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Décisions | Chambre de surveillance

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C/334/2024

DAS/53/2024 du 04.03.2024 sur DTAE/936/2024 ( PAE ) , REJETE

En fait
En droit

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/334/2024-CS DAS/53/2024

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU LUNDI 4 MARS 2024

 

Recours (C/334/2024-CS) formé en date du 23 février 2024 par Madame A______, actuellement hospitalisée au sein de la Clinique de B______, Unité C______, ______ (Genève).

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 4 mars 2024 à :

- Madame A______
p.a Clinique de B______ – Unité C______
______, ______.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

Pour information à :

-       Me D______, avocat,
______, ______.

-       Direction de la Clinique de B______
______, ______.

 


EN FAIT

A.           a) A______, née le ______ 1966, de nationalité française, a fait l’objet, le 11 janvier 2024, d’une décision de placement à des fins d’assistance prise par un médecin.

Selon ce qui ressort de la décision en cause, A______ avait été conduite au Service des urgences psychiatriques des HUG en ambulance, appelée par la police, à la suite de troubles du comportement présentés à son domicile ; l’intéressée était en train d’allumer un feu dans le hall de son immeuble, pour se réchauffer. Elle était déjà connue pour des troubles du comportement, liés à la consommation d’alcool et d’opiacés et était sortie de la Clinique de B______ le 10 janvier 2024.

b) Le 9 février 2024, le Dr E______, chef de clinique au sein de l’unité C______ de la Clinique de B______, a sollicité auprès du Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (ci-après : le Tribunal de protection) la prolongation du placement à des fins d’assistance de A______. Bien que l’état psychique de la patiente se soit amélioré, elle restait cependant fragile, avec une très faible conscience de sa maladie et de ses troubles du comportement. Elle acceptait, depuis quelques jours, un traitement antipsychotique régulier, qui lui était bénéfique.

c) Le Tribunal de protection a tenu une audience le 13 février 2024.

Le Dr F______, de la Clinique de B______, a indiqué que l’état de A______ n’était pas stabilisé ; il convenait d’adapter sa médication. L’équipe médicale était inquiète d’un risque de rechute en cas de sortie immédiate, dans la mesure où la patiente ne voulait pas poursuivre les traitements débutés durant son hospitalisation. Or, le traitement avait permis une nette amélioration de son état. Au moment de son admission, A______ présentait des symptômes maniaques et psychotiques francs, alors que désormais les symptômes étaient plus hypomanes.

A______ a indiqué avoir mandaté un avocat pour la représenter dans la procédure relative à la résiliation de son contrat de bail à loyer, consécutive « à l’histoire du feu ». Pour le surplus, elle a précisé ne plus consommer de stupéfiants et avoir été « substituée avec du SEVRELON ». Elle voyait un médecin chaque deux mois et son traitement était arrivé à son terme en décembre 2023.

Au terme de l’audience, la cause a été mise en délibération.

B.            Par ordonnance DTAE/936/2024 du 13 février 2024, le Tribunal de protection, composé d’une magistrate de carrière, d’un médecin psychiatre et d’une représentante du droit des patients, a prolongé pour une durée indéterminée le placement à des fins d’assistance institué le 11 janvier 2024 en faveur de A______ (chiffre 1 du dispositif), ordonné son maintien en la Clinique de B______ (ch. 2), rendu attentive l’institution de placement au fait que la compétence de libérer la personne concernée, de lui accorder des sorties temporaires ou de transférer le lieu d’exécution du placement, appartenait au Tribunal de protection (ch. 3), rappelé que la décision est immédiatement exécutoire nonobstant recours (ch. 4) et que la procédure est gratuite (ch. 5).

Le Tribunal de protection a retenu que A______ présentait des troubles du comportement correspondant à un trouble psychique au sens de la loi, susceptible de représenter un risque pour sa vie ou son intégrité personnelle, respectivement celles d’autrui, dont découlaient une désorganisation de la pensée et des idées délirantes. Son état n’était pas encore totalement stabilisé et une sortie immédiate risquait de provoquer la résurgence des symptômes ayant conduit à son placement et de la mise en danger qui leur était liée, compte tenu notamment de son anosognosie encore en partie présente et de son refus de poursuivre les traitements introduits durant son hospitalisation.

C.           a) Le 23 février 2024, A______ a déclaré former « recours à mon internement ». Elle a indiqué être saine d’esprit et de corps « afin de quitter les HUG et retrouver ma vie privée ».

b) La juge déléguée de la Chambre de surveillance de la Cour de justice a tenu une audience le 1er mars 2024.

A______ a persisté à contester son maintien en la Clinique de B______. Elle a indiqué connaître les raisons de son hospitalisation : le soir des faits, elle s’était rendue à sa boîte aux lettres. S’étant trompée de trousseau de clés et ayant oublié le numéro de code de l’entrée, qui venait de changer, elle s’était retrouvée enfermée, en petite tenue, à l’extérieur de l’allée. Sans téléphone et ayant très froid, elle n’avait trouvé d’autre solution, pour se réchauffer, que d’allumer un feu au moyen de son briquet et de journaux. Elle avait ensuite attendu l’arrivée des pompiers et de la police. Elle considérait pouvoir désormais regagner son domicile et reprendre le cours normal de sa vie. Elle a soutenu que certains médicaments qui lui étaient prescrits (régulateur de l’humeur et antipsychotique) ne lui étaient pas bénéfiques ; elle considérait n’avoir besoin que d’un traitement contre les douleurs.

Le Dr F______, chef de clinique au sein de l’unité G______ de la Clinique de B______, a été entendu. Il a indiqué ne pas suivre personnellement la recourante, celle-ci étant hospitalisée dans l’unité C______, mais connaître son dossier. L’état clinique de la patiente était fluctuant depuis son arrivée s’agissant de son humeur et de son degré d’organisation ; elle présentait par ailleurs encore des troubles du comportement. Elle avait par exemple introduit une fourchette métallique dans la prise électrique de sa chambre, ce qui avait provoqué un court-circuit ayant également affecté d’autres chambres. Son comportement était par ailleurs toujours hypomaniaque, ce qui signifiait que son humeur restait un peu trop « élevée » et son discours était également décousu, avec par moments des « coq-à-l’âne » ; elle présentait encore une forte interprétativité et un sentiment de persécution. Le Dr F______ a qualifié l’état de la recourante « d’assez sévère ». En l’état, le diagnostic de trouble schizo-affectif de type maniaque avait été posé. A______ prenait un antipsychotique (Invega) depuis quelques temps et un stabilisateur de l’humeur (Dépakine) depuis deux jours. Sous surveillance d’un infirmier, la recourante prenait ces traitements. Compte tenu de l’état de cette dernière, sa sortie n’était pas encore envisagée. Si la mesure était levée en l’état, il existait un risque de mise en danger tant de la recourante elle-même que des tiers, ainsi qu’un risque d’aggravation de son trouble schizo-affectif.

A______ a contesté ce diagnostic, indiquant avoir une famille, une vie sociale et un compagnon. Elle a également contesté les troubles du comportement décrits par le Dr F______ ; étant très myope, elle ne serait pas parvenue à introduire volontairement une fourchette dans une prise électrique. Si sa chambre avait connu, pendant trois jours, des problèmes électriques, c’était en raison d’un disjoncteur qui ne fonctionnait pas et qui avait dû être changé.

La cause a été gardée à juger au terme de cette audience.

EN DROIT

1.             1.1 Les décisions de l'autorité de protection de l'adulte peuvent faire l'objet d'un recours devant le juge compétent (art. 450 al. 1 CC). Dans le domaine du placement à des fins d'assistance, le délai de recours est de dix jours à compter de la notification de la décision entreprise (art. 450b al. 2 CC). Le recours ne doit pas être motivé (art. 450c CC).

1.2 En l'espèce, le recours a été formé dans le délai utile de dix jours (art. 72 al. 1 LaCC), par la personne concernée par la mesure ; il est donc recevable à la forme.

2. 2.1.1 En vertu de l'art. 426 al. 1 CC, une personne peut être placée dans une institution appropriée lorsqu'en raison de troubles psychiques, d'une déficience mentale ou d'un grave état d'abandon, l'assistance ou le traitement nécessaires ne peuvent lui être fournis d'une autre manière, l'art. 429 al. 1 CC stipulant par ailleurs que les cantons peuvent désigner des médecins qui, outre l'autorité de protection de l'adulte, sont habilités à ordonner un placement dont la durée est fixée par le droit cantonal.

La loi exige la réalisation de trois conditions cumulatives, soit une cause de placement, un besoin d'assistance ou de traitement ne pouvant lui être fourni autrement et l'existence d'une institution appropriée (cf. notamment DAS/67/2014 consid. 2.1).

2.1.2 Le placement ordonné par un médecin prend fin au plus tard après 40 jours, sauf s’il est prolongé par une décision du Tribunal de protection (art. 60 al. 2 LaCC).

Le médecin responsable de l’unité présente au plus tard 30 jours après le début du placement une requête de prolongation du placement, accompagnée des éléments pertinents du dossier médical (art. 60 al. 3 LaCC).

2.2.1 En l’espèce, la recourante a fait l’objet d’une mesure de placement décidée par un médecin. Le médecin responsable de l’unité dans laquelle elle est placée a par ailleurs présenté, dans le délai de 30 jours après le début du placement, une requête de prolongation de celui-ci, exposant que l’état de la patiente demeurait fragile, avec une absence de conscience de ses troubles ; un nouveau traitement, qui semblait bénéfique, venait d’être instauré.

Il ressort de ce qui précède que les conditions formelles de l’art. 60 al. 2 et 3 LaCC sont remplies.

2.2.2 La recourante conteste la nécessité de son maintien au sein de la Clinique de B______. Elle présente toutefois, selon les explications fournies par le Dr F______, un trouble schizo-affectif, diagnostic certes contesté par la recourante, mais qu’aucun élément objectif ne permet de mettre en doute. Il résulte par ailleurs de la demande de prolongation du placement et des explications fournies par le Dr F______ tant devant le Tribunal de protection que devant la juge déléguée de la Chambre de céans, que l’état de la recourante n’est pas stabilisé et est encore qualifié d’assez grave. Le traitement a été adapté il y a quelques jours seulement, avec l’intégration d’un médicament stabilisateur de l’humeur, dont il convient de s’assurer qu’il soit efficace. La recourante pour sa part conteste la nécessité de prendre ce médicament, de même que l’antipsychotique qui lui a été prescrit. Il y a par conséquent tout lieu de craindre, en cas de levée immédiate de la mesure de placement, qu’elle cesse de prendre lesdits médicaments, qu’elle n’accepte actuellement d’avaler que sous la surveillance d’un membre du personnel soignant. En cas de retour à son domicile sans traitement adapté, elle pourrait représenter un danger tant pour elle-même que pour les tiers, compte tenu notamment de l’absence totale de prise de conscience de la dangerosité du comportement ayant motivé son hospitalisation.

Au vu de ce qui précède, c’est à juste titre que le Tribunal de protection a prolongé la mesure de placement.

Infondé, le recours sera rejeté.

3.             La procédure est gratuite (art. 22 al. 4 LaCC).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ contre l'ordonnance DTAE/936/2024 rendue le 13 février 2024 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/334/2024.

Au fond :

Le rejette.

Dit que la procédure est gratuite.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.