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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/19628/2023

AARP/96/2024 du 14.03.2024 sur JTDP/1397/2023 ( PENAL ) , ADMIS

Descripteurs : DISPOSITIONS PÉNALES DE LA LEI;ENTRÉE ILLÉGALE
Normes : LEI.115
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/19628/2023 AARP/96/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 14 mars 2024

 

Entre

A______, domicilié ______, Italie, comparant par Me B______, avocate,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/1397/2023 rendu le 31 octobre 2023 par le Tribunal de police,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a.a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 31 octobre 2023, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a acquitté de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration [LEI]), mais déclaré coupable d'entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI) et condamné à une peine pécuniaire de
30 jours-amende à CHF 10.- l'unité (sous déduction d'un jour-amende correspondant à un jour de détention avant jugement), ses conclusions en indemnisation étant rejetées et les frais de procédure mis à sa charge.

a.b. A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à son acquittement du chef d'entrée illégale et à la couverture de ses frais de défense, frais à la charge de l'État.

b. Selon l'ordonnance pénale du 13 septembre 2023, il est encore reproché ce qui suit à A______ :

Le 12 septembre 2023, il est entré en Suisse alors qu'il faisait l'objet d'une interdiction de pénétrer sur le territoire suisse prise à son encontre par le Secrétariat d'État aux migrations (SEM), valable jusqu'au 3 janvier 2024, laquelle lui avait valablement été notifiée le 6 avril 2021.

B. Les faits encore pertinents suivants ressortent de la procédure :

De la présente procédure

a. A______, ressortissant gambien né le ______ 1998, est au bénéfice d'un permis de séjour et d'une carte d'identité délivrés les 15 février et 6 juillet 2023 par les autorités italiennes.

b. Le 12 septembre 2023, alors qu'il circulait à pieds à C______ [GE] , il a été appréhendé par les gardes-frontières, lesquels ont constaté qu'il faisait l'objet d'une interdiction d'entrée sur le territoire, valable du 3 avril 2022 au 3 janvier 2024.

Cette décision, datée du 4 janvier 2021 et notifiée à l'intéressé le 6 avril 2021 selon le fichier SYMIC, mentionne une adresse de destination en Italie et comprend la mention "Transmission par la représentation suisse à D______ [Italie]". Elle est rédigée en français.

c.a. Selon les déclarations de A______ à la police, il ignorait faire l'objet d'une interdiction d'entrée en Suisse. À la question "Est-ce la première fois que vous entrez en Suisse depuis la notification (06.04.2021) de votre interdiction d'entrée ?", il a affirmé être resté dans le pays depuis cette date. Il était désolé, avait oublié. Lorsqu'il avait été arrêté, il était sur le chemin du retour après avoir rendu visite à son frère, qui vivait en France voisine.

c.b. À teneur de son opposition à l'ordonnance pénale, A______ avait rencontré en prison un homme maîtrisant son dialecte, qui lui avait expliqué ce qui ressortait de sa première audition. Il avait réalisé qu'en raison de sa mauvaise compréhension de la langue anglaise, il n'était pas parvenu à s'exprimer clairement. Il souhaitait dès lors pouvoir être entendu en présence d'un interprète parlant le même dialecte que lui.

d. Il ressort d'une note au dossier que contacté par le Ministère public (MP) en amont de son audience sur opposition, le greffe de la prison de E______ a confirmé que A______ ne comprenait pas correctement le français, ni l'anglais, maîtrisant uniquement le mandingue. Cela étant, dès lors que le seul interprète parlant ce dialecte était injoignable, il était tout de même décidé de faire appel à un interprète en langue anglaise.

e. Au MP, A______ a rectifié ses propos. Il avait quitté la Suisse en avril 2021 pour se rendre en Italie. Au moment de son interpellation, il allait rendre visite à l'un de ses frères en Suisse, lui-même vivant désormais en France voisine chez un autre de ses frères. Il ignorait faire l'objet d'une mesure d'interdiction, dont il avait pris connaissance au moment d'être appréhendé.

f. Par-devant le TP, A______ a encore répété ignorer faire l'objet d'une interdiction d'entrée en Suisse. À l'avenir, il souhaitait demeurer en France avec ses frères.

De la procédure pénale P/1______/2020

g. A______ a précédemment fait l'objet d'une interdiction d'entrée en Suisse, valable du 17 août 2019 au 2 avril 2022.

Cette décision, datée du 3 avril 2019 et rédigée en italien, mentionne une adresse de destination en Italie et comprend également la mention "Transmission par la représentation suisse à D______ [Italie]". Il apparaît toutefois que la notification à A______ est intervenue en main propre le 14 mai 2019, comme en témoigne l'inscription manuscrite figurant sur la seconde page du document.

h. Dans le cadre d'une procédure pénale distincte, il était notamment reproché au précité sa présence à Genève le 23 octobre 2020.

h.a. A______ a été entendu sur les faits par le MP le 29 avril 2021.

h.b. Interpellé au mois de février 2022 par le TP afin notamment de savoir si l'intéressé faisait l'objet, le 23 octobre 2020, d'une décision d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée à Genève, l'OCPM a uniquement fait état de la mesure d'interdiction valable jusqu'au 2 avril 2022.

Autres éléments de procédure

i.a. Le 9 octobre 2023, Me B______ s'est constituée à la défense des intérêts de A______ et a sollicité d'être nommée d'office.

i.b. Par ordonnance du même jour, le TP a refusé d'accorder l'assistance juridique au précité, considérant que la cause ne présentait pas de difficultés particulières en fait ou en droit, si bien que celui-ci était en mesure de défendre seul ses intérêts.

i.c. À l'issue de sa consultation du dossier intervenue le 13 octobre 2023,
Me B______ a sollicité l'apport à la procédure de la décision d'interdiction litigieuse et de la preuve de sa notification, demande à laquelle le TP a fait suite en joignant au dossier la décision considérée, rappelant pour le surplus que la date de sa notification ressortait du fichier SYMIC déjà accessible.

C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties (art. 406 al. 2 CPP).

b.a. Dans son mémoire d'appel, A______ persiste dans ses conclusions.

Au moment de son interpellation, il ignorait faire l'objet d'une interdiction d'entrée en Suisse valable du 3 avril 2022 au 3 janvier 2024. D'ailleurs, divers éléments étayaient la thèse selon laquelle la notification de cette décision, censée avoir eu lieu le 6 avril 2021 selon le fichier SYMIC, n'était en réalité pas intervenue : l'appelant avait toujours fermement contesté avoir connaissance de l'interdiction ; le SEM n'avait pas été en mesure d'apporter la preuve de la notification ; la décision ne comprenait aucune mention manuscrite selon laquelle la notification serait intervenue en main propre, comme cela était le cas sur la première mesure d'interdiction dont il avait fait l'objet ; la décision avait vraisemblablement été envoyée à une adresse en Italie, alors qu'il se trouvait en Suisse à tout le moins jusqu'au 29 avril 2021 ; la décision n'avait pas été retournée au SEM avec la mention "non réclamé" ; dans le cadre de l'autre procédure pénale menée à son encontre également pour des infractions à la LEI, il n'était fait aucune mention de l'interdiction litigieuse, alors même qu'une audience et des échanges avec l'OCPM avaient eu lieu postérieurement à la prétendue notification de celle-ci.

b.b. A______ chiffre ses prétentions en indemnisation pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure à
CHF 3'648.38, TVA incluse.

c. Le Ministère public (MP) conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris.

Les éléments figurant au dossier démontraient que la décision litigieuse avait été dûment notifiée le 6 avril 2021 à A______.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance
(art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404
al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

2. La présomption d'innocence, garantie par les art. 10 CPP, 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst), 14 par. 2 Pacte ONU II et
6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH), ainsi que son corollaire, le principe in dubio pro reo, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large. En tant que règle sur le fardeau de la preuve, elle signifie, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 148 IV 409 consid. 2.2).

3. 3.1. L'art. 115 al. 1 let. a LEI réprime quiconque contrevient aux dispositions sur l'entrée en Suisse (art. 5).

Selon l'art. 5 al. 1 LEI, pour entrer en Suisse, tout étranger doit avoir une pièce de légitimation reconnue pour le passage de la frontière et être muni d’un visa si ce dernier est requis (let. a) ; disposer des moyens financiers nécessaires à son séjour (let. b) ; ne représenter aucune menace pour la sécurité et l’ordre publics ni pour les relations internationales de la Suisse (let. c) ; ne pas faire l’objet d’une mesure d’éloignement ou d’une expulsion (let. d).

3.2. En l'espèce, l'appelant ne conteste pas être entré sur le territoire suisse le
12 septembre 2023. Seule demeure litigieuse la question de savoir si la décision d'interdiction d'entrée dans ce pays, valable du 3 avril 2022 au 3 janvier 2024, lui avait été dûment notifiée à cette date, ce que l'intéressé conteste.

L'appelant a continuellement nié avoir eu connaissance de la mesure d'interdiction.

S'il a certes affirmé, à l'occasion de son audition par la police, qu'il était demeuré en Suisse après sa notification, il convient de donner crédit à ses déclarations selon lesquelles ses propos n'ont pas correctement été protocolés du fait de sa mauvaise compréhension de l'anglais ou de la question posée.

En effet, outre le fait que sa maîtrise défaillante de la langue anglaise ressort clairement du dossier, soit de l'échange intervenu entre le MP et la prison de E______, force est de constater que le libellé de la question qui lui a été posée ("Est-ce la première fois que vous entrez en Suisse depuis la notification (06.04.2021) de votre interdiction d'entrée ?") pouvait porter à confusion, en ce sens que l'appelant, qui venait d'affirmer n'avoir pas connaissance de la mesure d'interdiction en cours, pouvait légitimement croire qu'il était fait référence à la précédente mesure d'interdiction prononcée à son encontre.

Il s'y ajoute que sa présence en Italie est à tout le moins établie les 15 février et
6 juillet 2023, dates auxquelles ont été émis, dans ce pays, son titre de séjour et sa carte d'identité italiens, ce qui vient en tout état contredire les propos tenus lors de cette première audition et étayer la thèse d'un problème de compréhension.

L'unique preuve de la notification de la décision d'interdiction, censée être intervenue le 6 avril 2021, consiste donc en l'inscription figurant dans le fichier SYMIC.

Or, cette date ne trouve aucune correspondance.

En effet, si la notification était intervenue en main propre, la décision litigieuse comprendrait une mention manuscrite à ce sujet, comme tel est le cas sur la précédente décision d'interdiction.

Une notification à l'adresse italienne figurant en tête du document apparaît au demeurant peu probable, dès lors que l'appelant se trouvait selon toute vraisemblance en Suisse à cette période, sa présence à Genève étant à tout le moins établie le
29 avril 2021 par le procès-verbal de l'audience qui s'est tenue dans la procédure P/1______/2020.

En tout état, si la date du 6 avril 2021 correspondait à une notification valablement intervenue sur sol italien par la voie diplomatique ou à l'échéance du délai de garde local, le SEM aurait été en mesure de fournir une preuve de réception ou de non réclamation du courrier, ce qui n'a pas été le cas.

Dans ces circonstances, la date inscrite dans le fichier SYMIC ne saurait à elle seule faire foi.

Il convient partant de retenir, au bénéfice du doute, que la notification de l'interdiction d'entrée valable du 3 avril 2022 au 3 janvier 2024 n'était pas intervenue au moment où l'appelant a été appréhendé.

On relèvera à titre superfétatoire que la décision litigieuse est rédigée en français, langue que l'appelant ne maîtrise pas, de sorte qu'à supposer même qu'il eût eu accès à ce document, hypothèse non retenue, on ne peut pas partir du principe qu'il en aurait saisi le contenu.

Le fait qu'il n'a pas été fait mention de la mesure d'interdiction litigieuse lors des échanges intervenus dans le cadre de la P/1______/2020 est en revanche irrelevant, considérant qu'il était alors question d'une présence illégale de l'appelant sur sol suisse le 23 octobre 2020, date à laquelle dite mesure n'avait pas encore commencé à faire effet, si bien que son évocation aurait été superflue.

En vertu de ce qui précède, l'appelant sera acquitté du chef d'entrée illégale.

4. 4.1. Selon l'art. 428 al. 1 première phrase CPP, les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé. Si l'autorité pénale d'appel rend elle-même une nouvelle décision, elle se prononce d'office sur les frais fixés par l'autorité inférieure, selon l'art. 428 al. 3 CPP.

4.2.1. En l'espèce, l'appelant obtient gain de cause en appel, de sorte que l'ensemble des frais afférents à cette procédure, y compris l'émolument de jugement complémentaire, sera laissé à la charge de l'État.

4.2.2. Il en va de même des frais relatifs à la procédure préliminaire et de première instance, totalisant CHF 745.-, considérant les acquittements prononcés.

5. 5.1.1. L'art. 429 al. 1 let. a CPP, applicable aux voies de recours par renvoi de
l'art. 436 al. 1 CPP, prévoit que, s'il est acquitté, le prévenu a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.

L'indemnisation prévue à l'art. 429 al. 1 let. a CPP suppose que tant le recours à un avocat que l'activité déployée par celui-ci sont justifiés. Dans le cadre de l'examen du caractère raisonnable du recours à un avocat, le Tribunal fédéral estime qu'il doit être tenu compte, outre de la gravité de l'infraction et de la complexité de l'affaire en fait ou en droit, de la durée de la procédure et de son impact sur la vie personnelle et professionnelle du prévenu. Par rapport à un délit ou à un crime, ce n'est qu'exceptionnellement que l'assistance d'un avocat peut être considérée comme ne constituant pas un exercice raisonnable des droits de la défense (ATF 138 IV 197 consid. 2.3.4 et 2.3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_387/2013 du 8 juillet 2013 consid. 2.1 non publié aux ATF 139 IV 241).

L'État doit en principe indemniser la totalité des frais de défense, ceux-ci devant toutefois demeurer raisonnables compte tenu de la complexité et de la difficulté de l'affaire (ATF 142 IV 163 consid. 3.1.2). La Cour de justice applique un tarif horaire maximal de CHF 450.- pour les chefs d'étude et CHF 150.- pour les avocats-stagiaires (AARP/398/2023 du 20 novembre 2023 consid. 10.1).

5.1.2. L'art. 429 al. 3 CPP, entré en vigueur au 1er janvier 2024, qui prévoit que lorsque le prévenu a chargé un défenseur privé de sa défense, celui-ci a un droit exclusif à l'indemnité prévue à l'al. 1 let. a, n'est pas applicable aux procédures d'appel qui, comme celle de la présente cause, ont été introduites avant cette date
(cf. ATF 149 II 109 consid. 7.1 ; AARP/56/2024 du 8 février 2024 consid. 8.1.2).

5.2. En l'espèce, il y a lieu de considérer, au vu du dossier, que l'assistance d'un avocat était justifiée pour l'appelant et procédait d'un exercice raisonnable de ses droits de procédure. En particulier, c'est grâce à l'intervention du conseil de l'appelant en première instance que la décision d'interdiction litigieuse a été intégrée au dossier, étant rappelé que ce document, de même que l'absence de preuve de notification autre que l'inscription figurant sur l'extrait SYMIC, ont largement participé au prononcé de la décision d'acquittement. En appel, l'instruction de la cause par la voie écrite suffit à justifier la nécessité d'un conseil juridique. Il sera ainsi fait droit, sur le principe, à une telle indemnité.

5.2.1. L'indemnité sollicitée par l'appelant pour la procédure de première instance apparaît globalement adaptée à la complexité et au volume de la procédure. Il convient cela étant de retrancher de l'état de frais le temps consacré (dix minutes) à la conférence téléphonique du 10 octobre 2023, qui ne trouve aucune justification à teneur du dossier.

L'indemnité sera partant arrêtée à CHF 2'382.85, correspondant à trois heures et
45 minutes d'activité de cheffe d'étude à CHF 450.-/heure (CHF 1'687.50) et trois heures et 30 minutes d'activité d'avocate-stagiaire à CHF 150.-/heure (CHF 525.-), TVA incluse.

5.2.2. S'agissant de l'état de frais déposé en lien avec la procédure d'appel, en seront déduits les montants facturés afférents à la consultation du dossier intervenue le
8 novembre 2023, considérant qu'une consultation avait déjà eu lieu le 13 octobre précédent et qu'il n'était aucunement à prévoir qu'une nouvelle pièce – qui n'aurait pas été transmise directement au conseil de l'appelant – serait jointe au dossier entre l'audience de jugement et le dépôt de l'annonce d'appel. L'activité relative à la finalisation des mémoires et des chargés, qui relève du secrétariat, sera également écartée. Enfin, il convient d'adapter la TVA, dont le taux de 8.1% a été injustement appliqué à l'ensemble de l'activité déployée en 2023.

Compte tenu de ce qui précède, l'indemnisation sera accordée à hauteur de
CHF 3'199.-, correspondant à six heures et 35 minutes d'activité de cheffe d'étude à CHF 450.-/heure, TVA incluse.

6. 6.1.1. En vertu de l'art. 429 al. 1 let. c CPP, le prévenu acquitté totalement ou en partie a droit à une réparation du tort moral subi en raison d'une atteinte particulièrement grave à sa personnalité, notamment en cas de privation de liberté. L'intensité de l'atteinte à la personnalité doit être analogue à celle requise dans le contexte de l'art. 49 du code des obligations (CO ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_928/2014 du 10 mars 2016 consid. 5.1).

En principe, un montant de CHF 200.- par jour en cas de détention injustifiée de courte durée constitue une indemnité appropriée, dans la mesure où il n'existe pas de circonstances particulières qui pourraient fonder le versement d'un montant inférieur ou supérieur (ATF 143 IV 339 consid. 3.1)

6.1.2. Dans l'hypothèse où le bénéficiaire, domicilié à l'étranger, serait exagérément avantagé en raison des conditions économiques et sociales existantes à son lieu de domicile, il convient d'adapter l'indemnité vers le bas. Dans ces circonstances, on ne peut toutefois pas procéder schématiquement selon le rapport du coût de la vie au domicile du demandeur avec celui de la Suisse ou à peu près selon ce rapport, sinon l'exception deviendrait la règle (ATF 125 II 554 consid. 4a ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_58/2016 du 18 août 2016 consid. 4.2).

Le Tribunal fédéral a considéré qu'il n'y avait pas lieu de réduire l'indemnité dans l'hypothèse où le bénéficiaire vivait au Portugal, le coût de la vie dans ce pays correspondant au 70% du coût de la vie en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 1C_106/2008 du 24 septembre 2008 consid. 4.2).

6.2. En l'espèce, l'appelant a été détenu durant un jour, qu'il convient d'indemniser vu l'acquittement prononcé.

Considérant qu'il bénéficie d'un titre de séjour en Italie et affirme souhaiter s'établir en France, pays dans lesquels l'indice du coût de la vie ne se distingue pas suffisamment de celui de la Suisse pour justifier une adaptation du montant journalier de l'indemnité (https://data.oecd.org/price/price-level-indices.htm), la somme de CHF 200.- lui sera allouée, celle-ci portant intérêts à 5% dès le
12 septembre 2023.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/1397/2023 rendu le 31 octobre 2023 par le Tribunal de police dans la procédure P/19628/2023.

L'admet.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Acquitte A______ d'entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI).

Laisse les frais de la procédure préliminaire et de première instance à la charge de l'État (art. 423 al. 1 CPP).

Laisse les frais de la procédure d'appel à la charge de l'État (art. 428 al. 1 CPP).

Alloue à A______ un montant de CHF 2'382.85, TVA comprise, à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits au cours de la procédure de première instance (art. 429 al. 1 let. a CPP).

Alloue à A______ un montant de CHF 3'199.-, TVA comprise, à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits au cours de la procédure d'appel (art. 429 al. 1 let. a et 436 al. 1 CPP).

Condamne l'État de Genève à payer à A______ la somme de CHF 200.-, avec intérêts à 5% l'an dès le 12 septembre 2023, à titre d'indemnité pour son tort moral résultant de la procédure pénale (art. 429 al. 1 let. c CPP).

 

 

 

 

 

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, à l'Office cantonal de la population et des migrations et au Secrétariat d’Etat aux migrations.

 

La greffière :

Anne-Sophie RICCI

 

La présidente :

Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.