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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3372/2023

JTAPI/286/2024 du 02.04.2024 ( OCPM ) , REJETE

Descripteurs : AUTORISATION DE SÉJOUR;FORMATION CONTINUE;FORMATION(EN GÉNÉRAL)
Normes : LEI.27.al1; OASA.23.al1; OASA.23.al3
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3372/2023

JTAPI/286/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 2 avril 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1997, est ressortissant du Togo.

2.             Le 19 avril 2023, il a déposé une requête en autorisation de séjour auprès de l'ambassade de Suisse à Accra (Ghana) pour effectuer un Master en management des achats et supply chain auprès de l'école B______ à Genève. Il indiquait être titulaire d'une licence en commerce international obtenue au Maroc en 2020.

3.             Par courrier du 29 juin 2023, l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après: OCPM) a informé M. A______ de son intention de ne pas accéder favorablement à sa requête, lui impartissant un délai pour se déterminer, ce qu'il a fait par courrier du 17 juillet 2023, reçu le 24 juillet 2023 par l'OCPM.

4.             Par décision du 30 août 2023, l'OCPM a refusé de délivrer l'autorisation de séjour sollicitée.

M. A______ ne satisfaisait pas au critère des qualifications personnelles. Il était déjà titulaire d'une licence en commerce international, de sorte que la formation qu'il visait en Suisse n'était pas une première formation. De plus, la nécessité d'entreprendre une nouvelle formation en Suisse visant un Master n'était pas démontrée à satisfaction de droit. Si ses motivations étaient louables, elles relevaient plus de la convenance personnelle que d'un réel besoin d'entreprendre ces études sur le territoire. Sa demande de formation supplémentaire ne pouvait être considérée comme un cas d'exception suffisamment motivé. L'intérêt public de la politique migratoire s'opposait à ses intérêts personnels.

5.             Par acte du 4 octobre 2023, reçu en date du 17 octobre 2023, M. A______ a formé recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après: le tribunal) contre la décision précitée, concluant à ce que le tribunal constate qu'il remplissait les conditions de l'art. 27 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20).

Il avait démontré qu'il n'entendait ni se détourner de l'objet de sa demande de séjour en Suisse, ni y séjourner au-delà du délai d'échéance de l'autorisation sollicitée. L'OCPM avait motivé sa décision de refus uniquement sur la base de considérations purement personnelles et d'une fausse application des normes. L'autorité intimée avait notamment laissé transparaître son intention de refuser la demande même s'il en remplissait les conditions légales. La forme potestative de l'art. 27 LEI attestait du fait qu'il suffisait de remplir les conditions de cette norme pour accéder au visa sollicité. Il n'existait aucune autre condition supplémentaire. Selon l'appréciation de l'autorité intimée, son diplôme de licence professionnelle en science et technologie option génie civile était un obstacle à sa formation projetée, alors qu'il permettait en réalité d'attester de son niveau de formation à titre de prérequis pour suivre la formation continue envisagée en Suisse. Au demeurant, dès lors qu'il n'avait jamais étudié en Suisse, il s'agissait de sa première formation dans ce pays, laquelle, par son contenu spécifique, se distinguait de celle ayant conduit à l'obtention de sa licence. Il n'existait aucune formation similaire au Togo susceptible de garantir une compétence et des qualifications à l'issu du cursus. Sa décision d'entreprendre une nouvelle formation en Suisse était opportune et démontrée, mais tenait surtout aux manquements et carence de l'environnement académique et professionnel de son pays d'origine. Il lui appartenait, et à lui seul, de choisir librement, selon ses aptitudes et moyens, l'école et le pays étranger dans lesquels envisager et suivre la formation de son choix.

À l'appui de son recours, il a notamment produit une attestation d'inscription à la formation en Master en management des achats et supply chain pour l'année scolaire 2023-2024 de la B______ du 15 mars 2023, une confirmation de réservation d'un studio pour une durée de 91 nuits (du 1er septembre 2023 au 1er décembre 2023), un diplôme de C______, d'électronique et de management du Maroc indiquant une spécialisation dans le management, ainsi qu'une attestation bancaire de la D______ du 14 avril 2023, attestant que Monsieur E______, dans le cadre de sa société F______, disposait d'un compte bancaire avec un solde de CHF 31'793.70.- et d'une capacité financière suffisante pour subvenir aux besoins personnels de M. A______ durant son séjour d'études en Suisse.

6.             Le 19 décembre 2023, l'OCPM a transmis ses observations, accompagnées de son dossier. Il a conclu au rejet du recours.

Le recourant était titulaire d'une licence en commerce international obtenue au Maroc et n'avait pas démontré pour quel motif la formation dispensée par l'école B______ à Genève représentait un atout particulier pour la suite de sa carrière au Togo. Il n'avait notamment pas fait état de projets professionnels concrets en lien direct avec le Master visé. À la lecture des explications fournies dans le cadre du recours, il semblait qu'il avait opté pour cette école après le passage de l'un de ses représentants au Togo. La durée de son séjour en Suisse n'était pas non plus clairement déterminée puisqu'il envisageait éventuellement un doctorat après son Master. Il était rappelé que sous l'angle des moyens financiers nécessaires, le garant devait avoir son domicile en Suisse.

7.             Malgré un courrier de relance, le recourant n'a pas répliqué dans le délai imparti par le tribunal à cet effet.

8.             Le détail des écritures et des pièces produites sera repris dans la partie « En droit » en tant que de besoin.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions de la recourante ou du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'elle ou il invoque. L'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/1400/2019 du 17 septembre 2019 consid. 2b). La contestation ne peut donc excéder l'objet de la décision attaquée, c'est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l'autorité inférieure s'est prononcée ou aurait dû se prononcer (ATA/1218/2017 du 22 août 2017 consid. 3b ; ATA/421/2017 du 11 avril 2017 consid. 5 et les arrêts cités ; ATA/1145/2015 du 27 octobre 2015 consid. 4b).

6.             Le recourant conteste la décision du 30 août 2023 au motif qu'il remplirait les conditions de délivrance d'une autorisation de séjour pour études. Ce faisant, on comprend à l'évidence qu'il sollicite son annulation.

7.             La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201) règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas des ressortissants du Togo.

8.             Selon l'art. 27 al. 1 LEI, un étranger peut être admis en vue d'une formation ou d'une formation continue aux conditions suivantes : la direction de l'établissement confirme qu'il peut suivre la formation ou la formation continue envisagées (let. a) ; il dispose d'un logement approprié (let. b) ; il dispose des moyens financiers nécessaires (let. c) ; il a le niveau de formation et les qualifications personnelles requis pour suivre la formation ou le perfectionnement prévus (let. d).

Seul l’étranger qui fréquente une école délivrant une formation à temps complet dont le programme comprend au moins 20 heures de cours par semaine peut se voir délivrer une autorisation de séjour en vue d’une formation ou d’une formation continue au titre de l’art. 27 LEI (EM, Directives et commentaires, Domaine des étrangers [ci-après : Directive LEI], état au 1er mars 2022, p.78, 5.1.1.6).

9.             Selon l'art. 23 al. 1 OASA, l’étranger peut prouver qu’il dispose des moyens financiers nécessaires à une formation ou à une formation continue en présentant notamment une déclaration d’engagement ainsi qu’une attestation de revenu ou de fortune d’une personne solvable domiciliée en Suisse, les étrangers devant être titulaires d’une autorisation de séjour ou d’établissement (let. a), la confirmation d’une banque reconnue en Suisse permettant d’attester l’existence de valeurs patrimoniales suffisantes (let. b) ou une garantie ferme d’octroi de bourses ou de prêts de formation suffisants (let. c).

Selon son alinéa 2, les qualifications personnelles sont suffisantes notamment lorsqu'aucun séjour antérieur, aucune procédure de demande antérieure, ni aucun autre élément n'indique que la formation ou le perfectionnement invoqués visent uniquement à éluder les prescriptions générales sur l'admission et le séjour des étrangers (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral F-1391/2021 du 26 janvier 2022 consid. 5.3.2 ; F-541/2021 du 4 août 2021 consid. 5.3 ; ATA/1035/2019 du 18 juin 2019 consid. 8b).

10.         Les conditions de l’art. 27 al. 1 LEI étant cumulatives, une autorisation de séjour pour l'accomplissement d'une formation ne saurait être délivrée que si l'étudiant étranger satisfait à chacune d'elles (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-1359/2010 du 1er septembre 2010 consid. 5.3 ; ATA/899/2022 du 6 septembre 2022 consid. 4b ; ATA/1096/2021 du 19 octobre 2021 consid. 2c ; ATA/1392/2019 du 17 septembre 2019 consid. 6a). Cela étant, l'autorité cantonale compétente dispose d'un large pouvoir d'appréciation, l'étranger ne bénéficiant pas d'un droit de séjour en Suisse fondé sur l'art. 27 LEI (arrêts du Tribunal fédéral 2D_49/2015 du 3 septembre 2015 consid. 3, ATA/1035/2019 du 18 juin 2019 consid. 8e).

11.         La question de la nécessité du perfectionnement souhaité ne fait pas partie des conditions posées à l'art. 27 LEI pour l'obtention d'une autorisation de séjour pour études. Cette question doit cependant être examinée sous l'angle du pouvoir d'appréciation conféré à l'autorité par l'art. 96 al. 1 LEI (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral F-2450/2018 du 14 septembre 2018 consid. 7.2 ; F-6400/2016 du 27 avril 2018 consid. 5.3.3 ; ATA/899/2022 du 6 septembre 2022 consid. 4f ; ATA/1237/2020 du 8 décembre 2020 consid. 8), lequel stipule que les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son degré d'intégration.

12.         Suite à la modification de l'art. 27 LEI entrée en vigueur le 1er janvier 2011 (RO 2010 5957 ; FF 2010 373, notamment p. 391), l'absence d'assurance de départ de Suisse de l'intéressé au terme de sa formation ne constitue plus un motif justifiant à lui seul le refus de délivrance d'une autorisation de séjour pour études (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-5909/2012 du 12 juillet 2013 consid. 6.2 ; C-4647/2011 du 16 novembre 2012 consid. 5.4 ; ATA/899/2022 du 6 septembre 2022 consid. 4c ; ATA/1035/2019 du 18 juin 2019 consid. 8f). Néanmoins, cette exigence subsiste en vertu de l'art. 5 al. 2 LEI, à teneur duquel tout étranger qui effectue un séjour temporaire en Suisse, tel un séjour pour études, doit apporter la garantie qu'il quittera la Suisse à l'échéance de celui-là (ATA/1035/2019 du 18 juin 2019 consid. 8f ; ATA/677/2015 du 23 juin 2015 consid. 4a ; ATA/303/2014 du 29 avril 2014 consid. 6). L'autorité la prend en considération dans l'examen des qualifications personnelles requises au sens des art. 27 al. 1 let. d LEI et 23 al. 2 OASA (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-2333/2013 ; C-2339/2013 du 28 octobre 2014 consid. 7.2.2 ; C-2291/2013 du 31 décembre 2013 consid 6.2.1 ; C-4733/2011 du 25 janvier 2013 consid 6.3).

13.         Lors de l'examen des qualifications personnelles, aucun indice ne doit par conséquent porter à croire que la demande aurait pour objectif non pas un séjour temporaire en vue de suivre la formation, mais en premier lieu d'éluder les prescriptions sur les conditions d'admission en Suisse, afin d'y séjourner durablement. Aussi convient-il de tenir notamment compte, lors de l'examen de chaque cas, des circonstances suivantes : situation personnelle du requérant (âge, situation familiale, formation scolaire préalable, environnement social), séjours ou demandes antérieurs, région de provenance (situation économique et politique, marché du travail indigène pour les diplômés des hautes écoles) (directives LEI, ch. 5.1.1.1 ; ATA/1035/2019 du 18 juin 2019 consid. 8c).

Dans cette perspective, selon la jurisprudence du Tribunal administratif fédéral, le bénéfice d’une formation complète antérieure (arrêts C-5718/2013 du 10 avril 201 ; C-3143/2013 du 9 avril 2014 ; C-2291/2013 du 31 décembre 2013), l’âge de la personne demanderesse (arrêts C-5718/2013 du 10 avril 2014 ; C-3139/2013 du 10 mars 2014), les échecs ou problèmes pendant la formation (arrêt C-3170/2012 du 16 janvier 2014), la position professionnelle occupée au moment de la demande (arrêt C-5871/2012 du 21 octobre 2013), les changements fréquents d’orientation (arrêt C-6253/2011 du 2 octobre 2013), la longueur exceptionnelle du séjour à fin d’études (arrêt C-219/2011 du 8 août 2013) sont des éléments importants à prendre en compte en défaveur d’une personne souhaitant obtenir une autorisation de séjour pour études (cf. ATA/303/2014 du 29 avril 2014 consid. 8).

14.         L’étranger doit également présenter un plan d’études personnel et préciser le but recherché (ATA/457/2016 du 31 mai 2016 consid. 5 ; ATA/208/2015 du 24 février 2015 consid. 10 ; directives LEI, ch. 5.1.1). Un changement d’orientation en cours de formation ou de perfectionnement ou une formation supplémentaire ne peuvent être autorisés que dans des cas suffisamment motivés (ATA/208/2015 précité ; directives LEI, ch. 5.1.1.7).

15.         Lors de l'admission d'étrangers, l'évolution sociodémographique de la Suisse est prise en considération (cf. art. 3 al. 3 LEI). La Suisse ne peut accueillir tous les étrangers qui désirent y séjourner, que ce soit pour des séjours de courte ou de longue durée, raison pour laquelle la jurisprudence considère qu'il est légitime d'appliquer une politique restrictive d'admission (cf. ATF 122 II 1 consid. 3a ; cf. Alain WURZBURGER, « La jurisprudence récente du Tribunal fédéral en matière de police des étrangers », in RDAF I 1997 p. 287 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-1359/2010 du 1er septembre 2010 consid. 6.1 ; ATA/677/2015 du 23 juin 2015 consid. 6a ; ATA/303/2014 du 29 avril 2014 consid. 7).

Compte tenu du grand nombre d'étrangers qui demandent à être admis en Suisse en vue d'une formation ou d'un perfectionnement, les conditions d'admission fixées à l'art. 27 LEI, de même que les exigences en matière de qualifications personnelles et envers les écoles (art. 23 et 24 OASA), doivent être respectées de manière rigoureuse. Il y a lieu de tout mettre en œuvre pour empêcher que les séjours autorisés au motif d'une formation ou d'un perfectionnement ne soient exploités de manière abusive afin d'éluder des conditions d'admission plus sévères (directives LEI, ch. 5.1.1 ; cf. aussi ATA/1035/2019 du 18 juin 2019 consid. 8c ; ATA/303/2014 du 29 avril 2014 consid. 7).

L'expérience démontre que les étudiants étrangers admis à séjourner sur sol helvétique ne saisissent souvent pas l'aspect temporaire de leur séjour en Suisse et cherchent, une fois le but de leur séjour atteint, à s'établir à demeure dans le pays. Confrontées de façon récurrente à ce phénomène, afin de prévenir les abus, et compte tenu aussi de l'encombrement des établissements (écoles, universités, etc.) et de la nécessité de sauvegarder la possibilité d'accueillir aussi largement que possible de nouveaux étudiants sur le territoire de la Confédération, les autorités sont tenues de faire preuve de rigueur dans ce domaine. Aussi, selon la pratique constante, la priorité est donnée aux jeunes étudiants désireux d'acquérir une première formation en Suisse. Parmi les ressortissants étrangers déjà au bénéfice d'une première formation acquise dans leur pays d'origine, seront prioritaires ceux qui envisagent d'accomplir en Suisse un perfectionnement professionnel constituant un prolongement direct de leur formation de base (cf. not. arrêts du Tribunal administratif fédéral F-6538/2018 du 10 mars 2020 consid. 8.2.2 ; C-5015/2015 du 6 juin 2016 consid. 7.1 ; C-5718/2013 du 10 avril 2014 consid. 7.2.3 ; C-5497/2009 du 30 mars 2010 consid. 6.1 ; C-1794/2006 du 17 juillet 2009 consid. 5.2 ; C-4419/2007 du 28 avril 2009 consid. 5.2 et la jurisprudence citée ; ATA/1506/2017 du 21 novembre 2017 consid. 4e ; ATA/303/2014 du 29 avril 2014 consid. 7).

16.         Selon une pratique constante codifiée dans les directives du SEM, sous réserve de circonstances particulières, aucune autorisation de séjour pour études n'est en principe accordée à des requérants âgés de plus de 30 ans disposant déjà d'une formation, les exceptions devant être suffisamment motivées (cf. directives LEI, ch. 5.1.1.5 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-6538/2018 du 10 mars 2020 consid. 8.2.2 ; F-4736/2018 du 4 décembre 2019 consid. 7.7.3 et la jurisprudence citée ; ATA/1035/2019 du 18 juin 2019 consid. 8c).

Cette pratique a toutefois été fortement nuancée par le Tribunal fédéral dans l’ATF 147 I 89. Rappelant qu'elle n'avait pas été développée afin de limiter le nombre d'étudiants étrangers en Suisse, mais plutôt dans le but d'éviter qu'un grand nombre de ceux-ci ne quittent pas le pays au terme de leurs études, ce dernier a jugé que le refus de mettre le recourant (âgé de 35 ans, qui exerçait une activité de prêtre dans un diocèse togolais) au bénéfice d’une autorisation de séjour pour études en vue de suivre un master en théologie à l'Université de Fribourg, de façon à compléter son Bachelor obtenu dans la même matière au Togo, violait l’art. 8 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst - RS 101) en tant qu'il se fondait de manière déterminante sur son âge, sans qu'il n'existe en l'espèce de motif objectif justifiant l'utilisation d'un tel critère. In casu, ce refus ne se justifiait ni par la volonté d'appliquer une politique migratoire restrictive et d'assurer le départ des étudiants étrangers à la fin de leur formation en Suisse, ni par l'intérêt à privilégier la venue de jeunes étudiants.

17.         Selon l'art. 23 al. 3 OASA, une formation ou une formation continue est en principe admise pour une durée maximale de huit ans ; des dérogations peuvent être accordées en vue d'une formation ou d'une formation continue visant un but précis. Des exceptions ne sont ainsi possibles que dans les cas suffisamment motivés et doivent être soumises au SEM pour approbation. C'est par exemple le cas lorsqu'une formation présente une structure logique (p.ex. internat, gymnase, études menant à un diplôme, doctorat), qu'elle vise un but précis et n'est pas destinée à éluder des conditions d'admission plus strictes (cf. directives LEI, ch. 5.1.1.5 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-541/2021 du 4 août 2021 consid. 5.3).

18.         En l’espèce, il n'est pas contesté que le recourant ne se trouve pas dans l’une ou l’autre des situations dans lesquelles une loi ou un traité international lui conférerait un droit à l’octroi d’une autorisation de séjour. L’autorité intimée disposait dès lors d’un large pouvoir d’appréciation pour statuer sur sa requête.

Il faut rappeler que l’autorité intimée a la faculté de refuser l'octroi d'une autorisation fondée sur l'art. 27 LEI, même si les conditions légales sont réunies, sous réserve de l'abus ou de l'excès de son large pouvoir d’appréciation.

Vu sa situation, l’OCPM a considéré que le recourant n’avait pas démontré la nécessité de suivre les études projetées en Suisse. Quand bien même, comme déjà mentionné, ce dernier aspect ne représente plus à proprement parler une condition légale, le refus de l'autorité intimée ne constitue en tout cas pas une appréciation insoutenable de la situation, ni une mise en balance critiquable des intérêts en présence. À cet égard, la formation qu'il a déjà suivie au Maroc en management constituera indéniablement un atout dans le cadre de la suite de son parcours professionnel dans son pays d'origine. Il convient également d'ajouter que contrairement à ce que laisse entendre le recourant, le fait qu'il n'ait jamais effectué d'études en Suisse ne permet pas de retenir qu'il s'agirait d'une première formation. Au contraire, conformément à la jurisprudence précitée, il faut prendre en considération la formation antérieure déjà suivie par le recourant.

Par ailleurs, on peut également douter du fait que le recourant remplisse la condition des moyens financiers suffisants. En effet, à teneur des éléments du dossier, si l'attestation bancaire de la banque togolaise certifie certes que le garant du recourant disposerait de la capacité financière pour subvenir aux besoins de ce dernier en Suisse durant ses études, ce document ne fait état que d'un solde de compte d'un peu plus de CHF 30'000.-, ce qui ne permet pas de confirmer la capacité financière suffisante du garant du recourant, lequel n'est d'ailleurs manifestement pas domicilié en Suisse comme le prévoit l'art. 23 al. 1 let. a OASA. Par ailleurs, s'agissant du logement en Suisse, l'attestation qu'il a produite n'atteste que d'une durée de 91 nuits, ce qui n'est manifestement pas suffisant pour couvrir l'ensemble de la durée de la formation envisagée pour l'année scolaire 2023-2024.

Enfin, la décision entreprise ne viole pas des principes généraux du droit tels que celui de la proportionnalité. Le fait qu'une autre solution soit possible, à savoir la délivrance de l'autorisation sollicitée, compte tenu notamment de l'intérêt privé du recourant, cela ne consacre toutefois pas un abus du pouvoir d'appréciation de l'autorité intimée. La décision de l'OCPM est apte à atteindre le résultat de politique publique poursuivi et est nécessaire pour ce faire. Elle respecte la proportionnalité au sens étroit, si l'on met en balance les intérêts publics - l'encombrement des établissements d'éducation et la volonté d'empêcher que ne soient éludées les conditions d'admission sur le territoire suisse - et l’intérêt du recourant à suivre un Master en management en Suisse (cf. ATA/473/2021 du 4 mai 2021 consid. 4 ; ATA/369/2021 du 30 mars 2021 consid. 4 ; ATA/991/2020 du 6 octobre 2020 consid. 5). Le refus de l’OCPM tient également compte de la politique d'admission restrictive que les autorités suisses ont été amenées à adopter en matière de réglementation des conditions de résidence des étudiants étrangers et de délivrance de permis de séjour pour études (cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6400/2016 du 27 avril 2018 consid. 5.4).

En conclusion, l'OCPM n'ayant ni excédé ni abusé de son pouvoir appréciation en refusant de délivrer l’autorisation de séjour pour études sollicitée, le tribunal ne saurait, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdit (art. 61 al. 2 LPA), substituer son appréciation à celle de l'autorité intimée, étant rappelé que lorsque le législateur a voulu conférer à l'autorité de décision un pouvoir d'appréciation dans l'application d'une norme, le juge qui, outrepassant son pouvoir d'examen, corrige l'interprétation ou l'application pourtant défendable de cette norme à laquelle ladite autorité a procédé, viole le principe de l'interdiction de l'arbitraire (cf. ATF 140 I 201 consid. 6.1 et les références citées).

19.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 400.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

20.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 17 octobre 2023 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 30 août 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 400.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière