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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1544/2014

ATA/874/2015 du 25.08.2015 sur JTAPI/363/2015 ( LCI ) , REJETE

Recours TF déposé le 28.09.2015, rendu le 15.04.2016, REJETE, 1C_490/2015
Parties : COMMUNAUTE DE LA COPROPRIETE PAR ETAGE DE L'IMMEUBLE 17, 17A, 17B, 17C RUE EDMOND-VAUCHER À VERNIER / DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE, LA FONDATION HBM EMILE DUPONT
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1544/2014-LCI ATA/874/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 25 août 2015

3ème section

 

dans la cause

 

COMMUNAUTÉ DE LA COPROPRIÉTÉ PAR ÉTAGE DE L'IMMEUBLE 17, 17A, 17B, 17C RUE EDMOND-VAUCHER À VERNIER
représentée par Me Pierre Gabus, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE - OAC

et

LA FONDATION HBM ÉMILE DUPONT

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 mars 2015 (JTAPI/363/2015)


EN FAIT

1) Le plan localisé de quartier (ci-après : PLQ) n° 29'270, adopté par le Conseil d’État le 27 octobre 2004, concerne le périmètre situé le long de l’avenue Edmond-Vaucher, au niveau du chemin du Coin-de-Terre, sur la commune de Vernier, en zone 5 de développement 3.

Il prévoit la construction de six barres d’immeubles d’habitation R+3, implantées perpendiculairement à l’avenue Edmond-Vaucher. Quatre immeubles sont situés à l’ouest du chemin du Coin-de-Terre. Les cinquième et sixième barres consistent en deux immeubles, plus petits, côte à côte, qui doivent longer, à l’est, le chemin précité.

Le PLQ fait mention d’un indice d’utilisation du sol (ci-après : IUS) de 1,25.

2) Les trois premiers immeubles ont été construits, aux adresses respectives de 13 à 13C, 15 à 15C et 17 à 17C avenue Edmond-Vaucher (ci-après, respectivement : bâtiments 13, 15 et 17).

3) L’État de Genève est propriétaire de la parcelle n° 5'357 - anciennement parcelles nos 306 et 2'633, et moitié de la parcelle n° 2'634 - sise dans le périmètre du PLQ précité, à l’angle de l’avenue Edmond-Vaucher et du chemin du Coin-de-Terre, à l’est du bâtiment 17, sur laquelle devrait s’ériger la quatrième barre d’immeubles.

4) Selon le tableau de répartition des droits à bâtir du PLQ, la superficie de chacune des parcelles et la surface brute de plancher (ci-après : SBP) future y afférente consistaient, respectivement, en 1'232 m2 avec 1'540 m2 de SBP pour la parcelle n° 306, 1'534 m2 avec 1'918 m2 de SBP pour la parcelle n° 2'633, et 197 m2 avec 246 m2 de SBP pour la parcelle n° 2'634 dans son entier.

5) Le 27 novembre 2012, la Fondation HBM Émile-Dupont (ci-après : la fondation) a déposé une demande définitive d’autorisation de construire quatre immeubles de logements HBM, avec parking souterrain, sur la parcelle n° 5'357 avec pour adresse 19 à 19C de l’avenue Edmond-Vaucher (ci-après : bâtiment 19).

La demande a été enregistrée auprès du département des constructions et des technologies de l’information, devenu depuis le département de l’aménagement, du logement et de l’énergie (ci-après : le département ou le DALE), sous les références DD 105’508-3.

La demande d’autorisation sollicitait une dérogation, en proposant un gabarit de quatre étages sur rez (ci-après : R+4). Le PLQ ayant été adopté avant le 24 novembre 2009, une surélévation d’immeuble, en vue de permettre la construction de logements supplémentaires, pouvait justifier que le projet de construction s’écarte du PLQ. La fondation souhaitait réaliser un bâtiment comportant davantage de logements. La proposition permettait d’offrir treize logements supplémentaires par rapport au gabarit du PLQ. Depuis l’avenue de Châtelaine, en remontant l’avenue Edmond-Vaucher, le bâtiment de la fondation concluait une série de quatre immeubles. Ce dernier, situé à l’amorce du plateau, en limite du chemin du Coin-de-Terre, pouvait ainsi, de par sa position dominante, bénéficier d’un étage supplémentaire, sans porter ombrage aux bâtiments voisins. L’harmonie du périmètre n’était pas perturbée. À une échelle urbaine plus large, il était vraisemblable que les bâtiments qui seraient, à terme, édifiés dans le périmètre des actuels jardins familiaux du Bouchet, seraient construits avec des gabarits supérieurs à R+3.

La fondation joignait une étude d’ensoleillement, démontrant que les villas adjacentes ou, à terme, les futurs immeubles du chemin du Coin-de-Terre (n° 21 A et n° 21 B) ne seraient pas lésés par cette augmentation de gabarit. Celle-ci réduisait d’ailleurs de manière significative le coût des travaux, la construction d’éléments fondamentaux, tels que sous-sol, ascenseur, toiture, étant répartis sur un plus grand nombre d’étages. La plus grande densité permettait de rendre plus viable le projet. Le parking souterrain avait une contenance de quarante-deux véhicules pour soixante logements. Huit places étaient prévues en bordure du chemin du Coin-de-Terre pour les visiteurs. La fondation pouvait mettre à disposition des locataires six places de stationnement supplémentaires dans un parking lui appartenant dans un immeuble voisin.

6) Dans le cadre de l’instruction de la requête, plusieurs préavis ont été émis.

Ceux-ci étaient favorables, voire favorables sous réserve.

La commission d’architecture (ci-après : CA) a rendu un préavis favorable le 22 janvier 2013, à condition de « réserver les zones privatives en garantissant des dégagements de 4 mètres devant l’ensemble des locaux habitables du rez-de-chaussée » et d’une largeur minimale de portes.

Après un préavis nuancé du 19 juillet 2013, la direction des plans d’affectation et requête (ci-après : PAR) a estimé, le 31 octobre 2013, que l’adaptation du PLQ de R+3 à R+4 était admissible, dans la mesure où la construction de logements constituait un motif d’intérêt général justifiant que le projet de construction s’écarte du PLQ adopté. Le préavis était favorable.

7) Par arrêté du 15 avril 2014, le DALE a autorisé l’application des normes de la troisième zone aux bâtiments à construire, selon le dossier DD 105'508.

8) Par décision du 25 avril 2014, publiée le 2 mai 2014 dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO), le DALE a délivré l’autorisation de construire sollicitée.

9) Le 28 mai 2014, la « communauté de la copropriété par étage de l’immeuble 17, 17 A, 17 B et 17 C, avenue Edmond-Vaucher » (ci-après : la copropriété ou la recourante) a recouru contre l’autorisation de construire devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

Elle a conclu à l’annulation de l’autorisation précitée, sous suite de frais et dépens.

Elle a sollicité la restitution de l’effet suspensif à son recours et à ce qu’il soit interdit à la fondation d’effectuer des travaux au-delà du gabarit R+3.

10) Par décision du 23 juin 2014, le TAPI a accordé l’effet suspensif partiel au recours, limité à l’autorisation de construire un quatrième étage.

11) Par réponse du 28 août 2014, la fondation a conclu à l’irrecevabilité du recours, le dépôt de celui-ci n’ayant pas été décidé par l’assemblée des copropriétaires que l’administrateur, la société Moser Vernet & Cie, ne pouvait valablement pas représenter.

Subsidiairement, elle a conclu au rejet de recours et à la confirmation de la décision attaquée.

12) Par réponse du 15 septembre 2014, le département a pris des conclusions identiques à celles de la fondation.

13) Après un second échange d’écritures et une audience le 10 décembre 2014, le TAPI a, par jugement du 20 mars 2015, déclaré recevable le recours de la copropriété et l’a rejeté.

Selon la recourante, la SBP totale du projet querellé de 4'893 m2 représentait un dépassement de 1'316 m2 des droits à bâtir, soit une augmentation de 36,7 % qui ne pouvait être considérée comme une modification mineure du PLQ. Par ailleurs, l’IUS du projet s’élevait à 1,7 et s’écartait de celui du PLQ, fixé à 1,25.

Le TAPI, après avoir procédé à des calculs, détaillés dans le jugement, a retenu que la proportion du dépassement des droits à bâtir représentait 26 % et non 36,63 % comme allégué par la recourante. De même, l’écart de l’IUS était de 26 % et non de 36 %. Cette modification du PLQ devait être considérée comme admissible au regard de la jurisprudence. Elle ne correspondait qu’à un unique étage supplémentaire, qui permettait de répartir le coût de construction sur un plus grand nombre de logements et d’optimiser le financement public, ce qui répondait à un intérêt public général, compte tenu de la pénurie de logements notoire et persistante à Genève. La recourante ne contestait pas le fait que la hauteur du futur bâtiment serait inférieure au gabarit maximum de 21 m autorisé par la loi pour la zone 3. Tous les préavis émis étaient positifs, notamment celui de la CA et du PAR.

14) Par acte du 5 mai 2015, la copropriété a recouru devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Elle a conclu à l’annulation du jugement du TAPI et, ceci fait, à l’annulation de la décision d’autorisation de construire n° 105'508, le tout sous suite de frais et dépens.

Au moment du dépôt de l’autorisation de construire litigieuse par la fondation, seuls 60 % des constructions prévues par le PLQ avaient été réalisés. Selon le tableau de répartition des droits à bâtir fixés par le PLQ, les parcelles sur lesquelles l’autorisation avait été demandée permettaient la construction d’un immeuble d’une SBP de 3'581 m2. Or, la demande avait été déposée pour un immeuble d’une SBP de 4'893 m2 au total. Le projet dérogeait au PLQ et présentait une SBP excédante de 36,63 %, tout comme l’IUS. La proportion de dépassement des droits à bâtir de 26 % retenue par le TAPI résultait d’un calcul erroné et contraire au droit. L’augmentation de 36,6 % de SPB était admise par toutes les parties. Le TAPI avait commis une erreur de logique dans son calcul, tant pour le dépassement de SBP que pour l’IUS. Ayant établi les faits de manière erronée, le jugement devait être annulé.

Le TAPI avait par ailleurs fait application de l’art. 2 A al. 3 de la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 (LGZD - L 1 35), relatif à un indice de densité (ci-après : ID). Or, celui-ci ne pouvait s’appliquer rétroactivement au PLQ. Cet article ne visait que les autorisations de construire délivrées à compter du 16 mai 2013 et non soumises à un PLQ entré en force. L’autorisation de construire litigieuse n’étant pas conforme au PLQ, le jugement devait être annulé.

De surcroît, la dérogation au PLQ était importante, au sens de la jurisprudence. Au moment de l’octroi de l’autorisation de construire litigieuse, le PLQ datait de moins de dix ans et seulement 60 % des constructions prévues par le plan avaient été réalisés. Le dépassement, en termes de SBP, demeurait déterminant et était en l’occurrence extrêmement élevé. La jurisprudence avait considéré une augmentation de 40 % des SBP comme dépassant largement la notion de dérogation mineure.

15) Par réponse du 10 juin 2015, la fondation a conclu au rejet du recours, sous suite de frais et dépens. Elle a pris des conclusions subsidiaires dans l’hypothèse où la chambre administrative devait débouter la fondation et ne pas valider l’autorisation de construire, telle que délivrée le 25 avril 2014.

Elle s’en remettait à justice quant au calcul de la dérogation effectué par le TAPI, ainsi qu’à son résultat. Le pourcentage n’était, quoi qu’il en soit, pas un argument suffisant en tant que tel pour considérer que la dérogation était admissible ou non.

S’agissant du deuxième grief de la recourante relative à l’application rétroactive de la LGZD, celui-ci était infondé. Ses arguments seront repris en tant que de besoin dans la partie en droit.

Le bâtiment 19 devait permettre la création de soixante logements sociaux. La copropriété avait bénéficié de ce projet, puisqu’elle avait pu échapper à son obligation de compensation au sens de l’art. 4 A al. 5 LGZD et ne construire que des logements non soumis à l’art. 4 A al. 1 LGZD. Le projet litigieux faisait en effet office de compensation par la création de nombreux logements d’utilité publique (ci-après : LUP). Le bâtiment 17 était tel qu’il était à ce jour, grâce au transfert de LUP sur la parcelle de la fondation. Il était dès lors regrettable de la part des copropriétaires d’un bâtiment déjà construit, contre lequel la fondation n’avait d’ailleurs pas recouru, de contester la création de nouveaux logements sociaux. Cette attitude démontrait la volonté de la recourante de bloquer le projet par principe.

16) Par réponse du 9 juin 2015, le département a conclu au rejet du recours.

Même si le TAPI devait avoir effectué un calcul erroné de l’excédent de SBP, il n’en demeurait pas moins que le dépassement du gabarit en tant que tel demeurait dans les dimensions qui étaient largement admises par la jurisprudence. L’application de l’art. 2 A al. 2 LGZD, entré en vigueur le 15 mars 2014, était applicable. Cette nouvelle disposition transposait la volonté du législateur qui ancrait ainsi les moyens à mettre en œuvre afin de faire face à la crise du logement qui sévissait à Genève. Il introduisait un nouvel instrument pour l’aménagement du territoire, à savoir l’ID. La disposition transitoire ne faisait état que de l’IUS. À défaut de dispositions analogues pour l’ID, celui-ci devait s’appliquer au cas d’espèce, dans la mesure où la jurisprudence reconnaissait de manière constante que la loi applicable, en droit de la construction, était celle en vigueur au moment où statuait la dernière instance saisie du litige. Le PLQ se devait donc de respecter, selon les objectifs actuels de densification et d’aménagement du territoire, un ID minimal de 1,8 conformément à l’article litigieux. Le projet présentait un ID de 1,85. Il se situait donc à peine au-dessus du minimum préconisé actuellement. Il s’agissait d’un indice quant à la conformité du projet dans le but de réaliser l’objectif d’importance publique majeure de création de logements.

Le PLQ était vieux de onze ans et se situait déjà à plus des deux tiers de sa vie. Qui plus était, trois des quatre bâtiments majeurs étaient déjà réalisés, les deux derniers, situés au nord, étant manifestement plus petits. L’importance du PLQ devait donc être relativisée. La création d’un étage de plus, permettant la réalisation de treize logements supplémentaires d’utilité publique, devait être considérée comme relevant d’un motif d’intérêt général, justifiant que le projet s’écarte du PLQ. Ledit projet répondait par ailleurs aux objectifs du plan directeur cantonal 2030 (ci-après : PDC 2030), lequel aurait pour effet de densifier des secteurs déjà bâtis, contribuant à une utilisation optimale des zones à bâtir et du sol, et d’augmenter le parc de logements dont une part appréciable de logements à caractère social.

Le bâtiment querellé avait un gabarit de hauteur de 14,84 m, bien inférieur au gabarit autorisé en zone de développement 3, qui s’élevait à 21 m à la corniche, voire 27 m à certaines conditions. L’harmonie urbanistique de la rue était conservée de chaque côté, ce que la CA avait confirmé.

17) Par réplique du 8 juillet 2015, la recourante a sollicité la restitution de l’effet suspensif partiel au recours, limitée à l’autorisation de construire un quatrième étage sur le bâtiment objet de l’autorisation DD 105’508-3. Pour le surplus, elle a persisté dans ses conclusions.

18) Par observations sur effet suspensif du 16 juillet 2015, le département s’en est rapporté à justice, tout en relevant que la conclusion semblait tardive.

19) Le 20 juillet 2015, la fondation a conclu à l’irrecevabilité de la conclusion sur effet suspensif, tout en précisant qu’elle n’envisageait de débuter prochainement les travaux que pour le R+3, cette construction n’étant pas contestée par la recourante. Pour le surplus, elle a persisté dans ses précédentes conclusions.

20) Le 21 juillet 2015, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur effet suspensif.

21) Par courrier du 14 août 2015, la chambre de céans a informé les parties que la cause était aussi gardée à juger sur le fond.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable sur ces points (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 149 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 - LCI - L 5 05).

 

L’assemblée des copropriétaires a décidé le 27 mars 2014 d’interjeter recours en cas de délivrance d’une autorisation de construire un immeuble de quatre étages sur rez, ou plus, avec des entrées situées du côté 17 de la rue. La présente procédure consistant en la construction d’un immeuble sur la parcelle voisine de celle de la recourante, qui pourrait avoir une incidence tant sur les parties communes de la copropriété que sur les parties exclusives de l’immeuble des copropriétaires, la communauté a la qualité pour recourir au sens de l’art. 60 al. 1 let. b LPA (art. 712l al. 2 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 - CC - RS 210 ; ATA/369/2005 du 24 mai 2005).

2) a. La recourante fait grief au TAPI d’avoir mal établi les faits. Elle critique les calculs effectués par celui-ci pour déterminer les augmentations de la SBP et de l’IUS prévues par le projet litigieux par rapport au PLQ.

b. Les parties ne contestent ni le chiffre retenu au titre de la SBP prévue par le PLQ (3'581 m2) ni celui prévu par le projet (4'893 m2). Seule la relation entre les deux, singulièrement la proportion d’augmentation, est contestée.

Il ressort du jugement querellé le calcul suivant : « 4'893 m2 – 3’581 m2 = 1'312 m2 / 48,93 m2 = 26 %. Si l’on inverse ce calcul comme le fait la recourante, la proportion du dépassement est de 1'312 m2 / 35,81 m2 = 36,63 % », le TAPI fondant la suite de son raisonnement sur une augmentation de la SBP de 26 % et non sur les 36 % allégués par la recourante.

En l’espèce, il est exact que la différence entre les deux SBP s’élève à 1'312 m2. Toutefois pour déterminer le pourcentage du dépassement, la différence de 1'312 m2 doit être comparée à la SBP du PLQ et non à celle du projet comme l’a fait, à tort, le TAPI. En conséquence, la proportion du dépassement des SBP est de 36,63 %.

De même, l’IUS du projet s’élève à 1,7. Comparé à l’IUS du PLQ de 1,25, l’augmentation s’élève à 36 % (1,7 – 1,25 = 0,45 ; 0,45 : 1,25 = 36 %).

Le grief de mauvais établissement des faits est fondé.

Autre est la question des conséquences à en tirer, qui sera analysée ci-après.

3) Dans un second grief la recourante critique l’application, par le TAPI, de l’art. 2A al. 2 LGZD, entré en vigueur le 15 mars 2014 au motif qu’il ne pourrait pas trouver application de façon rétroactive alors que le TAPI a conforté son raisonnement par l’argument selon lequel l’ID minimal de 1,8, prévu dans ladite disposition devait impérativement être respecté.

a. Selon ladite disposition, un indice de densité minimal est applicable en zone de développement. Il est de 1,8 en zone de développement 3 (art. 2A al. 2 let. b LGZD). Les PLQ ou les autorisations de construire délivrées en application de l’art. 2 al. 2 doivent respecter cet indice de densité minimal. Ils peuvent toutefois s’en écarter si des raisons de qualité urbanistique ou architecturale le justifient, en particulier dans le cadre d’un plan directeur de quartier ou d’un concours au sens des let. d et e de cette même disposition, ou si la protection du patrimoine ou un autre motif d’intérêt général l’impose (art. 2A al. 3 LGZD).

b. Se pose en conséquence la question de l’application de l’ID dans le cas d’espèce, étant rappelé que la modification légale est intervenue après l’adoption du PLQ, le 27 octobre 2004, mais avant la délivrance de l’autorisation de construire, le 25 avril 2014, que la recourante fait état des travaux préparatoires selon lesquels le législateur n’aurait pas voulu d’application rétroactive dudit indice, que la disposition transitoire de l’art. 2 al. 5 LGZD ne fait mention que de l’IUS et que les intimés soutiennent que l’ID est applicable au présent projet.

Cette question souffrira toutefois de rester ouverte dès lors que même si l’ID ne devait pas trouver application dans le cas d’espèce, comme le demande la recourante, la solution ne serait pas différente pour les motifs qui suivent.

4) La recourante fait grief à l’intimé d’avoir autorisé un IUS de 1,7 alors que l’IUS retenu dans le PLQ n’était que de 1,25.

a. Selon l’art. 2A al. 4 et 5 LGZD, adopté le 16 mai 2013, mais entré en vigueur le 15 mars 2014, soit avant la délivrance de l’autorisation de construire litigieuse, l’indice d’utilisation du sol est le rapport entre la surface brute de plancher destinée aux logements et aux activités et la surface totale des terrains, y compris les surfaces de circulation externe et de raccordement et les surfaces d’espace et d’équipements publics lorsqu’elles donnent des droits à bâtir. Cet indice est utilisé en particulier dans les PLQ ou les autorisations de construire délivrées en application de l’art. 2 al. 2 (art. 2A al. 4 LGZD). Sont réservés les indices d’utilisation du sol fixés par les plans d’affectation du sol adoptés avant le 16 mai 2013 ou par les projets de plans d’affectation du sol mis à l’enquête publique avant cette date (art. 2A al. 5 LGZD).

b. Les projets de construction établis selon les normes d’une zone de développement doivent être conformes aux PLQ adoptés en application de l’art. 2 LGZD. Toutefois, lors du contrôle de conformité des requêtes en autorisation de construire avec le PLQ, le département peut admettre que le projet s’écarte du plan, pour autant que l’IUS et l’ID soient respectés et, dans la mesure où la mise au point technique du dossier ou un autre motif d’intérêt général, notamment la construction de logements supplémentaires, le justifie (art. 3 al. 5 LGZD depuis le 21 mars 2015 mais art. 3 al. 4 LGZD précédemment).

c. Selon l’art. 12 al. 3 LGZD, dans les zones de développement 2 et 3, la surélévation d’immeubles en vue de permettre la construction de logements supplémentaires, en application des normes introduites le 22 février 2008 dans la LCI, est également constitutive d’un motif d’intérêt général justifiant que le projet de construction s'écarte d’un PLQ adopté avant le 24 novembre 2009.

d. Selon la doctrine et la jurisprudence, en droit de la construction, la loi applicable est celle en vigueur au moment où statue la dernière instance saisie du litige. Si l’affaire est traitée par plusieurs autorités, sont déterminantes en principe les prescriptions en force lorsque la dernière juridiction statue. La jurisprudence admet ainsi d’une façon générale qu’une demande d’autorisation de bâtir déposée sous l’empire du droit ancien est examinée en fonction des dispositions en vigueur au moment où l’autorité statue sur cette demande, même si aucune disposition légale ou réglementaire ne le prévoit ; les particuliers doivent en effet toujours s’attendre à un changement de réglementation (ATF 101 Ib 299 ; ATA/56/2013 du 29 janvier 2013). En statuant sur une demande d’autorisation suivant des prescriptions devenues obligatoires après son dépôt, le juge ne tombe pas dans l’arbitraire, ni ne viole une disposition impérative ou la garantie de la propriété (ATF 107 1b 138 ; ATA/653/2014 du 19 août 2014 ; ATA/56/2013 précité ; ATA/22/2009 du 13 janvier 2009 ; ATA/792/2004 du 19 octobre 2004 ; ATA/541/2002 du 10 septembre 2002 : Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/ Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. I, Les fondements, 2012, p. 194-195).

e. En l’espèce, le PLQ a été adopté avant le 16 mai 2013. À teneur de l’art. 2A al. 5 LCI actuellement en vigueur le PLQ est réservé. En conséquence, il doit être tenu compte de l’IUS du PLQ de 1,25.

Toutefois, le PLQ a été adopté en 2004, soit avant le 24 novembre 2009. L’art. 27 LCI a été introduit le 22 février 2008. Le projet litigieux consiste en une surélévation d’immeuble en vue de permettre la construction d’un quatrième étage de logements, en application de l’art. 27 LCI. La surélévation projetée est en conséquence constitutive d’un motif d’intérêt général justifiant que le projet de construction s'écarte du PLQ.

La surélévation du bâtiment 19, en vue de permettre la construction de logements supplémentaires, en application des normes introduites le 22 février 2008 dans la LCI, peut dès lors être autorisée quand bien même l’IUS du projet à 1,7 est plus élevé que l’IUS de 1,25 du PLQ.

Le grief est infondé.

5) Reste à déterminer si la modification du projet reste conforme à la LGZD, ce que le recourant conteste. Selon lui, ladite dérogation au PLQ n’est pas mineure.

Selon l’art. 3 al. 5 LGZD, lors du contrôle de conformité de l’autorisation au PLQ, le département peut admettre que le projet s’écarte du plan dans la mesure où la mise au point technique du dossier ou un autre motif d’intérêt général le justifie.

Dans sa teneur antérieure au 29 mai 2004, cette disposition permettait au département d’admettre qu’un projet de construction s’écarte « légèrement » du PLQ. Selon la jurisprudence rendue à cette époque, le déplacement d’un bâtiment d’un mètre correspondait à une telle modification mineure (ATA M. du 12 janvier 1993), ainsi que la création d’un parking souterrain en raison de l’intérêt public prépondérant à assurer une circulation fluide et offrir aux habitants des immeubles concernés la possibilité de se parquer (ATA DTP du 3 octobre 1990). Une emprise supplémentaire de 100 m2 de parking souterrain n’a pas été considérée comme une modification mineure, mais comme un changement admissible (ATA/559/2000 du 14 septembre 2000). L’agrandissement de 159 m2 de la surface d’un attique a été considéré comme une dérogation mineure (ATA/298/2001 du 8 mai 2001).

La nouvelle teneur de la disposition précitée n’a pas modifié fondamentalement la marge d’appréciation laissée au département. Selon les travaux préparatoires relatifs à la modification législative intervenue, seules des modifications peu importantes, remplissant en outre les autres conditions prévues par cette disposition, peuvent être autorisées (MGC 2003-2004/VII d/31 1835). L’article en cause doit s’interpréter de façon à éviter que le PLQ ne perde de sa substance. En acceptant par le biais d’une autorisation de construire une modification importante du PLQ, la procédure d’adoption des plans d’affectation, telle que prévue par le droit fédéral de l’aménagement du territoire, ne serait pas respectée (ATA/543/2011 du 30 août 2011 ; ATA/143/2011 du 8 mars 2011 ; ATA/7/2011 du 11 janvier 2011 ; ATA/505/2007 du 9 octobre 2007).

Seules des modifications peu importantes peuvent ainsi être autorisées en dérogation à un PLQ, comme continue de l’illustrer la jurisprudence rendue sous l’empire de l’actuel art. 3 al. 5 LGZD. La juridiction de céans a considéré que constituaient des modifications mineures, notamment, le changement d’implantation d’un parking souterrain, ainsi que le changement d’accès en résultant (ATA/463/2011 précité), la création d’un étage supplémentaire comportant deux logements et induisant un dépassement du gabarit prévu par le PLQ de 2,70 m dans le cadre de la réalisation d’une construction à haut standard énergétique (ATA/583/2010 du 31 août 2010), un écart de SBP de 3 %, qualifié de peu important, compte tenu de la SBP totale du projet en cause (ATA/505/2007 précité). La chambre administrative a souligné en cette occasion que la mesure technique des SBP revêtait un caractère imprécis, l’expérience ayant montré que des différences de quelques pour-cent n’étaient pas inhabituelles en raison de la complexité des mesures (audition du directeur de l’aménagement du territoire lors de l’adoption du bonus lié au standard Minergie, MGC 2003-2004/X A 5064). Plus récemment, un projet comportant un attique de 51,50 m2 affecté à une cuisine, un séjour et une véranda non chauffée et n’excédant pas les 10 % de SBP supplémentaires autorisés en application du bonus Minergie a été considéré comme une modification mineure du PLQ (ATA/55/2012 du 24 janvier 2012).

Le déplacement de cinq places de parc, la transformation de six logements traversants en non traversants, la création de rez-de-chaussée « morts » entraînant le rehaussement de 1,40 m des bâtiments - sans toutefois que ceux-ci ne dépassent l’altitude maximale prévue par le plan - et enfin, le changement de place de la conduite de désenfumage ont été jugées d’importance mineure (ATA/315/2015 du 31 mars 2015, actuellement pendant devant le Tribunal fédéral).

6) En l’espèce, il ressort de la jurisprudence que le taux de dépassement de la SBP est un critère, parmi d’autres, à prendre en considération lors de l’appréciation de la modification apportée par un projet au PLQ.

Dans le projet concerné, la modification porte sur un seul étage, qui permettra d’obtenir treize logements d’utilité publique supplémentaires. L’entier de l’immeuble est consacré à de tels logements. Cette modification s’inscrit dans la volonté exprimée par le législateur cantonal de pouvoir procéder à la surélévation de certains bâtiments. Il s’inscrit aussi dans les objectifs du PDC 2030 adopté par le Grand Conseil le 20 septembre 2013 et approuvé par le Conseil fédéral le 29 avril 2015. Il s’inscrit de même dans la ligne des modifications voulues par le peuple suisse lors de l’adoption des modifications de loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700), notamment l’art. 3 al. 3 let a bis LAT, préconisant que les territoires réservés à l’habitat seront aménagés selon les besoins de la population et leur étendue limitée, des mesures devant être prises afin d’assurer une meilleure utilisation des surfaces sous-utilisées ou des possibilités de densification des surfaces de l’habitat.

Par ailleurs, le PLQ n’a pas été adopté récemment puisqu’il date de 2004, soit de plus de dix ans. L’extension projetée permettra par ailleurs de diminuer les coûts par pièce/an des logements d’ores et déjà prévus et non contestés. Les gabarits proposés s’intègrent parfaitement avec les immeubles voisins, l’immeuble contesté s’élevant à 14,84 m avec la surélévation, alors que la corniche de la superstructure technique du bâtiment 17, propriété de la recourante, se dresse à 14,88 m et que celle de bâtiment 15 se monte à 14,75 m. L’harmonie urbanistique est ainsi conservée. Les gabarits du bâtiment 19 respectent largement les gabarits légaux, notamment le maximum de 21 m, voire 27 m à certaines conditions prévues pour ladite zone (art. 27 al. 6 LCI). Le dépassement du gabarit en tant que tel, entre le PLQ et le projet, est ainsi minime. De surcroît, la fondation a produit une étude indiquant que les villas adjacentes ou, à terme, les futurs immeubles du chemin du Coin-de-Terre (n° 21 A et 21 B) ne seraient pas lésés par l’augmentation du gabarit.

De surcroît, les préavis sont favorables, y compris celui de la CA, composée de spécialistes, et celui du PAR.

Enfin, il existe un intérêt public indéniable à la construction de logements, compte tenu de la pénurie actuelle, notamment en matière de logements à caractère social.

Compte tenu de l’ensemble des circonstances, le département n’a pas abusé de son pouvoir d’appréciation en considérant que les conditions de l’art. 3 al. 5 LGZD étaient remplies et en délivrant l’autorisation contestée.

7) La recourante se réfère à trois arrêts de la chambre administrative où les modifications auraient été jugées importantes.

a. L’ATA/39/2014 du 21 janvier 2014 traitait d’une surélévation de deux étages. Le projet litigieux prévoyait une construction de gabarit R+7, soit une construction de huit niveaux alors que le PLQ prévoyait des constructions de gabarit R+5, soit six niveaux, la surélévation entrainant une augmentation de 40 % des SBP qui passaient d'un IUS de 1,15 à 1,6, le nombre de niveaux étant augmenté quant à lui de 35 %. Bien que les SBP du projet pouvaient être augmentées de 10 % au vu de sa soumission aux normes de haute performance énergétique, la chambre administrative a jugé qu’une augmentation totale de 40 % des SBP dépassait « largement » la dérogation mineure au PLQ.

b. L’ATA/515/2013 du 27 août 2013 portait sur une demande définitive d’autorisation de construire dans le but de surélever de deux étages deux immeubles, afin d’aménager huit logements au total, représentant une SBP de 932 m2. Ces immeubles étaient inclus dans un ensemble érigé dans les années 1950, et pour lequel le PLQ prévoyait plusieurs restrictions très spécifiques.

c. L’ATA/1017/2014 du 16 décembre 2014 a précisé qu’un projet de construction, dont la SBP dépasse de près de 100 % celle résultant du PLQ, ne constitue par une modification mineure, mais une dérogation illégale à cet instrument.

Ces arrêts ne sont toutefois pas de nature à modifier l’appréciation de la chambre de céans. Le premier ATA porte sur une problématique quelque peu différente s’agissant de deux étages et non d’un seul, ce qui modifie l’application de la loi sur les surélévations, pertinente dans la présente procédure.

Le second arrêt, outre qu’il porte aussi sur deux étages, se situait dans un ensemble architectural précis.

Enfin, 36 % n’avoisinant pas les 100 % évoqués dans le dernier arrêt, celui-ci n’est pas pertinent.

8) En tout point mal fondé, le recours sera rejeté.

9) Le prononcé du présent arrêt rend la demande de restitution de l’effet suspensif sans objet.

10) Un émolument de CHF 1’500.- sera mis à la charge de la copropriété (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 2'000.- sera allouée à la fondation qui y a conclu (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 5 mai 2015 par la Communauté de la copropriété par étage de l'immeuble 17, 17a, 17b, 17c rue Edmond-Vaucher à Vernier contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 mars 2015 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de la Communauté de la copropriété par étage de l'immeuble 17, 17a, 17b, 17c rue Edmond-Vaucher à Vernier un émolument de CHF 1’500.- ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 2'000.- à la Fondation HBM Emile-Dupont, à charge de la Communauté de la copropriété par étage de l'immeuble 17, 17a, 17b, 17c rue Edmond-Vaucher à Vernier ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de croit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pierre Gabus, avocat de la recourante, au département de l'aménagement, du logement et de l'énergie - oac, à la Fondation HBM Emile-Dupont, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :