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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/41/2015

ATA/1185/2017 du 22.08.2017 sur JTAPI/166/2016 ( LCI ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 16.10.2017, rendu le 07.03.2019, ADMIS, 1C_568/2017
Descripteurs : ZONE DE DÉVELOPPEMENT ; CONFORMITÉ À LA ZONE ; PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT ; AIR ; RAPPORT D'IMPACT SUR L'ENVIRONNEMENT ; CONSTRUCTION ET INSTALLATION ; POLLUTION
Normes : Cst.29.al2; LaLAT.19.al4; LZIAM.4; LaLAT.13B.al2; LPE.10.al2; LPE.10.al3; LPE.10.al4; OPair.41.annexe1; OPair.43.annexe1; OEIE.5.al2; ROEIE.13; ROEIE.15; ROEIE.9; LPA.68
Parties : RAMPINI & CIE SA / DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE-OAC, DÉPARTEMENT DE L'ENVIRONNEMENT, DES TRANSPORTS ET DE L'AGRICULTURE - GESDEC, GRADEG SA
Résumé : Application des normes de la zone primaire, soit celle industrielle et artisanale, à des parcelles sises en zone de développement industriel et artisanal. Les autorisations de construire et d'exploiter un site de recyclage de matériaux minéraux sont conformes à la loi, dans la mesure où le rapport d'impact est complet et qu'aucun élément ne permet de remettre en doute la pertinence des avis donnés par les autorités spécialisées consultées par le département.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/41/2015-LCI ATA/1185/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 22 août 2017

3ème section

 

dans la cause

 

RAMPINI & CIE SA
représentée par Me Mark Saporta, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'ENVIRONNEMENT, DES TRANSPORTS ET DE L'AGRICULTURE - GESDEC

et

GRADEG SA
représentée par Me Tobias Zellweger, avocat

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 février 2016 (JTAPI/166/2016)


EN FAIT

1) Gradeg SA (ci-après : Gradeg), sise 64, route du Nant-d'Avril à Meyrin, est active dans l'exploitation, le traitement, le transport et la vente de graviers et de sables ainsi que de tous autres matériaux de construction.

2) a. Depuis 1983, elle recycle des déchets de chantier minéraux sur les parcelles nos 12'047, 12'048 et 13'461, feuilles 26 et 38 de la commune de Meyrin.

La parcelle n° 13'461 appartient à l'État de Genève et Madame Corinne JUTZET est propriétaire des parcelles nos 12'047 et 12'048.

À l'origine, la parcelle n° 13'461 était sise en zone agricole avant d'être classée, en 1969, en zone de développement industriel et artisanal.

Quant aux parcelles nos 12'047 et 1'2048, elles étaient, à l'origine, en zone industrielle et artisanale. Depuis l'adoption, le 24 septembre 2010, par le Grand Conseil de la loi 10'655 modifiant les limites de zones sur le territoire des communes de Meyrin et de Vernier (création de deux zones de développement industriel et artisanal) dans le périmètre de la zone industrielle des Batailles
(ci-après : ZIBAT), ces parcelles sont sises en zone de développement industriel et artisanal.

b. Selon l'exposé des motifs relatif au projet de loi 10'655, le secteur de la ZIBAT était déjà largement occupé par des équipements et des constructions à vocation industrielle. Il était souhaitable de pouvoir disposer d'un plan directeur au sens de la loi générale sur les zones de développement industriel du 13 décembre 1984, devenue depuis lors la loi sur les zones de développement industriel ou d'activités mixtes (LZIAM – L 145), permettant d'assurer une valorisation et un développement rationnel et cohérent de ce périmètre. Il s'agissait dans ce secteur d'optimiser l'occupation du sol et d'utiliser au mieux les terrains concernés tout en favorisant les espaces verts. L'objectif était de requalifier les différentes parties de la zone, facilitant ainsi l'implantation d'activités à emploi denses dans les secteurs bien desservis par les transports publics. Par ailleurs, l'ensemble du périmètre était très fortement exposé aux nuisances sonores de l'aéroport, à celles liées au trafic ferroviaire et routier dues à la route de Meyrin et à la route du Nant-d'Avril. Seul un degré de sensibilité IV pouvait être assigné à ce secteur.

Dans le chapitre description du périmètre, il était indiqué que la ZIBAT était alors destinée à des activités industrielles, artisanales et de distribution en gros. On y distinguait cependant différents secteurs constructibles. Les secteurs qui offraient un potentiel permettant de développer des activités à forte densité d'emplois étaient situés à l'est et à l'ouest du périmètre, le long de la rue Lect et des chemins des Coquelicots et de la Croisette, à faible distance des principaux arrêts de transports publics. Les secteurs qui se situaient au sud de l'emprise ferroviaire offraient la possibilité pour les entreprises de se connecter au réseau ferroviaire ou d'établir des plates-formes d'échanges rail-route. Les secteurs centraux qui se trouvaient sous l'axe de la piste de l'aéroport subissaient les contraintes du « plafond aérien » du plan des zones de sécurité de l'aéroport. En complément des activités industrielles et artisanales, quelques édifices assuraient principalement des services de restauration.

3) La société Rampini & Cie SA (ci-après : Rampini), ayant son siège au 59, route du Nant-d'Avril, a pour but social l'exploitation d'une entreprise générale de travaux du bâtiment et du génie civil, l'achat et la vente de biens immobiliers ainsi que des participations à des opérations immobilières. Elle est propriétaire de la parcelle n° 4'399, feuille 52, de la commune de Vernier, sur laquelle elle stocke des containeurs et d'autres matériaux et exploite des bureaux et ateliers mécaniques dans lesquels travaillent soixante-cinq personnes.

La parcelle appartenant à Rampini est séparée de celles occupées par Gradeg par la route du Nant-d' Avril, soit un axe de transit du réseau primaire genevois.

4) Rampini se plaint depuis plusieurs années des nuisances qu'elle subit en raison de l'activité de Gradeg, en particulier des émissions de poussières.

5) Le 21 février 2011, Gradeg, alors au bénéfice d'une autorisation d'exploiter délivrée le 3 février 2006, pour une durée de cinq ans, renouvelable de cinq ans en cinq ans, a déposé une demande de renouvellement d'autorisation (n° 11-176) auprès du service de géologie, sol et déchets (ci-après : GESDEC) visant la continuation de l'exploitation de l'installation en place depuis 1983.

6) Le 16 avril 2012, elle a versé auprès d'un établissement bancaire une caution de CHF 30'000.- comme garantie financière dans le cadre de sa demande d'autorisation.

7) a. Le 20 novembre 2013, Gradeg a déposé une requête en autorisation d'exploiter (n° 14-200) et une demande d'autorisation de construire (DD 106'531) en vue de requérir le renouvellement de l'autorisation d'exploiter pour une nouvelle installation d'élimination des déchets plus performante.

Le réaménagement du site devait permettre une optimisation des flux de véhicules et de matériaux concernés ainsi qu'une atténuation des nuisances atmosphériques liées à l'activité du site. Il devait permettre également d'atténuer la potentielle surcharge du réseau d'assainissement collectif et de prévenir une pollution potentielle des eaux de surface et souterraines par la mise en place d'un bassin de décantation.

L'installation prévue était un concasseur de type GIPOKOMBI RC 130 FDR d'une puissance de 433 W, d'un poids de 73 t. Son rendement pouvait aller jusqu'à 450 t/h de produits finis et possédait les dimensions suivantes : 3,4 m de largeur, 22 m de longueur et 3,5 m de hauteur.

Les activités connexes au concassage seraient effectuées par une chargeuse et une pelle hydraulique.

Les déchets visés par la requête étaient des déchets de chantier : matériaux bitumeux, non bitumeux et béton de démolition. La capacité nominale de traitement annuel de l'installation serait de 150'000 t, tous déchets confondus.

Les éléments constitutifs de l'exploitation comprendraient une piste de roulement, une zone de déchargement, une zone de stockage des produits à recycler, une zone de travail, deux bennes déchets pour la ferraille et les indésirables, une zone de stockage des produits finis, une zone de chargement, un bassin de décantation des eaux de ruissellement, un laveur de roues, un bureau et un réfectoire/sanitaire. S'ajoutaient à cela les éléments mobiles de l'installation soit le concasseur, la pelle hydraulique, la chargeuse sur pneus, les camionnettes et les camions.

b. Gradeg a produit avec sa requête un rapport d'étude d'impact sur l'environnement (ci-après : REIE) réalisé par Écoservices SA en novembre 2013. Ce rapport, complété en août 2014, procédait à une évaluation des incidences du projet. Il détaillait les matériaux utilisés ainsi que les étapes du processus de transformation des matériaux.

S'agissant de l'impact de l'installation sur l'air, le rapport décrivait l'état initial (2013), à savoir les conditions locales et le niveau de pollution, et expose également les émissions atmosphériques spécifiques au site d'exploitation de Gradeg, distinguant les sources d'émissions de polluants atmosphériques tels que les engins, le trafic de véhicules généré, le concassage et le dégagement de poussières corrélées. Sur ce dernier point, il décrivait le plan d'assainissement mis en place par Gradeg intégrant des mesures au niveau du concasseur ainsi que lors du déversement des matériaux et de la circulation des véhicules : un dépoussiéreur, qui collectait les poussières consécutivement au traitement et conformément aux mesures préconisées par l'ordonnance sur la protection de l’air du 16 décembre 1985 (OPair - RS 814.318.142.1), était actif sur l'installation ; un arrosage sur le tapis conducteur des produits finis était également en place depuis 1999 ; les zones à fort dégagement de poussières étaient arrosées jusqu'à six fois par jour en cas de besoin ; les divers accès étaient aspergés régulièrement ; des précautions de manipulation en cas de fortes bises avaient également été mises en place et la vidange du silo à poussières était effectuée par temps de pluie par une entreprise spécialisée.

Après avoir évoqué l'état futur sans projet (2015), le rapport décrivait l'état futur avec projet selon les sources d'émissions de polluants, telles que le trafic généré par les véhicules de Gradeg et les clients, le déversement des matériaux et leur stockage sur le site, le concassage, la manipulation et le stockage des granulats par les engins (chargeuse, pelle hydraulique et concasseur).

Il évaluait en particulier les émissions annuelles de particules fines (PM10) ainsi que les émissions de dioxyde d'azote (NOx) produites par les machines pour conclure qu'elles n'auraient pas d'influence significative sur la qualité de l'air, ces engins étant par ailleurs équipés à l'origine d'un filtre à particules.

La hauteur de déversement des matériaux arrivant sur le site serait de 3 m au maximum, entre la zone de déchargement et la zone de stockage des matériaux entrants. Les stocks de matériaux ainsi que la zone de déchargement seraient équipés d'un système automatique d'abattement des poussières par aspersion. Le machiniste serait responsable d'humidifier les matériaux lors de leur déchargement sur le site afin de limiter les émissions de poussières lors de cette opération. Une conduite périphérique serait mise en place le long de la piste de roulement pour permettre l'arrosage du site. Un système d'humidification serait également installé sur la zone de stockage des produits finis, alimenté via la conduite périphérique et actionné par le machiniste.

Concernant l'activité même de recyclage des matériaux de démolition, le rapport relevait que les dégagements de poussières étaient dus tant aux opérations de concassage qu'aux déversements des matériaux et aux déplacements des poids-lourds. Afin de répondre aux nuisances provoquées par les dégagements de poussières, des mesures d'abattement étaient prévues à toutes les étapes du traitement des matériaux. Le nouveau concasseur intégrerait un système de réduction par humidification lors des étapes de concassage, de criblage et de concassage secondaire. En vue de réduire les dégagements de poussières liés aux déplacements des camions, le nouveau site prévoyait une piste de roulement en revêtement étanche. Une conduite périphérique permettant l'humidification de la voie de circulation en cas de besoin serait construite le long de la piste. Par ailleurs, une bâche protectrice d'une hauteur de 2 m sera élevée sur le périmètre du site, le long de la route du Nant-d'Avril et du chemin d'accès. Finalement, des mesures de précautions seraient prises par les employés de Gradeg, particulièrement en cas de forte bise ou par temps sec, c'est-à-dire qu'ils veilleraient à limiter les hauteurs de chute et la manipulation des matériaux. Au vu des équipements prévus et de la prise en compte de la problématique dans la gestion de la nouvelle installation, les dégagements de poussières et, in fine l'impact sur la qualité de l'air, étaient considérés comme maîtrisés.

Le rapport mentionnait enfin les impacts de la phase de réalisation (chantier).

c. Gradeg a également transmis au département de l'environnement, des transports et de l'agriculture (ci-après : DETA) un règlement d'exploitation de son unité mobile de concassage de matériaux de démolition, qui précisait toutes les caractéristiques de l'installation, les types de matériaux, de déchets de chantier minéraux traités, une liste des produits issus du traitement effectué, les capacités en termes de volumes journalier et annuel, les procédures de contrôle des matériaux, les modalités de stockage des matériaux et le rôle précis de ses collaborateurs sur son site.

8) Dans le cadre de l'analyse du REIE, le service de l'air, du bruit et des rayonnements non ionisants (ci-après : SABRA) a remis au service de l'environnement et des risques majeurs (ci-après : SERMA) un préavis interne favorable, qui ne figure pas parmi les pièces transmises à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) mais dont toutes le parties admettent le contenu. Les mesures préventives correspondaient aux bonnes pratiques que l'on pouvait attendre de ce type d'exploitation et elles devaient être strictement mises en place au regard de la situation générale des PM10 dans la maille kilométrique centrée autour de Gradeg, qui n'était pas conforme aux valeurs de l'OPair (22 µg/m3 au lieu de
20 µg/m3).

9) À la suite de la publication de la requête en autorisation de construire et de l'avis de consultation pour le dépôt de la requête en autorisation d'exploiter dans la Feuille d'avis officielle du canton de Genève (ci-après : FAO) du 11 février 2014, Rampini a formé le 13 mars 2014 les observations suivantes :

Le projet ne s'insérait pas dans la planification directrice cantonale, l'activité n'était pas conforme à la loi 10'655, le REIE du 20 novembre 2013 ne répondait pas aux exigences de la loi fédérale sur la protection de l’environnement du 7 octobre 1983 (LPE - RS 814.01) et de l'ordonnance relative à l'étude d'impact sur l'environnement du 19 octobre 1988 (OEIE - RS 814.011). Il était impossible, au vu des données du rapport, de déterminer si les normes de l'OPair, s'agissant des particules fines dans les poussières dégagées par l'installation, seraient respectées ; le projet contrevenait aux règles en matière de protection des eaux et, enfin, les plans soumis à l'appui de la requête étaient incomplets.

10) Dans le cadre de l'instruction de la demande, les instances de préavis se sont déterminées de la manière qui suit :

a. Le 27 janvier 2014, la Fondation pour les terrains industriels (ci-après : FTI) a rappelé que le projet se situait dans le périmètre du grand projet ZIMEYSAVER (zone industrielle de Meyrin-Satigny-Vernier) qui devrait fixer les grands principes d'aménagement de la zone de développement industriel. L'État se réservait dès lors la possibilité de prendre toutes les mesures conservatoires nécessaires dans le cadre de cette étude d'aménagement afin de favoriser l'équipement de l'ensemble de la zone de développement artisanal et industriel des Batailles. Considérant cependant que le projet répondait aux besoins d'exploitation de l'entreprise, la FTI l'a préavisé favorablement. Elle relevait toutefois la situation stratégique des parcelles dans le cadre de la requalification du secteur ainsi que le potentiel de densification de ces parcelles situées le long de la route du Nant-d'Avril, identifiée comme un important axe de développement.

b. Les 31 janvier et 19 mars 2014, l'Aéroport de Genève a émis des préavis favorables tant sous l'angle des éventuels obstacles à l'aviation que sous l'angle de l'exposition au bruit.

c. Le 11 février 2014, la commune de Meyrin a rendu un préavis favorable sous réserves. L'activité de recyclage des matériaux était très utile pour l'environnement et concernait notamment le secteur du bâtiment et du génie civil. Il apparaissait cependant clairement que l'activité déployée à cet endroit n'était pas conforme aux visions de développement que les communes étaient en train de planifier dans la zone industrielle ZIMEYSAVER. Le plan directeur de la ZIBAT (non adopté à ce jour) ne prévoyait pas non plus d'activités à cet endroit. Les voisins souffraient des poussières et interpellaient régulièrement les communes concernées. Cette activité devait rapidement être intégrée dans une planification territoriale sur un site mieux adapté dans une optique d'écologie industrielle.

d. Le 10 mars 2014, les chemins de fer fédéraux suisses (ci-après : CFF) ont donné leur accord au projet.

e. Le 13 juin 2014, la direction de la planification directrice cantonale et régionale a rendu un préavis favorable sans observation.

f. Le 9 octobre 2014, le SERMA a émis un préavis de synthèse favorable sous conditions.

La condition n° 1 imposait de mettre à jour et de transmettre à la direction générales de l'eau (ci-après : DGEau), trente jours avant l'ouverture du chantier, le plan « Réaménagement - site Gradeg » en adéquation avec le texte REIE d'août 2014, concernant la gestion des eaux. Les modifications demandées concernaient le bac de décantation (« Rajouter la neutralisation. En sortie de bac de décantation, diriger les eaux au réseau d'eaux usées (EU) ») et le laveur de roues (« Rajouter la décantation. En sortie du bac de lavage de roues, diriger les eaux au réseau d'eaux claires »). L'approbation de ce plan par la DGEau était nécessaire pour permettre l'ouverture du chantier.

La condition n° 2 concernait la protection de l'air et consistait à mettre en œuvre les mesures de protection de l'environnement spécifiques définies dans les documents transmis par Gradeg. Les conditions 4 à 8 tendaient à s'assurer du respect de la protection des eaux, en imposant notamment l'envoi à la DGEau d'un rapport trimestriel comportant des données hebdomadaires des rejets, le respect des valeurs définies dans l'ordonnance fédérale sur la protection des eaux du 28  octobre 1998 (OEaux – RS 814.201) concernant les rejets d'eaux résiduaires industrielles et le respect des modalités de stockage définies dans certaines fiches techniques.

Ce préavis couvrait l'ensemble des domaines environnementaux devant être traités dans le cadre d'une étude d'impact sur l'environnement (ci-après : EIE). Il constituait à ce titre l'unique préavis dans les domaines suivants : trafic et mobilité, utilisation rationnelle de l'énergie et climat, protection de l'air, protection contre le bruit, vibrations/bruit solidien propagé, rayonnement non ionisant, protection des eaux, protection des sols, sites contaminés, déchets, substances dangereuses pour l'environnement, organismes dangereux pour l'environnement, prévention des accidents majeurs/protection contre les catastrophes, forêts, flore, faune, biotopes, paysages et sites, monuments historiques et sites archéologiques. Parmi l'ensemble des domaines de l'environnement figurant dans le manuel EIE de la Confédération (repris à Genève en tant que directive cantonale EIE), les domaines suivants n'appelaient pas de demandes particulières, du fait qu'ils avaient été traités de manière satisfaisante : données de base concernant le trafic, utilisation rationnelle de l'énergie, protection de l'air et du climat, bruit, vibrations/bruit solidien propagé, rayonnements non ionisants, sol, sites contaminés, déchets et substances dangereuses pour l'environnement, organismes dangereux pour l'environnement, prévention des accidents majeurs et protection contre les catastrophes, paysages et sites, monuments historiques et sites archéologiques.

Le document précisait encore que les eaux pluviales issues du projet seraient acheminées en séparatif jusqu'en limite de parcelle et se déverseraient, après décantation, dans le réseau d'assainissement actuellement en unitaire. En cas de pluie d'une certaine importance, le déversoir d'orage dit « SY_1 » déversait ces eaux au Nant-d'Avril. Les déversements au Nant-d'Avril devaient être limités à 10 l/s/ha pour un temps de retour de dix ans. Cependant, le secteur du projet était inclus dans le bassin versant du futur ouvrage de gestion quantitative et qualitative des eaux pluviales dit « lac des Vernes ». En conséquence, la DGEau était favorable au projet sans gestion quantitative des eaux pluviales vis-à-vis du milieu récepteur compte tenu du fait qu'à terme ces eaux seraient gérées par le lac des Vernes.

11) Dans l'intervalle, le 11 août 2014, à la demande de Rampini, le service de toxicologie de l'environnement bâti a rendu un rapport d'expertise, au terme duquel toutes les évaluations effectuées au niveau de Gradeg et en termes d'expositions aux hydrocarbures aromatiques polycliniques, à l'amiante et aux poussières alvéolaires ne présentaient pas de risques sanitaires pour le voisinage.

12) Le 11 novembre 2014, le département de l'aménagement, du logement et de l'énergie (ci-après : le DALE) a délivré l'autorisation de construire définitive DD 106'531-2, qui devait être insérée dans la décision globale pour « réaménagement d'un site de recyclage de matériaux minéraux ». Cette décision était déclarée exécutoire nonobstant recours.

13) Le 21 novembre 2014, le DETA a prononcé une décision globale portant tant sur l'autorisation de construire que sur l'autorisation d'exploiter l'installation de recyclage de déchets. Son dispositif prévoyait notamment que les conditions prévues dans le préavis du SERMA du 9 octobre 2014 devaient être respectées. Il mettait en outre toute une série d'obligations à charge de Gradeg.

14) Ces décisions ont été publiées le 21 novembre 2014 dans la FAO.

15) Le 6 janvier 2015, Rampini a recouru à l'encontre des autorisations de construire DD 106'531-2 du 11 novembre 2014 et d'exploiter n° 14-200 du 21 novembre 2014 auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à leur annulation.

Ses griefs étaient essentiellement dirigés contre la délivrance de l'autorisation de construire, l'intéressée ayant néanmoins précisé recourir également contre celle d'exploiter dans la mesure où les deux autorisations étaient strictement indissociables.

16) La procédure a donné lieu à un triple échange d'écritures et à une audience de comparution personnelle des parties.

Le 16 mai 2015, le DALE a par ailleurs transmis au TAPI le plan-guide du grand projet ZYMEYSAVER dans son état au 26 novembre 2014 et copie du projet du plan directeur n° 29'975 (ZIBAT), précisant que le plan-guide en question n'était qu'une image directrice, à l'horizon 2030, sur laquelle les communes concernées et le canton s'étaient entendus pour aller de l'avant. Il ne s'agissait pas d'un plan directeur localisé au sens de l'art. 10 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT – L 130) et il ne possédait aucune valeur juridique puisqu'il n'avait pas été adopté selon le processus démocratique préconisé par la loi. S'agissant du projet de plan directeur n° 29'975 (ZIBAT), la procédure n'en était qu'à ses débuts et pourrait, en définitive, aboutir à un plan passablement modifié lors de son adoption. Enfin, le périmètre concerné par ce projet de plan directeur n'englobait pas les parcelles litigieuses.

17) Par jugement du 17 février 2016, le TAPI a admis partiellement le recours, modifié le chiffre 27 du dispositif de la décision globale du 21 novembre 2014 en ce sens que l'autorisation était délivrée pour une durée maximale de cinq ans, confirmé pour le surplus la décision globale du 21 novembre 2014, mis à la charge de la recourante un émolument de CHF 3'500.- et condamné cette dernière à verser à Gradeg une indemnité de CHF 4'000.- à titre de dépens.

Dès lors que le DETA était l'autorité directrice pour rendre une décision globale, il était compétent pour intervenir à la procédure et défendre celle-ci.

L'exploitation d'un site de recyclage de matériaux minéraux devait être qualifiée d'activité industrielle au sens de la LZIAM.

Les trois parcelles de Gradeg ne faisaient pas l'objet à ce jour d'un plan directeur au sens de l'art. 3 LZIAM. Le grand projet ZIMEYSAVER ne constituait pas un plan directeur et, selon les explications du DALE, le plan directeur n° 29'975 en cours de préparation visant la zone industrielle des Batailles (ZIBAT), ne comprenait pas les parcelles en question.

Se fondant sur deux jurisprudences de la chambre administrative, le TAPI a considéré qu'il y avait lieu d'appliquer les normes de la zone primaire des parcelles concernées, en l'absence d'autorisation du Conseil d'État en vue d'appliquer les normes de la zone de développement ou de renonciation à l'établissement d'un plan localisé de quartier (ci-après : PLQ).

Selon l'exposé des motifs du PL 10'655 visant notamment le déclassement des parcelles nos 12'047 et 12'048 en zone de développement industriel et artisanal, le secteur en question était déjà largement occupé par des équipements et des constructions à vocation industrielle. En outre, l'ensemble du périmètre était fortement exposé aux nuisances sonores de l'aéroport, à celles liées au trafic ferroviaire et routier dues aux routes de Meyrin et du Nant-d'Avril. Par conséquent, l'application des normes régissant la zone industrielle et artisanale à ces parcelles devait être admise, et de ce point de vue, l'autorisation de construire visant une installation industrielle conforme à la zone pouvait être délivrée.

En outre, tant l'emplacement du site de traitement de déchets de Gradeg qui figurait spécifiquement dans les deux plans de gestion des déchets du canton de Genève (ci-après : PGD) successifs (PDG 2009) - (2012 et PDG 2014) - (2017) que l'activité qu'elle déployait, s'inscrivaient parfaitement dans le cadre de la planification de gestion des déchets élaborée par le canton de Genève en concertation avec de nombreux acteurs du domaine. Le fait qu'un certain temps avait passé entre le terme prévu pour le PGD 2009 - 2012 et l'adoption du
PGD 2014 – (2017) ne permettait pas de considérer que l'autorisation querellée devrait être annulée pour ce motif.

L'autorisation querellée, qui prévoyait à son chiffre 27 un renouvellement tacite, d'année en année, de l'autorisation d'exploiter, était en revanche contraire au texte clair de l'art. 43 al. 3 du règlement d’application de la loi sur la gestion des déchets du 28 juillet 1999 (RGD - L 1 20.01), dans la mesure où ce dernier stipulait qu'elle était délivrée pour une durée maximale de cinq ans et pouvait être renouvelée. La décision entreprise devait donc être modifiée sur ce point.

Par ailleurs, le rapport d'Écoservices sur la base duquel l'EIE avait été réalisée, comprenait les éléments nécessaires requis par la législation. Rampini n'apportait aucun élément permettant de considérer que la décision violait les dispositions fédérales en matière de protection de l'air. Partant, dès lors que selon les préavis des instances spécialisées, les mesures de limitation des émissions de poussières proposées étaient adéquates, il n'existait aucune raison de se distancier de ce point de vue.

Le grief de Rampini selon lequel la décision contrevenait au principe de coordination des procédures en raison du fait que l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT) n'avait pas encore été consulté, devait également être rejeté. Cette absence d'autorisation ne pouvait pas invalider la décision litigieuse puisque l'OCIRT, qui était tenu de se prononcer avant le commencement de l'exploitation, avait encore toute latitude de le faire.

Enfin, la décision entreprise mentionnait toute une série de conditions dont le département compétent avait la possibilité de contrôler le respect en tout temps. Partant, c'était également à tort que Rampini se plaignait de ce que l'autorisation ne prévoyait pas suffisamment de précautions.

18) Le 4 avril 2016, Rampini a recouru contre ce jugement, qu'elle avait reçu le 18 février 2016, auprès de la chambre administrative, concluant à son annulation et à celle des autorisations de construire DD 106'531-2 et d'exploiter n° 14-200, avec suite de frais et de dépens.

a. Les parcelles et les bureaux lui appartenant recueillaient des quantités importantes de poussières générées par l'exploitation de Gradeg. L'installation projetée n'était pas de nature à réduire ces nuisances. Elle prévoyait en effet que l'activité de concassage serait rapprochée de la route du Nant-d'Avril et que le tas de matériaux traités serait toujours placé le long de cette dernière. La machine utilisée pour le concassage sera à l'évidence dotée d'un tapis convoyeur long, puisque les matériaux concassés devraient être déversés dans l'aire réservée aux produits finis, en tas qui atteindraient au moins 10 m de hauteur depuis l'aire de travail. Compte tenu de ce que le convoyage des matériaux traités sur le stock de produits finis devrait propulser ces matériaux à une hauteur significativement supérieure à la hauteur des tas de stock, qui atteindraient eux-mêmes 7 m, la nouvelle installation générerait donc nécessairement des poussières à une altitude plus élevée que le haut de la barrière de 2 m longeant la route. Elle n'apporterait ainsi aucune amélioration, d'autant que le volume global de matériaux pris en charge annuellement serait très largement supérieur à celui actuel.

b. À l'appui de ses dires, la recourante invoquait un constat rédigé par un huissier judiciaire le 9 février 2012, ainsi que deux rapports établis les 31  mars  2011 et 4 juillet 2012 par Biol Conseils SA, un bureau d'ingénieurs de l'environnement sis à Neuchâtel. Selon ces derniers documents, les retombées de poussières moyennes annuelles dépassaient actuellement la valeur limite de l'OPair aux huit postes de mesures proches des activités de Gradeg et de la route du Nant-d'Avril ; seules les immissions à deux autres postes étaient acceptables ; par temps de bise, les immissions étaient deux fois plus élevées que la moyenne annuelle.

Rampini a produit en outre un nouveau rapport de Biol Conseils SA du 24 mars 2016, duquel il ressortait les éléments suivants :

La barrière d'une hauteur de 2 m aurait un effet faible sur les émissions de poussières car elle serait sans doute rapidement endommagée faute de distance de sécurité entre la barrière et les matériaux. Par ailleurs, la hauteur des dépôts atteindrait en moyenne 3 à 4 m et au maximum 8 à 9 m ; les engins de chantier et le concasseur étaient hauts de plus de 3 m, de sorte que la barrière de 2 m serait peu efficace.

Dans la mesure où les mesures d'aspersion supposeraient du personnel pour être mises en œuvre, elles ne pourraient pas avoir lieu durant la nuit et les week-ends. De plus, durant l'hiver, le risque de gel n'était pas négligeable.

Le trafic journalier moyen étant élevé sur la route du Nant-d'Avril, il remettait en suspension les poussières émises par l'intimée.

« Selon toutes vraisemblances », l'augmentation de la capacité du site générerait des nuisances plus importantes que celles actuelles et donc un dépassement des valeurs limites. Une partie des matériaux traités seraient bitumeux et pourraient ainsi contenir des substances nocives pour la santé.

Biol Conseils SA préconisait ainsi le confinement dans des halles des zones de traitement et de stockage.

Partant, la recourante reprochait au TAPI de ne pas avoir tenu compte de la présence d'indices sérieux au dossier d'insuffisance des mesures d'accompagnement censées maintenir les poussières à un niveau acceptable.

c. Elle invoquait en outre un arrêt de la chambre administrative (ATA/231/2014 du 8 avril 2014), confirmé par le Tribunal fédéral (arrêt  1C_276/2014 du 1er octobre 2014), selon lequel la zone de développement primerait sur la zone dite de fond. Ainsi, il était impossible de délivrer une autorisation de construire tant que le Conseil d'État n'avait pas approuvé le plan directeur industriel ou artisanal, sous réserve de la réalisation de l'une des conditions de l'art. 4 al. 3 LZIAM, lesquelles n'étaient en l'espèce pas remplies.

d. Par ailleurs, le plan directeur de la zone de développement industriel et artisanal des Batailles (ci-après : PDZIBAT) avait été mis à l'enquête publique le 27 novembre 2015. Si le PDZIBAT n'englobait pas formellement les parcelles litigieuses, les principes posés avaient néanmoins un impact sur les périmètres adjacents à ce plan. Or, le maintien de l'activité de Gradeg était incompatible avec le développement prévu pour le périmètre en question. La mise en œuvre des concepts dégagés par le cahier de recommandations du PDZIBAT risquait d'être entravée par les autorisations querellées, puisque ce dernier prévoyait le long de la route du Nant-d'Avril la création d'espaces verts privés sur 15 m de large, en limite de parcelle, le long de la voie de mobilité douce.

e. De plus, le REIE était incomplet sur la question des nuisances aériennes (émissions de poussières). À l'exception des propres démarches que la recourante avait effectuées pour attester, quantifier et qualifier ces nuisances, aucune investigation n'avait été réalisée sur son site, respectivement sur les autres parcelles voisines de l'exploitation de l'intimée. Or, d'après le rapport de Biol Conseils SA, seul un confinement complet, en halle, de l'exploitation permettrait de respecter les règles fixées par le droit fédéral. Le TAPI aurait dû en outre imposer des limitations strictes concernant la hauteur de tous les tas de stockage maintenus à l'air libre et interdire toute exploitation par temps de bise.

Le REIE ne discutait ni de l'état actuel de l'exploitation, laquelle présentait déjà des manquements, ni de l'adéquation des mesure proposées avec l'objectif de supprimer, voire limiter, les nuisances pour le voisinage. Il n'examinait pas la conformité du projet avec les règles applicables et notamment l'art. 43 al. 1 de l'annexe I OPair. Partant, les autorités cantonales spécialisées ne disposaient pas des informations nécessaires pour évaluer le dossier et autoriser l'exploitation.

En ne palliant pas les lacunes de l'instruction liées aux manquements du REIE sur la question des poussières, le TAPI avait violé la LPE, l'OPair et l'OEIE, ainsi que son devoir d'instruire.

f. Enfin, contrairement à ce que prévoyait l'art. 9 al. 4 du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI - L 5 05.01), les plans et documents descriptifs des installations et constructions n'avaient pas été examinés et validés par l'OCIRT.

19) Le 9 mai 2016, Gradeg a répondu au recours, concluant à son rejet, avec suite de frais et de dépens estimés à CHF 6'000.-.

Le rôle du nouveau projet était justement de permettre une limitation plus efficace des nuisances. Le nouveau concasseur serait doté d'un système de réduction par humidification lors des étapes de concassage, de criblage et de concassage secondaire. De surcroît, ces engins étaient tous équipés d'un filtre à particules. Contrairement aux allégués de la recourante, le machiniste aurait en outre entièrement le temps de gérer l'aspersion d'eau sur le site en plus de la conduite du concasseur.

Par ailleurs, l'arrêt de la chambre administrative ATA/231/2014, dont se prévalait la recourante, ne constituait pas un arrêt de principe faisant primer la zone de développement sur celle de fond. La solution préconisée par la recourante (soit le refus de toute autorisation de construire en zone de développement industriel ou d'activités mixtes aussi longtemps que le Conseil d'État n'aurait pas adopté de plan directeur, sans aucune limitation temporelle) porterait une atteinte disproportionnée à la garantie de propriété dans l'hypothèse où l'adoption d'un plan directeur n'interviendrait pas dans un délai raisonnable et que le projet litigieux respecterait de surcroît l'affectation prévue par la zone de fond sans compromettre les objectifs d'une éventuelle planification en cours.

Le TAPI avait ainsi à juste titre admis l'application des normes régissant la zone industrielle et artisanale, ce d'autant plus que l'autorisation litigieuse avait été limitée à une durée de cinq ans. Le projet ne compromettait ainsi pas la planification envisagée de secteur.

Rampini soutenait à tort que le REIE était incomplet. Les entités techniques désignées par la loi, soit le SABRA et le SERMA, n'avaient pas relevé de carence ou de défaut dans sa dernière version.

S'agissant des poussières provenant de l'activité même de Gradeg, les valeurs limites ne pouvaient être calculées. En effet, des mesures effectuées même juste au-dessus de l'installation ne donneraient pas de résultats clairs quant à la proportion de ce qui provenait réellement de Gradeg et de ce qui provenait d'autres sources de pollution environnante (trafic, industries etc.). Ainsi, seules des mesures préventives pouvaient être évaluées dans le REIE et par le DETA. Or les mesures préventives figurant dans le rapport étaient conformes à l'art. 11 LPE et au chiffre 43 de l'annexe 1 de l'OPair.

20) Le 17 mai 2016, l'OCIRT a validé le projet de Gradeg.

21) Le 23 mai 2016, le DETA a conclu au rejet du recours, avec suite de frais et de dépens.

Le TAPI avait à juste titre appliqué les normes de construction de la zone de fond pour autoriser le projet.

Par ailleurs, il n'était pas possible de définir la participation de Gradeg au dépassement des valeurs d'immissions dans la zone en question avec précision au niveau quantitatif. Après s'être penchés trois fois sur la question, les experts du DETA étaient d'avis que le futur projet serait adéquat et proportionnel en vue de limiter les nuisances de poussières.

Il était faux de dire que l'activité projetée serait menée selon des modalités similaires à celles actuelles. En effet, le site serait non seulement intégralement réaménagé mais de nouvelles mesures, à tous les stades du processus, seraient mises en place afin de diminuer les émissions de poussières.

Les mesures prévues par le REIE étaient propres à remplir toutes les exigences imposées par le chiffre 43 de l'annexe I OPair.

Enfin, l'autorisation de l'OCIRT n'était pas une condition préalable à l'autorisation d'exploiter. Au demeurant, cette dernière avait été délivrée.

22) Le 27 juin 2016, un transport sur place a eu lieu en présence des parties, afin principalement de permettre à la chambre administrative de prendre connaissance des lieux.

Les représentants de Gradeg ont expliqué le fonctionnement des installations actuelles et celui du futur projet. Le juge délégué a alors constaté qu'un camion qui déchargeait générait une poussière notable.

Les représentants de Rampini ont dit craindre, au vu des volumes annoncés et des surfaces figurant sur les plans autorisés, que l'altitude supérieure des stocks de matériaux, aussi bien arrivant de démolition que broyés, dépasse le niveau supérieur annoncé ainsi que l'emprise prévue. Une telle situation aurait pour conséquence une élévation du broyeur et une augmentation de l'émission de poussières. Ils ont ensuite montré, sur leur terrain, des endroits très poussiéreux. Selon eux, le passage des avions générait des turbulences suffisantes pour faire voler la poussière. D'après Monsieur Mario RAMPINI, administrateur de la société, les inconvénients principaux étaient l'incidence des poussières sur la santé. Lui-même souffrait de graves problèmes aux yeux.

23) Le 21 juillet 2016, Rampini a transmis à la chambre administrative des plans mettant en évidence les dimensions des tas de matériaux du projet, accompagnés d'une notice explicative établie par Biol Conseils SA le 4 juillet 2016.

Aux termes de ce document, les plans autorisés par le DALE le 11 novembre 2014 présentaient des incohérences fondamentales, à savoir :

-                 les hauteurs calculées pour le stock de matériaux bitumeux de routes et le stock de béton de démolition semblaient peu réalistes, voire impossibles, sans que les stocks ne s'effondrent ;

-                 l'emprise au sol des produits finis était plus importante que celle dessinée sur le plan du 11 novembre 2014, ce qui impliquait que la zone de travail serait vraisemblablement plus petite. Le concasseur, la pelle et la chargeuse ne disposeraient ainsi pas d'espace suffisant et devraient inévitablement monter sur les stocks de matériaux. La hauteur de travail serait alors sans doute supérieure à celle de la bâche et générerait donc des nuisances supplémentaires à celles annoncées pour Rampini.

24) Dans ses observations du 21 octobre 2016, Gradeg a soutenu que l'adéquation « surface-volume » déterminée par le plan d'entreposage des déchets, qui relevait de l'autorisation d'exploiter, sortait de l'objet du litige tel qu'il avait été défini en première instance, le grief de la recourante à ce sujet n'ayant été formulé, pour la première fois, que lors du transport sur place du 27 juin 2016.

Au surplus, le GESDEC avait remarqué, à la suite des compléments fournis en août 2014 par Écoservices SA, que le plan d'aménagement proposé n'offrait pas de cohérence avec les volumes d'entreposages envisagés, la surface au sol ne permettant notamment pas de respecter les hauteurs définies dans le préavis de l'aéroport de Genève.

À la demande du GESDEC, Gradeg avait soumis à ce dernier, le 18 septembre 2014, un plan actualisé sur lequel figuraient des corrections manuscrites. Ce plan d'entreposage des déchets du 18 septembre 2014, qu'elle a annexé à ses écritures, avait été validé par le GESDEC au regard de l'adéquation surface-volume. Il avait ensuite été versé au dossier de la requête en autorisation d'exploiter. Le GESDEC l'avait en outre annexé à sa décision globale du 21 novembre 2014, de sorte qu'il faisait partie intégrante de la décision entreprise. Par ailleurs, une intégration du plan d'entreposage dans l'autorisation de construire était inutile, dans la mesure où la surface globale du sol restait inchangée. Les plans établis le 4 juillet 2016 par Biol Conseils SA étaient ainsi obsolètes.

Toutefois, dès lors que la décision contestée autorisait des volumes d'entreposage supérieurs à ceux dont elle avait besoin, et au vu de l'urgence de pouvoir réaménager le site, Gradeg proposait par gain de paix de limiter les quantités maximales de déchets stockés simultanément sur la plateforme, comme suit :

-                 béton de démolition : 550 m³ au lieu de 2'000 m³ ;

-                 matériaux non bitumeux de démolition des routes : 190 m³ au lieu de 500 m³  ;

-                 matériaux bitumeux de démolition des routes dont le liant à une teneur en HAP inférieure ou égale à 5'000 ppm : 300 m³ au lieu de 1'000 m³ ;

-                 matériaux de démolition non triés : 165 m³ au lieu de 40 m³.

Gradeg avait fait adapter le plan d'entreposage des déchets par son mandataire Écoservices SA pour tenir compte des volumes de stockages réduits. Ce document, accompagné d'un plan indiquant les portées des jets d'arrosage du site et d'une note sur les différents systèmes d'humidification anti-poussière disponibles sur le marché, ont été versés à la procédure, après avoir également été transmis au DETA le 19 octobre 2016.

25) Le plan de réaménagement du site du 18 septembre 2014, versé à la procédure, présente des séparations dans la zone de stockage : les matériaux bitumeux de démolition des routes étaient entreposés sur une surface de 100 m² ; ceux non bitumeux de démolition des routes sur une surface de 45 m² ; ceux de démolition non triés sur une surface de 40 m² ; et le béton de démolition sur une surface de 168 m².

Le plan de réaménagement du site du 18 octobre 2016, tenant compte des volumes réduits, comporte les mêmes séparations. Seules les quantités de matériaux stockés sont modifiées.

26) Dans ses observations du même jour, le DETA a conclu à l'irrecevabilité du grief soulevé par Rampini au sujet des emprises et des volumes de stockage des matériaux, dans la mesure où il était tardif, au rejet du recours, avec suite de frais et de dépens, et à la modification du point 8 de l'autorisation globale entreprise tenant compte des nouveaux volumes d'entreposage proposés par Gradeg.

Le DETA a confirmé les allégués de Gradeg au sujet du complément requis par le GESDEC pour les volumes d'entreposage et l'intégration du plan du 18 septembre 2014 à la décision globale.

Les nouveaux volumes proposés par Gradeg le 21 octobre 2016 étaient au demeurant validés. Le DETA rappelait que l'autorisation contestée poursuivait un intérêt public et que, compte tenu de l'ancienneté de l'installation de Gradeg, il convenait de clore rapidement ce dossier.

27) Le 3 novembre 2016, Rampini a relevé que son recours portait tant sur l'autorisation de construire que sur celle d'exploiter, de sorte que son grief relatif à l'entreposage était parfaitement recevable.

28) Lors de la comparution personnelle des parties du 19 décembre 2016, la chambre administrative a également entendu Monsieur Michel AMACHER, désigné d'entente entre les parties comme « représentant » du fabriquant du concasseur visé dans le projet de Gradeg.

Ce témoin, à la retraite depuis 2014, a confirmé avoir travaillé comme ingénieur dans les trois entreprises qui vendent les installations de concassage les plus courantes en Suisse, et en dernier lieu pour GIPO.

En règle générale, les installations de concassages mobiles n'étaient pas installées dans un hangar, contrairement aux fixes. L'offre de GIPO, datée du 20 février 2014, relative à la machine que Gradeg entendait acheter, prévoyait notamment des filtres pour l'installation de tri de soufflage, la possibilité de mettre de l'huile biodégradable, l'insonorisation du moteur et la brumisation, étant précisé que les rampes de brumisation n'étaient pas onéreuses. La poussière générée par les camions déversant du matériel pouvait être diminuée par l'installation de buses, mais l'offre ne contenait pas cette possibilité. À sa connaissance, la couverture des rubans était obligatoire en Suisse, bien qu'elle ne figurait ni sur les catalogues ni clairement sur le plan qui lui étaient soumis.

Il lui était difficile d'estimer précisément la hauteur maximum à laquelle un convoyeur pouvait monter les matériaux sortant du concasseur. Une hauteur de 3 m ou 3,5 m semblait être un maximum, mais c'était une estimation intuitive.

Si le client le demandait, il était possible de rallonger le convoyeur pour avoir une altitude de déversement de 5 m plus haut que le sol, mais de manière standard il s'agissait plutôt de 3 m.

Les émissions des moteurs étaient conformes à l'OPair. S'agissant des poussières, le témoin n'était pas certain que cela soit également le cas. Il ne connaissait pas d'exemples d'installations vendues pour être utilisées dans une zone ayant le même genre de voisinage que Gradeg. Il se souvenait d'une installation fixe au-dessus de Lausanne, contenue dans un hangar.

La réserve de produits à traiter allait de 2'000 t à 3'000 t pour des petites entreprises jusqu'à des chiffres beaucoup plus importants.

Le témoin avait vu l'installation de Gradeg deux ou trois ans avant son audition. A priori, l'offre de GIPO devrait améliorer la situation en matière de poussière. Toutefois, il ne connaissait pas les mesures actuelles prises par Gradeg avec leur concasseur fixe. De manière générale, une installation actuelle devrait créer moins de nuisances qu'une vieille installation.

À l'issue de l'audience, le juge a demandé au DETA de consulter la DGEau afin d'avoir son opinion sur un éventuel nouveau préavis, cas échéant sur les données complémentaires dont elle aurait besoin.

29) Par courrier du 27 janvier 2017, le DETA a informé la chambre administrative que la DGEau n'avait rien à ajouter à son préavis contenu dans celui du SERMA du 9 octobre 2014.

30) Le 3 mars 2017, Gradeg a persisté dans ses conclusions.

31) a. Dans ses écritures du même jour, Rampini a soutenu que le projet de Gradeg ne correspondait pas à l'état reconnu de la technique s'agissant de la gestion des poussières, l'efficacité du dispositif envisagé n'étant pas établie.

Par ailleurs, si la chambre administrative décidait de modifier les quantités de déchets stockés simultanément sur le site comme proposé par Gradeg et/ou de valider le système d'arrosage proposé par Gradeg en cours de procédure, alors que le projet autorisé ne prévoyait aucun système d'humidification par buses initialement, cela aurait pour conséquence de priver Rampini des différents degrés de juridiction et de « court-circuiter » l'instruction à mener par les services spécialisés avant que le DETA ne rende une nouvelle décision sujette à recours. Il incombait ainsi à la chambre administrative d'annuler les autorisations et de renvoyer l'affaire au DETA pour qu'il instruise ab initio les modifications proposées par Gradeg sur les volumes de stockage et le système d'arrosage.

b. Rampini a sollicité l'audition d'un représentant de la DGEau.

c. Elle a en outre produit un nouveau rapport établi le 2 mars 2017 par Biol Conseils SA, dont il ressort les éléments suivants :

-                 le projet ne prévoyait ni couverture des stocks ni imperméabilisation des surfaces sous les stocks, de sorte qu'il était impossible de se prémunir contre la génération d'eaux polluées. Le dispositif de séparation des matériaux n'était en outre pas décrit explicitement ;

-                 à la suite d'une étude comparative avec onze autres sites de traitement de déchets de chantier en fonction de leur capacité de traitement et de leur surface destinée à celui-ci, il apparaissait que le projet de Gradeg se distinguait nettement des autres sites ;

-                 les volumes autorisés de stockage de déchets et de matériaux traités étaient particulièrement faibles et ne permettaient qu'une autonomie très limitée du site. Les autres sites de traitement avaient des capacités de stockage nettement plus importantes, généralement de l'ordre de plusieurs semaines. Les volumes de stockage ne semblaient ainsi pas adaptés aux contraintes du marché de la construction. Pour répondre aux demandes des chantiers, Gradeg devrait sans doute accepter plus de déchets et ainsi dépasser les capacités autorisées sur le site ;

-                 la méthode d'aspersion prévue par Gradeg pour limiter la production de poussières sur les voies de circulation était adéquate. Le type d'installations prévues pour la gestion des poussières induites par le stockage des matériaux n'était pas explicité ; faute de préciser que les installations prévues utilisaient exclusivement la brumisation, le projet ne pouvait être considéré comme suffisant. Par ailleurs, aucune mesure n'était projetée pour la zone de déchargement ni celle de travail, bien qu'elles étaient de nature à émettre des poussières ;

-                 la gestion des eaux de l'installation telle que prévue par le projet n'était pas conforme à l'état de la technique. Il manquait un bassin de rétention et un bassin équipé d'un système automatique de neutralisation.

32) Le 31 mars 2017, Rampini a répondu aux écritures du 3 mars 2017 de Gradeg, en persistant dans son argumentation et ses conclusions, y compris celles tendant à l'audition de la DGEau. Elle s'est prévalue à nouveau du rapport du 2 mars 2017 de Biol Conseils SA pour soutenir que le projet, et notamment l'absence de maîtrise de poussières, violait la LPE et l'OPair. Par ailleurs, compte tenu du sous-dimensionnement des stocks de déchets en entrée et de matériaux traités, l'interruption de la production en cas de bise s'avérait difficile. Il existait en outre un risque majeur que Gradeg ne s'en tienne pas aux hauteurs prescrites pour les différents tas.

33) Le même jour, Gradeg a persisté à soutenir que le grief de Rampini relatif à l'adéquation « surface-volume » était irrecevable, faute d'avoir été soulevé en première instance déjà. Il en allait de même des griefs formés contre le plan d'entreposage du 18 octobre 2016, ce plan ne faisant état que de volumes de stockage réduits par rapport à celui soumis initialement à autorisation. Par ailleurs, selon la décision entreprise, elle était tenue de respecter le REIE, qui prévoyait notamment un système de réduction par humidification pour le concasseur, un système automatique d'abattement des poussières par aspersion pour les stocks de matériaux et la zone de déchargement. Les conditions du préavis du DETA du 9 octobre 2014 assureraient le respect de la gestion des eaux. Enfin, la réduction des volumes de déchets stockés n'impliquait pas une modification des plans intégrés dans l'autorisation de construire et d'exploiter, de sorte qu'il ne s'agissait pas de conclusions nouvelles ne respectant pas le double degré de juridiction.

34) Dans ces écritures du même jour, le DETA a également soulevé l'irrecevabilité des nouveaux griefs invoqués par la recourante au sujet de la problématique des volumes, de l'eau en surface, des modalités et capacités de stockage et de l'optimisation des stocks. Le rapport du 2 mars 2017 de Biol Conseils SA comportait un comparatif d'installations difficilement comparables. Il s'agissait de gravières, de carrières, d'installations d'entreposage et d'installations de recyclage, lesquelles n'avaient pas les mêmes besoins de tonnages et se trouvaient dans des situations géographiques différentes. Par ailleurs, les plans des 18 septembre 2014 et 18 novembre 2016, produits à la procédure, présentaient des séparations dans la zone de stockage. La couverture des stocks n'était pas obligatoire. La DGEau s'était déjà prononcée sur le projet, lequel n'avait jamais changé depuis 2014.

35) Par courrier du 6 avril 2017, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.


 

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur la décision globale du 21 novembre 2014 prononçant l'autorisation d'exploiter et l'autorisation de construire en faveur de l'intimée, rendue conformément à l'art. 22 de la loi sur la gestion des déchets du 20 mai 1999 (LGD - L 1 20).

3) La qualité pour recourir de la recourante, propriétaire d'une parcelle directement voisine des parcelles concernée par le projet de construction litigieux, n'est à juste titre pas contestée (ATF 121 II 171 consid. 2b).

4) La recourante demande l'audition d'un représentant de la DGEau.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 Cst., le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes et d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (arrêts du Tribunal fédéral 2C_545/2014 du 9 janvier 2015 consid. 3.1 ; 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; 131 I 153 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_119/2015 du 16 juin 2015 consid. 2.1).

b. En l'espèce, le 27 janvier 2017, la DGeau a informé la chambre administrative, par le biais du DETA, qu'elle n'avait rien à ajouter à son préavis contenu dans celui du SERMA du 9 octobre 2014, dans la mesure où le dossier ne présentait rien de nouveau. L'audition sollicitée ne serait ainsi pas à même d'apporter de nouveaux éléments, autres que ceux résultant déjà des pièces disponibles au dossier.

La mesure d'instruction requise sera donc écartée.

5) La recourante soutient d'abord que le régime des zones de développement s'appliquerait au périmètre concerné par le projet litigieux et exigerait l'adoption d'un plan directeur préalablement à la délivrance d'autorisations.

a. Pour déterminer l’affectation du sol sur l’ensemble du territoire cantonal, celui-ci est réparti en zones, dont les périmètres sont fixés par des plans annexés à la LaLAT (art. 12 al. 1 LaLAT). Les zones sont de trois types : les zones ordinaires, les zones de développement et les zones protégées (art.  12  al.  2  LaLAT). Les zones ordinaires ont pour objet de définir l’affectation générale des terrains qu’elles englobent (art. 12 al. 3 LaLAT). En vue de favoriser l’urbanisation, la restructuration de certains territoires, l’extension des villages ou de zones existantes, la création de zones d’activités publiques ou privées, le Grand Conseil peut délimiter des périmètres de développement, dits zones de développement, dont il fixe le régime d’affectation. À l’intérieur de ces périmètres, le Conseil d’État peut, en vue de la délivrance d’une autorisation de construire, autoriser le département à faire application des normes résultant de la zone de développement, en lieu et place de celles de la zone à laquelle elle se substitue (art. 12 al. 4 LaLAT).

Parmi les zones ordinaires figurent les zones à bâtir, dont les zones industrielles et artisanales destinées aux constructions industrielles, artisanales et ferroviaires (art. 19 al. 4 LaLAT).

b. Les zones de développement sont régies par la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 et (LGZD - L 1 35) et par la LZIAM (art. 30 LaLAT).

Selon l'art. 4. al. 1 let. a LZIAM, dans les zones de développement industriel et les zones de développement d’activités mixtes, le Conseil d’État peut, en vue de la délivrance de l’autorisation de construire, autoriser l’application des normes de la zone industrielle ou de la zone de développement d’activités mixtes au sens de la LaLAT. Cette décision est subordonnée notamment à l’approbation préalable des plans et règlements directeurs au sens des art. 2 et 3 LZIAM ou, le cas échéant, d’un plan localisé de quartier fixant tout ou partie des éléments énoncés dans l’art. 3 LGZD.

Aux termes de l'art. 4 al. 2 LZIAM, si la demande porte sur une construction ou une installation de peu d'importance, le DALE peut délivrer d'emblée l'autorisation de construire après en avoir fixé, si nécessaire, les conditions particulières.

L'art. 4 al. 3 LZIAM prévoit qu'en dérogation à l'al. 1 let. a, le Conseil d'État peut, après consultation du Conseil administratif ou du maire de la commune, renoncer à l'établissement d'un plan et règlement directeur ou d’un plan localisé de quartier au sens de l’al. 1 let. a : a) dans les secteurs de développement déjà fortement bâtis ; b) pour des projets de constructions ou installations conformes à des plans directeurs de quartier indiquant l’aménagement souhaité ; c) pour des projets de constructions ou installations conformes au premier prix d’un concours d’urbanisme et d’architecture réalisé en application de la norme SIA applicable, sur la base d’un cahier des charges accepté par le département chargé de l’aménagement.

c. En l’espèce, le projet litigieux vise l'exploitation d'un site de recyclage de matériaux minéraux, qui constitue une construction industrielle au sens de l'art. 19  al. 4 LaLAT.

Les trois parcelles litigieuses sont sises en zone de développement industriel et artisanal et sont soumises à la LZIAM, ce que les parties ne contestent pas.

Ces parcelles ne font pas l'objet à ce jour d'un plan directeur au sens de l'art. 2 LZIAM. Il est à cet égard admis que le grand projet ZIMEYSAVER ne constitue pas un plan directeur et que le plan directeur n° 29'975 en cours de préparation visant la zone industrielle des Batailles (ZIBAT) ne comprend pas les parcelles en question.

6) Reste dès lors à déterminer quelles normes s'appliquent en vue d'autoriser ou non sur ces dernières une nouvelle construction, en l'absence d'approbation préalable d'un plan directeur ou de la renonciation à l'établissement de ce dernier.

a. Dans un arrêt ATA/752/2014 du 23 septembre 2014 portant sur une autorisation de construire en vue de la modification et de la rénovation d'un rural sis en zone 4B, à laquelle se superposait une zone de développement industriel et artisanal, la chambre administrative a considéré que faute de plan d'aménagement spécial concernant la zone litigieuse, la validité de l'autorisation de construire devait s'examiner au regard de la zone de fond 4B (ATA/752/2014 précité consid. 4).

Le 4 novembre 2014, dans un arrêt ATA/857/2014 concernant l'assujettissement à la loi sur le droit foncier rural du 4 octobre 1991 (LDFR - RS 211.412.11) d'un immeuble sis en zone de développement à construire avec zone primaire agricole, la chambre administrative a précisé qu'il ressortait tant de la LaLAT que de la LGZD que la délimitation d’une zone de développement par le Grand Conseil ne suffisait pas à elle seule pour l’application des normes de la zone de développement. Ces dernières n'étaient applicables qu’après autorisation du Conseil d’État ou renonciation à ce dernier à l’établissement d’un PLQ. Les normes de la zone primaire restaient donc applicables à la zone de développement constructible aussi longtemps que le Conseil d’État n’avait pas autorisé leur application en approuvant un PLQ, assorti d’un règlement, et les conditions particulières applicables au projet ou renonciation à l’établissement d’un PLQ. Ainsi, un terrain en zone agricole de développement demeurait soumis aux normes applicables à la zone agricole jusqu’à autorisation d’application des normes de la zone de développement par le Conseil d’État ou renonciation à l’établissement d’un PLQ. Préalablement à cette autorisation ou renonciation, il continuait dès lors à être situé hors zone à bâtir et rentrait dans le champ d’application de la LDFR, à laquelle il restait assujetti (ATA/857/2014 précité consid. 8).

b. En l'espèce, il n'y a pas lieu de s'écarter de ces considérations, qui doivent être transposées à la LZIAM.

Les parcelles litigieuses restent donc soumises aux normes de la zone primaire.

La parcelle n° 13'461 a été classée en 1969 en zone de développement industriel et artisanal et les parcelles n° 12'047 et 12'048 étaient en zone industrielle et artisanale avant l'adoption de la loi 10'655 le 24 septembre 2010.

Il résulte de l'exposé des motifs du projet de loi 10'655 que le secteur était alors déjà largement occupé par des équipements et des constructions à vocation industrielle. L'ensemble du périmètre est au demeurant très fortement exposé aux nuisances sonores de l'aéroport, à celles liées au trafic ferroviaire et routier dues à la route de Meyrin et à la route du Nant-d'Avril.

Dans ces conditions, il se justifie d'admettre l'application des normes de la zone industrielle et artisanale aux trois parcelles.

c. C'est en vain que la recourante se prévaut d'un arrêt ATA/231/2014 du
8 avril 2014 portant sur le refus d'autorisations de construire sur une parcelle qui se trouvait en zone industrielle et artisanale avant d'être classée en zone de développement 2, dévolue à une affectation mixte, comportant des logements, des activités tertiaires, des entreprises sans nuisances ou moyennement gênantes. En effet, dans cette affaire, la chambre administrative a considéré que deux motifs justifiaient de refuser les autorisations de construire sollicitées : d'une part, le projet n'était pas conforme à l'affectation prévue pour la parcelle en question (activités entièrement industrielles alors que le secteur avait une affectation
mixte) ; d'autre part, l'art. 3 al. 1 de la loi n° 10'788 du 23 juin 2011 de modification des limites de zone, régissant le périmètre en question, conditionnait la délivrance d'autorisations de construire à l'adoption préalable de PLQ pour les constructions qui n'étaient pas de peu d'importance (ATA/231/2014 précité consid. 6d).

La situation traitée dans cet arrêt n'est par conséquent pas comparable à celle du cas d'espèce, puisque l'autorisation de construire a alors été refusée en application de l'art. 3 al. 1 de la loi n° 10'788 et qu'une telle disposition fait ici défaut. Au demeurant le projet soumis à autorisation par l'intimée est ici conforme à l'affectation prévue par les parcelles.

7) La recourante soutient que les autorisations octroyées empêcheraient la mise en œuvre de la planification de la zone de développement. Il ressortait du plan-guide ZYMEYSAVER que les parcelles concernées étaient situées dans un périmètre d'urbanisation réservé à des entreprises à « haute valeur ajoutée » et caractérisé par une forte densité. Le plan-guide prévoyait un « pôle logistique lourd de valorisation des ressources » au sud de la route du Nant-d'Avril et au nord de la route de Satigny. Par ailleurs, le cahier de recommandations du plan directeur ZIBAT prévoyait notamment le long de la route du Nant-d'Avril la création d'espaces verts privés sur 15 m de large, en limite de parcelle, le long de la voie de mobilité douce. Le maintien de l'activité de recyclage et de traitement de matériaux sur les parcelles en question était ainsi incompatible avec le développement prévu pour le périmètre concerné. Ce faisant, la recourante reproche à l'autorité de ne pas avoir fait application de l'art. 13B al. 1 LaLAT.

a. Selon cette disposition, lorsque l'adoption, la modification ou l'abrogation d'un plan d'affectation du sol paraît nécessaire, à l'effet de prévenir une construction qui serait de nature à compromettre des objectifs d'urbanisme ou la réalisation d'équipements publics, le département peut refuser une autorisation de construire sollicitée en vertu de l'art. 1 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05).

Il ne peut s’écouler plus de deux années entre la décision de refus et l’adoption, la modification ou l’abrogation d’un plan d’affectation du sol, la mise à l’enquête du projet devant intervenir dans les douze mois à compter de la décision de refus. A défaut, le propriétaire reprend la libre disposition de son terrain, dans les limites des lois ou plans d‘affectation du sol en vigueur, soit, dans les zones de développement, selon les normes de la zone ordinaire ou selon le plan d’affectation spécial en force (art. 13B al. 2 LaLAT).

Le refus conservatoire constitue une mesure provisionnelle individuelle tendant à protéger un processus de révision des plans d’affectation en paralysant l’application du plan en vigueur par l’effet anticipé du plan en gestation. La mesure assure le travail de révision contre les risques représentés par les projets de construction soumis à autorisation qui pourraient le menacer. Le refus vise à maintenir la liberté d’action de l’autorité chargée de l’établissement du plan d’affectation, comme le fait la mesure générale de la zone protégée, prévue à l’art. 27 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700 ; ATA/590/2017 du 23 mai 2017 consid. 3c ; ATA/231/2014 précité consid. 3c et les arrêts cités ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 1, 3ème éd., 2012, p. 204 ss ; Manuel BIANCHI, La révision du plan d’affectation communal, 1990, p. 180 ss).

L’art. 13B LaLAT accorde au DALE une grande marge d’appréciation que le juge ne peut revoir qu’en cas d’excès ou d’abus (art. 61 al. 2 LPA). Comme d’autres restrictions à la garantie de la propriété, une décision de refus conservatoire doit toutefois reposer sur un intérêt public (art. 36 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101) et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.). Ce dernier exige notamment qu’une mesure d’effet anticipé négatif ne paralyse pas un projet qui ne compromet pas la planification envisagée (arrêt du Tribunal fédéral 1C_528/2011 du 27 avril 2012, concernant une disposition vaudoise similaire à l’art. 13B LaLAT ; ATA/208/2016 du 8 mars 2016 consid. 3d ; ATA/231/2014 précité consid. 4d).

b. En l'espèce, dans le cadre de l'instruction de l'autorisation de construire, différents avis ont été recueillis.

Certes, tant la FTI que la commune de Meyrin ont alors évoqué la question de l'incompatibilité du projet avec le grand projet ZIMEYSAVER et le plan directeur ZIBAT (non encore adopté). La commune relevait que l'activité de recyclage des matériaux de l'intimée n'était pas conforme aux visions de développement que les communes étaient en train de planifier dans la zone industrielle en question ; par ailleurs le plan directeur ZIBAT ne prévoyait pas non plus d'activités à l'endroit des parcelles litigieuses.

Il n'en demeure pas moins que ces entités ont néanmoins préavisé favorablement le projet, dans la mesure où il répondait aux besoins d'exploitation de l'entreprise et que l'activité projetée était utile pour l'environnement et le secteur du bâtiment et du génie civil. La direction de la planification directrice cantonale et régionale a au demeurant également émis un préavisé favorable sans observation.

Il résulte ainsi du dossier que la problématique liée à la compatibilité du projet avec la planification de développement prévue a été prise en considération lors du prononcé de la décision litigieuse. L'autorité intimée a toutefois considéré, à l'instar des entités consultées, qu'elle ne justifiait pas le prononcé d'un refus conservatoire. Cette appréciation n'apparaît pas arbitraire, dès lors notamment que le plan directeur ZIBAT n'a pas encore été adopté et qu'aucun plan directeur n'est encore en consultation pour le périmètre englobant les parcelles occupées par l'intimée.

Le grief de la recourante doit par conséquent être rejeté.

8) La recourante reproche encore au DETA de n'avoir pas suffisamment instruit le dossier et d'avoir octroyé les autorisations litigieuses sur la base d'un REIE incomplet, dans la mesure où ce dernier n'examinait pas la conformité du projet avec les règles applicables et notamment l'art. 43 al. 1 de l'annexe I OPair.

a. La législation fédérale prévoit qu'avant de prendre une décision sur la planification et la construction ou la modification d'installations, l'autorité examine le plus tôt possible leur compatibilité avec les dispositions en matière d'environnement. Ainsi, doivent faire l'objet d'une étude d'impact sur l'environnement les installations susceptibles d'affecter sensiblement l'environnement, au point que le respect des dispositions en matière d'environnement ne pourra probablement être garanti que par des mesures spécifiques au projet ou au site (art. 10a LPE).  Quiconque entend planifier, construire ou modifier une installation soumise aux dispositions sur l'étude d'impact doit présenter à l'autorité compétente un rapport relatif à l'impact sur l'environnement (ci-après : le rapport d'impact). Ce rapport d'impact sert de base à l'appréciation du projet (art. 10b al. 1 LPE).

Aux termes de l'art. 10 al. 2 LPE, le rapport d'impact comporte les indications nécessaires à l’appréciation du projet selon les dispositions sur la protection de l’environnement. Il est établi conformément aux directives des services spécialisés et présente les points suivants : a) l’état initial ; b) le projet, y compris les mesures prévues pour la protection de l’environnement et pour les cas de catastrophe, ainsi qu’un aperçu des éventuelles solutions de remplacement principales étudiées par le requérant ; c) les nuisances dont on peut prévoir qu’elles subsisteront.

Le requérant effectue une enquête préliminaire afin de préparer le rapport d'impact. Les résultats de cette enquête sont réputés rapport d’impact lorsque l’enquête préliminaire a démontré tous les effets du projet sur l’environnement ainsi que les mesures de protection nécessaires (art. 10 al. 3 LPE). L’autorité compétente peut requérir des informations ou des explications complémentaires. Elle peut commander des expertises (art. 10 al. 4 LPE).

L'art. 9 OEIE précise que le rapport d’impact doit notamment contenir toutes les indications dont l’autorité compétente a besoin pour apprécier le projet (al. 2). Il doit rendre compte de tous les aspects de l’impact sur l’environnement imputables à la réalisation du projet et les évaluer aussi bien isolément que collectivement et dans leur action conjointe (al. 3). Il doit également présenter la manière dont les résultats des études environnementales effectuées dans le cadre de l’aménagement du territoire sont pris en compte (al. 4).

b. La LPE a pour but de protéger les hommes contre les atteintes nuisibles ou incommodantes (art. 1 al. 1 LPE). Parmi celles-ci figurent les pollutions atmosphériques (art. 7 al. 1 LPE). Selon l'art. 11 al. 1 et 3 LPE, les pollutions atmosphériques sont limitées par des mesures prises à la source (limitation des émissions). Les émissions seront limitées plus sévèrement s’il appert ou s’il y a lieu de présumer que les atteintes, eu égard à la charge actuelle de l’environnement, seront nuisibles ou incommodantes.

Un site de recyclage de matériaux de chantier est une installation stationnaire au sens des art. 7 al. 7 LPE et 2 al. 1 let. a et c OPair. L'art. 3 OPair prévoit que les nouvelles installations stationnaires doivent être équipées et exploitées de manière à ce qu'elles respectent la limitation des émissions fixée aux annexes 1 à 4. Selon le chiffre 41 de l'annexe 1 OPair, si le débit massique est égal ou supérieur à 0,20 kg/h, les émissions sous forme de poussières ne doivent pas dépasser au total 20 mg/m3. Le chiffre 43 de l'annexe 1 OPair prévoit que, si des exploitations artisanales ou industrielles comportent des phases de travail provoquant de fortes émissions de poussières, par exemple transport par tapis roulant, broyage, tri ou chargement de produits formant de la poussière, il faut récupérer les effluents gazeux et les acheminer vers une installation de dépoussiérage (al. 1). Lors de l’entreposage ou du transbordement en plein air de produits formant des poussières, il y a lieu de prendre des mesures empêchant les fortes émissions de poussières (al. 2). Lors du transport de produits formant des poussières, on utilisera des équipements empêchant de fortes émissions (al. 3). Si la circulation sur les chemins d’une usine entraîne de fortes émissions de poussières, on prendra toutes les dispositions utiles pour éviter la formation de poussières (al. 4).

c. Aux termes de l'art. 5 al. 2 OEIE, l’étude d'impact sur l'environnement est effectuée dans le cadre d'une procédure donnée (« procédure décisive »). Pour certaines installations, cette procédure est désignée dans l'annexe à l'ordonnance ; pour d'autres, l'annexe renvoie au droit cantonal (cf. art. 5 al. 3 OEIE). S’agissant, comme en l’espèce, d'installations destinées au tri ou au traitement physique de plus de 10'000 t de déchets par an, le chiffre 40.7 de l'annexe OEIE indique que la procédure décisive doit être déterminée par le droit cantonal.

À teneur de l'art. 13 du règlement genevois d'application de l'OEIE du 11 avril 2001 (ROEIE – K 1 70.05), le rapport d'impact satisfait aux exigences formulées par la LPE et l'OEIE ; il comporte également des indications d'ordre général relatives au thème de l'énergie (al. 1). Le rapport d'impact indique de manière claire et distincte les mesures à prendre, que ce soit pendant le chantier, lors de la mise en service de l'installation ou lors de son exploitation (al. 2). Par mesures, l'on entend les mesures prévues pour la protection de l'environnement qui sont intégrées au projet et qui sont approuvées dans le cadre de la procédure décisive y relative (al. 3).

Selon l'art. 15 ROEIE, l’autorité compétente transmet le dossier complet au service spécialisé qui dispose d’un délai de six semaines pour procéder à l’évaluation du rapport d’impact (al. 1). Dans le cadre de l'évaluation du rapport, le service spécialisé examine si le projet respecte la législation environnementale, se détermine le cas échéant sur les mesures proposées et exige, s'il y a lieu, des mesures complémentaires. Il pose également les conditions auxquelles la réalisation du projet devra être subordonnée ainsi que celles du suivi environnemental de réalisation (al. 2).

À Genève, le rapport d'impact doit être transmis au SERMA (art.  9  al.  1  ROEIE). Ce dernier évalue, le cas échéant avec le concours des services concernés de l’administration, le cahier des charges et le rapport d’impact, sollicite et émet les préavis nécessaires (art. 9 al. 2 ROEIE). Il conseille pour le surplus les requérants et l’autorité (art. 9 al. 3 ROEIE).

d. Selon la jurisprudence, chaque fois que l'autorité inférieure suit les préavis requis, la juridiction de recours doit s'imposer une certaine retenue, qui est fonction de son aptitude à trancher le litige (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 168 n. 508 et la jurisprudence citée ; ATA/610/2000 du 10 octobre 2000 consid. 5). Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/730/2016 du 30 août 2016 consid. 6c ; ATA/534/2016 du 21 juin 2016 consid. 5b ; ATA/281/2016 du 5 avril 2016 consid. 7b).

En ce qui concerne la possibilité d'attaquer le rapport d'impact et notamment son pronostic, le Tribunal fédéral a exposé qu'ils étaient uniquement des éléments de décision dans le contexte de l'étude d'impact respectivement de la procédure d'autorisation. Ils ne peuvent donc être attaqués que dans la mesure où ils sont repris dans la décision qui écarte les oppositions et approuve le projet, ou s'ils ont conduit à une constatation inexacte et incomplète des faits ainsi qu'à des conséquences juridiques erronées. En outre, il faut souligner l'incertitude inhérente à chaque pronostic – notamment pour ce qui est du trafic – de sorte que des imperfections doivent être tolérées, aussi longtemps que les hypothèses ne se révèlent pas totalement inutilisables et qu'il y a bien une constatation complète des faits (ATF 124 II 293, JdT 1999 I 618 consid. 12 et références citées).

e. En l'espèce, le REIE décrit la situation actuelle, les émissions atmosphériques spécifiques au site d'exploitation, y compris le dégagement de poussières corrélé, et les mesures d'assainissement mises en place. Il expose ensuite l'état futur avec projet selon les sources d'émissions de polluants et examine de manière circonstanciée notamment les dégagements de poussières qui seront émises par la nouvelle installation, ainsi que les mesures prévues pour pallier ces nuisances. Enfin, il mentionne également les impacts de la phase de réalisation du chantier.

Ce rapport a fait l'objet de compléments à la demande des services spécialisés. Ces derniers ont, au terme de la procédure, considéré qu'il contenait toutes les indications nécessaires pour apprécier le projet sous l'angle de l'étude de son impact sur l'environnement, et se sont prononcés favorablement en imposant toutefois certaines conditions qui ont été reprises dans la décision d'autorisation.

À cet égard, dans un préavis sectoriel, le SABRA a indiqué que les mesures préventives indiquées dans le REIE correspondaient aux bonnes pratiques que l'on pouvait attendre de ce type d'exploitation et qu'elles devaient être strictement mises en place au regard de la situation générale des PM10 dans la maille kilométrique centrée autour de Gradeg, qui n'était pas conforme aux valeurs de l'OPair (22 µg/m3 au lieu de 20 µg/m3). La recourante ne saurait ainsi soutenir que l'autorité intimée a délivré les autorisations litigieuses sans avoir connaissance des valeurs d'émissions de poussière avoisinant le site de l'intimée.

Enfin, c'est en vain que la recourante soutient que le REIE ne contient aucune mesure préventive permettant de limiter les nuisances lors du traitement et du broyage des matériaux. En effet, ce dernier spécifie que des mesures d'abattement des poussières seront prévues à toutes les étapes du traitement des matériaux, et, plus particulièrement, que le nouveau concasseur intégrera un système de réduction par humidification lors des étapes de concassage, de criblage et de concassage secondaire, que le stock des matériaux et la zone de déchargement seront équipés d'un système automatique d'abattement par aspersion et qu'une conduite périphérique sera mise en place le long de la piste de roulement pour permettre l'humidification du site.

Les services compétents se sont donc prononcés sur la base d'un dossier complet.

9) La recourante allègue dans un deuxième temps que le projet ne présenterait néanmoins pas des mesures d'accompagnement suffisantes pour maintenir les poussières à un niveau acceptable. Ce faisant, elle soutient que le pronostic du rapport d'impact serait erroné et qu'il y aurait lieu de s'écarter des avis des autorités spécialisées ayant préavisé favorablement ledit projet.

À l'appui de ses dires, la recourante se prévaut de ses propres considérations, alors qu'elle ne dispose d'aucune compétence spécifique en matière de protection de l'air, ainsi que de celles résultant des rapports d'expertise privée produits, tous établis par la même entité, Biol Conseils SA.

Or, les appréciations contenues dans les rapports de Biol Conseils SA, et notamment celui du 24 mars 2016, au sujet de la probable dégradation de la barrière de 2 m de haut prévue, de l'inefficacité du système d'aspersion envisagé et de la vraisemblance d'un futur dépassement des valeurs limites ne trouvent aucune assise dans le dossier. Le témoignage de M. AMACHER, ingénieur dans le domaine des installations de concassage ayant vu l'exploitation de l'intimée quelques années avant son audition, vient d'ailleurs contredire ces considérations, dès lors qu'il a estimé qu'a priori le projet devrait améliorer la situation actuelle s'agissant des nuisances de poussières.

Les éléments soulevés par la recourante ne sont ainsi pas suffisants pour mettre en doute la pertinence du REIE et celle des avis donnés par le SABRA et le SERMA, et plus particulièrement la capacité de ces derniers à émettre dans le cas d'espèce un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts. La recourante ne saurait substituer sa propre appréciation à celle de ces entités techniques, composées de spécialistes, et désignées par la loi.

10) La recourante a allégué pour la première fois, au cours de la procédure devant la chambre administrative, que le projet contenait une incohérence au niveau des volumes traités et de l'emprise au sol, de sorte qu'il en résulterait des nuisances supplémentaires à celles annoncées. En fin de procédure, elle a également soutenu que le projet ne présentait pas de garanties suffisantes pour la protection des eaux (couverture de stocks/imperméabilisation des surface des stocks pas prévue ; bassin de rétention et bassin équipé d'un système de neutralisation manquant), que les volumes de stockage ne semblaient pas adaptés aux contraintes du marché et que, faute de préciser l'utilisation exclusive de brumisation pour la gestion des poussières induites par le stockage des matériaux, ainsi que les mesures projetées pour la zone de déchargement et de travail, le projet était insuffisant.

L'intimée a, pour sa part, réduit ses prétentions, en proposant de limiter les quantités maximales de déchets stockés simultanément sur la plateforme, au motif que ceux autorisés par la décision entreprise étaient en tout état de cause supérieurs à ses besoins.

a. Selon l'art. 68 LPA, sauf exception prévue par la loi, le recourant peut invoquer des motifs, des faits et des moyens de preuves nouveaux qui ne l’ont pas été dans les précédentes procédures. A contrario, cette disposition ne permet pas au recourant de prendre des conclusions qui n’auraient pas été formées devant l’autorité de première instance.

b. L’objet du litige est principalement défini par l’objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu’il invoque. L’objet du litige correspond objectivement à l’objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF  136  V  362  consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/522/2017 du 9 mai 2017 ; ATA/907/2016 du 25 octobre 2016 ; ATA/459/2016 du 31  mai  2016). La contestation ne peut excéder l’objet de la décision attaquée, c’est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l’autorité inférieure s’est prononcée ou aurait dû se prononcer. L’objet d’une procédure administrative ne peut donc pas s’étendre ou qualitativement se modifier au fil des instances, mais peut tout au plus se réduire dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés. Ainsi, si un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions traitées dans la procédure antérieure (ATA/522/2017 précité ; ATA/907/2016 précité ; ATA/376/2016 du 3  mai  2016 et les références citées).

c. En l'espèce, l'intimée a réduit ses prétentions en proposant des volumes d'entreposage bien inférieurs à ceux autorisés par la décision entreprise, sous réserve de celui envisagé pour les matériaux de démolition non triés passant de
40 m³ à 165 m³. Toutefois, ces matériaux non triés seront des matériaux appartenant aux trois autres catégories, dont les volumes proposés par l'intimée ont été fortement réduits. Cette augmentation n'a dès lors aucune incidence sur les éventuelles nuisances causées, puisque dans l'ensemble les volumes seront moindres par rapport à ceux initialement envisagés. Par ailleurs, les surfaces d'entreposage ne sont pas modifiées. À cet égard, celle de 40 m² prévue pour les 165 m³ de matériaux de démolition non triés apparaît adaptée, dès lors qu'il n'est pas contesté qu'une surface de 45 m² est suffisante pour l'entreposage de 190 m³ de matériaux non bitumeux de démolition de route.

L'intimée a ainsi valablement réduit ses prétentions, en diminuant, dans l'ensemble, les volumes d'entreposage autorisés, ce qui ne modifie pas l'objet du litige.

Le chiffre 8 de la décision entreprise sera donc modifié avec les valeurs suivantes :

-                 béton de démolition : 550 m³ ;

-                 matériaux non bitumeux de démolition des routes : 190 m³ ;

-                 matériaux bitumeux de démolition des routes dont le liant à une teneur en HAP inférieure ou égale à 5'000 ppm : 300 m³ ;

-                 matériaux de démolition non triés : 165 m³.

d. En ce qui concerne les arguments nouveaux de la recourante, il est vrai que celle-ci a conclu à l'annulation de la décision globale depuis le début du litige. Toutefois, son recours devant le TAPI a été essentiellement dirigé contre la délivrance de l'autorisation de construire, l'intéressée ayant précisé recourir également contre celle d'exploiter dans la mesure où les deux autorisations étaient strictement indissociables. Plus particulièrement, ses griefs ont porté sur le défaut de planification coordonnée avec le développement prévu pour le secteur en question, sur les lacunes du REIE en rapport avec les questions des nuisances aériennes et sur le défaut d'autorisation de l'OCIRT. La recourante a ainsi limité l'objet du litige à ces questions.

Les nouveaux griefs formulés au cours de la présente procédure de recours concernent des questions de fait qui auraient déjà pu être invoquées devant le TAPI, puisqu'elles se fondent sur le projet déposé par l'intimée auprès du DETA. Dès lors qu'ils sortent du cadre strict du litige, ils sont irrecevables.

e. En tout état de cause, ces griefs seraient infondés pour les motifs qui suivent.

Il résulte de la procédure que le plan d'entreposage des déchets sur lequel se fonde la recourante pour soutenir une inadéquation « surface-volume » n'est pas celui qui a été validé par le GESDEC. Le 18 septembre 2014, l'intimée a en effet remis à cette autorité un plan actualisé puisque cette dernière avait remarqué que le plan initial comportait une incohérence avec les volumes envisagés. Les arguments de la recourante tombent ainsi à faux, cette dernière n'ayant du reste formulé aucun grief au sujet de l'adéquation prévue par le plan du 18 septembre 2014.

Les séparations dans la zone de stockage figurent sur ce même plan du 18 septembre 2014.

S'agissant des griefs relatifs au risque de génération d'eaux polluées, l'autorité intimée a soumis l'autorisation de construire à différentes conditions visant la protection des eaux, résultant du préavis du SERMA du 9 octobre 2014. Parmi ces dernières, il a été prévu que certaines modifications demandées au sujet du bac de décantation et du laveur de roues soient intégrées dans un plan
« Réaménagement – site Gradeg » devant être présenté à la DGEau trente jours avant le commencement des travaux. L'approbation de ce plan est nécessaire pour permettre l'ouverture du chantier.

La DGEau a ainsi examiné la question de manière circonstanciée, se réservant au surplus le droit de vérifier que toutes ses exigences seront remplies avant l'ouverture du chantier. Interpellée au terme de la présente procédure, elle a au demeurant maintenu sa position. Aucun élément au dossier ne permet de mettre en doute les capacités de jugement de cette entité spécialisée, de sorte que les reproches de la recourante apparaissent infondés.

Par ailleurs, le REIE prévoit que la zone de déchargement et celle de stockage des matériaux seront équipées d'un système automatique d'abattement de poussières par aspersion. Aucun élément au dossier ne permet de retenir que le système de brumisation, préconisé par la recourante, serait indispensable pour maintenir les nuisances de poussières générées dans les limites acceptables. Le témoin M. AMACHER a à cet égard évoqué la possibilité, et non pas la nécessité, de prévoir des buses pour diminuer la poussière générée par le déversement des camions. Au surplus, ainsi qu'il a été déjà exposé plus haut, les considérations techniques de la recourante ne sauraient se substituer à celles des autorités spécialisées, dans la mesure où il n'existe pas d'élément suffisant au dossier permettant de remettre en doute la fiabilité de leur appréciation.

Enfin, il n'appartient pas à l'autorité intimée de veiller à ce que l'intimée optimise son exploitation, de sorte que les arguments de la recourante liés à la capacité limitée de l'intimée à répondre aux demandes du marché ne sont pas pertinents.

11) C'est à juste titre que la recourante ne forme plus aucun grief, dans ses dernières écritures, lié au défaut d'autorisation de l'OCIRT.

En effet, l'art. 23 LGD prévoit qu'une installation d’élimination des déchets ne peut être mise en service qu’après contrôle du département et octroi de toutes les autorisations nécessaires, notamment celles délivrées en application de la législation sur le travail.

Or, l'OCIRT a validé le projet le 17 mai 2016, soit avant la mise en service de l'installation.

12) Compte tenu de ce qui précède, rien ne permettait à l’autorité intimée de s’écarter des avis favorables des entités consultées, de sorte que la décision entreprise sera confirmée sous réserve des valeurs mentionnées à son chiffre 8.

Au surplus, il sera constaté que la modification du chiffre 27 de la décision, ayant trait à la durée de l'autorisation, n'est pas litigieuse.

Le recours est donc partiellement admis.

13) Dans la mesure où la recourante succombe sur l'essentiel de son recours, elle sera condamnée au paiement d'un émolument s'élevant à CHF 3'500.-, comprenant les frais de témoin de CHF 280.- (art. 87 al. 1 LPA).

Vu l'issue du litige, une indemnité de procédure de CHF 4'000.-, à la charge de Rampini, sera allouée à Gradeg qui y a conclu et s'est fait assister d'un mandataire (art. 87 al. 2 LPA).

Aucune autre indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 4 avril 2016 par Rampini & Cie SA contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 février 2016 ;

au fond :

l'admet partiellement ;

modifie le chiffre 8 du dispositif de la décision globale du 21 novembre 2014 dont la nouvelle teneur est la suivante :

dit que les quantités de déchets stockés simultanément sur la plateforme sont limitées comme suit :

-                 béton de démolition : 550 m³ ;

-                 matériaux non bitumeux de démolition des routes : 190 m³ ;

-                 matériaux bitumeux de démolition des routes dont le liant a une teneur en HAP inférieure ou égale à 5'000 ppm : 300 m³ ;

-                 matériaux de démolition non triés : 165 m³.

confirme pour le surplus la décision globale du 21 novembre 2014, telle que modifiée par jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 février 2016 ;

met à la charge de Rampini & CIE SA un émolument de CHF 3'500.-, comprenant les frais de témoin de CHF 280.- ;

condamne Rampini & Cie SA à verser à Gradeg SA une indemnité de
CHF 4'000.- ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Mark Saporta, avocat de la recourante, à Me Tobias Zellweger, avocat de Gradeg SA, au département de l'environnement, des transports et de l'agriculture - Gesdec, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'à l'office fédéral de l'environnement.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Thélin et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. Poinsot

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :