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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/2383/2022

ACPR/535/2022 du 09.08.2022 sur OTMC/2255/2022 ( TMC ) , ADMIS

Descripteurs : DÉTENTION POUR DES MOTIFS DE SÛRETÉ;RISQUE DE FUITE;MESURE DE SUBSTITUTION À LA DÉTENTION;ASSIGNATION À RÉSIDENCE;BRACELET ÉLECTRONIQUE
Normes : CPP.221; CPP.237; LStup.19

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/2383/2022 ACPR/535/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 9 août 2022

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison B______, comparant par Me C______, avocate,

recourant,

 

contre l'ordonnance de mise en détention pour des motifs de sûreté rendue le 15 juillet 2022 par le Tribunal des mesures de contrainte,

 

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9,
1204 Genève - case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.

 


EN FAIT :

A.           Par acte expédié au greffe de la Chambre de céans le 28 juillet 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 15 juillet 2022, notifiée le 18 suivant, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a ordonné son maintien en détention pour des motifs de sûreté jusqu'au 10 octobre 2022.

Le recourant conclut à l'annulation de l'ordonnance querellée et à sa libération immédiate, subsidiairement avec des mesures de substitution.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Le 1er février 2022, la police a procédé à l'interpellation et l'arrestation de D______, né en 1985. Ce dernier a reconnu avoir vendu de la cocaïne, mais pour le compte de A______, qui lui avait remis le téléphone sur lequel appelaient les clients. La drogue retrouvée dans l'appartement qu'il occupait à E______ [GE], chemin 1______ no. ______, appartenait au détenteur du logement, soit A______.

b. Selon les recherches de la police, A______, ressortissant gambien né en 1975, au bénéfice d'un permis d'établissement en Suisse, ne séjournait pas à son domicile et avait quitté la Suisse le 16 décembre 2021. Un avis de recherche et d'arrestation a ainsi été émis le 31 mars 2022.

Le 18 mai 2022, A______ – qui était rentré de voyage trois jours plus tôt – s'est présenté au poste de police de E______ pour y annoncer que son appartement avait été entièrement fouillé – il pensait qu'il avait été cambriolé – et s'enquérir des démarches à entreprendre. Arrêté le même jour, il a été placé en détention provisoire le 20 suivant.

c. A______ est désormais renvoyé par-devant le Tribunal correctionnel, par acte d'accusation du Ministère public du 11 juillet 2022, pour infraction grave à la Loi fédérale sur les stupéfiants (art. 19 al. 1 let. c et d cum 19 al. 2 let. a LStup).

Il lui est reproché d'avoir, à Genève, depuis une date indéterminée en juin ou juillet 2021, jusqu'au 1er février 2022, participé à un important trafic de cocaïne, en particulier :

- vendu à quatre ou cinq reprises, entre fin juillet 2021 et début janvier 2022, à F______, au moins quatre grammes de cocaïne, au prix de CHF 80.- le gramme,

- vendu, entre début de l'été 2021 et décembre 2021 ou janvier 2022, environ sept grammes de cocaïne à G______ au prix de CHF 100.- le gramme,

- demandé, fin décembre 2021 ou début janvier 2022, à D______ de vendre, pour son compte, de la cocaïne à F______, étant précisé que D______ a ainsi vendu deux grammes de cocaïne au précité entre début janvier 2022 et le 1er février 2022, au prix de CHF 80.- le gramme,

- demandé, fin décembre 2021 ou début janvier 2022, à D______ de vendre, pour son compte, de la cocaïne à H______, étant précisé que D______ a ainsi vendu, à plusieurs reprises en janvier 2022 une quantité totale de 10 grammes de cocaïne à la précitée, au prix de CHF 80.- le gramme,

- demandé, fin décembre 2021 ou début janvier 2022, à D______ de vendre pour son compte, de la cocaïne à G______, étant précisé que D______ a ainsi vendu à tout le moins trois grammes de cocaïne en décembre 2021 et/ou janvier 2022 à la précitée, au prix de CHF 100.- le gramme,

- détenu, de concert avec D______, à tout le moins le 1er février 2022, à son domicile sis chemin 1______ no. ______, à E______, 610.9 grammes net de cocaïne, conditionnée, à un taux de pureté oscillant entre 23.9% et 64.7%.

L'audience de jugement est prévue le 20 septembre 2022.

d. A______ conteste être lié à un trafic de stupéfiants. Il résidait à Genève depuis longtemps et avait toujours travaillé. Lors de son départ mi-décembre 2021 pour la Gambie, il avait confié à D______ le trousseau de clés contenant celles de son appartement, de son véhicule et de sa boîte aux lettres, pour qu'il relève le courrier et garde l'appartement, mais le précité ne devait pas s'installer chez lui. Il était revenu de voyage le 15 mai 2022 ; son séjour s'était prolongé car sa mère était très souffrante, il était d'ailleurs à ses côtés au moment de sa mort. Le véhicule L______ [marque, modèle] gris avait été acheté en 2020 par une connaissance, depuis lors partie aux États-Unis, qui l'avait mis à son nom à lui (A______). Il avait utilisé le véhicule en alternance avec cette personne jusqu'au départ de celle-ci en été 2021, date à laquelle il l'avait racheté. Il avait travaillé sans être déclaré, dans le nettoyage, durant l'année 2021. Il ne s'expliquait pas que le surnom "I______" "ressorte dans cette affaire". Il ne savait pas comment D______ avait fait pour amener la drogue chez lui. Il a contesté que le numéro de téléphone – dont le dossier ne fournit pas le nom du titulaire – saisi sur D______ et utilisé par les clients pour acheter la cocaïne, soit le sien. Il n'avait pas changé de corpulence ces dernières années.

e. Lors de leur audition par la police, trois acheteurs ont en substance déclaré que le numéro qu'ils appelaient pour acheter la cocaïne était utilisé par deux dealers, qui conduisaient une L______ grise. Le premier était âgé de 40-50 ans et décrit de corpulence forte par l'un des acheteurs [cette description correspond au physique de A______], l'autre – identifié comme étant D______ – était plus jeune. Ce dernier vendait depuis janvier 2022. Le numéro de téléphone permettant de joindre les dealers était enregistré dans leurs téléphones respectifs sous "J______" pour l'un, "K______" pour l'autre et "I______" pour le troisième.

f. Lors de l'audience de confrontation, du 17 juin 2022, devant le Ministère public, F______ a émis un doute en voyant A______, précisant que son dealer avait l'air "beaucoup plus corpulent", portait souvent un bonnet et restait dans le véhicule lors des transactions. La première transaction avait eu lieu en été 2021 ; le vendeur lui avait dit s'appeler "I______".

H______ a déclaré que A______ ne lui disait rien, que ce n'était pas à lui qu'elle avait acheté de la drogue, mais à une personne petite et trapue. Elle avait identifié D______ mais ignorait le nom de l'autre, qui devait être âgé entre 20 ans et 30 ans et qui restait souvent dans la voiture. Ils ne se parlaient pas lors des transactions. Toutes les personnes de type africain se ressemblaient. Elle ne se souvenait pas que D______ aurait déposé du courrier appartenant à A______ chez elle ; elle était aide-comptable et recevait des déclarations d'impôts. Ses souvenirs étaient embrouillés par la prise de médicaments.

G______ n'a pas reconnu A______ comme étant son dealer. Elle avait connu D______ entre décembre 2021 et janvier 2022. Précédemment, elle achetait à l'autre dealer, qui s'appelait "I______", depuis l'été 2021. Elle ne l'avait jamais vu debout. S'il était exact que "I______" l'avait présentée à D______ – ce que ce dernier confirme –, elle a maintenu ne pas reconnaître A______. Il lui semblait que les deux dealers se déplaçaient dans la même voiture.

A______ a persisté à contester les faits. Il n'avait jamais vu ces témoins avant. Il n'avait pas de surnom.

g. Les traces prélevées sur les sachets de drogue correspondent au profil ADN de D______ et d'un tiers – M______, né en 1978 et résidant à Berne –, mais pas de A______.

Les données rétroactives du raccordement saisi sur D______, requises par la police et A______, n'ont pas été demandées par le Ministère public.

Par ordonnance du 11 juillet 2022, le Ministère public a ordonné la disjonction de la procédure s'agissant du prévenu M______, qui n'avait pas encore été entendu.

h. S'agissant de sa situation personnelle, A______ est divorcé (en Suisse) et se dit le père d'un enfant vivant en Gambie avec sa mère (celle de l'enfant). Il n'a pas de famille en Suisse. Carreleur de formation, il est sans emploi depuis 2019. Il a travaillé pour N______ (N______) en qualité de nettoyeur quelque temps en 2021. Sa "copine", dont il a dit être séparé, l'aidait à payer le loyer. Il s'était présenté à l'Hospice général pour obtenir une aide financière.

À teneur de l'extrait du casier judiciaire suisse, il n'a pas d'antécédents.

i. Dans sa demande de mise en détention pour des motifs de sûretés, le Ministère public a retenu que les charges étaient suffisantes au vu des éléments figurant au dossier, plus particulièrement des constatations de la police, des résultats de la perquisition du domicile de A______, des déclarations de D______, qui le mettait formellement en cause, ainsi que des déclarations des toxicomanes, même s'ils ne l'avaient pas reconnu lors de l'audience de confrontation, étant à cet égard précisé que la corpulence de A______ avait changé au fil du temps, comme en attestait une comparaison de différentes photos versées à la procédure.

Il existait un risque de fuite, au vu de la nationalité étrangère du prévenu et du fait que, malgré son permis C, il pourrait être tenté de fuir le pays pour échapper à la justice suisse, étant précisé qu'il avait été absent pendant plusieurs mois, ce qui avait généré un avis de recherche et d'arrestation. Ce risque était renforcé par la peine menace et celle concrètement encourue, et pour assurer l'éventuelle expulsion requise (art. 66a ss CP).

Il existait également un risque de collusion, d'une part, avec D______, qui le mettait formellement en cause, et, d'autre part, avec les acheteurs. Il convenait d'éviter que A______ n'entre en contact avec ces personnes, "sous peine de compromettre l'instruction de la procédure". Ce risque subsistait même si l'audience de confrontation avait déjà eu lieu, car il n'était pas exclu que A______ tentât d'entrer en contact avec son co-prévenu et les acheteurs, en amont de l'audience de jugement, pour influencer leurs déclarations.

C. Dans l'ordonnance querellée, le TMC a retenu l'existence de charges suffisantes, au vu des éléments du dossier, malgré les déclarations des acheteurs en confrontation. En définitive, il appartiendrait à l'autorité de jugement de se forger une conviction, étant précisé que le rôle du prévenu était visiblement au stade de l'organisation, et donc en retrait par rapport à celui de D______.

Le risque de fuite devait être retenu, pour les raisons évoquées par le Ministère public. Les mesures de substitution proposées, voire d'autres, reposaient sur la volonté du prévenu et n'empêcheraient nullement la fuite.

Il existait également un risque de collusion avec le co-prévenu et les acheteurs. Il importait, au vu des déclarations divergentes, que l'autorité de jugement disposât de déclarations non "polluées", risque important au vu des enjeux pour le prévenu. Une interdiction de contact apparaissait insuffisante.

D.           a. Dans son recours, A______ invoque l'insuffisance de charges. L'unique élément invoqué contre lui résidait dans sa mise en cause par D______, lequel n'avait d'autre but que de réduire sa propre culpabilité. Aucun des consommateurs ne l'avait reconnu, ce qui démontrait qu'il ne leur avait jamais vendu de stupéfiants. D'ailleurs, la description qu'ils avaient faite du vendeur ne correspondait pas à sa corpulence. En outre, absent durant cinq mois, il n'avait eu aucun contrôle sur son appartement, son véhicule et les activités de D______. Il ne se serait pas rendu au poste de police à son retour de l'étranger pour signaler un cambriolage supposé, s'il savait que son appartement avait été fouillé par la police.

Un risque de collusion ne pouvait être retenu, alors que l'instruction était terminée et les confrontations réalisées. De plus, les acheteurs ne semblaient pas avoir été convoqués à l'audience de jugement, de sorte qu'il ne pourrait influencer qui que ce soit ni faire disparaître des preuves.

S'agissant du risque de fuite invoqué, sa nationalité étrangère ne suffisait, à elle seule, pas. Il résidait, au bénéfice d'un permis C, sur le territoire suisse depuis vingt ans. Le centre de ses intérêts se trouvait dans ce pays : il y vivait avec sa "petite amie" – sans autre précision – et y bénéficiait d'un large réseau professionnel et personnel. Le but de son voyage en Gambie était de rendre visite à sa mère, qui était malade et était d'ailleurs décédée durant son séjour. Il souffrait de diabète et était suivi à cet égard depuis de nombreuses années à Genève. Il lui paraissait inconcevable de ne plus bénéficier de ce suivi médical.

Pour pallier l'éventuel risque de fuite, il propose l'obligation de se présenter régulièrement à un service pénal ou administratif, l'assignation à résidence et le port du bracelet électronique.

b. Le TMC maintient les termes de son ordonnance, sans formuler d'observations.

c. Le Ministère public conclut au rejet du recours. Il se réfère au contenu de sa demande de mise en détention pour des motifs de sûreté et à la motivation du TMC, qu'il fait sienne.

d. Le recourant persiste dans les termes de son recours.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             Le recourant invoque l'insuffisance de charges.

2.1.       Pour qu'une personne soit placée en détention provisoire ou pour des motifs de sûreté, il doit exister à son égard des charges suffisantes ou des indices sérieux de culpabilité, susceptibles de fonder de forts soupçons d'avoir commis une infraction (art. 221 al. 1 CPP). L'intensité de ces charges n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables. Au contraire du juge du fond, le juge de la détention n'a pas à procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge ni à apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure (ATF 143 IV 330 consid. 2.1; 143 IV 316 consid. 3.1 et 3.2).

2.2.       En l'espèce, bien que les charges pesant sur le recourant se soient amoindries après la confrontation du 17 juin 2022 – les trois acheteurs ayant déclaré que le recourant n'était pas le premier vendeur –, elles demeurent suffisantes au sens de l'art. 221 al. 1 CPP.

Les stupéfiants ont été retrouvés dans l'appartement du recourant et D______ était en possession non seulement des clés du logement, mais également du véhicule de l'intéressé. Or, les acheteurs ont déclaré que D______ n'avait livré la cocaïne que depuis décembre 2021 – soit depuis le départ du recourant en Gambie – et que, précédemment, les livraisons étaient faites, par l'autre dealer, "I______", à l'aide du même véhicule, une L______ grise. Ils déclarent également tous avoir commencé à acheter à "I______" durant l'été 2021, date qui correspond à l'achat par le recourant – selon ses propres déclarations – de cette voiture.

Il existe ainsi toujours de forts soupçons, au vu des déclarations de D______ et des éléments relevés ci-dessus, que le recourant ait requis ce dernier de le remplacer durant son voyage en Gambie. Le fait que les trois acheteurs n'aient pas reconnu le recourant, que ce dernier déclare ne pas avoir de surnom et que son profil ADN ne se retrouve pas sur les sachets de cocaïne, ne le met ainsi, en l'état du dossier remis à la Chambre de céans, pas d'emblée hors de cause, puisque les acheteurs avaient vu leur dealer principalement assis dans la voiture, portant un bonnet pour certains, et lors de transactions qui paraissent rapides au vu de leurs descriptions.

C'est donc à bon droit que le TMC a retenu l'existence de charges suffisantes.

3.             Le recourant conteste tout risque de collusion.

3.1. Conformément à l'art. 221 al. 1 let. b CPP, la détention provisoire ne peut être ordonnée que lorsque le prévenu est fortement soupçonné d'avoir commis un crime ou un délit et qu'il y a sérieusement lieu de craindre qu'il compromette la recherche de la vérité en exerçant une influence sur des personnes ou en altérant des moyens de preuve. Pour retenir l'existence d'un risque de collusion, l'autorité doit démontrer que les circonstances particulières du cas d'espèce font apparaître un danger concret et sérieux de manœuvres propres à entraver la manifestation de la vérité, en indiquant, au moins dans les grandes lignes et sous réserve des opérations à conserver secrètes, quels actes d'instruction doivent être encore effectués et en quoi la libération du prévenu en compromettrait l'accomplissement (ATF 137 IV 122 consid. 4.2; 132 I 21 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 1B_577/2020 du 2 décembre 2020 consid. 3.1).

3.2. En l'espèce, les co-prévenus ont été confrontés l'un à l'autre et aux témoins. Ces derniers ont déclaré que le premier dealer – "I______" – n'était pas le recourant, de sorte qu'on ne voit pas comment le précité pourrait davantage les amener à modifier leurs déclarations en sa faveur. D______ étant détenu, la sortie du recourant ne ferait courir aucun risque à la procédure. Il faut aussi relever que le recourant n'a été arrêté que trois mois après son co-prévenu, de sorte qu'il aurait déjà, dans ce laps de temps, pu faire disparaître les éventuels éléments à charge.

Partant, il n'existe désormais plus aucun risque de collusion.

4.             Le recourant conteste le risque de fuite.

4.1. Conformément à l'art. 221 al. 1 let. a CPP, la détention provisoire peut être ordonnée s'il y a sérieusement lieu de craindre que le prévenu se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite. Selon la jurisprudence, le risque de fuite doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères, tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'État qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable. La gravité de l'infraction ne peut pas, à elle seule, justifier le placement ou le maintien en détention, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine dont le prévenu est menacé (ATF 145 IV 503 consid. 2.2; 143 IV 160 consid. 4.3).

4.2         En l'espèce, le recourant est ressortissant de Gambie, pays dans lequel il a toute sa famille, étant relevé qu'il vient d'y séjourner durant cinq mois, ce qui témoigne des liens forts qu'il y a conservés, même si après le décès de sa mère ces attaches pourraient s'être restreintes. S'il réside en Suisse depuis de nombreuses années, au bénéfice d'un permis d'établissement, le recourant n'a, à l'heure actuelle, pas d'emploi. Il mentionne, dans son recours, une "petite amie", alors qu'il avait précédemment déclaré s'être séparé de sa "copine". Il n'a, de surcroît mentionné ni nom ni adresse permettant d'identifier cette compagne. On ne saurait donc retenir qu'une relation suivie le retiendrait en Suisse.

Il existe donc un risque que le recourant, pour éviter le procès à venir, et l'éventuelle condamnation, ne préfère s'enfuir dans son pays d'origine.

5.      Le recourant propose des mesures de substitution pour pallier le risque de fuite.

5.1. Conformément au principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst., concrétisé par l'art. 237 al. 1 CPP), le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si elles permettent d'atteindre le même but que la détention, par exemple, la saisie des documents d'identité et autres documents officiels (al. 2 let. b), l'assignation à résidence (al. 2 let. c) et l'obligation de se présenter régulièrement à un service administratif (al. 2 let. d). La liste des mesures de substitution énoncée à l'art. 237 CPP n'est pas exhaustive (arrêt du Tribunal fédéral 1B_654/2011 du 7 décembre 2011 consid. 4.2).

5.2. Une assignation à résidence, éventuellement couplée à un bracelet électronique, sert à s'assurer qu'une personne assignée à résidence ou interdite de périmètre est bien à l'emplacement prescrit aux heures prévues ou, au contraire, n'est pas à un endroit où l'accès lui est interdit (arrêt du Tribunal fédéral 1B_142/2018 du 5 avril 2018 consid. 2.1 et les références citées). Un tel outil ne permet toutefois pas de prévenir une fuite en temps réel, mais uniquement de la constater a posteriori (ATF 145 IV 503 consid. 3.3.1). Il n'est en effet pas exclu que le porteur d'un dispositif de surveillance électronique puisse fuir et, notamment, passer une frontière avant que les forces de l'ordre ne parviennent à l'arrêter, en particulier en cas de résidence proche d'une frontière (cf. ATF 145 IV 503 consid. 3.3).

5.3. En l'espèce, s'il existe certes un risque de fuite, il n'est pas d'une intensité telle qu'il ne puisse être pallié par des mesures de substitution. Le recourant n'a pas d'antécédents judiciaires. Il est au bénéfice d'un permis d'établissement en Suisse, qu'il viendrait à perdre s'il quittait le pays et ne se présentait pas au procès. S'il a dû être placé sous avis de recherche et d'arrestation dans la présente procédure, c'est en raison de son séjour de plusieurs mois dans son pays d'origine, étant néanmoins relevé que non seulement il est revenu en Suisse mais qu'il s'est présenté à la police pour y dénoncer ce qu'il croyait être un cambriolage à son domicile. Rien au dossier ne permet en outre de retenir, à ce stade, qu'il n'exécuterait pas le renvoi de Suisse éventuellement ordonné par la juridiction de jugement.

Il s'ensuit que, compte tenu des charges amoindries – que le recourant conteste – et de sa situation stable en Suisse depuis de nombreuses années, au bénéfice d'un permis d'établissement, le risque de fuite paraît pouvoir être contenu par l'interdiction de quitter le territoire suisse ; le dépôt de son passeport gambien ; l'assignation à résidence dans son appartement, sis chemin 1______ no. ______ à E______ ; et le port d'un bracelet électronique.

Conformément au principe de proportionnalité, la mesure sera ordonnée jusqu'au 10 octobre 2022.

6.             Le recours sera ainsi admis et la libération du recourant ordonnée au profit des mesures de substitution précitées.

7.             L'admission du recours ne donne pas lieu au paiement de frais, qui seront laissés à la charge de l'État.

8.             Il n'y a pas lieu d'indemniser à ce stade (cf. art. 135 al. 2 CPP) le défenseur d'office, qui ne l'a du reste pas demandé.

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Admet le recours.

Ordonne la mise en liberté de A______ au plus tôt le mercredi 10 août 2022, après le dépôt de son passeport gambien auprès du greffe du Tribunal pénal.

Ordonne à A______ de se soumettre aux mesures de substitution suivantes :

a) obligation de se présenter à toutes les convocations de la police et du Pouvoir judiciaire;

b) obligation de déposer son passeport, avant sa mise en liberté;

c) interdiction de quitter le territoire suisse sans l'accord de la Direction de la procédure, en l'occurrence le Tribunal pénal;

d) obligation de résider à son domicile sis 1______ no. ______, [code postal] E______;

e) assignation à résidence 7 jours sur 7 à son domicile sis chemin 1______ no. ______ à E______, qu'il ne pourra quitter que de 10h00 à 16h00 et le jour de l'audience au Tribunal pénal;

f) obligation de porter un bracelet électronique (sans GPS) fixé sur sa personne, la mise en place étant prévue au plus tôt pour le mercredi 10 août 2022 à 11 heures, à l'adresse assignée;

g) obligation de se conformer à toute instruction donnée par le Service de probation et d'insertion en lien avec le port de l'appareil technique fixé sur sa personne.

Dit que les mesures de substitution ci-dessus sont ordonnées jusqu'au 10 octobre 2022, à charge de la Direction de la procédure d'en requérir la prolongation si elle l'estime nécessaire.

Confie au Service de probation et d'insertion le mandat de procéder à la pose sur A______ d'un appareil technique fixe (sans GPS), puis d'assurer la surveillance de l'assignation à résidence.

Charge la Direction de la procédure, en l'état le Tribunal pénal, du suivi des mesures de substitution.

Attire l'attention de A______ sur le fait que, en application de l'article 237 al. 5 CPP, le Tribunal peut, en tout temps, révoquer les mesures de substitution, en ordonner d'autres ou prononcer la détention provisoire si des faits nouveaux l'exigent ou si le prévenu ne respecte pas les obligations qui lui ont été imposées.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, préalablement par courriel, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte.

Le communique, pour information, par courriel, au greffe de la prison B______ et au Service de probation et d'insertion.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Daniela CHIABUDINI et
Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.