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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/528/2022

ATA/367/2023 du 06.04.2023 sur JTAPI/96/2023 ( LCI ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/528/2022-LCI ATA/367/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 6 avril 2023

sur effet suspensif

 

dans la cause

A______
représentée par Me Patrick Blaser, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

et

B______
représentée par Me François Bellanger, avocat

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 25 janvier 2023 (JTAPI/96/2023)


Vu le recours interjeté le 27 février 2023 par la société immobilière A______ (ci-après : la SI) contre le jugement du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) du 25 janvier 2023 ; qu’elle a conclu à son annulation ainsi qu’à celle de l’autorisation de construire DD 1______, objet du litige ; qu’elle était propriétaire de la parcelle voisine, de 58'527 m2, de la construction projetée sur les parcelles dont la société B______ (ci-après : B______) était propriétaire ; que les parcelles étaient sises en zone de développement 4A ; que l’autorisation précitée concernait la construction d’un bâtiment administratif avec parking souterrain ; que les parcelles d’B______ avaient préalablement fait l’objet du plan localisé de quartier (ci-après : PLQ) n° 2______ « les Crêts de Pregny » adopté par le Conseil d’État le 16 avril 2014 ; que les parcelles d’B______ n’étaient pas équipées dès lors qu’elles ne bénéficiaient d’aucun droit pour se raccorder aux collecteurs construits sur la parcelle n° 932 de la SI ; que, par ailleurs, la DD 1______ ne permettait la construction que de seize places de stationnement , alors que quatre-vingt-huit étaient prévues par le PLQ ; qu’en conséquence, la DD différait substantiellement du PLQ ; qu’elle sollicitait dès lors, à titre préalable, la restitution de l’effet suspensif au recours ;

que le département du territoire (ci-après : DT) a conclu au rejet de la requête de restitution d’effet suspensif ; qu’elle était en tous points similaire à celle déposée devant le TAPI et rejetée par décision du 14 avril 2022 ; que la DD prévoyait trente-huit places de stationnement et que la différence avec le PLQ répondait à un intérêt public et ne portait nullement atteinte à ce dernier ;

qu’B______ a conclu au rejet de la requête ; qu’elle contestait l’existence d’une divergence importante entre le PLQ et l’autorisation querellée ; que tous les préavis avaient été favorables ; que, comme l’avait tranché le TAPI dans son jugement au fond, la substance et le principe du PLQ étaient respectés ;

que dans sa réplique, la recourante a persisté dans ses conclusions ;

que les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur effet suspensif ;

 

Considérant, en droit, l'art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) du 26 mai 2020, à teneur duquel les décisions sur effet suspensif sont prises par la présidente de ladite chambre, respectivement par le vice-président, ou en cas d'empêchement de ceux-ci, par un juge ;

 

qu'aux termes de l'art. 66 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10), sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsqu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l'effet suspensif (al. 3) ;

 

que selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles ne sont légitimes que si elles s'avèrent indispensables au maintien d'un état de fait ou à la sauvegarde d'intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/795/2021 du 4 août 2021 ; ATA/1043/2020 du 19 octobre 2020 ; ATA/303/2020 du 19 mars 2020) ;

 

qu'elles ne sauraient, en principe, anticiper le jugement définitif (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II 253-420, 265) ; que, par ailleurs, l'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3) ;

 

que l’art. 146 al. 2 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) constitue une disposition légale contraire au sens de l’art. 66 al. 1 LPA ; qu’il prévoit que lorsqu'il est dirigé contre une autorisation définitive précédée notamment d'un PLQ en force, le recours n'a pas d'effet suspensif à moins qu'il ne soit restitué sur requête du recourant ; que l'art. 146 al. 2 LCI constituant une exception au régime général, expressément voulue par le législateur, il n'y a en principe pas lieu de s'écarter de cette volonté (ATA/1275/2017 du 12 septembre 2017 consid. 5 et les références citées) ; que la jurisprudence pose comme condition à la restitution de l’effet suspensif le fait de rendre vraisemblable l'existence de divergences importantes entre le PLQ et l'autorisation délivrée ; que cela constitue une mise en œuvre à la fois du principe de la proportionnalité, prévu à l'art. 5 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
(Cst. - RS 101), et des principes dégagés par la jurisprudence rendue au fond relativement aux art. 146 al. 1 LCI et 3 al. 4 de la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 (LGZD - L 1 35 ; ATA/291/2011 du 10 mai 2011 consid. 4 et 5 ; ATA/143/2011 du 8 mars 2011, confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_188/2011 du 23 septembre 2011) ;

 

que dans l'hypothèse où le recourant sollicite la restitution de l'effet suspensif, l'autorité de recours doit examiner si les raisons pour exécuter immédiatement la décision entreprise sont plus importantes que celles justifiant le report de son exécution ; qu’elle dispose d'un large pouvoir d'appréciation qui varie selon la nature de l'affaire ; que pour effectuer la pesée des intérêts en présence, elle n'est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (arrêt du Tribunal fédéral 1C_435/2008 du 6 février 2009 consid. 2.3 et les références citées) ; que les chances de succès du recours n'influencent la pesée des intérêts que si elles peuvent être déterminées prima facie sur la base du dossier et qu'elles ne font aucun doute (arrêt du Tribunal fédéral 2C_356/2007 du 18 septembre 2007 consid. 3) ;

qu’à teneur de l’art. 3 LGZD, les projets de construction établis selon les normes d’une zone de développement doivent être conformes aux PLQ adoptés en application de l’art. 2 ; que toutefois, lors du contrôle de conformité des requêtes en autorisation de construire avec le PLQ, le DT peut admettre que le projet s’écarte du plan, pour autant que l’indice d’utilisation du sol et l’indice de densité soient respectés et, dans la mesure où la mise au point technique du dossier ou un autre motif d’intérêt général, notamment la construction de logements supplémentaires, le justifie (al. 5) ; que sont réputés conformes au PLQ au sens de l’al. 5, les projets de construction prévoyant des implantations différentes de bâtiments, places extérieures ou garages souterrains à construire, mais respectant les aires d’implantation visées à l’al. 1 let. a et e, ou prévoyant des accès aux places de parcage et aux garages souterrains différents de ceux pouvant figurer sur le plan, mais situées dans les secteurs d’accès aux places de parcage et aux garages souterrains. Il en va de même des modifications des espaces libres jouxtant l’implantation des bâtiments et compris à l’intérieur de l’aire d’implantation (al. 6) ; qu’est réputée de peu d’importance et constitutive d'un motif d'intérêt général ou technique au sens de l'al. 5, justifiant que le projet de construction s'écarte d'un PLQ, la diminution du nombre de places de parcage pour tenir compte d’écarts des projets de construction par rapport au plan ou d’éventuelles modifications du règlement relatif aux places de stationnement sur fonds privés du 16 décembre 2015 (RPSFP - L 5 05.10), en particulier des ratios de stationnement en matière de logements d’utilité publique, survenues postérieurement à l’adoption de ce plan (al. 7) ;

que la juridiction de céans a considéré que constituaient des modifications mineures, notamment,  la surélévation d’un étage, permettant d’obtenir treize logements d’utilité publique supplémentaires (ATA/874/2015 du 25 août 2015) ; la création d’un étage supplémentaire comportant deux logements et induisant un dépassement du gabarit prévu par le PLQ de 2,70 m dans le cadre de la réalisation d’une construction à haut standard énergétique (ATA/583/2010 du 31 août 2010) ; un projet comportant un attique de 51,50 m2 affecté à une cuisine, un séjour et une véranda non chauffée et n’excédant pas les 10 % de SBP supplémentaires autorisés en application du bonus Minergie (ATA/55/2012 du 24 janvier 2012) ; un écart de surface brute de plancher (ci-après : SBP) de 3 %, qualifié de peu important, compte tenu de la SBP totale du projet en cause (ATA/505/2007 du 9 octobre 2007) ; le déplacement de cinq places de parc, la transformation de six logements traversants en non traversants, la création d'un sous-sol et cinq étages sur rez au lieu de deux sous-sols et quatre étages sur rez, la création de rez-de-chaussée « morts » entraînant le rehaussement de 1.40 m des bâtiments, sans toutefois que ceux-ci ne dépassent l'altitude maximale prévue par le plan, et enfin, le changement de place de la conduite de désenfumage (ATA/315/2015 du 31 mars 2015 consid. 5, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 1C_249/2015 du 15 avril 2016)

 

qu’ont, au contraire, été considérées comme importantes une surélévation de deux étages (le projet litigieux prévoyant une construction de huit niveaux alors que le PLQ prévoyait des constructions de six, la surélévation entrainant une augmentation de 40 % des SBP (ATA/39/2014 du 21 janvier 2014) ; une surélévation de deux étages de deux immeubles, afin d’aménager huit logements au total, représentant une SBP de 932 m2, les immeubles étant inclus dans un ensemble érigé dans les années 1950, et pour lequel le PLQ prévoyait plusieurs restrictions très spécifiques (ATA/515/2013 du 27 août 2013) ;

 

qu’en l’espèce, l’absence d’une éventuelle servitude pour pouvoir se raccorder aux collecteurs construits sur la parcelle n° 932 de la SI est une questions de droit privé pour laquelle la chambre de céans n’est pas compétente ; que l’office cantonal de l’eau a préavisé favorablement le projet le 16 juin 2021 ; que ledit service a demandé que, trente jours avant l’ouverture du chantier, un plan des canalisations d’évacuation des eaux usées et eaux de pluie jusqu’au point de raccordement du projet au système public d’assainissement soit produit ;

que le bâtiment A, également prévu par le PLQ et appartenant à la République de l'Inde, a fait l'objet d'une autorisation de construire délivrée le 30 avril 2019 (DD 3______), laquelle est entrée en force sans avoir été contestée par la SI, de sorte que sa construction a débuté ; que selon le PLQ, les deux bâtiments sont raccordés au même collecteur EU/EP sur la parcelle n° 932 ; qu’ainsi et prima facie, le terrain semble pouvoir être équipé ;

 

que le PLQ prévoit quatre-vingt-huit places de stationnement, comprenant celles en surface et en sous-sol, pour les deux bâtiments prévus (A et B) ; que la construction, en cours, du bâtiment A comprendra quarante places ; que trente-huit places sont prévues dans les plans visés ne varietur de la DD litigieuse ; qu’après une analyse détaillée le TAPI est parvenu à une différence entre septante-sept places prévues et quatre-vingt-six dans le PLQ, soit 10 % ; que ces chiffres devront faire l’objet d’une analyse plus approfondie lors de l’examen au fond du litige ; que de prime abord, cette différence ne peut être qualifiée d’importante ; que de surcroît elle ne porte pas sur l’indice d’utilisation du sol et l’indice de densité (art. 3 al. 5 LGZD) ;

 

que le TAPI avait refusé la restitution de l’effet suspensif au recours il y a près d’un an, par décision du 14 avril 2022, sans que la SI ne le conteste ;

que l’instruction de la présente cause devrait être prochainement terminée et la cause en état d’être jugée ;

 

qu’en conséquence, les raisons justifiant le report de l’exécution ne peuvent primer, étant rappelé que la restitution de l’effet suspensif est l’exception dans le cadre de l’art. 146 al. 2 LCI ;

 

que la requête en restitution de l’effet suspensif sera rejetée ;

 

qu’il sera statué ultérieurement sur les frais du présent incident.

 

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette la requête en restitution de l’effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de croit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision à Me Patrick Blaser, avocat de la recourante, à
Me François Bellanger, avocat de B______ au département du territoire-OAC ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

 

 

 

Le vice-président :

 

 

C. Mascotto

 

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :