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Décisions | Chambre de surveillance

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C/12884/2023

DAS/23/2024 du 30.01.2024 sur DTAE/7449/2023 ( PAE ) , REJETE

Recours TF déposé le 29.02.2024, rendu le 12.03.2024, CONFIRME, 5A_150/2024
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/12884/2023-CS DAS/23/2024

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU MARDI 30 JANVIER 2024

Recours (C/12884/2023-CS) formé en date du 27 octobre 2023 par Madame A______, domiciliée ______ (Genève), représentée par Me Maïssa FATTAL, avocate.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 31 janvier 2024 à :

- Madame A______
c/o Me Maïssa FATTAL, avocate
Quai Gustave-Ador 2, 1207 Genève.

- Monsieur B______
______, ______.

- Monsieur D______
______, ______.

- Maître F______
______, ______.

- Madame G______
Monsieur H
______
SERVICE DE PROTECTION DE L'ADULTE
Route des Jeunes 1C, case postale 107, 1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.


EN FAIT

A. Par ordonnance DTAE/7449/2023 du 19 septembre 2023, communiquée aux parties pour notification le 29 septembre 2023, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: Tribunal de protection) a institué une curatelle de représentation et de gestion en faveur de B______, né le ______ 2005, originaire de C______ [GE] (ch. 1 du dispositif), désigné deux intervenants en protection de l’adulte auprès du Service de protection de l'adulte (SPAd), en qualité de curateurs avec pour tâches de le représenter dans ses rapports avec les tiers, en particulier en matière d’affaires administratives et juridiques, de gérer ses revenus et biens et d'administrer ses affaires courantes et dit que les curateurs peuvent se substituer l’un à l’autre dans l’exercice de leur mandat, chacun avec les pleins pouvoirs de représentation (ch. 2).

Il a en outre désigné A______ et D______, parents du concerné, aux fonctions de curateurs avec pour tâches de veiller à son bien-être social et de le représenter pour tous les actes nécessaires dans ce cadre et de veiller à son état de santé, de mettre en place les soins nécessaires et, en cas d’incapacité de discernement, de le représenter dans le domaine médical (ch. 3).

Il a par ailleurs limité l’exercice des droits civils du concerné en matière contractuelle et de la gestion de son patrimoine et l'a privé de l’accès à toute relation bancaire ou à tout coffre-fort, en son nom ou dont il est ayant-droit économique, toute procuration établie au bénéfice de tiers étant révoquée (ch. 4 et 5).

Il a enfin dispensé A______ et D______ de rapports sociaux et médicaux périodiques, autorisé les curateurs à prendre connaissance de la correspondance de la personne concernée, dans les limites du mandat et laissé les frais judiciaires à la charge de l’Etat (ch. 6 à 8).

En substance, sur la seule question qui fait l'objet du recours, le Tribunal de protection a considéré qu'il ne pouvait pas désigner les parents du majeur concerné comme curateurs de gestion et représentation dans les affaires financières et administratives, dans la mesure où d'une part, ils étaient frappés de nombreuses poursuites personnelles et d'autre part, ils ne maîtrisaient pas suffisamment la langue française et la compréhension des obligations des curateurs pour se voir confier cette mission. Il voyait en outre un conflit entre les intérêts des parents et ceux de l'enfant, les rentes de celui-ci étant plus confortables que les revenus de ceux-là.

B. Par acte déposé au greffe de la Cour de justice le 27 octobre 2023, A______ a formé recours contre ladite ordonnance concluant à ce qu'elle soit, elle, désignée curatrice de gestion et représentation en matière financière et administrative de son fils.

En substance, elle soutient que certes, elle ne maîtrise pas bien le français, mais qu'elle s'est, durant la minorité de son fils, occupée de celui-ci, globalement et à satisfaction, de sorte qu'elle peut continuer à le faire au-delà de la majorité. Les rapports familiaux doivent être privilégiés au détriment de l'intervention de tiers externes, lorsque cela n'est pas nécessaire.

Par décision DAS/264/2023 du 31 octobre 2023 de la Cour, une demande de mesure provisionnelle de A______ a été rejetée, du fait de l'effet suspensif ex lege attaché au recours.

Par courrier du 21 novembre 2023, le Tribunal de protection a déclaré persister dans sa décision.

En date du 28 novembre 2023, le père du concerné a appuyé les conclusions prises par son épouse dans son recours.

Par observations du 18 décembre 2023, la curatrice d'office de la personne concernée a conclu à la confirmation de l'ordonnance au vu des difficultés en matière administrative des parents et de leur manque de compréhension des obligations de rendre compte des curateurs, ainsi que de leur accord avec les termes proposés par le Tribunal de protection lors de son audience, repris dans la décision attaquée.

Sur quoi la cause a été gardée à juger

C. Ressortent pour le surplus de la procédure les faits pertinents suivants :

a) Le 23 juin 2023, une requête des parents de B______, né le ______ 2005, A______ et D______, est parvenue au Tribunal de protection dans laquelle ceux-ci expliquaient que, dans la mesure où leur fils, qui présentait une trisomie 21 et était scolarisé à l’Atelier de la Fondation E______, avant d’intégrer une structure spécialisée pour adultes, allait accéder à la majorité, ils souhaitaient dans cette perspective qu'il puisse bénéficier d’une mesure de protection adaptée à ses besoins et être eux-mêmes désignés en qualité de curateurs.

Un certificat médical dressé le 8 juin 2023 était joint à leur requête, aux termes duquel le Dr I______ attestait que B______ souffrait d’une déficience mentale associée à des troubles psychiques affectant son discernement de manière durable et permanente et l’empêchant d’assurer lui-même la sauvegarde de ses intérêts. Il n’était pas apte à désigner un mandataire ni à être auditionné par le Tribunal.

b) Par décision du 27 juin 2023, le Tribunal de protection a désigné F______, avocate stagiaire, en tant que curatrice d’office de l’intéressé pour la procédure.

c) Il ressort de l’enquête préliminaire diligentée par le Tribunal de protection que l’intéressé bénéficiait, lors de sa minorité, d’une allocation pour impotent. Son droit à une rente invalidité et au maintien de l’allocation pour impotent à l’âge adulte demeurait en cours d’instruction auprès de l’OCAS. L'intéressé, de même que ses parents et ses frères, étaient au bénéfice de prestations de l’Hospice général, versées pour l’ensemble de la famille. Selon les extraits du registre des poursuites au 3 juillet 2023, malgré la prise en charge totale de l'Hospice général, tant A______ que D______ font l’objet de nombreux actes de défaut de biens dans le canton de Genève, pour des montants respectivement d’environ 10'000 fr. et de 165'000 fr, ainsi que d'autres poursuites.

d) Dans son rapport de situation au Tribunal de protection du 28 août 2023, la curatrice d’office a fait part de la bonne évolution générale de l'intéressé, qui était quotidiennement entouré à domicile par ses parents, ainsi que par ses trois frères et appréciait sa fréquentation journalière de l’Atelier de la Fondation E______. Elle relevait qu'il était également régulièrement suivi sur le plan médical.

e) Une audience a été tenue par le Tribunal de protection en date du 19 septembre 2023, lors de laquelle A______ et D______, dont la compréhension de la langue française est apparue difficile au Tribunal de protection, ont expliqué que leur fils, bien que présent mais incapable d'être auditionné, était capable de former des phrases simples, même s’il ne savait pas lire ni effectuer de calculs. Il avait besoin de leur aide, ainsi que d’être stimulé pour tous les actes de la vie quotidienne. Compte tenu de leur situation financière délicate, ils ont pris note que leur désignation en tant que curateurs de leur fils pour les tâches administratives, juridiques et financières n’était pas possible et ont accepté à l'audience que le mandat soit confié au SPAd pour ces tâches uniquement, tout en se voyant attribuer celles concernant les aspects sociaux et médicaux.

Lors de la même audience, la curatrice d’office a préavisé l’institution d’une mesure de curatelle de représentation et de gestion en faveur de son protégé, dont les tâches administratives, juridiques et financières seraient confiées au SPAd et les tâches sociales et médicales à ses parents, précisant encore qu’il était opportun que son protégé soit limité dans l’exercice de ses droits civils sur le plan contractuel et de la gestion de son patrimoine.

Suite à quoi, l'ordonnance querellée a été prononcée.

EN DROIT

1. 1.1 Les décisions du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant sont susceptibles de faire l'objet d'un recours auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice dans un délai de trente jours à compter de leur notification (art. 450 al. 1 et 450b al. 1 CC, 53 al. 1 et 2 LaCC, 126 al. 3 LOJ).

Le recours doit être dûment motivé et interjeté par écrit (art. 450 al. 3 CC). Disposent notamment de la qualité pour recourir les personnes parties à la procédure et les proches (art. 450 al. 2 ch. 1 et 2 CC).

1.2 En l'espèce, interjeté auprès de l'autorité compétente dans le délai utile de trente jours et selon la forme prescrite par la loi, par une partie à la procédure, le recours est recevable.

1.3 La Chambre de surveillance examine la cause librement, en fait, en droit, et sous l'angle de l'opportunité (art. 450a al. 1 CC).

Les maximes inquisitoire et illimitée d'office sont applicables, de sorte que la Cour n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 446 CC).

2. La recourante ne remet pas en cause le prononcé de la mesure de protection.

Elle souhaite cependant être désignée curatrice de son fils également en matière juridique, administrative et de gestion, en lieu et place des intervenants du SPAd nommés, alors que le Tribunal de protection ne l'a pas retenue en raison non seulement des poursuites auxquelles elle faisait face, mais également en raison de son absence de maîtrise suffisante de la langue française et de son manque de compréhension des obligations qui incombent au curateur dans le cadre de la surveillance exercée par l'autorité.

2.1 A teneur de l'art. 400 al. 1 CC, l'autorité de protection nomme curateur une personne physique qui possède les connaissances et les aptitudes nécessaires à l'accomplissement des tâches qui lui sont confiées, qui dispose du temps nécessaire et qui les exécute en personne. Plusieurs personnes peuvent être désignées, si les circonstances le justifient. Celles-ci peuvent accomplir cette tâche à titre privé, être membre d'un service social privé ou public, ou exercer la fonction de curateur à titre professionnel. La loi, à dessein, n'établit pas de hiérarchie entre les personnes pouvant être désignées, le critère déterminant étant celui de leur aptitude à accomplir les tâches confiées. La complexité de certaines tâches limite d'ailleurs le recours à des non-professionnels, même si ceux-ci sont bien conseillés et accompagnés dans l'exercice de leur fonction (Message du Conseil fédéral, FF 2006, p. 6682/6683).

2.2 Lorsque la personne concernée propose une personne comme curateur, l'autorité de protection de l'adulte accède à son souhait pour autant que la personne proposée remplisse les conditions requises et accepte la curatelle (art. 401 al. 1 CC). L'autorité de protection de l'adulte prend autant que possible en considération les souhaits des membres de la famille ou d'autres proches (art. 401 al. 2 CC). S'ils possèdent les qualifications voulues, les parents ou d'autres proches, peuvent être choisis en qualité de curateur (HÄFELI, in CommFam Protection de l'adulte, 2013, n. 3 ad art. 401 CC).

2.3 Selon les art. 410 al. 1 et 411 al. 1 CC, le curateur tient les comptes et les soumet à l'approbation de l'autorité de protection de l'adulte aux périodes fixées par elle, mais au moins tous les deux ans et remet à l'autorité de protection, dans le même laps de temps, un rapport sur son activité et sur l'évolution de la situation de la personne concernée. Ce rapport et ces comptes font l'objet d'un contrôle par l'autorité de protection qui les approuve ou les refuse (art. 415 al.1 et 2 CC).

2.4 En l'espèce, il ressort de l'instruction menée par le Tribunal de protection qu'une mesure de protection doit être prononcée à l'égard de B______. Celle-ci, requise par la recourante et le père de l'enfant, a été prononcée (curatelle de représentation et de gestion). Elle n'est pas contestée.

Reste à savoir qui doit l'exercer.

La recourante fait surtout grief au Tribunal de protection d'avoir rendu une décision inopportune, ce que la Cour peut contrôler (art. 450a al. 1 ch. 3 CC), en désignant à B______ deux intervenants en protection du SPAd en qualité de curateurs chargés de le représenter dans ses rapports avec les tiers en matière administrative et juridique et de gérer ses revenus et ses affaires courantes. Elle expose qu'avant le passage à la majorité de leur enfant, les parents avaient géré correctement les intérêts de leur fils mineur, de sorte qu'il n'y avait aucune raison d'envisager que cela puisse ne pas être le cas dans le futur.

Force est d'admettre cependant, avec le Tribunal de protection que, pour les divers motifs retenus par lui, il est nécessaire que l'aspect administratif et juridique de la curatelle instituée soit exercé par des professionnels.

En effet, si la Cour ne partage pas les suspicions du Tribunal de protection à l'égard des parents relativement à l'utilisation potentiellement détournée en leur faveur des rentes du protégé, qui relève du procès d'intention à défaut d'élément au dossier, elle admet néanmoins que les difficultés de compréhension de la recourante de la langue, telles qu'elles ressortent du dossier, et des arcanes administratives, ainsi que des enjeux relatifs aux nécessaires rapports et comptes à dresser à l'égard de l'organe de contrôle, nécessitent que le mandat de protection soit exercé par des professionnels. En particulier, les devoirs des curateurs d'un majeur à l'égard des autorités de protection sont sans rapport avec les pouvoirs que peut exercer pendant la minorité de l'enfant le titulaire de l'autorité parentale. Celle-ci n'est soumise à aucun contrôle particulier, alors que les premiers sont encadrés comme rappelé plus haut par des dispositions légales spécifiques qui nécessitent une certaine compréhension du système et une volonté, doublée de la capacité de s'y conformer.

En ce sens déjà, la décision du Tribunal de protection n'apparaît pas inopportune. Elle ne l'est pas, en outre, pour une autre raison prise en compte par le Tribunal de protection. En effet, il serait apparu, si ce n'est clairement contraire au droit, à tout le moins inopportun, d'envisager de désigner à une fonction de protection en matière financière, notamment, un curateur, fût-il proche, criblé de dettes. Or, tel est le cas de la reourante et du père de l'enfant. Dans ce sens également, la décision entreprise doit être confirmée.

On relèvera enfin, ce qui n'est pas contesté, que l'entier de l'aspect social du mandat de curatelle est laissé aux parents du protégé, ce qui est opportun.

En définitive, le recours doit être rejeté.

3. Dans la mesure où elle succombe, la recourante supportera les frais de la procédure fixés à 400 fr., entièrement compensés avec l'avance versée, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ contre l’ordonnance DTAE/7449/2023 rendue le 19 septembre 2023 par le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant dans la cause C/12884/2023.

Au fond :

Le rejette.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires à 400 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance de frais effectuée, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.