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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2743/2017

ATA/1595/2017 du 12.12.2017 sur JTAPI/817/2017 ( LCR ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2743/2017-LCR ATA/1595/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 12 décembre 2017

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

SERVICE CANTONAL DES VÉHICULES

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 juillet 2017 (JTAPI/817/2017)


EN FAIT

1) Par décision du service cantonal des véhicules (ci-après : SCV) du 29 mai 2017, déclarée exécutoire nonobstant recours, le permis de conduire toutes catégories et sous-catégories de véhicules a été retiré pour une durée indéterminée à Monsieur A______, domicilié à Genève.

2) Par acte daté du 13 juin 2017 mais interjeté le 22 juin suivant, M. A______, invoquant des circonstances douloureuses aux plans personnel, médical, financier et administratif, a formé recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), lequel lui a, par courrier recommandé du 26 juin 2017, imparti un délai au 26 juillet 2017 pour payer une avance de frais de CHF 500.-, sous peine d’irrecevabilité.

3) Par jugement du 27 juillet 2017, notifié à M. A______ par pli recommandé faisant l’objet d’un avis de retrait déposé dans sa boîte aux lettres le 28 juillet 2017 avec délai pour retrait au 4 août 2017 et retourné le 7 août 2017 à l’expéditeur comme « non réclamé », le TAPI a déclaré irrecevable le recours interjeté le 22 juin 2017 par l’intéressé contre la décision du SCV du 29 mai 2017, au motif que l’avance de frais n’avait pas été versée, et a mis à sa charge un émolument de CHF 350.-.

Un avis annonçant la communication du pli du TAPI du 26 juin 2017 impartissant le délai au 26 juillet 2017 pour payer l’avance de frais avait été distribué au recourant le 27 juin 2017 avec indication du délai de retrait au 4 juillet 2017, mais ledit pli, n’ayant pas été retiré dans ce délai, avait été retourné à l’expéditeur avec la mention « non réclamé ».

4) Par pli simple du 11 août 2017, le TAPI a remis à M. A______ son jugement, en attirant son attention sur le fait que ledit jugement avait été notifié valablement et que le délai de recours avait commencé à courir.

5) Par acte daté du 3 septembre 2017, signé à chaque page avec la mention du 4 septembre 2017, mais expédié le 7 novembre 2017 au greffe de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) par courrier recommandé avec avis de réception, M. A______ a formé recours contre le jugement du TAPI du 27 juillet 2017.

Il souffrait d’une sclérose en plaques diagnostiquée en 2010. Il était au bénéfice de l’assurance-invalidité (ci-après : AI) depuis 2012, pour une maladie psychiatrique erronée. Il faisait état de difficultés administratives en lien avec le remboursement de prestations par des assurances, ainsi que de son désendettement entier obtenu récemment. Alors qu’entre 2008 – année d’un accident de voiture très violent – et 2016 il prenait beaucoup de médicaments et ne pouvait pas conduire mais ne faisait pas l’objet d’un retrait de permis, on lui avait retiré son permis en 2017, précisément à une période où il allait mieux et pouvait enfin prendre soin de lui-même, et sans le voir physiquement lors d’un entretien. C’était d’une manière abusive que l’AI avait dénoncé son cas au SCV.

Cela faisait plusieurs fois qu’il recourait contre diverses décisions. Il avait même une coach personnelle et professionnelle – ou proche aidante – depuis 2010 pour l’aider dans toutes les démarches. Alors qu’il était censé partir en vacances du 18 juillet au 18 août 2017, il avait dû travailler à la maison avec sa proche aidante pour s’occuper des affaires pendantes devant la Cour de justice. Il n’avait pas accès à un ordinateur car il avait une photocopie, les textes étant écrits par sa proche aidante puis signé par lui-même après relecture, ce qui prenait du temps. En juillet et août 2017, il avait, avec l’aide de sa proche aidante mais sans celle de l’Hospice général – qui avait fait preuve d’incompétence –, tout fait pour remettre à jour sa situation aux plans fiscal, comptable et administratif.

Il n’avait pas l’argent pour former recours, il pouvait faire une demande d’assistance juridique, mais il lui était impossible d’aller sur internet pour télécharger le formulaire ; il n’avait pas reçu le bulletin de versement et ne pouvait jamais payer dans les temps.

En conclusion, il demandait que le jugement du 27 juillet 2017 soit annulé, concernant son recours, et que les magistrats et greffiers du TAPI soient informés qu’il attendait le bulletin de versement afin de payer son recours correctement et faire valoir ses droits, dans des délais respectables pour une personne à mobilité réduite, avec un handicap. Par ailleurs, il ne comprenait pas le montant de CHF 350.-.

Il dénonçait les pratiques de la poste qui ne faisait pas monter depuis douze mois ses facteurs vers son appartement, alors qu’il était handicapé et que, comme attesté par une ergothérapeute, il ne pouvait ni monter ni descendre les escaliers « en trop ».

6) Par courrier du 14 novembre 2017, le TAPI a transmis son dossier à la chambre administrative sans formuler d’observations.

7) Par lettre du 24 novembre 2017, la chambre administrative a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Le recours a été interjeté devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).

2) Selon l’art. 62 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), le délai de recours est de trente jours s’il s’agit d’une décision finale ou d’une décision en matière de compétence (al. 1 let. a) ; le délai court dès le lendemain de la notification de la décision (al. 3 1ère phr.) ; la décision qui n'est remise que contre la signature du destinataire ou d'un tiers habilité est réputée reçue au plus tard sept jours après la première tentative infructueuse de distribution (al. 4), pour autant que celui-ci ait dû s’attendre, avec une certaine vraisemblance, à recevoir une communication de l’autorité, ce qui est le cas chaque fois qu’il est partie à la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 6B_239/2011 du 22 mars 2012 consid. 3.5 ; ATA/11/2015 du 6 janvier 2015 consid. 2 ; ATA/819/2013 du 17 décembre 2013 consid. 3), ce qui est le cas en l’occurrence.

3) a. Les délais de réclamation et de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont, en principe, pas susceptibles d’être prolongés (art. 16 al. 1 1ère phr. LPA), restitués ou suspendus, si ce n’est par le législateur lui-même. Celui qui n’agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (SJ 2000 I 22 consid. 2 p. 24 ; ATA/105/2014 du 18 février 2014 consid. 3a ; ATA/347/2012 du 5 juin 2012 consid. 4a ; ATA/284/2012 du 8 mai 2012 consid. 4 ; ATA/50/2009 du 27 janvier 2009 consid. 2 et les références citées).

b. Les cas de force majeure sont réservés, conformément à l’art. 16 al. 1 2ème phr. LPA.

Tombent sous cette notion les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d’activité de l’intéressé et qui s’imposent à lui de façon irrésistible (SJ 1999 I 119 ; RDAF 1991 p. 45 ; ATA/261/2016 du 22 mars 2016 ; ATA/536/2010 du 5 août 2010).

Les conditions pour admettre un empêchement de procéder à temps sont très strictes. La restitution du délai suppose que l’intéressé n’a pas respecté le délai légal en raison d’un empêchement imprévisible dont la survenance ne lui est pas imputable à faute (arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.2 et la jurisprudence citée ; ATA/703/2016 du 23 août 2016 consid. 5 ; ATA/173/2016 du 23 février 2016). Celui-ci peut résulter d’une impossibilité objective ou subjective. L’empêchement doit être de nature telle que le respect des délais aurait impliqué la prise de dispositions que l’on ne peut raisonnablement attendre de la part d’une personne avisée (ATA/703/2016 précité consid. 5 ; ATA/397/2013 du 25 juin 2013 consid. 9).

A été considéré comme un cas de force majeure donnant lieu à restitution de délai le fait qu’un détenu, qui disposait d’un délai de recours de trois jours, n’ait pu expédier son recours dans ce délai, du fait qu’il ne pouvait le poster lui-même et qu’en outre ce pli avait été soumis à la censure de l’autorité (ATA/515/2009 du 13 octobre 2009 consid. 6). Il en allait de même du recourant qui se voyait impartir, par pli recommandé, un délai de quinze jours pour s’acquitter d’une avance de frais alors que le délai de garde pour retirer le pli en question était de sept jours, de sorte qu’il ne restait qu’une semaine au justiciable pour s’exécuter (ATA/477/2009 du 20 septembre 2009 consid. 5).

En revanche, n’ont pas été considérés comme des cas de force majeure une panne du système informatique du mandataire du recourant l’ayant empêché de déposer un acte de recours dans le délai légal (ATA/222/2007 du 8 mai 2007 consid. 3b), le fait qu'un avocat ait transmis à son client la demande d'avance de frais par pli simple en prenant le risque que celui-ci ne reçoive pas ce courrier (ATA/596/2009 du 17 novembre 2009 consid. 6). Fondamentalement, selon la jurisprudence, la maladie ou un accident peut être considérée comme un empêchement non fautif et, par conséquent, permettre une restitution d'un délai, si elle met l'administré ou son représentant légal objectivement ou subjectivement dans l'impossibilité d'agir par soi-même ou de charger une tierce personne d'agir en son nom dans le délai (arrêt du Tribunal fédéral 9C_209/2012 du 26 juin 2012 ; ATA173/2016 du 23 février 2016 et jurisprudence citée).

c. Selon l'art. 16 al. 3 LPA, la restitution pour inobservation d’un délai imparti par l’autorité peut être accordée si le requérant ou son mandataire a été empêché sans sa faute d’agir dans le délai fixé ; la demande motivée doit être présentée dans les dix jours à compter de celui où l’empêchement a cessé.

Comme cela ressort expressément du texte légal, cette disposition ne s'applique toutefois qu'aux délais fixés par l'autorité, et non aux délais légaux comme dans la présente espèce.

4) En l’espèce, le jugement querellé, rendu le 27 juillet 2017, a fait l’objet d’un avis de retrait déposé dans la boîte aux lettres de l’intéressé le 28 juillet 2017 avec délai pour retrait au 4 août 2017, soit sept jours après la première tentative infructueuse de distribution au sens de l’art. 62 al. 4 LPA. C’est à cette dernière date que le jugement du TAPI est réputé avoir été notifié au recourant.

Le délai de trente jours a toutefois commencé à courir le 16 août 2017, vu la suspension des délais prévue par l’art. 63 al. 1 let b LPA.

Partant, le recours, expédié le 7 novembre 2017 au greffe de la chambre administrative, est tardif.

5) Le recourant n’invoque pas un cas de force majeure au sens de l’art. 16 al. 1 2ème phr. LPA, même s’il fait état de graves problèmes de santé, d’un handicap ainsi que de difficultés au plan administratif.

6) Vu ce qui précède, quand bien même les souffrances et les difficultés dont a fait état le recourant sont importantes, le recours est manifestement irrecevable, ce qu’il y a lieu de constater sans instruction préalable, conformément à l’art. 72 LPA.

7) Malgré l’issue du litige et compte tenu de l’ensemble des circonstances particulières, il ne sera pas mis d’émolument à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 7 novembre 2017 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 juillet 2017 ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, au service cantonal des véhicules, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu’à l’office fédéral des routes.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Junod, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :