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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4228/2015

ATA/552/2017 du 16.05.2017 ( AIDSO ) , REJETE

Descripteurs : COMPÉTENCE ; CONDITION DE RECEVABILITÉ ; PRESTATION D'ASSISTANCE ; RESTITUTION(EN GÉNÉRAL) ; REMISE DE LA PRESTATION ; PRINCIPE DE LA BONNE FOI
Normes : LPA.65; LIASI.1; LIASI.2; LIASI.3; LIASI.8; LIASI.9; LIASI.36; LIASI.42; LIASI.50; LIASI.51; LIASI.52; LIASI.53; RIASI.22
Résumé : La bonne foi et les difficultés financières ne sont pas des arguments pertinents pour contester la décision de remboursement. Ces arguments doivent être analysés dans un second temps, soit dans le cadre d'une procédure de remise éventuelle des prestations.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4228/2015-AIDSO ATA/552/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 16 mai 2017

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES



EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______1988, a sollicité, le 21 novembre 2013, des prestations complémentaires familiales (ci-après : PCFam) auprès du service des prestations complémentaires (ci-après : SPC).

Il était marié avec Madame B______. Ils avaient deux enfants, nés respectivement en 2007 et 2012.

2) Par décision du 17 janvier 2014, le SPC a octroyé des PCFam, subsides d’assurance maladie compris, à hauteur de CHF 2'498.- pour le mois de décembre 2013, et CHF 2'562.- mensuels à compter de janvier 2014.

Par décision du même jour, le SPC a dénié à M. A______ un droit à des prestations d’aide sociale.

3) Par décision du 23 juin 2014, le SPC a constaté que M. A______ n’avait plus droit, à compter du 31 mai 2014, aux PCFam. Lorsque le groupe familial comprenait deux personnes adultes, celles-ci devaient exercer une activité lucrative dont le taux s’élevait au minimum à 90% par année. La condition n’était plus remplie.

Par décision du même jour, le SPC a accordé à l’intéressé, à compter du 1er juin 2014 des prestations d’aide sociale mensuelles de CHF 3'710.- auxquelles s’ajoutaient CHF 380.- de subside d’assurance maladie.

4) Par décision du 7 juillet 2014 du SPC, les prestations mensuelles au titre de l’aide sociale et de subsides d’assurance maladie ont été modifiées à CHF 3’716.- pour juin et juillet 2014, puis à CHF 3'395.- à compter du 1er septembre 2014, selon décision du 21 août 2014.

5) Par décision du 15 octobre 2014, le SPC a recalculé le droit aux prestations.

Il en résultait un solde en faveur dudit service de CHF 5'335.- (CHF 3'336.- + CHF 1'999.-). La différence provenait essentiellement du mois d’août 2014. L’usager avait droit à CHF 380.-, alors qu’il avait perçu CHF 3'716.- (soit un trop perçu de CHF 3'336.-). Au mois de septembre 2014, il avait perçu CHF 3'395.- alors qu’il avait droit à CHF 1'396.- (soit un trop perçu de 1'999.-).

Il ressortait du plan de calcul annexé à la décision un montant de CHF 24'732.60 au titre de « gain d’activité lucrative ». La note explicative y relative de bas de page faisait référence à Mme B______. Le montant était pris en compte à 100%. Pour le mois de septembre, le montant était de CHF 16'993.20. Dès le mois d’octobre 2014, il n’était plus fait mention d’un tel gain.

6) Le 28 octobre 2014, M. A______ a fait opposition à la décision du 15 octobre 2014. Il n’avait pas les moyens de rembourser ladite somme. Il n’avait aucun autre revenu et se trouvait dans l’incapacité de travailler depuis le 22 juillet 2014 à la suite d’un accident de voiture, déjà signalé au SPC.

Son épouse avait commencé à travailler de façon temporaire à fin juillet 2014. Elle n’avait pas de contrat et se trouvait à l’essai. Elle n’avait obtenu un document qu’à la fin du mois de septembre. Il sollicitait une révision de la décision, estimant avoir déposé tous les justificatifs dans les délais fixés par le SPC, à l’exception du contrat de travail de son épouse, non disponible à l’époque.

7) Par décision du 5 novembre 2014, le SPC a informé l’intéressé que la compétence du service, pour le versement des prestations d’aide sociale, ne pouvait excéder les six mois à compter de la notification d’une décision mettant fin aux PCFam. Ce délai étant échu le 30 novembre 2014, il devait supprimer le versement des prestations d’aide sociale et subsides d’assurance maladie dès cette date. L’intéressé pouvait s’adresser au centre d’action sociale de son quartier.

8) Par décision du 9 février 2015, le service juridique du SPC a rejeté l’opposition de M. A______. Il avait révisé le calcul de la prestation en tenant compte du gain d’activité temporaire de l’épouse du 1er août au 30 septembre 2014. Elle avait perçu CHF 2'061.05 nets en août et CHF 1'416.10 nets en septembre. Le service avait également pris en compte l’allocation pour perte de gain perçue durant la période du cours de répétition du 18 août au 5 septembre 2014.

L’examen des conditions de la remise de l’obligation de rembourser le montant réclamé serait effectué dès l’entrée en force de la décision contestée.

9) Par acte du 23 février 2015, M. A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

Il avait communiqué tous les éléments au SPC afin d’éviter le remboursement de la somme de CHF 5'335.-.

Il n’avait pas les moyens de rembourser ce montant, étant au bénéfice de l’Hospice général (ci-après : l’hospice) et sans autre revenu. Il était toujours en incapacité de travail à la suite de l’accident du 22 juillet 2014. Son épouse avait été licenciée le 29 octobre 2014, sans préavis ni délai de congé, avant la fin des trois mois d’essai, pour des raisons inexpliquées par l’entreprise de nettoyage. Elle avait mandaté un syndicat.

Le SPC avait continué à verser des prestations alors même qu’il était déjà en possession de tous les justificatifs qui auraient nécessité la modification du droit aux prestations.

Le recourant citait l’art. 25 al. 1 de la loi sur la restitution (sic) selon lequel les prestations indûment touchées devaient être restituées. La restitution ne pouvait être exigée lorsque l’intéressé était de bonne foi et qu’elle le mettrait dans une situation difficile.

Il avait fait preuve de bonne foi en donnant tous les éléments nécessaires pour éviter de devenir débiteur des assurances sociales, d’autant plus à la suite de son incapacité de travail durable. « Je vous demande SVP d’être indulgent envers nous et de revoir votre décision de restitution car nous sommes une famille en très grande difficulté depuis j’ai eu mon accident de voiture ».

10) Par réponse du 26 mars 2015, le SPC a conclu au rejet du recours.

L’objet du litige portait sur la réalisation des conditions cumulatives de la remise de l’obligation de rembourser le montant de CHF 5'335.-, réclamé en restitution par la décision litigieuse. L’examen des conditions de la remise supposait l’entrée en force préalable de la décision contestée. Le SPC réservait en l’état sa position concernant le grief soulevé par le recourant dans son recours, lequel était prématuré.

11) Par arrêt du 11 août 2015 (ATA/818/2015), la chambre administrative a admis le recours, annulé la décision du 9 février 2015 et ordonné au SPC de rendre une nouvelle décision au sens des considérants.

L’analyse de la demande de remise devait être effectuée dans un second temps et n’était pas déterminante dans le cadre de la fixation du montant que M. A______ aurait perçu à tort. Or, le précité n’émettait aucun grief à l’encontre des calculs aboutissant à la somme de CHF 5'335.- réclamée au titre de trop perçu pour les mois d’août et septembre 2014.

La chambre de céans a toutefois annulé la décision parce qu’elle avait été rendue par le service juridique du SPC et non par sa direction qui était l’autorité compétente. La décision était de surcroît insuffisamment motivée et se référait à des lois fédérales inapplicables au cas d’espèce.

12) Par nouvelle décision sur opposition du 3 décembre 2015, la directrice du SPC a rejeté l’opposition de M. A______ et confirmé la décision du 15 octobre 2014.

Elle mentionnait diverses dispositions de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04) et du règlement d'exécution de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01).

Elle reprenait l’argumentation figurant dans sa décision sur opposition du 9 février 2015.

13) Par acte du 4 décembre 2015, M. A______ a interjeté recours à l’encontre de cette nouvelle décision devant la chambre administrative.

Il n’avait toujours pas les moyens de rembourser le montant réclamé et demandait implicitement la remise des prestations d’aide financière.

Il a repris en substance l’argumentation de son recours du 23 février 2015.

14) Par réponse du 21 décembre 2015, le SPC a conclu au rejet du recours et transmis son dossier à la chambre de céans.

Il relevait que l’examen des conditions de la remise supposait l’entrée en force préalable de la décision contestée et reprenait ses explications figurant dans ses observations du 26 mars 2015.

15) Par courrier du 23 décembre 2015, M. A______ a été informé que toutes les pièces pouvaient être consultées auprès du greffe de la chambre de céans, sur demande préalable.

16) Sans nouvelle du recourant et par courriers du 8 février 2017, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur la décision sur opposition prononcée par le SPC exigeant la restitution des prestations perçues indûment au titre d’aide sociale et subside d’assurance maladie pour un montant de CHF 5'335.- pour les mois d’août et septembre 2014.

3) a. L’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (art. 65 al. 1 LPA).
L’art. 65 al. 2 LPA exige que cet acte contienne l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. À défaut, un bref délai pour satisfaire à ces dernières exigences est fixé au recourant, sous peine d’irrecevabilité (
ATA/171/2014 du 18 mars 2014).

b. Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, il convient de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait que ces dernières ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est pas en soi un motif d’irrecevabilité, pourvu que la chambre administrative et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/171/2014 précité ; ATA/401/2013 du 25 juin 2013 ; ATA/102/2012 du 21 février 2012 ; ATA/1/2007 du 9 janvier 2007 ; ATA/118/2006 du 7 mars 2006 ; ATA/775/2005 du 15 novembre 2005 et la jurisprudence citée).

c. L’exigence de motivation de l’art. 65 al. 2 LPA a pour but de permettre à la juridiction administrative de déterminer l’objet du litige qui lui est soumis et de donner l’occasion à la partie intimée de répondre aux griefs formulés à son encontre (ATA/401/2013 précité ; ATA/102/2012 précité ; ATA/1/2007 précité ; ATA/775/2005 précité ; ATA/179/2001 du 13 mars 2001). Elle signifie que le recourant doit expliquer en quoi et pourquoi il s’en prend à la décision litigieuse (ATA/171/2014 précité ; ATA/102/2012 précité ; ATA/23/2006 du 17 janvier 2006).

d. En l’espèce, l’acte du recourant permet de comprendre que celui-ci demande l’annulation de la décision sur opposition attaquée, faute de moyens financiers pour s’acquitter des montants réclamés par le SPC et eu égard à sa bonne foi. Il comporte une motivation suffisante, d’autant plus que l’intéressé agit en personne.

Le recours est par conséquent recevable.

4) La juridiction administrative chargée de statuer est liée par les conclusions des parties. Elle n’est en revanche pas liée par les motifs que les parties invoquent (art. 69 al. 1 LPA).

5) La LIASI a pour but de prévenir l’exclusion sociale et d’aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1).

Les prestations de l’aide sociale individuelle sont l’accompagnement social, des prestations financières et l’insertion professionnelle (art. 2 LIASI).

6) L’hospice est l'organe d'exécution de la LIASI sous la surveillance du département de l'emploi, des affaires sociales et de la santé (ci-après : le département ; art. 3 al. 1 LIASI).

Le SPC gère et verse les prestations d'aide sociale notamment pour les personnes au bénéfice de PCFam (art. 3 al. 2 let. c LIASI).

Le SPC reçoit et instruit les demandes de prestations visées par l'art. 3 al. 2 LIASI, procède aux calculs, rend les décisions et verse les prestations. Le versement de ces prestations émarge à son propre budget (art. 22 al. 1 RIASI).

Les art. 50 à 53 de la LIASI sont applicables par analogie aux décisions du SPC (art. 22 al. 3 RIASI).

7) La personne majeure qui n’est pas en mesure de subvenir à son entretien ou à celui des membres de la famille dont elle a la charge a droit à des prestations d’aide financière. Celles-ci ne sont pas remboursables sous réserve notamment de la perception indue des prestations (art. 8 al. 1 et 2 LIASI).

Les prestations d’aide financière sont subsidiaires à toute autre source de revenu (art. 9 al. 1 LIASI).

8) Selon l’art. 36 LIASI, est considérée comme étant perçue indûment toute prestation qui a été touchée sans droit (al. 1). Par décision écrite, l’hospice réclame au bénéficiaire, à sa succession ou à ses héritiers qui l'ont acceptée, le remboursement de toute prestation d'aide financière perçue indûment par la suite de la négligence ou de la faute du bénéficiaire (al. 2). Le remboursement des prestations indûment touchées peut être réclamé si le bénéficiaire, sans avoir commis de faute ou de négligence, n'est pas de bonne foi (al. 3).

En l’occurrence, la décision litigieuse porte sur le remboursement de la somme de CHF 5'335.- correspondant au trop perçu par le recourant durant les mois d’août et septembre 2014.

Le recourant n’émet aucun grief à l’encontre des calculs du SPC qui le conduisent à réclamer cette somme. Il indique uniquement avoir transmis tous les documents nécessaires sans retard et invoque sa bonne foi.

Ces éléments ne sont toutefois pas déterminants dans le cadre de la fixation du montant que le recourant aurait perçu à tort, conformément à la jurisprudence de la chambre de céans, mais devront être analysés par le SPC dans un second temps, dans le cadre d’une éventuelle remise au sens de l’art. 42 LIASI (ATA/609/2015 du 11 août 2015 ; ATA/167/2014 du 18 mars 2014).

Par ailleurs, bien que la décision attaquée soit sommairement motivée, elle est compréhensible et se réfère en partie aux dispositions légales pertinentes. La somme de CHF 5'335.- réclamée n’est pas explicitement mentionnée dans la décision sur opposition mais ressort clairement du tableau figurant dans la décision du 15 octobre 2014. La décision entreprise semble ainsi suffisamment motivée. Elle est signée par la directrice du SPC, soit l’autorité compétente (art. 3 al. 2 let. c, 51 al. 1 et 52 LIASI et 22 al. 3 RIASI ; ATA/818/2015 précité).

Vu ce qui précède, aucun vice n’affecte la décision attaquée qui n’est pas contestable sur le fond.

9) L’art. 42 LIASI prévoit que le bénéficiaire qui était de bonne foi n'est tenu au remboursement, total ou partiel, que dans la mesure où il ne serait pas mis, de ce fait, dans une situation difficile. Dans ce cas, il doit formuler par écrit une demande de remise dans un délai de 30 jours dès la notification de la demande de remboursement. Cette demande de remise est adressée à l’hospice.

En l’espèce, le recourant a régulièrement formulé une demande de remise dans le dans le délai imparti par l’art. 42 LIASI.

Le SPC sera donc tenu de rendre une décision régulièrement motivée sur sa demande de remise, une fois la décision de remboursement devenue définitive.

10) Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.

Il ne sera pas perçu d’émolument en raison de la nature du litige (art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée au recourant, qui succombe (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 5 décembre 2015 par Monsieur A______ contre la décision sur opposition de la directrice du service des prestations complémentaires du 3 décembre 2015 ;

 

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, ainsi qu'au service des prestations complémentaires.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :