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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/908/2022

ATA/116/2023 du 07.02.2023 ( FPUBL ) , ADMIS

Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;CLASSE DE TRAITEMENT;DROIT D'OBTENIR UNE DÉCISION;DÉCISION;NULLITÉ;REFUS DE STATUER;LÉGALITÉ
Normes : LPA.4; LPA.46; LPA.4.al4; Cst.29.al1; Cst.29.al2; LPA.18; LEPM.7; LTrait.1.al1.letb; LTrait.4; LTrait.6; LTrait.5; RTrait.2; RComEF.1.al1; RComEF.4; RComEF.5; RComEF.11.al1; RComEF.11.al4; LTrait.4.al2
Résumé : Recours contre une décision refusant d'entrer en matière sur une demande d'évaluation de fonction au motif que la recourante a accepté les termes de son contrat de travail au moment de sa signature et que la réorganisation des secrétariats n'a eu aucun impact sur sa fonction de secrétaire. Cette décision consacre un déni de justice et viole le principe de la légalité au motif que la mise en place d'une nouvelle structure, postérieurement à la signature de son contrat, a affecté la répartition de ses tâches et modifié significativement sa fonction. Recours admis.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/908/2022-FPUBL ATA/116/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 7 février 2023

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Charles Piguet, avocat

contre

HÔPITAUX UNIVERSITAIRES DE GENÈVE
représentés par Me Marc Hochmann Favre, avocat



EN FAIT

1) Madame A______ a été engagée dès le 1er janvier 2018 par les Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), sous le statut d'auxiliaire, en qualité de commise administrative 5 à 100 % au sein de la B______.

Elle était engagée en classe 14 annuité 15 de l'échelle des traitements du personnel de l’État de Genève et des établissements hospitaliers, ce qui correspondait à un salaire mensuel brut de CHF 8'022.55, sous déduction des charges sociales, versé treize fois l'an.

La durée de son engagement était prévue du 1er janvier au 31 décembre 2018.

2) Le 19 novembre 2018, à la demande de sa hiérarchie, le contrat de Mme A______ a été prolongé jusqu'au 31 décembre 2019.

3) Dès le 1er février 2019, Mme A______ a été rattachée au sein de C______ à un taux d'activité de 60 % ainsi qu'au sein du service D______ à un taux d'activé de 40 %, toujours à la B______.

4) Le 19 novembre 2019, le contrat de Mme A______ a, une nouvelle fois, été prolongé jusqu'au 31 décembre 2020.

5) À l'automne 2020, une évaluation des activités des secrétariats a débuté en vue de mettre en place un « pool » de secrétariat de la B______.

6) Le 21 décembre 2020, les HUG ont engagé Mme A______, dès le 1er janvier 2021 et pour une durée indéterminée, en qualité de secrétaire 2 à 100 % au sein de la B______ (40 % au service D______ et 60 % au Service E______).

Elle était engagée en classe 11 annuité 22 de l'échelle des traitements du personnel de l’État de Genève et des établissements hospitaliers, ce qui correspondait à un salaire mensuel brut de CHF 7'413.65, sous déduction des charges sociales, versé treize fois l'an.

Mme A______ a signé la lettre d'engagement le 5 janvier 2021, en indiquant manuscritement « Sous réserve du cahier des charges ».

7) Par courriel du 5 janvier 2021, lequel faisait suite à un entretien le 23 décembre 2020, Mme A______ a écrit à Monsieur F______, responsable des ressources humaines aux HUG.

Lors de cette rencontre, M. F______ lui avait annoncé son souhait de remettre en place les cahiers des charges et fonctions des secrétaires afin de garantir une homogénéité de traitement entre les secrétaires de l'institution. Selon elle, son poste actuel était comparable à celui qu'elle avait occupé lors de son engagement en tant que commise administrative 5.

Elle prenait note que son cahier des charges n'avait pas encore été élaboré et que M. F______ était disposé à réévaluer son poste « à sa juste valeur » et à rectifier sa classe de traitement « si justifié ».

8) Le 27 février 2021, dans le cadre de l'évaluation des activités des secrétariats, Mme A______ a transmis un descriptif de sa fonction liée aux différentes tâches administratives et spécifiques au sein des services de D______ et de renseignement et facturation.

9) Le 8 juillet 2021, la réorganisation des secrétariats des différents services de la B______ a été présentée au personnel lors d'une séance d'information.

Les objectifs du « pool » de secrétariat de la B______ étaient de garantir les remplacements et la mobilité, consolider ou créer des binômes, renforcer la transversalité et la polyvalence des secrétaires, partager plus régulièrement les connaissances entre les secrétariats et organiser les améliorations de processus.

Chaque secrétaire aurait la responsabilité du secrétariat d'un service et effectuerait la suppléance de la secrétaire responsable du secrétariat d'un autre service.

Plusieurs activités centralisées (économat/commandes, demandes administratives internes, mises en conformité des factures, saisie des absences/heures) seraient attribuées à l'une ou l'autre des secrétaires.

Le rattachement hiérarchique serait fait auprès de Madame G______ de la B______, alors que le rattachement fonctionnel le serait auprès du chef de service.

Mme A______ serait en charge du secrétariat du Service E______ et serait la suppléante de la secrétaire du service D______.

Les prochaines étapes de la mise en place du « pool » consistaient en la finalisation et l'évaluation du cahier des charges génériques ainsi que leur signature.

10) Le 28 septembre 2021, H______ a écrit au directeur général des HUG, indiquant défendre plusieurs femmes travaillant à la B______.

Il demandait l'abandon du projet de création du nouveau « pool » de secrétariat à la B______ et, concernant Mme A______, son retour en classe 14.

11) Le 18 octobre 2021, le directeur général des HUG a répondu que la réorganisation des activités au sein de la B______ avait eu pour priorité d'adapter l'organisation du travail à l'évolution des besoins et n'était pas associée à un objectif économique. Elle s'était réalisée sans que les traitements des collaboratrices concernées ne fussent revus à la baisse.

Des clarifications seraient apportées à ces collaboratrices pour éviter toute interprétation de la réalité.

12) Le 22 novembre 2021, les HUG ont informé Mme A______ que, dès le 1er novembre 2021, elle serait rattachée à Mme G______ et lui ont transmis son nouveau cahier des charges.

13) Le 2 décembre 2021, H______ a indiqué que les dégradations – touchant exclusivement des femmes – ne respectaient pas la loi et n'étaient pas compréhensibles. En effet, dans la séance du 8 juillet 2021, il avait été annoncé que la nouvelle organisation ne faisait qu'officialiser ce qui existait déjà.

14) Le 9 décembre 2021, H______ a demandé aux HUG de suspendre le déclassement et que le service d'évaluation des fonctions (ci-après : SEF) soit saisi pour qu'il procède à l'évaluation des fonctions réellement exercées par les employées de la B______. En effet, le déclassement avait été décidé sans que le SEF se soit prononcé sur la nouvelle collocation. De plus, les cahiers des charges transmis ne correspondaient pas à la réalité des tâches effectuées par les employées.

15) Le 22 décembre 2021, les HUG ont répondu que la situation concernée ne correspondait pas à des créations de postes mais à des fonctions déjà référencées au SEF. Le traitement des situations concernées n'était pas le reflet d'une inégalité de traitement entre les hommes et les femmes.

16) Le 25 janvier 2022, Mme A______ a demandé aux HUG qu'ils saisissent le SEF afin que ce service évalue son poste et qu'il détermine la classe de fonction à laquelle il devait être rattaché.

Après avoir collaboré en qualité d'assistante de direction – commise administrative 5 – durant trois années consécutives, la modification brutale et sans préavis de sa classe de fonction en secrétaire 2 le 1er janvier 2021 lors de son engagement à durée indéterminée avait occasionné une perte mensuelle nette de CHF 558.-. La modification de classe n'avait jamais été convenue avec sa hiérarchie.

La réorganisation opérée le 1er novembre 2021, avec son intégration au « pool secrétariat » et la modification de sa fonction précédente, constituaient la mise en place d'une nouvelle structure affectant la répartition des tâches, la définition des fonctions et une modification significative de poste.

Elle était ainsi en droit de demander l'évaluation de sa fonction.

Si les HUG refusaient de faire droit à sa demande, elle demandait à ce qu'une décision formelle au sens de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) lui soit notifiée.

17) Le 14 février 2022, les HUG ont répondu qu'il ressortait du dossier que Mme A______ avait été engagée dès le 1er janvier 2021 en qualité de secrétaire 2, colloquée en classe 11 annuité 22, après avoir occupé différentes fonctions en contrats de durée déterminée.

Il ne faisait aucun doute qu'elle avait accepté l'intégralité des termes de son contrat de travail au moment de sa signature. Revenir a posteriori sur les conditions de son engagement, qui plus était plus d'un an après, relevait de la mauvaise foi.

Son cahier des charges correspondait aux activités effectives qu'elle accomplissait dans le cadre de sa fonction, ce qu'elle ne contestait pas.

Sa fonction avait donc été colloquée en classe 11, correspondant au poste de secrétaire 2, conformément aux cahiers des charges existants au sein des HUG et préalablement évalués.

Pour le surplus, la réorganisation des secrétariats n'avait eu aucun impact sur l'affectation de sa fonction, dans le sens où elle avait conservé ses tâches, sa fonction et son traitement. Dès lors, les HUG ne donneraient pas suite à la demande d'évaluation de fonction.

Le courrier était signé par Monsieur I______, directeur des ressources humaines. Aucune voie de droit ne figure sur ce document.

18) Par acte du 21 mars 2022, Mme A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le courrier précité, concluant principalement à sa nullité, à ce qu'il soit ordonné aux HUG de déposer une demande d'évaluation de fonction auprès du département de la sécurité, de la population et de la santé pour transmission au SEF et à l'octroi d'une indemnité de procédure. Subsidiairement, le refus de la réévaluation de sa fonction devait être annulé et le même ordre devait être donné aux HUG en vue de la saisine du SEF.

Le refus d'entrer en matière sur sa demande d'ouverture d'une procédure d'évaluation de fonction par son employeur, ensuite de sa demande expresse de la notification d'une décision formelle, constituait une décision au sens de l'art. 4 LPA.

En tant que la décision attaquée avait été signée par une personne qui ne disposait d'aucun pouvoir de signature, elle était nulle.

La chambre administrative avait reconnu à de nombreuses reprises le droit à une réévaluation de fonction. Les instructions du Mémento des instructions de l’office du personnel de l’État (ci-après : MIOPE) à cet égard prévoyaient d'ailleurs cela lors de la mise en place d'une nouvelle structure affectant la répartition des tâches et la définition des fonctions ou lors de modifications significatives d'un poste. En l'occurrence, elle était bien titulaire du poste concerné et une nouvelle structure avait bien été définie avec l'instauration d'un « pool secrétariat », nécessitant la création d'un échelon hiérarchique supplémentaire et des responsabilités différentes de celles existant précédemment. Les conditions nécessaires à l'exercice du droit à la réévaluation de fonction étaient donc réunies, ce qui devait conduire à l'annulation de la décision attaquée.

19) Le 20 mai 2022, les HUG ont conclu, à la forme, à l'irrecevabilité du recours Au fond, le recours devait être rejeté.

La loi ne consacrait pas un droit de la recourante à obtenir en tout temps une réévaluation de sa fonction. La loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'État, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait - B 5 15) prévoyait certes que le Conseil d'État établissait et tenait à jour le règlement et le tableau de classement des fonctions permettant de fixer la rémunération de chaque membre du personnel en conformité de l'échelle de traitements. Toutefois, cette obligation n'avait pas pour corollaire un droit de la recourante à obtenir inconditionnellement – et en tout temps – la réévaluation de sa fonction. Le MIOPE ne constituait qu'une ordonnance administrative ne prévoyant du reste pas un droit inconditionnel à la réévaluation. Un tel droit serait par ailleurs impraticable pour des raisons pratiques au vu de l'effectif du SEF. Ainsi, à défaut de modifier la situation juridique de la recourante, le courrier des HUG du 14 février 2022 ne constituait pas une décision au sens de l'art. 4 LPA.

Le règlement des HUG du 8 février 2016 relatif à la répartition des compétences en matière de gestion du personnel ne prévoyait pas la compétence d'un organe particulier pour signer un courrier tel que celui attaqué. En toute hypothèse, dans la mesure où la recourante avait interjeté recours contre le courrier du 14 février 2022, elle n'avait subi aucun préjudice. Il ne pouvait donc pas être considéré comme nul ou annulé.

Le nouveau cahier des charges de la recourante en vigueur depuis le 1er novembre 2021 constituait le répertoire des tâches qu'elle effectuait depuis son engagement à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2021 en tant que « secrétaire 2 », étant relevé qu'elle effectuait en réalité ces tâches relevant de la fonction de « secrétaire 2 » depuis le 1er février 2019 déjà. La mise en place du « pool » secrétariat n'avait donc pas donné lieu à la création d'un nouveau poste ou d'une nouvelle fonction au sens du MIOPE, ni une nouvelle structure. Il s'agissait uniquement d'une réorganisation interne des ressources d'ores et déjà existantes. En l'absence de toute nouvelle fonction ou de toute nouvelle structure, il n'y avait pas lieu de mettre formellement en œuvre une procédure d'évaluation par le SEF.

Le refus d'entrer en matière opposé par les HUG n'était pas comparable aux refus du Conseil d'État d'entrer en matière sur des demandes de réévaluation qui avaient donné lieu aux ATA/211/2017 du 21 février 2017 et ATA/7/2020 du 7 janvier 2020. Il n'y avait en effet matériellement pas d'éléments pour soumettre au SEF une demande de réévaluation de la fonction. Le cahier des charges générique du « pool » secrétariat – qui correspondait aux fonctions effectives – avait été examiné par le responsable des ressources humaines et la direction des ressources humaines à la lumière des critères établis par le SEF. Compte tenu notamment des critères pris en considération (niveau de formation professionnelle, niveau d'expérience, niveau d'efforts intellectuels, niveau d'efforts physiques, niveau de responsabilité), et en procédant par analogie avec les cahiers des charges existants d'ores et déjà aux HUG, la fonction correspondante était celle de « Secrétaire 2 » colloquée en classe 11. Une évaluation de fonction à l'interne avait donc été effectuée et la recourante n'avait pas indiqué en quoi elle serait incorrecte.

En tout état, cette évaluation pouvait être objectivée en comparant le cahier des charges générique du « pool » secrétariat avec l'évaluation des fonctions-type de « secrétaire » référencées par l’office du personnel de l’État (ci-après : OPE). Trois fonctions-type relatives à la fonction de « secrétaire » étaient référencées par cet office, soit, Secrétaire 1 (classe maximale 9), Secrétaire 2 (classe maximale 11) et Secrétaire 3 (classe maximale 12). Les tâches mentionnées dans le cahier des charges générique du « pool » secrétariat ne relevaient pas de la fonction-type de « Secrétaire 3 » référencée par l'OPE qui prévoyait une « activité autonome » qui s'exerçait « dans plusieurs domaines hétérogènes » avec des « liaisons complexes et principalement orientées vers l'extérieur ». Ainsi, c'était au maximum la fonction-type de « Secrétaire 2 » référencée par l'OPE qui était envisageable dans le cas d'espèce. Compte tenu du large pouvoir d'appréciation dont disposaient les HUG en la matière, la collocation par les HUG de la fonction de la recourante de « Secrétaire 2 » en classe 11 n'était pas critiquable.

20) Le 11 juillet 2022, Mme A______ a persisté dans ses conclusions.

Elle ne prétendait pas avoir un droit « inconditionnel » à demander la réévaluation de sa fonction. Elle estimait en revanche être dans une situation dans laquelle une réévaluation de sa fonction était imposée par la pratique administrative. Le MIOPE précisait en effet que le titulaire du poste pouvait demander la réévaluation de sa fonction lors de la mise en place d'une nouvelle structure affectant la répartition des tâches et la définition des fonctions, ainsi que lors de modifications significatives d'un poste.

Dans plusieurs dossiers, la chambre administrative avait retenu que le refus du Conseil d'État d'entrer en matière sur une demande de réévaluation constituait un déni de justice. De plus, la réorganisation du secrétariat de la B______ et la création du « pool » avait nécessairement entraîné une modification de l'activité de toutes les personnes impliquées. Les objectifs de ce « pool » impliquaient une modification du travail, les secrétaires devant apprendre de nouvelles tâches pour mettre en œuvre la « transversalité » voulue. En charge d'un secrétariat de la B______, son activité était par essence complexe et transversale à laquelle s'ajoutaient les tâches de « pool ». Elle avait été intégrée dans une structure nouvelle, avait un nouveau responsable hiérarchique et devait se soumettre à une nouvelle manière d'envisager le secrétariat au sein de la B______. Il y avait donc bien eu la création d'une nouvelle structure, voire de nouveaux postes, ainsi qu'une modification significative de son poste, ce qui constituait un motif en faveur de la réévaluation de sa fonction.

Les HUG citaient les critères du SEF sans pour autant indiquer la note attribuée à chacun d'entre eux. Or, les définitions de fonction-type retenaient une notation précise de chacun des critères pris en considération. À suivre l'argumentation des HUG, Mme A______ aurait dû indiquer pourquoi une évaluation qu'elle n'avait jamais vue et dont elle ne connaissait aucun détail était inexacte ou arbitraire. Cela était impossible sauf à violer gravement son droit d'être entendue. En l'état, l'intéressée disposait du niveau de formation d'une commise administrative 5 et d'une très longue expérience professionnelle. Les tâches confiées étaient complexes et nécessitaient des efforts intellectuels importants, en raison du nombre élevé de liaisons et d'interactions dans et hors service, voire hors département.

Aucune évaluation sérieuse de la fonction de Mme A______ n'avait été faite à la création du « pool » et celle-ci devait être menée par le SEF, seul service compétent pour ce faire. Si la chambre administrative devait faire sien l'argumentaire des HUG exposant que ladite réévaluation avait déjà eu lieu, alors le résultat de celle-ci ne lui avait pas été communiqué ou lui avait été communiqué indirectement par le courrier du 14 février 2022. Dans un cas comme dans l'autre, Mme A______ ayant immédiatement contesté la réalité du cahier des charges produit par les HUG et la prétendue évaluation de fonction sous-jacente à celui-ci, le recours devrait être traité comme une opposition à cette réévaluation et transmis à la commission de réexamen en matière d'évaluation des fonctions (ci-après : CREMEF) pour instruction.

21) Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable sous ces angles (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA), étant précisé que ni la LTrait, ni le règlement instituant une commission de réexamen en matière d'évaluation des fonctions du 7 avril 1982 (RComEF - B 5 15.04) ne prévoient une autorité judiciaire spéciale susceptible de trancher le présent litige.

2) Les intimés soutiennent que leur courrier du 14 février 2022 ne constitue pas une décision au sens de l'art. 4 LPA, si bien que le recours devrait être déclaré irrecevable.

a. En vertu de l'art. 4 al. 1 LPA, sont considérées comme des décisions au sens de l'art. 1 LPA, les mesures individuelles et concrètes prises par l'autorité dans les cas d'espèce fondées sur le droit public fédéral, cantonal, communal et ayant pour objet : de créer, de modifier ou d'annuler des droits ou des obligations (let. a) ; de constater l'existence, l'inexistence ou l'étendue de droits, d'obligations ou de faits (let. b) ; de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations (let. c). Lorsqu'une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision (art. 4 al. 4 LPA).

b. En droit genevois, la notion de décision est calquée sur le droit fédéral (ATA/599/2021 du 8 juin 2021 consid. 5b ; ATA/1656/2019 du 12 novembre 2019 consid. 2b). Il ne suffit pas que l'acte querellé ait des effets juridiques, encore faut-il que celui-ci vise des effets juridiques. Sa caractéristique en tant qu'acte juridique unilatéral tend à modifier la situation juridique de l'administré par la volonté de l'autorité, mais sur la base de et conformément à la loi (ATA/599/2021 précité consid. 5b ; ATA/1656/2019 précité consid. 2c). La décision a pour objet de régler une situation juridique, c'est-à-dire de déterminer les droits et obligations de sujets de droit en tant que tels (Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2ème éd., 2015, p. 339 ss).

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, en droit public, la notion de « décision » au sens large vise habituellement toute résolution que prend une autorité et qui est destinée à produire un certain effet juridique ou à constater l'existence ou l'inexistence d'un droit ou d'une obligation ; au sens étroit, c'est un acte qui, tout en répondant à cette définition, intervient dans un cas individuel et concret (ATF 135 II 328 consid. 2.1 ; 106 Ia 65 consid. 3 ; 99 Ia 518 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_282/2017 du 4 décembre 2017 consid. 2.1). La notion de décision implique donc un rapport juridique obligatoire et contraignant entre l'autorité et l'administré. De simples déclarations, comme des opinions, des communications, des prises de position, des recommandations et des renseignements n'entrent pas dans la catégorie des décisions, faute de caractère juridique contraignant (arrêts du Tribunal fédéral 1C_593/2016 du 11 septembre 2017 consid. 2.2 ; 8C_220/2011 du 2 mars 2012 consid. 4.1.2).

c. Les décisions doivent être désignées comme telles, motivées et signées, et indiquer les voies et délais de recours (art. 46 al. 1 LPA). Elles sont notifiées aux parties, le cas échéant à leur domicile élu auprès de leur mandataire, par écrit (art. 46 al. 2 1ère phr. LPA).

d. Lorsqu'une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision (art. 4 al. 4 LPA).

Une autorité qui n'applique pas ou applique d'une façon incorrecte une règle de procédure, de sorte qu'elle ferme l'accès à la justice à la particulière ou au particulier qui, normalement, y aurait droit, commet un déni de justice formel. Il en va de même pour l'autorité qui refuse expressément de statuer, alors qu'elle en a l'obligation. Un tel déni constitue une violation de l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) (ATF 135 I 6 consid. 2.1 ; 134 I 6 consid. 2.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_59/2013 du 4 juillet 2014 consid. 2.1 ; 2C_409/2013 du 27 mai 2013 consid. 5.1 ; 5A_279/2010 du 24 juin 2010 consid. 3.3).

Pour déterminer si une autorité a commis un déni de justice, il faut préalablement examiner si elle avait l'obligation de rendre une décision (ATA/1523/2019 du 15 octobre 2019 consid. 3b et les références citées).

e. En l'occurrence, le courrier du 14 février 2022 ne contient pas le terme de « décision » ni l'indication d'une voie de recours.

Les HUG y indiquent toutefois qu'ils ne donneront pas suite à la demande de la recourante d'évaluation de sa fonction par le SEF. Ils rejettent ainsi une requête, laquelle peut avoir des conséquences sur la classification de la fonction de la recourante et ainsi conduire à une modification de son salaire. Ce document la touche donc directement et est destiné à produire un effet juridique par rapport à sa situation. Il s'agit donc d'une décision au sens de l'art. 4 LPA, sujette à recours.

Partant, le recours interjeté contre la décision du 14 février 2022 est recevable.

3) Dans le corps de son mémoire de recours, la recourante propose son audition et l'audition de témoins.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1).

Le droit de faire administrer des preuves n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1. ; 140 I 285 consid. 6.3.1).

Cela n'implique pas une audition personnelle de l'intéressé, celui-ci devant simplement disposer d'une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l'issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_83/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.2 ; 2C_236/2019 du 4 juillet 2019 consid. 5.2 ; ATA/484/2020 du 19 mai 2020 et les arrêts cités).

b. En l'occurrence, la chambre de céans dispose d'un dossier complet, lequel comprend notamment les écritures des parties ainsi que les pièces produites à leur appui, étant rappelé que la procédure administrative est en principe écrite (art. 18 LPA). La recourante ne soutient d'ailleurs pas que son audition et/ou celle de témoins apporteraient des éléments qui ne résulteraient déjà pas des pièces produites. Le dossier apparaît complet et en état d’être jugé.

Il ne sera dès lors pas donné suite à la mesure d'instruction sollicitée – implicitement – par la recourante.

4) La recourante considère que la décision attaquée est nulle au motif qu'elle est signée par le directeur des ressources humaines, lequel ne dispose d'aucun pouvoir de signature.

a. La nullité absolue d'une décision peut être invoquée en tout temps devant toute autorité et doit être constatée d'office. Elle ne frappe que les décisions affectées des vices les plus graves, manifestes ou du moins facilement reconnaissables et pour autant que sa constatation ne mette pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Sauf dans les cas expressément prévus par la loi, il ne faut admettre la nullité qu'à titre exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire (ATF 130 II 249 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_354/2015 du 21 janvier 2016 consid. 4.1). Des vices de fond d'une décision n'entraînent qu'exceptionnellement sa nullité. Entrent avant tout en considération comme motifs de nullité l'incompétence fonctionnelle et matérielle de l'autorité appelée à statuer, ainsi qu'une erreur manifeste de procédure (ATF 129 I 361 consid. 2.1 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_354/2015 du 21 janvier 2016 consid. 4.1).

Selon la doctrine et la jurisprudence, ce n’est que dans l’hypothèse d’une réparation impossible de ce vice que la sécurité du droit ou le respect de valeurs fondamentales implique l’annulabilité d’une décision viciée à la forme. Ce principe général découle des règles de la bonne foi qui, conformément à l’art. 5 al. 3 Cst., imposent également des devoirs à l’autorité dans la conduite d’une procédure (ATF 123 II 231 consid. 8b ; 119 IV 330 consid. 1c ; 117 Ia 297 consid. 2 ; ATA/1159/2022 du 15 novembre 2022 consid. 4b).

b. L'art. 7 de la loi sur les établissements publics médicaux du 19 septembre 1980 (LEPM - K 2 05) liste les attributions du conseil d’administration des HUG (let. a à j).

c. En l'espèce, les HUG n'ont pas produit leur règlement relatif à la répartition des compétences en matière de gestion du personnel adopté le 8 février 2016 par le conseil d'administration. Ils expliquent toutefois que ledit règlement ne prévoit pas la compétence d'un organe particulier au sein des HUG pour signer un courrier tel que celui attaqué.

Outre le fait que, dans sa réplique du 11 juillet 2022, la recourante n'a ni sollicité la production de ce règlement ni contesté les explications des HUG sur ce point, il ne ressort pas de l'art. 7 LEPM que le conseil d'administration des HUG serait compétent pour rendre la décision attaquée. En outre, selon le site Internet des intimés (https://www.hug.ch/direction-ressources-humaines, consulté le 25 janvier 2023), la direction des ressources humaines a pour mission de gérer efficacement les activités administratives notamment par l’application des politiques, lois et procédures en matière de ressources humaines, ainsi que de la gestion de la rémunération. Il apparaît ainsi que la direction des ressources humaines des HUG est bien l'organe compétent pour statuer sur la demande de la recourante, ce qu'elle ne conteste pas véritablement.

Il est vrai que M. I______ ne figurait pas au registre du commerce – il y figure toutefois depuis le 9 mai 2022 selon la publication dans la feuille officielle suisse du commerce en tant que directeur avec pouvoir de signature à deux –, toutefois il était déjà, au moment de la prise de décision, le directeur des ressources humaines, soit le poste le plus haut dans la hiérarchie de la direction en question, étant rappelé par ailleurs que selon l'art. 9 al. 3 LPA, les collectivités, institutions et autres personnes de droit public peuvent en outre se faire représenter par les membres de leurs autorités ou organes ainsi que par les membres de leur personnel, si bien que la question de l'inscription d'une personne au registre du commerce n'est en principe pas pertinente. En outre, la recourante n'a subi aucun préjudice de l'éventuelle informalité par rapport à son droit de signature, puisqu'elle a valablement pu recourir par-devant la chambre de céans, laquelle dispose d’un plein pouvoir d’examen. Au surplus, une annulation de la décision attaquée pour le motif allégué par la recourante serait constitutif de formalisme excessif, prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst., et contreviendrait au principe de la célérité et de l’économie de procédure.

Compte tenu de ces éléments, en tant que la décision querellée émane de l'autorité compétente, elle ne saurait être considérée comme nulle. Dans l’hypothèse où il faudrait retenir un motif d’annulabilité, force est de constater qu’il n’en est résulté, in casu, aucun préjudice irréparable pour la recourante.

Le grief sera donc écarté.

5) L'objet du litige consiste à déterminer si c'est de manière conforme au droit que les HUG ont refusé d'entrer en matière sur la demande d'évaluation de la fonction de la recourante et de la transmettre au SEF.

6) a. Aux termes de l'art. 1 al. 1 let. b LTrait, cette loi concerne la rémunération des membres du personnel de l’État de Genève, y compris le personnel des établissements publics médicaux.

b. Selon l'art. 4 LTrait, le Conseil d'État établit et tient à jour le règlement et le tableau de classement des fonctions permettant de fixer la rémunération de chaque membre du personnel en conformité de l'échelle des traitements (al. 1). Dans ce classement, il doit être tenu compte du rang hiérarchique et des caractéristiques de chaque fonction en prenant en considération notamment l'étendue qualitative et quantitative des attributions dévolues et des obligations à assumer, les connaissances professionnelles et aptitudes requises, l'autonomie et les responsabilités, les exigences, inconvénients, difficultés et dangers que comporte l'exercice de la fonction (al. 2).

L'autorité ou l'organe de nomination – soit la commission administrative des HUG en l'espèce (art. 6 LTrait) – fixe la rémunération des membres du personnel dans un acte d'engagement ou de nomination, en application de l'échelle des traitements, du tableau de classement des fonctions et des principes posés à l'art. 11 LTrait relatif au traitement initial (art. 5 LTrait).

c. La classe prévue pour la fonction est déterminée par le résultat de l'évaluation des fonctions. La liste des fonctions, mise à jour et approuvée par le Conseil d'État, est à disposition à l'OPE (art. 2 du règlement d'application de la LTrait du 17 octobre 1979 - RTrait - B 5 15.01).

d. Une CREMEF est instituée. Elle permet aux membres du personnel de l'État et des établissements publics médicaux de demander le réexamen des décisions relatives à l'évaluation des fonctions (rangement, cotation, classification) (art. 1 al. 1 RComEF). Sont susceptibles d'opposition toutes les décisions relatives à l'évaluation des fonctions mentionnées à l'art. 1 RComEF à l'exclusion des décisions prises lors de l'engagement (art. 4 RComEF). Peuvent faire opposition les membres du personnel de l'État et des établissements publics médicaux intéressés à titre individuel ou collectif pour la fonction qui les concerne ainsi que le département, l'établissement concerné ou le Grand Conseil, ce dernier étant représenté par son bureau (art. 5 RComEF). Après avoir vérifié la procédure et l'objectivité de l'analyse effectuée par l'OPE, la commission se prononce sur la décision contestée en formulant une proposition au Conseil d'État (art. 11 al. 1 RComEF). Le Conseil d'État statue en dernier ressort et communique sa décision à l'intéressé (art. 11 al. 4 RComEF ; ATA/1270/2021 du 23 novembre 2021 consid. 4e, ATA/1146/2019 du 19 juillet 2019 consid. 6a).

7) a. Le MIOPE réunit les directives précisant les pratiques communes dans l’application des lois et des règlements relatifs au personnel de l’État. Il constitue une ordonnance administrative. Les dispositions du MIOPE ne constituent pas des règles de droit et ne lient pas le juge ; toutefois, du moment qu'elles tendent à une application uniforme et égale du droit, les tribunaux ne s'en écartent que dans la mesure où elles ne restitueraient pas le sens exact de la loi (ATF 133 II 305 consid. 8.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_95/2011 du 11 octobre 2011 consid. 2.3 ; ATA/1160/2021 du 2 novembre 2021 consid. 6b ; ATA/648/2020 du 7 juillet 2020 consid. 5b).

b. Selon le point 1 de la fiche MIOPE n° 02.01.01, intitulée Évaluation ou révision de classification de fonction, du 1er février 2000, mise à jour le 15 juillet 2013 (disponible sur https://www.ge.ch/document/020101-evaluation-revision-classification-fonction, consulté le 25 janvier 2023), une demande d'évaluation est initiée par les directions de services de l'établissement en référence aux missions et prestations définies par l'établissement lors de la création d'un nouveau poste ou d'une nouvelle fonction (let. a), lors de la mise en place d'une nouvelle structure affectant la répartition des tâches et la définition des fonctions (let. b), lors de l'évolution significative d'une famille professionnelle ou d'un cursus de formation (let. c) et lors de modifications significatives d'un poste (let. d).

c. Une évaluation de poste ou de fonction peut notamment être demandée par la ou le titulaire d'un poste (point 2 let. a fiche MIOPE n° 02.01.01).

d. Lorsqu'elle concerne un poste isolé, la demande d'évaluation de fonction est soumise à la direction évaluation et système de rémunération de l'OPE (ci-après : DESR-OPE) par le service des ressources humaines du département de tutelle (point 4 fiche MIOPE n° 02.01.01).

Lorsqu'elle concerne plusieurs postes et/ou un secteur, la demande est soumise à la DESR-OPE par le service des ressources humaines du département de tutelle. Le responsable des ressources humaines (ci-après : RRH) du département de tutelle informe le collège spécialisé ressources humaines (ci-après : CSRH ; point 4 fiche MIOPE n° 02.01.01).

Lorsqu'elle concerne une ou plusieurs fonctions d'une famille professionnelle et/ou un nombre important de titulaires, la demande est adressée à la DESR-OPE par le service des ressources humaines du département de tutelle. La DESR-OPE procède à l'étude de la demande afin de mettre en exergue les éléments liés aux aspects transversaux de la ou des fonctions soumises à évaluation. La DESR-OPE transmet le résultat de l'étude au directeur général de l'OPE. Ce dernier présente le résultat de l'étude de la demande faite par la DESR-OPE au CSRH, lors de la séance mensuelle traitant des affaires de personnel. Sur la base du préavis du CSRH, le collège des secrétaires généraux se prononce quant à la suite à donner à la demande (point 4 fiche MIOPE no 02.01.01).

Lorsque le département est d'accord avec la proposition de l'OPE, celle-ci devient une décision de l'OPE. Si le département n'est pas d'accord avec la proposition, il adresse à l'OPE, service d'évaluation des fonctions, une lettre dûment motivée. La décision de l'OPE peut faire l'objet par la suite d'une opposition auprès de la CREMEF. En cas de déclaration de non-opposition, l'OPE établit sans délai un plumitif à l'intention du Conseil d'État pour ratification au moyen d'un extrait de procès-verbal de séance. En l'absence de la déclaration de non-opposition, l'OPE attend l'échéance du délai d'opposition de trente jours pour donner la suite qui convient (points 6 et 7 fiche MIOPE n° 02.01.01 ; ATA/7/2020 précité consid. 5c ; ATA/1146/2019 précité consid. 6a).

e. L'évaluation de fonctions contient, par la force des choses, une grande part d'appréciation, dont la concrétisation dépend de la façon dont une certaine tâche est perçue par la société, respectivement par l'employeur (ATF 125 II 385 consid. 5b et les références citées ; ATA/824/2012 du 11 novembre 2012 consid. 5b). Le point de savoir si différentes activités doivent être considérées comme étant de même valeur dépend d'estimations qui peuvent conduire à des résultats différents (ATF 129 I 161 consid. 3.2 ; 125 II 385 consid. 5b ; ATA/664/2010 du 28 septembre 2010 consid. 5 ; Vincent MARTENET, Géométrie de l'égalité, 2003, p. 284). Dans ce domaine, le pouvoir d'examen du juge est donc limité. Il doit ainsi en principe uniquement s'attacher à contrôler le respect des principes constitutionnels et à sanctionner, le cas échéant, l'abus du pouvoir d'appréciation (ATF 129 I 161 consid. 3.2 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_245/2007 du 30 octobre 2007 consid. 2 ; ATA/622/2013 du 24 septembre 2013 consid. 3 ; ATA/824/2012 consid. 5b).

8) a. La chambre administrative a eu à connaître de litiges concernant des employés de l'État de Genève qui souhaitaient que leurs fonctions soient évaluées (ATA/1270/2021 du 23 novembre 2021 ; ATA/850/2016 du 11 octobre 2016 ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 ; ATA/722/2015 du 14 juillet 2015 notamment). Dans ces cas, la procédure prévue par les dispositions légales précitées et le MIOPE a été enclenchée, et une décision du Conseil d'État a été prise quant au bien-fondé ou non de leurs demandes respectives (ATA/7/2020 précité ; ATA/407/2017 du 11 avril 2017 consid. 5f ; ATA/211/2017 du 21 février 2017 consid. 6f).

b. En 2017, la chambre administrative a considéré que le refus du Conseil d'État d'entrer en matière sur les demandes de réévaluation de la fonction de maîtresse et maître d'éducation physique de l'enseignement secondaire, et même de tous les niveaux d'enseignement s'apparentait à un déni de justice, dans la mesure où plus de quatre ans après l'entrée en vigueur initialement prévue du projet SCORE (1er janvier 2013), cette révision n'avait toujours pas abouti et compte tenu du fait que le MIOPE prévoyait que le titulaire d'un poste de la fonction publique pouvait demander que son poste ou fonction soit évalué, respectivement réévalué (ATA/211/2017 précité consid. 6g ; ATA/407/2017 précité consid. 6).

Cette jurisprudence a été reprise dans le cadre de l'ATA/7/2020 précité, précisant que le principe de la légalité était également violé. En effet, il a été retenu que tant que le système actuel de la LTrait et du RTrait demeurait en vigueur, le Conseil d'État ne pouvait pas adopter une position de principe ayant pour objet de refuser toute réévaluation de fonction collective ou sectorielle comme il l'avait décidé ; il ne pouvait refuser l'entrée en matière sur toute demande en ce sens sans aucun examen de l'évolution de la fonction en cause au regard des critères de l'art. 4 al. 2 LTrait. Un tel refus violait l'obligation légale du Conseil d'État de tenir à jour le tableau des fonctions. Le Conseil d'État ne pouvait donc refuser d'examiner les demandes de réévaluation en question sans examiner si le classement de la fonction d'examinatrice-auditrice et examinateur-auditeur était à jour ou non.

9) En l'espèce, les HUG ont refusé d'entrer en matière sur la demande d'évaluation de la fonction occupée par la recourante, indiquant qu'elle avait accepté les termes de son contrat de travail de durée indéterminée au moment de son engagement dès le 1er janvier 2021.

Or, le fait d'avoir accepté les termes de son contrat de travail le 1er janvier 2021 ne peut pas lui être opposé. En effet, la recourante soutient que son poste a connu, postérieurement à la signature de son contrat, des modifications significatives et que la répartition de ses tâches, voire la définition de sa fonction, ont été affectées par la mise en place d'une nouvelle structure.

Suivre la position des intimés reviendrait à rendre impossible toute demande de réévaluation de fonction alors qu'un collaborateur peut, pendant son engagement, se voir confier de nouvelles tâches, attributions ou responsabilités qui peuvent modifier substantiellement la fonction pour laquelle il avait été engagé initialement.

En outre, contrairement à ce que soutiennent les intimés, la B______, plus particulièrement son secrétariat, a connu des modifications importantes au cours de l'année 2021. Alors que jusqu'ici, les secrétaires étaient rattachées à un ou deux services de la B______, les intimés ont décidé de mettre en place, à partir du second semestre de l'année 2021, un « pool secrétariat DF » centralisant certaines activités des secrétaires avec un rattachement hiérarchique modifié.

Ce « pool », ayant pour but de renforcer la transversalité et la polyvalence des secrétaires, a eu pour conséquence que le poste pour lequel la recourante a été engagée a été modifié de manière significative. Ainsi, comme il ressort du nouveau cahier des charges de la recourante, celle-ci pourra être amenée à exercer des activités de « ______», telles que la mise en conformité de factures, gestion de l'économat, gestion de diverses commandes dans « ______ », « ______», diverses demandes de gestion administratives internes.

Compte tenu de ces modifications significatives du poste de la recourante résultant de la création de cette nouvelle structure et comme cela ressort de son nouveau cahier des charges, il ne peut pas être exclu que les points des critères « Formation professionnelle », « expérience professionnelle », « efforts intellectuels » et « responsabilité » par rapport à la définition de fonction-type soient différents de ceux correspondant à la fonction de secrétaire 2 faite par l'OPE. Par exemple, pour la fonction de secrétaire 3, ce poste implique notamment une activité autonome qui s'exerce dans plusieurs domaines hétérogènes contrairement à la fonction de secrétaire 2 dont les domaines d'activité sont homogènes. Or, prima facie, avec cette nouvelle structure, la recourante sera amenée à déployer ses activités dans plusieurs domaines/services, puisque l'objectif de la restructuration est de renforcer la transversalité, la polyvalence et la mobilité des secrétaires ainsi que de garantir leur remplacement. Elle pourrait donc être amenée à évoluer dans des domaines d'activités hétérogènes et non plus homogènes comme cela a été le cas jusqu'alors.

Dans ces circonstances, les conditions prévues par le point 1 let. b et d de la fiche MIOPE n° 02.01.01 apparaissent réalisées, étant précisé qu'il n'y a pas lieu de s'en écarter en l'espèce, puisque dans la classification de la fonction il convient de tenir compte notamment de l’étendue qualitative et quantitative des attributions dévolues et des obligations à assumer, des connaissances professionnelles et des aptitudes requises, de l’autonomie et des responsabilités, des exigences, inconvénients, difficultés et dangers que comporte l’exercice de la fonction en question (art. 4 al. 2 LTRait).

Au vu de ce qui précède, la décision litigieuse consacre un déni de justice, dans la mesure où elle prive la recourante d'une évaluation de sa fonction par le SEF, et viole le principe de la légalité.

Le recours sera donc admis. La décision de refus d'entrer en matière prononcée par les HUG le 14 février 2022, contraire au droit, sera annulée et le dossier sera retourné à ces derniers pour qu'ils entrent en matière sur la demande de réévaluation de la fonction de secrétaire 2, l'instruise selon la procédure mise en place par la fiche MIOPE n° 02.01.01 et que les autorités compétentes en la matière se déterminent sur son éventuel bien-fondé.

10) Vu l'issue du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée à la recourante, à la charge des intimés (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 21 mars 2022 par Madame A______ contre la décision des Hôpitaux universitaires de Genève du 14 février 2022 ;

au fond :

l'admet ;

annule la décision des Hôpitaux universitaires de Genève du 14 février 2022 ;

retourne le dossier aux Hôpitaux universitaires de Genève afin qu'ils entrent en matière sur la demande d'évaluation de la fonction de Madame A______ et l'instruisent au sens des considérants ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à Madame A______ à la charge des Hôpitaux universitaires de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral :

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Charles Piguet, avocat de la recourante, ainsi qu'à Me Marc Hochmann Favre, avocat des Hôpitaux universitaires de Genève.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, Mmes Lauber et Michon Rieben, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. Mazza

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :