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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/687/2019

ATA/399/2019 du 09.04.2019 ( FPUBL ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/687/2019-FPUBL ATA/399/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 avril 2019

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Giuseppe Donatiello, avocat

contre

B______
représentée par Me Fabien Rutz, avocat



EN FAIT

1) Monsieur A______ a été engagé le 24 juillet 2017 par B______, dépendant de C______, en qualité « d'auxiliaire », avec la fonction de D______. Son cahier des charges comportait, notamment, l'établissement de systèmes de contrôle interne (ci-après : SCI). La durée de son contrat était limitée au 31 janvier 2018.

2) Le 5 décembre 2017, le directeur général de B______ a prolongé le contrat de M. A______ jusqu'au 30 janvier 2019.

3) Le 15 mars 2018, le Conseil d'administration de B______ a convoqué M. A______ à un entretien de service, dont le but était de l'entendre sur le non-respect de son cahier des charges, notamment sur l'élaboration du SCI. B______ comptait résilier son contrat de travail.

4) À la suite de la publication d'un article dans la presse citant les propos de la présidente du Conseil d'administration, M. A______ a sollicité la récusation de plusieurs personnes dont celle de cette dernière, ses déclarations violant le secret de fonction et démontraient sa prévention à son endroit. Il a également demandé la suspension de la procédure d'entretien de service jusqu'à droit jugé sur ses demandes de récusation.

5) Par décision du 26 avril 2018, B______ a rejeté les demandes de récusation, après avoir refusé de suspendre la procédure d'entretien de service.

6) Par décision du 9 mai 2018, le bureau du Conseil d'administration de B______ a résilié les rapports de service de M. A______ pour le 30 juin 2018 en raison de l'insuffisance de ses prestations.

7) Par arrêt du 8 janvier 2019, la chambre administrative de la Cour de justice a annulé les décisions de B______ des 26 avril et 9 mai 2018, constaté que la décision de celle-ci du 9 mai 2018 était contraire au droit, proposé la réintégration de M. A______ au sein de B______ et ordonné à cette dernière, en cas de refus de procéder à cette réintégration, de transmettre immédiatement sa décision à la chambre administrative.

Les règles sur la récusation avaient été violées. La résiliation, prononcée avec le concours d'une personne qui aurait dû se récuser, était ainsi contraire au droit. La réintégration de l'intéressé devait être ordonnée, étant relevé que son contrat arrivait à échéance le 31 janvier 2019.

8) Par courrier du 16 janvier 2019, dont elle a réservé une copie à la chambre de céans, B______ a indiqué à M. A______ :

« La présente fait suite à l'arrêt de la chambre administrative [...] par lequel cette dernière a proposé que B______ vous réintègre dans vos fonctions.

Par la présente, nous vous informons que nous entendons donner une suite positive à cette proposition et que vous êtes, dès lors, réintégré dans vos fonctions telles que définies dans le contrat signé le 24 juillet 2017 et prolongé par M. E______ en date du 5 décembre 2017. »

Compte tenu de la proche échéance des rapports de service, elle s'est proposé de le libérer de son obligation de travailler. Elle a annexé à son courrier le décompte final des créances salariales jusqu'au 31 janvier 2019, 13ème salaire et solde de vacances compris, précisant qu'un certificat de travail lui parviendrait ultérieurement.

9) Par acte déposé le 14 février 2019 auprès de la chambre de céans, M. A______ a fait valoir qu'il n'avait pas été réintégré. La réintégration était fictive. Il reprenait ainsi ses conclusions pécuniaires formulées dans son recours contre la décision de résiliation des rapports de service et concluait à ce que B______ soit condamnée à lui verser une indemnité correspondant à douze mois de son dernier salaire, en application de l'art. 31 al. 4 de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05).

10) Invitée à se déterminer, B______ a exposé qu'elle avait accepté de réintégrer M. A______. Le contrat de travail de ce dernier étant arrivé à son terme le 31 janvier 2019, elle l'avait libéré de son obligation de travailler entre le 16 et le 31 janvier 2019. Elle lui avait remis un décompte relatif aux prétentions salariales ainsi qu'une attestation selon laquelle les rapports de service avaient duré du 24 juillet 2017 au 31 janvier 2019 et comptabilisé, dans le traitement salarial, l'annuité supplémentaire relative au mois de janvier 2019.

M. A______ n'avait pas refusé sa réintégration. Il ne pouvait ainsi se prévaloir de l'alternative prévue à l'art. 31 al. 4 LPAC. Enfin, il ne pouvait, par le biais de la réintégration, bénéficier d'un contrat de durée indéterminée.

11) Par courrier du 19 mars 2019, la chambre de céans a informé les parties que la cause était gardée à juger.

12) Le 25 mars 2019, M. A______ a déposé une réplique spontanée.

B______ aurait eu la possibilité de le réintégrer pour une durée indéterminée, mais ne lui avait pas offert cette solution. Contrairement à ce que soutenait son employeur, il n'avait pas à accepter la libération de l'obligation de travailler. Il avait constamment manifesté sa volonté de poursuivre les rapports de service, dernièrement encore en postulant auprès de B______ pour la place de « chargé/e de projets », mise au concours en février 2019.

Au terme de son écriture, il a formellement conclu au constat que sa réintégration avait été refusée, subsidiairement que ce refus concernait la durée déterminée au 31 janvier 2019, et a repris ses conclusions pécuniaires.

EN DROIT

1) Le recours contre la décision de B______ du 16 janvier 2019 a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant conclut au constat que l'intimée aurait refusé sa réintégration, ce que cette dernière conteste, affirmant qu'elle avait, par son courrier du 16 janvier 2019, réintégré le recourant.

Il convient donc de déterminer si réintégration il y a eu ou non.

a. Selon l'art. 31 LPAC, si la chambre administrative retient que la résiliation des rapports de service est contraire au droit, elle peut proposer à l'autorité compétente la réintégration (al. 3). En cas de décision négative de l'autorité compétente ou en cas de refus du recourant, la chambre administrative fixe une indemnité dont le montant ne peut être inférieur à un mois et supérieur à vingt-quatre mois du dernier traitement brut à l'exclusion de tout autre élément de rémunération ; concernant un employé, l'indemnité ne peut être supérieure à six mois (al. 4).

b. Le principe de la bonne foi consacré aux art. 9 et 5 al. 3 Cst. exige que l'administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale et leur commande de s'abstenir, dans leurs relations de droit public, de tout comportement contradictoire ou abusif (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2 ; 137 I 69 consid. 2.5.1).

c. Le principe de la confiance s'applique également aux procédures administratives. Selon ce principe, les décisions, les déclarations et comportements de l'administration doivent être compris dans le sens que son destinataire pouvait et devait leur attribuer selon les règles de la bonne foi, compte tenu de l'ensemble des circonstances qu'il connaissait ou aurait dû connaître (arrêts du Tribunal fédéral 2P.170/2004 du 14 octobre 2004 in RDAF 2005 ; I 712A.453/2002 du 6 décembre 2002 consid. 3.1 in fine; ATF 135 III 410 consid. 3.2 ; 126 III 189 consid. 2a ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., n. 569 s). L'interprétation objectivée selon le principe de la confiance sera celle d'une personne loyale et raisonnable (ATF 116 II 431 consid. 3a).

d. En l'espèce, l'intimée, se référant à l'arrêt de la chambre de céans du 8 janvier 2019 qui proposait la réintégration du recourant, a écrit à ce dernier qu'elle entendait « donner une suite positive à cette proposition » et qu'il était « dès lors réintégré dans [ses] fonctions telles que définies dans le contrat signé le 24 juillet 2017 et prolongé [...] en date du 5 décembre 2017 ».

Cette formulation ne comporte aucune ambiguïté et ne prête pas à interprétation. Elle ne peut qu'être comprise comme l'acceptation par l'autorité intimée de la proposition de la chambre de céans de réintégrer le recourant au sein de B______. Partant et contrairement à ce que soutient le recourant, son chef de conclusions visant à constater que l'intimée aurait refusé de le réintégrer doit être rejeté.

Par ailleurs, le recourant ne s'est pas opposé à sa réintégration, déjà réclamée dans son premier recours. Il ne soutient au demeurant pas s'y être opposé, d'une part. D'autre part, aucun élément ne permet de retenir qu'un refus aurait été justifié. La seconde hypothèse de l'art. 31 al. 4 LPAC n'est donc pas réalisée.

Enfin, en tant que le recourant fait valoir que sa réintégration impliquait de le mettre au bénéfice d'un contrat de durée indéterminée, il ne peut être suivi. En effet, la réintégration prévue à l'art. 31 al. 3 et 4 LPAC intervient comme conséquence d'une résiliation des rapports de service contraire au droit. Elle replace la personne ayant fait l'objet d'une telle résiliation dans ses rapports de service, tels qu'ils existaient avant la résiliation. Elle ne tend pas à créer des rapports de service différents. L'intimée a ainsi, à juste titre, replacé le recourant dans les rapports de service le liant à elle avant la résiliation. Le contrat régissant ces rapports de service a été conclu pour une durée déterminée, dont l'échéance initialement fixée au 31 janvier 2018 avait été reportée au 31 janvier 2019. Le fait qu'une procédure ait opposé les parties, à la suite de laquelle le recourant a été réintégré, n'est pas de nature à modifier la nature des rapports de service liant les parties avant résiliation, notamment la durée de ces derniers.

L'intimée ayant correctement procédé à la réintégration du recourant, ce dernier ne peut faire valoir de prétentions issues d'un refus de réintégration fondées sur l'art. 31 al. 4 LPAC.

En tous points infondé, le recours sera rejeté.

3) Dès lors que le recourant succombe, il supportera un émolument de CHF 500.- et s'acquittera d'une indemnité de procédure de CHF 500.- en faveur de l'intimée (art. 87 al. 1 et 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 février 2019 par Monsieur A______ contre la décision de B______ du 16 janvier 2019 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de Monsieur A______ ;

alloue à B______ une indemnité de procédure de CHF 500.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

communique le présent arrêt à Me Giuseppe Donatiello, avocat du recourant, ainsi qu'à Me Fabien Rutz, avocat de B______.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, M. Thélin, MM. Pagan et Verniory, Mme Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :