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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1725/2022

JTAPI/1008/2022 du 28.09.2022 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : LIMITATION DES ÉMISSIONS;ANTENNE;RADIOCOMMUNICATION;TÉLÉPHONE MOBILE;ATTEINTE À LA SANTÉ;PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT
Normes : LPE.11; ORNI.4
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1725/2022 LCI

JTAPI/1008/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 28 septembre 2022

 

dans la cause

 

COMMUNE de A______, représentée par Me Jean-Pierre CARERA, avocat, avec élection de domicile

 

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

B______ Sàrl, représentée par Me Stephan KRONBICHLER, avocat, avec élection de domicile

C______ SA


EN FAIT

1.             La société C______ SA est propriétaire de la parcelle n° 1______ de la commune de A______ (ci-après: la commune), sise en zone agricole.

2.             Le 16 avril 2020, B______ AG, aujourd'hui B______Sàrl (ci-après: B______) a requis du département du territoire (ci-après: le département ou DT) la délivrance d'une autorisation de construire portant sur la construction d'une nouvelle station de base de téléphonie mobile située sur la parcelle susmentionnée, accompagnée d'une demande de dérogation selon l'art. 27 de la loi d’application de la LAT du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30). Cette requête a été enregistrée sous la référence DD 2______ et a été publiée dans la Feuille d'avis officielle (ci-après: FAO) du 6 mai 2020.

La fiche de données spécifique au site du 13 décembre 2021, s'agissant du rayonnement dans les locaux à usage sensible (ci-après: LUS) et dans le lieu de séjour momentané (ci-après: LSM) les plus chargés, indiquait les mesures suivantes :

- LSM n° 1 – Pied du mât ; maintenance : 8.24 V/m ;

- LUS n° 2 – Maison, parcelle n° 1______ ; habitation : 4.92 V/m ;

- LUS n° 3 – Maison, parcelle n° 3______ ; habitation : 4.22 V/m ;

- LUS n° 4 – Maison, parcelle n° 4______ ; habitation : 2.72 V/m ;

3.             L'enquête publique a eu lieu du 15 mai au 15 juin 2020.

4.             Lors de l'instruction de cette requête, les préavis suivants ont notamment été recueillis:

-                 le 27 avril 2020, la direction des autorisations de construire (ci-après: la DAC) s'est prononcée favorablement au projet avec dérogation au sens des art. 27 LaLAT et 24 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700) ;

-                 le 29 mai 2020, l'office de l'urbanisme (ci-après: le SPI) a rendu un préavis favorable avec dérogation à l'art. 27 LaLAT, précisant en substance que si le projet n'était pas conforme à la zone agricole, il était imposé par sa destination à cet emplacement. Il était également relevé que le projet ne s'intégrait pas dans le paysage dès lors que le mât était d'une hauteur de 35 m et dépassait largement le sommet des arbres alentours. Toutefois, en l'absence de mesures de protection spécifiques visant à préserver le paysage dans le secteur, le projet pouvait être autorisé ;

-                 le 5 juin 2020, le service de l'air, du bruit et des rayonnements non ionisant (ci-après: SABRA) a requis la production de pièces complémentaires, indiquant que vu les travaux dirigés par l'office fédéral de l'environnement (ci-après: OFEV) sur le déploiement de nouvelles antennes liées à la 5G, de type adaptatif, et sur la méthodologie de contrôle in situ du rayonnement en cours, le canton réservait sa position sur la conformité à l'ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant (ORNI – RS 814.710) dans l'attente du résultat desdits travaux ;

-                 le 15 juin 2020, la commune a rendu un préavis défavorable, s'opposant à l'installation d'un mât d'une hauteur de 35 m sur une parcelle en zone agricole. De plus, à la prise de connaissance des informations concernant les antennes adaptatives et la 5G ainsi que la mise en place du moratoire par le canton de Genève, elle appliquait le principe de précaution quant à ce genre d'installation sur son territoire tant que l'ensemble des principes et la publication de l'aide à l'exécution pour les antennes adaptatives de l'OFEV n'auraient pas été réalisées ;

-                 le 30 juin 2020, le service des monuments et des sites (ci-après: SMS) s'est déclaré pas concerné par le projet, relevant la situation de l'antenne à proximité directe du plan de site de D______. Son impact serait important, au regard des vues lointaines depuis le site protégé.

5.             Par décision du 26 octobre 2020, le département a refusé de délivrer l'autorisation de construire DD 2______. Les enquêtes et investigations de l'OFEV devant permettre de lever les incertitudes quant aux effets de la 5G n'avaient pas encore abouti et le moratoire avait été prolongé par le Conseil d'État le 16 octobre 2019. L'absence de la transparence nécessaire au sujet de l'exposition effective de la population due à ces antennes et d'indications précises de la Confédération nécessaires à évaluer le respect de l'ORNI conduisaient à ce refus.

6.             Dans le cadre du recours formé le 18 novembre 2020 par D______ contre cette décision (A/5______), le Tribunal administratif de première instance (ci-après: le tribunal ou TAPI) a suspendu la cause d'entente entre les parties par décision du 15 avril 2021 (DITAI/6______).

7.             Le 28 avril 2021, le Conseil d'État a levé le moratoire sur le développement de la 5G.

8.             Le 7 juin 2021, le département a informé le tribunal qu'il reconsidérait sa décision du 26 octobre 2020 et reprenait l'instruction de la requête DD 113'477.

9.             Par jugement du 8 septembre 2021 (JTAPI/7______), le tribunal a déclaré le recours dans la procédure A/5______ sans objet et a rayé la cause du rôle.

10.         Le département a repris l'instruction de la requête en autorisation de construire.

11.         Le 24 février 2022, le SABRA a rendu un préavis favorable au projet, sous conditions, indiquant que d'après la fiche de données spécifique au site du 13 décembre 2021, l'installation se composait d'un groupe de vingt-sept antennes, réparties sur trois mâts situés au chemin de E______ et qu'elle était susceptible de produire des immissions dépassant la valeur limite d'installation (ci-après: VLInst) dans une surface d'un rayon de 240 m.

Selon la fiche de données spécifique au site, il n'y avait pas de lieux normalement accessibles où la valeur limite d'immissions (ci-après: VLI) était épuisée. L'opérateur avait évalué les immissions sur les bâtiments voisins et la VLInst y était respectée. Cependant, pour les points d'évaluation nos 2 et 3, les immissions étaient supérieures à 80% de la VLInst dans des directions proches du rayon principal, l'exploitant devant ainsi effectuer, lors de la réception, des mesurages à ses frais.

L'installation était conforme à l'ORNI et au règlement genevois sur la protection contre le rayonnement non ionisant des installations stationnaires du 29 septembre 1999 (RPRNI - K 1 70.07). L'opérateur s'engageait à intégrer les antennes de cette installation dans son système d'assurance qualité (système AQ) permettant de surveiller les données d'exploitation conformément aux recommandations de l'OFEV.

Le préavis mentionnait trois conditions, soit les mesurages de contrôle aux LUS nos 2 et 3, l'intégration des antennes de cette installation dans le système d'assurance qualité et que les parties accessibles pour l'entretien, où la VLI était épuisée, devaient être dûment protégées.

12.         Le 27 avril 2022, le département a délivré l'autorisation de construire sollicitée, laquelle a été publiée dans la FAO du même jour.

13.         Par acte du 24 mai 2022, sous la plume de son conseil, la commune a formé recours auprès du tribunal contre la décision précitée, concluant à son annulation, sous suite de frais et dépens.

En sa qualité de commune du lieu de situation, elle disposait de la qualité pour recourir.

Elle avait rendu un préavis défavorable en juin 2020, en raison de l'implantation de la construction en zone agricole, mais également du principe de précaution, dans l'attente du résultat des travaux scientifiques en cours à propos de la 5G, en indiquant sa volonté d'être consultée à nouveau si la situation devait évoluer. Or, le département avait repris l'instruction du dossier près de deux après le dépôt de la requête initiale et une suspension de l'instruction, au motif que la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (ci-après: chambre constitutionnelle) avait rendu un arrêt important sur la question et que le Conseil fédéral avait publié une aide à l'exécution de l'ORNI, laquelle faisait notamment suite aux travaux des experts scientifiques. Ces éléments constituaient des faits nouveaux importants pour l'instruction de la demande qui auraient nécessité de solliciter un nouveau préavis de la commune. Il en allait de même des autres instances de préavis sollicitées, hormis le SABRA. En outre, dans l'intervalle, les circonstances avaient évolué avec le dépôt de deux demandes d'autorisation dans le secteur concerné impliquant des animaux (poules et abeilles) et la production de denrées alimentaires (œufs et miel), lesquelles n'étaient pas compatibles avec un tel projet d'installation.

Malgré les études récentes et le respect des valeurs limites fixées par l'ORNI, il n'était pas possible d'affirmer que l'installation ne constituait pas un danger pour la population. Même si la jurisprudence de la chambre constitutionnelle retenait que la fixation des valeurs relevait du droit fédéral, le département disposait d'une marge de manœuvre lui permettant de refuser le projet en question en se basant sur le principe de précaution, celui-ci ne se limitant pas au respect des valeurs limites de l'ORNI. Les enjeux de protection de la santé de la population étaient nettement plus importants que celui de la mise en place d'un réseau de communication moderne et efficace.

La technologie 5G était susceptible de causer des inconvénients graves pour le voisinage ou le public, notamment de porter atteinte à la santé des populations à proximité des antennes, en violation de l'art. 14 LCI, ce d'autant plus que le projet se situait en zone agricole comprenant plusieurs exploitations agricoles avec des logements.

Enfin, le projet n'était pas imposé par sa destination en zone agricole, dès lors que le choix de regrouper vingt-sept antennes à cet emplacement était avant tout motivé par des considérations économiques afin d'éviter d'exploiter plusieurs installations plus petites, moins puissantes et plus onéreuses.

14.         Par écriture du 11 juillet 2020, sous la plume de son conseil, B______ (ci-après: B______) a répondu au recours, concluant à son rejet, sous suite de frais et dépens.

Le SABRA avait constaté que les VLInst étaient respectées. En outre, la recourante avait pu s'exprimer pleinement sur le projet dans le cadre de son recours, de sorte qu'un éventuel vice de procédure était désormais réparé.

Les cantons n'avaient pas la compétence d'aller plus loin que les exigences posées par l'ORNI en matière de protection de la population, le droit fédéral réglant la question de manière exhaustive. Partant, les griefs relatifs à une violation des art. 11 LPE et 14 LCI tombaient à faux, puisque le SABRA avait constaté que l'installation projetée respectait intégralement l'ORNI.

Selon les cartes de couverture produites en annexes de la demande d'autorisation de construire, l'installation projetée était indispensable pour obtenir une couverture de qualité suffisante dans la zone concernée, étant précisé que des puissances importantes étaient nécessaires. En outre, cette zone connaissait un déficit de capacité que le sites alentours ne pouvaient pas combler. Il était par ailleurs notoire que les besoins de couverture et de capacité réseau étaient en forte augmentation. La concentration des antennes de trois opérateurs sur un seul site entouré d'arbres permettait au mieux de préserver l'esthétique du paysage qui serait plus affectée par la construction de multiples mâts à l'intérieur de la zone à bâtir, lesquelles devraient nécessairement avoir une puissance plus faible. La majeure partie du village de F______ était située en zone agricole. Il était dès lors impossible d'un point de vue technique de desservir ce secteur exclusivement par des antennes situées en zone à bâtir. L'installation projetée ne pouvait donc pas être construite en zone à bâtir. Enfin, les autorités spécialisées, à savoir la DAC et le SPI, avaient préavisé favorablement l'emplacement du projet en zone agricole.

15.         Par écriture du 21 juillet 2022, le département a répondu au recours, concluant à son rejet. Il a produit son dossier.

Aucune modification relative au projet d'autorisation de construire ne pouvait être qualifiée d'essentielle. La recourante ne démontrait pas le contraire, se contentant de relever que les circonstances avaient évolué de manière significative. Il n'était ainsi pas nécessaire de requérir un nouveau préavis de la commune, alors que le SABRA s'était prononcé favorablement, et qu'elle s'était déjà prononcée défavorablement le 15 juin 2020, sans expliquer en quoi le fait de la consulter à nouveau aurait eu une influence sur la décision litigieuse.

En soutenant que le principe de précaution n'avait pas été respecté, la recourante se contentait d'invoquer un prétendu abus du pouvoir d'appréciation. L'autorisation litigieuse se basait sur l'examen minutieux opéré par le SABRA, lequel s'était fondé sur les valeurs indiquées dans la fiche de données spécifique au site du 13 décembre 2021 pour rendre son préavis favorable sous conditions, jugeant que les valeurs limites de l'ORNI et du règlement cantonal topique étaient respectées.

Dans la mesure où, comme en l'espèce, la loi fédérale du 7 octobre 1983 sur la protection de l'environnement (loi sur la protection de l'environnement, LPE ; RS 814.01) et l'ORNI étaient respectées, le projet litigieux ne pouvait être source d'inconvénients graves.

Enfin, l'installation projetée était absolument nécessaire pour étendre la couverture de la zone visée, laquelle n'était pas couverte par le réseau de téléphonie mobile exploité par la requérante. Les antennes étaient donc bien destinées à pallier une lacune de couverture et de capacité. Selon les indications du Système d'Information du Territoire à Genève (ci-après : SITG), l'installation mobile la plus proche se situait à 340 m du projet et émettait dans un rayon de 133 m alors que les antennes projetées émettraient des immissions dans un rayon de 240 m. Ce projet avait fait l'objet d'un examen minutieux et avait abouti au préavis favorable du SPI, confirmant que son implantation était imposée par sa destination. Le projet n'entrainerait qu'un empiètement minime sur la surface agricole dans la mesure où la superficie utilisée pour le support d'antennes était modeste et que la construction était prévue en applique du bâtiment agricole existant. En outre, les antennes seraient regroupées de sorte à réduire au minimum les atteintes à l'environnement.

16.         Invitée par le tribunal, la recourante n'a pas répliqué.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             En effet, s'agissant de la qualité pour recourir de la commune, selon les art. 34 al. 1 LaLAT et 145 al. 2 LCI, la commune du lieu de situation peut recourir contre les décisions du département du territoire.

Elle dispose de cette qualité du seul fait que la construction ou l'installation projetée se trouve sur son territoire (ATA/1104/2020 du 3 novembre 2020, consid. 1 et réf. cit).

4.             En l'espèce, le projet d'installation d'antennes pour téléphonie mobile litigieux est situé sur la parcelle n° 1______ sise sur le territoire de la commune, de sorte que sa qualité pour recourir est donnée.

5.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b).

En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce. Il n'en résulte toutefois pas que l'autorité est libre d'agir comme bon lui semble, puisqu'elle ne peut pas faire abstraction des principes constitutionnels régissant le droit administratif, notamment la légalité, la bonne foi, l'égalité de traitement, la proportionnalité et l'interdiction de l'arbitraire (ATA/366/2013 du 11 juin 2013 consid. 3a et la référence citée).

6.             Sur le fond, le litige porte sur l’autorisation d’implanter une installation de téléphonie mobile en zone agricole.

7.             Dans un premier grief, la commune fait valoir qu'elle aurait dû être consultée une seconde fois lors de l'instruction du dossier suite à l'évolution des connaissances sur les effets des antennes 5G.

8.             Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l'autorité reste ainsi libre de s'en écarter pour des motifs pertinents et en raison d'un intérêt public supérieur. Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser. Il n'en demeure pas moins que la délivrance de telles autorisations de construire demeure de la compétence exclusive du département, à qui il appartient de statuer en tenant compte de tous les intérêts en présence (ATA/259/2020 du 3 mars 2020 consid. 4b).

9.             Si un projet de construction subit des modifications essentielles en cours d'instruction, après avoir été porté à la connaissance de l'autorité de préavis, il appartient à l'autorité de décision de requérir à nouveau le préavis de cette dernière (ATA/927/2021 du 7 septembre 2021 consid. 6d ; ATA/414/2017 du 11 avril 2017 consid. 4b ; ATA/198/2013 du 26 mars 2013 ; ATA/273/2011 du 3 mai 2011). Un projet subit une modification essentielle, lorsque pris dans leur ensemble, tant l'implantation que la volumétrie des bâtiments ont été modifiées, notamment par une augmentation de l'emprise au sol de la construction réduisant les distances aux limites de propriété ou par un déplacement d'un bâtiment et une augmentation du nombre d'étages prévus. Il en est de même lorsque les modifications intervenues changent le régime juridique d'un projet le faisant passer notamment des règles ordinaires en matière de gabarit de hauteur à celles régissant les surélévations d'immeubles (ATA/198/2013 du 26 mars 2013).

10.         Dans l’affaire objet de l’arrêt ATA/414/2017 précité, la chambre administrative a confirmé la décision du TAPI de solliciter, après l’audition d’un de ses représentants, un préavis complémentaire de l’autorité spécialisée (soit l’office cantonal de l’énergie) sur la modification du projet litigieux due à la production d’une nouvelle pièce (à savoir un bilan thermique actualisé) par la requérante devant le TAPI et de donner aux parties la possibilité de se déterminer sur ce préavis complémentaire, au lieu de renvoyer le dossier au département pour nouvelle décision sur la demande d’autorisation de construire. Ladite modification, si elle pouvait avoir un certain impact sur les aspects énergétiques du bâtiment en cause, n’induisait pas de changement de régime juridique du projet querellé et ne pouvait pas être qualifiée d’essentielle au sens de la jurisprudence (consid. 4c).

11.         Dans une affaire plus récente, la chambre administrative a admis, à la lumière de la jurisprudence précitée, qu’avant de rendre son jugement, le TAPI exige du département la production du préavis de la commission d’urbanisme – qui manquait au dossier – au sujet de la dérogation à la hauteur de gabarit et au coefficient d’occupation du sol du bâtiment, à vocation industrielle et artisanale, envisagé et qu’il transmette ledit préavis – favorable dans ce cas – aux parties en donnant à celles-ci la possibilité de se déterminer à son sujet. La chambre de céans a estimé qu’il ne ressortait pas de la jurisprudence précitée que « seuls des compléments relatifs à des préavis déjà émis pourraient être demandés par le TAPI » (ATA/615/2020 du 23 juin 2020 consid. 3b, confirmé par l’arrêt du Tribunal fédéral 1C_449/2020 du 26 août 2021 consid. 3.2).

12.         En l'espèce, il ressort des différents préavis que l'autorisation de construire initiale avait été refusée uniquement sur la base des incertitudes liées au développement de la 5G et dans l'attente du résultat des travaux de la Confédération à ce sujet. En revanche, il est manifeste que le projet n'a pas évolué depuis son dépôt initial. Ainsi, seul le contexte global a évolué, la reprise de la procédure n'étant due qu'à la fin du moratoire sur le développement de la 5G et à la publication des résultats des études de l'OFEV. Il est ainsi manifeste que le projet n'a subi aucune modification essentielle nécessitant obligatoirement une nouvelle consultation de la commune, ce d'autant plus que vu la teneur de son acte de recours, il est évident que celle-ci n'a pas modifié son point de vue sur le projet et y reste défavorable pour des motifs de sécurité de la population. Il en va de même des projets de constructions en cours d'instruction à proximité de l'installation litigieuse, étant par ailleurs relevé que le projet de construction de la mieillerie est situé en dehors du rayon d'immissions de 240 m de l'installation.

Partant, en ne sollicitant pas un nouveau préavis de la commune, le département n'a pas violé l'art. 3 al. 3 LCI.

Le grief doit donc être écarté.

13.         La recourante allègue ensuite une violation du principe de précaution et une violation de l'art. 14 LCI. Ces deux griefs portent en substance sur des éléments proches, ce qui justifie de les examiner en même temps.

14.         Le développement du réseau de téléphonie mobile 5G s'inscrit dans un climat de tension entre intérêts publics contradictoires : d'un côté, la mise à disposition de la population d'un réseau mobile performant, et de l'autre, la protection de la santé de la population contre les rayonnements non ionisants (Joel DRITTENBASS, Risk-Based Approach als Konkretisierungsvariante des umweltschutzrechtlichen Vorsorgeprinzips : Angewendet am neuen 5G-Mobilfunkstandard, DEP 2021, p. 134 ss, p. 139 s.).

15.         En droit fédéral, la protection contre les effets nocifs ou gênants causés notamment par les rayonnements non ionisants issus des antennes de téléphonie mobile est régie par la LPE et les ordonnances qui en découlent (cf. ATF 138 II 173 consid. 5.1 ; arrêt 1C_97/2018 du 3 septembre 2019 consid. 3.1 ; Joel DRITTENBASS, op.cit., p. 140).

16.         Selon l'art. 1 al. 1 LPE, la loi sur la protection de l'environnement a pour but de protéger l'homme, les animaux et les plantes, leurs communautés biotiques et leurs habitats contre les atteintes nuisibles ou incommodantes et de préserver à long terme les bases naturelles de la vie. Les impacts qui pourraient devenir nuisibles ou gênants doivent être limités à un stade précoce par mesure de précaution (art. 1 al. 2 LPE). L'émission de rayonnements est limitée par des mesures à la source (art. 11 al. 1 LPE), notamment par l'édiction de valeurs limites d'émission dans les ordonnances (art. 12 al. 1 let. a et al. 2 LPE).

17.         Pour l'évaluation des effets nocifs ou gênants, le Conseil fédéral fixe par voie d'ordonnance des VLI ( art. 13 al. 1 LPE). Selon l'art. 14 let. a LPE, les VLI doivent être fixées de telle manière que des immissions inférieures à ces valeurs ne mettent pas en danger l'homme, les animaux et les plantes, leurs communautés biotiques et leurs habitats selon l'état de la science ou l'expérience. Bien que la disposition précitée se réfère à la pollution atmosphérique, elle s'applique également en règle générale à d'autres immissions, notamment celles causées par les rayonnements non ionisants (cf. ATF 146 II 17 consid. 6.5 ; 126 II 399 consid. 4b ; 124 II 219 consid. 7a ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_579/2017 du 18 juillet 2018 consid. 5.5 ; 1C_450/2010 du 12 avril 2011 consid. 3.3).

18.         Sur la base de la délégation de compétence de l'art. 13 al. 1 LPE, le Conseil fédéral a édicté l'ORNI pour protéger les personnes contre les rayonnements non ionisants nocifs ou gênants provenant de l'exploitation d'installations fixes (art. 1 ORNI). Cette ordonnance règle les limites d'émissions ainsi que les limites d'immissions pour les émetteurs de radiocommunication mobile et les raccordements d'abonnés sans fil (cf. art. 2 al. 1 let. a, et annexe 1 ch. 6, ainsi que l'annexe 2 de l'ORNI ; ATF 138 II 173 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_97/2018 du 3 septembre 2019 consid. 3.1). Pour se protéger contre les effets thermiques scientifiquement fondés du rayonnement des installations de radiocommunication mobile, l'ORNI prévoit des VLI qui doivent être respectées partout où des personnes peuvent être présentes (art. 13 al. 1 et annexe 2 ORNI ; ATF 126 II 399 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_627/2019 du 6 octobre 2020 consid. 3.1).

19.         En outre, le Conseil fédéral a fixé des VLInst pour concrétiser le principe de précaution en vertu de l'art. 11 al. 2 LPE (art. 3 al. 6 et art. 4 al. 1, ainsi que l'annexe 1 ch. 64 ORNI). Les VLInst ne sont pas directement liées à des dangers avérés pour la santé, mais ont été fixées en fonction de la faisabilité technique et opérationnelle ainsi que de la viabilité économique afin de minimiser le risque d'effets nocifs, dont certains ne sont que soupçonnés et pas encore prévisibles (ATF 126 II 399 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_627/2019 du 6 octobre 2020 consid. 3.1). Avec les VLInst, le Conseil fédéral a créé une marge de sécurité par rapport aux dangers avérés pour la santé (cf. ATF 128 II 378 consid. 6.2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_627/2019 du 6 octobre 2020 consid. 3.1 ; 1C_576/2016 du 27 octobre 2017 consid. 3.5.1). Dans les LUS, les installations de radiocommunication mobile doivent toujours respecter la VLInst d'une installation donnée (art. 3 al. 3 et al. 6, art. 4 al. 1 et annexe 1 ch. 65 ORNI ; cf. ATF 128 II 378 consid. 6.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_627/2019 du 6 octobre 2020 consid. 3.1).

20.         L'annexe 1 ch. 64 ORNI prévoit que la VLInst à respecter est de 4.0 V/m pour les installations qui émettent exclusivement dans la gamme de fréquence autour de 900 MHz ou dans des gammes de fréquence plus basses (let. a); 6.0 V/m pour les installations qui émettent exclusivement dans la gamme de fréquence autour de 1800 MHz ou dans des gammes de fréquence plus élevées (let. b); et de 5.0 V/m pour toutes les autres installations (let. c).

21.         Ainsi, les VLI et VLInst de l'ORNI sont principalement adaptées à la protection de l'homme (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_579/2017 du 18 juillet 2018 consid. 5.4 ; 1C_254/2017 du 5 janvier 2018 consid. 9.2 ; 1C_450/2010 du 12 avril 2011 consid. 3.2). La doctrine a au surplus relevé que les valeurs limites prévues dans l'ORNI était dix fois plus strictes que celles recommandées par la Commission internationale de protection contre les rayonnements non ionisants (Joel DRITTENBASS, op. cit., p. 138).

22.         Les valeurs limites spécifiées dans l'ORNI pour la protection contre les rayonnements non ionisants sont fondées sur des résultats scientifiquement étayés concernant les risques pour la santé liés aux antennes de radiotéléphonie mobile. Le Conseil fédéral ou son autorité spécialisée, l'OFEV, suit en permanence l'évolution de la science avec un groupe consultatif d'experts (BERENIS) et doit, si nécessaire, adapter les valeurs limites à l'état de la science ou de l'expérience (cf. art. 14 LUS ; arrêts 1C_518/2018 du 14 avril 2020 consid. 5.1.1 ; 1C_348/2017 du 21 février 2018 consid. 4 ; 1C_118/2010 du 20 octobre 2010 consid. 4.2.3). Cela étant, vu la marge de manœuvre dont dispose le Conseil fédéral s'agissant de l'établissement des valeurs limites, seuls de solides éléments démontrant de nouvelles connaissances fondées scientifiquement justifient de les remettre en cause (arrêts 1C_518/2018 précité consid. 5.1.1 ; 1C_323/2017 du 15 janvier 2018 consid. 2.5). À cet égard, le Tribunal fédéral a encore récemment confirmé qu'en l'état des connaissances actuelles, il n'existait pas d'indices en vertu desquels ces valeurs limites devraient être modifiées (arrêts 1C_518/2018 précité consid. 5.1.1 ; 1C_348/2017 du 21 février 2018 consid. 4.3; 1C_323/2017 du 15 janvier 2018 consid. 2.5). La doctrine relève également que si des incertitudes scientifiques existent, le volume des études scientifiques permettant d'apprécier les effets des antennes de téléphonie mobile sur le corps humain a fortement augmenté et leurs conclusions emportent le constat qu'aucun effet du rayonnement de la téléphonie mobile sur la santé n’a pu être prouvé de manière cohérente en dessous des valeurs limites de l'ORNI (Martin RÖÖSLI, Gesundheitsgefährdungsabschätzung: Auswirkungen von nichtionisierender Strahlung auf den Menschen, DEP 2021, p. 117-133, p. 127 ss). Sans indice concret indiquant que ces valeurs limites devraient être modifiées, le Tribunal fédéral a jugé, à diverses reprises, que les valeurs limites fixées dans l'ORNI étaient conformes à la Constitution et à la loi (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_375/2020 du 5 mai 2021 consid. 3.2.5 ; 1C_518/2018 du 14 avril 2020 consid. 5.1.1 ; 1C_348/2017 du 21 février 2018 consid. 4.3 ; 1C_323/ 2017 du 15 janvier 2018 consid. 2.5). Le Tribunal fédéral en a tiré qu'il existe une présomption de respect du principe de prévention si les valeurs limites prévues par l'ORNI sont respectées (arrêt du Tribunal fédéral 1C_518/2018 précité consid. 5.3).

Par ailleurs, la CourEDH a en particulier confirmé, sous l'angle de l'art. 8 CEDH, que tant que la nocivité des antennes pour la population n'était pas prouvée scientifiquement, elle restait dans une large mesure spéculative, de sorte qu'on ne pouvait imposer à la Confédération l'obligation d'adopter des mesures plus amples (ACEDH, Luginbühl c. Suisse du 17 janvier 2006 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_518/2018 précité consid. 5.1.1).

23.         Dans le domaine du rayonnement non ionisant, la limitation dite préventive - qui doit être ordonnée en premier lieu, indépendamment des nuisances existantes - est reprise à l'art. 4 al. 1 ORNI. Cette limitation fait l'objet d'une réglementation détaillée à l'annexe 1 de l'ORNI (par renvoi de l'art. 4 al. 1 ORNI), laquelle fixe notamment, pour les stations émettrices pour téléphonie mobile et raccordements téléphoniques sans fils (ch. 6 annexe 1 ORNI), les VLInst mentionnées plus haut (ch. 64 annexe 1 ORNI).

24.         Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l'étendue de la limitation préventive des émissions selon l'art. 4 al. 1 ORNI est déterminée de manière exhaustive avec l'édiction des VLInst, raison pour laquelle les autorités appliquant la loi ne peuvent pas exiger une limitation supplémentaire dans des cas individuels sur la base de l'art. 12 al. 2 LPE (ATF 133 II 64 consid. 5.2; Arrêts du Tribunal fédéral 1A_251/2002 du 24 octobre 2003, consid. 4 ; 1A.10/2001 du 8 avril 2002, consid. 2.2 ; Joel DRITTENBASS, op. cit., p. 141-142).

25.         Au sens de l'art. 12 al. 2 ORNI, pour vérifier si la VLInst, au sens de l’annexe 1, n’est pas dépassée, l'autorité procède ou fait procéder à des mesures ou à des calculs, ou se base sur des données provenant de tiers. L'OFEV recommande des méthodes de mesure et de calcul appropriées.

26.         Sur cette base, l'OFEV a publié le 23 février 2021 un document intitulé « Explications concernant les antennes adaptatives et leur évaluation selon l’ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant (ORNI) » (ci-après: explications OFEV - https://www.newsd.admin.ch/newsd/ message/attachments/65389.pdf; consulté le 10 novembre 2021). Il y est expressément indiqué que l'ORNI s’applique aussi bien à la technologie de téléphonie mobile de type 2G (GSM), 3G (UMTS), 4G (LTE) ou 5G (New Radio) (Explications OFEV, p. 3).

27.         Aussi en date du 23 février 2021, l'OFEV a publié un complément à la recommandation d'exécution de l'ordonnance sur la protection contre le rayonnement non ionisant concernant les stations de base pour téléphonie mobile et raccordements sans fil (WLL) de l'OFEFP (actuellement : OFEV) de 2002 (ci-après: le complément – https://www.newsd.admin.ch/ newsd/message/attachments/65394.pdf; consulté le 10 novembre 2021).

Avant la publication du complément, des antennes adaptatives avaient été autorisées sur la base du scénario du pire. Le complément définit désormais comment les paramètres techniques des antennes adaptatives doivent être déclarés dans la fiche de données spécifique au site et comment leur contribution à l'intensité du champ électrique de l'installation de téléphonie mobile doit être calculée. Il indique en outre comment les antennes adaptatives doivent être contrôlées dans les systèmes d'assurance de la qualité utilisés par les opérateurs (complément, p. 6).

Il y est aussi précisé que conformément à l’annexe 1 ch. 63 de l’ORNI révisée, le mode d’exploitation déterminant pour les antennes adaptatives correspond également au mode d’exploitation dans lequel un maximum de conversations et de données est transféré, l’émetteur étant au maximum de sa puissance. En raison des propriétés spécifiques des antennes adaptatives, la variabilité des directions d’émission et des diagrammes d’antenne doit également être prise en considération. Concrètement, il faut aussi tenir compte du fait que les antennes adaptatives ne peuvent pas émettre en même temps à la puissance d'émission maximale possible dans toutes les directions, ce qui correspond au scénario du pire. Dans la réalité, la puissance d'émission est répartie pour les signaux qui sont émis dans différentes directions. En outre, conformément à l'annexe 1 ch. 64 ORNI, dans un LUS, la preuve par calcul du respect de la valeur limite de l'installation est fournie comme auparavant au moyen de la fiche complémentaire 4a de la fiche de données spécifique au site (complément, p. 7 ss).

28.         De surcroît, le 24 mai 2022, l'OFEV a publié un rapport fédéral relatif aux mesures d'exposition aux rayonnements non ionisants occasionnés par les antennes 5G (Mesures d'exposition aux rayonnements non ionisants, Rapport annuel 2021, Consortium de projet SwissNIS, https://www.newsd.admin.ch/newsd/message/attachments/71991.pdf ; ci-après : le rapport annuel 2021 sur la 5G). Le rapport annuel 2021 décrit d'une part le concept de base et le mode de collecte des données, et présente d'autre part les premiers résultats des mesures effectuées. Il ressort de ce rapport que les valeurs mesurées sont nettement inférieures aux valeurs limites, déterminantes en ce qui concerne les effets sur la santé (rapport 2021 sur la 5G, p. 58).

29.         Une nouvelle installation de radiocommunications mobiles et son exploitation ne peuvent être approuvées que si, sur la base d'une prévision mathématique, il est assuré que les valeurs limites fixées par l'ORNI peuvent probablement être respectées (art. 4 ss ORNI). La base de ce calcul est la fiche de données spécifique au site que doit remettre le propriétaire de l'installation projetée (art. 11 al. 1 ORNI). Celle-ci doit contenir les données techniques et opérationnelles actuelles et prévues de l'installation, dans la mesure où celles-ci sont déterminantes pour l'émission de rayonnements (art. 11 al. 2 let. a ORNI). Cela inclut notamment la puissance ERP (art. 3 al. 9 ORNI), y compris la direction du faisceau principal des antennes, et si l'antenne fonctionne en mode adaptatif ou non. Les données correspondantes servent de bases pour le permis de construire et sont contraignantes pour l'opérateur ; toute augmentation de l'ERP au-delà de la valeur maximale autorisée et toute direction de transmission au-delà du domaine angulaire autorisé est considérée comme un changement de l'installation, ayant pour conséquence qu'une nouvelle fiche de données spécifique au site doit être présentée (annexe 1 ch. 62 al. 5 let. d et e ORNI ; ATF 128 II 378 [arrêt du Tribunal fédéral 1A.264/2000 du 24 septembre 2002] consid. 8.1, non publié). La fiche de données du site doit également contenir des informations sur le lieu accessible où ce rayonnement est le plus fort, sur les trois LUS où ce rayonnement est le plus fort, et sur tous les LUS où la valeur limite de l’installation au sens de l’annexe 1 est dépassée (art. 11 al. 2 let. c ORNI).

30.         Il est vrai que la prévision calculée qui doit être faite sur la base de ces informations est sujette à certaines incertitudes, car elle prend en compte les principaux facteurs d'influence mais ne tient pas compte de toutes les subtilités de la propagation du rayonnement. Cependant, le Tribunal fédéral a précisé que dans ce calcul, l'incertitude de mesure ne doit être ni ajoutée ni déduite. Seuls les valeurs mesurées doivent être prises en compte (arrêts du Tribunal fédéral 1C_653/2013 du 12 août 2014 consid. 3.4; 1C_132/2007 du 30 janvier 2008 consid. 4.4-4.6 in RDAF 2009 I 536). En effet, c'est pour prendre en compte cette incertitude que des mesures de réception doivent être effectuées après la mise en service de l'installation si, selon la prévision calculée, 80 % de la valeur limite de l'installation est atteinte à un LUS (complément recommandation OFEV, ch. 2.1.8 ; Benjamin WITTWER, Bewilligung von Mobilfunkanlagen, 2e éd., Zurich 2008, p. 61 s. ; arrêt du Tribunal fédéral 1A.148/2002 du 12 août 2003 consid. 4.3.1 s.). Si, sur la base de ces mesures, il s'avère que la VLInst est dépassée lors du fonctionnement, la puissance d'émission maximale admissible doit être redéfinie et le respect des valeurs prescrites doit être démontré par des mesures supplémentaires (cf. arrêt du tribunal fédéral 1C_681/2017 du 1 décembre 2019 consid. 4.5). De surcroît, le risque d'un pronostic erroné est supporté par le maître d'ouvrage dans la mesure où il peut encore être amené à prendre des mesures pour assurer le respect des valeurs limites ultérieurement, c'est-à-dire après la mise en service de l'installation (cf. ATF 130 II 32 consid. 2.4).

31.         De surcroît, il sied d'ajouter qu'au printemps 2005, le Tribunal fédéral avait estimé qu'il fallait mieux contrôler l'exploitation des antennes de téléphonie mobile, afin de garantir en particulier que les puissances émettrices et les directions d'émission autorisées soient respectées. Sur cette base, l'OFEV a mis en place un système d'assurance qualité prévoyant que pour chaque antenne, les valeurs correspondant à la direction et à la puissance émettrice maximale sont enregistrées dans une banque de données et comparées quotidiennement aux valeurs autorisées. Ce système est examiné périodiquement et certifié par un organe indépendant. SWISSCOM a mis en place un tel système de sécurité, dont les nouveaux paramètres relatifs aux antennes adaptatives ont été validé par l'OFCOM en date du 23 juin 2021 (Validierungszertifikat QSS Swisscom, accessible à l'adresse https://www.bafu.admin.ch/bafu/fr/home/themes/electrosmog/info-specialistes/mesures-contre-l-electrosmog/assurance-de-la-qualite-en-ce-qui-concerne-le-respect-des-valeur.html; consulté le 10 novembre 2021).

32.         Le Tribunal fédéral a reconnu le système d'assurance qualité comme un instrument de contrôle performant et n'a pas considéré nécessaire de recourir à un contrôle par des mesures de construction (arrêt du Tribunal fédéral 1C_282/2008 du 7 avril 2009 consid. 3.5).

33.         Les valeurs limites sont fixées par le Conseil fédéral conformément aux critères de l'art. 11 al. 2 LPE que sont l'état de la technique, les conditions d'exploitation ainsi que le caractère économiquement supportable, sans référence directe aux dangers pour la santé prouvés ou supposés, avec toutefois la prise en compte d'une marge de sécurité (arrêt 1A.134/2003 du 5 avril 2004 consid. 3.2, in DEP 2004 p. 228).

34.         Enfin, dans la mesure où la LPE et l'ORNI sont respectés, un projet ne peut être source d'inconvénients graves pour le voisinage au sens de l'art. 14 LCI (ATA/404/2016 du 10 mai 2016 consid. 10 ; ATA/609/2004 du 5 août 2004 consid. 4c).

35.         En l'espèce, d'après la fiche de données spécifique au site du 13 décembre 2021, transmise par B______ dans le cadre de l'instruction de l'autorisation de construire litigieuse, la VLInst à respecter est celle prévue à l'art. 3 al. 3 let. c ORNI, soit 5.0 V/m, ce que ne conteste au demeurant pas la recourante. S'agissant du rayonnement dans les LUS les plus chargés, soit les LUS nos 2 et 3, toutes les mesures présentent une intensité de champ électrique inférieure à la VLInst fixée à 5.0 V/m. Ces mesures ont été vérifiée par le SABRA, autorité spécialisée compétente, sans que celle-ci n'ait mis en doute leur véracité. En l'absence d'éléments indiquant le contraire, il n'y a également pas lieu pour le tribunal de céans de les remettre en cause.

Globalement, la procédure suivie par le département n'est pas critiquable. Le permis de construire garantit le respect des valeurs limites pertinentes, par le biais des conditions associées comprises dans le préavis du SABRA, notamment une mesure de contrôle aux LUS nos 2 et 3 et une intégration de cette installation dans son système d'assurance qualité (système AQ). C'est précisément le mécanisme de contrôle rétrospectif qui garantit que les calculs effectués à l'avance pourront être corrigés rétrospectivement si nécessaire, au cas où la réalité ultérieure ne correspondrait pas aux hypothèses prévues. Il sied à cet égard de préciser que la jurisprudence du Tribunal fédéral est claire : la limitation préventive des émissions prévues par l'ORNI est déterminée de manière exhaustive avec l'édiction des VLInst, sans que le département ne puisse exiger une limitation supplémentaire dans un cas individuel.

Ainsi, en octroyant l'autorisation de construire sur la base de la prévision que l'installation respecterait les VLInst, moyennant les réserves émises dans le préavis du SABRA, la décision du département est conforme au droit fédéral.

Par ailleurs, concernant les inquiétudes de la recourante au sujet des effets des antennes 5G sur le corps humain, celle-ci entend en substance démontrer que les ondes électromagnétiques induites par les antennes téléphoniques litigieuses présentent un risque pour la santé. Or, il est constant que le corps humain est sensible aux champs électromagnétiques, la question étant de savoir quelle intensité d'exposition peut être jugée acceptable. Par conséquent, les généralités sur les effets des champs électromagnétiques induits par les antennes de téléphonie mobile – aussi pertinentes soient-elles – n'apportent rien au débat sur la valeur probante – même relative – des nombreuses études scientifiques menées jusqu'ici et ne délégitime pas les valeurs limites fixées par l'ordonnance, ce d'autant plus que les valeurs mesurées sont inférieures aux valeurs limites, déterminantes en ce qui concerne les effets sur la santé.

Partant, dès lors les VLInst sont respectées dans la présente espèce, il convient d'admettre que le principe de précaution n'a pas été violé. Il en va de même de l'art. 14 LCI.

Les griefs sont rejetés.

36.         Enfin, la recourante fait valoir que le projet ne serait pas imposé par sa destination en zone agricole.

37.         L'autorisation de construire est délivrée si la construction ou l'installation est conforme à l'affectation de la zone (art. 22 al. 2 let. a LAT) et si le terrain est équipé (art. 22 al. 2 let. b LAT). Le droit fédéral et le droit cantonal peuvent poser d'autres conditions (art. 22 al. 3 LAT).

38.         Les zones agricoles servent à garantir la base d'approvisionnement du pays à long terme, à sauvegarder le paysage et les espaces de délassement et à assurer l'équilibre écologique ; elles doivent être maintenues autant que possible libres de toute construction en raison des différentes fonctions de la zone agricole ; elles comprennent, d'une part, les terrains qui se prêtent à l'exploitation agricole ou à l'horticulture productrice et sont nécessaires à l'accomplissement des différentes tâches dévolues à l'agriculture et, d'autre part, les terrains qui, dans l'intérêt général, doivent être exploités par l'agriculture (cf. art. 16 al. 1 LAT).

39.         À teneur de l'art. 16a al. 1 LAT, sont conformes à l'affectation de la zone agricole les constructions ou installations qui sont nécessaires à l'exploitation agricole ou à l'horticulture productrice ; seules les constructions dont la destination correspond à la vocation agricole du sol peuvent y être autorisées, le sol devant être le facteur de production primaire et indispensable (ATF 133 II 370 consid. 4.2 ; 129 II 413 consid. 3.1 ; 125 II 278 consid. 3a et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_314/2009 du 12 juillet 2010 consid. 5.1 ; 1C_72/2009 du 15 décembre 2009 consid. 2.1). L'art. 34 al. 1 OAT reprend cette définition en précisant que sont conformes à l’affectation de la zone agricole les constructions et installations qui servent à l’exploitation tributaire du sol ou au développement interne.

40.         À Genève, ne sont autorisées en zone agricole que les constructions et installations qui sont destinées durablement à l'activité agricole ou horticole et aux personnes l’exerçant à titre principal (art. 20 al. 1 let. a LaLAT) et qui respectent la nature et le paysage (art. 20 al. 1 let. b LaLAT) ainsi que les conditions fixées par les art. 34 ss OAT (art. 20 al. 1 let. c LaLAT).

41.         En vertu de l'art. 24 LAT, une autorisation dérogatoire peut être délivrée pour de nouvelles constructions ou installations hors de la zone à bâtir lorsque l'implantation de ces constructions ou installations est imposée par leur destination (let. a) et qu'aucun intérêt prépondérant ne s'y oppose (let. b).

Ces deux conditions sont cumulatives (ATF 124 II 252 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_618/2014 du 29 juillet 2015 consid. 4.3) et doivent être examinées séparément (ATF 138 II 570 consid. 4).

42.         Selon l’art. 27 LaLAT, qui correspond à l'art. 24 LAT (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1A.196/2006 du 12 mars 2007 consid. 5.3 ; 1A.69/2004 du 11 août 2004 consid. 2.1), hors des zones à bâtir, en dérogation à l’art. 20 LaLAT, une autorisation ne peut être délivrée pour une nouvelle construction ou installation ou pour tout changement d’affectation que si l’emplacement de la construction prévue est imposé par sa destination (let. a) et si elle ne lèse aucun intérêt prépondérant, notamment du point de vue de la protection de la nature et des sites et du maintien de la surface agricole utile pour l’entreprise agricole (let. b).

43.         De façon générale, l'implantation d'une construction est imposée par sa destination lorsqu'un emplacement hors de la zone à bâtir est dicté par des motifs techniques, des impératifs liés à l'exploitation d'une entreprise, la nature du sol ou lorsque l'ouvrage est exclu de la zone à bâtir pour des motifs particuliers. Il suffit que l'emplacement soit relativement imposé par la destination : il n'est pas nécessaire qu'aucun autre emplacement n'entre en considération ; il doit toutefois exister des motifs particulièrement importants et objectifs qui laissent apparaître l'emplacement prévu comme plus avantageux que d'autres endroits situés à l'intérieur de la zone à bâtir (ATF 136 II 214 consid. 2.1 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_877/2013 du 31 juillet 2014 consid. 3.1.1). L'examen du lieu de situation imposé par la destination apparaît incomplet lorsqu'aucune solution alternative ni aucun emplacement alternatif n'ont été débattus (ATF 136 II 214 consid. 2.2 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_877/2013 du 31 juillet 2014 consid. 3.1.1). L'application du critère de l'art. 24 let. a LAT doit être stricte, dès lors qu'il contribue à l'objectif de séparation du bâti et du non-bâti (ATF 124 II 252 consid. 4a ; 117 Ib 270 consid. 4a, 379 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_877/2013 du 31 juillet 2014 consid. 3.1.1). Seuls des critères objectifs sont déterminants, à l'exclusion des préférences dictées par des raisons de commodité ou d'agrément (ATF 129 II 63 consid. 3.1 ; 124 II 252 consid. 4a ; 123 II 499 consid. 3b/cc et la jurisprudence citée ; arrêt du Tribunal fédéral 1A.98/2005 du 19 février 2007 consid 3.1).

44.         Dans la mesure où la Confédération oblige les concessionnaires à assurer un service de téléphonie publique pour l’ensemble de la population et dans tout le pays (cf. art. 92 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101 ; art. 14 al. 1 et 16 al. 1 let. a de la loi sur les télécommunications du 30 avril 1997 - LTC - RS 784.10), la couverture nécessaire à la téléphonie mobile vise tout le territoire suisse, qu’il soit bâti ou non (ATF 138 II 570 consid. 4.2). Dès lors, pour déterminer le lieu d'implantation d'une antenne de téléphonie mobile destinée à couvrir la zone agricole, il est déterminant que cet emplacement ait une relation fonctionnelle étroite avec la zone de couverture considérée (ATF 138 II 570 consid. 4.2 ; 138 II 173 consid. 5.3).

45.         La pesée des intérêts exigée par l'art. 24 let. b LAT comprend en outre, selon l'art. 3 OAT, la détermination de tous les intérêts, publics et privés, touchés par le projet (art. 3 al. 1 let. a OAT). Il s'agit évidemment d'abord des intérêts poursuivis par la LAT elle-même (notamment la préservation des terres cultivables, l'intégration des constructions dans le paysage, la protection des rives, sites naturels et forêts - art. 3 al. 2 LAT -, la protection des lieux d'habitation - art. 3 al. 3 let. b LAT), mais aussi des autres intérêts protégés dans les lois spéciales (LPE, LPN, LFo, OPB, OPAir) ; les intérêts privés sont également pris en compte (ATF 134 II 97 consid. 3.1 ; 129 II 63 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_877/2013 du 31 juillet 2014 consid. 3.2.1). L'autorité doit ensuite apprécier ces intérêts notamment en fonction du développement spatial souhaité et des implications qui en résultent (art. 3 al. 1 let. b OAT). La pesée des intérêts proprement dite tient compte, dans la mesure du possible, de l'ensemble des intérêts en présence et doit être motivée (art. 3 al. 1 let. c et al. 2 OAT ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_877/2013 du 31 juillet 2014 consid. 3.2.1).

46.         Le Tribunal fédéral s'est déjà prononcé sur l'application de l'art. 24 LAT aux projets de nouvelles installations de téléphonie mobile en zone agricole.

Il a jugé, ici aussi, que l'exigence de l'implantation imposée par la destination (« Standortgebundenheit ») n'est pas absolue, mais relative. Il n'est pas nécessaire qu'aucun autre emplacement ne puisse entrer en considération, mais il doit cependant exister des raisons objectives importantes qui font apparaître l'emplacement retenu comme beaucoup plus favorable que d'autres emplacements situés dans la zone à bâtir. En principe, l'implantation imposée par sa destination est admise lorsque, pour des motifs radiotechniques, l'opérateur ne peut pas supprimer de manière suffisante un déficit de couverture ou de capacité du réseau en retenant un ou plusieurs emplacements à l'intérieur de la zone à bâtir, ou encore lorsque la réalisation de l'installation dans la zone à bâtir serait de nature à provoquer des perturbations ou des interférences sur le réseau. L'opérateur ne peut pas invoquer, pour le choix d'un emplacement en zone agricole, des avantages économiques (le prix du terrain moins élevé) ou la plus grande facilité à trouver des propriétaires fonciers (ou des voisins) prêts à accepter une telle installation. Si l'emplacement hors de la zone à bâtir est préférable en termes de couverture, encore faut-il que cet avantage soit important. Par ailleurs, si aucun terrain en zone à bâtir n'est disponible, il faut que les lacunes en matière de couverture ou de capacité ne puissent pas être comblées en utilisant un emplacement, en zone agricole ou dans une autre zone non constructible, où un autre opérateur a déjà installé des équipements de téléphonie mobile. Cet élément doit en effet être pris en considération dans le cadre de la pesée des intérêts selon l'art. 24 let. b LAT, en vue de déterminer le meilleur lieu de situation pour une installation dont l'implantation hors de la zone à bâtir est imposée par sa destination (cf. not. ATF 133 II 409 consid. 4.2 ; 133 II 321 consid. 4.3.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 1A.98/2005 du 19 février 2007 consid. 3.1 ; 1A.294/2004 du 10 mars 2006 consid. 2 ; 1A.186/2002 du 23 mai 2003, publié in ZBl 105/2004 p. 103, consid. 3 ; cf. aussi, s'agissant de la nécessité d'analyser les alternatives possibles qu’offrent l’utilisation des antennes existantes, ATF 138 II 570 consid. 4.3; arrêt du Tribunal fédéral 1C_228/2007 du 28 novembre 2008 ; Jean-Baptiste ZUFFEREY/Chantal PANTILLON, "La jurisprudence récente en droit public", in Journée suisse du droit de la construction, 2011, ch. 49, p. 273).

47.         L'évaluation des besoins est une question délicate. L'élément décisif pour l'octroi d'une dérogation selon l'art. 24 LAT est l'absence d'un emplacement adéquat dans la zone à bâtir, où une installation ayant la même fonction pourrait être implantée. Le fait que l'emplacement choisi soit voisin de plusieurs zones à bâtir ne justifie pas que l'on soumette l'octroi d'une dérogation selon l'art. 24 LAT à des conditions moins restrictives ; au contraire, c'est un indice qu'il peut exister un emplacement équivalent, du point de vue des besoins radiotechniques de l'opérateur, à proximité, mais à l'intérieur des zones constructibles (arrêt du Tribunal fédéral 1A.98/2005 du 19 février 2007 consid 3.3).

48.         Dans certaines circonstances particulières, un emplacement hors de la zone à bâtir peut au demeurant se révéler plus avantageux qu'en zone à bâtir en raison de tous les intérêts en présence et il peut exceptionnellement apparaître comme imposé par sa destination au sens de l'art. 24 let. a LAT en dehors des cas mentionnés précédemment. À la différence d'autres constructions et installations (comme les routes, les parkings, les décharges, les gravières, les installations sportives, etc.), les antennes de téléphonie mobile peuvent trouver place en dehors de la zone à bâtir sans pour cela nécessairement occuper de nouveaux terrains jusqu'alors non construits. C'est le cas lorsqu'elles sont réalisées sur des constructions et installations existantes. Cet élément est à prendre en compte dans la pesée des intérêts nécessaire lors de l'évaluation des emplacements, en zone à bâtir comme hors zone. Cependant, si l’installation prévue est destinée à occuper une partie non négligeable d’une zone non constructible, on ne peut pas admettre que l’implantation dans cette zone est imposée par la destination au simple motif que l’emplacement en question a déjà fait l’objet de constructions ; il s’agit au contraire d’examiner si une telle localisation est clairement plus appropriée que de possibles implantations dans les zones à bâtir (ATF 133 II 409 consid. 4.2 ;133 II 321 consid. 4.3.3 ; arrêts 1C_405/2011 du 24 avril 2012 ; 1C_478/2008 du 28 août 2008 ; Jean-Baptiste ZUFFEREY/Chantal PANTILLON, op. cit., ch. 50 p. 273 ; ATA/160/2014 du 18 mars 2014 consid. 7d).

49.         Ainsi, il est possible d'implanter des antennes non seulement lorsqu'elles sont inévitables pour assurer une couverture adéquate de la téléphonie mobile, mais aussi lorsque, suite à une pondération des intérêts par rapport à des emplacements en zone, elles paraissent plus propices et seront réalisées sur des constructions et installations existantes. Néanmoins, les exigences techniques de la téléphonie admettent que ces antennes soient imposées par leur destination uniquement aux conditions strictes suivantes :

Par principe, il faudra que l'installation de téléphonie mobile hors zone ne génère pas une désaffectation importante du terrain inconstructible, ni ne soit gênante dans son apparence. La pondération des intérêts ne pourra dès lors aboutir à une telle appréciation positive que dans les localités qui abritent déjà des constructions et installations, conformes ou non à la zone. On peut penser aux pylônes des lignes à haute tension, aux candélabres pour l'éclairage, à d'autres infrastructures de même type ainsi qu'aux bâtiments et installations agricoles. Dans cette perspective, des routes, des chemins ou des places de parc n'entrent pas en ligne de compte, au même titre que des terrains non construits. Et même lorsqu'un endroit déjà construit se révèle clairement préférable à un emplacement en zone à bâtir, l'antenne projetée n'obtiendra une dérogation qu'à la condition supplémentaire, prévue par art. 24 let. b LAT, qu'aucun intérêt prépondérant contraire ne s'y oppose (ATF 133 II 321 consid. 4.3.3).

50.         Chaque fois que l’autorité administrative suit les préavis des instances consultatives, l’autorité de recours observe une certaine retenue, fonction de son aptitude à trancher le litige (ATA/24/2014 du 14 janvier 2014; ATA/126/2013 du 26 février 2013 et les références citées ; ATA/726/2012 du 30 octobre 2012 ; ATA/549/2011 du 30 août 2011 ; ATA/330/2009 du 30 juin 2009 ; ATA/129/2003 du 11 mars 2003). Elle se limite à examiner si le département ne s’écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (cf. ATA/24/2014 du 14 janvier 2014 ; ATA/126/2013 du 26 février 2013 ; ATA/549/2011 du 30 août 2011 ; ATA/330/2009 du 30 juin 2009).

51.         En l'espèce, il n'est pas contesté que, prévu en zone agricole, le projet querellé n’est pas conforme à l’affectation de cette zone (art. 20 al 1 LaLAT). Pour être autorisé, il doit par conséquent remplir les conditions imposées par les art. 24 LAT et 27 LaLAT.

L'emplacement projeté de l’installation de téléphonie mobile litigieuse vise à améliorer la couverture du réseau de B______, déficient dans la zone, ce qui, en soi, n'est pas contesté. Celle-ci est donc bien destinée à pallier une lacune de couverture et de capacité, soit un besoin technique.

En outre, il ressort des explications fournies par B______, des plans produits et du rapport justificatif que cette dernière a établi en avril 2020 à l'appui de sa demande d’autorisation de construire, notamment son annexe 2 (« Couverture actuelle B______ » et « Couverture projetée avec le nouveau site B______ »), que l'installation litigieuse vise avant tout et essentiellement à couvrir un périmètre affecté à la zone agricole. Il est ainsi manifeste que l'emplacement choisi pour la réalisation du projet litigieux présente une relation fonctionnelle étroite avec la zone de couverture considérée.

Pour le surplus, du moment que l'installation en cause vise à desservir la zone agricole, il n'est pas nécessaire de démontrer que l'emplacement qui a été choisi est nettement plus favorable qu'un autre emplacement situé en zone à bâtir, de sorte que le département n'avait pas à se pencher de manière plus approfondie sur cette question. En effet, la présente problématique doit être distinguée des affaires ayant donné lieu aux arrêts cités plus haut (not. ATF 133 II 409 consid. 4.2 et ATF 133 II 321 consid. 4.3.3). La jurisprudence en question traitait d'antennes de téléphonie mobile sises hors de la zone à bâtir, mais destinées à couvrir la zone à bâtir. Il ressort en effet des principes fondamentaux d'aménagement du territoire que les infrastructures desservant le milieu bâti - auxquelles appartiennent les antennes de téléphonie mobile - doivent en principe être réalisées dans la zone à bâtir qu'elles desservent. Comme le Tribunal fédéral l'a déjà observé, le régime dérogatoire prévu par la jurisprudence doit se comprendre dans ce contexte-là. En revanche, lorsque les installations en cause ont pour but de desservir la zone agricole, la situation doit être envisagée différemment.

Dans ces circonstances, il apparaît que l'implantation de l'installation litigieuse est ici imposée par sa destination au sens de l'art. 24 let. a LAT.

52.         Cela étant, il convient d'examiner encore si aucun intérêt prépondérant ne s'oppose à une telle installation (art. 24 let. b LAT).

Il appert que le projet litigieux ne génère pas une désaffectation importante du terrain inconstructible. À l'instar de l'autorité intimée, on peut effectivement admettre qu'il n’entraînera pas, voire seulement un empiètement minime sur la surface agricole, notamment parce que la superficie, d'un peu moins de 30 m2, utilisée pour le mât appelé à supporter les antennes et l'équipement technique lui étant joint est très modeste (cf. plans « vue » et « vue en plan » versés au dossier de l'autorité, visés ne varietur le 27 avril 2022). Il ressort également de ces plans que le projet se situe à l'applique du bâtiment agricole existant et vise à regrouper les antennes de téléphonie des trois opérateurs, ce qui tend à minimiser l'impact sur le paysage en concentrant cette nouvelle installation autour d'une construction existante. En effet, dans son préavis du 29 mai 2020, le SPI, soit l'instance spécialisée, s'est prononcé favorablement à l'octroi d'une dérogation au sens de l'art. 27 LALAT relevant que la pratique actuelle tendait à concentrer les installations sur de grands mâts au lieu de plus petites installations plus nombreuses, sans qu'il ne soit pour l'heure démontré que l'une ou l'autre de ces variantes entraine un impact sur le paysage plus acceptable que l'autre, ce d'autant plus que l'implantation de ce genre d'installations génère un impact négatif sur le contexte environnant, quelle que soit leur situation.

Enfin, comme déjà développé plus haut, il sera rappelé que s'agissant des craintes de la recourante quant aux éventuels effets nocifs liés au développement de la 5G, les récentes études de la Confédération à ce sujet ont démontré que le respect des valeurs limites fixées dans l'ORNI permettait d'assurer la sécurité de la population et partant également de la faune.

Il résulte ainsi de ce qui précède que c'est à juste titre que l'autorité intimée a délivré l'autorisation de construire litigieuse sur la base des art. 24 LAT et 27 LaLAT, en suivant les préavis favorables des instances compétentes.

53.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 900.- couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

54.         Vu l'issue du litige, une indemnité de procédure de CHF 1'500.-, à la charge de la recourante, sera allouée à B______ (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 24 mai 2022 par la commune de A______ contre la décision du département du territoire du 27 avril 2022 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 900.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             condamne la recourante à verser à B______ Sàrl une indemnité de procédure de CHF 1'500.- ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Sophie CORNIOLEY BERGER, présidente, Patrick BLASER et Isabelle KOECHLIN-NIKLAUS, juges assesseurs.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’à l’office fédéral de l’environnement.

Genève, le

 

La greffière