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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1080/2022

ATA/28/2023 du 17.01.2023 ( FPUBL ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1080/2022-FPUBL ATA/28/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 janvier 2023

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Malika Salem Thevenoz, avocate

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE



EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______1961, a occupé la fonction de
maître-assistant dès le 1er juin 1994 puis de maître d'enseignement et de recherche (ci-après : MER) au sein du département B______ (ci-après : la faculté) de l'université de Genève (ci-après : l’université) dès le 1er février 2000.

L’intéressé a vu son mandat de MER régulièrement renouvelé, la dernière fois pour la période allant du 1er août 2016 au 31 juillet 2021.

Selon son cahier des charges, ses activités représentaient pour 40 % de la recherche, pour 40 % de l’enseignement et pour 20 % de la gestion.

2) Le 23 novembre 2020, le professeur C______, directeur du département B______ (ci-après : le directeur du département), a procédé à l’entretien d'évaluation de M. A______ dans le cadre de la procédure de renouvellement de son mandat de MER, dont l'échéance était fixée au 31 juillet 2021.

Cette évaluation était très positive concernant les activités d'enseignement. Pour la recherche, l'évaluation retenait le critère « très bon » pour la contribution à l'activité de recherche de l'entité et l'insertion dans les réseaux de collaboration, et celui de « bon » pour les activités de publication/diffusion des productions scientifiques. La compétence « Gestion d'équipe et capacité d'encadrement » était laissée sans critère d'évaluation, au motif, relevé par le directeur : « there seem some problems to be taken care of in regard of how to supervise
co-workers. A very clear complaint has been made that needs to be well reflected now, so that adequate changes maybe implemented, if necessary, and similar problems will not occur anymore in the future. Not being judged at present ».

Il était indiqué que le renouvellement était envisagé aux conditions
suivantes : « Adjustements in team management – to be determinated, as soon as all information will be available regarding at least one recent problematic event in the laboratory (know to HR) ».

M. A______ a pour sa part notamment relevé, concernant la plainte mentionnée, qu’il avait été surpris par la soudaineté de la démarche et attristé que la personne n’ait pas souhaité utiliser les ressources à disposition à l’université pour tenter de résoudre ce qui devait avoir été vécu comme un grave conflit. S’il existait une formation pour améliorer sa gestion d’équipe, il serait heureux de pouvoir la suivre.

3) La plainte à laquelle il était fait référence dans l’évaluation était celle de Madame D______ qui, dans sa lettre de démission du 27 octobre 2020 du poste de laborantine qu'elle occupait au sein du laboratoire de M. A______, a fait état de comportements inadaptés de sa part à son égard qui l'avaient atteinte dans sa santé et la conduisaient à mettre un terme à leur collaboration.

4) Par courriel du 26 février 2021 adressé à une responsable des ressources humaines (ci-après : RH) de l’université, ayant pour objet « problèmes de gestion d’équipe », M. A______ a indiqué que depuis plusieurs mois, une situation qu’il qualifiait de toxique s’était installée dans son laboratoire. Les membres de son équipe étaient épuisés, démotivés et certains étaient peut-être en souffrance psychique. Il avait l’impression de ne plus arriver à répondre à leur attente et demandait s’il existait à l’université un service qui pourrait les aider.

5) a. Dans une note conjointe du 1er mars 2021 adressée au rectorat, le professeur E______, doyen de la faculté (ci-après : le doyen), et Madame F______, directrice de la division des ressources humaines (ci-après : la directrice des RH), ont fait état de plusieurs témoignages concordants et hautement préoccupants de collaborateurs et d'étudiants placés sous la responsabilité de
M. A______ concernant son comportement à leur égard. Il était en particulier question de rapports de travail toxiques générés par des remarques désobligeantes, de pressions extrêmes, de même que de fréquents hurlements, d'humiliations répétées ayant entraîné la dégradation de l'état de santé de plusieurs membres de son équipe. Il était demandé au rectorat d'ouvrir une procédure d'investigation à son encontre et de prononcer une « mesure d'éloignement immédiate » pour protéger les membres de l’équipe de M. A______.

b. Une « note récapitulative » était jointe, laquelle résumait ce qui ressortait de neuf entretiens menés auprès de différents membres de l’équipe de M. A______. Il était fait état de manière concordante de rapports de travail toxiques, générés par des remarques désobligeantes, une pression extrême, des hurlements fréquents, des humiliations répétées, des collaboratrices et collaborateurs souvent en pleurs en sortant du bureau de M. A______, tout ceci ayant entraîné la dégradation de l’état de santé de plusieurs collaboratrices et collaborateurs, et faisant craindre un climat généralisé de harcèlement moral. Dans les douze derniers mois, un étudiant et une étudiante en master en biologie et en « Master of advanced studies » (ci-après : MAS) de microbiologie avaient quitté le laboratoire de M. A______ en cours d’études. Au moins un doctorant était également parti en cours de thèse plusieurs années auparavant. Les témoins mentionnaient des dégradations de l’état de santé des membres de l’équipe. Deux personnes étaient alors en arrêt maladie.

Lors du premier confinement dû au Covid-19 en mars 2020, les personnes interrogées avaient toutes confirmé que M. A______ avait établi ses propres règles, mentionnant de façon explicite qu’il ne voulait pas que les membres de son équipe suivent les règles du Conseil fédéral ni du recteur ou du doyen et leur avait demandé de venir chaque jour au travail durant toute la période. Il leur avait dit de mentir sur le port du masque pendant les réunions dans une salle qu’ils savaient trop petite pour respecter des distances de sécurité.

Plusieurs personnes avaient décrit un cercle vicieux fréquent lors des entretiens individuels avec M. A______ : si des résultats négatifs avaient été obtenus dans les expériences, il critiquait ce qu’ils avaient fait, puis critiquait leur compétence, leur donnait un ultimatum et menaçait enfin de les licencier.

6) Le 3 mars 2021, M. A______ a adressé un courriel à la directrice des RH de teneur similaire à celui adressé le 26 février précédent à une responsable RH.

Cette dernière lui a répondu qu’elle devait rencontrer le recteur prochainement et lui proposait d’attendre cette échéance.

7) Par courrier du 5 mars 2021, remis en mains propres lors d’un entretien en présence du professeur G______, recteur de l’université (ci-après : le recteur), du doyen et de la directrice des RH, le rectorat a informé M. A______ de l'ouverture d'une procédure d'investigation à son encontre en application de l'art. 70 al. 4 (recte : al. 3) du règlement sur le personnel de l'université du 17 mars 2009
(ci-après : RPers) suite au contenu préoccupant de la lettre de démission de
Mme D______ et à des entretiens avec plusieurs membres de son équipe et étudiants entre décembre 2020 et février 2021. Il lui était fait injonction de ne plus se présenter à sa place de travail et de limiter ses interactions avec les membres de son équipe par courriels ou par « Zoom » à des questions strictement professionnelles pendant la durée de l'enquête.

À cette occasion lui ont été remises la note conjointe du 1er mars 2021 et son annexe ainsi qu’une copie de la lettre de démission de Mme D______.

8) M. A______ a fait l’objet d’arrêts de travail pour maladie à 100 % du 8 mars au 25 mai 2021, à 50 % du 26 mai au 27 septembre 2021, à 100 % du 28 septembre au 17 novembre 2021 et à 50 % dès le 18 décembre 2021.

9) a. Le 19 mars 2021, M. A______ a sollicité une copie de l’ensemble de son dossier personnel ainsi que tous les éléments rassemblés dans le cadre de la procédure d’investigation, soit notamment les comptes-rendus des auditions des éventuels plaignants et témoins.

Il a également relevé que son droit d’être entendu aurait dû être respecté avant que ne lui soit signifiées l’ouverture de la procédure d’investigation et la mesure d’éloignement.

b. Le 22 mars 2021, la division des RH a transmis par courriel à M. A______ un lien et un mot de passe lui permettant d’accéder à son dossier personnel.

c. Par courrier du 24 mars 2021, la division des RH lui a indiqué qu’il ne pouvait être fait droit à sa demande de remise des éléments rassemblés dans le cadre des démarches préliminaires, notamment s’agissant des entretiens qui avaient été menés, dès lors qu’ils l’avaient été avec la garantie de la confidentialité.

Les craintes exprimées à son égard par les différentes personnes entendues justifiaient la mesure d’éloignement.

10) Le 23 mars 2021, M. A______ a été entendu, assisté de son conseil, par l’enquêteur nommé dans le cadre de la procédure d’investigation (ci-après : l'enquêteur).

Il a remis à cette occasion une note de huit pages rappelant son cursus, ses activités au sein de l’université et répondant aux griefs qui lui étaient faits.

11) Dans le cadre de la procédure précitée, l’enquêteur a par la suite entendu onze personnes entre le 23 mars et le 1er avril 2021, à savoir Mmes D______, H______, I______ et J______ ainsi que MM. K______, L______, M______, N______, O______ (par vidéo-conférence), P______ et Q______.

12) a. Le 12 avril 2021, la commission de renouvellement des mandats des collaborateurs de l'enseignement et de la recherche de la faculté a recommandé à l'unanimité le renouvellement du mandat de MER de M. A______. L'évaluation était très positive sous une réserve : il devait clairement améliorer son activité de gestion dans les années à venir, particulièrement au sein de son équipe de recherche.

b. Le collège des professeurs de la faculté a ratifié cette proposition lors de sa séance du 19 avril 2021.

13) Le 26 avril 2021, M. A______ a sollicité de l’enquêteur l’audition de cinq témoins supplémentaires, sa ré-audition ainsi que la fixation d'un délai pour produire des pièces supplémentaires.

14) Le 29 avril 2021, l'enquêteur a fait droit à l'intégralité de ces requêtes et a procédé à l’audition du doyen, du Professeur C______, de Monsieur R______ et de Mesdames S______ et T______.

15) Le 10 mai 2021, M. A______ a produit un chargé contenant 101 pièces.

16) Le 18 mai 2021, l’enquêteur a procédé à la seconde audition de M. A______, en présence de son conseil.

17) Par courrier du 19 mai 2021, l’enquêteur a informé M. A______ qu’il estimait être arrivé au terme de son enquête.

18) Le 21 juin 2021, M. A______ a remis ses observations écrites à l’enquêteur, relevant qu’il n’avait commis aucune atteinte à la personnalité des membres de son laboratoire.

Il avait été choqué en découvrant les procès-verbaux d’auditions des membres de son laboratoire et des reproches qu’ils formulaient à son encontre, provoquant chez lui un traumatisme attesté par son thérapeute. Ces faits étaient pour la plupart totalement mensongers, comme en attestaient les pièces de la procédure, ou sortis de leur contexte. Un tel acharnement portait atteinte à sa personnalité.

S’il pouvait admettre un problème de communication avec les membres de son laboratoire, et qu’il avait pu être maladroit dans les remarques pourtant toujours fondées qu’il avait formulées sur leur travail, il contestait tous les griefs de manipulation, d’humiliation, de propos racistes, de propos grossiers et de propos sexistes qu’on lui prêtait. Les accusations à son encontre n’étaient pas établies avec une vraisemblance confinant à la certitude.

Il a pour le surplus repris les procès-verbaux d’audition, en relevant ce qui était, à ses yeux, erroné ou exact.

19) Le 6 juillet 2021, M. A______ a formé une plainte pénale à l’encontre de Mmes D______, H______ et I______ ainsi que MM. L______, K______, N______ et M______ des chefs de diffamation, subsidiairement lésions corporelles simples.

20) Par courrier du 16 juillet 2021, le recteur a informé M. A______ que le rectorat n'était pas en mesure de se prononcer sur le renouvellement de son mandat tant qu'il n'avait pas reçu le rapport d'investigation, de sorte que le terme dudit mandat était prolongé jusqu'au 31 octobre 2021.

21) L'enquêteur a rendu son rapport à l’université le 21 juillet 2021.

a. Il s’était appuyé, outre les procès-verbaux d’auditions, sur un document écrit remis par M. A______ lors de sa première audition, sur les 105 pièces qu’il avait produites, ainsi que sur quelques pièces déposées par les témoins. La réception des pièces de M. A______ uniquement après les auditions de l’instruction complémentaire, n’avait eu aucun impact sur la procédure.

La plupart des éléments factuels ressortant des témoignages avaient été constatés de façon concordante par plusieurs témoins et présentés d’une façon personnelle qui ne donnait pas à penser à une préparation collective des auditions ni à douter de l’honnêteté et de la crédibilité des témoins entendus. Si les déclarations de M. A______ étaient importantes, elles devaient être mises en balance avec la multitude de témoignages concordants qui contredisaient sa vision sur plusieurs points.

b. Si ni les témoignages ni les pièces au dossier ne permettaient d’établir que
M. A______ s’était fait l’auteur de harcèlement psychologique à l’égard d’une personne en particulier, les témoins avaient évoqué une ambiance de travail délétère et un comportement général de l’intéressé nuisant à ses collaborateurs. Selon les témoins, les victimes des comportements de M. A______ changeaient régulièrement et de façon arbitraire. Mme H______ avait constaté un certain acharnement à l’égard de Mme D______, souvent stigmatisée sur le plan professionnel et personnel, ce qui ressortait également d’autres témoignages. La condition de régularité faisait toutefois défaut à son égard pour reconnaître l’existence de harcèlement psychologique.

Le fait que les propos tenus par M. A______ à l’égard de Mme H______ l’aient été sur le ton de la plaisanterie n’enlevait rien à leur caractère discriminant et donc à l’application de l’art. 4 de la loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes du 24 mars 1995 (Loi sur l’égalité, LEg - RS 151.1). Les propos tenus se rapportaient au fait que, étant de sexe féminin, elle devait se comporter d’une façon déterminée. Il ressortait du témoignage de Mme H______ qu’elle avait été atteinte dans sa dignité de femme par les propos en question qui, même d’une gravité moindre, avaient participé à son mal-être au travail.

Au regard des témoignages, il existait de nombreuses atteintes à la personnalité, parfois graves, ayant entraîné des dommages à l’intégrité psychique de plusieurs collaborateurs ou étudiants ayant travaillé dans le laboratoire de M. A______. Si l’enquêteur n’était pas en mesure de déterminer si c’était à dessein ou non que celui-ci s’était comporté comme il l’avait fait, il n’était en tout cas pas convaincu par la position de M. A______ selon laquelle il n’aurait découvert l’ampleur des problèmes qu’au travers des documents produits dans le cadre de l’ouverture de l’investigation.

Il ressortait de plusieurs témoignages qu’il avait été interpellé à plusieurs reprises sur les difficultés causées par son comportement, notamment par
MM. L______, K______, M______ ou Mme D______, et l’avait modifié provisoirement avant de reprendre ses habitudes. Ces multiples violations des droits de la personnalité des membres du laboratoire avaient engendré un climat de travail globalement toxique, fait de tension permanente, de peur, entravant les personnes le subissant dans leurs libertés individuelles et leur libre arbitre. L’emprise de M. A______ sur son équipe avait été en réalité telle que la plupart des personnes travaillant pour lui avaient été placées dans l’impossibilité de réagir à ses divers agissements inadéquats. La dualité de M. A______, soulevée par plusieurs témoins, entre un côté ouvert et agréable en dehors du travail et très toxique au travail, avait par ailleurs contribué pour beaucoup au maintien du statut quo, avec l’espoir toujours présent que la situation allait un jour s’améliorer globalement. C’était ce qui expliquait que certains soient revenus volontairement travailler avec
M. A______, après avoir terminé une précédente mission.

Un exemple était illustratif d’un mélange des rôles chez M. A______, nuisible dans les rapports de travail et constituant un terreau propice aux abus constatés. Celui-ci demandait en effet aux membres de son laboratoire de s’occuper de son chat, de relever son courrier privé et de vérifier que tout se passait bien chez lui pendant ses vacances. Il avait d’ailleurs établi un planning pour l’organisation des visites à son domicile. Bien qu’interloqués par cette demande, les membres du laboratoire n’avaient pas cherché à s’y opposer, ceci alors que M. A______ ne forçait formellement personne à le faire. Chacun avait rempli cette mission, malgré la charge de travail déjà colossale. Interpellé à ce sujet, l’intéressé n’avait rien trouvé à y redire, relevant que le laboratoire était comme une famille et que dans une famille l’on s’entraidait.

c. En conclusion, bien que le harcèlement psychologique ne puisse être retenu, M. A______ s'était fait l'auteur d'atteintes graves à la personnalité de plusieurs personnes ayant collaboré avec lui, ceci au travers de comportements verbalement agressifs, d'une pression et d'un contrôle excessifs, de la violation des normes Covid-19, d'une surcharge de travail, de critiques permanentes et disproportionnées, ainsi que de propos racistes et sexistes. Ces comportements avaient eu des conséquences sur la santé psychique de plusieurs collaborateurs et un impact sur l'état général de son groupe, engendrant un climat de travail hostile. L'enquêteur mettait à cet égard en évidence l’importante souffrance et le grand désarroi qui étaient apparus dans l'attitude et les propos de la quasi intégralité des personnes entendues. En ce sens, l'absence de harcèlement psychologique au sens strict ne rendait pas moins grave l'appréciation qui pouvait être faite des manquements constatés.

Si l'impact de telles accusations pouvait effectivement être important pour
M. A______, on ne pouvait que s'étonner de la position qu'il avait défendue, à savoir que, plutôt que de prendre acte de la grande souffrance qu'il avait causée, il préférait considérer n'avoir rien à se reprocher et sous-entendre être victime d'une forme de cabale à son encontre. Une telle prise de position et cette quasi-absence de remise en question n'étaient assurément pas rassurantes quant à la suite de la collaboration entre les personnes travaillant encore dans son laboratoire et celles amenées à le faire dans le futur.

22) Le 16 août 2021, le doyen a demandé au rectorat d’étudier la possibilité de ne pas renouveler le mandat de M. A______ à l’issue de la prolongation temporaire de trois mois. À la lecture du rapport de l’enquêteur qu’il avait reçu le 8 août 2021, il constatait que de graves éléments étaient relevés « en terme de climat toxique de travail » ainsi que l’existence de nombreuses atteintes à la personnalité, parfois graves. L’intéressé n’avait ainsi pas assumé à satisfaction les activités de gestion des ressources humaines.

23) Le 17 août 2021, l’université a transmis le rapport de l’enquêteur à
M. A______.

24) Par courrier du 26 août 2021, le recteur a fait savoir à M. A______ que compte tenu des conclusions dudit rapport, l'ensemble des éléments constituant des violations graves et répétées à ses devoirs de service inscrits aux art. 20, 21
let. a et b et 23 al. 1 RPers était réalisé. Ces éléments dénotaient également son inaptitude à assumer à satisfaction des activités de gestion des ressources humaines. Les conditions d'un renouvellement telles que prévues à l'art. 157 RPers n'étant pas réalisées, le rectorat envisageait de ne pas renouveler son mandat de MER.

Il était informé qu’en application de l'art. 77 al. 3 RPers, copie du rapport d'investigation allait être communiquée aux cinq collaborateurs reconnus victimes d'une atteinte à la personnalité d'une certaine gravité.

25) Le 31 août 2021, M. A______ a répondu que le rapport d'investigation était « juridiquement inacceptable » au vu des grossières erreurs qu'il contenait, de l'appréciation excessivement partiale qu'il reflétait, sans pondération aucune et sans prise en compte de nombreuses pièces qu'il avait versées à la procédure. Une décision qui reposerait sur ledit rapport, avec la même partialité arbitraire, serait combattue en justice.

Par ailleurs, il s'opposait à ce que ledit rapport soit transmis à quiconque.

26) Le 8 septembre 2021, le recteur a confirmé la communication annoncée aux collaborateurs concernés et exerçant toujours une fonction au sein de l'université. Chacun allait recevoir une copie dans laquelle les extraits des témoignages des autres témoins seraient caviardés. Deux autres personnes qui n'étaient pas ou plus membres du personnel de l'université seraient uniquement informées des conclusions de l'enquête.

27) Le 16 septembre 2021, M. A______ s’est déterminé sur le contenu du rapport et a sollicité un rendez-vous pour évoquer sa situation.

Outre le fait que le non-renouvellement du mandat ne pouvait se baser sur la seule base de ce rapport, lequel faisait abstraction de toute pondération, reposant sur un parti pris évident et comprenant des erreurs, une telle mesure apparaissait au surplus totalement disproportionnée eu égard à la situation réelle et à son parcours académique et scientifique. Il s'agissait donc de trouver une solution à une situation extrêmement complexe qui permettrait à l'université d'éviter d'engager sa responsabilité sans pour autant anéantir son propre parcours académique.

Il était reconnu comme un scientifique rigoureux, exigeant, mais juste, et soucieux de la fiabilité des résultats scientifiques, connu pour son éthique et pour son souci de transmettre à des étudiants et collaborateurs les mêmes standards, sans lesquels la science perdait son sens. Nul ne pouvait nier qu'il s'était engagé pour soutenir ses collaborateurs dans leurs projets scientifiques, professionnels et personnels.

L'université, contrairement à ce qu'avait fait l'enquêteur, devait relire attentivement les pièces qu'il avait produites et ses observations avant de prendre toute décision. L'enquêteur était parti du postulat juridiquement inacceptable que les témoignages primaient les pièces, même lorsque les pièces démentaient les témoignages. M. A______ n'avait jamais nié la souffrance des personnes œuvrant dans son laboratoire, mais avait simplement indiqué qu'il ne pouvait accepter d'être l'unique responsable de ce mal-être. On ne pouvait exiger de sa part qu'il admette des faits qui ne s'étaient pas déroulés tels qu'expliqués par les témoins pour s'accuser d'un comportement qui n'était pas le sien. L'enquêteur ne pouvait poser le diagnostic d'une dualité dans sa personnalité, émettant de la sorte un jugement médical pour lequel il n'avait aucune compétence, dualité au demeurant démentie par des pièces et par la déposition de certains témoins. Concernant les accusations de hurlements, pressions, humiliations et remarques désobligeantes, au demeurant générales sans que ne soient évoqués d'épisodes précis, de même que de tenue de propos racistes ou sexistes, seuls des morceaux choisis de témoignages avaient été retenus en écartant de manière incompréhensible des propos qui lui étaient favorables. Les pièces produites contredisaient les conclusions de l'enquêteur quant au prétendu non-respect des normes Covid-19. Il n'y avait aucun exemple quant à la charge de travail et à la pression soi-disant imposée ; les pièces démentaient le constat de l'enquêteur.

On ne pouvait retenir à son encontre les graves griefs formulés sur la seule base de la prétendue crédibilité des personnes entendues, alors que cette crédibilité était remise en question par les pièces versées à la procédure et même par des témoignages qui ne concordaient pas, divers exemples étant cités. Si la situation était si catastrophique, elle aurait été relevée depuis longtemps par plusieurs personnes, dont ses responsables hiérarchiques. Des étudiants en maîtrise, une fois le diplôme obtenu, ne seraient à l'évidence pas revenus effectuer leur doctorat sous son mentorat.

28) Le 22 septembre 2021, le recteur a confirmé à M. A______ avoir pris connaissance de l’intégralité des pièces de la procédure, dont les 105 pièces qu’il avait produites, avant d’envisager de prononcer le non-renouvellement de son mandat.

Pour faire droit à sa demande, il lui proposait la tenue d’un entretien.

29) L’entretien susmentionné s’est tenu le 28 septembre 2021.

30) a. Par décision du 26 octobre 2021, déclarée exécutoire nonobstant opposition, le rectorat a constaté que M. A______ n'était plus en mesure d'assurer les activités de gestion d'équipe, et ce de manière immédiate et définitive. Il l'informait avoir reconnu le statut de victimes à cinq personnes, dont il donnait l'identité, une décision constatant l'existence d'une atteinte à leur personnalité allant leur être notifiée.

Sur la base du dossier, soit le rapport d'enquête et l'ensemble des pièces, il était constaté qu'il avait commis de multiples atteintes à la personnalité, non seulement graves, mais également répétées ayant entraîné des dommages à l'intégrité physique et psychique de plusieurs collaborateurs et étudiants ayant travaillé dans son laboratoire, ce par des agressions verbales multiples et répétées, la tenue de propos racistes discriminants, un non-respect des règles sanitaires en lien avec le Covid-19, des pressions excessives au travail et des paroles et attitudes humiliantes. Par son comportement, il avait généré un climat de travail toxique, fait de tensions permanentes, ainsi que de peur, et entravant les personnes le subissant dans leur liberté individuelle et leur libre arbitre. Il avait tenu des propos sexistes, embarrassants, voire grossiers et relevant du harcèlement sexuel à l'encontre d'une collaboratrice. Il n'avait pas respecté ses devoirs de service inscrits aux art. 20, 21 let. a et b, 22 let. f et 23 al. 1 RPers.

Il n'avait pas attesté d'une prise de conscience des conséquences de ses actes sur les personnes sous sa responsabilité, considérant que son comportement était à mettre en lien avec son souci d'être perfectionniste et le respect des objectifs scientifiques, des calendriers définis par les étudiants et du cahier des charges.

b. M. A______ a formé opposition auprès du rectorat le 26 novembre 2021 contre cette décision, reprenant en substance l'argumentation présentée le
16 septembre 2021.

Il a, notamment, produit des lettres de soutien, une attestation du
Docteur U______, psychiatre, du 16 juin 2021, faisant état d'un suivi à plusieurs reprises et d'un trouble psychique important lié à une situation de caractère pathogène sur son lieu de travail.

31) a. Par décision du 26 octobre 2021 également, le rectorat a décidé de ne pas renouveler le mandat de MER de M. A______ au-delà du
31 octobre 2021. Afin de respecter le délai de notification réglementaire, son mandat était toutefois prolongé au 30 avril 2022.

Les manquements répétés relevés dans la décision du rectorat du 26 octobre 2021 constituaient des violations graves des devoirs de service. M. A______ ne remplissait pas les conditions de renouvellement.

b. Le 26 novembre 2021, M. A______ a formé opposition auprès du rectorat contre cette décision, concluant principalement au renouvellement de son mandat pour une durée de cinq ans.

32) Le 29 novembre 2021, l’université a notifié à Mmes D______ et I______ ainsi qu’à MM. L______, M______ et K______ une décision de constat d’atteinte à leur personnalité.

33) Le 25 janvier 2022, M. A______ a été libéré de son obligation de travailler.

34) Par décision sur opposition du 3 mars 2022, le rectorat a confirmé la décision du 26 octobre 2021 suite à la procédure d'investigation en tant qu'elle constatait que l'attitude, les propos et les exigences de M. A______ à l'égard des membres de son équipe violaient les art. 21 let. a et b, 22 let. f et 23 al. 1 RPers et constituaient également une atteinte à la personnalité de ceux qui la subissaient. Cette décision a été déclarée exécutoire nonobstant recours.

Contrairement à ce qu’indiquait M. A______, le rapport d’enquête ne contenait pas de grossières erreurs ainsi qu’une appréciation excessivement partiale, sauf à considérer que le seul fait que l’enquêteur, sur la base de l’ensemble des pièces au dossier, n’ait pas adhéré aux explications qu’il avait fournies était constitutif d’un parti pris purement subjectif.

35) Par une autre décision du 3 mars 2022, le rectorat a confirmé la décision du 26 octobre 2021 de non-renouvellement du mandat de MER de M. A______. Le lien de confiance devant présider aux relations entre l'université, en sa qualité d'employeur, et les membres de son personnel était irrémédiablement rompu. Cette décision a été déclarée exécutoire nonobstant recours.

Compte tenu du caractère répétitif et de la durée des manquements reprochés, une mesure de renouvellement conditionnel au sens de l'art. 160 RPers ne pouvait être envisagée. La décision était conforme au principe de proportionnalité.

Le dépôt de plainte pénale de M. A______ au mois de juillet 2021, pour diffamation, à l'encontre de tous les membres de son équipe appelés à témoigner dans le cadre de la procédure d'investigation, ouverte d'office par le rectorat, finissait de convaincre qu'il n'avait aucune considération pour leur ressenti.

36) Par acte du 6 avril 2022, M. A______ a interjeté recours, enregistré sous le numéro de cause A/1080/2022, par-devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision faisant suite à la procédure d'investigation en concluant, à titre principal, à son annulation. Il devait en conséquence être dit et constaté le contraire des comportements qui lui étaient reprochés dans la décision du 3 mars 2022.

Préalablement, la jonction de la procédure devait être ordonnée avec celle faisant l'objet du recours déposé contre la seconde décision du 3 mars 2022, en rapport avec le non-renouvellement de mandat. Il sollicitait également la production des contrats de travail, cahier des charges et décomptes des jours de vacances de Mmes H______, D______ et I______ et de MM. K______, M______, L______ et N______.

Il n’avait jamais eu connaissance du rapport de la commission de renouvellement des mandats du 12 avril 2021 ni du rapport du doyen du
16 août 2021. Il sollicitait l’accès à l’entier de son dossier personnel et des éléments rassemblés par l’université dans les démarches préalables à l’ouverture de la procédure d’investigation, y compris les communications entre les personnes entendues et l’université. Il apparaissait que des échanges d’informations avaient eu lieu entre ces dernières, dès lors que la décision querellée faisait état de sa plainte pénale alors qu’il ne l’avait pas transmise à l’intimée.

Le rapport était une compilation, soigneusement sélectionnée, des déclarations lui étant défavorables. Les faits en ressortant n’étaient donc pas ceux à prendre en considération. L’enquêteur n’avait effectué aucune pondération avec les différents témoignages favorables et fait totalement abstraction des nombreuses explications et pièces qu’il avait apportées démontrant que les griefs formulés à son encontre étaient faux.

La décision querellée violait plusieurs dispositions légales et réglementaires, reflétant un excès et un abus de pouvoir d’appréciation. Elle violait également le principe de l’interdiction de l’arbitraire.

37) Par acte du 6 avril 2022 également, M. A______ a formé recours, enregistré sous le numéro de cause A/1082/2022, par-devant la chambre administrative contre la seconde décision du 3 mars 2022 suite au non-renouvellement de son mandat de MER. Au fond, il a conclu à l'annulation de cette décision et à ce qu'il soit dit que l'université devait le renouveler aux mêmes conditions pour une période de cinq ans à compter du 1er novembre 2021.

Il a sollicité l’accès aux mêmes pièces que dans son autre recours.

Tout au long de ses mandats, il n’avait jamais fait l’objet d’une plainte, d’une sanction ou d’un avertissement. Jusqu’au début du litige, il ne lui avait jamais été demandé d’améliorer son activité de gestion ni de diminuer ses exigences envers les étudiants ou les membres de son laboratoire. Il avait contribué à la renommée de l’université. Il était un scientifique reconnu, mais également une personne avenante, souriante, bienveillante et soucieuse de voir ses étudiants obtenir leur diplôme. Il était reconnu qu’il disposait de très bonnes qualités d’encadrement. La description faite par ses pairs ne correspondait donc pas à celle des décisions dont il était recours.

38) Le 13 avril 2022, l'université a conclu au rejet de toutes les requêtes de
M. A______, à l'exception de celle de la jonction des deux procédures précitées.

39) Dans ses observations du 29 avril 2022, M. A______ a persisté dans ses demandes de mesures provisionnelles.

40) Par décision du 6 mai 2022, la chambre administrative a ordonné la jonction des procédures A/1080/2022 et A/1082/2022 sous le numéro A/1080/2022, refusé d'octroyer des mesures provisionnelles et réservé le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond.

41) Dans sa réponse au fond du 9 mai 2022, l’université a conclu au rejet du recours et de l’ensemble des requêtes formées par le recourant.

Ce dernier avait été abondamment entendu tout au long de la procédure d’investigation ainsi que dans le cadre de ses observations au rectorat du
16 septembre 2021. Il avait été entendu oralement par une délégation du rectorat le 28 septembre 2021. La procédure de (non) renouvellement, tout comme celle d’investigation, s’était déroulée conformément aux prescriptions légales.

Nonobstant les dénégations du recourant, les atteintes graves et répétées à la personnalité qui lui étaient reprochées étaient établies. Ce faisant, il ne remplissait plus la condition de l’aptitude à assumer à satisfaction les activités de gestion des ressources humaines. Le lien de confiance était irrémédiablement rompu. Les décisions étaient conformes au droit.

42) Dans sa réplique du 27 juin 2022 le recourant a relevé que l’entrevue du 5 mars 2021 ne pouvait être qualifiée d’entretien à proprement parler, dès lors qu’il n’avait pas été interrogé sur les griefs articulés à son encontre.

Il était établi par les pièces qu’il avait produites que les prétendues violations des normes Covid-19 n’existaient pas. Les activités organisées pendant le confinement étaient conformes aux règles imposées par le Conseil fédéral et l’université.

Les remarques qu’il avait pu faire à M. N______ sur son travail étaient bien-fondées, dès lors qu’il ressortait de ses pièces et de certaines auditions que celui-là n’avait jamais atteint le niveau escompté. Il n’avait toutefois jamais manifesté d’animosité à son égard et avait même fait preuve de bienveillance.

Mme T______ avait indiqué ne jamais avoir eu de problème avec lui lorsqu’elle avait été stagiaire.

Le Professeur C______, qui avait assisté aux entretiens préliminaires, n’aurait pas voté pour le renouvellement de son mandat s’il avait été convaincu de la réalité des griefs articulés contre lui. Le doyen avait par ailleurs mis en avant son investissement dans le cadre de projets en Côte d’Ivoire développés par M. O______, de sorte qu’il n’était ni établi ni crédible qu’il ait tenu des propos racistes. L’audition de Mme S______ mettait en évidence le fait que MM. N______ et K______ avaient menti s’agissant de son attitude envers l’apprenti M. V______. Les explications fournies par M. K______ étaient également erronées et peu crédibles, comme l’attestaient les pièces qu’il avait produites, concernant deux autres étudiants. Quand Mme D______ s’était plainte de harcèlement, il s’en était immédiatement inquiété et lui avait indiqué les possibilités offertes, y compris la médiation, ce à quoi elle n’avait jamais répondu. Ses explications étaient fausses concernant plusieurs autres points. Il contestait tous propos racistes ou sexistes. Mme I______ et M. O______ n’avaient pas confirmé les propos prétendument racistes qu’il aurait tenus à leur encontre. Si M. L______ avait fait l’objet de réprimande, c’était parce que ses résultats n’étaient pas bons et qu’il était souvent en retard dans la restitution de ses expériences. Les griefs qu’il avait articulés à l’égard de Mme H______ s’expliquaient par des problèmes de rigueur et de documentation imprécise de son travail expérimental. Le différend qu’il avait eu avec M. N______ tenait au fait que ce dernier n’avait pas respecté un plan expérimental très détaillé et qu’il ne suivait pas les consignes sur la tenue du cahier de laboratoire.

L’apport de son dossier personnel était nécessaire pour démontrer l’absence de plainte à son égard. Il en allait de même des contrats de travail, cahier des charges et décomptes de jours de vacances pour répondre au grief de la charge excessive de travail.

43) Lors de l’audience de comparution personnelle des parties du 5 septembre 2022 :

a. Le recourant a notamment exposé qu’il avait son propre bureau et que les deux post-doctorants se partageaient un bureau. Les six ou sept autres personnes avaient chacune leur place de travail dans l’espace laboratoire. Le fonds national suisse de la recherche scientifique était le principal pourvoyeur de fonds. Il en découlait une exigence de résultats et de publications scientifiques. Ce fonds les pénalisait indirectement si les étudiants ne finissaient pas leur thèse dans les délais réglementaires. Les étudiants se mettaient également eux-mêmes la pression pour finir leur « grade » et avoir le curriculum vitae le meilleur possible. La période Covid-19 était la source de cette situation.

Il n’avait pas eu de problèmes particuliers avec Mme D______. Les seules tensions qui existaient étaient lorsqu’elle souhaitait prendre ses vacances, car il lui demandait de ne pas trop les fragmenter et de ne pas les prendre lorsque le laboratoire tournait à plein régime.

b. Les représentantes de l’université ont indiqué qu’elles ignoraient si des notes avaient été prises durant ou à l’issue des entretiens menés par la directrice des RH. Ces entretiens étaient toutefois confidentiels, de sorte que ces notes n’auraient de toute façon pas à être produites. Le rectorat avait pour unique document la note récapitulative du 1er mars 2021 pour décider de l’ouverture de la procédure d’investigation. Le recourant avait donc au accès à l’ensemble des documents soumis au rectorat.

Le doyen avait eu connaissance de l’intégralité de la procédure d’investigation. Sur cette base, il avait dû estimer qu’il avait tous les éléments nécessaires sans avoir besoin d’entendre oralement le recourant. Elles ignoraient si le Professeur C______ avait été interpellé par le doyen, mais il n’avait en tout cas pas eu accès au dossier d’investigation, même s’il avait connaissance de cette procédure. La commission facultaire chargée de renouveler le mandat de MER était composée de neuf personnes dont le Professeur C______ et la vice-doyenne, Madame W______ (ci-après : la vice-doyenne).

44) Le 26 septembre 2022, l’université a persisté dans ses conclusions, sollicitant en sus l’audition de la directrice des RH.

M. A______ avait eu accès, le 22 mars 2021, à l’intégralité de son dossier administratif. Il avait également eu accès à toutes les autres pièces pertinentes pour la résolution du litige.

45) Le même jour, M. A______ a indiqué qu’il persistait dans les demandes en production de pièces ressortant de ses écritures. Des notes ou procès-verbaux avaient forcément été établis à la suite des entretiens listés dans la note récapitulative du 1er mars 2021. Il sollicitait par ailleurs l’audition de plusieurs témoins. Était joint un chargé contenant des pièces complémentaires.

46) Le 10 octobre 2022, le recourant a renouvelé sa demande d’audition de témoins.

47) Lors de l’audience d’enquête du 14 novembre 2022 devant la chambre de céans :

a. Madame F______ a indiqué que la séance du 5 mars 2021 avait duré « pas moins d'une heure ». Aucun procès-verbal n'avait été tenu. M. A______ s'était exprimé lors de cette séance. Il était choqué d'apprendre les problèmes qu'il y avait dans son équipe et partant l'ouverture d'une procédure d'investigation. Le doyen avait un peu de retard. Avant le début de la séance, dans une discussion informelle, M. A______ avait remercié le recteur sur sa gestion de la crise Covid-19 et les mesures prises. Quand la séance avait débuté, le recteur s’était principalement exprimé. Il avait lu à M. A______ l’ensemble de la note conjointe du 1er mars 2021 et de l'ouverture de la procédure d'investigation. Il n'avait pas été demandé à M. A______ de s'exprimer immédiatement sur chacun des points reprochés. Il lui avait été dit qu'il pourrait le faire dans le cadre de la procédure d'investigation. Il avait eu la place pour s’exprimer. M. A______ avait dit être choqué. Le ton tranchait avec le début de la discussion, informelle. Cette séance l’avait marquée. M. A______ avait dit à quel point l'équipe était importante pour lui. Elle s’était rendu compte que les doléances formulées étaient difficiles à vivre pour lui. Il avait accusé physiquement le coup et quasiment fait un malaise. M. A______ avait accepté une aide psychologique apportée immédiatement.

Le rapport d'investigation devait logiquement être d'abord arrivé au rectorat avant d'être transmis au doyen.

Mme D______ n’avait pu être entendue qu'en janvier 2021 car, quand bien même sa lettre de démission remontait au mois d'octobre 2020 – elle-même n’en ayant eu connaissance que le 7 décembre 2020, après avoir pris son poste le 1er décembre précédent – elle s'était trouvée en arrêt maladie et ne supportait plus tout ce qui concernait l'université, au point même de ne plus pouvoir venir dans ses locaux. Mme D______ avait entre-temps accepté de la voir, à l'université, hors la présence du doyen, le 23 décembre 2020. Elle s’était dite d'accord d'être entendue avec le doyen, mais accompagnée d'un collègue et pour autant que cela soit dans un autre bâtiment que celui où travaillait M. A______. Dans la mesure où la lettre de Mme D______ comportait des allégations de potentielles atteintes à la personnalité, son contenu devait être partagé avec le directeur du département, M. C______. Ce dernier avait trouvé à Mme D______ un autre lieu de travail, au Jardin botanique, jusqu'à la fin de son délai de congé, le 31 janvier 2021. Elle avait en effet dit à la responsable RH de la faculté des sciences d’alors à quel point elle voulait quitter l'université tant elle souffrait de s'y trouver. Leur priorité n'était alors pas de résoudre le problème de l'équipe, mais la situation de possible précarité de Mme D______ qui travaillait à 50 % dans le laboratoire de M. A______ et à 40 % dans un autre laboratoire jusqu'au 31 décembre 2020, avait en charge un enfant handicapé et gagnait le seul revenu du groupe familial.

Ils n'avaient, dans le cadre de ces entretiens avec des collègues de Mme D______, pas entendu M. A______ dans la mesure où tous avaient dit à quel point ils craignaient des représailles de sa part, pour eux-mêmes ou d'autres collègues. Les gens présents avaient pris des notes mais il n'y a pas eu de procès-verbaux officiels vu le refus des personnes entendues. Celles-ci avaient été informées en début d’entretien que la situation ne pourrait pas être réglée si M. A______ n'était pas mis au courant de la teneur de leurs propos.

Ils avaient entendu Mme D______ le 29 janvier 2021, de même que M. M______, le collègue que celle-là avait choisi pour l'accompagner comme personne de confiance. M. M______ ne faisait plus partie de l'équipe de M. A______ depuis 3 ans. C’était pendant l'entretien de Mme D______ que M. M______ avait demandé à être entendu. Il était à cette époque fiancé à Mme I______. Ils avaient recommandé à M. M______ de l'encourager à venir s'exprimer devant eux.

Le calendrier figurant dans la note du 1er mars 2021 avait été établi rétroactivement, après les entretiens avec les protagonistes.

Les personnes entendues avaient évoqué des manquements de M. A______ davantage par rapport à des collègues que par rapport à leur situation. Ils avaient dans un premier temps pensé convoquer M. A______ pour l'entendre avec le doyen. Toutefois, au fur et à mesure des entretiens, ils avaient réalisé la gravité des reproches formulés à l'encontre de M. A______ et les constats d'atteinte à la personnalité qu'ils pouvaient constituer. Ils avaient donc dû choisir la procédure d'investigation, couplée à l’interdiction temporaire d’accès au laboratoire. Une médiation avaient été proposée aux personnes concernées, mais celles-ci avaient peur de M. A______ et de ses réactions. Mme I______ par exemple craignait que M. A______ apprenne qu'elle était fiancée à M. M______ et qu'il lui en tienne rigueur vu leur mauvaise relation. Les choses étaient à ce point problématiques pour elle, que tous deux faisaient en sorte de ne jamais s'embrasser ni d’avoir d’autres gestes d'affection en ville de peur que M. A______ n'apprenne cette relation. Ces personnes n'avaient pas demandé le départ de M. A______. Après le 5 mars 2021, les personnes qui travaillaient encore sous la responsabilité de M. A______ avaient été informées que des mesures provisoires de protection étaient prises et qu'une procédure d'enquêtes était ordonnée. Après les entretiens de février 2021, MM. K______ et L______, qui disaient « aller bien » nonobstant la situation qu'ils avaient décrite, s’étaient retrouvés en arrêt maladie, réalisant qu'en fait ils étaient à bout et que cette situation avait un impact sur leur santé. Ils n’étaient donc pas en capacité d'entrer dans un processus de médiation. En juin 2021, ils avaient fait savoir qu'ils ne pouvaient même plus échanger par écrit avec M. A______ tant cela leur causait du mal. Ils voulaient donc tout arrêter.

En prenant ses fonctions, et partant connaissance du dossier RH de M. A______, Mme F______ y avait trouvé uniquement, en 2010 ou 2011, la mention d'un collaborateur qui avait contacté la conseillère aux études pour évoquer la situation d'une doctorante faisant sa thèse sous la responsabilité de M. A______ dont la soutenance était apparemment retardée sciemment par ce dernier. M. A______ avait demandé à être confronté à ce collaborateur. La soutenance avait été fixée, mais trop tard, de sorte, qu’à sa connaissance, l'étudiante avait raté l'occasion d'intégrer une grande université américaine. Il n'y avait apparemment pas eu d'autres suites. Elle ne pensait pas que l’enquêteur ait reçu une copie du dossier RH de M. A______ ni d'éléments y figurant.

Les accès informatiques de M. A______ avaient été coupés selon la procédure habituelle après la résiliation des rapports de service. M. A______ n'avait pas été averti de la fin de ses accès informatiques. Il lui avait été demandé à plusieurs reprises de remettre ses badges d'accès aux locaux et le matériel de l'université.

b. Selon son conseil, M. A______ avait vu ses accès informatiques rétablis durant 3 jours.

48) M. A______ a, dans ses observations du 28 novembre 2022, pris des conclusions sur 8 pages et demie, tant sur les demandes d’actes d’instruction que sur le fond. Avant de rendre toute décision, il convenait de prendre très attentivement connaissance des pièces versées à la procédure et des écritures des parties. Si la chambre administrative ne devait pas donner suite aux mesures d’instruction « légitimes » qu’il avait sollicitées et si elle ne devait pas tenir compte du contenu des pièces qu’il avait pris la peine de produire, une motivation détaillée devait être fournie pour démontrer que l’arrêt à venir avait été rendu après une réelle instruction de la cause. Ce n’était qu’en procédant ainsi qu’elle pourrait revenir sur le surprenant préjugé « dont la présidente en charge de ce dossier s’[était] apparemment forgée », ce qui s’était clairement reflété à travers les éléments concrets qu’il énumérait en lien avec l’audience du 14 novembre 2022. Il a sur ce point manifesté son désaccord quant à la manière dont l’audience avait été menée et quant à certaines des questions posées par la juge déléguée. Il en tirait la conclusion qu’il « attend[ait] de la juridiction de céans qu’elle traite de manière fouillée son litige sans se contenter de rendre hâtivement une décision sur la base d’un a priori né avant toute instruction de la cause, et même avant prise de connaissance complète du dossier. Il en [allait] du respect du droit d’être entendu ».

Il persistait dans les mesures d’instruction sollicitées, tant s’agissant de ses requêtes en production de pièces que d’audition de témoins, telles que motivées dans sa réplique du 27 juin 2022 et son courrier du 26 septembre 2022. Les éléments ressortant du rapport d’enquête devaient être prouvés pour pouvoir être retenus. Or, l’enquêteur externe n’avait pas cherché réellement à élucider les faits, se contentant d’entendre les personnes concernées, sans vérifier leurs dires et en leur accordant sans autre de la crédibilité. On ne comprenait guère quel élément nouveau serait survenu entre l’audience du 5 septembre 2022 à l’issue de laquelle un délai avait été imparti aux parties au 26 septembre 2022 pour présenter ou confirmer leurs éventuelles demandes d’actes d’enquête et le 14 novembre 2022, date d’audition d’un unique témoin, avant de laisser entendre stopper l’instruction des autres moyens de preuve. Les mesures d’instruction se justifiaient d’autant plus que selon Mme F______, l’enquêteur externe n’avait procédé à aucune mesure d’investigation, se contentant d’entendre les personnes figurant sur la note récapitulative du 1er mars 2021 et que l’université n’avait pas jugé utile de transmettre une copie de son dossier RH ni d’éléments y figurant. Des points devaient aussi être clarifiés, puisque les personnes entendues par l’enquêteur avaient fourni des explications démenties par les pièces qu’il avait produites, au sujet de la prétendue violation des normes Covid-19 et de la situation de l’apprenti V______. La question de savoir comment le rapport d’investigation avait été traité au sein de l’université devait aussi être clarifiée, pour savoir comment s’était forgée la décision de M. E______ du 16 août 2021, allant à l’encontre de la recommandation unanime de renouvellement de mandat de la commission ad hoc et alors même que celle-ci avait relevé, le 12 avril 2021, qu’il devait « cependant clairement améliorer son activité de gestion, particulièrement au sein de son équipe de recherches, dans les années à venir ». Cette réflexion faisait clairement référence à la problématique ayant conduit au présent litige, étant précisé que M. C______ et Mme W______ connaissaient l’ouverture de la procédure d’investigation et, pour le premier, le contenu de la note récapitulative du 1er mars 2021 et des entretiens des personnes figurant sur cette note.

Au fond, il persistait intégralement dans ses précédentes explications.

Il déplorait que la confidentialité n’ait pas été respectée à son égard dans le cadre de l’enquête préliminaire (audition de Mme D______ accompagnée de M. M______), alors que les membres du laboratoire avaient pu en profiter au-delà même de ce qui était nécessaire, en lui refusant après l’ouverture d’enquête externe dans la présente procédure toutes les informations rassemblées par l’université lors des entretiens. Il était aussi surprenant que l’université n’ait jamais envisagé la moindre médiation pour tenter de trouver une solution et éviter que la situation ne dégénère jusqu’à un point de non-retour, qui avait certainement contribué à attiser l’insatisfaction des membres du laboratoire, jusqu’à conduire plusieurs d’entre eux à des arrêts maladie. Si la situation était si dramatique et alarmante, on pouvait se demander pourquoi l’université, entre le 27 octobre 2020 et le 5 mars 2021, n’avait pas jugé utile de prendre une mesure de protection préventive tendant à son éloignement du laboratoire.

Il était incompréhensible que l’université n’ait pas tenu compte dans ses décisions de son absence d’antécédents de la nature des griefs invoqués à son encontre.

La mauvaise ambiance de travail dont faisaient état des membres du laboratoire ne suffisait pas à fonder les décisions querellées, d’autant moins que Mme D______ avait collaboré avec lui pendant plus de 10 ans et M. O______ pendant plus de 7 ans. Aucun élément concret n’étayait les accusations de pressions, d’humiliation, de même que de propos sexistes et racistes. L’intégralité des griefs retenus à sa charge était infondée et, si une partie avait été fondée, une sanction plus modérée aurait dû être prise à son égard, d’autant plus qu’il servait l’université depuis plus de 27 ans et qu’il lui restait à peine 5 ans d’activité avant sa retraite.

49) L’université, dans de brèves observations du 28 novembre 2022, a notamment confirmé que le rapport d’investigation, les observations de l’avocate de M. A______, les bordereaux de pièces produits par ce dernier, le dossier d’investigation comportant l’ensemble des procès-verbaux d’audition des témoins et de M. A______, ainsi que les pièces produites en audience par ceux-ci avaient été transmis par l’enquêteur au recteur le 21 juillet 2021, puis à M. E______ le 8 août 2021.

50) Les parties ont été informées, le 2 décembre 2022, que la cause était gardée à juger.

51) Le contenu des écritures et des différentes pièces produites par les parties sera développé, en tant que de besoin, dans la partie en droit du présent arrêt.

 

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 43 al. 2 de la loi sur l’université du 13 juin 2008 - LU - C 1 30 ; art. 91 du Statut de l’université (ci-après : statut), entré en vigueur le 28 juillet 2011 ; art. 36 al. 1 du règlement relatif à la procédure d’opposition au sein de l’université du 16 mars 2009 ; art. 218 RPers ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant met en cause la manière dont la juge déléguée aurait mené l’audience d’enquêtes. Il n’en tire toutefois aucune conclusion au-delà d’une invitation faite à la chambre administrative d’examiner son dossier en toute objectivité avant de trancher le litige.

3) Le recourant conclut à la production, par la partie intimée, de l'intégralité de son dossier personnel, des contrats de travail, cahiers des charges et décomptes des jours de vacances de MM. K______, M______, L______ et N______ et de Mmes H______, D______ et I______ ainsi que des éléments rassemblés par l’université dans les démarches préalables à l’ouverture de la procédure d’investigation. Il sollicite également l’audition de MM. E______, C______, K______, X______ et Y______, ainsi que de Mme I______, de son médecin-psychiatre, de la vice-doyenne et de la directrice des RH. L’université sollicite pour sa part également l’audition de cette dernière.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1. ; 140 I 285 consid. 6.3.1). Le droit d'être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 141 III 28 consid. 3.2.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_245/2020 du 12 juin 2020 consid. 3.2.1 ; ATA/631/2020 du 30 juin 2020 consid. 2a).

Le droit d'être entendu ne comprend pas le droit d'être entendu oralement ni celui d’entendre des témoins (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 138 III 374
consid. 4.3.2 ; 134 I 140 consid. 5.3).

b. Une décision entreprise pour violation du droit d'être entendu n'est pas nulle mais annulable (ATF 143 IV 380 consid. 1.4.1 ; 136 V 117). En effet, la nullité d'un acte commis en violation de la loi doit résulter ou bien d'une disposition légale expresse, ou bien du sens et du but de la norme en question (ATF 122 I 97 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_34/2013 du 21 janvier 2013 consid. 6.3). Ainsi, d'après la jurisprudence, la nullité d'une décision n'est admise que si le vice dont elle est entachée est particulièrement grave, est manifeste ou du moins facilement décelable et si, en outre, la constatation de la nullité ne met pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Des vices de fond n'entraînent qu'à de rares exceptions la nullité d'une décision ; en revanche, de graves vices de procédure, ainsi que l'incompétence qualifiée de l'autorité qui a rendu la décision sont des motifs de nullité (ATF 138 II 501 consid. 3.1 ; 132 II 21 consid. 3.1 et les références citées ; 122 I 97 consid. 3).

c. La réparation d'un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d'être entendu, n'est possible que lorsque l'autorité dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure (ATF 145 I 167 consid. 4.4 ; 142 II 218 consid. 2.8.1). Elle dépend toutefois de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; 126 I 68 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_819/2018 du 25 janvier 2019 consid. 3.8) ; elle peut cependant se justifier en présence d'un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; 137 I 195 consid. 2.3.2 ; ATA/1194/2019 du 30 juillet 2019 consid. 3c et les arrêts cités). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu'elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/1108/2019 du 27 juin 2019 consid. 4c et les arrêts cités).

d. Le recours à la chambre administrative ayant un effet dévolutif complet, celle-ci dispose d'un libre pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 61 LPA). Celui-ci implique la possibilité de guérir une violation du droit d'être entendu, même si l'autorité de recours n'a pas la compétence d'apprécier l'opportunité de la décision attaquée (ATF 145 I 167 consid. 4.4 ; 137 I 195 consid. 2.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral du 12 mai 2020 8C_257/2019 consid. 2.5 et les références citées), sous réserve que ledit vice ne revête pas un caractère de gravité (arrêts du Tribunal fédéral 8C_541/2017 du 14 mai 2018 consid. 2.5).

e. L'art. 42 LPA n'empêche pas l'employeur, dans le cadre du rapport de travail qui le lie à ses employés, d'entendre ces derniers au sujet d'une plainte qu'ils formulent, pour évaluer la situation et juger de la pertinence des faits soulevés et de l'opportunité d'ouvrir une enquête administrative. De tels entretiens relèvent de la gestion du personnel et du rôle hiérarchique que les représentants de l'institution assument à l'égard de leurs subordonnés. Ils se différencient, matériellement, de l'enquête administrative qui intervient subséquemment, avec pour fonction d'instruire la plainte et d'établir la réalité des reproches faits au fonctionnaire incriminé. La procédure d’enquête administrative ne peut se dérouler sans procès-verbaux ni sans la présence des parties, sauf exceptions prévues par la loi. Les auditions préliminaires peuvent être versées au dossier dans la procédure subséquente, comme toute pièce en rapport étroit avec le litige. L'employé incriminé doit cependant pouvoir se déterminer à leur sujet, si les procès-verbaux de ces auditions ont été joints au dossier (ATA/351/2021 du 23 mars 2021 consid. 5b et les références citées).

f. En l’occurrence, les parties, de même que la directrice des RH ont été auditionnés par la chambre de céans. MM. E______, C______, K______ ainsi que Mme I______ ont déjà été entendus par l’enquêteur dans le cadre de la procédure d’investigation. Le recourant n’indique pas précisément pour quel motif leur ré-audition, devant la chambre de céans, serait nécessaire à la résolution du litige. Le recourant a par ailleurs produit les lettres de soutien de MM. X______ et Y______, de sorte que leur audition n’est pas de nature à apporter un éclairage nouveau, étant relevé que les compétences scientifiques et pédagogiques du recourant ne sont pas remises en cause et que ces personnes n’ont pas été témoins des agissements qui lui sont reprochés, lesquels sont intervenus au sein du laboratoire. De même, l’audition de son médecin psychiatre n’est pas nécessaire dès lors que ce dernier a déjà établi une attestation médicale le 16 juin 2021, laquelle figure au dossier et qu’il n’est pas contesté que le recourant ait été gravement affecté par la procédure. Enfin, l’audition de la vice-doyenne, par laquelle le recourant souhaite notamment pouvoir démontrer qu’elle avait préconisé le renouvellement de son mandat alors qu’elle était au courant de la procédure d’investigation, n’est pas nécessaire pour la résolution de ce dossier, pour les motifs exposés ci-après.

Le recourant sollicite par ailleurs l’apport de son dossier personnel. Il souhaite notamment démontrer qu’il n’a jamais fait l’objet de plaintes, de sanctions ou d’avertissements. Or, il ressort des faits de la procédure que l’accès à son dossier personnel lui a été donné par l’université en date du 22 mars 2021, de sorte qu’il disposait de l’entier dudit dossier et avait la possibilité de produire toutes les pièces qu’il souhaitait. De plus, il n’est pas soutenu par l’autorité intimée qu’il aurait fait l’objet de plaintes, sanctions ou avertissements avant les faits litigieux, de sorte que l’apport de son dossier personnel n’est pas nécessaire, l’absence d’antécédents étant établie. Le recourant a notamment eu accès au rapport de la commission de renouvellement des mandats du 12 avril 2021 ainsi qu’au rapport du doyen du 16 août 2021, dont il demandait copie.

Il est regrettable que l’université n’ait pas été en mesure de répondre lors de l’audience devant la chambre de céans à la question de savoir si des procès-verbaux avaient été établis à la suite des entretiens menés auprès de certains collaborateurs entre décembre 2020 et février 2021, ce d’autant plus que le recourant en a réclamé la production à plusieurs reprises. Cela étant, il sera relevé que le contenu et le déroulement des entretiens menés auprès de membres du laboratoire du recourant ne sont pas décisifs pour la résolution du présent litige. En effet, lesdites discussions sont intervenues aux prémices de cette affaire, lorsque l’université s’interrogeait sur la nécessité ou non d’entreprendre une procédure d’investigation. De tels entretiens relevaient de la gestion du personnel et non de la procédure administrative et des droits qui en découlent. Ils se différencient ainsi des entretiens menés par l’enquêteur dans le cadre de la procédure d’investigation, dont il n’est pas contesté que le recourant a pu obtenir copie des procès-verbaux y relatifs. Il n’apparaît enfin pas que l’autorité intimée se serait fondée sur les entretiens précédant l’ouverture de la procédure d’investigation pour rendre les décisions litigieuses. Celles-ci reposent uniquement sur le contenu du rapport remis par l’enquêteur. Le recourant ne dispose dès lors pas d’un droit à obtenir une copie des procès-verbaux rédigés suite aux entretiens intervenus entre décembre 2020 et février 2021, pour autant qu’ils existent, étant rappelé que la tenue d’un procès-verbal n’est pas obligatoire en phase non contentieuse (art. 20 al. 3 LPA a contrario ; ATA/871/2022 du 30 août 2022 consid. 3c ; ATA/27/2022 du 11 janvier 2022 consid. 2b ; Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, n. 357).

S’agissant de la production des cahiers des charges, des contrats de travail et des décomptes horaires des membres du laboratoire du recourant, outre qu’ils concernent des données personnelles de tiers, ils ne sont pas nécessaires pour résoudre le présent litige, pour les motifs qui seront développés ci-après.

Dans ces circonstances, la chambre administrative ne procédera pas à l’audition de témoins supplémentaires, ni à d’autres actes d'instruction, dans la mesure où ils ne sont pas de nature à influer sur l'issue du litige, et qu’elle dispose des éléments nécessaires pour statuer en toute connaissance de cause.

4) a. L’université est un établissement de droit public doté de la personnalité morale (art. 1 al. 1 LU. Elle s’organise elle-même et les dispositions complétant la LU sont fixées dans le statut, les règlements dont elle se dote sous réserve de l’approbation du Conseil d’État et d’autres règlements adoptés par l’université (art. 1 al. 2 et 3 LU).

b. Le statut des membres du corps professoral et du corps des collaboratrices et collaborateurs de l’enseignement et de la recherche de l’université est régi par la LU, dont l’art. 13 al. 1 dispose que l’université est l’employeur de son personnel. En qualité de membre du corps professoral (art. 9 let. a LU ; art. 4 al. 1, 2 et 3
let. b et 87 al. 1 let. b RPers), le recourant est soumis aux art. 126, 139, 140, 141, 142, 143 et 144 de la loi sur l’instruction publique du 17 septembre 2015 (LIP -
C 1 10), aux dispositions de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l’État, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait - B 5 15) et, pour le surplus, au RPers, soit sa deuxième partie (art. 12 al. 1 LU ; art. 2 al. 1 RPers).

c. D’après l’art. 26 al. 5 LU, l’université comprend notamment des unités principales d’enseignement et de recherche (ci-après : UPER ; appelées traditionnellement facultés), qui comportent parfois des subdivisions.

Ces UPER sont dirigées par un décanat, qui est placé sous l’autorité d’un doyen (art. 26 al. 3 let. a LU).

5) a. Selon l’art. 140 RPers, le ou la maître d’enseignement et de recherche est chargé ou chargée, sous la responsabilité d’un ou une professeur ou professeure ordinaire ou d’un ou une professeur associé ou professeure associée, d’activités d’enseignement et/ou de recherche. Cette responsabilité peut être dévolue au directeur ou à la directrice du département ou de la subdivision concernée (al. 1). Il est nommé ou elle est nommée pour une première période de quatre ans au maximum ; la nomination est renouvelable pour des périodes successives de cinq ans au maximum (al. 3).

À teneur de l'art. 157 al. 1 RPers, lorsque les mandats des collaborateurs de l’enseignement et de la recherche sont renouvelables, leur renouvellement est déterminé par : a) les aptitudes scientifiques et pédagogiques de l’intéressé-e révélées dans l’exercice de la fonction ; b) l’aptitude à assumer à satisfaction les activités de gestion administrative conformément aux exigences de la fonction et à s’intégrer au sein de la structure ; c) les besoins de l’UPER ou de l’UER découlant du plan d’études et par les disponibilités budgétaires; d) l’état d’avancement du travail de doctorat s’agissant des assistant-es ; e) le respect, par l’intéressé-e, des devoirs qui incombent aux membres du corps enseignant; f) l’aptitude à assumer à satisfaction les activités de gestion des ressources humaines conformément aux exigences de la fonction.

Selon l’art. 158 RPers, toute proposition de renouvellement, de renouvellement pour une durée inférieure ou de non-renouvellement doit être précédée d’un entretien d’évaluation entre le collaborateur ou la collaboratrice de l’enseignement et de la recherche et le professeur ou la professeure ou le maître ou la maître d’enseignement et de recherche auquel il est rattaché ou à laquelle elle est rattachée. Le résultat de l’entretien d’évaluation est joint à la proposition (al. 1). Pour les collaborateurs/trices de l’enseignement et de la recherche dont le mandat est renouvelable autres que les maîtres assistant-es et les assistant-es, le corps professoral de la subdivision concernée confie à une commission de renouvellement le soin d’élaborer les propositions sur la base des critères mentionnés à l’art. 157
al. 1 let. a à e (al. 3). La commission examine les rapports d’activité établis par les collaborateurs/trices et soumet ses propositions à l’approbation du corps professoral de la subdivision concernée (al. 4). Elles sont ensuite ratifiées par l’instance prévue à cet effet par le règlement d’organisation de l’UPER, à défaut par son collège des professeur-es, avant d’être transmises par le Décanat au Rectorat pour décision
(al. 4). Dans la mesure du possible, les collaborateurs/trices de l’enseignement et de la recherche, les membres du personnel administratif et technique et les
étudiant-es susceptibles d’apporter des informations sont consulté-es (al. 7)

En cas de difficultés identifiées au sujet de la gestion des ressources humaines, le doyen ou la doyenne entend le collaborateur ou la collaboratrice de l’enseignement et de la recherche (art. 158A al. 1 RPers). Le doyen ou la doyenne joint le procès-verbal d’audition au rapport qu’il ou elle adresse au Rectorat
(art. 158A al. 2 RPers).

Lorsqu’il ressort de la procédure de renouvellement d’un MER que des difficultés ou des lacunes sont apparues au cours du mandat antérieur et qu’elles pourraient être surmontées à bref délai, le rectorat peut prendre une décision de renouvellement conditionnel pour une période inférieure à la durée ordinaire du mandat (art. 160 al. 1 RPers).

b. Les devoirs des membres du corps enseignant sont mentionnés aux art. 20 et ss RPers.

Lesdits membres sont ainsi tenus au respect de l’intérêt de l’université et doivent s’abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice (art. 20 RPers). Selon
l’art. 21 RPers, ils doivent, par leur attitude, entretenir des relations dignes et correctes avec leurs supérieurs, leurs collègues et leurs subordonnés ainsi que permettre et faciliter la collaboration entre ces personnes (let. a), établir des contacts empreints de compréhension et de tact avec les étudiants et le public (let. b), justifier et renforcer la considération et la confiance dont l’université et la communauté universitaire doivent être l’objet (let. c). Aux termes de l’art. 22 RPers, les membres du corps enseignant chargés de fonctions d’autorité sont en outre notamment tenus d’organiser le travail de leur structure et de leurs subordonnés (let. a), de les diriger, d’en coordonner et contrôler l’activité (let. b), de veiller à la réalisation des tâches incombant à leur structure (let. c) et à la protection de la personnalité des membres du personnel (let. f).

L’art. 23 RPers a trait à l’exécution du travail et prévoit que les membres du corps enseignant doivent remplir tous les devoirs de leur fonction consciencieusement et avec diligence (al. 1). Ils doivent respecter leur horaire de travail et assurer une présence régulière et appropriée à l’université compte tenu en particulier de l’exécution de leur cahier des charges (al. 2).

6) Lorsque le droit cantonal n’accorde pas un droit à la prolongation des rapports de service, l’autorité compétente est en principe libre de renouveler l’engagement d’un agent public ou d’y mettre fin, le collaborateur concerné ne disposant alors d’aucun droit au renouvellement desdits rapports (ATA/669/2022 du 28 juin 2022 consid. 7c ; ATA/1296/2015 du 8 décembre 2015 consid. 6). Selon la jurisprudence, même si un fonctionnaire fédéral n’avait à l'époque aucun droit à être réélu, le non-renouvellement de ses rapports de service devait cependant être motivé par une raison pertinente, un motif objectif suffisant ou des motifs plausibles devant alors justifier une non-réélection (ATF 119 Ib 99 consid. 2a). Il ne doit toutefois pas nécessairement s’agir d’un motif qui justifierait également une sanction disciplinaire ou qui constituerait un juste motif de licenciement, dès lors que même des diminutions non fautives des capacités de travail justifient une non-réélection, une faute de la part de l’intéressé n’étant pas nécessaire. L’autorité de nomination doit considérer l’ensemble des actes de l’intéressé et déterminer sa capacité de continuer à remplir les devoirs de sa charge, l’impression d’ensemble étant, dans ce cadre, déterminante. Ainsi, des doutes sérieux sur la compétence de l’intéressé, des prestations insuffisantes ou un comportement insatisfaisant peuvent justifier une non-réélection. L’autorité de nomination dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour appliquer les concepts de « prestations insuffisantes » et de « comportement incorrect » (arrêt du Tribunal fédéral 8C_770/2011 du 10 avril 2012 consid. 3.3 et 3.4 et les références citées).

7) a. L’université veille à la protection de la personnalité des membres du corps enseignant et combat l’apparition ou la persistance de comportements constitutifs de harcèlement psychologique ou sexuel (art. 8 al. 1 RPers). Elle met en place un système global de gestion des conflits, accessible à l’ensemble de la communauté universitaire (art. 8 al. 3 RPers).

Les art. 62 ss RPers définissent les règles applicables au processus de médiation et à la procédure de plainte pour atteinte ou suspicion d’atteinte aux droits de la personnalité d’un membre du corps enseignant, notamment en cas de harcèlement psychologique ou de harcèlement sexuel (art. 8 al. 4 et 62 al. 1 RPers).

L’art. 63 RPers définit ces notions. Est ainsi constitutif d’un harcèlement psychologique tout enchaînement de propos ou d’agissements hostiles, répétés fréquemment pendant une période assez longue, par lesquels une ou plusieurs personnes tendent à déstabiliser, à isoler, à marginaliser, voire à exclure une ou plusieurs personnes sur leur lieu de travail (al. 1). Est constitutif d’un harcèlement sexuel tout comportement importun de caractère sexuel ou tout autre comportement fondé sur l’appartenance sexuelle qui porte atteinte à la dignité du collaborateur sur son lieu de travail, en particulier le fait de proférer des menaces, de promettre des avantages, d’imposer des contraintes ou d’exercer des pressions de toute nature sur un collaborateur en vue d’obtenir de sa part des faveurs de nature sexuelle (al. 2). Tout harcèlement est une forme aiguë d’atteinte à la personnalité (al. 3).

b. Selon la définition donnée par la jurisprudence qui vaut pour les relations de travail fondées tant sur le droit privé que sur le droit public, le harcèlement psychologique, communément appelé « mobbing », se définit comme un enchaînement de propos et/ou d'agissements hostiles, répétés fréquemment pendant une période assez longue, par lesquels un ou plusieurs individus cherchent à isoler, marginaliser, voire exclure une personne sur son lieu de travail. II n'y a pas harcèlement psychologique du seul fait qu'un conflit existe dans les relations professionnelles, ni d'une mauvaise ambiance de travail, ni du fait qu'un membre du personnel serait invité – même de façon pressante, répétée, au besoin sous la menace de sanctions disciplinaires ou d'une procédure de licenciement – à se conformer à ses obligations résultant du rapport de travail, ou encore du fait qu'un supérieur hiérarchique n'aurait pas satisfait pleinement et toujours aux devoirs qui lui incombent à l'égard de ses collaborateurs. Il résulte des particularités du mobbing que ce dernier est généralement difficile à prouver, si bien qu'il faut savoir admettre son existence sur la base d'un faisceau d'indices convergents, mais aussi garder à l'esprit qu'il peut n'être qu'imaginaire, sinon même être allégué abusivement pour tenter de se protéger contre des remarques et mesures pourtant justifiées (arrêts du Tribunal fédéral 8C_787/2015 du 4 novembre 2016
consid. 3.2.2 ; 2P.207/2002 du 20 juin 2003 consid. 4.2 et les références citées ; ATA/728/2016 du 30 août 2016 consid. 8). La victime est souvent placée dans une situation où chaque acte pris individuellement peut être considéré comme supportable alors que l'ensemble des agissements constitue une déstabilisation de la personnalité, poussée jusqu'à l'élimination professionnelle de la personne visée (arrêt du Tribunal fédéral 4D_72/2017 du 19 mars 2018 consid. 8.2).

Le « mobbing », ne saurait ainsi résulter d'un seul acte hostile ou de quelques comportements isolés, même si ces derniers causent un préjudice ou constituent une véritable atteinte à la personnalité du travailleur. Selon le Tribunal fédéral, il n'est pas arbitraire de considérer qu'un seul acte hostile, ni même deux, ne suffisent pas à former un tel enchaînement, partant un harcèlement psychologique (arrêt du Tribunal fédéral 2P.207/2002 précité consid. 4.3.2).

c. La définition du harcèlement sexuel opérée par l’art. 63 al. 2 RPers est similaire à celle prévue par l’art. 4 de la loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes du 24 mars 1995 (Loi sur l’égalité, LEg - RS 151.1), qui s’applique notamment aux rapports de travail régis par le droit public cantonal (art. 2 LEg). Bien que les exemples cités par cette disposition ne se réfèrent qu’à des cas d’abus d’autorité, la définition englobe tous les comportements importuns fondés sur le sexe, soit également ceux qui contribuent à rendre le climat de travail hostile, par exemple les plaisanteries déplacées, les remarques sexistes, les commentaires grossiers ou embarrassants, les propos obscènes et sexistes ou les regards qui déshabillent (ATF 126 III 395 consid. 7b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_74/2019 du 21 octobre 2020 consid. 3.1.1). Selon les procédés utilisés, plusieurs incidents peuvent être nécessaires pour constituer une discrimination au sens de l’art. 4 LEg ; la répétition d’actes ou l’accumulation d’incidents n’est toutefois pas une condition constitutive de cette forme de harcèlement sexuel (ATA/390/2022 du 12 avril 2022 consid. 6a et les références citées).

Si une intention de nuire pourrait peser comme facteur de gravité du harcèlement sexuel, l'absence d'une telle intention ne saurait en atténuer le caractère inadmissible. En effet, sauf lorsqu'il s'agit d'établir l'existence d'un chantage sexuel, la motivation de l'auteur est sans pertinence pour la qualification du harcèlement sexuel (arrêt du Tribunal fédéral 8C_74/2019 du 21 octobre 2020 consid. 3.3.4 ; Karine LEMPEN, in Commentaire de la loi fédérale sur l'égalité, Gabriel AUBERT/Karine LEMPEN [éd.], 2011, n° 9 ad art. 4 LEg p. 103 s.).

8) Une décision est arbitraire au sens de l’art. 9 Cst. lorsqu’elle est manifestement insoutenable, qu’elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, qu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou encore lorsqu’elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité. L’arbitraire ne résulte pas du seul fait qu’une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu’elle serait préférable. De plus, il ne suffit pas que les motifs de la décision attaquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 144 I 170 consid. 7.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_397/2021 du 7 février 2022 consid. 2.1.2).

9) Le recourant conteste avoir commis des atteintes à la personnalité de plusieurs membres de son laboratoire. Il reproche à l’autorité intimée, tout comme à l’enquêteur, d’avoir accordé une importance prépondérante aux témoignages oraux plutôt qu’aux pièces qu’il a produites, lesquelles permettraient, selon lui, de contredire la version des témoins sur plusieurs points.

De manière générale, le recourant tente de démontrer, notamment en sollicitant l’audition de plusieurs témoins, qu’il est quelqu’un de poli, éduqué et agréable, et que personne – en dehors des membres de son laboratoire n’a jamais constaté de propos racistes ou sexistes, ou encore de problèmes avec des membres de son laboratoire. Or, ces différents éléments, favorables au recourant, même à retenir qu’ils seraient établis, rejoignent les témoignages de différents membres de son laboratoire, et en particulier ceux de MM. K______, O______, L______ et Mmes I______ et H______, selon lesquels le recourant pouvait avoir deux types de comportements à leur égard (tantôt bienveillant, tantôt malveillant) et avait notamment une attitude totalement différente à l’intérieur ou à l’extérieur du laboratoire. Il ressort tant des pièces au dossier que des auditions des témoins par l’enquêteur, que le recourant pouvait se montrer tant attentif que bienveillant à l’égard des membres du laboratoire. Tels peuvent notamment être cités à titre d’exemple la visite organisée du laboratoire pour la mère de l’apprenti ou des cadeaux offerts à l’occasion des soutenances de thèse. Il en va par exemple de même de son comportement envers M. O______, qu’il a accueilli chez lui durant sa convalescence ou qu’il a aidé dans des démarches pour récupérer ses avoirs de prévoyance après son retour dans son pays d’origine. Certains exposent avoir été félicités pour leur travail. Plus généralement, la plupart des membres du laboratoire ont relevé que lors des événements extérieurs au laboratoire, le recourant était « courtois », « gentil », « jovial », « agréable », qu’ils riaient tous ensemble.

Ces différents éléments positifs ne permettent toutefois pas de contrebalancer les nombreux comportements inadéquats commis à l’encontre de son équipe. En effet, MM. K______, O______, L______, M______ et Mmes I______ et H______ ont tous indiqué avoir subi, de la part du recourant, des humiliations, des remarques désobligeantes, des pressions, des cris et des hurlements.

M. K______, doctorant, a indiqué à l’enquêteur que le recourant leur faisait subir, à chacun leur tour sans qu’il n’y ait réellement de « bouc émissaire », une « grosse pression » qui se manifestait par « des rabaissements, des humiliations, du harcèlement, des cris ». Il y avait également des remarques « blessantes, parfois insultantes et parfois racistes ». M. M______, qui avait été doctorant dans le laboratoire, a également fait état de rabaissement, le recourant lui ayant dit que son travail était « de la merde », de cris et de crises de colère réguliers.
M. O______, contrairement à ce qu’indique le recourant, a également indiqué qu’il était arrivé au recourant de lui « crier dessus très fort » ou d’avoir une attitude humiliante à son égard, même si ce n’était pas régulier, précisant que les relations avaient été de plus en plus difficiles au fil des années. Mme H______, ayant fait son master de biologie dans le laboratoire du recourant, a fait état d’une « atmosphère de peur, de reproche, de colère et d’humiliation ». M. L______, doctorant puis post-doctorant dans le laboratoire du recourant, a précisé que lorsqu’il avait annoncé son intention de ne pas renouveler son contrat au précité, ce dernier lui avait fait vivre un « épisode d’intimidation qui [avait] duré une heure et demie environ », avant de s’adoucir et de lui promettre que son propre comportement allait changer, ce qui l’avait alors amené à signer une prolongation. À titre d’exemple, le recourant avait dit une fois, en s’adressant à M. L______ et à un collègue, « pas de pitié pour les cons », et une autre fois « si j’avais le droit, je te donnerais une gifle ». Mme D______, laborantine en biologie, a également relevé que l’intéressé avait des réactions très fortes, lesquelles faisaient peur, et qu’il s’était permis de lui lancer du chocolat sur la tête, ce qui a aussi été rapporté par M. L______.
M. N______ a précisé qu’à compter de décembre 2020, il avait eu l’impression de devenir le « souffre-douleur » du recourant. Pour exemple, alors qu’il était énervé après une discussion avec son assureur, le recourant s’était « déchargé » sur lui ; il en allait de même à chaque fois qu’il avait des problèmes extraprofessionnels.

Lors de son audition par l’enquêteur, M. P______, chargé de cours dans l’unité de microbiologie de la faculté jusqu’en 2019 et occupant le laboratoire voisin de celui du recourant, a indiqué qu’il avait « régulièrement vu les doctorants du [recourant] sortir du laboratoire en étant tristes ». Lorsqu’il les interrogeait, ces derniers répondaient que cela ne se passait pas très bien dans le laboratoire, mais la discussion n’allait pas plus loin. M. Q______, également chargé de cours à l’unité de microbiologie de la faculté et collègue direct du recourant, a pour sa part indiqué à l’enquêteur qu’il avait vu des collaborateurs sortir en pleurant du laboratoire de l’intéressé, notamment Mme I______, et qu’il était visible que les personnes qui en sortaient ne se sentaient pas bien. Mme T______, laquelle avait effectué un stage dans le laboratoire du recourant lorsqu’elle était étudiante en ingénierie des sciences de la vie, a également indiqué à l’enquêteur avoir constaté qu’il arrivait que l’intéressé prenne une voix plus grave qui « semblait apeurer certaines personnes ». Elle avait « senti la peur chez certaines personnes », tant sur la base de ce qu’elles lui rapportaient que sur ce qu’elle percevait de leur langage corporel.

Plusieurs témoins ont fait spécifiquement état d’un comportement inadéquat du recourant à l’égard de collaborateurs ayant des problèmes de santé. MM. K______ et M______ ont relevé la pression intense mise par l’intéressé à
M. O______ lorsque ce dernier a été opéré. M. O______ avait dû rester debout pendant deux heures lors d’une séance, alors qu’il était en convalescence et ne pouvait pas s’asseoir. M. O______ a lui-même indiqué que s’il n’avait pas été obligé d’assister à des séances, le recourant lui avait dit que s’il ne guérissait pas et ne reprenait pas convenablement le travail, il serait dans l’obligation de mettre fin à son contrat. Il avait donc décidé de reprendre le travail même s’il n’était pas encore guéri. Mme D______ a encore relaté que lorsqu’elle avait annoncé son cancer du côlon, alors que M. O______ avait été opéré de ce qu’elle pensait être des hémorroïdes, le recourant avait ri en disant qu’ils étaient « tous malades par derrière ». M. L______ a confirmé la tenue de ces propos.

Le recourant considère que les « blagues de mauvais goût » qui jouent sur les stéréotypes et se veulent humoristiques peuvent être stupides, mais sont fondées sur l’exagération et ne reposent pas sur des motifs à caractère raciste, de sorte qu’elles ne sauraient être assimilées à des propos racistes. In casu, Mme D______ a exposé que le recourant se moquait de son accent, tandis que Mme H______ a indiqué qu’il en faisait de même s’agissant de celui de M. O______. S’il est vrai que M. O______ n’a pas qualifié les propos ou comportements dont il avait l’objet de la part du recourant de « racistes » comme le relève ce dernier, il a tout de même indiqué qu’il avait été blessé par une remarque sous-entendant que les Ivoiriens ne méritaient pas d’être aidés. Mme H______ a également relevé que le recourant avait dit une fois, alors qu’elle avait laissé son porte-monnaie sur la table, « attention, il y a un Arabe dans le laboratoire ». M. N______ a indiqué que le recourant lui avait dit lors de sa première semaine de travail « les gens de ton pays ne savent même pas écrire un CV et une lettre de motivation », propos que M. K______ dit avoir entendus. Comme relevé par l’enquêteur, il n’est pas question d’établir si le recourant devrait être qualifié de raciste, ce que ce dernier conteste vivement, pièces à l’appui. En revanche, il ne fait aucun doute que ce type de comportements et de remarques, dont il n’y a pas lieu de douter puisque confirmés par plusieurs témoins, ne respecte à l’évidence pas les devoirs qui incombent aux membres du corps enseignant et est de nature à déstabiliser et à porter atteinte aux personnes concernées. Le fait que le recourant se soit montré à diverses occasions bienveillant avec des étudiants étrangers n’est pas de nature à remettre en cause ce qui précède, pas plus que le fait qu’il se soit investi dans des projets en Côte d’Ivoire développés par M. O______.

Le recourant considère que les blagues sexistes doivent être distinguées des « blagues simplement grossières », qui n’ont pas de connotation sexuelle ou qui ne sont pas fondées sur une appartenance sexuelle et n’emportent pas de discrimination en raison du sexe, ces dernières n’étant pas humiliantes et n’entrant pas dans la définition du harcèlement sexuel. Il ne saurait être suivi. Mme H______ a indiqué, lors de son audition par l’enquêteur, que le recourant avait fait de nombreuses remarques sexistes. À titre d’exemples, elle a notamment cité qu’il lui avait dit, alors qu’elle avait un rhume, « arrête de te balader à poil » ou qu’il lui avait demandé d’être « plus sexy » sur une photographie à l’occasion d’une soirée de Noël. Il lui aurait également dit à une reprise en regardant des photographies prises durant un échantillonnage « ah voilà ton cul ». Interrogé sur la véracité de ces propos, le recourant a répondu à l’enquêteur qu’il les avait probablement tenus, mais que c’était de l’humour. Il ne s’agissait pas d’une attitude qu’il pouvait avoir de manière régulière, mais uniquement à certains occasions spéciales ou festives. Or, à nouveau, de tels propos ne sont pas admissibles dans un contexte professionnel, qui plus est universitaire, et ce même s’ils ont été tenus à l’occasion d’événements festifs comme le soutient le recourant.

Le fait que des étudiants en maîtrise, une fois leur diplôme obtenu, soient revenus effectuer leur doctorat sous son mentorat n’est pas non plus de nature à remettre en cause ce qui précède. En effet, comme susmentionné, les qualités d’enseignement du recourant ne sont pas mises en cause. Il ressort d’ailleurs du dossier qu’il est un professeur respecté et apprécié de ses élèves. La situation est toutefois toute autre pour les étudiants effectuant un doctorat, lesquels n’étaient plus de simples auditeurs, mais faisaient partie de son équipe dans son laboratoire. De même, le fait que certaines personnes aient apprécié de travailler avec lui n’empêche pas qu’il ait pu avoir un comportement inacceptable à l’égard d’autres personnes. Les quatre recommandations écrites en faveur du recourant figurant au dossier – lesquelles vantent notamment ses compétences scientifiques et humaines émanent en particulier toutes d’externes à l’université, ne pouvant dès lors avoir connaissance de ce qui se déroulait à l’intérieur du laboratoire du recourant. Elles ne sont dès lors pas en mesure de remettre en cause les témoignages concordants précités sur les événements ayant eu lieu à l’intérieur dudit laboratoire.

Pour le surplus, le fait que certains membres du laboratoire du recourant n’aient pas eu les compétences ou la productivité escomptées – ce qu’il ne convient pas d’établir en l’espèce – ne justifie pas le comportement de l’intéressé à leur égard.

Les faits retenus reposent ainsi sur de nombreux témoignages concordants recueillis durant la procédure d’investigation. Quoi qu’en pense le recourant, si les pièces qu’il a produites permettent de démontrer qu’il a toujours été cordial et respectueux dans les échanges écrits avec ses collaborateurs, elles ne permettent pas de mettre en doute la crédibilité des témoins entendus, ni ne contredisent les faits ainsi établis.

Les constats qui précèdent permettent d’aboutir à la conclusion que le recourant a commis de graves atteintes à la personnalité de plusieurs membres de son laboratoire. Ces éléments justifient à eux seuls la confirmation de la décision prise à la suite de la procédure d’investigation, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres éléments reprochés, notamment au regard de la prise de vacances ou de la charge de travail des collaborateurs, de son comportement à l’égard de l’apprenti – lequel n’a de plus pas été entendu par l’enquêteur ou de ses exigences et responsabilités à l’égard de l’application des mesures visant à lutter contre la pandémie de Covid-19. Les pièces se rapportant à ces derniers griefs dont le recourant demande la production ne sont donc pas utiles.

C’est ainsi à bon droit que l’université a confirmé la décision constatant des atteintes à la personnalité de plusieurs collaborateurs et collaboratrices et plusieurs étudiants ou étudiantes ayant travaillé dans le laboratoire du recourant.

10) Le recourant considère que l’autorité intimée aurait violé la procédure de renouvellement de son mandat, et notamment l’art. 158A RPers, dès lors que le doyen ne l’aurait pas entendu avant que la décision litigieuse ne soit rendue.

En l’occurrence, la situation est particulière puisqu’alors même que la procédure visant le renouvellement du mandat de MER du recourant était en cours, le rectorat a eu connaissance de problèmes de gestion avec les membres du laboratoire de l’intéressé. En effet, conformément à l’art. 158 al. 1 RPers, un entretien d’évaluation s’est tenu le 23 novembre 2020, au cours duquel les aptitudes du recourant ont été évaluées par le Professeur C______. Si ce dernier avait connaissance à ce moment d’une plainte à l’égard du recourant de la part d’une collaboratrice, rien ne permet de considérer que la situation était telle qu’elle nécessitait à ce stade un entretien en présence du doyen au sens de l’art. 158A RPers. Il ressort d’ailleurs du dossier, et en particulier de la « note récapitulative » du 1er mars 2021, que les membres du laboratoire du recourant n’ont commencé à être entendus qu’à compter du mois de décembre 2020 et ce jusqu’au mois de février 2021, soit après ledit entretien d’évaluation.

Cela étant, après que les membres de son laboratoire ont été entendus, le recourant a été convoqué à un entretien, par courriel du 3 mars 2021, devant se tenir le 5 mars 2021. Lors de celui-ci, auquel étaient présents outre l’intéressé, le recteur, le doyen et la directrice des RH, il a été informé de l’ouverture de la procédure d’investigation et s’est vu enjoindre de ne plus se présenter à sa place de travail le temps de l’enquête. Il lui a également été remis à cette occasion la note conjointe du 1er mars 2021 et son annexe ainsi qu’une copie de la lettre de démission de Mme D______. Lors de l’audience d’enquêtes du 14 novembre 2022, la directrice RH a notamment précisé que cette séance avait duré « pas moins d’une heure » et que le recourant s’était exprimé, quand bien même il ne s’était pas prononcé sur chacun des points reprochés au terme de la note conjointe du 1er mars 2021, qui lui avait été lue par le doyen.

Dans ces conditions, il doit être considéré que le recourant a effectivement été auditionné par le doyen le 5 mars 2021. Il est vrai qu’il n’existe aucun procès-verbal de ladite audition au sens de l’art. 158A al. 2 RPers, ce que la directrice des RH a confirmé en audience. Cela étant, dans les circonstances particulières rappelées ci-avant, et dès lors que le recteur était également présent à cet entretien, cette informalité ne saurait être considérée comme grave au point d’aboutir à l’annulation de la décision de non-renouvellement comme le prétend le recourant.

Ce grief sera dès lors écarté.

11) Le recourant conteste le non-renouvellement de son mandat de MER.

À titre préalable, il sera relevé que les compétences du recourant en matière d’enseignement et de recherche, telles que définies dans son cahier des charges, ne sont pas remises au cause dans le cadre de la présente procédure. L’intéressé relève en particulier, sans être contredit par l’intimée, être reconnu comme un scientifique rigoureux, exigeant et soucieux de la fiabilité des résultats scientifiques. Ces qualités scientifiques sont en outre confirmées par différentes attestations produites par le recourant émanant d’autres scientifiques. La reconnaissance des compétences précitées est également confirmée par l’évaluation du Professeur C______ du 23 novembre 2020, mais également par le fait que la commission de renouvellement des mandats des collaborateurs de l'enseignement et de la recherche de la faculté a recommandé à l'unanimité le renouvellement de son mandat de MER, proposition ratifiée par la suite par le collège des professeurs de la faculté lors de sa séance du 19 avril 2021.

Ce sont, en revanche, ses compétences de gestion d'équipe et ses capacités d'encadrement qui sont remises en cause. Or, comme susmentionné, il est établi à satisfaction de droit que le recourant a commis des atteintes importantes à la personnalité de plusieurs membres de son laboratoire. Ces éléments justifient ainsi la décision constatant que l’intéressé ne remplissait plus les conditions de l’art. 157 let. e et f RPers permettant de renouveler son mandat de MER.

Il est vrai qu’il est pour le moins surprenant que la commission de renouvellement des mandats des collaborateurs de l'enseignement et de la recherche de la faculté ait recommandé à l'unanimité le 12 avril 2021 le renouvellement dudit mandat, proposition ratifiée une semaine plus tard par le collège des professeurs de la faculté, alors même qu’une procédure d’investigation était en cours et qu’il avait été fait interdiction à l’intéressé de se présenter à son travail dès le 5 mars 2021. Ces événements concomitants étaient effectivement de nature à semer le doute dans l’esprit du recourant quant à la gravité des faits reprochés et à sa situation. Il n’en demeure pas moins qu’en vertu de l’art. 158 RPers, la décision finale de renouvellement était du ressort du rectorat. Le recourant ne peut dès lors en tirer aucun argument en faveur de l’annulation de la décision litigieuse.

Par ailleurs, le non-renouvellement de son mandat n’apparaît pas disproportionné, et ce même au vu de son parcours académique et scientifique, de son activité pendant plus de 27 ans pour l’université, de l’absence d’antécédents disciplinaires et alors qu’il est à 5 ans de la retraite, compte tenu de la gravité des faits retenus. Un renouvellement conditionnel au sens de l’art. 160 al. 1 RPers ne pouvait être envisagé, dès lors que les éléments établis ci-avant ne relèvent pas de simples difficultés ou lacunes au sens de cette disposition, mais sont clairement des violations graves, répétées et continues des devoirs incombant aux membres du corps enseignant. En outre, la réaction du recourant, visant à jeter le discrédit sur la plupart des membres interrogés de son laboratoire, à invoquer leurs lacunes professionnelles et à déposer une plainte pénale contre sept d’entre eux, n’est manifestement pas de nature à laisser présager une remise en cause de ses comportements dysfonctionnels.

Enfin, l’intimée a fait une correcte application de l’art. 159 RPers, puisqu’elle a prolongé les rapports de service jusqu’au 30 avril 2022, de manière à respecter le délai de congé de 6 mois en cas de non-renouvellement du mandat.

Il découle de ce qui précède que l’université a agi conformément au droit en rendant les deux décisions litigieuses, celles-ci ne consacrant pas d’excès ni d’abus de son pouvoir d’appréciation, et ne violant pas le principe de l’interdiction de l’arbitraire.

Entièrement mal fondés, les recours seront par conséquent rejetés.

12) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 2'000.-, qui comprend la décision sur mesures provisionnelles et sur effet suspensif ainsi que les mesures d’instruction, notamment les deux audiences, sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera accordée, pas plus qu’à l’intimée, qui dispose de son propre service juridique
(art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable les recours interjetés le 6 avril 2022 par Monsieur A______ contre les décisions sur opposition de l’université de Genève du 3 mars 2022 ;

au fond :

les rejette ;

met un émolument de CHF 2'000.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Malika Salem Thevenoz, avocate du recourant, ainsi qu'à l'Université de Genève.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Verniory, Mme Lauber, M. Mascotto, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Marmy

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

 

la greffière :