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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/12538/2022

ACPR/584/2022 du 23.08.2022 sur OMP/11659/2022 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : REJET DE LA DEMANDE;SÉQUESTRE(MESURE PROVISIONNELLE);SUPPRESSION(EN GÉNÉRAL);ACTE D'ORDRE SEXUEL AVEC UN ENFANT;INFRACTIONS CONTRE L'INTÉGRITÉ SEXUELLE;PORNOGRAPHIE
Normes : CPP.263

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/12538/2022 ACPR/584/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 23 août 2022

 

Entre

 

A______, domicilié ______[GE], comparant par Me Olivier WASMER, avocat, Grand-Rue 8, 1204 Genève,

recourant,

 

contre le refus de levée de séquestre rendu le 6 juillet 2022 par le Ministère public,

 

et

 

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


Vu :

-          l'instruction ouverte le 10 juin 2022 contre A______ pour pornographie pour avoir, à C______, à son domicile, entre le 11 avril 2021 et le 22 mai 2022, téléchargé sur Internet 7 fichiers contenant de la pédopornographie;

-          la saisie des ______[marque : téléphones portables], ______[marque : tablette] "militaire", ______[marque - tablette] "privé", laptop, laptop ______[marque] et disque dur lors de la perquisition du 22 juin 2022 au domicile du prévenu et à l'occasion de l'audition de l'intéressé du même jour;

-          le mandat d'actes d'enquête du 29 juin 2022 chargeant la police (BCI) d'analyser ledit matériel;

-          le refus de levée de séquestre du 6 juillet 2022;

-          le recours du prévenu déposé le 15 juillet 2022;

-          les observations du Ministère public;

-          la réplique du recourant.

Attendu que :

-          le prévenu conteste les faits reprochés;

-          la BCI a avisé les enquêteurs, à l'issue de l'audition du prévenu qu'ils ont conduite le 22 juin 2022, qu'un pointage réalisé sur l'un des appareils avait permis de retrouver un fichier effacé, identifié dans la liste des fichiers incriminés selon Child Protection System;

-          dans sa décision querellée, le Procureur, après avoir relevé que l'analyse du matériel informatique du prévenu était en cours, considère que le maintien du séquestre apparaissait en l'état comme la seule mesure susceptible de permettre la mise en sûreté des objets et valeurs pouvant être utilisés comme moyens de preuve et de les confisquer, ces derniers étant en lien de connexité avec la ou les infraction(s) reprochée(s);

-          dans son recours, A______ conclut à la restitution du laptop ______[marque] "professionnel", du disque dur externe "professionnel" et de l'"______[marque - tablette]" militaire. Il allègue :

o   la violation du principe de célérité: la police qui disposait du matériel informatique depuis plus de trois semaines, aurait dû procéder à une vérification rapide voire au transfert des données afin de permettre une restitution rapide de ses outils de travail;

o   la violation du principe de subsidiarité: une copie du contenu de ces outils aurait permis de sauvegarder le but du séquestre tout en lui restituant son matériel dont il avait besoin dans son activité professionnelle étant directeur de B______ SA;

o   la violation du principe de proportionnalité: le séquestre l'empêchait de répondre à ses obligations professionnelles envers ses clients;

-          dans ses observations, le Procureur répond qu'il n'y avait aucun retard de la police dans l'analyse du matériel informatique et que le séquestre devait être maintenu dans la mesure où il demeurait une possibilité de confiscation (art. 197 al. 6 CP);

-          dans sa réplique, le prévenu réaffirme que la majorité des appareils séquestrés lui était nécessaire dans son activité professionnelle; que la copie d'un ordinateur ne prenait que 4 heures au maximum; et qu'aucun indice ne démontrait que la police avait commencé son analyse.

Considérant que :

-          le séquestre probatoire prévu par l'art. 263 al. 1 let. a CPP consiste en la mise sous main de la justice des objets ou valeurs patrimoniales découverts au cours de l'enquête et permettant la manifestation de la vérité dans le procès-pénal (L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, CPP, Code de procédure pénale, Bâle 2016, n. 6 ad art. 263);

-          le séquestre prévu par l'art. 263 al. 1 let. d CPP a pour but de préparer la confiscation au sens des art. 69 et 70 CP. Tant que l'instruction n'est pas achevée et que subsiste une probabilité de confiscation, de créance compensatrice ou d'une allocation au lésé, la mesure conservatoire doit être maintenue (ATF 141 IV 360 consid. 3.2 p. 364). Les probabilités d'une confiscation, respectivement du prononcé d'une créance compensatrice, doivent cependant se renforcer au cours de l'instruction et être régulièrement vérifiées par l'autorité compétente, avec une plus grande rigueur à mesure que l'enquête progresse (ATF 122 IV 91 consid. 4 p. 96);

-          l'art. 197 al. 6 CP est une disposition spéciale en matière de pornographie dure prévoyant qu'en cas d'infraction au sens des al. 4 et 5, les objets sont confisqués, indépendamment des conditions de réalisation de l'art. 69 CP (Message du Conseil fédéral concernant la modification du code pénal et du code pénal militaire du 26 juin 1985, FF 1985 1108; A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire romand, Code pénal II, vol. II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n. 70 ad art. 197). Il n'est ainsi pas nécessaire que l'objet compromette la sécurité des personnes, la morale ou l'ordre public au sens de l'art. 69 al. 1 CP (M. NIGGLI/ H. WIPRÄCHTIGER (éds), Basler Kommentar Strafrecht II : Art. 111-392 StGB, 4ème éd., Bâle 2019, n. 61 ad art. 197). La notion d'objets visée par l'art. 197 al. 6 CP comprend toute forme de support sonore et/ou visuel (CD, DVD, ordinateur, disque dur, carte mémoire, etc.; L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), Commentaire romand, Code pénal I, art. 1-110 CP, 2ème éd., Bâle 2021, n. 24 ss ad art. 69; A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), op.cit., n. 70 s. ad art. 197; M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI (éds), Code pénal - Petit commentaire, 2ème éd., Bâle 2017, n. 6 ad art. 135; Y. BENHAMOU, Blocage de sites web en droit suisse : des injonctions civiles et administratives de blocage au séquestre pénal, in Droit d'auteur 4.0, Genève 2018, p. 12-13; Obergericht Zurich, SB190469 du 19 novembre 2020 consid. VII.1.2);

-          un séquestre est fondé sur la vraisemblance (ATF 126 I 97 consid. 3d/aa et les références citées). Comme cela ressort de l'art. 263 al. 1 CPP, une simple probabilité suffit car la saisie se rapporte à des faits non encore établis, respectivement à des prétentions encore incertaines. L'autorité doit pouvoir décider rapidement du séquestre provisoire (art. 263 al. 2 CPP), ce qui exclut qu'elle résolve des questions juridiques complexes ou qu'elle attende d'être renseignée de manière exacte et complète sur les faits avant d'agir (ATF 141 IV 360 consid. 3.2; ATF 140 IV 57 consid. 4.1.2 et les références citées);

-          ainsi, au début de l'enquête, un soupçon crédible ou un début de preuve de l'existence de l'infraction reprochée suffit à permettre le séquestre, ce qui laisse une grande place à l'appréciation du juge;

-          selon l'art. 267 al. 1 CPP, si le motif du séquestre disparaît, le ministère public ou le tribunal lève la mesure et restitue les objets et les valeurs patrimoniales à l'ayant droit. Tel sera le cas si le but pour lequel le séquestre a été ordonné a disparu, s'il n'existe pas de lien de connexité entre l'infraction et l'objet séquestré, si les charges contre le prévenu ne sont pas confirmées, si les biens ou valeurs litigieux ne peuvent faire l'objet d'une confiscation ultérieure, si la mesure devient disproportionnée ou si une mesure moins grave peut être ordonnée (L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, op. cit., n. 2 ad art. 267 CPP) ; Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 1 à 1d ad art. 267 CPP);

-          à teneur de l'art. 5 al. 1 CPP, les autorités pénales engagent les procédures pénales sans délai et les mènent à terme sans retard injustifié. L'art. 29 al. 1 Cst. dispose que toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. À l'instar de l'art. 6 § 1 CEDH – qui n'offre pas, à cet égard, une protection plus étendue –, cette disposition consacre le principe de la célérité, autrement dit prohibe le retard injustifié à statuer (arrêt du Tribunal fédéral 4A_500/2008 du 7 avril 2009). Selon la jurisprudence, apparaissent comme des carences choquantes une inactivité de treize ou quatorze mois au stade de l'instruction, un délai de quatre ans pour qu'il soit statué sur un recours contre l'acte d'accusation ou encore un délai de dix ou onze mois pour que le dossier soit transmis à l'autorité de recours (ATF 124 I 139 consid. 2c; 119 IV 107 consid. 1c);

-          en l'espèce, les données contenues dans le matériel informatique du prévenu sont des éléments de preuve de nature à étayer les soupçons de l'infraction qui lui est reprochée, ou à disculper le prévenu, l'analyse de ces appareils est donc essentielle;

-          on ne peut reprocher de carence à la police dans cette activité dont elle est chargée depuis le 22 juin 2022 et qui porte sur plusieurs appareils;

-          l'instruction cherche à déterminer sur quels appareils le recourant a téléchargé des fichiers à caractère pédopornographique, les soupçons de commission de l'infraction considérée s'étant renforcés par l'analyse effectuée par la BCI sur l'une des pièces saisies;

-          le séquestre sur l'ensemble du matériel informatique en cours d'analyse apparaît ainsi utile à la manifestation de la vérité et n'est dès lors nullement disproportionné, ce d'autant plus que le recourant a vraisemblablement procédé à des sauvegarde de ses travaux fiduciaires dans l'hypothèse de perte, vol ou disfonctionnement de ses appareils portables;

-          au vu de ce qui précède, le Ministère public était fondé à refuser la levée du séquestre;

-          partant, l'ordonnance querellée sera confirmée; le recours sera rejeté;

-          le prévenu, qui succombe, supportera les frais envers l'État, lesquels seront fixés à CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03).

* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, fixés à CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, au recourant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Siégeant :

 

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Monsieur Xavier VALDES, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/12538/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

815.00

-

CHF

Total (Pour calculer : cliquer avec bouton de droite sur le montant total puis sur « mettre à jour les champs » ou cliquer sur le montant total et sur la touche F9)

CHF

900.00