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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2265/2022

ATA/636/2023 du 13.06.2023 sur JTAPI/847/2022 ( ICC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2265/2022-ICC ATA/636/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 juin 2023

4ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant

contre


ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS intimées

_________



Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 23 août 2022 (JTAPI/847/2022)


EN FAIT

A. a. Par courrier du 7 juillet 2022, A______ a saisi le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI), le priant de « prendre note de [sa] réclamation » concernant la décision de l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) « pour [sa] taxation de l'année 2011 », demandant au TAPI de l'annuler.

b. Par pli recommandé du 11 juillet 2022, le TAPI a accusé réception du recours et demandé à A______ de préciser, d'ici au 22 juillet 2022, quelle décision il contestait, de la produire et de fournir la motivation et des conclusions à l'appui, à défaut de quoi son recours pourrait être déclaré irrecevable. Il lui était par ailleurs imparti un délai au 10 août 2022 pour procéder au paiement d’une avance de frais de CHF 700.-, sous peine d’irrecevabilité de son recours.

c. Selon le système du suivi des envois (« Track & Trace ») mis en place par la Poste, cette lettre recommandée a été distribuée à A______ le 12 juillet 2022.

d. Le 18 juillet 2022, A______ a répondu à la demande du TAPI en confirmant que son recours concernait l'année 2011 et a annexé la décision sur réclamation du 14 juin 2022 de l'AFC-GE par laquelle cette autorité refusait d'entrer en matière sur la réclamation qu'il avait formée le 26 avril 2022 à l'encontre de son bordereau de taxation relatif à l'année 2011, la réclamation étant irrecevable au motif qu'elle n'avait pas été présentée dans le délai légal et impératif de 30 jours.

e. Selon les données émanant des services financiers du Pouvoir judiciaire, le paiement de l'avance de frais a été effectué le 16 août 2022.

f. Par courrier du 17 août 2022, A______ a demandé au TAPI de bien vouloir excuser le retard involontaire dans le paiement de l'avance de frais, qui avait été réglé ce jour-là. Il avait été dans l'incapacité de s’en acquitter dans le délai à la suite d’un accident pendant son séjour vacancier. Il a joint un « avis d'arrêt de travail » du 8 août 2022 de la Docteure B______ jusqu'au 13 août 2022 à la suite d’une chute.

g. Par jugement du 23 août 2022, le TAPI a déclaré irrecevable le recours pour défaut de motivation, le contribuable n’ayant émis aucune critique au sujet de la tardiveté de la réclamation et du défaut de paiement de l’avance de frais dans le délai imparti. L’arrêt de travail dont il se prévalait, qui avait débuté le 8 août 2022, soit deux jours avant l’échéance du délai, ne pouvait constituer un motif d’excuse, puisqu’il ne l’empêchait pas de procéder à l’avance de frais ou d’instruire un tiers d’agir à sa place.

B. a. Par acte remis à la poste le 20 septembre 2022, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation et à ce que son recours du 7 juillet 2022 soit déclaré recevable.

Âgé de 80 ans et sans formation juridique, il avait allégué un établissement erroné des faits par l’AFC-GE et une décision arbitraire et de mauvaise foi à son encontre, et transmis les pièces dont il disposait.

Sujet à des problèmes de santé depuis plusieurs mois, dont des chutes nécessitant un repos strict, il avait été victime d’un accident à l’étranger le 8 août 2022, qui avait amené son médecin traitant à le soumettre précisément à un tel repos et à une immobilisation complète, qui l’empêchait de régler ses affaires administratives depuis l’étranger. Il avait procédé au paiement de l’avance de frais quatre jours après la fin de son empêchement.

Il a notamment joint à son recours un bilan de gonalgies daté du 2 septembre 2022 du Centre d’imagerie médicale de Carros (France) faisant état d’un pincement fémoro-tibial bilatéral, d’une ébauche ostéophytique tricomportementale notamment des épines tibiales, d’une discrète désaxation patellaire latérale et d’un épanchement articulaire avec un comblement sous-quadricipital.

b. L’AFC-GE n’a pas été invitée à se déterminer.

c. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.              

2.1 L'exigence de l'avance de frais et les conséquences juridiques en cas de non-paiement de celle-ci relèvent du droit de procédure cantonal. Les cantons sont libres, dans le respect des garanties constitutionnelles, d'organiser cette matière à leur guise (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 5.1 ; ATA/1262/2017 du 5 septembre 2017 consid. 2a et les références citées).

2.2 En vertu de l'art. 86 LPA, la juridiction invite le recourant à faire une avance ou à fournir des sûretés destinées à couvrir les frais de procédure et les émoluments présumables ; elle fixe à cet effet un délai suffisant (al. 1). Si l'avance n'est pas faite dans le délai imparti, la juridiction déclare le recours irrecevable (al. 2).

Les juridictions administratives disposent d’une grande liberté d’organiser la mise en pratique de cette disposition et peuvent donc opter pour une communication des délais de paiement par pli recommandé (ATA/83/2018 du 30 janvier 2018 consid. 3a et les références citées).

2.3 À rigueur de texte, l'art. 86 LPA ne laisse aucune place à des circonstances extraordinaires qui justifieraient que l’avance de frais n’intervienne pas dans le délai imparti. La référence au « délai suffisant » de l’al. 1 ouvre toutefois la porte à une certaine marge d’appréciation de la part de l’autorité judiciaire (ATA/881/2010 du 14 décembre 2010 consid. 4a). Ainsi, selon la jurisprudence, il convient d’appliquer par analogie la notion de cas de force majeure de l’art. 16 al. 1 LPA afin d’examiner si l’intéressé a été empêché sans sa faute de verser l’avance de frais dans le délai fixé (ATA/636/2017 du 6 juin 2017 consid. 4b et les références citées).

Tombent sous la notion de force majeure les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d'activité de l'intéressé et qui s'imposent à lui de façon irrésistible (ATA/160/2019 du 19 février 2019 consid. 2b ; ATA/916/2015 précité consid 2c ; ATA/378/2014 du 20 mai 2014 consid. 3d ; ATA/515/2009 du 13 octobre 2009 consid. 4b). Les conditions pour admettre un empêchement sont très strictes. Ce dernier doit être imprévisible et sa survenance ne doit pas être imputable à faute à l'administré (arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.2 et la jurisprudence citée ; ATA/1028/2016 et ATA/916/2015 précités consid. 2c ; ATA/735/2015 du 14 juillet 2015 consid. 3b et la jurisprudence citée). Il doit être de nature telle que le respect des délais aurait exigé la prise de dispositions que l'on ne peut raisonnablement attendre de la part d'un homme d'affaires avisé (ATA/544/2013 du 27 août 2013 ; ATA/397/2013 du 25 juin 2013 consid. 9 ; Danielle YERSIN/Yves NOËL, Commentaire de la loi sur l'impôt fédéral direct, 2008, ad art. 133, n. 14 et 15 p. 1283).

A été considéré comme un cas de force majeure donnant lieu à restitution de délai le fait qu’un recourant se soit vu impartir, par pli recommandé, un délai de 15 jours pour s’acquitter d’une avance de frais, alors que le délai de garde pour retirer le pli en question était de sept jours, de sorte qu’il ne lui restait qu’une semaine pour s’exécuter (ATA/477/2009 du 20 septembre 2009 consid. 5). En revanche, n'a pas été considérée comme un cas de force majeure la maladie, celle-ci n'étant admise comme motif d'excuse que si elle empêche le recourant d'agir par lui-même et de donner à un tiers les instructions nécessaires pour agir à sa place (ATA/50/2009 du 27 janvier 2009 consid. 3c).

2.4 Le formalisme excessif, prohibé par l’art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst - RS 101), est réalisé lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 135 I 6 consid. 2.1 p. 9 ; 134 II 244 consid. 2.4.2 ; ATA/1077/2015 précité consid. 6a ; ATA/836/2014 du 28 octobre 2014 consid. 7a).

Il n'y a pas de rigueur excessive à ne pas entrer en matière sur un recours lorsque, conformément au droit de procédure applicable, la recevabilité de celui-ci est subordonnée au versement d'une avance de frais dans un délai déterminé. Il faut cependant que son auteur ait été averti de façon appropriée du montant à verser, du délai imparti pour le paiement et des conséquences de l'inobservation de ce délai (ATF 104 Ia 105 consid. 5 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_734/2012 du 25 mars 2013 consid. 3.1 ; 2C_645/2008 du 24 juin 2009 consid. 2.2). La gravité des conséquences d'un retard dans le paiement de l'avance sur la situation du recourant n'est pas pertinente (arrêts du Tribunal fédéral 2C_703/2009 du 21 septembre 2010 consid. 4.4.2 ; 2C_645/2008 précité consid. 2.2 ; 2C_450/2008 du 1er juillet 2008 consid. 2.3.4).

2.5 En l’espèce, il n’est pas contesté que la demande d’avance de frais impartissait au recourant un délai suffisant et qu’elle n’a pas été effectuée dans celui-ci.

Le recourant fait valoir qu’il a subi un accident le 8 août 2022 à Nice (France), qui l’avait obligé à rester alité, dans un contexte où il était régulièrement sujet à des chutes.

Il n’explique pas en quoi ledit repos strict prescrit par son médecin était incompatible avec la transmission d’un ordre de paiement ou des instructions données à un tiers dans ce sens ou encore de demander une prolongation du délai de paiement, étant relevé qu’il n’invoque pas avoir été dans un état de conscience insuffisant ou que la mobilité notamment de ses membres supérieurs n’aurait pas été suffisante pour procéder au paiement qui lui incombait, selon les modalités qui lui convenaient.

Le recourant ne peut donc se prévaloir d’un cas de force majeure.

Le TAPI pouvait donc, sans faire preuve de formalisme excessif, constater que l’avance de frais avait été faite hors délai et déclarer le recours irrecevable.

Dans ces circonstances et conformément à la jurisprudence citée plus haut, le recours sera rejeté, sans qu’il soit besoin d’examiner s’il a été motivé de façon suffisante (art. 72 LPA).

3.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *


PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, en tant qu’il est recevable, le recours interjeté le 20 septembre 2022 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 23 août 2022 ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à A______, à l’administration fiscale cantonale, à l’administration fédérale des contributions, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Fabienne MICHON RIEBEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. KRAUSKOPF

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

la greffière :