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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/59/2024

DCSO/151/2024 du 18.04.2024 ( PLAINT ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/59/2024-CS DCSO/151/24

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 18 AVRIL 2024

 

Plainte 17 LP (A/59/2024-CS) formée en date du 4 janvier 2024 par A______ et B______, représentés par Me Adeline Himpens, avocate.

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

-       A______ et B______

c/o Me Adeline HIMPENS

Promenade du Pin 1

Case postale

1211 Genève 3.

- C______

______

______.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. Le 13 octobre 2021, A______ et B______ ont engagé une poursuite à l'encontre de C______ pour un montant de 20'052 fr. réclamé au titre de loyers impayés du 1er juin 2019 au 30 juin 2020 sur la base de l'ordonnance de réméré du Tribunal judiciaire de D______ [France] du 28 mai 2020.

b. Le 26 avril 2022, l'Office cantonal des poursuites (ci-après : l'Office) a notifié le commandement de payer, poursuite n° 1______ à C______, qui y a formé opposition le même jour.

c. Par requête du 3 janvier 2023, A______ et B______ ont requis la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer.

Par jugement du 25 juillet 2023, le Tribunal de première instance, statuant par voie de procédure sommaire, a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition à hauteur de 19'259 fr. 50 en mettant les frais judiciaires et dépens à la charge de C______.

Ce jugement, communiqué pour notification par le greffe le 27 juillet 2023, a été reçu par A______ et B______ le lendemain 28 juillet 2023.

C______ n'a pu être atteint lors de la première tentative de notification. Un avis de retrait lui a été remis le 18 octobre 2023, et l'envoi a été retourné au Tribunal de première instance à l'échéance du délai de garde.

d. Le 28 novembre 2023, A______ et B______ ont requis la continuation de la poursuite, joignant à leur réquisition une copie du jugement du 25 juillet 2023 et de la correspondance échangée avec le Tribunal de première instance en lien avec la notification de ce jugement au poursuivi.

e. Par décision du 11 décembre 2023, l'Office a refusé de donner suite à cette réquisition de continuer la poursuite, au motif que cette poursuite était périmée, le délai de l'art. 88 al. 2 LP étant parvenu à échéance le 17 novembre 2023.

f. Le 15 décembre 2023, B______ et A______ ont demandé à l'Office de reconsidérer sa décision.

Par réponse du 20 décembre 2023, l'Office a refusé de reconsidérer sa décision.

B. a. Par acte adressé le 4 janvier 2024 à la Chambre de surveillance, B______ et A______ forment une plainte au sens de l'art. 17 LP. Ils concluent à l'annulation de la décision de l'Office du 11 décembre 2023, qu'ils ont reçue le lendemain 12 décembre 2023, à l'annulation du refus de reconsidération du 20 décembre 2023 et à l'admission de leur réquisition de continuer la poursuite du 28 novembre 2023.

Ils font valoir que le jugement de mainlevée prononcé le 25 juillet 2023 est exécutoire lors de sa notification aux deux parties, soit le 25 octobre 2023, que délai de péremption de l'art. 88 al. 2 LP parvenait ainsi à échéance le 14 février 2024 seulement, de sorte que leur réquisition de continuer la poursuite n’était pas tardive.

b. Dans son rapport du 26 janvier 2024, l'Office conclut au rejet de la plainte. Selon lui, le délai de péremption, suspendu pendant la procédure de mainlevée, avait recommencé à courir le 29 juillet 2023 soit le lendemain de la communication du jugement de mainlevée aux plaignants, expirant ainsi avant qu'ils aient sollicité la continuation de la poursuite.

c. C______ ne s'est pas déterminé sur la plainte.

d. Par avis du 7 février 2024, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1. 1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de la LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre des mesures prises par l'Office – ou un autre organe de l'exécution forcée – qui ne peuvent être attaquées par la voie judiciaire (art. 17 al. 1 LP). La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP).

Par "mesure" de l'office au sens des art. 17 s. LP, il faut entendre tout acte d'autorité accompli par l'office ou par un organe de la poursuite en exécution d'une mission officielle dans une affaire concrète (ATF 129 III 400 consid. 1.1; ATF 128 III 156 consid. 1c et les références). L'acte de poursuite doit être de nature à créer, modifier ou supprimer une situation du droit de l'exécution forcée dans l'affaire en question (ATF 129 III 400 consid. 1.1). En d'autres termes, il doit s'agir d'un acte matériel qui a pour but la continuation ou l'achèvement de la procédure d'exécution forcée et qui produit des effets externes (ATF 142 III 643 consid. 3). Ne constituent en conséquence pas des mesures sujettes à plainte la simple confirmation d'une décision déjà prise, une communication de l'Office sur ses intentions ou un avis (Gillieron, Commentaire LP, n. 184 et 185 ad art. 17 LP; Erard, in CR LP, 2005, n. 10 ad art. 17 LP; cf. ATF 142 III 643 consid. 3;
129 III 400 consid. 1.1; 128 III 156 consid. 1c).

1.2 En l'espèce, la plainte, formée dans les délai et forme prescrits (art. 17 al. 2, 56 et 63 LP) auprès de l'autorité compétente, est recevable dans la mesure où elle est dirigée contre la décision du 11 décembre 2024 refusant de donner suite à la réquisition de continuer la poursuite. Elle n'est en revanche pas recevable en ce qu'elle tend à l'annulation du refus de l'Office de reconsidérer sa décision, communiqué le 20 décembre 2023, qui ne constitue pas une mesure sujette à plainte.

2. 2.1 Selon l'art. 88 al. 2 LP, le droit du créancier de requérir la continuation de la poursuite se périme par un an à compter de la notification du commandement de payer. Si opposition a été formée, ce délai ne court pas entre l'introduction de la procédure judiciaire ou administrative et le jugement définitif.

Le délai est suspendu, en cas d'opposition, à compter de l'introduction de la procédure visant à en obtenir la levée, selon les règles applicables à cette procédure, jusqu'au moment où le créancier est en mesure de requérir la continuation de la poursuite. Tel sera en principe le cas lorsque le jugement prononçant la mainlevée acquiert force de chose jugée formelle, c'est-à-dire lorsqu'il ne peut plus être remis en cause par une voie ordinaire, ayant de par la loi un effet suspensif. Sous réserve de cas particuliers, une décision susceptible d'appel entre ainsi en force et devient exécutoire non pas dès son prononcé ou sa notification mais seulement au moment du prononcé sur appel ou, si le délai d'appel n'est pas utilisé, à l'expiration de celui-ci (ATF 139 III 486 consid. 3). A l'inverse, une décision ne pouvant être contestée que par la voie d'un recours, au sens des art. 319 ss. CPC, acquiert en principe force de chose jugée et est exécutoire dès son prononcé (art. 325 al. 1 CPC), dès lors que l'instance de recours ne dispose que d'un pouvoir de cognition limité (art. 320 CPC) et que le recours n'a pas d'effet suspensif automatique (art. 325 al. 2 CPC). Dans cette dernière hypothèse, le caractère définitif et exécutoire de la décision écartant la mainlevée résulte directement de la loi, de telle sorte qu'il n'est pas nécessaire au poursuivant de joindre à sa réquisition de poursuite une attestation à cet effet (ATF 130 III 657 consid. 2.1; 126 III 479 consid. 2 at b; DCSO/155/2020 du 14 mai 2020 consid. 4.1; DCSO/68/2017 du 9 février 2017 consid. 2.1; Winkler, in KUKO SchKG, 2ème éd., 2014, n. 8a ad art. 88 LP).

La péremption de la poursuite est la sanction de l'inaction du créancier, raison pour laquelle le délai est suspendu tant que dure l'instance judiciaire tendant à faire lever l'opposition du débiteur. Le délai ne recommence donc à courir au préjudice du créancier que si, après avoir obtenu une décision exécutoire, il n'en fait pas usage pour requérir la continuation de la poursuite (ATF 106 III 51 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_428/2020 du 24 août 2020, consid. 5.2).

2.2 En l'espèce, le commandement de payer, poursuite n° 1______, a été notifié à l'intimé le 26 avril 2022, de sorte que le délai d'un an prévu par l'art. 88 al. 2 LP a commencé à courir le lendemain 27 avril 2022. Le délai a été suspendu dès le 3 janvier 2023, date à laquelle les plaignants ont requis la mainlevée de l'opposition formée au commandement de payer, soit après écoulement de 251 jours.

Le jugement écartant l'opposition a été prononcé le 25 juillet 2023; il a été notifié aux plaignants le 28 juillet 2023 et à l'intimé le 25 octobre 2023. Rendue en procédure sommaire (art. 251 let. a CPC), cette décision ne pouvait être contestée que par la voie d'un recours au sens de l'art. 319 CPC (art. 319 let. a CPC cum art. 309 let. b ch. 3 CPC), de sorte qu'elle est entrée en force et devenue exécutoire dès son prononcé. La plaignante avait ainsi la possibilité de requérir la continuation de la poursuite dès qu'elle a reçu ce jugement de mainlevée le 28 juillet 2023.

L'on ne saurait suivre les plaignants lorsqu'ils soutiennent que ce délai de péremption n'a recommencé à courir qu'à compter de la notification du jugement de mainlevée aux deux parties, soit lors de sa notification au poursuivi le 25 octobre 2023 seulement : les plaignants étaient en effet en mesure de requérir la continuation de la poursuite dès qu'ils ont reçu notification de ce jugement, exécutoire dès son prononcé, indépendamment de sa notification à l'intimé. Il est vrai que le poursuivi disposait alors encore de la faculté d'interjeter un recours contre le jugement de mainlevée et de requérir la suspension de son effet exécutoire : l'éventuel octroi de l'effet suspensif aurait alors eu pour effet de suspendre à nouveau le délai de péremption de la poursuite, voire de suspendre les effets des actes de poursuite émis entre l'entrée en force du jugement et l'octroi de l'effet suspensif (ATF 130 III 657 = JdT 2005 II 139).

Suspendu pendant la procédure de mainlevée, le délai d'une année de l'art. 88 al. 2 LP a ainsi repris son cours dès le 29 juillet 2023, lendemain de sa notification aux plaignants, et est arrivé à échéance le 19 novembre 2023. Il était donc d'ores et déjà expiré lorsque les plaignants ont requis la continuation de la poursuite le 28 novembre 2023.

C'est en conséquence à juste titre que l'Office a refusé de donner suite à la réquisition de continuer la poursuite litigieuse.

Mal fondée, la plainte sera rejetée.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 4 janvier 2024 par B______ et A______ contre la décision rendue le 11 décembre 2023 par l'Office cantonal des poursuites dans la poursuite n° 1______.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Mme Ekaterine BLINOVA et M. Mathieu HOWALD, juges assesseurs ; Madame Elise CAIRUS, greffière.

 

La présidente :

Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI

 

La greffière :

Elise CAIRUS

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.