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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1891/2017

ATA/1299/2019 du 27.08.2019 sur JTAPI/51/2018 ( LCI ) , REJETE

Recours TF déposé le 07.10.2019, rendu le 10.10.2019, IRRECEVABLE, 1C_539/2019
Descripteurs : PERMIS DE CONSTRUIRE;AUTORISATION PRÉALABLE;PRISE DE POSITION DE L'AUTORITÉ
Normes : LCI.5.al1; LCI.3.al1; LCI.11; LCI.15; LCI.48; LCI.49
Parties : CORNAZ Claude, BONASIAS Crocifissa et Alessandro, MATAMOROS Rafael, BARLET Gaëlle, BONASIAS Alessandro, KAISER Marion, ROCH Olivier, MINKOFF Francis, COZZULA Catherine, GANGSTED Jenna, RYDH Henrik, PORTAL Caroline, PERINET-MARQUET Alexis, RATSAPHONG Antoine, PHUTTHIKUN RATSAPHONG Prayong, WALTHER Eric, WALTHER Ana et Éric, RAPPAZ Bernard, RAPPAZ (CRETTOL) Cécile et Bernard, SCHLACHTER Bernhard, SCHLACHTER Ladonna et Bernhard, DETHURENS Olivier, ARNOLD Meinrad, ARNOLD Muriel et Meinrad, BLANC Diane, HALLER Jacqueline, TRUANT François, BEUCHAT Yvelise, DANEYROLE Rémi, LAMBIEL Micheline, CID Maris del Carmen, VIANIN Nathalie, DE CASTELBERG Christian, DANEYROLE Sophie et Rémi, BELLO Eleonora, FM PATRIMOINE IMMOBILIER SÀRL ET M. FRANCIS MINKOFF, MINKOFF Francis / DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE - OAC, ANGILOTTI Pierre, TELIS SA
Résumé : Rejet du recours du propriétaire d’une parcelle voisine, qui était à l’origine comprise dans la demande préalable de construire publiée dans la FAO, contre le jugement du TAPI confirmant l’autorisation préalable de construire. La cinquième version du projet litigieux excluant l’immeuble projeté sur ladite parcelle est une variante du projet initial n’exigeant pas une nouvelle publication de la demande dans la FAO. Le préavis favorable de la commission d’architecture ne doit pas comporter une motivation explicite concernant les raisons de l’octroi de la dérogation prévue à l’art. 11 LCI, ni concernant les considérations d’ordre esthétique des constructions projetées. Rejet des arguments relatifs aux vides d’étages et aux jours croisés.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1891/2017-LCI ATA/1299/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 27 août 2019

3ème section

 

dans la cause

 

Monsieur Francis MINKOFF et FM PATRIMOINE IMMOBILIER SÀRL
représentés par Me Delphine Zarb, avocate

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE

et

TELIS SA

et

Monsieur Pierre ANGILOTTI
Madame Muriel et Monsieur Meinrad ARNOLD
Madame Gaëlle BARLET
Madame Eleonora BELLO
Madame Yvelise BEUCHAT
Madame Diane BLANC
Madame Crocifissa et Monsieur Alessandro BONASIAS
Madame Maria del Carmen CID
Monsieur Claude CORNAZ
Madame Catherine COZZULA
Madame Sophie et Monsieur Rémi DANEYROLE
Monsieur Christian DE CASTELBERG
Monsieur Olivier DETHURENS
Madame Jenna GANGSTED
Madame Jacqueline HALLER
Madame Marion KAISER
Madame Micheline LAMBIEL
Monsieur Rafael MATAMOROS
Monsieur Alexis PERINET-MARQUET
Madame Caroline PORTAL
Madame Prayong PHUTTHIKUN RATSAPHONG
Monsieur Antoine RATSAPHONG
Madame Cécile CRETTOL RAPPAZ et Monsieur Bernard RAPPAZ
Monsieur Olivier ROCH
Monsieur Henrik RYDH
Madame Ladonna et Monsieur Bernhard SCHLACHTER
Monsieur François TRUANT
Madame Nathalie VIANIN
Madame Ana et Monsieur Eric WALTHER

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 18 janvier 2018 (JTAPI/51/2018)


EN FAIT

1) Le 22 juillet 2011, Monsieur Francis MINKOFF et Telis SA ont ensemble déposé, par l'intermédiaire d'un mandataire-architecte commun (ci-après : le mandataire), auprès de l'ancien département des constructions et des technologies de l'information ayant changé entre-temps d'appellation et devenu actuellement le département du territoire (ci-après : le département), une demande préalable d'autorisation de construire portant sur l'édification d'immeubles de logements avec commerces et parking souterrain, en 3ème zone à bâtir, sur la commune de Carouge, après démolition des bâtiments existants, notamment du bâtiment d'angle sis sur la parcelle n° 802. Ledit projet était prévu sur les parcelles nos 1'209, 1'210, 1'211, 1'253 et 1'254 ainsi que sur la parcelle no 802. Cette demande a été enregistrée sous le numéro DP 18'388-1.

Les parcelles nos 1'209, 1'210, 1'211, 1'253 et 1'254 appartiennent à Telis SA. Quant à la parcelle n° 802, elle était propriété de M. MINKOFF et est devenue celle de la société FM Patrimoine Immobilier Sàrl, dont M. MINKOFF est le gérant président.

La parcelle n° 802 se trouve au 2, rue des Caroubiers, sur l'un des angles du rond-point des Noirettes. Elle forme la pointe d'un triangle dont un côté est constitué des parcelles nos 1'209, 1'210 et 1'211, avec trois bâtiments situés aux 25, 27 et 29, rue des Noirettes, et dont l'autre côté comprend la parcelle no 1'254 avec deux bâtiments situés aux 4 et 6, rue des Caroubiers. La parcelle n° 1'253 est une cour intérieure au centre desdites parcelles.

Cette demande a été publiée le 15 août 2011 dans la Feuille d'avis officielle du canton de Genève (ci-après : FAO).

2) Lors de l'instruction de la demande préalable, les requérants ont déposé plusieurs versions modifiant leur projet initial, en raison notamment des préavis négatifs de la commune, du service des monuments et des sites (ci-après : SMS) et de la sous-commission architecture (ci-après : SCA) de la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après : CMNS).

a. Selon les préavis du SMS des 19 septembre 2011 et du 5 novembre 2012 et le préavis de la SCA du 19 février 2013, le projet était contraire aux dispositions légales en vigueur parce qu'il impliquait la démolition du bâtiment situé sur la parcelle des recourants, au 2, rue des Caroubiers. Ce bâtiment, construit en 1898, appartenait, avec les bâtiments situés aux 1 et 3, rue des Caroubiers et construits en 1897, à un ensemble du XIXème-XXème siècles protégé au sens de l'art. 89 ss de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05). L'implantation, le gabarit et le style de ces immeubles, situés en tête de la rue des Caroubiers et de la Gabelle, déterminaient la forme urbaine donnée au rond-point des Noirettes. Dans le cadre du projet « Praille-Acacias-Vernets », le SMS avait établi la liste des ensembles protégés dudit secteur, validée par la CMNS le 8 mai 2012. Ladite liste incluait les bâtiments sis au rond-point des Noirettes aux 1, 2, 3 et 5 rue des Caroubiers et aux 20 et 22, rue de la Gabelle.

Le SMS précisait aussi que les trois immeubles locatifs situés aux 25, 27 et 29, rue des Noirettes avaient été construits en 1947 et ceux situés aux 4 et 6, rue des Caroubiers l'avaient été en 1950, par les mêmes architectes et pour le compte de Telis SA.

b. Le 10 juillet 2013, le mandataire du projet indiquait au département ne pas pouvoir souscrire au préavis de la SCA au motif que le maintien du bâtiment d'angle « condamnerait le projet dans son ensemble ». Il lui demandait de traiter ce préavis « à l'interne de [ses] services ». Il a relancé le département, le 17 mars 2014, afin qu'il statue sur la demande préalable, précisant que le bâtiment dont la CMNS demandait le maintien n'avait, d'après lui, pas de valeur patrimoniale car il ne faisait pas partie d'un ensemble et qu'il était isolé sur le rond-point des Noirettes.

c. Le 2 avril 2014, le département rappelait au mandataire du projet litigieux le préavis défavorable de la CMNS fondé sur l'appartenance du bâtiment sis au 2, rue des Caroubiers à un ensemble protégé du XIX-XXème siècle. Dans la mesure où aucun élément témoignant d'un intérêt public prépondérant ne justifiait de s'écarter de celui de la protection du patrimoine, il apparaissait peu probable de ne pas prendre en compte le préavis de la CMNS et de délivrer l'autorisation sollicitée. L'instruction du dossier était poursuivie jusqu'à son terme.

3) Le 10 décembre 2015, le mandataire a déposé une nouvelle demande préalable d'autorisation de construire auprès du département visant le même type de projet qu'en juillet 2011, à savoir la construction d'immeubles de logements avec commerce et parking souterrain, sur les mêmes parcelles appartenant à Telis SA que le projet susmentionné de 2011, à l'exclusion de la parcelle n° 802 appartenant à M. MINKOFF. Ce dernier n'était plus mentionné dans ladite demande, celle-ci indiquant une autre société requérante et Telis SA à titre de seule propriétaire. Cette nouvelle demande faisait référence, dans la rubrique relative aux demandes liées, à la DP 18'388. Elle a été enregistrée sous le numéro
« A 18388/1/ /5/10.12.2015 ».

Dans le courrier accompagnant ladite demande, le mandataire a fait référence à une séance du 13 octobre 2015 avec deux architectes, membres de la commission d'architecture (ci-après : CA), au cours de laquelle avait été validée la nouvelle version du projet alors soumise au département. Il s'agissait de la cinquième version du projet qui n'incluait plus la parcelle n° 802 et qui ainsi n'affectait plus le bâtiment situé au 2, rue des Caroubiers. Le mandataire a rappelé au département la collaboration avec les représentants de la CA, dans ses courriers des 18 avril et 17 juin 2016.

4) Lors de l'instruction subséquente à cette demande, les préavis des instances consultées ont été favorables au projet, avec parfois des conditions ou des dérogations, étant précisé qu'une dernière version du projet a été déposée le 28 octobre 2016 afin de satisfaire les préavis des 4 avril et 18 août 2016 de la direction générale des transports demandant certaines modifications du projet notamment en lien avec la position de la rampe de parking pour des raisons de sécurité.

a. Le 19 février 2016, la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC) a émis un préavis favorable avec dérogations, mentionnant les
« pré-consultations » de la CA des 7 juillet, 1er et 15 septembre 2015. Elle répondait positivement à l'octroi de la dérogation fondée sur l'art. 11 LCI pour les rubriques relatives au rapport de surface, à la distance de limite de parcelle, aux vues droites sur parcelle, à la distance entre bâtiments et au gabarit théorique du bâtiment. Elle considérait respectées les questions portant sur la pente de la toiture, le vide d'étage, les constructions de peu d'importance et les jours croisés.

b. Le 23 février 2016, la CA a établi un préavis favorable avec dérogations et y indiquait être « favorable à la dérogation selon l'art. 11 LCI », sans davantage d'explications.

c. Dans le préavis du 17 mai 2016, le SMS a coché la rubrique intitulée « pas concerné ». Il avait pris connaissance du projet n° 5 enregistré le 10 décembre 2015. Il relevait d'emblée que le bâtiment sis au 2, rue des Caroubiers, appartenant à un ensemble protégé, était désormais « prévu maintenu » et qu'aucuns travaux le concernant n'étaient envisagés. Le projet portant désormais sur une « démolition / reconstruction » de bâtiments ne bénéficiant d'aucune mesure de protection effective, le SMS s'en remettait à l'analyse de la CA pour l'examen de cette requête, et en particulier en ce qui concernait l'harmonie des nouveaux gabarits dans les rues concernées ainsi que les raccords aux immeubles maintenus.

5) Entre le 20 septembre 2011 et le 23 mars 2016, la commune a préavisé négativement les trois premières versions et la cinquième version du projet litigieux. Seule la quatrième version a reçu un accueil favorable de la part de la commune avec toutefois plusieurs recommandations ; cette version correspondait au mieux à ses attentes s'agissant de la nouvelle proposition de gabarit pour le bâtiment et d'aménagement pour la cour.

Elle fondait son préavis négatif du 23 mars 2016 relatif à la cinquième version du projet, notamment sur l'abandon du traitement du bâtiment d'angle situé sur la parcelle n° 802 sur le rond-point des Noirettes, sur l'intérêt patrimonial de l'ensemble formé par les différents bâtiments d'angle sur ledit rond-point ainsi que la valeur d'un autre bâtiment avoisinant sis au 31, rue des Noirettes, et sur le fait que la requête proposait d'aligner le gabarit de la rue des Noirettes non pas sur les deux bâtiments avoisinants, mais sur des bâtiments situés plus au nord de cette rue. La commune demandait un même gabarit pour l'ensemble facilitant la lecture du rond-point et de l'îlot de la rue des Noirettes comme un tout. Elle proposait certaines améliorations.

6) Après en avoir informé la commune et les personnes ayant en août 2011 formé des observations, le département a, par décision du 30 mars 2017, octroyé l'autorisation préalable de construire DP 18'388-1, publiée le même jour dans la FAO, sur la base de l'art. 11 LCI. Ladite demande préalable était autorisée avec la réserve - figurant au chiffre 6 de l'autorisation délivrée - d'obtenir, parallèlement à l'autorisation de la demande définitive, une autorisation de démolir en bonne et due forme.

7) Plusieurs personnes, propriétaires et/ou domiciliées dans les immeubles proches du projet litigieux, ont recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) en concluant à son annulation. Ce recours a été enregistré sous la cause n° A/1891/2017.

8) M. MINKOFF et FM Patrimoine Immobilier Sàrl ont également, par recours séparé, contesté cette autorisation de construire en concluant principalement à sa nullité et subsidiairement, après apport de l'ensemble du dossier depuis 2011, à son annulation. Ce recours a été enregistré sous la cause n° A/2120/2017.

9) Après avoir reçu les déterminations de Telis SA, qui renvoyait à la position que prendrait le département, de ce dernier et des autres parties ayant contesté l'autorisation litigieuse, le TAPI a, par jugement du 18 janvier 2018, joint les deux recours sous le numéro de cause A/1891/2017 et les a rejetés. Il a également constaté que l'autorisation DP 18'388-1 du 30 mars 2017 mentionnait, à tort, M. MINKOFF en tant que requérant et propriétaire.

10) Seuls M. MINKOFF et FM Patrimoine Immobilier Sàrl ont interjeté recours le 19 février 2018 contre ce jugement auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) en concluant principalement à son annulation et à la constatation de la nullité de l'autorisation litigieuse. Subsidiairement, ils ont conclu à l'apport, par le département, de tout le dossier relatif à l'autorisation DP 18'388 depuis 2011 ainsi qu'à l'annulation de cette dernière.

En substance, ils reprochaient au département de ne pas avoir publié dans la FAO la demande préalable d'autorisation de construire sur les parcelles susmentionnées appartenant à Telis SA et jouxtant leur parcelle, déposée en décembre 2015, au motif qu'il s'agissait d'un projet différent de celui d'origine, qui excluait leur parcelle, mais qui les affectait directement. Ils n'avaient pas été informés de ce nouveau projet, ni n'avaient pu exprimer leur point de vue sur celui-ci.

De plus, le libellé des formules destinées à recueillir les préavis des instances spécialisées concernant ce nouveau projet visait toujours, et ce de manière erronée, la parcelle n° 802 des recourants ainsi que M. MINKOFF à titre de requérant, ce qui pouvait induire en erreur les instances consultées en leur laissant penser que ce dernier était d'accord avec ce nouveau projet, voire que sa parcelle faisait partie de celui-ci. Cela mettait en doute les préavis favorables à ce projet émis par les instances spécialisées, dans la mesure où ceux-ci étaient, en grande partie, assortis de conditions ou de dérogations pour l'octroi desquelles leur position, en tant que propriétaires de l'immeuble situé à la tête du triangle formé avec les parcelles précitées de Telis SA, jouait un rôle essentiel, notamment s'agissant du non-respect des vues droites et des distances entre bâtiments.

Ils critiquaient aussi le jugement querellé. Celui-ci n'exposait pas les faits de manière complète et claire, notamment en ne tenant pas correctement compte des « erreurs et lacunes procédurales » du département dans le traitement de l'autorisation et en omettant de rappeler le contenu et l'importance des préavis pour l'autorisation litigieuse. Les mentions erronées de celle-ci faisant figurer M. MINKOFF comme requérant et propriétaire, ne pouvaient pas être considérées comme des erreurs de plume. Ils invoquaient une violation de l'art. 3 al. 1 LCI et de leur droit d'être entendus en raison de l'absence de publication de la demande de décembre 2015 dans la FAO. M. MINKOFF avait renoncé au projet de construction seulement parce qu'il pensait que Telis SA y avait aussi renoncé ; il ignorait que tel n'était pas le cas jusqu'à la publication de l'autorisation litigieuse dans la FAO. La violation de leur droit d'être entendu ne pouvait pas être réparée devant la juridiction de céans car la décision litigieuse reposait sur des préavis basés sur des prémisses erronées. Ils ne partageaient pas la position du TAPI concernant les questions des vides d'étages, du dépassement de gabarit, des jours croisés, de l'intégration architecturale du projet litigieux avec leur bâtiment maintenu sur la parcelle n° 802 et celle de l'absence de motivation du préavis de la CA.

11) Le département a conclu au rejet du recours. Puis, les recourants ont dupliqué. Bien qu'informées du présent recours, ni Telis SA ni les autres personnes ayant recouru devant le TAPI dans la cause initialement enregistrée sous le numéro A/1891/2017, ne se sont manifestées devant la chambre administrative.

12) Les parties ont ensuite été informées que la cause était gardée à juger.

 

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) S'agissant de la conclusion subsidiaire des recourants sollicitant l'apport de l'intégralité du dossier relatif à la DP 18'388 depuis 2011, la chambre de céans n'y donnera pas suite, dans la mesure où, pour les raisons exposées ci-après, il ne s'agit pas d'une mesure nécessaire à l'issue du litige, ni à l'établissement de faits pertinents qui ont pu être établis sur la base des pièces et écritures des parties.

3) Les recourants se plaignent de l'absence de publication, dans la FAO, du projet présenté en décembre 2015 qui excluait leur parcelle, les indications contenues dans le libellé du projet soumis après cette date aux instances spécialisées pour préavis et dans celui de l'autorisation préalable de construire litigieuse étant erronés en ce qui concerne M. MINKOFF et sa parcelle. Ils invoquent la violation de l'art. 3 al. 1 LCI et de leur droit d'être entendus.

Le TAPI écarte ces griefs. Selon cette juridiction, le projet excluant l'immeuble situé au 2, rue des Caroubiers sur la parcelle des recourants, est une nouvelle variante qui ne requiert pas le dépôt d'une requête séparée ni son enregistrement sous un nouveau numéro de dossier. La limite entre un projet dont l'instruction peut se poursuivre en tant que variante et un projet nouveau devant faire l'objet d'une demande nouvelle est clairement posée par l'art. 10A du règlement d'application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (ci-après : RCI - L 5 05.01) : c'est le « projet sensiblement différent » du projet initial qui constitue cette limite. Cette différence sensible peut découler d'aspects architecturaux, de l'implantation ou du volume du projet. Dans ce dernier cas, le TAPI distingue entre une augmentation et une diminution de l'importance du projet. Si une augmentation très sensible de la hauteur ou de la profondeur du futur immeuble peut justifier de reprendre l'instruction du dossier à zéro, dès lors que de multiples aspects (architecturaux, spatiaux, de sécurité, de mobilité, etc.) peuvent être concernés, il n'en va pas de même lors d'une réduction sensible du projet car, à mesure que se réduit l'envergure d'un projet, ses impacts se réduisent en principe également. Tout au plus peuvent subsister des aspects négatifs déjà critiqués par les instances consultées, mais cela ne justifie pas de reprendre une instruction au début. Dans la présente affaire, le fait de renoncer à démolir l'immeuble situé sur la parcelle n° 802 des recourants n'a fait que réduire l'impact du projet à tous points de vue, notamment sur le plan patrimonial. Les immeubles faisant l'objet de l'autorisation litigieuse étaient déjà présents au départ, bien que sous une forme différente, mais cela n'est, pour les organismes chargés de préaviser, qu'une nouvelle variante. Quant à la possibilité pour les tiers de prendre connaissance du dossier et de se déterminer, en cas de réduction de l'ampleur du projet comme en l'espèce, il ne peut concerner d'autres tiers que ceux qui étaient censés consulter le dossier au départ ; ces derniers ne sont en principe pas davantage touchés lors de cette diminution qu'ils ne l'étaient potentiellement au début. S'agissant de M. MINKOFF, dans la mesure où il avait renoncé au projet, il ne subissait aucun préjudice du fait que Telis SA le poursuive de son côté. Les recourants avaient en outre pu recourir en temps utile contre l'autorisation litigieuse et faire valoir leurs droits.

a. La présente procédure a pour objet une autorisation préalable de construire. Selon l'art. 5 al. 1 LCI, la demande préalable tend à obtenir du département une réponse sur l'implantation, la destination, le gabarit, le volume et la dévestiture du projet présenté. D'après la jurisprudence, elle constitue une demande simplifiée qui peut être présentée avant le dépôt d'un projet définitif. Elle vise à épargner aux intéressés d'être contraints de dresser des plans de détail et à l'administration de compulser de tels plans, tant que les questions de principe n'auront pas été résolues (ATA/1017/2014 du 16 décembre 2014 consid. 3b ; ATA/692/1997 du 11 novembre 1997 consid. 5 ; ATA/423/1997 du 1er juillet 1997 consid. 2 et les arrêts cités).

L'art. 2 al. 1 à 3 LCI, l'art. 3 al. 1 à 5 LCI, et l'art. 4 al. 1 à 3 LCI sont applicables par analogie à la demande préalable (art. 5 al. 3 LCI). La réponse à la demande préalable régulièrement publiée vaut décision et déploie les effets prévus aux art. 3, 5 al. 1 et 146 LCI. Le recours dirigé contre une autorisation définitive, précédée d'une autorisation préalable en force au sens de l'art. 5 al. 1 LCI, ou d'un plan localisé de quartier en force, ne peut porter sur les objets tels qu'agréés par ceux-ci (art. 146 al. 1 LCI). Lorsqu'il est dirigé contre une autorisation définitive précédée d'une autorisation préalable ou d'un plan localisé de quartier en force, le recours n'a pas d'effet suspensif à moins qu'il ne soit restitué sur requête du recourant (art. 146 al. 2 LCI).

S'agissant de la procédure, toutes les demandes d'autorisation sont rendues publiques par une insertion dans la FAO ; il est fait mention, le cas échéant, des dérogations nécessaires (art. 3 al. 1 LCI). Pendant un délai de trente jours à compter de la publication, chacun peut consulter les demandes d'autorisation et les plans au département et lui transmettre ses observations par une déclaration écrite (art. 3 al. 2 LCI). Selon l'art. 3 al. 3 LCI, les demandes d'autorisation sont soumises, à titre consultatif, au préavis des communes, des départements et des organismes intéressés. L'autorité de décision n'est pas liée par ces préavis. Les communes et toutes les instances consultées formulent leur préavis dans un délai de trente jours à compter de la date d'enregistrement de la demande. Passé ce délai, le département peut statuer, considérant que le défaut de réponse équivaut à une approbation sans réserve. L'art. 3 al. 4 LCI dispose que lorsque le département refuse une autorisation, il se prononce néanmoins sur tous les éléments qui la concernent. D'après l'art. 3 al. 5 LCI, les autorisations sont publiées dans la FAO. Il est fait mention, le cas échéant, des dérogations accordées. Les personnes qui ont fait des observations en sont informées par simple avis.

b. Selon la jurisprudence de l'ancien Tribunal administratif reprise par la chambre de céans, la publication des demandes d'autorisation (art. 3 al. 1 LCI) compte au nombre des dispositions impératives du droit public (ATA/280/2006 du 23 mai 2006 consid. 6 et les arrêts cités ; ATA/860/2003 du 25 novembre 2003 consid. 7 et les arrêts cités). Le Tribunal administratif a jugé que l'omission de l'enquête publique avant l'octroi d'une dérogation entraînait la nullité de l'autorisation délivrée. Le fait que d'autres publications soient prévues par la loi ne saurait modifier la gravité des vices sans enlever aux prescriptions de droit public contenues dans la LCI leur caractère impératif (ATA W. du 4 septembre 1974 in RDAF 1965 pp. 33 et ss not. 39 consid. 5). Le Tribunal administratif a également considéré qu'une procédure accélérée (APA) appliquée à tort à une demande d'autorisation était de nature à empêcher toute opposition émanant des voisins et des tiers concernés, ce qui entraînait la nullité de l'autorisation y relative, les recourants n'ayant pas pu consulter la demande d'autorisation et les plans conformément à l'art. 3 al. 2 LCI (ATA/280/2006 du 23 mai 2006
consid. 7 s ; ATA/860/2003 du 25 novembre 2003 consid. 8 ss ; ATA/303/2000 du 16 mai 2000 consid. 5 ss). Il y a ici lieu de rappeler qu'en procédure accélérée, la demande d'autorisation n'est pas publiée dans la FAO, contrairement à l'autorisation (art. 3 al. 7 LCI), de sorte qu'il n'y a pas d'enquête publique comme en procédure ordinaire (art. 3 al. 2 LCI) et en cas de demande préalable (art. 5 al. 3 LCI).

c. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu'une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 142 II 218 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_157/2018 du 28 mai 2018 consid. 3.1 et les références citées ; ATA/723/2018 du 10 juillet 2018 et les arrêts cités).

Une décision entreprise pour violation du droit d'être entendu n'est pas nulle mais annulable (ATF 143 IV 380 consid. 1.4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_114/2018 du 31 juillet 2018 consid. 2.1 ; ATA/714/2018 du 10 juillet 2018 et les arrêts cités). En effet, selon un principe général, la nullité d'un acte commis en violation de la loi doit résulter ou bien d'une disposition légale expresse, ou bien du sens et du but de la norme en question (ATF 122 I 97 consid. 3 et les arrêts cités). En d'autres termes, il n'y a lieu d'admettre la nullité, hormis les cas expressément prévus par la loi, qu'à titre exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire (ATF 130 II 249 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_111/2016 du 8 décembre 2016 consid. 5 ; ATA/795/2018 du 7 août 2018 et les arrêts cités). Ainsi, d'après la jurisprudence, la nullité d'une décision n'est admise que si le vice dont elle est entachée est particulièrement grave, est manifeste ou du moins facilement décelable et si, en outre, la constatation de la nullité ne met pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Des vices de fond n'entraînent qu'à de rares exceptions la nullité d'une décision ; en revanche, de graves vices de procédure, ainsi que l'incompétence qualifiée de l'autorité qui a rendu la décision sont des motifs de nullité (ATF 138 II 501 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_120/2018 et 6B_136/2018 du 31 juillet 2018 consid. 2.2).

La réparation d'un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d'être entendu, n'est possible que lorsque l'autorité dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_556/2017 du 5 juin 2018 consid. 2.1; ATA/820/2018 du 14 août 2018 et les arrêts cités ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, p. 526 s. n. 1554 s. ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, ch. 2.2.7.4 p. 322 et 2.3.3.1 p. 362). Elle dépend toutefois de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception. Elle peut cependant se justifier en présence d'un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_556/2017 précité consid. 2.1 ; ATA/714/2018 précité). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu'elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/820/2018 du 14 août 2018 et les arrêts cités).

d. Le principe de la bonne foi consacré aux art. 9 et 5 al. 3 Cst. exige que l'administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale et leur commande de s'abstenir, dans leurs relations de droit public, de tout comportement contradictoire ou abusif (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2 ; 137 I 69 consid. 2.5.1).

Le principe de la confiance s'applique aux procédures administratives. Selon ce principe, les décisions, les déclarations et comportements de l'administration doivent être compris dans le sens que son destinataire pouvait et devait leur attribuer selon les règles de la bonne foi, compte tenu de l'ensemble des circonstances qu'il connaissait ou aurait dû connaître (arrêts du Tribunal fédéral 2P.170/2004 du 14 octobre 2004 in RDAF 2005 ; 2A.452/2002 du 6 décembre 2002 consid. 3.1 in fine; ATF 135 III 410 consid. 3.2 ; 126 III 189 consid. 2a ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 569 s). L'interprétation objectivée selon le principe de la confiance sera celle d'une personne loyale et raisonnable (ATF 116 II 431 consid. 3a ; ATA/399/2019 du 9 avril 2019 consid. 2). L'interprétation selon le principe de la confiance s'applique aussi aux déclarations de personnes privées (ATA/548/2018 du 5 juin 2018 consid. 4h et les références citées).

e. En l'espèce, les recourants reprochent au département de ne pas avoir informé M. MINKOFF de la poursuite de l'instruction de la demande préalable, à la suite de l'exclusion de la parcelle n° 802 du projet envisagé à l'origine avec Telis SA. Ils se plaignent aussi des indications erronées concernant M. MINKOFF et la parcelle n° 802 dans le libellé du projet contenu dans les formulaires de préavis et la décision finale. M. MINKOFF, alors seul propriétaire de la parcelle n° 802, indique avoir renoncé au projet car il pensait que Telis SA y avait également renoncé. Il considère avoir été écarté du projet par cette dernière sans en avoir été informé. Les recourants estiment que le changement des requérants et propriétaires concernés par la demande préalable, survenu avec le dépôt de la cinquième version du projet en décembre 2015, représente une modification exigeant l'ouverture d'une nouvelle procédure, une nouvelle instruction complète et une nouvelle publication de la demande dans la FAO, notamment au motif que « l'ancien "requérant" peut devenir "opposant" et [que] tous les rôles sont changés », en particulier lorsque la parcelle supprimée est « la tête de pont d'un ensemble ».

La question de savoir si une nouvelle publication au sens de l'art. 3
al. 1 LCI devait être effectuée lors de la modification du projet de décembre 2015 consistant à sortir la parcelle n° 802 du projet initial, doit s'examiner de manière objective, par rapport à l'ampleur des changements intervenus et à l'impact de ces derniers. Contrairement à ce que semblent penser les recourants, le fait que l'autorisation sollicitée soit, après leur sortie et celle de leur parcelle n° 802 du projet, accordée n'exige pas en soi une nouvelle publication au sens de l'art. 3 al. 1 LCI. Cela dépend d'une appréciation objective et concrète de l'évolution du projet. Sur ce point, la chambre de céans partage l'argumentation susmentionnée du TAPI relative à la distinction entre une augmentation et une diminution de l'importance du projet et aux considérations liées à ce cas de figure-ci. Dans la présente affaire, il n'est pas contesté que, hormis la suppression de la parcelle n° 802, le projet déposé en décembre 2015 est resté, s'agissant de son implantation, sa destination, son gabarit, son volume et sa dévestiture, identique pour les immeubles projetés aux 25, 27 et 29, rue des Noirettes et aux 4 et 6, rue des Caroubiers. Comme le retient à juste titre le TAPI, l'ampleur du projet initial, dont la demande a été publiée dans la FAO, s'est réduite avec la version déposée en décembre 2015, avec pour conséquence une réduction de l'impact du projet. Le fait que la forme du projet de construction ait changé en raison de la sortie de l'immeuble projeté sur la parcelle n° 802, n'a pas pour effet d'augmenter, notamment envers les voisins, les potentielles nuisances du projet par rapport à celles du projet d'origine. Quant à la présence de différences entre le projet initial et le projet autorisé, elle est inhérente à l'évolution habituelle d'un dossier de construction entre le début et la fin de l'instruction, du fait qu'il est soumis aux instances consultées chargées d'émettre des préavis, dont les considérations sont susceptibles de conduire à des modifications du projet initial dont la demande a été publiée dans la FAO. L'élément déterminant au regard de la nécessité d'une nouvelle publication au sens de l'art. 3 al. 1 LCI demeure l'ampleur des changements et ses potentiels nouveaux impacts.

Au regard de la fonction de la publication visée à l'art. 3 al. 1 LCI, il est en l'espèce indéniable que M. MINKOFF avait connaissance du projet initial de construction soumis au département et des plans y relatifs, vu sa qualité de
co-requérant avec Telis SA. Il était ainsi non seulement informé de la version initiale du projet et de la volonté de cette société de construire sur ses parcelles, mais également de l'évolution de ce dossier et en particulier des appréciations des instances consultées, en particulier du refus du SMS et de la SCA de démolir le bâtiment existant sur la parcelle n° 802 en raison de sa valeur patrimoniale. Il a ainsi pu participer à l'élaboration et à l'évolution du projet traité par le département, que ce soit directement ou par le biais du mandataire commun choisi avec Telis SA, et ce à tout le moins jusqu'au dépôt de la cinquième version en décembre 2015. Le fait qu'il ait alors choisi de renoncer au projet sur sa parcelle, ce qu'il reconnaît, n'a pas nécessairement pour conséquence d'obliger le département à procéder à une nouvelle publication au sens de l'art. 3 al. 1 LCI. Il y a alors lieu d'examiner l'ampleur et les répercussions des modifications, comme déjà exposé plus haut. Pour les raisons sus-évoquées, le projet déposé en décembre 2015 n'exigeait pas une nouvelle publication au sens de l'art. 3
al. 1 LCI.

Le fait que M. MINKOFF n'ait pas été informé par Telis SA et/ou par leur mandataire commun de la volonté de celle-ci de poursuivre le projet sans le recourant, ne change rien au regard de l'art. 3 al. 1 LCI. En effet, ce dernier avait, comme les personnes tierces ayant consulté la FAO lors de la publication de la demande, connaissance du projet initial de Telis SA et avait pu faire part de ses remarques. Le fait que sa position procédurale était alors différente ne change pas cela, étant au surplus précisé qu'il a pu défendre ses intérêts en lien avec l'immeuble projeté sur sa parcelle sur laquelle un bâtiment était déjà érigé et dont Telis SA a dû tenir compte dans le cadre de l'évolution du projet. Le but de l'art. 3 al. 1 LCI n'est pas de pallier des éventuels défauts de communication dans le cadre de relations contractuelles ressortant du droit privé.

M. MINKOFF était en outre, ou devait l'être, en raison de sa qualité de
co-requérant en tout cas jusqu'en décembre 2015, informé de la position du SMS et du blocage que cela avait sur la concrétisation du projet de construction commun. Dans ces circonstances et du point de vue d'une personne raisonnable placée dans une situation similaire, M. MINKOFF pouvait aisément imaginer l'hypothèse que Telis SA maintienne son projet de construction sur ses parcelles sans lui, dans la mesure où le blocage principal résidait dans l'opposition du SMS à la démolition du bâtiment existant sur la parcelle des recourants. Il aurait pu s'assurer auprès du département de la clôture de la procédure qu'il avait initiée avec Telis SA étant précisé que, dans ce type de situation, les requérants sont tenus de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA). Par ailleurs, le département ignorait l'état de la relation de M. MINKOFF avec Telis SA et leur mandataire, ce qui n'est pas contesté par les recourants. Ces derniers ne soutiennent pas avoir communiqué au département, au cours de l'instruction de la demande, un changement quelconque dans les relations contractuelles de M. MINKOFF avec ledit mandataire et/ou avec Telis SA. Le fait allégué que Telis SA, voire leur mandataire commun, lui ait caché cette volonté, voire l'ait écarté du projet, n'a pas d'impact sur l'objet de la présente procédure de recours limitée à l'examen de la conformité au droit de l'autorisation litigieuse, à l'exclusion de questions relevant du droit privé. Aucune violation du droit d'être entendu ne peut dans ce contexte être reprochée au département. Enfin et vu la poursuite du projet par Telis SA, tant M. MINKOFF que la société dont il est gérant président ont pu recourir contre l'autorisation accordée à l'issue de l'instruction de la demande préalable, sans subir de préjudice et en faisant valoir leurs droits en tant que propriétaire voisin des parcelles visées par le projet litigieux, notamment au sujet des « nombreux empiètements » du projet autorisé sur leur parcelle qu'ils invoquent, conformément à l'art. 47 LPA. Dès lors, les griefs tirés de la violation de l'art. 3 al. 1 LCI et du droit d'être entendu peuvent être écartés.

Concernant les erreurs susmentionnées dans le descriptif du projet, après la modification survenue en décembre 2015, il est certes regrettable que le département ait omis de supprimer dans le libellé du projet la mention de M. MINKOFF en tant que requérant et propriétaire ainsi que celle de sa parcelle. Toutefois, et suivant l'avis du TAPI, il y a lieu de considérer que ces erreurs proviennent d'une inattention du département dépourvue de conséquences juridiques, dans la mesure où les instances consultées ont suivi le dossier depuis le début et examiné plusieurs versions du projet, processus par ailleurs habituel en matière de projet de construction. Dans ces circonstances, il n'y a, en dépit des erreurs dans le libellé, aucun doute pour la chambre de céans que lesdites instances ont fondé leur préavis sur les versions successives du projet, et non sur le libellé erroné de ce dernier. Dès lors et contrairement à l'avis des recourants, il n'y a, en l'espèce, aucun vice grave susceptible d'entraîner la nullité de l'autorisation litigieuse. Quant à l'impact - invoqué par les recourants - du libellé erroné sur le contenu des préavis, il n'est ni étayé ni n'emporte, pour les raisons précitées, la conviction de la chambre de céans, les instances consultées étant habituées à devoir examiner, dans le cadre d'une même demande, plusieurs versions avec pour conséquence inévitable des modifications entre le projet initial et le projet autorisé à l'issue de l'instruction de la demande. Par ailleurs, dans l'hypothèse - soulevée par les recourants - dans laquelle leur accord aurait été nécessaire pour octroyer l'autorisation litigieuse, il est évident que le département ne se serait pas contenté des indications figurant dans le libellé du projet mais aurait requis les pièces utiles et signées par les intéressés. Cet argument ne peut donc être retenu.

4) S'agissant du gabarit, les recourants critiquent l'absence de motivation du préavis de la CA au motif que la distance de 10,14 m entre les alignements de l'immeuble projeté sur la parcelle n° 1'254 et celui situé en face, de l'autre côté de la rue sur les parcelles nos 1'190, 1'322 et 1'323, constituerait une dérogation importante par rapport à la distance de 11,40 m entre alignements imposée par la loi. Ils se plaignent aussi du fait que les dérogations accordées dans le préavis du DAC n'ont pas été motivées. L'absence de ces motivations ne leur permettrait pas de comprendre les éléments pris en compte par ces instances pour préaviser favorablement le projet litigieux.

En l'espèce, s'agissant du premier point, il n'est pas contesté que la dérogation en cause est d'une valeur inférieure à 1,5 m, comme cela a été retenu par le TAPI. Les recourants invoquent l'ATA/718/2012 du 30 octobre 2012 pour contester le fait que la juridiction précédente et le département se fondent sur le préavis de la CA pour autoriser cette dérogation, alors que ce préavis-ci n'est - hormis la référence à l'art. 11 LCI - pas motivé. Ils avancent le même argument par rapport aux dérogations admises par le préavis du DAC sur la base de
l'art. 11 LCI.

Or, c'est à juste titre que le TAPI rejette l'argumentation des recourants en se référant à l'évolution de la jurisprudence de la chambre de céans sur cette question. S'il est vrai que dans l'ATA/718/2012 invoqué par les recourants, cette dernière a estimé insuffisant un préavis favorable de la CA dépourvu de motivation explicite, les circonstances particulières de cette affaire rappelées par le TAPI ne sont pas comparables à celles du cas d'espèce. En effet, dans cet arrêt, la chambre administrative a précisé que, si un préavis favorable n'avait en principe pas besoin d'être motivé, il en allait différemment dans le cas qu'elle avait alors à traiter concernant un dépassement de gabarit de 4,44 m parce que les surélévations avaient été instaurées récemment dans la loi, qu'il s'agissait d'un des premiers cas où il en était fait application et que toute autorisation dérogatoire ne devait être délivrée qu'après un examen minutieux des conditions la permettant (ATA/718/2012 précité consid. 8).

Dans une jurisprudence ultérieure (ATA/414/2017 du 11 avril 2017 confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_297/2017 du 6 décembre 2017 consid. 3.4.2), rappelée par le TAPI, la chambre de céans a considéré qu'un préavis favorable n'avait en principe pas besoin d'être motivé. Néanmoins, lorsqu'une augmentation de la hauteur du gabarit légal était trop importante, elle devait faire l'objet d'un examen minutieux et le préavis de la CA devait, dans ce cas, contenir une motivation explicite (ATA/414/2017 précité consid. 7b). Dans cette affaire et comme l'a relevé le Tribunal fédéral, la chambre administrative avait procédé à plusieurs constats - exposés ci-après - lui permettant de conclure à l'absence de motif obligeant le département à s'écarter du préavis de la CA favorable à la dérogation fondée sur l'art. 11 LCI. Le préavis de l'inspection de la construction indiquait que le gabarit du bâtiment dépassait « très légèrement ». La CA avait identifié dès le début de l'instruction la nécessité d'une dérogation au sens de l'art. 11 LCI. L'examen des préavis successifs de la CA montrait qu'elle avait étudié le projet en cause avec diligence, en particulier quant à l'intégration de la surélévation autorisée dans l'ensemble des bâtiments érigés sur le périmètre concerné. Les demandes de modification et de compléments qu'elle avait requises montraient qu'elle avait examiné les conditions de l'octroi de la dérogation en cause (ATA/414/2017 précité consid. 7c et arrêt du Tribunal fédéral 1C_297/2017 précité consid. 3.4.2).

En l'espèce, un dépassement inférieur à 1,5 m ne constitue pas une dérogation importante exigeant une motivation explicite de la CA, contrairement à l'avis des recourants. De plus, après les deux préavis négatifs du SMS, le préavis négatif de la SCA et l'échange entre le mandataire et le département en mars-avril 2014, le projet autorisé a fait l'objet, en octobre 2015, d'un examen particulier avec deux membres de la CA, comme cela ressort de trois courriers du mandataire sans que cela ne soit contesté. Le grief doit donc sur ce point être écarté. Il en va de même par rapport aux dérogations mentionnées dans le préavis de la DAC pour les raisons suivantes. L'exigence de motivation accrue posée par la jurisprudence susmentionnée de la chambre de céans concerne le préavis de la CA, et non celui de la DAC. De plus, la présente procédure concerne l'autorisation préalable et ne porte ainsi que sur les questions d'implantation, de destination, de gabarit, de volume et de dévestiture du projet litigieux conformément à l'art. 5 al. 1 LCI, de sorte que les autres aspects qui ne sont pas déterminants pour l'autorisation préalable devront être détaillés et examinés dans le cadre de la demande définitive. Le préavis de la DAC fait en outre référence, en sus de la mention à l'art. 11 LCI, à trois « pré-consultations » de la CA et à la superstructure de la rue des Caroubiers en ce qui concerne la question du dépassement de gabarit « théorique » du bâtiment. Dans ces circonstances, il n'y a pas lieu de s'écarter des préavis positifs des deux instances précitées, ni d'exiger une motivation explicite du préavis de la CA.

5) Les recourants invoquent une violation de l'art. 15 LCI. Les dimensions « imposantes et non uniformisées » du projet litigieux nuiraient à l'intérêt patrimonial de l'ensemble formé par les différents bâtiments d'angle sur le
rond-point des Noirettes et un autre bâtiment voisin situé au 31, rue des Noirettes. Aucun travail architectural n'aurait été fait afin de lier les bâtiments modernes projetés à celui maintenu sur la parcelle des recourants. La CA aurait dû se prononcer de manière explicite sur l'harmonie des lieux, vu le dernier préavis du SMS qui s'en remettait à la CA au sujet de l'harmonie des nouveaux gabarits dans les rues concernées et les raccords aux immeubles maintenus. Le TAPI ne pouvait se contenter du préavis favorable non motivé de la CA.

Sur le premier argument, les recourants ne font que substituer leur propre appréciation à celle de la CA ; le fait que la commune s'oppose au projet en raison de l'intérêt patrimonial sus-évoqué n'y change rien, la CA étant, en l'espèce, l'organisme spécialisé sur cette question, ce qui n'est pas contesté. Dans la mesure où le département a suivi le préavis positif de la CA, après notamment la séance du 13 octobre 2015 entre deux membres de cette instance avec le mandataire du projet, et que l'art. 15 al. 2 LCI donne un poids particulier au préavis de la CA en matière d'esthétique des constructions, la chambre de céans doit, dans ces circonstances et à l'instar du TAPI pour partie composé de personnes possédant des compétences techniques spécifiques, observer une certaine retenue (ATA/417/2019 du 9 avril 2019 consid. 7 et les arrêts cités). Le premier grief des recourants doit donc être écarté.

Quant à la question de la nécessité d'une motivation explicite dans le préavis de la CA au sujet des considérations d'ordre esthétique, il y a lieu de rappeler, comme l'a fait le TAPI, qu'un préavis favorable n'a en principe pas besoin d'être motivé conformément à la jurisprudence de la chambre de céans (ATA/414/2017 du 11 avril 2017 consid. 7b). Par ailleurs, la chambre de céans ne voit, en l'espèce, pas de raison de remettre en cause sur le volet esthétique le préavis positif de la CA qui a examiné, notamment dans le cadre de la séance particulière sus-évoquée, le projet litigieux, plusieurs fois remanié vu les préavis négatifs du SMS et de la SCA. Elle partage la position du TAPI, selon laquelle le département et les tribunaux peuvent partir de l'idée que les questions d'intégration au bâti existant sont examinées par la CA qui, de l'expérience de la juridiction précédente, n'hésite pas, si elle l'estime nécessaire, à demander les modifications d'un projet afin de parvenir à une image satisfaisante. Le fait que le dernier préavis du SMS renvoie à l'appréciation de la CA ne change rien, l'élément déterminant étant que le projet litigieux soit soumis à cette instance-ci vu son champ de compétences, et non que la CA développe les raisons pour lesquelles elle est favorable au projet litigieux. Il ne se justifie donc pas, contrairement à l'avis des recourants, de s'écarter de la jurisprudence précitée ni d'exiger une motivation explicite du préavis positif de la CA. Ce second grief doit aussi être rejeté.

6) Les recourants ne partagent pas l'appréciation faite par le TAPI en ce qui concerne la question des vides d'étages et des jours croisés.

a. S'agissant des vides d'étages, le jugement querellé n'est pas critiquable, dans la mesure où l'objet du présent litige est une autorisation préalable de construire qui porte uniquement sur certains aspects parmi lesquels ne figure pas l'examen des vides d'étages (art. 5 al. 1 LCI). La conséquence de ceux-ci sur le gabarit n'est tout au plus, comme l'admettent les recourants, qu'indirecte, étant précisé que le calcul du gabarit ne fait pas référence aux vides d'étages (art. 11,
26 ss et 35 LCI). Cette question devra ainsi être examinée lors de la demande définitive, des dérogations étant prévues à certaines conditions par la loi
(art. 49 LCI) comme l'indique le TAPI. Ce grief est donc rejeté.

b. Pour des raisons similaires à celles sus-évoquées, l'argument relatif aux jours croisés invoqué par les recourants doit également être écarté. En effet, cet aspect n'a pas à être examiné dans une demande préalable de construire, mais le sera lors du dépôt de la demande définitive comme l'indique à juste titre le TAPI. Contrairement à l'avis des recourants, si certes le calcul des vues droites, qui est lié à la distance entre constructions (art. 48 LCI), dépend de l'implantation de l'immeuble, la définition de l'implantation n'est juridiquement pas dépendante de la question des vues droites, celles-ci servant à définir les pièces destinées à l'habitation de jour ou de nuit, les cuisines et les locaux où l'on travaille en permanence (art. 47 LCI). Il n'y a dès lors pas lieu de s'intéresser à ce stade à la question d'éventuelles servitudes entre les parcelles visées par le projet litigieux et la parcelle des recourants.

7) Enfin, quant au grief des recourants en lien avec les faits constatés par le TAPI, il s'agit plutôt d'une critique sur l'appréciation juridique des faits effectuée par cette juridiction, qui se recoupe en réalité avec les questions de droit déjà traitées. Il n'y a dès lors pas lieu de le développer davantage.

8) Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

9) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge conjointe et solidaire des recourants qui succombent (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 19 février 2018 par Monsieur Francis MINKOFF et FM Patrimoine Immobilier Sàrl contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 18 janvier 2018 ;

 

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge conjointe et solidaire de Monsieur Francis MINKOFF et FM Patrimoine Immobilier Sàrl ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Delphine Zarb, avocate des recourants, au département du territoire, à Telis SA, à Monsieur Pierre Angilotti et consorts, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Pagan et Mme Cuendet, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. Poinsot

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :