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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1384/2024

JTAPI/403/2024 du 29.04.2024 ( MC ) , CONFIRME

Descripteurs : DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION;MESURE DE CONTRAINTE(DROIT DES ÉTRANGERS);INTÉRÊT ACTUEL
Normes : LEI.75.al1.letg; LEI.76.al1.letb
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1384/2024 MC

JTAPI/403/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 29 avril 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Laure BAUMANN, avocate

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

 


 

EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1996, est originaire d’Albanie.

2.             Le 24 avril 2024, il a été appréhendé par les services de police genevois en possession d'un passeport biométrique valable après qu'il était ressorti de l'appartement d'une personne toxicomane résidant à la rue ______[GE]. Suspectant une transaction de stupéfiants, les forces de l'ordre ont perquisitionné l'appartement en question où la locataire a formellement reconnu, sur planche photographique, M. A______ comme étant le dealer lui ayant vendu 15 gr. brut d'héroïne contre la somme de CHF 250.-.

3.             Entendu le jour même dans les locaux de la police, M. A______ a expliqué qu'il était arrivé en Suisse deux jours auparavant. Porteur d'une somme de CHF 700.- (constituée également de devises en euros), il avait l'intention de faire du tourisme durant deux ou trois jours avant de repartir pour l'Allemagne où il avait de la famille. Contestant d'abord avoir vendu de la drogue, et informé qu'il était formellement mis en cause par sa cliente du jour, il a changé d'avis et reconnu les faits qui lui étaient reprochés. Toutefois, il maintenait être vraiment venu en Suisse afin de faire du tourisme. Il n'était pas consommateur de stupéfiants, mais avait des problèmes familiaux et avait besoin d'argent. Il avait travaillé dans la construction en Allemagne et en Autriche, ce qui expliquait l'argent qu'il avait sur lui. Le jour même, alors qu'il se promenait en ville, une personne de couleur noire s'était approchée de lui en lui parlant en italien et en lui demandant s'il voulait de la drogue pour en consommer. Il avait répondu négativement, tout en ajoutant qu'il avait besoin d'argent. Il avait alors acheté à son interlocuteur les trois sachets contre la somme de CHF 100.-, afin de pouvoir les revendre, ce qu'il avait fait contre la somme de CHF 250.-. C'était la première fois qu'il agissait de la sorte. Il ne savait pas comment fonctionnait le trafic de stupéfiants. Il ne voulait qu'apporter de l'aide à sa famille. Concernant la cliente, c'était son contact dans la rue qui lui avait dit qu'il connaissait une personne susceptible d'être intéressée par l'achat de la marchandise. Il s'était rendu chez cette personne sur indication de celui qui lui avait vendu les trois sachets.

4.             Prévenu d'infractions à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) (trafic d'héroïne) et à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) (séjour illégal), il a été mis à disposition du Ministère public sur ordre du commissaire de police.

5.             Par décision déclarée exécutoire nonobstant recours du 25 avril 2024, dûment notifiée, l'office cantonal de la population et des migrations a prononcé le renvoi de Suisse de M. A______, en application de l’art. 64 LEI, et a chargé les services de police de procéder à l’exécution de cette mesure dès sa remise en liberté.

6.             Par ordonnance pénale du 25 avril 2024, le Ministère public a condamné M. A______ pour les faits ayant mené à son arrestation.

7.             Le même jour, M. A______ a été libéré par les autorités pénales et remis entre les mains des services de police. Les démarches en vue de la réservation d'un vol en sa faveur pour l'Albanie ont été immédiatement entamées.

8.             Le 25 avril 2024 à 14h20, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de trois semaines, considérant que sa détention était fondée sur le fait qu'il mettait gravement en danger la vie ou l'intégrité corporelle d'autres personnes.

9.             Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il était d’accord de retourner en Albanie. Il était en outre d’accord que le Tribunal administratif de première instance renonce à la procédure orale, après que le commissaire de police eut attiré son attention sur la teneur de l’art. 80 al. 3 LEI.

Selon le procès-verbal du commissaire de police, la détention administrative pour des motifs de droit des étrangers avait débuté à 14h05.

10.         Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) le même jour, par courriel, à 14h36, en précisant qu'une place à bord d'un vol de ligne était confirmée pour dimanche 28 avril 2024 à 06h50 au départ de Genève.

11.         A réception de l’ordre de mise en détention, le tribunal a invité le conseil de M. A______ désigné d’office pour la défense de ses intérêts (cf. art. 12 al. 2 de la loi d’application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10), à lui communiquer ses éventuelles observations écrites d’ici au 29 avril 2024 à 9h.

Par courrier adressé par télécopie au tribunal le 29 avril 2024 à 8h45, le conseil de M. A______ a présenté des observations.

Le tribunal restait tenu d'examiner la légalité de la détention administrative, nonobstant le fait que M. A______ avait pris l'avion le 28 avril 2024 à destination de l'Albanie. En effet, même dans le cadre d'une rétention de trois jours, la loi prévoyait un contrôle au moins a posteriori de la légalité de la détention. Considérer que la fin de la détention par l'exécution du renvoi rendait sans objet le contrôle judiciaire de la légalité de la détention reviendrait à le priver d'un accès au juge.

Par ailleurs, nonobstant son départ, le tribunal restait tenu de se prononcer dans un délai maximum de 96 heures. À défaut, il devait prononcer la levée de la détention de M. A______ ou subsidiairement, constater l'illégalité de sa détention.

Sur le fond, il ne constituait pas une menace sérieuse envers d'autres personnes, car les circonstances dans lesquelles il avait été arrêté indiquaient clairement qu'il entrait dans la catégorie des cas bagatelle.

Enfin, la durée de sa détention apparaissait comme clairement disproportionnée, puisqu'il avait été possible pour le Commissaire de police de réserver un vol dans un délai de moins de trois jours. Par conséquent, dans l'hypothèse d'un refus de prendre l'avion le 28 avril 2024, il était parfaitement possible d'organiser un nouveau vol dans un très court délai.

EN DROIT

1.             Le tribunal est compétent pour examiner d’office la légalité et l’adéquation de la détention administrative (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. d LaLEtr).

2.             Selon l’art. 8 al. 3 LaLEtr, les ordres de mise en détention du commissaire de police sont transmis sans délai au tribunal pour contrôle de la légalité et de l’adéquation de la détention.

3.             M. A______ ayant toutefois quitté la Suisse le 28 avril 2024, mettant ainsi fin à sa détention administrative dès cette date, il convient préalablement d'examiner s'il conserva l'intérêt actuel à l'examen de sa requête visant le contrôle de la légalité et de l'adéquation de sa détention administrative.

4.             Un intérêt digne de protection suppose un intérêt actuel à obtenir l’annulation de la décision attaquée (ATF 138 II 42 consid. 1 ; 137 I 23 consid. 1.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1157/2014 du 3 septembre 2015 consid. 5.2 ; 1C_495/2014 du 23 février 2015 ; ATA/308/2016 du 12 avril 2016 ; Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, p. 734 n. 2084 ; Pierre MOOR/Etienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 748 n. 5.7.2.3 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 449 n. 1367). L’existence d’un intérêt actuel s’apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours (ATF 137 I 296 consid. 4.2 ; 136 II 101 consid. 1.1) ; si l’intérêt s’éteint pendant la procédure, le recours, devenu sans objet, doit être simplement radié du rôle (ATF 125 V 373 consid. 1) ou déclaré irrecevable (ATF 123 II 285 consid. 4 ; ATA/322/2016 du 19 avril 2016 ; ATA/308/2016 du 12 avril 2016).

5.             La condition de l’intérêt actuel fait défaut en particulier lorsque, notamment, la décision attaquée a été exécutée et a sorti tous ses effets (ATF 125 I 394 consid. 4; 120 Ia 165 consid. 1a ; ATA/407/2015 du 30 avril 2015).

6.             Il est toutefois exceptionnellement renoncé à l’exigence d’un intérêt actuel lorsque cette condition de recours fait obstacle au contrôle de légalité d’un acte qui pourrait se reproduire en tout temps, dans des circonstances semblables, et qui, en raison de sa brève durée ou de ses effets limités dans le temps, échapperait ainsi toujours à la censure de l’autorité de recours (ATF 140 IV 74 consid. 1.3 ; 139 I 206 consid. 1.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1157/2014 du 3 septembre 2015 consid. 5.2 ; 1C_477/2012 du 27 mars 2013 consid. 2.3 ; ATA/236/2014 du 8 avril 2014 ; ATA/716/2013 du 29 octobre 2013 ; Jacques DUBEY/ Jean-Baptiste ZUFFEREY, op. cit., p. 734 n. 2086 ; François BELLANGER, La qualité pour recourir, in François BELLANGER/Thierry TANQUEREL, Le contentieux administratif, 2013, p. 121) ou lorsqu’une décision n’est pas susceptible de se renouveler mais que les intérêts des recourants sont particulièrement touchés avec des effets qui vont perdurer (ATF 136 II 101 ; 135 I 79). Cela étant, l’obligation d’entrer en matière sur un recours, dans certaines circonstances, nonobstant l’absence d’un intérêt actuel, ne saurait avoir pour effet de créer une voie de recours non prévue par le droit cantonal (ATF 135 I 79 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_133/2009 du 4 juin 2009 consid. 3).

7.             Il en va également ainsi, même s'il n'existe plus d'intérêt actuel et pratique au recours, lorsque la partie recourante invoque de manière défendable un grief fondé sur la CEDH (ATF 142 I 135 consid. 1.3.1 ; 139 I 206 consid. 1.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1028/2021 du 16 novembre 2022 consid. 1.2 ; ATA/128/2019 du 7 février 2019 consid. 2).

8.             En l'espèce, M. A______ invoque de manière défendable une violation de l'art. 5 par. 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), de sorte qu'il y a lieu d'examiner la légalité de sa détention, nonobstant le fait que celle-ci ait pris fin.

9.             C'est le lieu de préciser que le présent jugement est certes rendu au-delà du délai de 96 heures prévu par les art. 80 al. 2 LEI et 9 al. 3 LaLEtr, qui a commencé à partir du début de la détention administrative de M. A______, soit le 25 avril 2024 à 14h05. Cela ne saurait toutefois entraîner de ce simple fait l'illégalité de sa détention. En effet, du fait même que celle-ci a pris fin avant l'écoulement des 96 heures, c'est par nature un examen a posteriori de la détention administrative qui est effectué, lors duquel il reste certes possible de constater cas échéant que la détention était illégale. En revanche, à partir du moment où elle prend fin matériellement, elle ne peut plus le devenir, que ce soit en raison du dépassement du délai de 96 heures ou pour toute autre raison.

10.         Selon l’art. 76 al. 1 let. b LEI, lorsqu'une décision de renvoi ou d'expulsion a été notifiée, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, placer la personne concernée en détention administrative, notamment si celle-ci menace sérieusement d'autres personnes ou met gravement en danger leur vie ou leur intégrité corporelle et fait l'objet d'une poursuite pénale ou a été condamnée pour ce motif (ch. 1 renvoyant à l'art. 75 al. 1 let. g LEI).

11.         Selon la jurisprudence constante, la participation à un trafic de stupéfiant comme de l'héroïne ou de la cocaïne constitue une menace pour les tiers et une grave mise en danger de leur vie ou de leur intégrité (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012; ATA/185/2008 du 15 avril 2008 ; ATA/65/2008 du 15 février 2008 ; ATA/39/2008 du 22 janvier 2008 ; ATA/352/2007 du 26 juillet 2007 et les arrêts cités).

12.         Comme la loi exige une menace sérieuse ou une mise en danger grave de la vie ou de l'intégrité corporelle d'autres personnes, il faut que le comportement répréhensible revête une certaine intensité. Les infractions, y compris en relation avec les stupéfiants, qui apparaissent comme des cas bagatelles ne suffisent pas (arrêts du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012 consid. 4.3 ; 2A.35/2000 du 10 février 2000 consid. 2b/bb ; 2A.450/1995 du 3 novembre 1995 consid. 5a). Enfin, comme la disposition est tournée vers le futur et tend à empêcher que l'étranger continue son comportement dangereux, il faut en outre faire un pronostic pour déterminer si, sur la base des circonstances connues, il existe un risque sérieux que d'autres mises en danger graves se reproduisent (arrêts du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012 consid. 4.3 ; 2A.480/2003 du 26 août 2004 consid. 3.1 et les nombreuses références citées).

13.         Un tel pronostic s'impose tout particulièrement en matière de stupéfiants, lorsqu'une procédure pénale a démontré que l'étranger s'est livré à un trafic de drogues dures, mais qui ne portait que sur de faibles quantités ; dans un tel cas de figure, il faut se demander s'il s'agit seulement d'un comportement coupable isolé ou s'il existe un risque que l'intéressé poursuive son trafic. En effet, la détention en phase préparatoire n'est pas d'emblée exclue en présence de petits trafiquants, s'ils présentent un risque de récidive (arrêts du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012 consid. 4.3 ; 2A.480/2003 du 26 août 2004 consid. 3.5). Il est fréquent que les petits revendeurs ne soient jamais en possession d'une grande quantité de stupéfiants, ce qui ne les empêche pas de procéder constamment à du trafic, de sorte qu'en peu de temps, ils parviennent à écouler une grande quantité de drogue. Or, un tel comportement constitue une mise en danger grave de la vie ou de l'intégrité corporelle des personnes permettant de justifier une détention en phase préparatoire (cf. ATF 125 II 369 consid. 3b/bb ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012 consid. 4.3 ; 2A.35/2000 du 10 février 2000 consid. 2b/bb ; 2A.450/1995 du 3 novembre 1995 consid. 5b). En revanche, celui qui n'a agi que de manière isolée avec une petite quantité de stupéfiants ne représente pas encore un danger grave pour la vie ou l'intégrité corporelle d'autres personnes (arrêts du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012 consid. 4.3 ; 2A.480/2003 du 26 août 2004 consid. 3.1 in fine ; 2A.35/2000 du 10 février 2000 consid. 2b/bb; 2A.450/1995 du 3 novembre 1995 consid. 3b).

14.         Il en découle qu'un petit dealer condamné une fois pour trafic d'une faible quantité de drogue dure peut parfaitement tomber sous le coup de l'art. 75 al. 1 let. g LEI, indépendamment du fait qu'il ne remplit pas les conditions figurant à l'art. 19 al. 2 LStup, lorsque les circonstances dénotent un risque qu'il continue son trafic. Partant, le fait que l'intéressé ait été en possession d'une quantité en elle-même insuffisante, selon la jurisprudence (cf. ATF 109 IV 143 consid. 3b) à entraîner l'application de l'art. 19 al. 2 let. a LStup n'est pas pertinent, étant relevé que cette disposition pénale suppose une mise en danger de la santé de nombreuses personnes, alors que l'art. 75 al. 1 let. g LEI met l'accent sur la gravité de la mise en danger et non sur le nombre de personnes susceptibles d'être touchées (arrêt du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012 consid. 4.3).

15.         Dans cette mesure, le Tribunal fédéral a jugé que la position de la chambre administrative de Cour de justice, qui se fondait sur sa jurisprudence selon laquelle le seul fait que l'intéressé ait été condamné pénalement pour trafic de cocaïne, soit une drogue "dure", justifiait l'application de l'art. 75 al. 1 let. g LEI, ne pouvait être suivie. Il ressortait des principes exposés ci-dessus qu'en présence d'un petit dealer n'ayant été condamné qu'une fois pour un trafic d'une faible quantité de stupéfiants (même de drogues dures), il convenait d'examiner l'ensemble des circonstances, afin de former un pronostic sur le risque de réitération. Ce n'était qu'en présence d'indices concrets en ce sens que l'on pouvait retenir pour l'avenir une grave mise en danger de la vie ou de l'intégrité d'autres personnes, ce qui était la condition à une mise en détention en phase préparatoire au sens de l'art. 75 al. 1 let. g LEI (arrêt du Tribunal fédéral 2C_293/2012 du 18 avril 2012 consid. 4.5).

16.         En l'occurrence, le trafic d'héroïne pour lequel a été condamné M. A______ portait certes sur une petite quantité de drogue au sens de la jurisprudence mentionnée ci-dessus. Cela étant, les explications qu'il a données lors de son audition à la police au sujet des circonstances qui l'avait amené à participer au trafic de stupéfiants, paraissent non seulement peu plausibles, mais contiennent des contradictions flagrantes qui conduisent en réalité à retenir qu'il a pu être actif dans le trafic de stupéfiants pendant une période indéterminée avant son arrestation, et qui laissent quoi qu'il en soit peu de doutes sur la facilité avec laquelle il réitérerait son comportement répréhensible. En effet, tout en expliquant d'abord qu'il était venu en Suisse simplement pour faire du tourisme, muni d'une somme relativement faible en regard du coût de la vie dans ce pays, et en contestant avoir vendu de la drogue, il a ensuite admis son activité délictuelle, tout en maintenant que son but initial était uniquement de faire du tourisme, mais en ajoutant à ce moment-là qu'il n'avait accepté la proposition d'une personne rencontrée par hasard dans la rue que pour gagner un peu d'argent qui lui permettrait de venir en aide à sa famille. Or, on comprend très mal qu'une personne, pour qui un gain net de CHF 150.- sur une transaction de drogue serait d'une importance suffisamment grande pour qu'elle accepte de commettre une infraction d'une certaine gravité, s'apprête à dilapider plusieurs centaines de francs en Suisse dans un simple séjour touristique. Par ailleurs, la prétendue rencontre fortuite, dans la rue, d'une personne à qui M. A______ aurait accepté d'acheter trois sachets d'héroïne afin de les revendre sans avoir soi-disant jamais participé à un tel trafic et n'avoir aucune connaissance du fonctionnement de ce type de marché, apparaît hautement invraisemblable.

17.         Il était donc légitime de la part du Commissaire de police de retenir que M. A______ n'était pas un simple petit dealer occasionnel, mais qu'il appartenait certainement à un réseau organisé et qu'il constituait donc une menace grave pour la vie ou l'intégrité d'autres personnes.

18.         Par conséquent, quant au principe, les conditions de la détention au sens des dispositions susmentionnées étaient réalisées.

19.         La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l’art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; 135 II 105 consid. 2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_237/2013 du 27 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_413/2012 du 22 mai 2012 consid. 3.1) et de l’art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu’elle repose sur une base légale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_584/2012 du 29 juin 2012 consid. 5.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1). Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne peut être prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 du 10 avril 2013 consid. 4.1 ; 2C_237/2013 du 27 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1).

20.         Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 36 Cst., se compose des règles d'aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de la personne concernée et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/752/2012 du 1er novembre 2012 consid. 7).

21.         Il convient dès lors d'examiner, en fonction des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi au sens de l'art. 5 par. 1 let. f CEDH est adaptée et nécessaire (ATF 135 II 105 consid. 2.2.1 ; 134 I 92 consid. 2.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_26/2013 du 29 janvier 2013 consid. 3.1 ; 2C_420/2011 du 9 juin 2011 consid. 4.1 ; 2C_974/2010 du 11 janvier 2011 consid. 3.1 ; 2C_756/2009 du 15 décembre 2009 consid. 2.1).

22.         En l'occurrence, il convient tout d'abord de souligner que la détention apparaît comme le seul moyen apte à permettre l'exécution effective du renvoi de M. A______, celui-ci n'ayant à Genève ni attaches ni revenu et ayant fait preuve d'une profonde désinvolture à l'égard de l'ordre juridique. La levée de sa détention l'aurait certainement pu conduire qu'à sa probable disparition et à l'impossibilité d'assurer concrètement son renvoi. Par ailleurs, cet objectif répondait à un intérêt public certain.

23.         Quant à la durée de sa détention, l'examen judiciaire auquel procède normalement le tribunal à ce sujet n'a, en l'occurrence, assurément plus d'objet, puisque c'est uniquement lorsque cet examen précède la date du renvoi qu'il convient de se demander si la durée de la détention est proportionnée au cas où elle devrait être exécutée.

24.         Quoi qu'il en soit, s'il avait dû se prononcer à ce sujet, le tribunal aurait retenu que la durée de trois semaines était proportionnée, le Commissaire de police ne pouvant être astreint à renouveler des demandes de prolongation de la détention dans des délais extrêmement brefs, alors qu'il peut être sur le point, parallèlement, d'obtenir l'exécution du renvoi.

25.         En l'espèce, eu égard à l'ensemble des circonstances, il y a lieu de confirmer a posteriori la légalité de l'ordre de mise en détention administrative prononcé pour une durée de trois semaines.

26.         Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             confirme a posteriori la légalité de l’ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police le 25 avril 2024 à 14h20 à l’encontre de Monsieur A______ pour une durée de trois semaines, soit jusqu'au 15 mai 2024 inclus ;

2.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les dix jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, au commissaire de police et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière