaient pas abouti.

26. Le 24 septembre 2014, Mme A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision de licenciement. Elle a conclu à ce qu’il soit constaté et déclaré que la résiliation était contraire au droit, que la décision du 25 août 2014 soit annulée, que la chambre administrative propose sa réintégration, le cas échéant dans un autre service et/ou un autre département. Subsidiairement, il pouvait être pris acte du refus de l’intimé de la réintégrer, l’État de Genève devant être condamné à lui verser une indemnité de CHF 163'119.60, avec intérêts à 5 % dès le 26 août 2014. Les conclusions étaient prises sous suite d’indemnité de procédure. Plus subsidiairement, elle sollicitait l’audition de Messieurs Q______ et R______.

Il n’existait pas de motif objectivement fondé rendant la poursuite des rapports de service impossible. L’employeur se référait à trois incidents. Le premier, avec Mme M______, survenu en 2010, ne pouvait pas être invoqué en 2014, alors qu’aucune mesure n’avait été prise à son encontre entre-temps. La seconde faute avait amené sa hiérarchie à prononcer un blâme à son encontre. Cette procédure ne pouvait, deux ans après les faits, être considérée comme un motif objectivement fondé, ce d’autant moins qu’elle avait reconnu son erreur, n’avait pas recouru contre cette sanction et que les parties avaient poursuivi leur collaboration pendant deux ans. Seul restait le reproche de ne pas avoir déclaré toute sa fortune à l'C______. Il n’y avait pas lieu de s’interroger sur la motivation l’ayant amenée à ne pas déclarer son bien immobilier, la situation devant être analysée objectivement. Il s’agissait donc d’un comportement privé hors cadre professionnel. Ne pas déclarer une partie de sa fortune relevait du même comportement que celui de tout citoyen, fonctionnaire ou non, qui omettait, sciemment ou par omission, de déclarer une partie de ses revenus ou de sa fortune lors de l’établissement de sa déclaration fiscale. Ce comportement n’avait aucune incidence sur l’aspect professionnel. Le fait qu’elle soit employée de l’C______ n’était pas un motif d’aggravation du comportement. Une infirmière, un instituteur ou une secrétaire du DIP qui devraient répondre de la même omission et subir une procédure de rattrapage ne se verraient pas licenciés pour ce comportement. De surcroît, l’amende infligée n’avait pas été plus élevée parce qu’elle occupait le poste de secrétaire au sein de l’C______. Il convenait d’admettre que sa faute n’avait pas été commise dans le cadre de son activité professionnelle, n’avait pas eu d’incidence sur le travail de son service, ni sur le sien et n’avait pas eu d’effet sur la qualité de son travail. Aucun des reproches n’était en soi suffisamment grave pour démontrer que la poursuite des rapports de service était rendue difficile. On ne pouvait non plus considérer que le cumul des « affaires » justifierait le motif fondé. Ces « affaires » étaient distinctes les unes des autres. Les reproches concernaient des faits qui remontaient à quatre ans pour la première, deux ans pour la deuxième qui était close suite au prononcé d’une sanction. La décision de licenciement n’était pas fondée, voire était arbitraire.

Même à supposer qu’il existe des motifs objectivement fondés à l’origine de la décision de licenciement, le principe de la proportionnalité était violé, ce d’autant plus que toutes les démarches nécessaires au reclassement n’avaient pas été prises par les ressources humaines. M. K______ s’était limité à l’inviter à se porter candidate à des postes dont elle ne remplissait manifestement pas les exigences et à adresser un courriel aux autres services de ressources humaines. L’argument invoqué par le secrétariat général selon lequel un reclassement n’avait pas abouti, notamment vu qu’un retour au travail n’était pas envisageable, se heurtait à l’appréciation du médecin traitant et du médecin-conseil selon laquelle une reprise du travail aurait pu être entreprise après trois à six mois d’arrêt. Il n’avait pas été tenu compte du fait qu’elle était âgée de 58 ans et avait exercé trente-trois ans de fonction publique en pouvant se prévaloir d’excellents états de service, hormis le blâme de 2012.

Le montant réclamé correspondait au maximum prévu par la loi, soit deux ans d’indemnités journalières (sept cent vingt jours) auxquels elle aurait encore eu droit si son incapacité de travail pour cause de maladie se prolongeait et que les rapports de service n’avaient pas été résiliés. Ce montant se justifiait par les conséquences négatives qu’une telle décision avait eues sur son état de santé et sur son avenir professionnel, puisque la décision litigieuse signifiait sa mort professionnelle.

27. Par réponse du 31 octobre 2013, l’office du personnel de l’État (ci-après : OPE) a conclu au rejet du recours. Ses arguments seront repris en tant que de besoin dans la partie en droit.

28. Par réplique du 1er décembre 2014, Mme A______ a persisté dans ses conclusions.

L’affaire M______ était un non-événement qui ne devait pas être utilisé par l’employeur pour tenter de justifier le licenciement. Les reproches à l’origine du blâme, par définition, ne constituaient pas un motif fondé, à défaut de quoi, l’C______ aurait prononcé, à l’époque, un licenciement. Le redressement fiscal, dont la sanction n’avait été qu’une simple amende, ne pouvait fonder, objectivement, une résiliation des rapports de service. Elle était secrétaire. Son travail pouvait être exercé dans n’importe quel autre département et n’imposait pas une exigence d’exemplarité accrue par rapport à d’autres secrétaires d’autres départements. Elle n'avait pas bénéficié de facilités ou d’avantages pour commettre cette faute du fait de son statut de fonctionnaire à l’C______. Cette faute n’avait pas eu d’incidence sur la réputation de ladite administration, toute l’affaire ayant été traitée en interne. Elle n’avait pas porté un préjudice économique à l’État dans la mesure où elle avait remboursé les rattrapages d’impôts et s’était acquittée de l’amende. La qualité du travail avait toujours été irréprochable. La continuation de ses rapports de service était toujours compatible avec le bon fonctionnement de l’administration.

Par ailleurs, toutes les mesures n’avaient pas été prises par le département pour la garder au sein de l’administration. Seuls six postes vacants lui avaient été proposés et non sept, une offre étant faite à deux fois. Sur les six postes, un seul correspondait à ses compétences et aux conditions de travail. Or, il nécessitait une expérience professionnelle dans le domaine immobilier de trois à cinq ans qu’elle ne possédait pas, ce que la direction des ressources humaines (ci-après : DRH) n’ignorait pas. Elle avait postulé, mais sa candidature n’avait pas été retenue. Les autres postes étaient en réalité à des taux partiels, entre 30 et 50 %, alors qu’elle travaillait à 90 %. Le seul poste à 100 % était en classe 9, alors qu’elle bénéficiait d’une classe 11. Il ne pouvait dès lors être soutenu que la DRH avait adressé activement des offres correspondant à son profil, à moins qu’il ne suffise à ce dernier d’envoyer des offres qui ne correspondent ni au domaine de compétence, ni aux conditions d’engagement de la personne concernée. Par ailleurs, lorsqu’elle avait dû renoncer à postuler pour des raisons de santé, le DRH avait immédiatement mis un terme à la procédure de reclassement, quand bien même le médecin du travail considérait que son arrêt de travail n’allait durer qu’entre trois et six mois. Le département semblait vouloir se séparer d’elle plutôt que de vouloir la reclasser et avait retenu son arrêt de travail, pourtant limité dans le temps, comme prétexte pour mettre un terme immédiatement à la procédure de reclassement. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, la résiliation des rapports de travail d’un employé, qui avait œuvré pendant quarante-quatre ans auprès de son employeur, avait été considérée comme contraire au droit, celui-ci n’ayant pas cherché à replacer l’employé au sein de l’entreprise. Son cas était identique.

29. Par courrier du 1er décembre 2014, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. La recourante conclut, de façon subsidiaire, à l’audition de deux témoins.

Selon la jurisprudence fondée sur l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend pour l’intéressé celui d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b ; 127 III 576 consid. 2c ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_424/2009 du 6 septembre 2010 consid. 2). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 131 I 153 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_58/2010 du 19 mai 2010 consid. 4.3 ; 4A_15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.2 et les arrêts cités ; ATA/755/2012 du 6 novembre 2012 ; ATA/432/2008 du 27 août 2008).

La recourante n’indique pas en quoi l’audition des témoins serait pertinente. Les faits sont pour le surplus établis et non contestés. La chambre administrative dispose d'un dossier complet lui permettant de trancher le litige et de se prononcer sur les griefs soulevés en toute connaissance de cause. Cette conclusion est rejetée.

3. Le pouvoir d’examen de la chambre administrative se limite à la violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (art. 61 al. 1 let.  a LPA). La juridiction de céans ne peut pas revoir l’opportunité de la décision litigieuse (art. 61 al. 2 LPA).

4. Saisie d'un recours, la chambre administrative applique le droit d'office. Elle ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n'est liée ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/402/2012 du 26 juin 2012).

5. Le litige porte sur la contestation de la résiliation des rapports de service de la recourante pour motif fondé.

6. a. En tant que fonctionnaire, la recourante est soumise à la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) (art. 1 et 5 LPAC), ainsi qu’à son règlement d’application (RPAC - B 5 05.01).

b. Les membres du personnel sont tenus au respect de l’intérêt de l’État et doivent s’abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice (art. 20 RPAC).

Les membres du personnel se doivent, notamment, par leur attitude, d’entretenir des relations dignes et correctes avec leurs supérieurs, leurs collègues et leurs subordonnés ; de permettre et de faciliter la collaboration entre ces personnes (art. 21 let. a RPAC) et de justifier et de renforcer la considération et la confiance dont la fonction publique doit être l’objet (art. 21 let. c RPAC).

c. Selon l’art. 21 al. 3 LPAC, l’autorité compétente peut résilier les rapports de service du fonctionnaire pour motif fondé. Elle motive sa décision. Elle est tenue, préalablement à la résiliation, de proposer des mesures de développement et de réinsertion professionnels et de rechercher si un autre poste au sein de l’administration cantonale correspond aux capacités de l’intéressé.

d. Il y a motif fondé au sens de l’art. 22 LPAC lorsque la continuation des rapports de service n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration, soit notamment en raison de l'insuffisance des prestations (let. a), l'inaptitude à remplir les exigences du poste (let. b), la disparition durable d'un motif d'engagement.

e. Les rapports de service étant soumis au droit public, la résiliation est en outre assujettie au respect des principes constitutionnels, en particulier ceux de la légalité, de l’égalité de traitement, de la proportionnalité et de l’interdiction de l’arbitraire (ATA/330/2013 du 28 mai 2013 ; ATA/33/2013 du 22 janvier 2013).

7. Les motifs de résiliation des rapports de service ont été élargis lors de la modification de la LPAC du 23 mars 2007, entrée en vigueur le 31 mai 2007. Depuis lors, il ne s’agit plus de démontrer que la poursuite des rapports de service est rendue difficile, mais qu’elle n’est plus compatible avec le bon fonctionnement de l’administration (MGC 2006-2007/VI A 4529). Selon l’exposé des motifs relatif à cette modification, l’intérêt public au bon fonctionnement de l’administration cantonale est déterminant en la matière. C’est lui qui sert de base à la notion de motif fondé qui doit exister pour justifier un licenciement dans la fonction publique. Le motif fondé est indépendant de la faute du membre du personnel. Il n’est qu’un élément objectif indépendant d’une intention ou d’une négligence. […] La résiliation pour motif fondé, qui est une mesure administrative, ne vise pas à punir mais à adapter la composition de la fonction publique dans un service déterminé aux exigences relatives au bon fonctionnement dudit service (MGC 2005-2006/XI A 10420).

8. Selon la doctrine, le devoir de fidélité est la plus caractéristique des obligations des fonctionnaires et celle qui entraîne pour eux des restrictions les plus sensibles. Elle exprime l’appartenance à un appareil, l’État, qui a un pouvoir de puissance publique générale et fournit à la collectivité des prestations indispensables. Le devoir de fidélité oblige les fonctionnaires, aussi bien dans l’exercice de leurs tâches qu’au dehors, à un comportement tel que la population puisse avoir confiance dans l’appareil administratif à qui est confiée la gestion des affaires publiques. L’intégrité est indispensable (Pierre MOOR/Droit administratif, vol. 3, 1992, 5.3.3.1).

Les fonctionnaires ont une vie privée, qu’ils peuvent mener librement. Ils ont néanmoins une obligation de dignité. Mais celle-ci ne saurait dépasser ce qui est requis pour la correcte exécution de leurs tâches ; elle va donc dépendre de la position occupée – on attend davantage d’un haut fonctionnaire – et de la nature des fonctions – certains postes (gendarmes, instituteurs, par ex.) requérant un plus grand respect, donc un plus grand mérite que d’autres. Il doit y avoir une relation qualifiée entre le comportement exigé ou sanctionné et la fonction. Si la considération qui devrait être portée à un agent public disparaît, il convient de décider d’un déplacement et non d’une sanction disciplinaire. Pour les infractions générales, un rapport à la fonction exercée doit être établi, impliquant une perte de confiance dans l’exécution des tâches à remplir. La condamnation pour objection de conscience a parfois servi de motif pour licencier, révoquer ou ne pas renommer : en tant que principe, la position est erronée (Pierre MOOR, op. cit. 5.3.3.2 et les références citées).

9. L'agent public doit aussi, pour sauvegarder les intérêts de son employeur, agir avec honnêteté et respecter la loi. Le minimum à cet égard est de ne pas transgresser la loi pénale, en tout cas dans le cadre du service. Une violation de la loi pénale commise en dehors du service doit être traitée avec plus de circonspection, et n'entraînera de sanctions disciplinaires (ou de sanctions disciplinaires plus fortes) que si l'infraction commise discrédite l'action de l'État. Ainsi, un employé condamné pour ne pas s'être rendu à un cours de répétition militaire n'encourra-t-il probablement pas de sanction, tandis qu'un officier de gendarmerie appréhendé pour ivresse au volant risque davantage sur le plan disciplinaire (Jean-Marc VERNIORY/Fabien WAELTI, Le devoir de réserve des fonctionnaires spécialement sous l’angle du droit genevois, PJA 2008 p. 810 ss, p. 812).

10. Il ressort de la jurisprudence fédérale notamment que :

- dans une affaire neuchâteloise, le Tribunal fédéral a relevé qu’une fonctionnaire ne pouvait pas travailler dans un magasin de vêtements les mercredis après-midi à trois reprises au moins, à l'insu de son employeur et alors qu'elle se déclarait absente pour cause de maladie. L’argument selon lequel son comportement ne prêtait pas à conséquence dans la mesure où l'activité en cause n'était pas incompatible avec son incapacité de travail, ni n'était rémunérée, ne pouvait être suivi. La gravité de sa faute résidait dans le fait qu'elle avait consacré à son activité accessoire un temps où elle était réputée incapable de travailler. Or, ceci n'était pas tolérable pour un employeur. La fonctionnaire avait manqué à son devoir de fidélité envers son employeur. Les premiers juges pouvaient sans arbitraire considérer que le comportement de la recourante avait rompu la relation de confiance avec l'employeur, au sens de l'art. 15 de la loi sur le statut de la fonction publique du canton de Neuchâtel (ci-après : LSt) et permettait à celui-ci de résilier les rapports de service dans le cadre de l'art. 45 LSt (arrêt 8C_548/2012 du 18 juillet 2013) ;

- le fait, pour un agent de détention, d'héberger un ancien détenu chez soi présupposait une relation d'une certaine proximité qui apparaissait d'autant plus grande en l'espèce que l'hébergement avait duré cinq jours et qu'il n'avait été interrompu que par l'arrestation de l'ancien détenu par la police. Cette proximité était de nature à faire naître de sérieux doutes sur l'aptitude du recourant à adopter une saine et indispensable distance dans sa relation avec les détenus. Le fait qu'il avait donné entière satisfaction depuis plus de cinq ans n'était pas de nature à modifier l'appréciation qui précédait, mais tendait au contraire à démontrer que malgré le temps écoulé depuis le blâme reçu pour avoir introduit diverses marchandises dans la prison à l'intention de détenus, le recourant n'avait toujours pas saisi toute la portée de ses devoirs d'agent de détention. Les premiers juges pouvaient sans arbitraire considérer que le comportement et l'attitude du recourant étaient propres à faire douter sérieusement ses supérieurs, ainsi que ses collègues de son aptitude à assumer pleinement la charge d'agent de détention et conclure au bien-fondé de la résiliation prononcée par le Conseil d'État. En sa qualité d'agent de détention, le recourant était en effet tenu par des devoirs pouvant affecter même sa vie privée. Ces devoirs ne sauraient cependant dépasser ce qui était requis pour la correcte exécution de ses tâches et dépendaient de la position occupée et de la nature des fonctions (arrêt du Tribunal fédéral 8C_292/2011 du 9 décembre 2011 et les références citées) ;

- le licenciement d’un employé de l'unité PostMail du Centre de courrier, malgré plusieurs remarques, entretiens oraux, une mise en garde et un avertissement écrits, qui refuse de distribuer certains imprimés publicitaires à caractère érotique en raison de ses convictions personnelles et religieuses, a été jugé fondé, en application de la loi sur le personnel de la Confédération du 24 mars 2000 (LPers - RS 172.220.1). Après examen des pièces versées au dossier, le Tribunal administratif fédéral a considéré que les imprimés n'avaient aucun caractère pornographique ou illégal. En refusant de distribuer les envois en question, en violation des instructions et nombreuses mises en gardes qu'il avait reçues, l'intéressé avait manifestement perturbé le bon fonctionnement de son service et adopté un comportement propre à rompre le lien de confiance nécessaire à la poursuite des rapports de travail. Par ailleurs, ce comportement constituait clairement une violation du devoir de fidélité et, partant, des obligations contractuelles au sens de l'art. 12 al. 6 let. a LPers (arrêt du Tribunal administratif fédéral A-4659/2010 du 14 juin 2011 ; ATF 136/2010 I 332 cité in Minh Son NGUYEN ; Sanctions et licenciements : conditions matérielles et exigences procédurales, in : Les réformes de la fonction publique, 2012) ;

- le Tribunal administratif fédéral a confirmé le licenciement d’un officier instructeur qui s’était soustrait durant plusieurs années au paiement des impôts en annonçant son départ de sa précédente commune de domicile sans annoncer son arrivée dans sa nouvelle commune de domicile. Le comportement était inexcusable de la part d’un officier de carrière de l’armée suisse revêtant une fonction de modèle (arrêt du Tribunal administratif fédéral A-6609/2007 du 17 décembre 2007).

11. Il ressort de la jurisprudence cantonale notamment que :

- un fonctionnaire ne peut pas récolter des signatures pour une initiative cantonale sur les lieux où il travaille sans violer son devoir de réserve, étant donné qu’un tel comportement peut mener les administrés à faire un amalgame entre sa fonction et son activité politique (ATA/714/2014 du 9 septembre 2014) ;

- qu’un blâme a été prononcé à l’encontre d’un policier ayant commis, dans le cadre de sa vie privée, un excès de vitesse qualifié d’infraction grave à la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01 ; ATA/607/2012 du 11 septembre 2012) ;

- le devoir de fidélité d’un enseignant ne s’arrête pas au comportement qu’il doit adopter à l’école, mais également à celui qu’il doit observer en dehors de celle-ci. L’enseignant constitue, vis-à-vis des étudiants, à la fois une référence et une image qui doivent être préservées. Il lui appartient donc, dès qu’il se trouve hors de sa sphère privée, d’adopter en tout temps un comportement auquel ceux-ci puissent s’identifier. À défaut, il détruirait la confiance que la collectivité - et en particulier les parents et les élèves - ont placée en lui. Ce devoir de fidélité embrasse l’ensemble des devoirs qui lui incombent dans l’exercice de ses activités professionnelles et extra-professionnelles. En ramenant notamment une prostituée à l’hôtel où logeaient ses élèves, lors d'un voyage de classe, en organisant sur son lieu de travail et pendant ses heures de service une rencontre à caractère sexuel avec un jeune homme dont il n’avait pas vérifié l’âge réel et dont il ignorait l’activité, puis en menaçant ce dernier, le recourant a mélangé vie privée et vie professionnelle de façon contraire à ses obligations d'enseignant. Une révocation était fondée (ATA/605/2011 du 27 septembre 2011 et les références citées).

- une agression verbale et physique d’un supérieur hiérarchique dans le contexte professionnel d’un séminaire, attitude liée à une alcoolisation excessive et délibérée, contrevient aux devoirs des fonctionnaires. Elle n’est pas compatible avec la loyauté et la diligence que tout employeur est en droit d'attendre de ses collaborateurs, soit, plus particulièrement, avec la considération dont doivent jouir les employés d'une collectivité publique. La gravité de la conduite du recourant, contraire à la bienséance et à la décence que se doit d'observer un fonctionnaire dans le cadre de ses fonctions, fondait la révocation, étant précisé que le fonctionnaire avait au préalable été averti pour des retards et avait des rapports conflictuels avec sa hiérarchie (ATA/531/2011 du 30 août 2011).

12. En l'espèce, la recourante conteste l’existence d’un motif fondé.

a. Le principal grief de la recourante consiste dans le fait que son licenciement serait fondé sur la problématique du rappel d’impôts et de l’amende, soit de faits d’ordre privé sans influence sur la qualité de son travail ou celui du service.

Cet argument ne peut être suivi. En taisant, plusieurs années de suite, plusieurs faits propres à influencer de façon importante sa taxation (bien immobilier sis à l’étranger, produits d’une sous-location, ainsi que des éléments de fortune) la recourante a violé l’art. 20 LPAC, à savoir qu’elle n’a pas respecté l’intérêt de l’État et ne s’est pas abstenue d’un comportement préjudiciable à celui-ci, alors qu’elle travaille dans l’administration qui s’occupe de la perception de l’impôt dû par tout contribuable. À l’instar de la jurisprudence du Tribunal fédéral sur le travail, même bénévole, effectué par un fonctionnaire sous certificat médical, la fonctionnaire a agi contrairement aux intérêts légitimes de son employeur, alors qu’il appartient à tout employé de s’abstenir d’entreprendre ce qui pourrait causer un dommage économique à son employeur ou nuire à ce dernier.

L’argument selon lequel la faute de la recourante n’a pas été commise dans le cadre de son activité professionnelle, n’a pas eu d’incidence sur le travail de son service, ni sur le sien et n’a pas eu d’effet sur la qualité de son service n’est en l’état pas pertinent, la violation de l’art. 20 RPAC étant réalisée.

Il est vrai toutefois que la gravité de la faute doit être appréciée en fonction de toutes les circonstances du cas. En l’espèce, la situation n’est pas identique entre une soustraction fiscale effectuée par un fonctionnaire occupé dans un autre département, que par une personne qui travaille au sein de l’C______. Certes, au sein de cette administration, la recourante exerçait une fonction de secrétaire. Toutefois, celle-ci travaillait au service juridique, avait notamment pour tâche de préparer les dossiers à l’attention des instances judiciaires, de mettre à jour les lois et la jurisprudence et de conseiller les contribuables et leurs mandataires sur l’état d’avancement de leurs procédures, notamment de redressement fiscal. Le fait que les manquements de la fonctionnaire aient fait l’objet d’une dénonciation est sans pertinence, tout comme le fait qu’elle ait été en litige avec la dénonciatrice. La dénonciation démontre toutefois que l’attitude fautive de la fonctionnaire était connue à l’extérieur de l’C______ et nuisait en conséquence à l’image de l’État. Il existe donc une relation qualifiée entre le comportement sanctionné et la fonction de l’intéressée. L’absence de contestation du rappel d’impôt et de l’amende est un élément qui peut être pris en compte, étant cependant rappelé que le fonctionnaire qui les contesterait ne ferait qu’exercer un droit qui lui est propre, ce dont il ne pourrait lui être tenu rigueur. Le paiement des montants dus selon les décisions définitives et exécutoires n’est que normal. Il peut toutefois être mis à la décharge de la recourante le fait qu’aujourd’hui le dommage direct est réparé. Autre est le problème des coûts indirects (temps passé par le personnel du service de contrôle, frais administratifs, etc…) engendrés par son comportement envers l’État.

b. La recourante soutient que l’analyse de l’existence d’un motif fondé au sens de l’art. 22 LPAC doit se faire sur le seul manquement fiscal, à l’exclusion des événements de 2010 et du blâme de 2012, tous deux anciens et n’ayant justifié, pour les faits de 2012, qu’un blâme et non pas une résiliation.

En l’espèce, l’intéressée avait reçu un blâme le 13 septembre 2012. S’il est exact que les événements relatifs à Mme M______ n’avaient pas suscité de sanction formelle, ils ont impliqué, dès leur connaissance par le directeur de l’C______, l’entretien du 13 septembre 2012 pour en discuter ainsi qu’un courrier du 3 octobre 2012, mentionnant très clairement que de nouveaux manquements pourraient appeler le prononcé d’une sanction disciplinaire plus grave et qu’un comportement irréprochable était attendu de l’intéressée.

L'intimé, ayant fait usage de son large pouvoir d'appréciation en la matière, était par conséquent fondée à retenir que, pris dans leur ensemble, les griefs formulés à l’égard de la recourante étaient de nature à entamer le lien de confiance indispensable à la poursuite de la relation de travail. Cela se justifie d'autant plus que, compte tenu du contexte particulier dans lequel évolue le personnel de l’C______, cette dernière se doit de pouvoir compter sur des employés particulièrement fiables.

Le pouvoir d’examen de la chambre administrative étant limité à la violation du droit et ne portant pas sur l’opportunité de la décision, il en résulte que l’intimé n’a pas violé le droit en considérant que la condition de l’existence d’un motif fondé était remplie.

13. Dans un second grief la recourante reproche à l’intimé d’avoir violé le principe de la proportionnalité.

Traditionnellement, le principe de la proportionnalité se compose des règles d’aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé - de nécessité - qui impose qu’entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l’atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l’administré et le résultat escompté du point de vue de l’intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 p. 482 ; arrêt du Tribunal fédéral 1P. 269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/415/2011 du 28 juin 2011).

Selon la jurisprudence, l'autorité d'engagement dispose, en présence de justes motifs, d'une liberté d'appréciation dans le choix de la sanction (modification ou résiliation des rapports de service), laquelle est toutefois subordonnée au principe de proportionnalité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_780/2012 du 11 février 2013 consid. 5.2.1 et les références citées)

En l’espèce, l’autorité a décidé d’un licenciement. Une telle mesure s'inscrit à n'en pas douter dans le cadre de sa liberté d'appréciation dans le choix des mesures de résolution des conflits (arrêts du Tribunal fédéral 8C_677/2013 du 22 septembre 2014 ; 8C_340/2009 du 24 août 2009 consid. 4.3.2 et 8C_70/2010 du 20 décembre 2010 consid. 4.2.3).

a. Le licenciement de l’intéressée est un moyen propre à atteindre le but fixé, soit l’intérêt public au bon fonctionnement de l’administration cantonale, étant rappelé que le motif fondé, selon les travaux préparatoires, est indépendant de la faute du membre du personnel et que ladite résiliation est une mesure administrative qui permet d’adapter la composition de la fonction publique dans un service déterminé.

b. Le principe de la nécessité veut qu’aucune mesure moins incisive ne soit envisageable.

Le principe du reclassement, applicable aux seuls fonctionnaires, est une expression du principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.). Il impose à l’État de s’assurer, avant qu’un licenciement ne soit prononcé, qu’aucune mesure moins préjudiciable pour l’administré ne puisse être prise (arrêt du Tribunal fédéral 1C_309/2008 du 28 janvier 2009 consid. 2.2 ; ATA/223/2010 du 30 mars 2010 consid. 10 ; ATA/434/2009 du 8 septembre 2009).

Lorsque les éléments constitutifs d'un motif fondé de résiliation sont dûment établis lors d'entretiens de service, un reclassement selon l'art. 21 al. 3 LPAC est proposé pour autant qu’un poste soit disponible au sein de l’administration et que l’intéressé au bénéfice d'une nomination dispose des capacités nécessaires pour l’occuper (art. 46A al. 1 RPAC). Des mesures de développement et de réinsertion professionnels propres à favoriser le reclassement sont proposées (art. 46A al. 2 RPAC). En cas de reclassement, un délai n'excédant pas six mois est fixé pour permettre à l'intéressé d'assumer sa nouvelle fonction (art. 46A al. 5 RPAC). En cas de refus, d’échec ou d'absence du reclassement, une décision motivée de résiliation des rapports de service pour motif fondé intervient (art. 46A al. 6 RPAC).

L'autorité administrative est dispensée de l'obligation d'ouvrir une procédure de reclassement si le médecin conseil atteste que le fonctionnaire n'est pas médicalement apte à reprendre un emploi quelconque au sein de l'État de Genève à court et à moyen terme, que le fonctionnaire ne conteste pas cette situation et que le délai de protection de la résiliation des rapports de service pour temps inopportun est échu (ATA/783/2014 du 7 octobre 2014).

En l'espèce, la procédure de reclassement a été ouverte le 26 mars 2014. L’intéressée a été informée le 23 juin 2014 que ses rapports de service seraient résiliés dès la fin de la période de protection pour cause de maladie, alors même que le 9 mai 2014, le service de santé du personnel de l’État informait la DRH d’une incapacité de travail de l’intéressée pour une période de trois à six mois. Compte tenu de la jurisprudence précitée, et quand bien même la qualité des propositions faites à la recourante interpelle, force est de constater qu’au vu de son incapacité de travail qui a perduré six mois, il ne pouvait être demandé à l’employeur davantage de démarches en matière de reclassement. De surcroît, compte tenu de la soustraction fiscale, l’intéressée n’aurait pas pu être conservée au sein de l’C______ et aurait dû être déplacée vers une autre administration. Elle avait fait toute sa carrière au sein de l’C______ où elle avait, petit à petit, gravi des échelons en acquérant des compétences spécifiques en lien avec cette administration. Le principe de la nécessité est en conséquence respecté.

c. L’intérêt privé de la recourante à conserver son emploi doit passer après l’intérêt public au respect de la loi et à la conservation d’un personnel respectueux de son employeur. Même le fait que, pendant trente-trois ans, il n’y ait pas eu de difficultés ou que la fonctionnaire ait été âgée de 58 ans au moment de la décision de licenciement n’est pas déterminant, celle-ci ayant commis, depuis 2003 déjà, des actes contraires aux intérêts de son employeur.

Le principe de la proportionnalité est donc respecté.

14. La recourante fait grief à la décision d’être arbitraire.

Une décision est arbitraire lorsqu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou lorsqu’elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité. La chambre administrative ne s’écarte de la solution retenue par l’autorité cantonale que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable, qu’elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, si elle a été adoptée sans motif objectif ou en violation d’un droit certain. L’arbitraire ne résulte pas du seul fait qu’une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu’elle serait préférable. Pour qu’une décision soit annulée pour cause d’arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 138 I 232 consid. 6.2 p. 239 ; 136 I 316 consid. 2.2.2 p. 318 s ; ATA/131/2013 du 5 mars 2013 consid. 6).

Dès lors que la décision de licenciement est conforme à la loi, le grief d’arbitraire est infondé

15. En conséquence, le recours sera rejeté.

16. Cette issue exclut l’examen des prétentions en indemnité de la recourante.

17. Vu l’issue de la procédure un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité ne lui sera par ailleurs allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 24 septembre 2014 par Madame A______ contre la décision de résiliation des rapports de service du D______ du 25 août 2014 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il est mis à la charge de la recourante un émolument de CHF 1’000.- ;

dit qu'il ne lui est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Christian Tamisier, avocat de la recourante ainsi qu'au D______.

Siégeants : M. Verniory, président, MM. Thélin et Dumartheray, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :