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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2909/2024

JTAPI/684/2025 du 23.06.2025 ( LCR ) , REJETE

Descripteurs : VIOLATION DES RÈGLES DE LA CIRCULATION;RETRAIT DE PERMIS;TÉLÉPHONE MOBILE
Normes : LCR.31.al1; OCR.3.al1; LCR.16a.al1.leta; LCR.16a.al2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2909/2024 LCR

JTAPI/684/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 23 juin 2025

 

dans la cause

 

 

Monsieur A______, représenté par Me Mauro POGGIA, avocat, avec élection de domicile

contre

OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1981, est titulaire d’un permis de conduire pour la catégorie B depuis le 20 avril 2004.

2.             Par décision du 24 mars 2023, l’office cantonal des véhicules (ci-après : OCV ou l’office) a prononcé un avertissement à son encontre, en application de l’art. 16a de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01). Il lui était reproché de n’avoir pas voué toute l’attention nécessaire à la route et à la circulation en manipulant un téléphone portable lors de la conduite, le 1er mai 2022 à Lauterbrunnen. L’infraction devait être qualifiée de légère.

3.             Le 29 février 2024, à 15 heures 55, lors d’une action de circulation « B______ », M. A______ a été interpellé par la police municipal de la Ville de Genève alors qu’il circulait au volant d’un véhicule de marque C______, à l’avenue d’Aïre en direction de la place des Charmilles.

Selon le rapport de police établi le 5 mars 2024, l’appointé D______, posté à la hauteur du numéro 1 de la promenade de l’Europe, avait constaté que l’intéressé manipulait son téléphone portable sans vouer toute l’attention nécessaire aux besoins de la circulation. Intercepté à la hauteur de l’école primaire des Charmilles, M. A______ avait dans un premier temps contesté les faits reprochés et avait été déclaré en contravention sur-le-champ.

4.             Par ordonnance pénale du service des contraventions du 4 avril 2024, M. A______ a été condamné à une amende de CHF 240.- en raison des faits précités, en application des art. 31 et 90 LCR ainsi que 3 de l’ordonnance sur les règles de la circulation routière du 13 novembre 1962 (OCR - RS 741.11). Il était retenu : inattention et manipulation du téléphone portable. L’intéressé n’ayant pas fait opposition à cette ordonnance, elle est entrée en force.

5.             Par courrier du 16 mai 2024, l’OCV a informé M. A______ de ce que les autorités de police avaient porté à sa connaissance l’infraction du 29 février 2024. Les constatations des organes de police pouvaient aboutir à une mesure administrative, tout à fait indépendante de l’amende ou d’une autre sanction pénale que les autorités judiciaires compétentes pouvaient prononcer. Un délai de 15 jours lui était accordé pour lui faire part de ses observations.

6.             M. A______ a présenté ses observations par courriel du 3 juin 2024.

Lors du contrôle routier du 29 février 2024, le policier l’avait accusé d’avoir utilisé son téléphone portable au volant. Il avait pu prouver que tel n’était pas le cas, mais le policier avait informé son collègue l’avoir vu avec le téléphone à la main. Il avait été verbalisé pour cela en recevant une amende pénale de CHF 250.- (sic) qu’il avait payée. C’était la première fois qu’il recevait ce genre d’amende. Il estimait faire l’objet d’un acharnement gratuit, car il avait réglé la contravention sans faire d’histoire.

7.             Par décision du 13 août 2024, l’OCV a prononcé le retrait du permis de conduire de M. A______ pour une durée d’un mois.

Il était retenu à titre d’infraction : ne pas vouer toute l’attention nécessaire à la route et à la circulation en manipulant un téléphone portable, le 29 février 2024 à 15 heures 55, sur l’avenue d’Aïre, à Genève, en direction de la place des Charmilles, au volant d’une voiture. Il s’agissait d’une infraction légère aux règles de la circulation routière. L’intéressé ne pouvait pas justifier d’une bonne réputation, le système le système d’information relatif à l’admission à la circulation (SIAC) faisant apparaître un antécédent, soit un avertissement prononcé par décision du 24 mars 2023. Il ne justifiait pas non plus d’un besoin professionnel de conduire des véhicules automobiles. Compte tenu de l’ensemble des circonstances, la mesure prononcée ne s’écartait pas du minimum légal.

8.             Le courrier d’accompagnement du même jour indiquait à M. A______ que la durée du retrait était fixée du 15 octobre 2024 au 14 novembre 2024, dates incluses, le permis devant être déposé à l’OCV avant la date indiquée.

9.             Par acte du 9 septembre 2024, sous la plume de son conseil, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) contre cette décision, concluant, à titre préalable, à l’audition des appointés D______ et E______, à titre principal, à l’annulation de la décision, subsidiairement, à ce que seul un avertissement soit prononcé, le tout sous suite de dépens.

Il contestait avoir commis une violation de la LCR et en particulier d’avoir fait usage de son téléphone portable durant la conduite. En effet, il avait immédiatement expliqué à l’agent qui l’avait interpellé qu’il s’était borné à rattraper son téléphone qui avait glissé de son siège pour le poser sur le siège passager. Au volant d’une voiture de sport basse, il était vraisemblable que l’agent posté en haut de la rue ait constaté qu’il tenait son téléphone à la main et en avait déduit qu’il téléphonait, ce qui était inexact. D’ailleurs, il avait immédiatement proposé, sans obtenir de réaction favorable, que l’on examine son téléphone portable pour s’assurer qu’il n’y avait ni appel ni message entrants ou sortants au moment où il était passé devant le collègue ayant signalé l’infraction alléguée. Il n’avait d’ailleurs même pas été confronté à l’appointé D______, lequel se trouvait toujours à son poste d’observation. Il sollicitait ainsi l’audition des deux agents afin d’établir que ce qui avait été observé et qui avait été interprété comme une utilisation d’un téléphone pouvait parfaitement correspondre aux explications données au moment de son interpellation.

Les faits reprochés ne sauraient être qualifiés de faute bénigne avec légère mise en danger de la sécurité, faute de de quoi il faudrait sanctionner un conducteur sur deux en ville de Genève. Il se demandait d’ailleurs s’il aurait autant suscité l’attention de la police s’il avait été au volant d’un autre véhicule.

Enfin, même si l’on devait retenir les constatations hautement discutables de la police municipale, il s’imposerait alors de limiter la mesure à un simple avertissement, dès lors que l’infraction était particulièrement légère, n’ayant engendré aucune mise en danger et s’apparentant à un geste que n’importe quel conducteur était susceptible de faire lors d’une conduite en zone urbaine à faible allure. À cela s’ajoutait qu’il était amené à conduire régulièrement pour des raisons professionnelles et qu’un retrait de son permis de conduire aurait des conséquences graves sur le cours de son activité.

10.         Dans ses observations du 11 novembre 2024, l’OCV a persisté dans les termes de la décision entreprise et conclu au rejet du recours, sous suite de frais et dépens. Il a produit son dossier.

Sa décision était conforme à la loi et à la jurisprudence fédérale en matière d’inattention à la suite d’une manipulation d’un téléphone portable et compte tenu de l’antécédent du recourant, prononcé de surcroît pour le même motif. Il estimait ne pas avoir mésusé de son pourvoir d’appréciation en qualifiant l’infraction de légère au sens de l’art. 16a al. 1 let. a LRC et si le recourant ne s’estimait pas responsable, il lui aurait appartenu de s’opposer à la contravention établie à son encontre et de faire valoir ses réquisitions de preuve, en lieu et place de s’acquitter de l’amende par gain de paix.

11.         Par réplique du 19 novembre 2024, M. A______ a persisté dans son argumentation et dans ses conclusions, en particulier s’agissant de l’audition des deux agents de police municipal qui avaient prétendument constaté l’infraction.

12.         Par courrier du 5 décembre 2024, l’autorité intimée a indiqué au tribunal ne pas avoir d’observations complémentaires à formuler.

13.         Le 14 avril 2025, le tribunal a sollicité du recourant la production de l’ordonnance pénale prononcée à son encontre en lien avec les faits du 29 février 2024.

14.         Par courrier du 22 avril 2025, le recourant a informé le tribunal ne pas retrouver le document en question, relevant pour le surplus que les auditions sollicitées devaient pouvoir éclairer davantage le tribunal que la lecture de l’ordonnance pénale qui retenait une amende, réglée par gain de paix car il devait quitter la Suisse pour une période prolongée et en pensant que ce malheureux malentendu n’aurait pas d’autres suites.

15.         Par courrier du 28 avril 2025, le tribunal a relancé M. A______, lui rappelant son devoir de collaboration.

16.         Par courrier du 8 mai 2025, M. A______ a transmis au tribunal une copie de l’ordonnance pénale du 4 avril 2024, relevant qu’il n’était pas retenu qu’il ait téléphoné en conduisant, mais qu’il ait été inattentif en manipulant son téléphone portable, ce qui était différent. Or, il contestait avoir été inattentif à la circulation. Le fait de déplacer son téléphone, initialement situé sous sa cuisse droite, pour le poser sur le siège passager, n’équivalait pas à téléphoner. Si l’on devait retenir une responsabilité à ce titre, l’automobiliste qui réglait sa radio était de toute évidence plus dangereux que celui qui déplaçait son téléphone en gardant son attention sur la route. Enfin, il s’était acquitté de l’amende dans la mesure où il devait se rendre à l’étranger, qu’il ne souhaitait pas être convoqué en son absence, et qu’il pensait que cela en resterait là. En aucun cas il n’avait accepté la matérialité des faits, et il l’avait fait savoir lors de son interpellation.

17.         Par courrier du 23 mai 2025, l’OCV a persisté dans les termes de sa décision, relevant que les faits retenus dans l’ordonnance pénale, qui relevaient également du rapport de contravention, étaient définitivement établis. En l’absence d’une opposition formulée dans le délai imparti, le recourant n’était plus en mesure de les contester et/ou de soumette à l’attention du tribunal une nouvelle interprétation de ces derniers.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l’OCV (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 de la loi d’application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             Le recourant sollicite préalablement sa comparution personnelle, ainsi que l’audition des deux agents de police présents au moment des faits, afin « d’établir ce qui a été observé ».

6.             Le droit d’être entendu garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération Suisse du 18 avril 1999 (Cst. – RS 101) comprend notamment le droit, pour l’intéressé, de s’exprimer sur les éléments pertinents avant qu’une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d’avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités). Toutefois, ce droit ne peut être exercé que sur les éléments qui sont déterminants pour décider de l’issue du litige. Il est ainsi possible de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l’authenticité n’est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsque le juge parvient à la conclusion qu’elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu’elles ne pourraient l’amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_576/2021 du 1er avril 2021 consid. 3.1 ; 2C_946/2020 du 18 février 2021 consid. 3.1 ; 1C_355/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.1).

Par ailleurs, le droit d’être entendu ne comprend pas celui d’être entendu oralement (cf. not. art. 41 in fine LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6.1 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_668/2020 du 22 janvier 2021 consid. 3.3 ; 2C_339/2020 du 5 janvier 2021 consid. 4.2.2 ; ATA/672/2021 du 29 juin 2021 consid. 3b) ni celui d’obtenir l’audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_725/2019 du 12 septembre 2019 consid. 4.1 ; 2C_1004/2018 du 11 juin 2019 consid. 5.2.1 ; 2C_1125/2018 du 7 janvier 2019 consid. 5.1 ; ATA/672/2021 du 29 juin 2021 consid. 3b).

7.             En l’occurrence, le dossier en possession du tribunal, soit notamment l’ordonnance pénale du 4 avril 2024 et le rapport de contravention du 5 mars 2024, contient les éléments suffisants et nécessaires à l’examen des griefs et pour trancher le litige. Comme cela sera développé ci-après, l’audition des agents de police ne se révèle nullement nécessaire puisque les faits sont établis par l’issue de la procédure pénale, le tribunal de céans n’ayant pas vocation à mener une instruction que le recourant a renoncé à solliciter auprès des instances pénales, comme on le verra plus loin. Au demeurant, il faut rappeler que les constatations figurant dans un rapport de police, établi par des agents assermentés, ont une valeur probante accrue (cf. ATA/1411/2017 du 17 octobre 2017 ; ATA/73/2017 du 31 janvier 2017 ; ATA/902/2016 du 25 octobre 2016 ; ATA/99/2014 du 18 février 2014). S’agissant de sa comparution personnelle, le recourant a pu développer son argumentation dans son recours et produire les pièces justificatives qu’il estimait utiles, sans que l’on voie en quoi ses explications données de manière orale auraient une valeur probante plus importante que celles qu’il a donné par écrit.

Les actes d’instruction sollicités, en soi non obligatoires, ne se révélant pas nécessaires, il n’y sera donc pas donné suite.

8.             Le recourant conteste avoir commis une violation à la LCR. Il s’en prend aux faits qui ont été retenu par le service des contraventions.

9.             Aux termes de l’art. 26 al. 1 LCR, chacun doit se comporter dans la circulation de manière à ne pas gêner ni mettre en danger ceux qui utilisent la route conformément aux règles établies.

10.         L’art. 31 al. 1 LCR prévoit que le conducteur doit rester constamment maître de son véhicule de façon à pouvoir se conformer aux devoirs de la prudence. L’art. 3 al. 1 OCR précise que le conducteur vouera son attention à la route et à la circulation; il évitera toute occupation qui rendrait plus difficile la conduite du véhicule; il veillera en outre à ce que son attention ne soit distraite, notamment, ni par un appareil reproducteur de son ni par un quelconque système d’information ou de communication.

Le degré de l’attention requise par l’art. 3 al. 1 OCR s’apprécie au regard des circonstances d’espèce, telles que la densité du trafic, la configuration des lieux, l’heure, la visibilité et les sources de danger prévisibles (ATF 137 IV 290 consid. 3.6 p. 295 et les références citées; arrêt 6B_69/2017 du 28 novembre 2017 consid. 2.2.1).

11.         Lorsque la qualification juridique d’un acte ou la culpabilité est douteuse, il convient de statuer sur le retrait du permis de conduire après seulement que la procédure pénale soit achevée par un jugement entré en force ; fondamentalement, en effet, c’est au juge pénal qu’il appartient de se prononcer sur la réalisation d’une infraction (ATF 129 II 312 consid. 2. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_87/2009 du 11 août 2009 consid. 2.1). Les autorités administratives appelées à prononcer un retrait du permis de conduire ne peuvent en principe pas s’écarter des constatations de fait d’une décision pénale entrée en force. La sécurité du droit commande en effet d’éviter que l’indépendance du juge pénal et du juge administratif ne conduise à des jugements opposés, rendus sur la base des mêmes faits (ATF 137 I 363 consid. 2.3.2 ; 109 Ib 203 consid. 1 ; 96 I 766 consid. 4 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_636/2013 du 7 août 2013 consid. 2.1 ; 1C_567/2011 du 12 mars 2012 consid. 3.1 ; 1C_245/2010 du 13 juillet 2010 consid. 2.1 ; cf. aussi ATA/172/2012 du 27 mars 2012 ; ATA/363/2011 du 7 juin 2011).

L’autorité administrative ne peut dès lors s’écarter du jugement pénal que si elle est en mesure de fonder sa décision sur des constatations de fait inconnues du juge pénal ou qui n’ont pas été prises en considération par celui-ci, s’il existe des preuves nouvelles dont l’appréciation conduit à un autre résultat, si l’appréciation à laquelle s’est livré le juge pénal se heurte clairement aux faits constatés, ou si le juge pénal n’a pas élucidé toutes les questions de droit, en particulier celles qui touchent à la violation des règles de la circulation (ATF 136 II 447 consid. 3.1 ; 129 II 312 consid. 2.4 ; 123 II 97 consid. 3c/aa ; 119 Ib 158 consid. 3c/aa ; 105 Ib 18 consid. 1a ; 101 Ib 270 consid. 1b ; 96 I 766 consid. 5 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_567/2011 du 12 mars 2012 consid. 3.1 ; 1C_245/2010 du 13 juillet 2010 consid. 2.1 ; cf. aussi ATA/23/2015 du 6 janvier 2015 ; ATA/172/2012 du 27 mars 2012 ; ATA/363/2011 du 7 juin 2011).

12.         Tout en rappelant que l’autorité administrative n’est pas liée par le jugement pénal pour les questions de droit, en particulier pour l’appréciation de la faute, le Tribunal fédéral a précisé que malgré son indépendance, l’autorité administrative se doit d’éviter le plus possible des décisions contradictoires, ce qui requiert qu’elle se rattache à l’appréciation du juge pénal si celle-ci est soutenable, même si elle-même aurait apprécié la faute différemment (arrêt du Tribunal fédéral 1C_424/2012 du 15 janvier 2015).

13.         En l’occurrence, il ressort de l’ordonnance pénale du 4 avril 2024, en force, que l’infraction retenue à l’encontre du recourant pour les faits du 29 février 2024 est « inattention » et « manipulation du téléphone portable ». Référence était faite aux art. 31 et 90 LCR (maitrise du véhicule ; violation des règles de la circulation) et 3 OCR (conduite du véhicule). Le tribunal constate à cet égard que, contrairement aux allégations du recourant, il ne lui est pas reproché d’avoir « téléphoné » en conduisant, mais bien d’avoir été inattentif à la suite de la manipulation de son téléphone portable, comme cela ressort d’ailleurs également du rapport de contravention du 5 mars 2024.

Ayant déjà fait l’objet d’un avertissement pour le même motif, le recourant devait se douter que cette condamnation entraînerait l’ouverture d’une procédure administrative pouvant conduire au retrait de son permis de conduire. Dès lors, s’il contestait les faits retenus, il lui appartenait, en application du principe de la bonne foi, de faire valoir ses moyens dans le cadre de la procédure pénale. C’est dans ce cadre uniquement qu’il pouvait remettre en cause les constatations de la police municipale. N’ayant pas formé opposition à l’ordonnance pénale, il n’est désormais plus recevable à remettre en cause cette dernière, pas plus que les faits constatés dans le rapport de contravention (arrêt du Tribunal fédéral 1C_312/2015 du 1er juillet 2015 consid. 3.2 ; ATA/70/2012 du 31 janvier 2012 consid. 3).

Par conséquent, conformément à la jurisprudence rappelée ci-dessus, le tribunal considérera les faits comme établis à satisfaction de droit, nonobstant les dénégations du recourant.

14.         En conséquence, c’est à juste titre que l’OCV a retenu que celui-ci avait commis une violation simple des règles de la circulation routière.

15.         Le permis de conduire peut être retiré en cas d’infraction à la circulation routière pour laquelle la procédure relative aux amendes d’ordre n’est pas applicable (art. 16 al. 2 LCR). La LCR distingue les infractions légères, moyennement graves et graves (art. 16a à 16c LCR). Commet une infraction légère la personne qui, en violant les règles de la circulation routière, met légèrement en danger la sécurité d’autrui et à laquelle seule une faute bénigne peut être imputée (art. 16a al. 1 let. a LCR). 

16.         S’agissant de la sanction, l’art. 16a al. 2 LCR prévoit qu’après une infraction légère, le permis d’élève conducteur ou le permis de conduire est retiré pour un mois au moins au conducteur qui a fait l’objet d’un retrait de permis ou d’une autre mesure administrative au cours des deux années précédentes.

17.         En cas d’infraction particulièrement légère, il est renoncé à toute mesure administrative (art. 16a al. 4 LCR).

18.         Les circonstances du cas d’espèce doivent être prises en considération pour fixer la durée du retrait du permis de conduire, notamment l’atteinte à la sécurité routière, la gravité de la faute, les antécédents en tant que conducteur ainsi que la nécessité professionnelle de conduire un véhicule automobile. La durée minimale du retrait ne peut toutefois pas être réduite (art. 16 al. 3 LCR). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, cette dernière règle s’impose à l’autorité et aux tribunaux sans dérogation possible, même pour tenir compte de besoins professionnels particuliers du conducteur (ATF 132 II 234 consid. 2). Ainsi, si des circonstances telles que la gravité de la faute, les antécédents ou la nécessité professionnelle de conduire un véhicule automobile doivent être prises en compte pour fixer la durée du retrait, la durée minimale prescrite par la loi ne peut pas être réduite (ATF 135 II 334 consid. 2.2).

19.         Par jugement du 17 octobre 2022 (JTAPI/1078/2022), le tribunal a confirmé une décision de l’OCV prononçant le retrait du permis de conduire pour une durée d’un mois d’un automobiliste avec antécédents n’ayant pas voué toute l’attention nécessaire à la route et à la circulation en manipulant un téléphone portable et ayant circulé avec deux pneus dans un état insuffisant, retenant après lui qu’il s’agissait d’une infraction légère aux règles de la circulation routière. Il a également retenu des infractions légères au sujet d’automobilistes ayant fait preuve d’inattention en manipulant leur téléphone portable (JTAPI/1020/2022 du 29 septembre 2022 et JTAPI/666/2022 du 23 juin 2022). Des fautes moyennement graves, voire graves ont en revanche été retenues dans des cas d’inattention avec perte de maitrise et/ou accidents (JTAPI/852/2023 du 14 août 2023 ; JTAPI/804/2023 du 21 juillet 2023 ; JTAPI/246/2023 du 6 mars 2023).

A également été considérée comme une faute légère provoquant une mise en danger abstraite accrue légère, le fait pour un conducteur d’avoir détourné son attention de la route (sur un trajet de 400 mètres environ) pour regarder le GPS sur l’écran de son téléphone portable (arrêt du 7 juillet 2020 de la Cour de droit administratif et public vaudoise CR.2020.0006).

20.         En l’espèce, comme vu supra, il est reproché au recourant d’avoir été inattentif à la circulation à la suite de la manipulation de son téléphone portable. Il s’agit d’une faute qui ne peut être qualifiée de moyennement grave. C’est donc à juste titre que l’OCV l’a qualifié de légère au sens de l’art. 16a al. 1 let. a LCR. C’est également à juste titre qu’il a fait application de l’art. 16a al. 2 LCR et, fixé à un mois la durée du retrait du permis du recourant, dès lors que celui-ci a fait l’objet d’un avertissement, prononcé le 24 mars 2023, soit au cours des deux années précédant l’infraction du 20 février 2024. Il est cependant préoccupant que le recourant minimise sa faute comme il le fait. Le fait que de nombreux conducteurs manipulent leur téléphone portable au volant n’enlève rien au danger qu’un instant d’inattention fait naître.

Par ailleurs, étant lié par cette durée, qui constitue le minimum légal incompressible devant sanctionner l’infraction en cause, l’OCV a correctement appliqué les règles en vigueur et n’a pas excédé ou abusé de son pouvoir d’appréciation. En particulier, un éventuel besoin professionnel d’utiliser son véhicule ne permet pas d’alléger la mesure minimale de retrait du permis.

21.         Mal fondé, le recours doit être rejeté et la décision entreprise confirmée.

22.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais du même montant versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 9 septembre 2024 Monsieur A______ contre la décision de l’office cantonal des véhicules du 13 août 2024 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l’avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière