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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3631/2022

ATA/918/2023 du 29.08.2023 ( FPUBL ) , ADMIS

Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;FONCTIONNAIRE;REFUS DE STATUER
Normes : LHES-SO-GE.25.al1.letd; RIPers-HES-SO-GE.34.al2; RIPers-HES-SO-GE.25.al1; RIPers-HES-SO-GE.41.al1; RIPers-HES-SO-GE.45; RIPers-HES-SO-GE.46; RIPers-HES-SO-GE.48; RIPers-HES-SO-GE.125; RIPers-HES-SO-GE.165; LPA.46
Résumé : Admission d’un recours pour déni de justice. La décision de « retour à l’état initial » d’un chargé d’enseignement à qui a été confié une activité de responsable HES d’un département, constitue une décision pour laquelle le règlement prévoit la voie de la réclamation, même en l’absence de désignation de la qualité de décision et sans indication des voies et délais de recours. C’est à tort que l’autorité intimée n’a pas donné suite à la réclamation adressée par le recourant à l’encontre de la décision de non-renouvellement.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3631/2022-FPUBL ATA/918/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 août 2023

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Christian BRUCHEZ, avocat

contre

HAUTE ÉCOLE SPECIALISÉE DE SUISSE OCCIDENTALE - GENÈVE (HES‑SO Genève) intimée

 



EN FAIT

A. a. A______, né en 1969, est chanteur ______. Il a été engagé par le conservatoire de musique de B______ en qualité de professeur de chant à temps partiel dès 2005.

b. Le 1er septembre 2009, suite au transfert du conservatoire de musique de B______ à la Haute école de musique - conservatoire de musique de Genève (ci‑après : HEM), il a été engagé en qualité de chargé de cours Haute école spécialisée (ci-après : HES) de l’unité décentralisée de B______, à un taux d’activité de 65 %.

c. Le 1er septembre 2011, il s’est vu confier, en sus de sa fonction de chargé de cours HES, le mandat de responsable du département vocal nouvellement créé jusqu’au 31 août 2015.

Depuis le 1er septembre 2011, son taux d’activité de chargé de cours était fixé à 80 %, soit 1’440 heures par année académique et son salaire fixé en classe 23, annuité 14.

d. Le 1er février 2012, A______ a été nommé fonctionnaire.

e. Dès le 1er avril 2014, la HES de Suisse occidentale - Genève (ci-après : HES-SO Genève), à laquelle était rattachée la HEM, est devenue une institution autonome de droit public, et le nouvel employeur de A______.

f. Dès le 1er septembre 2017, la fonction de A______ a été transférée dans celle de maître d’enseignement, responsable HES, conformément à la nouvelle typologie applicable en vertu du règlement interne sur le personnel de la HES-SO Genève du 6 février 2017 (ci-après : RIPers). L’engagement à durée indéterminée était prévu du 1er septembre 2017 au 31 août 2021, renouvelable à son échéance. La durée était liée au mandat de responsable du département vocal.

Son traitement était alors situé en classe 23, annuité 17 et le complément salarial lié à sa fonction de responsable HES était de 6% de la classe 27, annuité 22.

g. Le 26 janvier 2021, la HES-SO Genève a nommé A______ à la fonction de maître d’enseignement HES à un taux de 100% du 1er septembre 2021 au 31 août 2025.

Le directeur général de la HES-SO Genève indiquait que le renouvellement du mandat de responsable HES ferait l’objet d’une consultation et d’une décision ultérieure, conformément à la directive sur la désignation, le renouvellement et le retour à la fonction initiale pour les responsables HES (ci-après : la directive).

h. Un entretien d’évaluation et de développement du personnel (ci-après : EEDP), portant exclusivement sur la fonction de responsable du département vocal de la HEM, a eu lieu le 25 août 2021, lors duquel plusieurs problèmes ont été identifiés par la direction dans la gestion du mandat. L’EEDP s’appuyait sur la consultation du corps enseignant du département ainsi que sur celle du personnel administratif impliqué dans la gestion de celui-ci.

En était notamment ressorti que l’action managériale de A______ était entachée pour certains de ses collègues de plusieurs dysfonctionnements : la dynamique du département serait trop peu participative et empreinte de favoritisme (allocation des étudiants dans les classes et/ou dans certains projets). Cette perception devait être corrigée sans délai.

Les différents éléments évoqués incitaient la direction à proposer au directeur général un renouvellement de mandat de responsable du département pour la seule année 2021-2022, assortie de la fixation d’objectifs dont l’atteinte ferait l’objet d’un nouvel EEDP à la fin de l’année. Un accompagnement par un coach désigné par la direction était proposé.

i. Le 30 août 2021, le directeur général de la HES-SO Genève a renouvelé le mandat de responsable HES du département vocal de A______ du 1er septembre 2021 au 31 août 2022.

j. Le 18 septembre 2021, A______ a déposé des observations suite à l’EEDP. Il contestait une partie des problèmes évoqués par la direction mais accueillait favorablement la proposition d’un coaching personnalisé. Il était conscient de « la nécessité des changements à apporter dans la dynamique managériale au sein du département vocal ». Des actions concrètes seraient proposées à la direction de l’école et il avait également pris note de la nécessité de faire remonter immédiatement auprès de la direction tous les cas problématiques nécessitant un arbitrage.

k. Une coach a été mandatée le 26 novembre 2021 pour accompagner A______.

l. Le 22 février 2022, C______, directrice de la HEM, a informé A______ du déroulement de la procédure de renouvellement de la fonction de responsable HES qui serait conduite entre la mi-mars et la mi-avril 2022 : une consultation auprès du personnel d’enseignement et de recherche (ci-après : PER) serait menée à cet effet et une décision prise par la direction générale à son issue.

m. Le 12 avril 2022, le directeur de la HES-SO Genève, faisant suite à un entretien du 1er avril ayant eu lieu avec C______et D______, directrice des ressources humaines à la HES-SO Genève, lors duquel les résultats de la consultation avaient été discutés, a informé A______ que son mandat de responsable HES ne serait pas renouvelé au 1er septembre 2022.

Le courrier détaillait les raisons pour lesquelles ce non-renouvellement avait été décidé, soit la consultation du PER de 2021 qui avait fait apparaître des lacunes significatives en termes de compétences managériales, malgré un coaching financé par l’institution en 2017. La consultation du PER de 2022 avait donné lieu à des commentaires positifs de certains collègues qui lui reconnaissaient de grandes compétences pédagogiques et artistiques. Toutefois, une majorité des témoignages faisait état d’un comportement ressenti comme arbitraire. Le manque de disponibilité et de présence avait été relevé par plusieurs collègues. Plusieurs étudiants et anciens étudiants s’étaient manifestés spontanément pour faire part de leur expérience négative. Les principaux biais étaient le favoritisme à l'égard des étudiants de sa classe dans les projets du département, une attitude manquant de bienveillance ainsi qu’une implication insuffisante au sein du département, en dehors des étudiants et projets propres.

B. a. Le 24 mai 2022, par son conseil, A______ a sollicité la transmission de l’ensemble des documents liés à la procédure de consultation 2022 ainsi qu’un délai pour s’exprimer au sujet de la décision de non-renouvellement.

b. Le 16 juin 2022, le directeur de la HES-SO Genève a informé A______ ne pas pouvoir entrer en matière sur sa réclamation. Le courrier du 12 avril 2022 ne constituant pas une décision, le mandat de responsable HES ayant naturellement pris fin à son échéance. A______ avait déjà été invité à s’exprimer sur le résultat de la consultation menée lors de l’entretien du 1er avril 2022 et cela même en l’absence de décision.

c. Le 17 août 2022, A______ a fait valoir un droit au renouvellement. Le courrier du 12 avril 2002 le lui refusant constituait donc une décision et il devait avoir accès aux pièces du dossier.

d. Le 4 octobre 2022, la HES-SO Genève a maintenu sa position.

e. Parallèlement, le 7 juillet 2022, une sanction disciplinaire a été prononcée à l’égard de A______ pour non-respect de l’obligation d’annonce d’une activité accessoire, s’agissant de son activité au Conservatoire régional de E______. La sanction consistait en la réduction du traitement à compter du 1er août 2022, celui‑ci passant de l’annuité 21 à l’annuité 0 de la classe 23.

Un recours a été déposé par A______ contre cette sanction le 9 septembre 2022 auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci‑après : la chambre administrative).

C. a. Le 2 novembre 2022, A______ a déposé un recours en déni de justice auprès de la chambre administrative contre le refus de statuer par voie de décision du directeur général de la HES-SO Genève, concluant à ce qu’il soit constaté un déni de justice, ordonné à l’autorité intimée d’entrer en matière et de traiter la réclamation à l’encontre de la décision de refus de renouvellement de la fonction de responsable HES et ordonné à l’autorité intimée de lui octroyer l’accès au dossier relatif à la décision de refus de renouvellement, notamment aux pièces en lien avec la consultation menée par la directrice au début de l’année 2022.

Le principe était le renouvellement du contrat à son échéance. Le non renouvellement constituait une exception soumis à une condition précise, à savoir le constat d’insuffisances dans l’exercice de la fonction de responsable HES, constat qui devait être établi dans le cadre d’une procédure de consultation devant conduire à une synthèse écrite et à un entretien d’évaluation.

Le refus de renouveler constituait également une sanction déguisée.

Le refus d’entrer en matière sur la réclamation formée était constitutif d’un déni de justice.

b. Le 7 décembre 2022, l’autorité intimée a conclu à l’irrecevabilité du recours en l’absence d’un acte attaquable, et subsidiairement à son rejet.

Le RIPers et la directive spécifique applicable prévoyait que si le retour à la fonction initiale était possible, il ne s’agissait pas d’un non-renouvellement de l’engagement mais d’un retour à la fonction initiale. En outre, il n’existait pas de droit au renouvellement d’un contrat de durée déterminée.

Le recourant n’avait pas droit à un acte attaquable dans ces circonstances.

c. Le 24 janvier 2023, le recourant a répliqué, contestant la position de l’autorité intimée.

d. L’autorité intimée ayant renoncé à déposer des observations dans le délai fixé, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées le 19 décembre 2022.

EN DROIT

1.             Le recours a été interjeté devant la juridiction compétente (art. 165 al. 1 et al. 4 RIPers ; art. 132 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).

2.             Le recourant se plaint d’un déni de justice.

2.1 Lorsqu'une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision (art. 4 al. 4 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.2 Une autorité qui n'applique pas ou applique d'une façon incorrecte une règle de procédure, de sorte qu'elle ferme l'accès à la justice à la particulière ou au particulier qui, normalement, y aurait droit, commet un déni de justice formel. Il en va de même pour l'autorité qui refuse expressément de statuer, alors qu'elle en a l'obligation. Un tel déni constitue une violation de l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst - RS 101 ; ATF 135 I 6 consid. 2.1 ; 134 I 6 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_59/2013 du 4 juillet 2014 consid. 2.1).

2.3 Une partie peut recourir en tout temps pour déni de justice ou retard non justifié si l’autorité concernée ne donne pas suite rapidement à la mise en demeure prévue à l’art. 4 al. 4 LPA (art. 62 al. 6 LPA). Toutefois, lorsque l’autorité compétente refuse expressément de rendre une décision, les règles de la bonne foi (art. 5 al. 3 Cst.) imposent que le recours soit interjeté dans le délai légal, sous réserve éventuelle d’une fausse indication quant audit délai (ATA/939/2021 du 14 septembre 2021 consid. 3a ; ATA/1722/2019 du 26 novembre 2019 consid. 2b et les références citées).

2.4 Pour pouvoir se plaindre de l’inaction de l’autorité, encore faut-il que l’administré ait effectué toutes les démarches adéquates en vue de l’obtention de la décision qu’il sollicite (ATA/699/2021 du 2 juillet 2021 consid. 9b ; ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 2d). Les conclusions en déni de justice sont irrecevables lorsque le recourant n’a pas procédé à la mise en demeure prévue à l’art. 4 al. 4 LPA (ATA/63/2023 du 24 janvier 2023 consid. 3b et la référence citée).

2.5 En cas de recours contre la seule absence de décision, les conclusions ne peuvent tendre qu’à contraindre l’autorité à statuer (ATA/621/2023 du 13 juin 2023 consid. 3.4 ; ATA/939/2021 précité consid. 3c). En effet, conformément à l’art. 69 al. 4 LPA, si la juridiction administrative admet le recours pour déni de justice ou retard injustifié, elle renvoie l’affaire à l’autorité inférieure en lui donnant des instructions impératives (ATA/373/2020 du 16 avril 2020 consid. 6a).

La reconnaissance d’un refus de statuer ne peut être admise que si l’autorité mise en demeure avait le devoir de rendre une décision ou, vu sous un autre angle, si le recourant avait un droit à en obtenir une de sa part (ATF 135 II 60 consid. 3.1.2 ; ATA/621/2023 précité consid. 3.4 ; ATA/939/2021 précité consid. 3d).

3.             3.1 Au sens de l’art. 4 al. 1 LPA sont considérées comme des décisions les mesures individuelles et concrètes prises par l’autorité dans les cas d’espèce fondées sur le droit public fédéral, cantonal ou communal et ayant pour objet de créer, de modifier ou d’annuler des droits ou des obligations (let. a), de constater l’existence, l’inexistence ou l’étendue de droits, d’obligations ou de faits (let. b), de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations (let. c).

3.2 Pour qu’un acte administratif puisse être qualifié de décision, il doit revêtir un caractère obligatoire pour les administrés en créant ou constatant un rapport juridique concret de manière contraignante. Ce n’est pas la forme de l’acte qui est déterminante, mais son contenu et ses effets (ATA/327/2023 du 28 mars 2023 consid. 2.1 et les arrêts cités).

3.3 En droit genevois, la notion de décision est calquée sur le droit fédéral (art. 5 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 - PA - RS 172.021), ce qui est également valable pour les cas limites, ou plus exactement pour les actes dont l’adoption n’ouvre pas de voie de recours. Ainsi, de manière générale, les communications, opinions, recommandations et renseignements ne déploient aucun effet juridique et ne sont pas assimilables à des décisions, de même que les avertissements ou certaines mises en demeure (arrêts du Tribunal fédéral 1C_150/2020 du 24 septembre 2020 consid. 5.2 et l’arrêt cité ; 1C_593/2016 du 11 septembre 2017 consid. 2.2 ; ATA/743/2021 du 13 juillet 2021 consid. b ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, p. 279 ss n. 783 ss ; Ulrich HÄFELIN/Georg MÜLLER/Felix UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 8e éd., 2020, p. 199 n. 874 ss ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3e éd., 2011, p. 179 ss n. 2.1.2.1 ss et 245 n. 2.2.3.3). Ces dernières peuvent constituer des cas limites et revêtir la qualité de décisions susceptibles de recours, lorsqu’elles apparaissent comme des sanctions conditionnant ultérieurement l’adoption d’une mesure plus restrictive à l’égard du destinataire. Lorsque la mise en demeure ou l’avertissement ne possèdent pas un tel caractère, ils ne sont pas sujets à recours (ATA/505/2021 du 11 mai 2021 consid. 4a ; ATA/1308/2018 du 5 décembre 2018 consid. 8c et les arrêts cités ; Alfred KÖLZ/Isabelle HÄNER/Martin BERTSCHI, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 3e éd., 2013, p. 309 s. ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, op. cit., p. 180 n. 2.1.2.1).

3.4 Toute décision administrative au sens de l’art. 4 LPA doit avoir un fondement de droit public. Il ne peut en effet y avoir décision que s’il y a application, au travers de celle-ci, de normes de droit public (Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, p. 314 n. 857 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, op. cit., p. 194 n. 2.1.1.1). De nature unilatérale, une décision se réfère à la loi dont elle reproduit le contenu normatif de la règle (Thierry TANQUEREL, op. cit, p. 285 n. 798 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, op. cit., p. 174 n. 2.1.1.1). Une décision tend à modifier une situation juridique préexistante. Il ne suffit pas que l’acte visé ait des effets juridiques, encore faut-il que celui-ci vise des effets juridiques. Sa caractéristique en tant qu’acte juridique unilatéral tend à modifier la situation juridique de l’administré par la volonté de l’autorité, mais sur la base et conformément à la loi (ATA/29/2023 du 17 janvier 2023 consid. 3b et l’arrêt cité ; Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, op. cit., p. 320 n. 876).

Constitue ainsi une décision un acte étatique qui touche la situation juridique de l’intéressé, l’astreignant à faire, à s’abstenir ou à tolérer quelque chose, ou qui règle d’une autre manière obligatoire ses rapports avec l’État (arrêt du Tribunal fédéral 1C_150/2020 du 24 septembre 2020 consid. 5.2 et l’arrêt cité ; Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure genevoise, 2017, p. 18 n. 66).

Les décisions doivent être désignées comme telles, motivées et signées, et indiquer les voies et délais de recours (art. 46 al. 1 phr. 1 LPA). Elles sont notifiées aux parties, le cas échéant à leur domicile élu auprès de leur mandataire, par écrit (art. 46 al. 2 phr. 1 LPA). Elles peuvent être notifiées par voie électronique aux parties qui ont expressément accepté cette forme de communication (art. 46 al. 2 phr. 2 LPA). Une notification irrégulière ne peut entraîner aucun préjudice pour les parties (art. 47 LPA).

4.             Le recourant estime que l’autorité intimée aurait dû rendre une décision de non-renouvellement de la fonction de responsable HES lui permettant de déposer une réclamation, tandis que pour l’autorité intimée, le non-renouvellement litigieux ne constitue pas une telle décision, le mandat ayant été fixé pour une durée déterminée et subsidiairement que les dispositions applicables ne prévoient pas une telle décision.

4.1 La HES-SO Genève est un établissement autonome de droit public doté de la personnalité morale (art. 1 al. 3 loi sur la Haute école spécialisée de Suisse occidentale ‑ Genève du 29 août 2013 - LHES‑SO‑GE ‑ C 1 26). Elle s’organise elle-même, fixe ses priorités et ses modalités d’action et est responsable de sa gestion dans le cadre des orientations, principes et règles stipulées par la LHES-SO-GE, dans le respect des dispositions pertinentes du droit fédéral, de la convention intercantonale, et du cadre normatif fixé par la HES-SO (art. 1 al. 4 LHES-SO-GE).

La HES-SO Genève organise ses procédures et son fonctionnement de manière à garantir les principes de respect de la personne, de transparence, d’équité et d’impartialité. Elle met en place des voies de médiation, de réclamation et de recours dont les modalités sont fixées par règlements internes (art. 6 LHES‑SO‑GE).

Les enseignantes et enseignants ainsi que les collaboratrices et collaborateurs de l’enseignement et de la recherche sont soumis aux dispositions de la loi sur l’instruction publique du 17 septembre 2015 (LIP - C 1 10) et de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'État, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait - B 5 15 ; art. 19 al. 1 de la loi sur la Haute école spécialisée de Suisse occidentale - Genève du 29 août 2013 - LHES-SO-GE - C 1 26). Pour ce qui a trait au personnel de la HES-SO Genève, les compétences qui appartiennent au Conseil d’État, respectivement à l’office du personnel de l’État (ci-après : OPE) à teneur de la LIP et de la LTrait sont transférées aux organes de la HES-SO Genève selon les modalités définies par le RIPers (art. 19 al. 2 LHES-SO-GE).

Sur proposition de la direction de l’école, la directrice générale ou le directeur général de la HES-SO Genève décide de l’engagement, du renouvellement et de la fin des rapports de service du PER (art. 25 al. 1 let. d LHES-SO-GE).

4.2 Le Conseil d’État est l’autorité de nomination. Il peut déléguer cette compétence au Conseiller d’État chargé du département agissant d’entente avec l'OPE (art. 129 al. 1 LIP). Les enseignantes et les enseignants ainsi que les collaboratrices et les collaborateurs de l’enseignement et de la recherche de la HES‑SO Genève sont engagés suivant les catégories et pour les périodes définies par règlement (art. 129 al. 9 LIP).

Conformément à l’art. 25 al. 3 let. d LHES-SO-GE, la directrice générale ou le directeur général, sur proposition de la directrice ou du directeur d’école, décide de l’engagement, du renouvellement et de la fin des rapports de travail du personnel d’enseignement et de recherche. Cette compétence n’est pas délégable (art. 34 al. 1 RIPers).

4.3 La composition du PER est détaillé à l’art. 14 al. 2 RIPers qui distingue le corps enseignant (art. 14 al. 2 let. a à f) et le corps intermédiaire (art. 14 al. 3 let. a à c). Le corps enseignant comprend notamment les maîtres d’enseignement HES (art. 14 al. 2 let. d RIPers), fonction occupée par le recourant.

La HES-SO Genève peut désigner des responsable HES et des intervenants vacataires, que le RIPers regroupe sous l’appellation « autres membres du personnel », les distinguant ainsi du PER (art. 15 let. a et b RIPers).

Les responsables de filière ou de département, soit les responsables HES, proposent et mettent en œuvre la stratégie de la pédagogie pour leur filière ou leur département, en l’inscrivant dans le projet général d’école, ils proposent des actions ou des moyens permettant le développement de la filière ou du département, en lien avec la politique et les objectifs fixés par le Conseil de direction de l’école et en concertation avec le responsable du domaine de la HES-SO. Ils définissent la répartition interne des ressources allouées en fonction du plan d’étude et du plan de recherche appliquée et développement pour garantir la gestion pédagogique et administrative optimale de leur filière ou de leur département (art. 125 RIPers).

Cette fonction était également exercée par le recourant, conjointement à celle de maître d’enseignement, lui donnant droit à un supplément de traitement de 6% de la classe 27, annuité 22 (art. 134 let. a RIPers) et elle fait l’objet du présent litige.

4.4 Sauf exceptions prévues par le titre sur le personnel d'enseignement et de recherche, les membres du corps enseignant, les responsables HES et les adjointes ou adjoints scientifiques ou artistiques HES sont engagés pour une durée indéterminée, maximale de quatre ans, renouvelable à cette échéance (art. 34 al. 2 RIPers).

Les autres membres du personnel sont engagés pour une durée déterminée, conformément aux dispositions spécifiques du titre sur le personnel d'enseignement et de recherche qui régissent ces fonctions (art. 34 al. 3 RIPers). L’engagement fait l’objet d’une lettre adressée à l’intéressée ou l’intéressé par la direction de l’école (art. 35 al. 1 RIPers).

4.5 L’art. 41 al. 1 RIPers prévoit que, sauf exception prévue dans le titre consacré au PER, tous les quatre ans, la directrice générale ou le directeur général procède au renouvellement de l’engagement des membres du corps enseignant, des responsables HES, notamment, conformément à la procédure décrite, ordinaire ou simplifiée (art. 45 et 46 RIPers). La procédure ordinaire prévoit une commission de renouvellement ainsi que des auditions facultatives et un rapport de la commission.

Une décision de non-renouvellement de l’engagement doit être rendue six mois avant la fin de l’engagement. Elle est prise par la directrice générale ou le directeur général sur la base du rapport de la commission de renouvellement et doit être motivée (art. 45 RIPers).

Contre cette décision de non-renouvellement, l’intéressé peut former une réclamation auprès de la directrice générale ou du directeur général dans un délai de 30 jours. Le recours à la chambre administrative n’est ouvert que contre les décisions sur réclamation et la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10) étant applicable au surplus (art. 48 al. 1, 2 et 4 RIPers).

4.6 Il n'existe en principe pas de droit au renouvellement d'un contrat de durée déterminée (ATA/560/2020 du 9 juin 2020 consid. 3b ; ATA/398/2012 du 26 juin 2012 consid. 6). L'échéance d'un contrat de durée déterminée ne constitue pas un licenciement ou une sanction disciplinaire ; c'est un simple fait objectif qui n'est pas susceptible de recours. Le courrier par lequel l'employeuse ou employeur rappelle l'échéance du contrat n'est donc pas une décision car il ne crée, ne modifie ou n'annule pas de droits ou d'obligations (ATA/909/2022 du 13 septembre 2022 consid. 11 ; ATA/768/2014 du 30 septembre 2014 consid. 2b ; ATA/142/2006 du 14 mars 2006 consid. 3).

4.7 Dans les dispositions particulières du chapitre 6 du titre consacré au PER du RIPers, figure l’art. 124, lequel prévoit que sur proposition de la directrice ou du directeur d’école, la directrice générale ou le directeur général peut désigner des membres du corps enseignant pour accomplir des activités découlant des fonctions de responsable HES, soit des responsables de filière ou de départent, d’institut de recherche, de la coordination de la recherche, de la coordination de l’enseignement ou de la formation continue (art. 124 al. 1 let. a à e RIPers).

En accord avec la directrice ou le directeur d’école, l’intéressée ou l’intéressé peut continuer d’accomplir certaines missions de son poste initial en particulier lorsqu’elles touchent à l’enseignement ou la recherche (art. 124 al. 2 RIPers).

Les modalités de désignation et de retour à l’activité initiale sont réglées dans une directive du Conseil de direction (art. 4 RIPers).

4.8 Une directive sur la désignation, le renouvellement et le retour à la fonction initiale pour les responsables HES est entrée en vigueur conjointement au RIPers (ci-après : la directive). Elle indique qu’elle découle de l’art 124 al. 4 RIPers.

L’art. 3 de la directive précise que les fonctions de responsables HES sont toujours associées à une fonction de la typologie du PER qui constitue la fonction de base ou fonction initiale (art. 3 directive). Le renouvellement de l’engagement, au sens de l’art. 41 RIPers, est distinct de la reconduction de la fonction de responsable HES, qui fait l’objet de la directive. Lorsqu’un responsable HES cesse d’occuper cette fonction, il reprend, en principe, la fonction de la typologie occupée précédemment ou prévue à son engagement. Si nécessaire, des mesures d’accompagnement sont mises en œuvre pour faciliter cette transition.

L’art. 3.3 de la directive concerne les modalités de renouvellement. Il précise que les modalités de renouvellement des responsables HES, s’agissant de cette fonction, ne sont pas intégrées à la procédure de renouvellement et sont réglées pour elles‑mêmes. Par souci de cohérence, elles doivent être mises en lien avec la procédure de renouvellement. Si la consultation du corps enseignant concerné, ayant lieu en principe avant un EEDP, ou l’EEDP lui-même met en évidence des difficultés en ce qui concerne la fonction de responsable HES, la direction peut décider de ne pas renouveler la fonction. Si le retour à la fonction initiale est possible, il ne s’agit pas d’un non‑renouvellement de l’engagement mais d’un retour à la fonction initiale. En revanche, si les difficultés identifiées remettent en cause l’engagement de l’intéressé en tant que membre du PER, une procédure ordinaire doit être ouverte. En cas de renouvellement de l’engagement dans la fonction de la typologie mais pas de la fonction de responsable HES, l’intéressé est avisé par écrit, au moins trois mois avant la date du renouvellement que la fonction de responsable HES n’est pas reconduite. En principe, par souci de clarté et de simplification administrative, cette information est communiquée simultanément au renouvellement de l’engagement.

4.9 Il appert ainsi, à la lecture de ces dispositions du RIPers et de la directive, que la distinction faite par cette règlementation entre la fonction d’enseignement et celle de responsable HES porte notamment sur les modalités de non-renouvellement. Ainsi, pour la fonction de responsable HES, le non-renouvellement correspond à un retour à l’état initial, entraînant notamment la perte du supplément de traitement lié à l’exercice de la fonction de responsable HES. La différence réside également dans la procédure fixée pour aboutir à la décision de non‑renouvellement, comme vu ci-dessus.

Toutefois, si les procédures sont clairement distinctes, rien ne permet de retenir que le « retour à l’état initial », soit de fait le non-renouvellement de l’activité de responsable HES, ne constitue pas une décision au sens susrappelé. Cette décision est en effet rendue après une procédure qui diffère de celle du non-renouvellement de l’activité principale, mais qui constitue une décision au sens de l’art. 4 LPA, car elle touche la situation juridique de l’intéressé.

4.10 L’art 165 RIPers prévoit que pour toutes les décisions de la HES-SO Genève pour lesquelles une voie de recours spécifique au sens du chapitre intitulé « voies de droit », n’est pas prévue, l’intéressé peut former réclamation auprès de l’auteur de la décision dans les 30 jours à compter de la notification de la décision. Le recours à la chambre administrative n’étant ouvert que contre les décisions sur réclamation ou sur recours de la directrice générale ou du directeur général. La LPA est applicable au surplus.

La procédure prévue à l’art. 48 RIPers pour les réclamations contre les décisions de non-renouvellement de l’engagement ordinaire ne s’appliquait pas au non‑renouvellement de la fonction de responsable HES, c’est donc la voie de la réclamation prévue à l’art. 165 RIPers qui est applicable à la décision de non‑renouvellement de la fonction de responsable HES, même si la décision n’est pas désignée comme telle et n’indique pas les voies et délais de recours selon les exigences de l’art. 46 LPA, aucun préjudice pour les parties ne pouvant résulter d’une notification irrégulière (art. 47 LPA).

5.             L’autorité intimée estime encore que la durée déterminée prévue lors du dernier renouvellement de l’activité de responsable HES empêche de considérer l’annonce du non-renouvellement comme une décision, conformément à la jurisprudence développée en matière de contrat à durée déterminée.

Ce raisonnement ne saurait être suivi, dans la mesure où chaque renouvellement prévoit une durée de quatre ans au maximum, comme le prévoient le RIPers et la directive. Le renouvellement du 30 août 2021 se distingue uniquement par la durée plus courte, soit une année. Une durée inférieure à quatre ans est possible en application de l’art. 3.2 de la directive, à titre d’exception. En l’espèce, cette durée inférieure était motivée par les problèmes relevés dans l’EEDP du 25 août 2021.

Le raisonnement de l’autorité intimée ne peut être suivi pour une seconde raison. Conjointement à la fixation d’une durée d’une année du mandat renouvelé le 30 août 2021, des objectifs d’amélioration de l’activité ont été fixés et un coaching personnalisé mis en place. Puis, six mois avant la fin du mandat, en février-mars 2022, la consultation du corps enseignant a été conduite par la directrice, conformément à la procédure de renouvellement prévue par la directive à l’art. 3.3. qui précise que si la consultation et/ou l’EEDP met en évidence des difficultés en ce qui concerne la fonction de responsable HES, la direction peut décider de ne pas renouveler la fonction de responsable HES. Le recourant a été informé de l’ouverture de cette procédure par la directrice, le 22 février 2022.

Il n’est donc pas possible de suivre l’autorité intimée lorsqu’elle soutient que le renouvellement était de durée déterminée puisque rien ne le distingue des renouvellements précédents, si ce n’est sa durée. L’autorité intimée a suivi la procédure prévue par la directive en la matière pour lui permettre de prendre une décision de renouvellement ou de non-renouvellement, comme en l’espèce, en fonction de l’issue de la consultation et d’un éventuel EEDP.

Force est donc de constater que c’est à tort que l’autorité intimée n’a pas donné suite à la réclamation adressée par le recourant, le 24 mai 2022 contre la décision du 12 avril 2022, consacrant ainsi un déni de justice.

Le recours pour déni de justice sera donc admis et la cause renvoyée à l’autorité intimée pour qu’elle traite la réclamation du recourant à l’encontre de la décision de non-renouvellement du 12 avril 2022.

6.             Vu l’issue du litige, aucun émolument ne sera perçu, étant rappelé que la HES-SO Genève est une institution de droit public (art. 87 al. 1 LPA ; ATA/1148/2022 du 15 novembre 2022). Une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera allouée au recourant, à la charge de l’autorité intimée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 novembre 2022 par A______ pour déni de justice à l'encontre de la Haute école spécialisée de Suisse occidentale - Genève (HES‑SO Genève)  ;

 

au fond :

l’admet ;

renvoie le dossier à la Haute école spécialisée de Suisse occidentale - Genève (HES-SO) pour qu’elle traite la réclamation faite contre la décision du 12 avril 2022 ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue à A______ une indemnité de procédure de CHF 1'500.-, à la charge de la Haute école spécialisée de Suisse occidentale - Genève (HES-SO Genève) ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Christian BRUCHEZ, avocat du recourant, ainsi qu'à la Haute école spécialisée de Suisse occidentale - Genève (HES-SO Genève).

Siégeant : Valérie LAUBER, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Eleanor McGREGOR, Claudio MASCOTTO, Fabienne MICHON RIEBEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. BALZLI

 

 

la présidente siégeant :

 

 

V. LAUBER

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :