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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1896/2021

ATA/252/2023 du 14.03.2023 sur JTAPI/1258/2021 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1896/2021-PE ATA/252/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 mars 2023

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______ recourant

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 13 décembre 2021 (JTAPI/1258/2021)


EN FAIT

A. a. Par décision du 12 avril 2019, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a refusé de donner suite à la demande d’autorisation de séjour avec activité lucrative déposée le 18 décembre 2018 par B______Sàrl en faveur de Monsieur A______, ressortissant mauricien né le ______ 1981.

Ce refus se fondait sur la décision du 16 janvier 2019 du service de la main-d’œuvre étrangère de l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT), qui le liait. Un délai au 2 août 2019 a été imparti à M. A______ pour quitter la Suisse.

b. Par acte du 7 juin 2019, M. A______ a recouru par-devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant à sa nullité, subsidiairement à son annulation et à ce qu’il soit mis au bénéfice d’un permis d'établissement, compte tenu de la durée de son séjour en Suisse.

c. Par jugement du 12 juin 2019 (JTAPI/527/2019), le TAPI a déclaré le recours irrecevable pour cause de tardiveté.

d. La chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a rejeté le recours déposé contre ce jugement par arrêt du 27 août 2019 (ATA/1298/2019), et le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours déposé contre l'arrêt précité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_819/2019 du 1er octobre 2019).

B. a. Le 27 novembre 2019, M. A______ a déposé auprès de l’OCPM une demande d’autorisation de séjour pour cas de rigueur, en exposant la motivation de sa requête dans une lettre d’accompagnement.

b. Par lettre du 27 février 2020, l’OCPM lui a fait part de son intention de ne pas donner une suite favorable à sa requête et, par décision datée du 27 juillet 2020, a refusé de transmettre son dossier au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) avec un préavis positif et a prononcé son renvoi de Suisse.

Il n’avait pas respecté l’ordre juridique en refusant de quitter la Suisse. Son récent projet de mariage en France ne démontrait pas une volonté d’intégration. Enfin, la durée de son séjour au bénéfice d’un permis pour études n’était pas déterminante pour la reconnaissance d’un cas de rigueur.

c. Par acte du 24 septembre 2020, M. A______ a interjeté recours devant le TAPI contre la décision précitée, en concluant à son annulation ainsi que, à titre préalable, à la restitution de l’effet suspensif à son recours.

d. Par jugement du 12 février 2021 (JTAPI/150/2021), le TAPI a déclaré le recours irrecevable pour cause de tardiveté. Ce jugement est entré en force faute d'avoir été contesté.

C. a. Le 13 avril 2021 l’OCPM a imparti à M. A______ un délai au 13 juin 2021 pour quitter la Suisse. Au vu du JTAPI/150/2021 précité, la décision de renvoi du 27 juillet 2020 était désormais définitive et exécutoire.

b. Par acte du 1er juin 2021, M. A______ a demandé au TAPI de « revoir la décision du titre de séjour ». Il se trouvait dans l’impossibilité de regagner son pays, qui subissait une grave crise économique provoquée par la pandémie de Covid-19 et la catastrophe liée au pétrolier Wakashio qui s’était échoué en déversant du pétrole dans la mer.

L’industrie touristique mauricienne était à l’arrêt et les frontières étaient fermées. Il ne disposait d’aucun logement dans son pays, qui était en train de devenir une dictature. Le gouvernement avait placé sur liste noire les ressortissants mauriciens vivant à l’étranger. Il ne pourrait y exercer sa profession de moniteur de plongée, alors qu’en Suisse, il occupait un emploi lui permettant de vivre sans percevoir l’aide sociale.

Ce recours a été ouvert sous le numéro de procédure A/1896/2021.

c. Le 21 juin 2021, l’OCPM a conclu à l’irrecevabilité du recours.

Compte tenu du jugement du TAPI du 12 février 2021, le nouveau délai de départ au 13 juin 2021 était raisonnable. Il avait été fixé dans la suite de la décision, désormais en force, du 27 juillet 2020, si bien qu’il n’était pas susceptible de recours.

d. M. A______ a dans ses écritures suivantes transmis une attestation qui lui avait été délivrée le 8 juillet 2021 par la mairie de C______, indiquant qu’aucune opposition n’avait été formée à son mariage avec Madame D______, née en 1986 à l'Île Maurice, dont la nationalité n'était pas mentionnée. Celle-ci était sa seule famille et il attendait une date pour pouvoir se marier. En lui demandant de retourner dans son pays, l’OCPM détruirait son couple, ainsi que sa vie. Il devait ainsi tenir compte de son mariage et de sa situation familiale, de sa présence en Suisse d’une durée de onze ans, ainsi que de son respect de la justice genevoise. Il a aussi transmis au TAPI copie de son contrat de travail conclu avec l’entreprise vaudoise E______ Sàrl sise à ______, selon lequel il était embauché pour une durée indéterminée en qualité de commercial moyennant un salaire mensuel brut de CHF 4'500.-.

e. L’OCPM a exposé que la demande de prise d’activité de M. A______ auprès de E______ Sàrl relevait des autorités vaudoises du marché du travail. Le recours interjeté consécutivement à la fixation du délai de départ pour quitter la Suisse devait être déclaré irrecevable.

f. Le 5 juillet 2021, M. A______ a demandé à l’OCPM de reconsidérer sa décision de renvoi du 27 juillet 2020. Il a repris les arguments exposés dans sa lettre au TAPI du 1er juin 2021. À l’appui de sa demande, il a joint un chargé de pièces.

g. Le 23 juillet 2021, l’OCPM a fait part à M. A______ de son intention de refuser d’entrer en matière sur sa demande de reconsidération.

La situation économique, sociale, sanitaire et politique prévalant dans son pays d’origine affectait l’ensemble de la population, si bien qu’elle ne pouvait être considérée comme un fait important et nouveau. La situation personnelle de l’intéressé était déjà connue lorsque la décision du 27 juillet 2020 avait été rendue. Un délai lui a été accordé pour faire valoir son droit d’être entendu.

h. Par pli du 23 août 2021, M. A______ s’est déterminé sur la lettre précitée en persistant dans sa requête de reconsidération. Sa demande était liée à des faits nouveaux qui ne pouvaient être prouvés antérieurement. La procédure de mariage prenait du temps, dès lors qu’il fallait faire venir des documents depuis son pays d’origine. Lorsqu’il obtiendrait un titre de séjour européen, il pourrait continuer à travailler en Suisse. Il se prévalait de l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), qui l’autorisait à vivre auprès de son épouse. Il n’existait aucun accord de réadmission entre la Suisse et l’Île Maurice. Enfin, il était au bénéfice d’un contrat de travail auprès de E______ Sàrl.

i. Par décision du 10 septembre 2021, l’OCPM a refusé d’entrer en matière sur la demande de reconsidération.

Il a repris les arguments exposés dans sa lettre d’intention du 23 juillet 2021. Par ailleurs, le fait que M. A______ ait entrepris des démarches sur le territoire français en vue de se marier avec une ressortissante mauricienne domiciliée en France voisine constituait un fait nouveau, mais non un fait important justifiant de modifier sa position. M. A______ ne pouvait pas se prévaloir de l’art. 8 CEDH, étant donné que sa future épouse ne résidait pas en Suisse.

j. Par acte du 8 octobre 2021, M. A______ a interjeté recours auprès du TAPI contre cette décision en concluant, préalablement, à la restitution de l’effet suspensif.

Il était parfaitement intégré, ayant effectué des études auprès d’écoles prestigieuses. Il avait malheureusement eu affaire à des employeurs malhonnêtes. Il sollicitait d’être entendu par le TAPI, afin de démontrer son haut degré d’intégration. Grâce au réseau qu’il avait développé depuis 2010, il lui serait aisé de trouver un emploi. L’OCPM avait omis d’évoquer ses compétences linguistiques. Il avait toujours été indépendant financièrement, n’ayant jamais émargé à l’aide sociale et s’étant toujours acquitté de ses frais de scolarité, ainsi que de ses impôts. Il avait toujours cotisé aux assurances sociales. Il résidait depuis onze ans en Suisse, ce qui représentait une durée considérable au sens de la jurisprudence. L’OCPM méconnaissait la situation de l’Île Maurice, où 100'000 personnes sur 1'200'000 habitants étaient au chômage, et où le gouvernement emprisonnait tous ses opposants, y compris les parlementaires.

Ce recours a été ouvert sous le numéro de cause A/3473/2021.

k. Par jugement du 13 décembre 2021 (JTAPI/1258/2021), le TAPI a joint les causes A/1896/2021 et A/3473/2021 et a rejeté les recours.

Dans la seconde cause, l’objet du litige se limitait à la question de savoir si les faits nouveaux allégués devaient contraindre l’autorité intimée à réexaminer sa situation. Tel n'était pas le cas. Les éléments que M. A______ faisait valoir ne constituaient pas des faits ou des moyens de preuve qu’il n’aurait pas été à même d’invoquer avant que la décision du 27 juillet 2020 n’ait été rendue. Par ailleurs, il n’invoquait aucun changement notable de circonstances. Si certes l’attestation de la mairie de C______ du 8 juillet 2021 constituait un fait nouveau, celui-ci ne pouvait être qualifié d’important. En effet, même si à teneur de ce document, aucune opposition au mariage n’avait été formée, rien ne démontrait que M. A______ était désormais marié et encore moins qu’il disposait d’un titre de séjour français.

Dans son premier recours, M. A______ demandait au TAPI de « revoir sa décision » relative à son titre de séjour, mais il ne désignait pas le jugement dont il souhaitait obtenir la révision, étant précisé que tant le JTAPI/527/2019 que le JTAPI/150/2021 ne se prononçaient pas sur son droit à séjourner en Suisse, puisqu’il s’agissait de deux jugements d’irrecevabilité.

Il convenait néanmoins d’examiner la question de l’exécution de son renvoi, étant donné que l’examen de l'admission provisoire devait être effectué en tout temps. La crise économique sévissant à l’Île Maurice, consécutive à l’arrêt de l’industrie touristique et à la fermeture des frontières n'était, selon la jurisprudence, pas de nature à rendre un renvoi inexigible. Par ailleurs, M. A______ ne rendait pas vraisemblable une mise en danger concrète en cas de retour dans son pays et ne prétendait pas que celui-ci serait en proie à la guerre, à la guerre civile, ni qu’une situation de violence généralisée y prévaudrait.

D. a. Par acte posté le 13 janvier 2022, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre le jugement précité, concluant à l'octroi d'une autorisation de séjour.

Il vivait sur le territoire suisse depuis le mois d'août 2010, soit une durée considérable. Il était au bénéfice d'un contrat de travail, lequel était toutefois soumis à la condition « suspensive et résolutoire » de l'obtention d'un permis de séjour. L'OCPM faisait fi de sa volonté de travailler. Il était parfaitement intégré, avec une formation et une expérience dans le domaine de l'hôtellerie ainsi qu'un important réseau dans ce domaine. Il maîtrisait parfaitement le français, mais aussi l'allemand et l'anglais, ce dont l'OCPM avait omis de tenir compte. Il avait toujours été indépendant financièrement.

La durée de son séjour en Suisse devait être reconnue au titre de l'art. 8 CEDH. En outre, cette dernière garantie était « applicable Urbi et orbi », et il importait donc peu qu'il se mariât en France ou en Suisse.

Son éventuel retour à l'île Maurice était compromis, les membres de la diaspora qui revenaient au pays étant très souvent persécutés voire emprisonnés dès leur retour.

b. Le 3 mars 2022, l'OCPM a conclu au rejet du recours. Les arguments soulevés dans celui-ci n'étaient pas de nature à modifier sa position, étant en substance semblables à ceux présentés en première instance.

c. Le 8 juillet 2022, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 5 août 2022 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

d. Le 29 juillet 2022, l'OCPM a persisté dans ses conclusions sans formuler d'observations.

e. Le 5 août 2022, M. A______ a persisté dans ses conclusions. Il était en procédure préparatoire de mariage avec sa future épouse, qu'il avait connue en 2010, mais cette procédure avait été difficile à mener à bien en raison notamment de la situation sanitaire ainsi que du décès de sa grand-mère. Une fois marié, il serait mis au bénéfice d'un titre de séjour en France, qui lui permettrait de travailler en Suisse. Dès lors, l'art. 8 CEDH lui permettait de demeurer en Suisse jusqu'à l'obtention de son titre de séjour.

f. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le recourant conclut à l'obtention d'une autorisation de séjour. Il est toutefois douteux que cette – unique – conclusion soit recevable au vu de l'objet du litige.

2.1 En effet, le recours interjeté le 1er juin 2021 (cause A/1896/2021) portait sur la décision de l'intimé du 13 avril 2021 lui impartissant un délai de départ de Suisse. La seule conclusion envisageable dans ce cadre était l'annulation ou la modification du délai pour quitter la Suisse, dès lors que le refus d'autorisation de séjour était alors définitif.

2.2 Quant au recours du 8 octobre 2021 (cause A/3473/2021), il portait sur la décision de l'office intimé du 10 septembre 2021 refusant d'entrer en matière sur sa demande de reconsidération. Dès lors, la seule conclusion recevable était l'annulation de la décision récitée et le renvoi de la cause à l'OCPM pour que celui-ci entre en matière sur la reconsidération.

2.3 Ainsi, dans aucune des deux causes traitées – et jointes – par le TAPI, le recourant ne pouvait-il demander l'octroi d'une autorisation de séjour, et il en va de même par-devant la chambre de céans, si bien que son recours est en principe irrecevable. La question de la recevabilité du recours souffrira toutefois de demeurer ouverte au vu des considérants qui suivent.

3.             Il convient, en premier lieu, d’examiner si le refus de reconsidérer la décision du 12 avril 2019 était fondé.

3.1 L'autorité administrative qui a pris une décision entrée en force n'est obligée de la reconsidérer que si sont réalisées les conditions de l'art. 48 al. 1 LPA. Une telle obligation existe notamment lorsque des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente (art. 80 let. b LPA ; faits nouveaux « anciens » ; ATA/539/2020 du 29 mai 2020 consid. 5b).

Une telle obligation existe également lorsque la situation du destinataire de la décision s'est notablement modifiée depuis la première décision (art. 48 al. 1 let. b LPA). Il faut entendre par là des faits nouveaux « nouveaux » ou novae véritables, c'est-à-dire survenus après la prise de la décision litigieuse, qui modifient de manière importante l'état de fait ou les bases juridiques sur lesquels l'autorité a fondé sa décision, justifiant par là sa remise en cause (ATA/1620/2019 du 5 novembre 2019 consid. 3a ; ATA/159/2018 du 20 février 2018 consid. 3a). Pour qu'une telle condition soit réalisée, il faut que survienne une modification importante de l'état de fait ou des bases juridiques, ayant pour conséquence, malgré l'autorité de la chose jugée rattachée à la décision en force, que cette dernière doit être remise en question (ATA/539/2020 précité consid. 4b ; ATA/1244/2019 du 13 août 2019 consid. 5 ; ATA/830/2016 du 4 octobre 2016 consid. 2a).

3.2 Saisie d'une demande de reconsidération, l'autorité examine préalablement si les conditions de l'art. 48 LPA sont réalisées. Si tel n'est pas le cas, elle rend une décision de refus d'entrer en matière qui peut faire l'objet d'un recours dont le seul objet est de contrôler la bonne application de cette disposition (ATF 117 V 8 consid. 2 ; 109 Ib 246 consid 4a).

3.3 En droit des étrangers, le résultat est identique que l'on parle de demande de réexamen ou de nouvelle demande d'autorisation : l'autorité administrative, laquelle se base sur l'état de fait actuel, qui traiterait une requête comme une nouvelle demande, n'octroiera pas une autorisation de séjour dans un cas où elle l'a refusée auparavant si la situation n'a pas changé ; et si la situation a changé, les conditions posées au réexamen seront en principe remplies (arrêt du Tribunal fédéral 2C_715/2011 du 2 mai 2012 consid. 4.2 ; ATA/1098/2022 du 1er novembre 2022 consid. 2 ; ATA/1620/2019 précité consid. 3e).

3.4 En l’espèce, le TAPI a confirmé le refus d’entrer en matière sur la demande de reconsidération, dès lors que le seul fait nouveau survenu depuis la décision du 12 avril 2019, à savoir la procédure préparatoire de mariage avec une personne titulaire d'un droit de séjour en France, n’était pas de nature à modifier l’issue du litige. Cette analyse ne peut qu'être confirmée. Il ne s'agit que d'une procédure préparatoire, qui a déjà été ouverte en 2021, et le recourant n'a pas informé la chambre de céans qu'il se serait marié depuis lors. En outre, l'éventuel nouveau statut du recourant n'aurait pas de répercussions sur le refus d'une autorisation de séjour en dérogation aux mesures de limitations, confirmé sur recours, mais lui permettrait le cas échéant de solliciter une nouvelle autorisation.

C'est donc à juste titre que le TAPI a confirmé le refus d’entrer en matière sur la demande de reconsidération en l'absence de faits nouveaux importants.

4.             S'agissant du recours du 1er juin 2021 interjeté contre la décision de l'intimé du 13 avril 2021, le TAPI l'a rejeté, le comprenant comme une demande de révision de l'un de ses précédents jugements, et examinant en outre la question d'une éventuelle admission provisoire.

4.1 Selon la jurisprudence, la possibilité de recourir contre une décision d'exécution s'impose si un acte règle une question nouvelle, non prévue par une décision antérieure, ou s'il contient une nouvelle atteinte à la situation juridique de l'intéressé (ATF 119 Ib 492 consid. 3c/bb ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd. 2018, n. 1150 p. 398 s. ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3ème éd. 2011, p. 116 in initio). En revanche, si un acte ne fait que reprendre, sans les modifier, des obligations figurant déjà dans une décision antérieure, il n'y a pas d'objet possible à un recours et l'acte en cause doit être qualifié de mesure d'exécution, non sujette à recours (ATF 129 I 410 consid. 1.1). Le recours dirigé contre une décision d'exécution ne permet pas de remettre en cause la décision au fond, définitive et exécutoire, sur laquelle elle repose. On ne saurait faire exception à ce principe que si la décision tranchant le fond du litige a été prise en violation d'un droit fondamental inaliénable et imprescriptible du recourant ou lorsqu'elle est nulle de plein droit (ATF 119 Ib 492 consid. 3c/cc et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_171/2020 du 6 avril 2021 consid. 1.4.1 ; 1C_310/2018 du 9 janvier 2019 consid. 3.1).

4.2 La nullité absolue d'une décision peut être invoquée en tout temps devant toute autorité et doit être constatée d'office. Elle ne frappe que les décisions affectées des vices les plus graves, manifestes ou du moins facilement décelables, et pour autant que la constatation de la nullité ne mette pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Hormis dans les cas expressément prévus par la loi, il n'y a lieu d'admettre la nullité qu'à titre exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire. Des vices de fond n'entraînent qu'à de rares exceptions la nullité d'une décision ; de graves vices de procédure, ainsi que l'incompétence qualifiée de l'autorité qui a rendu la décision sont des motifs de nullité (ATF 144 IV 362 consid. 1.4.3 ; 139 II 243 consid. 11.2 ; 138 II 501 consid. 3.1 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_171/2020 du 6 avril 2021 consid. 1.4.2 ; 1C_281/2018 du 12 septembre 2019 consid. 3.1).

4.3 Lorsqu'un recours est dirigé contre une décision d'irrecevabilité, les conclusions qui vont au-delà de l'annulation de cette décision et du renvoi de la cause à l'autorité inférieure pour nouvelle décision sont irrecevables (arrêts du Tribunal fédéral 2F_31/2021 du 8 décembre 2021 consid. 1.2 ; 1C_451/2019 du 6 septembre 2019 consid. 2 ; ATA/1063/2022 du 18 octobre 2022 consid. 1).

4.4 Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, toute personne étrangère dont l'autorisation est refusée, révoquée ou qui n'est pas prolongée après un séjour autorisé est renvoyée. La décision de renvoi est assortie d'un délai de départ raisonnable (art. 64d al. 1 LEI).

Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). L'exécution n'est pas possible lorsque la personne concernée ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyée dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n'est pas licite lorsqu'elle serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n'est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger la personne étrangère, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

L'art. 83 al. 3 LEI vise notamment l'étranger pouvant démontrer qu'il serait exposé à un traitement prohibé par l'art. 3 CEDH ou l'art. 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984 (Conv. torture - RS 0.105 ; ATA/801/2018 7 août 2018 consid. 10c ; ATA/1004/2021 du 28 septembre 2021 consid. 4a). L'art. 83 al. 4 LEI s'applique en premier lieu aux « réfugiés de la violence », soit aux étrangers qui ne remplissent pas les conditions de la qualité de réfugié parce qu'ils ne sont pas personnellement persécutés, mais qui fuient des situations de guerre ou de violence généralisée (Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, volume II : loi sur les étrangers, 2017, p. 949). En revanche, les difficultés socio-économiques qui sont le lot habituel de la population locale, en particulier des pénuries de soins, de logement, d'emplois et de moyens de formation, ne suffisent pas en soi à réaliser une telle mise en danger (ATA/1004/2021 précité ; ATA/515/2016 du 14 juin 2016 consid. 6b).

4.5 En l'espèce, le TAPI aurait dû déclarer le recours irrecevable. La décision attaquée était clairement une décision d'exécution, et n'était invoquée ni nullité de celle-ci ni violation d'un droit fondamental imprescriptible et inaliénable, et la seule conclusion formulée en substance dans l'acte de recours, à savoir l'octroi d'un titre de séjour, était ainsi exorbitante au litige.

Même à comprendre le courrier du recourant comme une demande en révision, les deux jugements rendus par le TAPI étant des constats d'irrecevabilité, ces demandes étaient irrecevables faute de conclusions visant à l'annulation de l'un de ces deux jugements avec renvoi à l'intimé. De plus, l'un des deux jugements ayant été porté devant la chambre de céans puis le Tribunal fédéral, il ne pouvait a priori pas faire l'objet d'une demande de révision au vu de l'effet dévolutif des recours (art. 67 LPA).

Le constat qui précède ne saurait toutefois conduire à l'admission du recours, une annulation du jugement attaqué pour en prononcer l'irrecevabilité partielle n'ayant pas de sens.

À titre superfétatoire, on ne peut que confirmer l'analyse du TAPI au sujet d'une éventuelle admission provisoire du recourant. Celui-ci évoque des risques pour sa sécurité en cas de retour à Maurice, sans toutefois les étayer de manière concrète. Or, si des signes d'une dérive autocratique sont mis en avant par de nombreux médias depuis quelques années, l'Île Maurice ne subit pour autant une situation de guerre ou de violence généralisée, et rien dans le dossier n'indique en outre que le recourant pourrait être considéré comme une menace par le régime en place. Quant aux difficultés socio-économiques, elles sont, à teneur de la jurisprudence précitée, le lot habituel de la population locale et ne suffisent pas en soi à réaliser une mise en danger au sens de l'art. 83 LEI. Il n'y a donc pas lieu de mettre le recourant au bénéfice d'une admission provisoire.

Il découle de ce qui précède que le recours, entièrement infondé, doit être rejeté.

5.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, en tant qu'il est recevable, le recours interjeté le 13 janvier 2022 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 13 décembre 2021 ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 400.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : M. Mascotto, président, M. Verniory, Mme Lauber, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.