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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1503/2015

ATA/1440/2017 du 31.10.2017 sur JTAPI/893/2016 ( LDTR ) , PARTIELMNT ADMIS

Parties : FONDATION DE LA COMMUNE DE CHENE-BOURG POUR LE LOGEMENT / DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE - OAC
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1503/2015-LDTR ATA/1440/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 31 octobre 2017

 

dans la cause

 

FONDATION DE LA COMMUNE DE CHÊNE-BOURG POUR LE LOGEMENT
représentée par Me Nathalie Thürler, avocate

contre

DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 septembre 2016 (JTAPI/893/2016)


EN FAIT

1) La Fondation de la commune de Chêne-Bourg pour le logement, de droit public (ci-après : la fondation), est propriétaire de la parcelle no 3'789, feuillet 26, de la commune de Chêne-Bourg, sise en zone de développement 4B, sur laquelle se trouve le bâtiment d’habitation no 1'805, se trouvant au 51B, avenue de Bel-Air (ci-après : l’immeuble).

2) Le 5 février 2015, la fondation a déposé auprès du département de l’aménagement, du logement et de l’énergie (ci-après : DALE) une demande d’autorisation de construire en procédure accélérée, référencée sous dossier APA 41'920, pour procéder à la réfection de la peinture et des parquets, ainsi que changer l’aménagement et le carrelage de la cuisine d’un appartement de deux pièces et demie au cinquième étage de l’immeuble (ci-après : l’appartement). L’ancien loyer annuel s’élevait à CHF 7'836.-. Il passerait à CHF 8'508.- (CHF 3'405.- multipliés par deux pièces et demie).

Selon les plans annexés à la demande, l’appartement était constitué d’un hall d’entrée donnant sur un séjour de 16,54 m2, d’une chambre de 8,25 m2, d’une petite cuisine et d’une salle de bains.

3) Le 4 mars 2015, l’instance chargée de l’application de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) du 25 janvier 1996
(LDTR - L 5 20) a préavisé favorablement le projet, sous conditions.

Le loyer de l’appartement de deux pièces sis au quatrième étage
(recte : cinquième) ne dépasserait pas, après travaux, son niveau actuel de CHF 15'288.- (recte : CHF 7'836.-) par année, soit CHF 7'644.-
(recte : CHF 3'918.-) par pièce par année, ceci pour une durée de trois ans à compter de la remise en location après la fin des travaux.

Selon la note technique à la fin du préavis, tant le loyer annuel avant travaux que le loyer annuel après travaux plafonné étaient de CHF 7'836.-, soit CHF 3'918.- par pièce – s’agissant d’un appartement de deux pièces –, vu la limite supérieure du loyer annuel par pièce admissible de CHF 3'405.-.

4) Par décision du 20 mars 2015, publiée dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève le 27 mars 2015, le DALE a délivré l’autorisation sollicitée. Selon la condition no 4, les conditions figurant dans le préavis de l’instance LDTR devaient être strictement respectées et faisaient partie intégrante de l’autorisation.

5) a. Par acte du 7 mai 2015, la fondation a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant à l’annulation de sa condition no 4 en tant qu’elle fixait le nombre de pièces de l’appartement à deux et imposait un loyer annuel maximum de CHF 15'288.-, soit CHF 7'644.- par pièce, à la constatation que l’appartement était constitué de deux pièces et demie et que le loyer annuel n’excéderait pas, après travaux, CHF 8'508.- par année, soit CHF 3'403.20 la pièce, ainsi qu’à la confirmation de l’autorisation de construire pour le surplus.

Vu le coût très modéré des travaux, de CHF 6'400.- par pièce (CHF 16'000.- pour deux pièces et demie) et leur faible impact sur le loyer, ceux-ci étaient à la limite entre les travaux d’entretien et les travaux de rénovation.

Soit l’instance LDTR s’était trompée de dossier, vu le loyer annuel et l’étage inexacts retenus en première page de son préavis, soit elle avait à tort retenu qu’il s’agissait d’un appartement de deux pièces. La réglementation appliquée n’existait pas lors de la construction de l’immeuble. C’était la législation en vigueur lors de ladite construction qui devait faire foi, sous peine de violation des principes de la sécurité juridique et de la bonne foi. L’office cantonal du logement, devenu ensuite l’office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : OCLPF), avait admis le nombre de pièces annoncé par la commune de Chêne-Bourg, notamment s’agissant des appartements de deux pièces et demie du bâtiment nord, correspondant à l’immeuble. L’état locatif des sept bâtiments dont faisait partie l’immeuble n’avait jamais été modifié et comportait encore le même nombre de pièces.

b. À l’appui de son recours, la fondation a versé plusieurs documents à la procédure, parmi lesquels un accord de principe de l’OCLPF du 24 avril 1974, un courrier à ce dernier du 30 janvier 1976 et le plan de location du même jour annexé – à teneur duquel les sept immeubles comportaient notamment six appartements de deux pièces et demie au nord « (compté pour deux pièces selon le nouveau règlement) » – un plan financier de mise en location provisoire du 30 janvier 1976 et un arrêté de fixation de l’état locatif provisoire du Conseil d’État du 25 février 1976. Selon des notes manuscrites figurant sur le plan de l’appartement – le même que celui produit devant le DALE le 5 février 2015 – la cuisine avait une surface de 3,3 m2, le hall de 4 m2 et la salle de bains de 3,5 m2.

6) Par réponse du 10 juillet 2015, le DALE a conclu au rejet du recours.

L’instance LDTR avait commis une inadvertance flagrante. Il ne faisait aucun doute que c’était un montant de CHF 7'836.- l’an, à savoir CHF 3'918.- la pièce l’an, qui était fixé. La fondation avait saisi qu’il s’agissait d’une irrégularité matérielle sans conséquence sur la portée juridique de la décision. Il s’agissait d’une simple erreur de plume sujette à rectification.

La chambre, dont la surface était inférieure à 9 m2, comptait pour une demi-pièce. Le séjour-cuisine avait une surface inférieure à 25 m2 et équivalait à une pièce et demie. De par sa taille, inférieure à 6 m2, la cuisine ne constituait pas une pièce à elle seule.

Le fait que l’appartement avait été construit à la fin des années 1970 ne constituait pas un motif de dérogation. Même à l’époque, cette typologie ne comptait que deux pièces.

Il ne ressortait pas des pièces produites que le DALE avait confirmé que le logement appartenait à la catégorie des deux pièces et demie. Les pièces produites contenaient uniquement des renseignements globaux, et non une référence individualisée à l’appartement. La fondation n’alléguait pas d’assurance ou information reçue sur la comptabilisation des pièces de l’appartement. Elle n’indiquait pas avoir pris des mesures sur lesquelles elle ne pourrait revenir sans dommage.

La fondation n’avait pas établi ni même allégué le caractère insupportable du coût des travaux sans majoration de loyer.

7) a. Par réplique du 21 août 2015, la fondation a persisté dans ses conclusions, reprenant son argumentation précédente en la complétant.

Un calcul du rendement sur investissement, prenant en compte que l’appartement était composé de deux pièces et demie, avait été établi à l’origine et s’était perpétué depuis dans les baux et états locatifs. Revenir sur cet état de fait revenait à réduire la contenance de son patrimoine et le rendement autorisé.

b. À l’appui de sa réplique, elle a versé plusieurs pièces à la procédure, parmi lesquelles un plan financier provisoire du 30 novembre 1973, des courriers des 13 décembre 1978 et 8 janvier 1979 concernant la location de l’appartement, ainsi que des états locatifs nominatifs de l’immeuble des 17 février 1976, 20 août 1976 et 31 mai 1978.

8) Par duplique du 24 septembre 2015, le DALE a maintenu sa position et son argumentation, en la précisant.

Les immeubles construits avant l’entrée en vigueur du règlement d'exécution de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 24 août 1992 (RGL - I 4 05.01) – dont ceux construits au bénéfice de l’ancienne loi générale d’encouragement à la construction de logements à caractère social du 28 juin 1974 (aLGL) – entraient dans son champ d’application.

Ni les états locatifs, ni l’accord de principe ne relevaient de la compétence du DALE. Ce dernier ne faisait que reprendre les éléments du plan financier de la fondation, sans les valider. Le loyer demeurant identique à celui avant travaux, il n’y avait pas de diminution du rendement.

9) Le 12 avril 2016 a eu lieu une audience de comparution personnelle, durant laquelle les parties ont maintenu leurs positions.

10) Dans ses observations complémentaires du 27 mai 2016, la fondation a maintenu ses conclusions en annulation de la condition no 4 de l’autorisation litigieuse à titre subsidiaire, demandant désormais principalement le constat que les travaux entrepris n’étaient pas soumis à autorisation.

11) Dans ses déterminations du même jour, le DALE a persisté dans ses conclusions.

12) Par jugement du 6 septembre 2016, notifié le 12 septembre 2016, le TAPI a rejeté le recours et ordonné au DALE de rectifier les conditions du préavis de l’instance LDTR repris dans sa décision quant aux mentions du quatrième au lieu du cinquième étage et d’un loyer annuel de CHF 15'288.- au lieu de CHF 7'836.-, soit CHF 3'918.- par pièce.

Vu leur coût (CHF 10'000.- la pièce), les travaux n’étaient plus à la limite entre les travaux d’entretien non assujettis et les travaux de rénovation assujettis. Le coût des travaux représentait 10,19 % en considérant l’appartement comme un deux pièces ou 11,9 % de la valeur d’assurance de l’appartement, en retenant deux pièces et demie. La barre des 10 % était dans tous les cas atteinte, de sorte que le montant des travaux représentait une part considérable de la valeur d’assurance, apportant une plus-value à l’immeuble.

L’immeuble avait été admis au bénéfice de l’aLGL, de sorte que l’art. 1 RGL lui était applicable par analogie pour le calcul du nombre de pièces. Au sens de la législation sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation, il s’agissait d’un deux pièces (la chambre correspondant à une demi-pièce et le séjour-cuisine à une pièce et demie). Le fait que l’immeuble avait été construit dans les années 1970 ne constituait pas un motif de dérogation.

Le loyer annuel de CHF 15'288.- et la mention du quatrième étage figurant dans le préavis de l’instance LDTR constituaient de simples erreurs de plume et vu la note technique, c’était bien un montant annuel de CHF 7'836.- qui était fixé, ce qu’avait manifestement bien compris la fondation. Ce type d’irrégularité matérielle ne pouvait donner lieu qu’à rectification.

Si l’appartement devait être considéré comme un deux pièces et demie, c’était le fait de la fondation. Il ne ressortait pas des pièces produites que le DALE avait confirmé que l’appartement appartenait à cette catégorie. Les documents historiques ne comportaient aucune référence individualisée aux logements. Les états locatifs ne relevaient pas de la compétence du DALE. L’accord de principe du 24 avril 1974 n’avalisait pas le plan financier. La fondation n’avait pas apporté la preuve de l’assurance ou information du DALE quant à la comptabilisation des pièces ni des mesure prises sur lesquelles elle ne pouvait revenir sans dommage. Il n’y avait pas de violation du principe de la bonne foi.

La fondation n’avait pas même allégué le caractère insupportable des coûts de travaux sans majoration de loyer.

13) Par acte du 12 octobre 2016, la fondation a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation, à la constatation que les travaux n’étaient pas soumis à autorisation de construire, subsidiairement à la constatation que le logement était composé de deux pièces et demie et que le loyer annuel n’excéderait pas, après travaux, CHF 8'508.-, soit CHF 3'403.20 la pièce, ainsi qu’à l’allocation d’une équitable indemnité de procédure à titre de participation à ses frais d’avocat.

Elle a repris et complété l’argumentation formulée auparavant.

Une dérogation avait été accordée dès le départ par l’État, en toute connaissance de cause. Il ne pouvait être affirmé qu’il n’y avait pas de préjudice économique à supprimer a posteriori des pièces habitables, dont la valeur locative n’était assurément pas nulle.

14) Le 18 octobre 2016, le TAPI a transmis son dossier à la chambre administrative, sans formuler d’observations.

15) Par réponse du 17 novembre 2016, le DALE a conclu au rejet du recours, reprenant son argumentation précédente.

16) Par réplique du 9 janvier 2017, la fondation a persisté dans ses conclusions et argumentation.

17) Le 10 janvier 2017, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur la conformité au droit du jugement du TAPI en tant qu’il confirme, d’une part, la soumission à autorisation des travaux litigieux et, d’autre part, la fixation du nombre de pièces de l’appartement à deux, dont découle la fixation du loyer plafonné.

3) L’instance préalable a déclaré recevable le recours de la fondation, sans réserve.

a. L’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (art. 65 al. 1 LPA). L’acte de recours contient également l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. À défaut, la juridiction saisie impartit un bref délai au recourant pour satisfaire à ces exigences, sous peine d’irrecevabilité (art. 65 al. 2 LPA). La juridiction administrative applique le droit d’office et ne peut aller au-delà des conclusions des parties, sans pour autant être liée par les motifs invoqués (art. 69 al. 1 LPA).

b. Compte tenu du caractère peu formaliste de l’art. 65 LPA, il convient de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait que ces dernières ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est pas en soi un motif d’irrecevabilité, pourvu que le tribunal et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/552/2017 du 16 mai 2017 consid. 3b et les références citées). Une requête en annulation d’une décision doit, par exemple, être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a, de manière suffisante, manifesté son désaccord avec la décision, ainsi que sa volonté qu’elle ne développe pas d’effets juridiques (ATA/1331/2017 du 26 septembre 2017 consid. 2). Des conclusions conditionnelles sont en revanche irrecevables. Il en va de même des conclusions subsidiaires prises en dehors du délai de recours, pendant le cours de la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 8C_799/2011 du 20 juin 2012 consid. 6.2 ; ATA/247/2015 du 3 mars 2015 consid. 2).

  L’absence de conclusions ne peut être réparée que dans le délai de recours. Hors ce délai, le fait d’être autorisé à compléter une écriture de recours ne permet pas de suppléer le défaut de conclusions. Partant, des conclusions nouvelles prises au stade de la réplique sont irrecevables (ATA/860/2016 du 12 octobre 2016 consid. 3).

c. L’exigence de motivation de l’art. 65 al. 2 LPA a pour but de permettre à la juridiction administrative de déterminer l’objet du litige qui lui est soumis et de donner l’occasion à la partie intimée de répondre aux griefs formulés à son encontre. Elle signifie que le recourant doit expliquer en quoi et pourquoi il s’en prend à la décision litigieuse (ATA/1199/2017 du 22 août 2017 consid. 8d). L’exigence de la motivation est considérée comme remplie lorsque les motifs du recours, sans énoncer les conclusions formelles, permettent de comprendre aisément ce que le recourant désire (ATA/799/2016 du 27 septembre 2016 consid. 2c).

d. En l’espèce, la recourante, représentée par son avocate, a uniquement formulé, dans son acte de recours devant le TAPI, des conclusions en annulation de la condition no 4 de la décision de l’autorité intimée – selon laquelle les conditions du préavis de l’instance LDTR, et donc le loyer plafonné fixé par cette dernière en fonction du nombre de pièces retenu, faisaient partie intégrante de l’autorisation délivrée – ainsi qu’en fixation du loyer annuel plafonné à CHF 8'508.-, demandant pour le reste expressément la confirmation de l’autorisation concernée. S’agissant de la motivation de son recours, elle s’est contentée d’indiquer que les travaux étaient à la limite entre les travaux d’entretien non soumis à la LDTR et les travaux de rénovation assujettis, sans argumenter qu’il s’agirait uniquement de travaux d’entretien et qu’ils ne devraient pas être soumis à autorisation, pour ne fonder en définitive son argumentation que sur le fait que l’appartement serait constitué de deux pièces et demie, et non de deux pièces comme retenu par l’autorité intimée, et que le loyer annuel devrait dès lors être plafonné à CHF 8'508.-.

Les conclusions et argumentation de la recourante, telles que formulées dans son acte du recours du 7 mai 2015 – et d’ailleurs confirmées dans sa réplique du 21 août 2015 – ne remettaient ainsi pas en cause la soumission à autorisation des travaux, mais uniquement le nombre de pièces retenu et le loyer annuel plafonné fixé par l’instance LDTR. Le recours ne visait donc pas l’annulation de l’autorisation délivrée, mais uniquement celle de la condition no 4.

Les conclusions – principales – en annulation de l’autorisation et l’argumentation quant à l’absence de l’assujettissement à la LDTR des travaux ont ainsi uniquement été formulées par la recourante à la suite de l’audience du 12 avril 2016, dans ses observations complémentaires après enquêtes du 27 mai 2016, soit bien après l’échéance du délai de recours.

Ces conclusions étaient dès lors tardives, de sorte que l’instance précédente aurait dû les déclarer irrecevables.

Le jugement du TAPI sera par conséquent annulé en tant qu’il déclare recevables les conclusions en annulation de l’autorisation litigieuse et examine au fond la soumission à autorisation des travaux, et lesdites conclusions seront déclarées irrecevables.

4) Il reste à examiner si l’appartement doit être considéré comme un deux pièces et demie, comme l’affirme la recourante, ou comme un deux pièces, ainsi que l’ont retenu l’autorité intimée puis le TAPI.

5) La recourante affirme que les règles du RGL ne pourraient pas trouver application pour la détermination du nombre de pièces de l’appartement aux fins de fixer le loyer en application de la LDTR.

a. Selon l’art. 52 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), toute pièce pouvant servir à l’habitation doit avoir en principe 9 m2, mais au minimum 6 m2 de surface (al. 1). Elle doit être aérée et éclairée par un jour vertical ouvrant sur l’extérieur (al. 2).

b. L’art. 1 RGL définit la façon de calculer le nombre de pièces des logements soumis à la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977 (LGL - I 4 05), sauf des logements d’utilité publique.

De jurisprudence déjà ancienne et constante, appliquée également dans des cas d’immeubles anciens (ATA/645/2012 du 25 septembre 2012 consid. 7, concernant un immeuble construit en 1964-1965 ; ATA/567/2005 du 16 août 2005 consid. 21, relatif à un immeuble datant de 1962), la chambre de céans a toujours considéré qu’il était possible d’appliquer la disposition précitée, par analogie, au calcul du nombre de pièces selon la LDTR, les buts poursuivis par la LDTR et la LGL relevant d’un même souci de préserver l’habitat et de lutter contre la pénurie de logements à Genève (ATA/334/2014 du 13 mai 2014 consid. 7c ; ATA/641/2013 du 1er octobre 2013 consid. 5c ; ATA/826/2012 du 11 décembre 2012 consid. 4c ; ATA/322/2008 du 17 juin 2008 consid. 3).

Cette jurisprudence a été confirmée par le Tribunal fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 1C_323/2014 du 10 octobre 2014 consid. 7.2) et a encore été appliquée dans des arrêts récents de la chambre de céans dans des cas d’immeubles construits respectivement en 1898 (ATA/673/2017 du 20 juin 2017 consid. 3 et 4) et 1974 (ATA/1097/2017 du 18 juillet 2017 consid. 3)

c. Pour calculer le nombre de pièces au sens de la LDTR, il faut ainsi se référer à l’art. 1 RGL, selon lequel toute chambre d’une surface inférieure à 9 m2 compte pour une demi-pièce (art. 1 al. 5 let. a RGL). En outre, selon l’art. 1 al. 5 let. c RGL, si l’espace communautaire qui regroupe le séjour, le coin à manger et la cuisine est égal ou supérieur à 25 m2 (art. 1 al. 6 RGL), il compte pour deux pièces. S’il est inférieur à cette surface, il compte pour une pièce et demie. Des dérogations ne peuvent être accordées que pour des immeubles existants transformés ou rénovés (art. 1 al. 8 RGL).

d. En l’espèce, contrairement à ce qu’affirme la recourante, le fait que l’immeuble ait été construit dans les années 1970, soit avant l’entrée en vigueur tant de la LDTR que du RGL, n’empêche aucunement l’application analogique de l’art. 1 RGL, conformément à la jurisprudence susmentionnée.

Or, l’appartement est composé d’une chambre de 8,25 m2, d’une cuisine d’une surface inférieure à 6 m2, constituant simplement un laboratoire où il n’est pas possible de manger et ne pouvant être considérée comme une pièce, mais qui forme, avec le séjour et le hall, un espace communautaire d’une surface totale de 23,84 m2 (16,54 m2 + 4 m2 + 3,3 m2, selon les chiffres communiqués par la recourante elle-même). Ainsi, la chambre, d’une surface inférieure à 9 m2, compte pour une demi-pièce et la surface communautaire, inférieure à 25 m2, pour une pièce et demie.

Le logement comporte par conséquent deux pièces, comme l’ont à juste titre retenu l’autorité intimée puis le TAPI.

6) La recourante affirme toutefois que l’appartement devrait tout de même être considéré comme un deux pièces et demie en application du principe de la bonne foi.

a. Valant pour l’ensemble de l’activité étatique, le principe de la bonne foi, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), exige que l’administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l’administration doit s’abstenir de toute attitude propre à tromper l’administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d’une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; 129 I 161 consid. 4 ; 129 II 361 consid. 7.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_18/2015 du 22 mai 2015 consid. 3 ; 2C_970/2014 du 24 avril 2015 consid. 3.1).

b. Le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2 ; 137 I 69 consid. 2.5.1 ; 131 II 627 consid. 6.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_151/2012 du 5 juillet 2012 consid. 4.2.1 ; 2C_1023/2011 du 10 mai 2012 consid. 5). Conformément au principe de la confiance, qui s’applique aux procédures administratives, les décisions, déclarations et comportements de l’administration doivent recevoir le sens que l’administré pouvait raisonnablement leur attribuer en fonction des circonstances qu’il connaissait ou aurait dû connaître (arrêt du Tribunal fédéral 2P.170/2004 du 14 octobre 2004 consid. 2.2.1 in RDAF 2005 I 71 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, n. 569 s. p. 193). Le principe de la confiance est toutefois un élément à prendre en considération et non un facteur donnant en tant que tel naissance à un droit (Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 569 p. 193 et les références citées). La protection de la bonne foi ne s’applique pas si l’intéressé connaissait l’inexactitude de l’indication ou aurait pu la connaître en consultant simplement les dispositions légales pertinentes (ATF 135 III 489 consid. 4.4 ; 134 I 199 consid. 1.3.1).

c. Selon la jurisprudence, les assurances ou les renseignements erronés donnés par les autorités confèrent des droits aux justiciables lorsque les cinq conditions cumulatives suivantes sont remplies. Tout d’abord, une promesse concrète doit avoir été émise à l’égard d’une personne déterminée. Il faut ensuite que l’autorité ait agi dans le cadre et dans les limites de sa compétence, que la personne concernée n’ait pas été en mesure de se rendre compte immédiatement de l’inexactitude du renseignement fourni, qu’elle se soit fondée sur ce renseignement pour prendre des dispositions qu’elle ne peut ensuite modifier sans subir de préjudice et, enfin, que la loi n’ait pas subi de changement depuis le moment où la promesse a été faite (ATF 141 V 530 consid. 6.2 ; ATA/17/2017 du 10 janvier 2017 consid. 9 et les références citées).

d. En l’espèce, la recourante se fonde sur des documents datant des années 1970 – plan financier provisoire du 31 décembre 1973, accord de principe du 24 avril 1974, courrier à l’OLCPF du 30 janvier 1976 avec son plan de location du même jour annexé, plan financier de mise en location provisoire du 30 janvier 1976, arrêté du Conseil d’État fixant l’état locatif du 25 février 1976, courriers de mise en location de l’appartement des 13 décembre 1978 et 8 janvier 1979, états locatifs nominatifs de l’immeuble des 17 février 1976, 20 août 1976 et 31 mai 1978 – destinés à établir que l’autorité intimée aurait depuis toujours considéré l’appartement comme un deux pièces et demie.

Il ne ressort cependant aucunement des différentes pièces produites que la recourante aurait reçu l’assurance de l’autorité intimée que l’appartement serait toujours considéré comme un deux pièces et demie, y compris dans le cadre d’une éventuelle rénovation. À cela s’ajoute le fait qu’une simple lecture du RGL aurait permis à la recourante de savoir que l’appartement ne pouvait actuellement être considéré comme un deux pièces et demie, ce qui semblait d’ailleurs déjà être le cas en 1976, vu la mention figurant dans le plan de location du 30 janvier 1976, selon laquelle les appartements de deux pièces et demie au nord étaient « compté[s] comme deux pièces selon le nouveau règlement ».

Au surplus, il sera relevé que la réglementation a changé depuis les années 1970, puisque la LDTR a été adoptée en 1996 et le RGL en 1992. Il sera à cet égard rappelé que la jurisprudence admet, d’une façon générale, qu’une demande d’autorisation de bâtir déposée sous l’empire du droit ancien est examinée en fonction des dispositions en vigueur au moment où l’autorité statue sur la demande, même si aucune disposition légale ou règlementaire ne le prévoit ; les particuliers doivent en effet toujours s’attendre à un changement de réglementation (ATF 101 Ib 297 consid. 2b ; ATA/673/2017 précité consid. 9b).

Au vu de ce qui précède, la recourante ne peut se prévaloir du principe de la bonne foi pour demander que l’appartement soit considéré comme un deux pièces et demie, comme l’a à juste titre constaté le TAPI.

Le recours est par conséquent mal fondé et sera rejeté en tant qu’il demande l’annulation de la condition no 4 de l’autorisation de l’intimée.

7) Dans ces circonstances, le recours sera partiellement admis. Le jugement du TAPI sera annulé en tant qu’il déclare recevables les conclusions en annulation de l’autorisation formulées au stade des observations finales après enquêtes, lesquelles seront déclarées irrecevables. Le jugement du TAPI sera confirmé pour le surplus.

8) Vu l’issue du litige et dans la mesure où l’admission partielle du recours découle exclusivement de l’irrecevabilité d’une partie des conclusions de la recourante devant le TAPI, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de cette dernière (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 12 octobre 2016 par la Fondation de la commune de Chêne-Bourg pour le logement contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 septembre 2016 ;

au fond :

l’admet partiellement ;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 septembre 2016 en tant qu’il déclare recevables les conclusions en annulation de la décision du 20 mars 2015 formulées par la Fondation de la commune de Chêne-Bourg pour le logement devant le Tribunal administratif de première instance dans ses écritures du 27 mai 2016 ;

déclare irrecevables les conclusions en annulation de la décision du 20 mars 2015 formulées par la Fondation de la commune de Chêne-Bourg pour le logement devant le Tribunal administratif de première instance dans ses écritures du 27 mai 2016 ;

confirme le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 septembre 2016 pour le surplus ;

met à la charge de la Fondation de la commune de Chêne-Bourg pour le logement un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Nathalie Thürler, avocate de la recourante, au département de l'aménagement, du logement et de l'énergie, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mmes Krauskopf et Junod, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

K. De Lucia

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :