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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/1422/2023

DCSO/291/2023 du 29.06.2023 ( PLAINT ) , REJETE

Normes : LP.102; LP.103.al2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1422/2023-CS DCSO/291/23

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 29 JUIN 2023

Plainte 17 LP (A/1422/2023-CS) formée en date du 21 avril 2023 par A______, élisant domicile en l'étude de Me Pascal PETROZ, avocat.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du 3 juillet 2023 à :

-       A______

c/o Me PETROZ Pascal

Perréard de Boccard SA

Rue du Mont-Blanc 3

Case postale

1211 Genève 1.

- CONFEDERATION SUISSE

DFF - AFC - DPR

Division Encaissement, TVA

Schwarztorstrasse 50

3007 Bern.

- B______ Sàrl, en liquidation
c/o Me C______ et Me D______
______
______
______.

- E______
F______
c/o Me NEPHTALI Laurent
Rue du Mont-de-Sion 8
1206 Genève.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. A______ est inscrit au Registre foncier en qualité de propriétaire de l'immeuble immatriculé sous feuillet n° 1______ de la commune de G______ [GE], d'une part de copropriété par étages de l'immeuble immatriculé sous feuillet n° 2______ de la commune de H______ [GE], de l'immeuble immatriculé sous feuillet n° 3______ de la commune de I______ [GE], de l'immeuble immatriculé sous feuillet n° 4______ de la commune de J______ [GE], d'une part de copropriété de l'immeuble immatriculé sous feuillet n° 5______ de la commune de K______ [GE], de l'immeuble immatriculé sous feuillet n° 6______ de la commune de L______ [GE], et d'une part de copropriété des immeubles n° 7______ et 8______ de la commune de M______ [GE] (ci-après, collectivement, les immeubles du débiteur ou les immeubles saisis).

b. Dans le cadre de la procédure pénale n° P/9______/2014 dirigée à l'encontre, notamment, de A______, les revenus tirés par ce dernier des immeubles lui appartenant ont été saisis le 10 octobre 2014. Cette saisie a été levée, en tant qu'elle portait sur les revenus futurs générés par les immeubles visés, le 11 novembre 2020.

c. A______ fait l'objet, notamment, des poursuites n° 10_____ et 11_____, engagées à son encontre par la Confédération suisse, 12_____, engagée à son encontre par E______ et F______, et 13_____, engagée à son encontre par B______ SARL EN LIQUIDATION.

Ces quatre poursuites participent à la saisie, série n° 14_____, exécutée le 30 mai 2023 sur divers actifs dont l'Office cantonal des poursuites (ci-après : l'Office) a retenu qu'ils appartenaient à A______, parmi lesquels les immeubles du débiteur.

Le procès-verbal de saisie, établi le 23 mars 2023 et adressé le même jour aux poursuivi et créanciers poursuivant, n'a fait l'objet d'aucune plainte.

d. Par avis adressé le 3 avril 2023 – apparemment par plis simple et recommandé – à A______, lequel indique ne pas avoir reçu le pli recommandé et avoir reçu le pli simple le 17 avril 2023, l'Office a informé celui-ci de ce que les loyers et fermages des immeubles saisis seraient dorénavant encaissés par ses soins, et qu'il lui était en conséquence fait interdiction, sous la menace des sanctions pénales prévues par les art. 169 et 289 CP, d'accepter des paiements pour ces créances ou de conclure des arrangements à leur sujet, toute conclusion, modification ou résiliation d'un bail étant par ailleurs soumise à son accord.

B. a. Par acte adressé le 21 avril 2023 à la Chambre de surveillance, A______ a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre l'avis du 3 avril 2023, concluant à son annulation. A l'appui de cette conclusion, il a fait valoir que la mesure attaquée violait l'art. 103 al. 2 LP, dans la mesure où les revenus des immeubles saisis étaient nécessaires à son entretien et à celui de sa famille et qu'il ne disposait d'aucune autre ressource; la mesure contestée était également contraire au principe de la bonne foi de l'administration car contradictoire avec l'ordonnance de levée partielle du séquestre pénal du 11 novembre 2020; enfin, elle violait le principe de l'égalité entre les créanciers du fait qu'elle revenait à favoriser les créanciers saisissant participant en qualité de parties civiles à la procédure pénale n° P/9______/2014, qui seraient désintéressés dans le cadre de cette procédure.

b. Par ordonnance du 2 mai 2023, la Chambre de céans a rejeté la requête d'effet suspensif formée à titre préalable par le plaignant.

c. Dans ses observations du 5 juin 2023, l'Office a conclu au rejet de la plainte. Selon lui, le plaignant n'avait jamais jusqu'alors indiqué que les revenus de ses immeubles lui étaient indispensables pour subvenir à son entretien, expliquant au contraire être aidé par ses amis. Une éventuelle demande de sa part fondée sur l'art. 103 al. 2 LP et accompagnée des pièces justificatives nécessaires serait le cas échéant examinée. La décision du Ministère public du 11 novembre 2020 était pour sa part dénuée de pertinence car émanant d'une autorité différente appliquant des normes différentes; enfin, de nombreux autres créanciers participant à la procédure pénale n° P/9______/2014 avaient requis la saisie des biens du plaignant, leurs poursuites participant à des séries ultérieures.

d. Par détermination du 12 mai 2023, B______ SARL EN LIQUIDATION s'en est pour sa part rapportée à justice sur l'issue de la procédure de plainte, "à la condition" que ses "intérêts", tels que décrits dans le corps de sa détermination, soient "préservés".

e. En l'absence de réplique spontanée de la part du plaignant, la cause a été gardée à juger le 21 juin 2023.

 

EN DROIT

1. 1.1 Déposée dans les formes prévues par la loi (art. 9 al. 1 et 2 LALP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicables par renvoi de l'art. 9 al. 4 LALP), auprès de l'autorité compétente pour en connaître (art. 6 al. 1 et 3 LALP; art. 17 al. 1 LP), à l'encontre d'une mesure de l'Office pouvant être attaquée par cette voie (art. 17 al. 1 LP) et par une partie lésée dans ses intérêts (ATF 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3), la plainte est dans cette mesure recevable.

Il convient par ailleurs d'admettre qu'elle a été formée en temps utile, que le délai de dix jours prévu par l'art. 17 al. 2 LP soit calculé à compter du (probable) dernier jour du délai de garde du pli recommandé expédié le 3 avril 2023 – dont l'Office ne prétend pas qu'il aurait été retiré plus tôt –, soit le 11 avril 2023, ou du jour où le plaignant indique avoir reçu le pli simple expédié le même jour, soit le 17 avril 2023.

La plainte est donc recevable.

1.2 Il ne sera en revanche pas entré en matière sur les conclusions de B______ SARL EN LIQUIDATION tendant à la prétendue préservation de ses intérêts, lesdits intérêts ne paraissant pas concerner la mesure faisant l'objet de la plainte et celle-là n'ayant pas elle-même formé une plainte.

2. 2.1 Selon l'art. 102 al. 1 LP, la saisie d'un immeuble s'étend à ses fruits (naturels et civils), dont les loyers et fermages (art. 14 ORFI; ATF 125 III 248 consid. 2; Zopfi, in KUKO SchKG, 2ème édition, 2014, N 10 ad art. 102 LP).

L'office des poursuites doit pourvoir à la gérance et à l'exploitation de l'immeuble saisi (art. 102 al. 3 LP), ce qui comprend notamment l'encaissement des éventuels loyers dus par des tiers en contrepartie de la cession de l'usage de l'immeuble (Zopfi, op. cit., N 5 d art. 102 LP).

L'art. 103 al. 2 LP prévoit que, si le débiteur poursuivi est sans ressources, il est prélevé ce qui est nécessaire à son entretien et à celui de sa famille. L'art. 93 al. 1 LP et la jurisprudence y relative s'appliquent à la détermination du minimum vital du débiteur et de sa famille. L'application de l'art. 103 al. 2 LP suppose par ailleurs que le débiteur ne puisse pas subvenir à ses besoins par d'autres revenus. Il lui incombe de déposer une demande motivée accompagnée dans la mesure du possible des pièces nécessaires (Zopfi, op. cit., N 4 ad art. 103 LP).

2.2 Il résulte en l'espèce du procès-verbal de saisie du 23 mars 2023, qui n'a fait l'objet d'aucune plainte, que la saisie a porté sur les immeubles du débiteur. Cette saisie englobant, conformément à l'art. 102 al. 1 LP, les fruits desdits immeubles, et donc les loyers dus en contrepartie de leur jouissance par des tiers, il incombait à l'Office de veiller à leur encaissement, d'où l'interdiction faite au plaignant de continuer à les encaisser lui-même.

Contrairement à ce que paraît soutenir le plaignant, il n'appartenait par ailleurs pas à l'Office de rechercher lui-même, d'office, si celui-ci était sans ressources et s'il convenait donc, en application de l'art. 103 al. 2 LP, de renoncer à saisir tout ou partie des fruits des immeubles saisis afin de lui permettre d'assurer son entretien et celui de sa famille. C'est au contraire au plaignant qu'il aurait incombé de saisir l'Office d'une requête en ce sens, accompagnée de toutes pièces utiles au calcul de son minimum vital selon l'art. 93 al. 1 LP. Or ce n'est que le 21 avril 2023, soit simultanément au dépôt de la présente plainte, que le plaignant a sollicité de l'Office l'application en sa faveur de l'art. 103 al. 2 LP, et ce sans produire aucune pièce relative à ses ressources et charges.

Le grief de violation des art. 102 et 103 LP est donc infondé en tant qu'il vise l'avis du 3 avril 2023. Il est prématuré en tant qu'il dénonce une mauvaise application par l'Office de l'art. 103 al. 2 LP, celui-ci n'ayant, au moment du dépôt de la plainte, encore rendu aucune décision sur ce point.

2.3 C'est à tort par ailleurs que le plaignant croit discerner une contradiction entre la levée, en novembre 2020, du séquestre pénal portant sur les loyers des immeubles lui appartenant et la saisie, en avril 2023 soit deux ans et demi plus tard, des loyers futurs de ces mêmes immeubles. Outre le fait que ces mesures ont été prononcées par des autorités distinctes, comme l'a relevé l'Office, elles s'inscrivent dans des contextes règlementaires totalement différents et poursuivent des buts de nature différente, ce que le plaignant, utilement assisté d'un avocat, devrait être en mesure de reconnaître.

De la même manière, on ne voit pas en quoi la saisie porterait atteinte au principe de l'égalité entre les créanciers dans la mesure où les montants que ces derniers pourraient obtenir au terme des poursuites engagées viendront en imputation de la créance globale qu'ils invoquent à l'encontre du plaignant, que celle-ci soit ou non également invoquée dans le cadre de la procédure pénale n° P/9______/2014. Le fait que les créanciers agissant en premier, et donc participant à une série antérieure, soient avantagés par rapport à ceux participant à une série postérieure, constitue pour sa part une caractéristique de la procédure d'exécution forcée et, dans la mesure où elle est fondée sur l'existence de situations différentes, ne porte pas atteinte au principe de l'égalité entre les créanciers.

La plainte est ainsi mal fondée dans son ensemble, ce qui conduit à son rejet.

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 21 avril 2023 par A______ contre l'avis qui lui a été adressé le 3 avril 2023 dans la série n° 14_____.

Au fond :

La rejette.

Siégeant :

Monsieur Patrick CHENAUX, président; Madame Ekaterine BLINOVA et Monsieur Denis KELLER, juges assesseurs; Madame Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

 

Le président : La greffière :

 

Patrick CHENAUX Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.