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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2994/2012

ATA/211/2014 du 01.04.2014 ( LOGMT ) , REJETE

Descripteurs : ; LOGEMENT ; LOGEMENT SOCIAL ; BAIL À LOYER ; LOCATAIRE ; REVENU DÉTERMINANT ; DROIT DE GARDE ; ENFANT ; GARDE ALTERNÉE ; DOMICILE ; JURIDICTION CONSTITUTIONNELLE ; PRIMAUTÉ DU DROIT FÉDÉRAL ; LÉGALITÉ ; ÉGALITÉ DE TRAITEMENT ; PROPORTIONNALITÉ ; PRINCIPE DE LA BONNE FOI
Normes : LGL.30.al3; LGL.31C.al1.lete; LGL.31C.al1.letf; LGL.31C.al1.letg; RGL.8.al1
Résumé : Seules les inscriptions figurant dans les registres de l'OCPM font foi pour déterminer le domicile légal des personnes occupant un logement HLM. En l'espèce, seul le recourant est officiellement domicilié à l'adresse de l'appartement HLM qu'il loue, ses deux enfants étant légalement domiciliés chez leur mère. L'intéressé occupant seul un logement de cinq pièces, c'est à bon droit que l'OLO a considéré que le recourant était en situation de sous-occupation et l'a astreint au paiement d'une surtaxe, malgré le fait que l'intéressé exerce une garde alternée sur ses deux enfants. Le recours est rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2994/2012-LOGMT ATA/211/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 1er avril 2014

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur R______

contre


OFFICE CANTONAL DU LOGEMENT ET DE LA PLANIFICATION FONCIÈRE



EN FAIT

1) a. Monsieur R______ vit séparé de son épouse et a été, depuis le 16 août 2009, locataire d’un appartement de cinq pièces situé rue M______ ______ à Genève, dans un immeuble d’habitation à loyer modéré (ci-après : HLM), le loyer annuel sans les charges étant de CHF 21'888.-. Il ressort des fichiers de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) que l’intéressé a quitté ce logement le 20 septembre 2013.

b. M. R______ a deux enfants mineurs nés respectivement les ______ 1996 et ______1999. Selon les fichiers de l’OCPM, ceux-ci sont légalement domiciliés chez leur mère, à Genève.

c. Le 24 août 2010, l’office du logement, devenu depuis lors l’office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : OCLPF), a adressé à M. R______ un avis de situation pour l’année 2010, mentionnant que le revenu annuel brut de l’intéressé était de CHF 82'844.- et que le taux d’effort réglementaire était de 26 %. L’attention de M. R______ était expressément attirée sur son devoir d’aviser l’OCLPF si les données le concernant étaient inexactes ou incomplètes, notamment quant à ses revenus actuels. Il était également tenu de signaler toute modification de situation, tant dans la composition du groupe de personnes occupant le logement que dans ses revenus. A défaut, il risquait de devoir restituer des prestations indûment touchées et/ou de devoir verser des surtaxes pour des périodes antérieures.

2) Par décision du 2 août 2012, l’OCLPF a soumis M. R______ au paiement d’une surtaxe avec effet rétroactif dès le 1er octobre 2010, pour un montant total de CHF 11'524,75. L’intéressé n’avait pas donné suite à l’avis de situation 2010 et n’avait pas communiqué la hausse de ses revenus dès 2010. Ses revenus bruts avaient été de CHF 104'999.- en 2010, CHF 115'975.- en 2011 et CHF 133'233.- en 2012.

3) Le 30 août 2012, M. R______ a formé réclamation auprès de l’OCLPF contre la décision précitée.

Ses revenus ayant augmenté, son loyer devait effectivement être « soumis à une éventuelle surtaxe » dont il ne contestait pas l’effet rétroactif. Il n’avait pas prévenu tout de suite l’OCLPF de l’évolution de ses revenus, car il n’avait pas encore reçu les taxations 2009, 2010 et 2011. Il contestait le taux d’effort de 26 % déterminant son loyer et la surtaxe y relative. Ses enfants devaient être pris en compte dans les déductions forfaitaires permettant de définir le revenu déterminant et la quotité de la surtaxe.

Il vivait séparé de son épouse qui avait conservé le logement familial dont ils étaient tous deux propriétaires. Il assumait la garde partagée de ses enfants à raison de 50 %, sans toutefois que cet aspect ne soit réglé par un jugement. Ses enfants vivaient chez lui une semaine sur deux. Il assumait la moitié de leurs frais et leur éducation. L’appartement étant occupé par trois personnes, le taux d’effort devait être de 20 % au lieu de 26 % et la surtaxe devait par conséquent être revue à la baisse, pour le passé et l’avenir.

4) Par décision sur réclamation du 5 septembre 2012, l’OCLPF a rejeté la réclamation de M. R______ et confirmé sa décision du 2 août 2012.

Les deux enfants de M. R______ n’étant pas légalement domiciliés chez leur père, il fallait considérer que l’intéressé occupait seul un appartement de cinq pièces. L’intéressé avait été expressément informé de l’incidence de la domiciliation de ses enfants. Vu que le taux d’occupation légal n’était pas observé, un taux d’effort de 26 % devait être appliqué et les déductions forfaitaires pour une personne seule devaient être retenues.

5) Par acte posté le 5 octobre 2012, M. R______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision sur réclamation précitée, concluant à l’annulation des deux décisions de l’OCLPF des 2 août et 5 septembre 2012.

Vu que ses deux enfants vivaient chez lui une semaine sur deux, il avait droit aux déductions forfaitaires y relatives permettant de définir son revenu déterminant. Le reste du temps, il était « en sous-occupation légalement autorisée ». L’OCLPF considérait à tort qu’il était en sous-occupation toute l’année. La pratique de l’OCLPF y relative violait l’esprit de l’art. 31C let. f et g de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977 (LGL - I 4 05). Vu la garde alternée, les deux résidences de ses enfants devaient être prises en compte par l’OCLPF, même si leur domicile légal était chez leur mère. Le fait de prendre en compte le domicile légal de ses enfants en lieu et place de leur résidence le privait de prestations légales auxquelles il avait droit, ce qui violait les principes de la légalité, de l’égalité de traitement et de la proportionnalité et portait une atteinte illicite à sa personnalité, car l’OCLPF n’avait pas pris « en compte [sa] condition essentielle de parent ».

6) Le 9 novembre 2012, l’OCLPF a conclu au rejet du recours et à la confirmation de sa décision sur réclamation.

M. R______ avait admis ne pas l’avoir informé en temps opportun de l’augmentation de ses revenus. Les enfants du recourant n’étaient pas légalement domiciliés chez lui, mais chez leur mère, si bien qu’au regard de la LGL, l’intéressé occupait seul un logement subventionné de cinq pièces. Seul le critère de la domiciliation légale était décisif en matière d’allocation de logement ou de surtaxe. Le taux d’effort de 26 % appliqué au calcul de la surtaxe de M. R______ respectait l’égalité de traitement puisqu’il était le même pour tout logement subventionné sous-occupé, quelle que soit la situation des locataires concernés. Le principe de la bonne foi était également respecté puisque M. R______ avait été informé avant la conclusion du bail des conséquences liées à la domiciliation de ses enfants au regard de la LGL.

Il ressort des pièces jointes aux observations de l’OCLPF notamment que, le 6 juillet 2009, M. R______ a écrit à l’agence immobilière s’occupant de l’appartement HLM qu’il était « conscient que le taux d’effort [était] de 26 % et non 20 % si le domicile légal des enfants ne [lui était] pas attribué par le juge et [il acceptait] ces conditions ». Le 7 août 2009, l’OCLPF a autorisé la location dudit logement à M. R______, bien que ce dernier ne remplît pas les conditions requises pour son occupation. Après avoir examiné la situation de l’intéressé, il avait décidé d’« accorder une dérogation au taux d’occupation, car [il s’agissait d’] une garde partagée ». Dans ses déclarations fiscales pour les années 2010 et 2011, M. R______ a indiqué faire ménage commun avec ses deux enfants et en assurer l’entretien.

7) Le 10 décembre 2012, le juge délégué a transmis copie des observations précitées à M. R______ et l’a prié de lui indiquer s’il maintenait son recours. Le cas échéant, un délai au 7 janvier 2013 lui était imparti pour répliquer.

8) Le 4 janvier 2013, M. R______ a persisté dans son recours. Il n’avait toujours pas reçu les « attestations fiscales » pour les années 2010 et 2011. Il avait remis à l’OCLPF les documents dont il disposait. L’art. 31C al. 1 let. f LGL violait le droit fédéral car il ne tenait pas compte de la notion de résidence de l’enfant en cas de garde partagée et prévoyait une surtaxe « financièrement pénalisante (et humainement vexatoire) ». Il priait la chambre administrative de revoir sa jurisprudence concernant l’application de l’art. 31C al. 1 let. f LGL et de prendre en compte « le taux d’occupation "réel" de l’appartement ».

9) Le 7 janvier 2013, le juge délégué a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ce point de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 14 al. 2 du règlement d'exécution de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 24 août 1992 - RGL - I 4 05.01).

2) a. Aux termes de l'art. 60 al. 1 let. b LPA, ont qualité pour recourir toutes les personnes qui sont touchées directement par une décision et ont un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée.

b. Selon la jurisprudence, le recourant doit avoir un intérêt pratique à l'admission du recours, soit que cette admission soit propre à lui procurer un avantage, de nature économique, matérielle ou idéale (ATA/307/2013 du 14 mai 2013 et les références citées).

c. Un intérêt digne de protection suppose un intérêt actuel à obtenir l’annulation de la décision attaquée. L’existence d’un intérêt actuel s’apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours ; s’il s’éteint pendant la procédure, le recours, devenu sans objet, doit être simplement radié du rôle ou déclaré irrecevable (ATA/525/2013 du 27 août 2013 et les références citées).

d. En l’espèce, il ressort des fichiers de l’OCPM qu’en date du 20 septembre 2013, le recourant a quitté le logement HLM pour lequel il a été astreint par l’OCLPF au paiement d’une surtaxe. Dans la mesure où cette dernière concerne une période durant laquelle l’intéressé était domicilié dans ledit logement, le recourant conserve un intérêt actuel au présent recours, bien qu’il ait quitté l’appartement par la suite. Le recours est donc recevable.

3) Le litige porte sur le paiement d’une surtaxe avec effet rétroactif dès le 1er octobre 2010 réclamé par l’OCLPF au recourant, en raison de l’augmentation des revenus de l’intéressé dès 2010. Selon le recourant, l’OCLPF n’a pas tenu compte du fait qu’il exerce une garde alternée sur ses enfants et que ceux-ci vivent chez lui une semaine sur deux, ce qui – selon le recourant – a une incidence sur le taux d’effort applicable, sur les déductions auxquelles il a droit et sur le calcul du montant de la surtaxe. L’intéressé conteste la compatibilité de l'art. 31C al. 1 let. f LGL avec le droit fédéral et estime que la décision litigieuse viole les principes de la légalité, de l’égalité de traitement et de la proportionnalité.

4) De jurisprudence constante, la chambre administrative est habilitée à revoir, à titre préjudiciel et à l’occasion de l’examen d’un cas concret, la conformité des normes de droit cantonal au droit fédéral. Cette compétence découle du principe de la primauté du droit fédéral sur le droit des cantons, ancré à l’art. 49 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101). D’une manière générale, les lois cantonales ne doivent rien contenir de contraire à la Cst., aux lois et ordonnances du droit fédéral. Le contrôle préjudiciel permet de déceler et de sanctionner la violation par une loi ou une ordonnance cantonales des droits garantis aux citoyens par le droit supérieur. Toutefois, dans le cadre d'un contrôle concret, seule la décision d'application de la norme viciée peut être annulée (ATA/803/2013 du 10 décembre 2013 et les références citées).

5) Le principe de la légalité exige que l'administration n'agisse que dans le cadre fixé par la loi. Cette exigence se traduit de deux manières : d'une part, l'administration doit respecter l'ensemble des prescriptions légales qui la régissent, c'est le principe de primauté de la loi, qui incorpore le principe de la hiérarchie des normes ; d'autre part, l'administration ne peut agir que si la loi le lui permet, selon le principe de l'exigence de la base légale. La primauté de la loi signifie que l'administration doit respecter la loi et s'en tenir à ses prescriptions. Cette obligation découle de la Cst. et ne vaut que pour les règles auxquelles l'autorité est soumise dans l'ordre juridique considéré (ATA/248/2012 du 24 avril 2012 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 155-158).

6) Selon la jurisprudence, une décision ou un arrêté viole le principe de l’égalité de traitement lorsqu’il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu’il omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances, c’est-à-dire lorsque ce qui est semblable n’est pas traité de manière identique et lorsque ce qui est dissemblable ne l’est pas de manière différente. Cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. La question de savoir si une distinction juridique repose sur un motif raisonnable peut recevoir une réponse différente selon les époques et suivant les conceptions, idéologies et situations du moment (ATF 138 V 176 consid. 8.2 p. 183 ; 131 I 1 consid. 4.2 p. 6/7 ; 129 I 346 consid. 6 p. 357 ss ; ATA/803/2013 du 10 décembre 2013 ; Vincent MARTENET, Géométrie de l'égalité, 2003, p. 260 ss).

7) Dans l’exercice de ses compétences, toute autorité administrative doit respecter le principe de la proportionnalité, que ce respect soit imposé par l’art. 36 al. 3 Cst. ou, de manière plus générale, par l’art. 5 al. 2 Cst., dans ses trois composantes, à savoir l’aptitude, la nécessité et la proportionnalité au sens étroit. Ainsi, une mesure étatique doit être apte à atteindre le but d’intérêt public visé, être nécessaire pour que ce but puisse être réalisé, et enfin être dans un rapport raisonnable avec l’atteinte aux droits des particuliers qu’elle entraîne (ATF 136 I 87 p. 92 ; 136 I 17 p. 26 ; 135 I 176 p. 186 ; 133 I 110 p. 123 ; 130 I 65 p. 69 ; ATA/832/2013 du 17 décembre 2013 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 187).

8) Le principe de la bonne foi entre administration et administré, exprimé aujourd’hui aux art. 9 et 5 al. 3 Cst., exige que l’une et l’autre se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l’administration doit s’abstenir de toute attitude propre à tromper l’administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d’une incorrection ou insuffisance de sa part (ATA/833/2013 du 17 décembre 2013 et les références citées).

9) a. Les logements appartenant à une catégorie subventionnée par l'Etat, tel un logement HLM (art. 16 al. 1 let. b LGL), sont destinés aux personnes dont les revenus n'excèdent pas les montants fixés dans les barèmes d'entrée, respectivement de sortie, définis par la LGL (art. 30 al. 1 LGL). Par revenu, il faut entendre le revenu déterminant, c'est-à-dire l'ensemble des ressources au sens des art. 17 ss de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP – D 3 08), du titulaire du bail, additionnées à celles des autres personnes occupant le logement, dont à déduire une somme de CHF 10'000.- pour la première personne, de CHF 7'500.- pour la deuxième personne et de CHF 5'000.- par personne dès la troisième personne occupant le logement (art. 31C al. 1 let. a LGL dans sa teneur au 15 mai 2012).

b. Le barème d'entrée s'obtient en divisant le loyer effectif du logement par le taux d'effort du locataire (art. 30 al. 2 LGL). Le taux d’effort est le pourcentage minimum du revenu déterminant à consacrer au loyer (art. 31C al. 1 let. d LGL). Le taux d'effort varie en fonction du nombre d'occupants du logement et se situe entre 16 % et 26 % (art. 30 al. 3 LGL dans sa teneur au 15 mai 2012) : il est de 20 % lorsque trois personnes occupent un logement de cinq pièces (art. 8 al. 1 RGL dans sa teneur au 15 mai 2012) ; il est de 26% en cas de sous-occupation (art. 30 al. 3 let. d LGL dans sa teneur au 15 mai 2012).

c. Dès que le revenu du locataire dépasse le barème d'entrée, ce dernier est astreint au paiement d'une surtaxe (art. 31 al. 1 LGL) et le bail peut être résilié (art. 31 al. 4 LGL). La surtaxe correspond à la différence entre le loyer théorique et le loyer effectif du logement ; la surtaxe, ajoutée au loyer, ne peut en aucun cas entraîner des taux d'effort supérieurs à ceux visés par l'art. 30 al. 3 LGL (art. 31 al. 2 LGL).

La période d'application de la surtaxe s'étend du 1er avril de chaque année au 31 mars de l'année suivante (art. 11 al. 1 RGL). En cas de modification de revenu, le service compétent examine la nouvelle situation du locataire dans un délai de trente jours et fixe le nouveau montant de la surtaxe (art. 11 al. 3 RGL). Lorsqu'un locataire, astreint au paiement d'une surtaxe, quitte son logement, la surtaxe n'est due que pour la période où il a occupé les locaux (art. 12 al. 3 RGL).

La surtaxe a été définie comme la restitution partielle d’un avantage concédé par l’Etat de la part des bénéficiaires qui n’y ont plus entièrement droit ou, à la limite, comme une pénalité envers ceux qui habitent un logement subventionné alors qu’ils ne devraient pas en bénéficier (MGC 1974/III 2115). Elle se distingue de l’impôt dans la mesure où celui-ci se définit, au sens strict du terme, comme une contribution unilatérale qui n’est pas liée spécialement à une contrepartie et qui représente une contribution aux tâches générales incombant à l’Etat dans l’intérêt de la collectivité (ATF 95 I 506 ; RDAF 1979 p. 204-205 ; ATA/395/2013 du 25 juin 2013).

La surtaxe est une contribution causale, indépendante des coûts, dans la mesure où elle n’est pas fixée en fonction d’une dépense particulière et que son montant dépend de l’estimation de l’avantage économique du bénéficiaire (ATA/395/2013 du 25 juin 2013 et les références citées).

10) Il appartient au locataire d’annoncer sans délai auprès du service compétent toute modification significative de revenu survenant en cours de bail (art. 9 al. 2 RGL). A défaut, le service compétent peut tenir compte des revenus pris en considération pour l'impôt des années précédentes (art. 9 al. 3 RGL).

11) a. Il y a sous-occupation lorsque le nombre de pièces du logement dépasse de plus de deux unités le nombre de personnes occupant le logement (art. 31C al. 1 let. e LGL). Sont considérées comme occupant le logement, les personnes ayant un domicile légal, déclaré à l’OCPM, identique à celui du titulaire du bail (art. 31C al. 1 let. f LGL). Lorsque le nombre d'habitants du logement n'est pas justifié par le locataire, les conditions de la sous-occupation sont réputées remplies (art. 10 al. 4 RGL). La conclusion d’un bail en sous-occupation lors de garde partagée d’enfants mineurs, pour autant que le taux de garde attribué et effectif soit d’au moins 40 %, est admise (art. 31C al. 1 let. g LGL).

b. En matière de surtaxe HLM comme en matière d'allocations, le critère choisi pour définir quelles sont les personnes qui occupent un logement est celui de l'inscription dans les registres de l'OCPM, et non celui du domicile effectif au sens des articles 23 et suivants du Code civil suisse du 10 décembre l907 (CC - RS 210 ; ATA/16/2013 du 8 janvier 2013 ; ATA/408/2006 du 26 juillet 2006 ; ATA/24/2005 du 18 janvier 2005 ; ATA/219/2002 du 30 avril 2002 ; ATA/142/2002 du 19 mars 2002).

c. Le texte de l’art. 31C al. 1 let. f LGL est clair (ATA/240/2011 du 12 avril 2011; ATA/462/2003 du 10 juin 2003 ; ATA/272/2002 du 28 mai 2002). En effet, tous ces termes, selon leur acception courante, ne peuvent être compris raisonnablement que d’une manière déterminée (ATA/240/2011 du 12 avril 2011; André GRISEL, Traité de droit administratif, Neuchâtel, 1984, p. 124).

d. Les seules situations dans lesquelles il n’a pas été tenu compte de ce critère sont des cas dans lesquels une personne n’avait pas effectué les démarches qu’elle aurait dû effectuer auprès de l’OCPM pour annoncer son déménagement d’un logement alors qu’elle l’avait quitté à la suite d’une séparation conjugale (ATA/16/2013 du 8 janvier 2013 ; ATA/128/2009 du 10 mars 2009 ; ATA/24/2005 du 18 janvier 2005). Dans un autre cas, où il ressortait du registre de l’OCPM que le fils du recourant était domicilié chez sa mère - situation conforme au jugement qui l’avait expressément fixé - la chambre administrative a indiqué qu’il appartenait au recourant de demander une modification du jugement de divorce sur ce point s’il souhaitait que son fils soit légalement domicilié chez lui (ATA/240/2011 du 12 avril 2011).

e. Il ressort des travaux préparatoires relatifs à l’art. 31C al. 1 let. f et g LGL que, même en cas de garde partagée, les enfants n’ont qu’un seul domicile légal (MGC 2000/X D 9215). Les deux parents qui partagent la garde sur une base minimum de 40 % - 60 % peuvent bénéficier de deux appartements subventionnés et d’une allocation logement (MGC 2000/X D 9216).

12) En l’espèce, le recourant ne conteste pas que ses revenus ont augmenté et que lui-même doit être astreint au paiement d’une surtaxe avec effet rétroactif dès le 1er octobre 2010, pour l’appartement HLM de cinq pièces qu’il a occupé du 16 août 2009 au 20 septembre 2013.

Il n’est pas contesté que seul le recourant était inscrit auprès de l’OCPM comme étant domicilié à l’adresse de l’appartement précité. Il ressort des fichiers de l’OCPM que les deux enfants de l’intéressé sont légalement domiciliés chez leur mère, ce qui n’est pas non plus contesté par le recourant. Seules ces inscriptions font foi en l’occurrence, même si en pratique l’intéressé exerce une garde alternée sur ses deux enfants, non formalisée par un quelconque jugement.

Dès lors que le recourant occupait seul le logement HLM de cinq pièces, ce dernier était sous-occupé. L’OCLPF était ainsi en droit de soumettre l’intéressé au paiement d’une surtaxe avec un taux d’effort de 26 %, sans opérer de déduction relative à ses enfants, puisque ceux-ci ne sont pas considérés comme des « personnes occupant le logement » au sens de l’art. 31C al. 1 let. f LGL.

Si le recourant souhaitait que l’OCLPF prenne en compte ses deux enfants en qualité de « personnes occupant le logement » au sens de la LGL, il lui appartenait de solliciter auprès des autorités compétentes la modification du domicile légal de ses enfants.

Contrairement à ce qu’indique le recourant, il n’y a pas lieu de se référer au critère subsidiaire de la résidence des enfants en lieu et place de celui du domicile légal, puisque la base légale (art. 31C al. 1 let. f LGL) est claire, comme cela ressort de la jurisprudence de la chambre administrative précitée (cf. consid. 11c). Il n’y a pas lieu de modifier cette dernière, qui s’applique notamment à toutes les familles vivant dans un logement de type HLM.

Les travaux préparatoires confirment que, même en cas de garde partagée, les enfants n’ont qu’un seul domicile légal. La prise en compte de ce critère dans la détermination du nombre de personnes occupant le logement et dans le calcul de la surtaxe ne rend pas inconstitutionnelle la définition ancrée à l’art. 31C al. 1 let. f LGL et ne viole pas les principes de la primauté du droit fédéral, de la légalité, de l’égalité de traitement et de la proportionnalité.

Il ressort du dossier que, le 6 juillet 2009, le recourant a écrit à l’agence immobilière s’occupant de l’appartement HLM qu’il était « conscient que le taux d’effort [était] de 26 % et non 20 % si le domicile légal des enfants ne [lui était] pas attribué par le juge et [il acceptait] ces conditions ». En d’autres termes, l’intéressé a signé le contrat de bail en connaissance de cause. Il savait que le taux d’effort serait de 26 % si le domicile légal de ses enfants chez leur mère demeurait inchangé. Il devait également savoir qu’il ne bénéficierait pas d’une déduction liée à la garde alternée de ses enfants puisque ceux-ci n’étaient pas domiciliés officiellement chez lui mais chez leur mère. Il devait s’attendre à devoir payer une surtaxe dans cette situation. Dans ces circonstances, le principe de la bonne foi entre administration et administré n’a pas été violé. En d’autres termes, le fait que l’OCLPF ait permis au recourant de louer un appartement HLM de cinq pièces alors que les enfants de l’intéressé sont domiciliés chez leur mère ne viole pas le principe de la bonne foi, le recourant ayant expressément indiqué connaître les conséquences de cette situation.

13) En tous points mal fondé, le recours doit être rejeté.

14) La procédure étant gratuite en matière de surtaxe HLM (art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), le recourant ne sera pas astreint au paiement d'un émolument. Aucune indemnité ne sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 5 octobre 2012 par Monsieur R______ contre la décision sur réclamation de l'office du logement du 5 septembre 2012 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur R______, ainsi qu'à l’office cantonal du logement et de la planification foncière.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :