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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/765/2024

JTAPI/707/2024 du 15.07.2024 ( OCPM ) , REJETE

Descripteurs : REGROUPEMENT FAMILIAL;ENFANT;DÉLAI;CAS DE RIGUEUR;DROIT D'ÊTRE ENTENDU
Normes : Cst.29.al2; LEI.43; LEI.47.al1; LEI.47.al3.letb; CEDH.8; LEI.30; OASA.31
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/765/2024

JTAPI/707/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 15 juillet 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Michel CELI VEGAS, avocat, avec élection de domicile

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 2005, est ressortissant du Venezuela.

2.             Le 17 juin 2021, son père, Monsieur B______, ressortissant vénézuélien titulaire d'une autorisation de séjour obtenue le 18 octobre 2018 suite à son mariage avec une ressortissante suisse, a déposé une demande de regroupement familial auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) en sa faveur.

Dans le courrier d’accompagnement, il expliquait que son fils était venu le visiter fin 2020 et qu’il avait voulu rester en Suisse.

3.             Par courrier du 25 octobre 2021, l'OCPM a invité M. B______ à lui fournir, notamment, l'acte de naissance de son fils muni de l’Apostille de la Haye et à lui indiquer les raisons pour lesquelles il n'avait pas déposé de demande de visa auprès de la représentation diplomatique suisse au Venezuela.

4.             Le 7 décembre 2022, l’OCPM lui a par ailleurs demandé de lui préciser qui s’occupait de son fils avant son arrivée en Suisse et quelles raisons justifiaient sa venue. Il a réitéré sa demande d'acte de naissance et requis tout document utile lui attribuant un droit de garde sur ce dernier.

5.             Par courrier du 31 décembre 2022, M. B______ a expliqué à l’OCPM que son fils vivait avec sa mère avant sa venue en Suisse mais que c'était lui qui avait toujours subvenu à ses besoins, lui envoyant de l'argent afin de lui permettre de survivre au Venezuela. Son fils et sa mère étaient partis vivre en Colombie afin d’avoir une meilleure qualité de vie mais cela n’avait finalement pas été le cas. Par conséquent, en accord avec la mère de son fils, il avait été décidé qu'il était mieux que celui-ci vienne vivre auprès de lui. Il invitait l’OCPM a bien vouloir délivrer un permis en faveur de son fils car ce dernier devrait bientôt commencer des stages avec son école.

Il a joint le jugement lui attribuant la garde sur son fils.

6.             Par courriers des 10 février, 25 mars et 18 juillet 2023, M. B______ s’est enquis auprès de l’OCPM de l’avancée du traitement de la demande de permis en faveur de son fils. Ce dernier avait absolument besoin d’un permis pour pouvoir poursuivre ses études.

7.             Par courrier du 17 octobre 2023, l'OCPM a informé M. B______ de son intention de rejeter la demande de regroupement familial et de prononcer le renvoi de son fils. Un délai de 30 jours lui était imparti pour exercer son droit d'être entendu.

En substance, les conditions du regroupement familial n’étaient pas remplies et M. A______, qui serait majeur le ______ 2023, serait ainsi à même de se prendre en charge dans son pays d’origine. Il relevait encore que les intéressés avaient mis les autorités devant le fait accompli ne déposant pas de demande de visa et n’ayant pas attendu sa décision à l’étranger.

8.             Le 8 janvier 2024, dans le délai prolongé à sa demande pour ses observations, M. A______, sous la plume d’un conseil, a relevé qu’il était désormais majeur et requis que sa situation soit analysée sous l’angle des dispositions applicables au cas de rigueur et du respect de la vie familiale. Les art. 30 al. 1 let. b et 58a de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), 31 de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et la Convention relative aux droits de l'enfant, conclue à New York le 20 novembre 1989, approuvée par l'Assemblée fédérale le 13 décembre 1996. Instrument de ratification déposé par la Suisse le 24 février 1997 (CDE - RS 0.107) étaient invoqués.

Il a joint un chargé de pièces, dont son acte de naissance, des attestations de scolarité dont il ressort qu’il était inscrit en classe d’accueil (année scolaire 2021-2022) puis d’insertion professionnelle (année scolaire 2023-2024) à l’ACCES II et des lettres de recommandation de ses enseignants.

9.             Par décision du 1er février 2024, l'OCPM a rejeté la demande d’octroi d’une autorisation en faveur de M. A______ et prononcé son renvoi de Suisse, un délai au 29 avril 2024 lui étant imparti pour ce faire.

La demande de regroupement familial était tardive et aucune raison familiale majeure ne justifiait un regroupement familial différé, les motifs avancés étant principalement économiques. De plus, l'acte de naissance n'avait jamais été fourni.

Pour le surplus, l’intéressé n'avait pas démontré une intégration socio-éducative particulièrement exceptionnelle. Les connaissances acquises pendant les études suivies en Suisse n’étaient pas si spécifiques qu'elles ne pourraient pas être utiles en cas de retour au Venezuela et, arrivé en Suisse en novembre 2020, soit à l’âge de quinze ans, son séjour de 3 ans était de courte durée. Jeune, en bonne santé et désormais majeur, il ne rencontrerait que peu de difficultés à se réintégrer dans son pays d'origine, quand bien même sa mère ne s'occuperait plus de lui. Quant aux conditions de vie au Venezuela, les art. 30 LEI et 31 OASA n'avaient pas pour but de soustraire le requérant aux conditions socio-économiques de son pays d’origine. De plus, son père pourrait continuer à lui envoyer de l'argent afin de le soutenir. L'art. 8 CEDH et la CDE ne pouvaient être invoqués dès lors qu’il était majeur. Il ne dépendait en outre pas physiquement ou psychiquement de son père. Il rappelait enfin avoir été mis devant le fait accompli par les intéressés.

10.         Par acte du 4 mars 2024, sous la plume de son conseil, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) contre cette décision, concluant principalement à son annulation et cela fait, à ce qu’il soit autorisé à disposer d’une autorisation de séjour en application de l’art. 30 al. 1 let. b LEI, soit subsidiairement au renvoi du dossier à l’OCPM pour nouvel examen en application de la disposition précitée et de l’art. 31 OASA, sous suite de frais et dépens. Préalablement il a requis son audition.

Arrivé en Suisse en novembre 2020, il vivait avec son père, sa belle-mère et ses demi frère et sœur, lesquels lui fournissaient un grand soutien émotionnel et matériel. Même lorsqu’il vivait au Vénezuela, il avait toujours entretenu des contacts étroits avec son père. Dans son pays d’origine, il n’avait que sa mère laquelle était de moins en moins présente et de plus en plus souvent inatteignable. La durée de son séjour en Suisse, de 3 ans, n’était pas négligeable et il y était extrêmement bien intégré, parlant notamment très bien le français et obtenant de très bons résultats scolaires. Hormis sa mère qui ne s’occupait plus de lui, il n’avait aucune attache dans son pays d’origine et serait dans l’impossibilité d’y trouver du travail. Un retour au Venezuela lui occasionnerait ainsi un dommage irréparable et constituerait pour lui un véritable déracinement.

Une séparation d’avec sa famille en Suisse serait par ailleurs contraire à la CDE et l’art. 8 CEDH.

La décision de l’OCPM était enfin arbitraire et disproportionnée.

Il a joint un chargé de pièces.

11.         Dans ses observations du 2 mai 2024, l'OCPM a conclu au rejet du recours. M. A______ ne contestait pas que les conditions des art. 47 al. 4 LEI et 75 OASA n’étaient pas réalisées en l’espèce. Pour le surplus, étant majeur, les art. 3 CDE et 8 CEDH ne lui étaient pas applicables. Les conditions de l’art. 31 OASA n’étaient enfin pas remplies pour les motifs exposés dans sa décision du 1er février 2024.

12.         Le 5 juin 2024, dans le délai prolongé pour sa réplique, M. A______ a persisté dans les conclusions de son recours, reprenant en substance ses explications précédentes.

Il était arrivé en Suisse à la demande de son père qui ne souhaitait pas qu’il poursuive sa vie au Venezuela au côté de sa mère, qui le délaissait dans la période très compliquée de l’adolescence. Il avait dû tout laisser derrière lui au Venezuela, ne pouvant faire autrement que d’obéir à son père. Depuis lors, il s’était parfaitement intégré en Suisse et n’était plus en mesure de retourner dans son pays d’origine. Il a persisté dans sa requête d’audition.

13.         Par courrier du 26 juin 2024, l'OCPM a indiqué n'avoir pas d'observations complémentaires à formuler

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Préalablement, le recourant demande que le tribunal procède à son audition.

4.             Garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu est une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation doit entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recourant sur le fond (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 et les références).

Il comprend notamment le droit, pour l'intéressé, de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités).

5.             Le droit de faire administrer des preuves n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes, de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières ou de mettre un terme à l'instruction, lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_725/2019 du 12 septembre 2019 consid. 4.1 ; 2C_1125/2018 du 7 janvier 2019 consid. 5.1 ; 1C_212/2018 du 24 avril 2019 consid. 4.1).

6.             En l'espèce, le tribunal estime que le dossier contient les éléments suffisants et nécessaires pour statuer en toute connaissance de cause sur le litige, de sorte qu’il n’apparaît pas utile de procéder à l’audition du recourant. En tout état, ce dernier a pu faire valoir ses arguments, dans le cadre de son recours et de ses écritures subséquentes, et produire tout moyen de preuve utile, sans qu’il n’explique ce qui, dans la procédure écrite, l’aurait empêché d’exprimer ses arguments de manière pertinente et complète.

Dès lors, sa demande d’audition, acte d’instruction en soi non obligatoire, sera rejetée.

7.             Dans son recours le recourant conclut à l’annulation de la décision de l’OCPM et à ce qu’il soit autorisé à disposer d’une autorisation de séjour en application de l’art. 30 al. 1 let. b LEI, soit subsidiairement au renvoi du dossier à l’OCPM pour nouvel examen en application de la disposition précitée et de l’art. 31 OASA. Il ne conteste plus le refus de l’OCPM de lui octroyer une autorisation de séjour pour regroupement familial, ceci à juste titre, dès lors qu’il ne remplit en effet pas les conditions des art. 43 et 47 LEI, la demande de regroupement familial déposée en sa faveur étant tardive et aucune raison familiale majeure justifiant un regroupement familial différé n’étant avancé. La décision litigieuse sera donc confirmée sur ce point.

8.             Reste dès lors à examiner si la situation du recourant remplit les critères relatifs à un cas de rigueur.

9.             Selon l'art. 30 al. 1 let. b LEI, il est possible de déroger aux conditions d'admission d'un étranger en Suisse pour tenir compte d'un cas individuel d'extrême gravité.

10.         L’art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l’existence d’un cas individuel d’extrême gravité, il convient de tenir compte, notamment, de l’intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l’état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l’État de provenance (let. g).

11.         À teneur de l’art. 58a al. 1 LEI, pour évaluer l’intégration, l’autorité compétente tient compte des critères suivants ; le respect de la sécurité et de l’ordre publics (let. a), le respect des valeurs de la Constitution (let. b), les compétences linguistiques (let. c), la participation à la vie économique ou l’acquisition d’une formation (let. d).

Ces critères, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; 137 II 1 consid. 1 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3986/2015 du 22 mai 2017 consid. 9.3 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017), d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (cf. ATA/1669/2019 du 12 novembre 2019 consid. 7b).

12.         Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance de la situation qu'ils visent doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 ; ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6a ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 7c ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1020/2017 du 27 juin 2017 consid. 5b ; cf. aussi arrêts du Tribunal fédéral 2C_602/2019 du 25 juin 2019 consid. 3.3 ; 2C_222/2017 du 29 novembre 2017 consid. 1.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (cf. ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6a ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 7c ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c).

13.         La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; ATAF F-6322/2016 du 1er mai 2018 consid. 4.6 et les références citées ; ATA/353/2019 précité consid. 5d ; ATA/38/2019 précité consid. 4d).). Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-912/2015 du 23 novembre 2015 consid. 4.3.2 ; ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7e ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017).

La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d’origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l’intéressé, seraient gravement compromises (arrêt du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; ATA/577/2021 du 1er juin 2021 consid. 2c).

14.         Dans le cadre de l'exercice de leur pouvoir d'appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son degré d'intégration (art. 96 al. 1 LEI). Sauf prescription particulière de la loi ou d'un traité international, l'étranger n'a donc en principe aucun droit à la délivrance et au renouvellement d'un permis de séjour pour cas de rigueur. L'autorité compétente dispose d'un très large pouvoir d'appréciation dans le cadre de l'examen des conditions de l'art. 31 al. 1 OASA, dont elle est tenue de faire le meilleur exercice en respectant les droits procéduraux des parties. Le contrôle de l'usage du pouvoir d'appréciation de l'autorité intimée par le tribunal de céans doit donc s'exercer avec retenue et se limiter au cas de l'excès ou de l'abus du pouvoir d'appréciation. Le tribunal ne saurait ainsi substituer sa propre appréciation des preuves à celle de l'autorité intimé en l'absence d'une appréciation manifestement contraire au droit, voire choquante.

15.         En l'espèce, le recourant indique être arrivé en Suisse en novembre 2020, ce que ne conteste pas l'OCPM. Ainsi, au moment du dépôt de la demande d'autorisation de séjour en sa faveur, en juin 2021, il pouvait se prévaloir d'un séjour de moins d’une année. A l’évidence, une telle durée ne correspond pas à une très longue durée au sens des critères légaux et jurisprudentiels rappelés plus haut, au terme de laquelle il faudrait nécessairement retenir que le renvoi de Suisse constituerait pour un véritable déracinement et donc une mesure disproportionnée, ce d’autant plus que ce séjour s’est déroulé dans l’illégalité. Par ailleurs, depuis le dépôt de sa demande d'autorisation, son séjour se poursuit au bénéfice d'une simple tolérance. Or, il ne peut déduire des droits résultant d'un état de fait créé en violation de la loi. Il ne peut en tout cas pas tirer parti de la seule durée de son séjour en Suisse, qui doit en l'occurrence être fortement relativisée, pour bénéficier d'une dérogation aux conditions d’admission.

L’intégration socio-éducative du recourant en Suisse est indiscutablement bonne mais ne saurait néanmoins être qualifiée de remarquable ou d’exceptionnelle. S’il ressort du dossier qu’il s’est certes bien intégré au système scolaire genevois, qu’il est encore en cours de formation, qu’il parvient à subvenir à ses besoins avec l'aide de sa famille et que son casier judiciaire est vierge, ces éléments ne sont pas constitutifs à eux seuls d’une intégration exceptionnelle au sens de la jurisprudence.

S'agissant de ses possibilités de réintégration dans son pays d'origine, le recourant est arrivé en Suisse à l’âge de 15 ans, après avoir passé son enfance et une partie de son adolescence au Venezuela, sous réserve d’une année en Colombie. Il maitrise ainsi de toute évidence la langue et les us et coutumes de son pays d’origine, et son système éducatif lui est familier. Rien n'indique par ailleurs que les difficultés auxquelles il pourrait faire face en cas de retour au Venezuela seraient plus lourdes que celles que rencontrent d'autres compatriotes contraints de retourner dans leur pays d'origine au terme d'un séjour régulier en Suisse. En outre, âgé de 18 ans aujourd’hui, il est en mesure de vivre de manière indépendante. À cela s'ajoute qu'il a appris le français, ce qui constituera un atout supplémentaire pour sa réintégration. Au demeurant, son père pourra continuer à le soutenir financièrement depuis la Suisse. Par conséquent, ses possibilités de réintégration au Venezuela paraissent bonnes et il ne se trouve pas dans une situation si grave que l’on ne puisse exiger de lui qu’il tente de se réadapter à son existence passée.

Dès lors, compte tenu de ce qui précède, il apparaît que les conditions permettant de reconnaître un cas individuel d'une extrême gravité ne sont pas remplies et que l'appréciation que l'OCPM a faite de la situation du recourant sous l'angle des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA est parfaitement admissible. Dans ces conditions, le tribunal, qui doit respecter la latitude de jugement conférée à l’autorité intimée ne saurait en corriger le résultat en fonction d'une autre conception, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdit de faire (art. 61 al. 2 LPA).

16.         Le recourant se prévaut également de l’art. 8 CEDH et de la CDE.

17.         Selon la jurisprudence, un étranger peut, en fonction des circonstances, se prévaloir du droit au respect de sa vie familiale garanti par l’art. 8 par. 1 CEDH pour s’opposer à une éventuelle séparation de sa famille, à condition qu’il entretienne une relation étroite et effective avec un membre de celle-ci ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 137 I 284 consid. 1.3 ; 136 II 177 consid. 1.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1083/2016 du 24 avril 2017 consid. 1.1 ; 2C_786/2016 du 5 avril 2017 consid. 3.1 et les références citées). Les relations ici visées concernent en premier lieu la famille dite nucléaire, c’est-à-dire la communauté formée par les parents et leurs enfants mineurs (ATF 140 I 77 consid. 5.2 ; 137 I 113 consid. 6.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_584/2017 du 29 juin 2017 consid. 3 ; 2C_1083/2016 du 24 avril 2017 consid. 1.1).

18.         Le Tribunal fédéral admet aussi qu’un étranger puisse, exceptionnellement et à des conditions restrictives, déduire un droit à une autorisation de séjour de l’art. 8 par. 1 CEDH s’il existe un rapport de dépendance particulier entre lui et un proche parent (hors famille nucléaire) au bénéfice d’un droit de présence assuré en Suisse (nationalité suisse ou autorisation d’établissement), par exemple en raison d’une maladie ou d’un handicap (ATF 140 I 77 consid. 5.2 ; 137 I 113 consid. 6.1 ; arrêt 2C_71/2022 du 26 janvier 2022 consid. 4.2).

19.         Par ailleurs, sous l’angle étroit de la protection de la vie privée, l’art. 8 CEDH ouvre le droit à une autorisation de séjour, mais à des conditions restrictives, l’étranger devant établir l’existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d’une intégration ordinaire (cf. not. ATF 130 II 281 consid. 3.2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_255/2020 du 6 mai 2020 consid. 1.2.2 ; 2C_498/2018 du 29 juin 2018 consid. 6.1 ; 2C_739/2016 du 31 janvier 2017 consid. 1.1).

Lorsque l’étranger réside légalement depuis plus de dix ans en Suisse, il y a lieu de partir de l’idée que les liens sociaux qu’il y a développés sont suffisamment étroits pour qu’il bénéficie d’un droit au respect de sa vie privée ; lorsque la durée de la résidence est inférieure à dix ans, mais que l’étranger fait preuve d’une forte intégration en Suisse, le refus de prolonger ou la révocation de l’autorisation de rester en Suisse peut également porter atteinte au droit au respect de la vie privée (ATF 144 I 266 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_603/2019 du 16 décembre 2019 consid. 6.2 ; 2D_30/2019 du 14 août 2019 consid. 3.2 ; 2C_459/2019 du 17 mai 2019 consid. 3.1).

Les années passées en Suisse dans l’illégalité ou au bénéfice d’une simple tolérance - par exemple en raison de l’effet suspensif attaché à des procédures de recours - ne sont en revanche pas déterminantes (ATF 137 II 1 consid. 4.3 ; 134 II 10 consid. 4.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_603/2019 du 16 décembre 2019 consid. 6.2 ; 2C_436/2018 du 8 novembre 2018 consid. 2.2).

20.         L’examen de la proportionnalité sous l’angle de l’art. 8 par. 2 CEDH se confond avec celui imposé par l’art. 96 LEI (arrêts du Tribunal fédéral 2C_419/2014 du 13 janvier 2015 consid. 4.3 ; ATA/1539/2017 du 28 novembre 2017). Il faut que la pesée des intérêts publics et privés effectuée dans le cas d’espèce fasse apparaître la mesure d’éloignement comme proportionnée aux circonstances (ATF 135 II 377 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_915/2010 du 4 mai 2011 consid. 3.3.1).

21.         En l’espèce, le recourant, désormais majeur, ne peut se prévaloir de l’art. 8 CEDH pour s’opposer à une séparation de sa famille en Suisse. Il ne soutient en outre pas et il ne résulte pas du dossier qu’un rapport de dépendance particulier entre lui et un proche parent au bénéfice d’un droit de présence assuré en Suisse (nationalité suisse ou autorisation d’établissement) existerait.

Il n’en va pas différemment sous l’angle étroit de la protection de la vie privé, le recourant n’ayant, comme vu supra, pas séjourné légalement en Suisse pendant au moins dix ans.

La CDE n’est enfin pas applicable à un enfant devenu majeur au cours de la procédure de regroupement familial (art. 1 CDE ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_767/2013 du 6 mars 2014 consid. 3.5 ; ATA/51/2021 du 19 janvier 2021 consid. 4a).

22.         Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé.

23.         Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande d'autorisation (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-4183/2011 du 16 janvier 2012 consid. 3.1; cf. aussi not. ATA/954/2018 du 18 septembre 2018 consid. 9).

24.         En l'espèce, dès lors qu'elle a refusé de délivrer une autorisation de séjour au recourant, l'autorité intimée devait en soi ordonner son renvoi de Suisse en application de l'art. 64 al. 1 let. c LEI, aucun élément ne laissant pour le surplus supposer que l'exécution de cette mesure ne serait pas possible, pas licite ou qu'elle ne pourrait être raisonnablement exigée (art. 83 LEI).

25.         En conséquence, mal fondé, le recours sera rejeté.

26.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.-  ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

27.         Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

28.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 4 mars 2024 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 1er février 2024 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.- ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière