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Décisions | Chambre de surveillance

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C/10642/2021

DAS/231/2023 du 03.10.2023 sur DTAE/3655/2023 ( PAE ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/10642/2021-CS DAS/231/2023

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU MARDI 3 OCTOBRE 2023

 

Recours (C/10642/2021-CS) formé en date du 15 juin 2023 par Monsieur A______, domiciliée ______ (Genève), représenté par Me Stéphane CECCONI, avocat.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 6 octobre 2023 à :

- Monsieur A______
c/o Me Stéphane CECCONI, avocat
Rue de l'Hôtel-de-Ville 12, case postale 1311, 1211 Genève 1.

- Madame B______
c/o Me Elodie FRITSCHY-KUGLER, avocate
Rue de Jargonnant 2, case postale 6045, 1211 Genève 6.

- Madame C______
Monsieur D
______
SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS
Case postale 75, 1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.


EN FAIT

A. a) B______ a donné naissance, hors mariage, à la mineure E______ le ______ 2021 et à la mineure F______ le ______ 2022.

A______ a reconnu les mineures, respectivement, les 31 mai 2021 et 12 mai 2022, dates auxquelles les parents ont également déposé des déclarations communes d’autorité parentale conjointe sur elles.

b) Par décision DTAE/3103/2022 rendue le 4 avril 2022, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: le Tribunal de protection) a, notamment, ordonné l'expertise psychiatrique familiale des mineures.

Il ressort de cette décision que E______, qui présentait un trouble réactionnel de l’attachement de l’enfance, avait été placée au Foyer H______ peu après sa naissance (le 18 juin 2021), dans un contexte où le trouble dépressif de sa mère l’empêchait de répondre à ses besoins et où le père minimisait la fragilité psychique de la mère et ne respectait pas les besoins de E______. Le droit de déterminer le lieu de résidence et la garde avaient été retirés aux parents dans ce cadre. E______ avait nettement progressé dans ses comportements et ses interactions au foyer. Il était devenu nécessaire, au jour de la décision, d'investiguer sur la question de savoir si les parents allaient pouvoir lui apporter le rythme journalier stable et l'attention renforcée dont elle avait besoin, ce d'autant plus au vu de la naissance de F______.

c) Par décision DTAE/2580/2022 rendue sur mesures superprovisionnelles le 21 avril 2022, le Tribunal de protection a, notamment, retiré aux parents la garde et le droit de déterminer le lieu de résidence de F______ et ordonné le placement de la mineure au Foyer G______ avec sa mère.

d) Par courrier du 25 novembre 2022, les curateurs des mineures du Service de protection des mineurs (ci-après: le SPMi) ont informé le Tribunal de protection que F______ avait été placée en hospitalisation sociale à l'unité de développement des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après: les HUG) à la suite d'une nouvelle décompensation psychique de la mère.

e) Par courrier du 20 janvier 2023, les curateurs du SPMi de E______ et F______ ont fait part au Tribunal de protection de retours de la part de l'équipe infirmière de l'unité de développement, indiquant qu'il était encore arrivé à la mère de laisser F______ seule quelques instants sur la table à langer ou de laisser l'enfant dans son bain en quittant la pièce. La mère entendait toutefois leurs retours à cet égard. Les curateurs préavisaient d'autoriser le placement de la mineure au Foyer H______ dans l'attente de pouvoir discuter des conclusions de l'expertise en audience.

f) Par décision DTAE/510/2023 rendue sur mesures superprovisionnelles le 23 janvier 2023, le Tribunal de protection a autorisé le placement de F______ au Foyer H______.

g) En date du 31 janvier 2023, le Docteur I______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie d'enfants et d'adolescents, médecin chef de clinique au Centre universitaire romand de médecine légale (CURML), et Madame J______, psychologue au CURML, ont rendu le rapport d'expertise psychiatrique familiale.

Il en ressort que E______ présentait un trouble réactionnel de l'attachement de l'enfance de type inhibé et un développement langagier dans la norme inférieure. Les experts mettaient ces difficultés en lien avec les épisodes psychotiques que la mère avait présentés pendant et après la grossesse, l'empêchant de répondre aux besoins de E______ et de la stimuler de manière correcte, et avec les problèmes rencontrés par la suite par les deux parents pour ajuster leurs réponses aux besoins spécifiques de leur fille. E______ avait, en conséquence, besoin d'un environnement contenant et prévisible. La mise en place de rituels et de routine, ainsi que la présence d'une figure d'attachement sur le long cours étaient essentielles. Elle bénéficierait d'un placement en famille d'accueil, qui lui permettrait l'identification à une seule personne de référence, diminuerait les changements dans les réponses éducatives parentales qu'elle n'était pas en état de supporter au vu de son trouble et diminuerait les changements environnementaux liés à la vie en foyer.

Quant à F______, son développement était harmonieux, mais des prémisses d'un attachement insécure étaient visibles, tel le fait de moins exprimer ses besoins que la moyenne. La différence de développement entre sa sœur et elle résultait probablement de l'accompagnement professionnel important offert [au foyer] G______ et de la stabilité psychique de la mère au moment de sa naissance.

L'expertise mettait en exergue chez la mère un retard mental léger et un trouble bipolaire, dont elle avait une conscience limitée. Elle montrait des capacités d'apprentissage et d'évolution dans ses compétences parentales, lesquelles étaient toutefois impactées par son instabilité psychique. Elle n'était pas en capacité de s'occuper de deux enfants à plein temps. Certaines difficultés, comme de stimuler ses filles de manière adéquate, nécessitaient le maintien d'un étayage. La mère présentait un investissement psychique limité auprès de sa fille E______ et ne reconnaissait pas ses difficultés. Elle s'investissait, en revanche, davantage auprès de sa fille F______ et, avec l'étayage [au foyer] G______, avait pu apprendre à s'organiser pour la prendre en charge.

Le père présentait, pour sa part, un retard mental léger et une consommation d'alcool, nocive pour la santé et dont il n'avait pas conscience. Il peinait à percevoir les difficultés des mineures et à entendre les conseils des professionnels, ce qui l'empêchait de combler ses lacunes. Il montrait des compétences pour entrer en lien de manière positive avec ses enfants en les stimulant et en leur mettant des limites, mais ses compétences parentales fluctuaient au cours du temps. À cet égard, il pouvait, par exemple, sur une durée de visite d'une heure trente au foyer, s'isoler de la relation et être sur son téléphone portable sans tenir compte des signaux émis par sa fille. Il avait également été constaté par le foyer, lorsque des visites de E______ chez son père avaient eu lieu, que celui-ci ne parvenait pas à expliquer son rythme chez lui et que la mineure revenait très fatiguée de ces visites.

Les experts préconisaient, ainsi, que:

- E______ soit placée en famille d'accueil, avec une intégration en crèche à réévaluer après son placement et poursuite du suivi à la Guidance infantile, et que les droits de visite pour les parents n'excèdent pas quelques heures par semaine, afin que E______ puisse s'investir auprès de sa famille d'accueil, le droit de visite de la mère pouvant se faire de manière non surveillée quelques heures en journée le week-end à quinzaine et celui du père devant avoir lieu en milieu surveillé à quinzaine, par exemple au Point rencontre en modalité "accueil",

- F______ puisse intégrer un nouveau foyer mère-bébé avec un droit de visite pour le père se déroulant au foyer sur quelques heures en journée, avec un suivi par la Guidance infantile dès l'âge de 1 an,

- la mère poursuive son suivi thérapeutique auprès du centre ambulatoire de psychiatrie et de psychothérapie intégrées (CAPPI) et reçoive son traitement par voie injectable plutôt que per os, et

- soit mis en place un suivi psychosocial structuré au sein du CAPPI pour le père.

h) Par courrier reçu le 31 janvier 2023, la mère s'est défendue d'avoir laissé F______ sans surveillance dans le bain et sur la table à langer et a indiqué avoir contacté le Foyer M______ conformément aux préconisations de l'expertise.

i) Par courrier du 7 février 2023, les curateurs des mineures ont informé le Tribunal de protection du fait que F______ avait pu être accueillie au Foyer H______ et ont proposé un planning des visites des parents au foyer, lequel a été avalisé par le Tribunal de protection par décision DTAE/947/2023 rendue sur mesures superprovisionnelles le 7 février 2023.

j) Par courrier du 28 février 2023, le SPMi a informé le Tribunal de protection que la mère et la mineure F______ allaient intégrer le Foyer M______, ce dont les parents étaient satisfaits, bien que le père reste revendicateur. En conséquence, les curateurs recommandaient que le Tribunal de protection prenne acte du placement de F______ au Foyer M______ avec sa mère, autorise le réseau de professionnels actuellement autour de la famille à lire l'expertise familiale avant l'audience fixée et autorise les visites entre le père et sa fille F______ selon le planning à établir en collaboration avec le Foyer M______, recommandations auxquelles le Tribunal de protection a fait droit par décision DTAE/1615/2023 rendue sur mesures superprovisionnelles le 1er mars 2023.

k) Lors de l'audience tenue le 6 mars 2023 par le Tribunal de protection, les experts ont confirmé leur rapport du 31 janvier 2023.

Ils ont précisé que le trouble de la mère l'empêchait d'avoir une vie stable. La préconisation d'un traitement par voie injectable visait à éviter des rechutes qui mettraient la mère et F______ en danger. Il n'y avait pas de contre-indication à ce que la mère sorte avec F______ du Foyer M______.

S'agissant du père, celui-ci était en capacité d'entrer en lien de manière positive avec chacune des filles, mais ses consommations d'alcool, son absence de remise en question et ses difficultés de collaboration rendaient l'étayage proposé peu efficient. Le père ne paraissait ainsi pas en mesure de s'occuper à plein temps de E______. Le suivi préconisé permettrait d'élaborer de nouvelles compétences parentales et devrait s'exercer au CAPPI [du quartier de] K______, lequel proposait des approches ethnologiques.

La perspective d'un retour de E______ auprès de l'un de ses deux parents paraissait peu vraisemblable. Dans l'attente d'un éventuel placement en famille d'accueil de la mineure, le droit de visite pouvait continuer à s'exercer de la même manière qu'au Foyer H______, sous réserve des relations personnelles plus étendues avec la mère.

l) Par courrier adressé le 17 mars 2023 au Tribunal de protection, la mère a, notamment, conclu à ce que son autorité parentale sur les mineures soit maintenue, à ce qu'il soit donné acte de son accord de placer sa fille E______ auprès d'une famille d'accueil pour une période limitée d'un an, à ce qu'un droit de visite avec E______ lui soit réservé à raison d'un week-end à quinzaine, à ce que F______ soit placée au sein du Foyer M______ à ses côtés, à ce qu'elle soit autorisée à sortir du Foyer M______ en présence de F______ à raison de trois fois par semaine et à ce que les curatelles existantes soient maintenues.

Selon elle, le placement de E______, s'il ne paraissait pas pouvoir être évité pour l'instant, ne devait pas constituer une solution définitive, de sorte que son droit de visite avec la mineure ne devait pas être restreint.

m) Par courrier adressé le même jour au Tribunal de protection, le père a indiqué ne pas pouvoir se résoudre à accepter le placement de E______. Il disait rejeter le discours des experts qui indiquaient qu'un retour de E______ auprès de ses parents paraissait peu vraisemblable, précisant qu'il souhaitait progresser sur le plan de ses capacités parentales. Il a en outre relevé l'importance du maintien du lien père-enfant et le fait que la décision du Tribunal de protection du 1er mars 2023 n'avait pas encore été appliquée, de sorte qu'il n'avait plus vu sa fille depuis plusieurs semaines.

Il s'en est rapporté à justice s'agissant du placement de E______ au sein d'une famille d'accueil, sollicitant, en cas de placement, que la famille soit disposée à maintenir un lien régulier entre E______ et ses parents, qu'un droit de visite avec E______ à raison de trois fois par semaine lui soit accordé, que le placement de F______ aux côtés de sa mère au sein du Foyer M______ soit ordonné, qu'un droit de visite avec F______ lui soit accordé, selon le planning établi par le foyer, mais au minimum à raison de trois visites par semaine, et qu'il soit pris acte de sa décision d'entreprendre un suivi psychosocial auprès du CAPPI [à] K______.

n) En date du 20 mars 2023, le Tribunal de protection a délibéré la cause, réuni dans sa composition pluridisciplinaire.

B. Par ordonnance DTAE/3655/2023 rendue le 20 mars 2023, notifiée à A______ le 16 mai suivant, le Tribunal de protection a statué comme suit :

- maintenu le retrait de la garde et du droit de déterminer le lieu de résidence de E______ et F______ aux parents (ch. 1 et 2 du dispositif),

- ordonné le placement de E______ en famille d'accueil avec hébergement, maintenant son placement au Foyer H______ dans l'attente de disponibilités en famille d'accueil (ch. 3),

- ordonné le placement de F______ au Foyer M______ aux côtés de sa mère (ch. 4),

- réservé à B______ un droit aux relations personnelles avec E______, devant s'exercer à raison de quelques heures durant la journée un week-end à quinzaine, en accord avec la famille d'accueil et les curateurs, et, dans l'attente du placement, d'entente avec le foyer H______ et les curateurs à raison d'une visite accompagnée suivie d'une visite libre deux fois par semaine (ch. 5),

- réservé à A______ un droit aux relations personnelles avec E______, devant s'exercer à quinzaine en milieu surveillé tel que le Point rencontre en modalité "accueil" et, dans l'attente du placement, d'entente avec le Foyer H______ et les curateurs à raison d'une visite accompagnée suivie d'une visite libre deux fois par semaine (ch. 6),

- réservé à A______ un droit aux relations personnelles avec F______, devant s'exercer au Foyer M______, d'entente entre la mère, le Foyer M______ et lui-même, durant quelques heures en journée (ch. 7),

- maintenu la curatelle d’organisation, la curatelle de surveillance et de financement du lieu de placement, la curatelle aux fins de gérer les assurances-maladie et les frais médicaux des mineures, la curatelle aux fins de faire valoir leurs créances alimentaires, la curatelle d’assistance éducative, la curatelle d’organisation et de surveillance des relations personnelles et la curatelle de représentation dans le domaine médical en faveur de F______ (ch. 8 à 13),

- instauré une curatelle de représentation dans le domaine médical en faveur de E______ (ch. 14),

- confirmé les curateurs dans leurs fonctions (ch. 15),

- ordonné la poursuite du suivi thérapeutique de B______ auprès du CAPPI (ch. 16),

- ordonné la mise en place d'un suivi psychosocial structuré auprès du CAPPI [à] K______ pour A______ (ch. 17),

- ordonné la poursuite d'un suivi auprès de la Guidance infantile pour les mineures (ch. 18 et 19),

- ordonné le maintien de F______ en crèche (ch. 20),

- laissé les frais judiciaires à la charge de l'Etat (ch. 21), et

- débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 22).

Le Tribunal de protection a confirmé le retrait aux père et mère de la garde et du droit de déterminer le lieu de résidence de leurs filles, au motif que les inquiétudes ayant justifié leur retrait à titre provisionnel restaient d'actualité, en particulier pour E______. En effet, les parents, qui ne s'étaient pas montrés en mesure d'offrir un environnement stable à la mineure et de lui apporter des stimulations adéquates, avaient ainsi impacté son développement, de sorte qu'elle présentait des besoins importants de suivi rapproché et d'encadrement affectif stable sur du long terme. Or, la mère montrait un engagement moindre auprès de sa fille E______ qu'auprès de sa fille cadette et présentait une fragilité psychique peu compatible avec la prise en charge de deux enfants, ainsi que des difficultés à stimuler adéquatement ses deux filles, qui plus est au vu des besoins particuliers de l'aînée. A la faveur de l'étayage offert par les différents intervenants, la mère avait toutefois progressé dans la prise en charge de F______ et présentait un lien adéquat avec celle-ci. Quant au père, s'il présentait un bon lien avec ses filles, il restait peu preneur des conseils fournis par le réseau quant à leur prise en charge, si bien qu'il n'avait pas suffisamment évolué dans ses compétences parentales. Il peinait, notamment, à fournir une attention à ses filles dans la durée, ce même sur de courtes périodes. Il apparaissait ainsi invraisemblable, en l'état, que le père parvienne à se focaliser sur les mineures et à reconnaître leurs besoins de manière suffisante pour les prendre en charge de manière autonome à son domicile. Bien qu'ils soient en partie conscients de leurs difficultés, les parents, en particulier le père, peinaient à accepter que leur fille E______ soit placée en famille d'accueil. Leur accord sur ce point n'était ainsi que récent et incomplet, de sorte que le retrait du droit de déterminer le lieu de résidence de E______ à ses parents s'imposait. Au vu de la complexité de la situation familiale et du besoin qu'avaient les parents de pouvoir prendre soin d'eux afin de pouvoir faire évoluer leurs capacités parentales, il apparaissait nécessaire qu'ils n'aient pas à prendre eux-mêmes la responsabilité du placement des mineures.

S'agissant de la mesure de placement de E______, la mineure avait besoin d'un cadre structurant et contenant, lui permettant d'assurer le suivi développemental nécessaire, de faire le lien entre les différents professionnels qui l'entouraient et de développer un lien sécurisant et de longue durée avec moins de figures d'attachement qu'au foyer, tout en favorisant le maintien des relations avec ses parents. Le foyer ne pouvant entièrement répondre auxdits besoins pour des questions d'organisation, le placement de la mineure dans une famille d'accueil avec hébergement s'imposait.

La mère étant sensible à l'étayage offert par les professionnels, elle était en mesure de rencontrer E______ de manière régulière, sans toutefois que ce lien n'empêche la mineure d'investir pleinement sa famille d'accueil. S'agissant du père, les éléments précités démontraient chez lui un bon investissement auprès de ses filles, mais des difficultés à prendre en compte et à appliquer les conseils des professionnels, ainsi qu'à garder son attention focalisée sur ses enfants. Il restait, dès lors, nécessaire qu'il continue de bénéficier d'un soutien et d'un accompagnement rapprochés de la part de professionnels de l'enfance, afin de l'aider à consolider ses compétences parentales durant les temps de visite avec E______.

C. a) Par acte expédié le 15 juin 2023 à la Cour de justice (ci-après: la Cour), A______ a recouru contre cette ordonnance, dont il a sollicité l'annulation des ch. 3, 5 et 6 de son dispositif.

Cela fait, il a conclu à ce que :

- soit maintenu le placement de E______ au Foyer H______,

- lui soit réservé un droit aux relations personnelles avec E______ devant s'exercer à raison d'une visite accompagnée suivie d'une visite libre deux fois par semaine,

- son droit de visite soit élargi à compter du deuxième mois et sur une période de six mois, selon les modalités préavisées par les curateurs,

- soit réservé à B______ un droit aux relations personnelles avec E______ devant s'exercer d'entente avec le Foyer H______ et les curateurs à raison d'une visite accompagnée suivie d'une visite libre deux fois par semaine,

- soit ordonné aux curateurs de rendre un rapport faisant état de sa propre situation six mois après le prononcé de la présente décision,

- soit ordonné aux curateurs de veiller à ce que son droit aux relations personnelles avec F______, instauré selon le chiffre 7 du dispositif de l'ordonnance entreprise, soit effectif, et

- l'instruction de la cause soit renvoyée au Tribunal de protection pour décisions subséquentes en faveur d'un élargissement de ses droits parentaux.

A l'appui de son recours, il a produit des pièces nouvelles relatives à sa situation personnelle.

Il n'a pas motivé son recours s'agissant de sa conclusion relative à l'exercice effectif de son droit aux relations personnelles avec F______ ni même exposé les raisons l'ayant amené à formuler cette conclusion.

b) Le Tribunal de protection n'a pas souhaité revoir sa décision.

c) Par déterminations du 19 juillet 2023, B______ s'en est rapportée à justice s'agissant du recours et a, pour le surplus, renvoyé à ses conclusions écrites du 17 mars 2023 au Tribunal de protection.

d) Par avis du 25 juillet 2023, les parties et participants à la procédure ont été informés de ce que la cause serait mise en délibération à l'issue d'un délai de dix jours.

e) Faisant usage de son droit de répliquer de manière spontanée, A______ a, par écritures du 29 août 2023, fait valoir des faits nouveaux, déposé de nouvelles pièces et persisté dans ses conclusions.

D. Les éléments suivants ressortent en outre de la procédure :

a) A______ allègue que la décision entreprise a déclenché un processus de remise en ordre dans sa vie personnelle et professionnelle, qui, en sus du soutien du CAPPI [à] K______, lui permettra de développer ses compétences parentales.

b) Il allègue être séparé de B______, avec qui il souhaiterait élaborer un projet de coparentalité avec l'aide de professionnels.

c) Sur le plan professionnel, il aurait décidé de reprendre sa formation dans la vente. A cette fin, il a conclu un contrat de réinsertion avec l'Hospice général en qualité d'employé polyvalent auprès de l'épicerie sociale de [l'association] L______ pour une durée d'une année à partir du 11 mai 2023.

d) Il a produit un courrier établi le 8 juin 2023 par son assistante sociale auprès de l'HOSPICE GENERAL, dans lequel cette dernière fait état du sérieux de son bénéficiaire et des bons retours qu'elle a reçus s'agissant de son activité de réinsertion, laquelle lui permettrait de valider ses acquis et d'obtenir un CFC de gestionnaire de commerce de détail.

e) A______ allègue également qu'il ne serait pas socialement isolé, dans la mesure où son frère benjamin, dont il serait proche, vivrait et travaillerait à Genève dans le domaine de la comptabilité et qu'il bénéficierait du soutien de son entourage.


 

EN DROIT

1. 1.1 Les dispositions de la procédure devant l'autorité de protection de l'adulte sont applicables par analogie aux mesures de protection de l'enfant (art. 314 al. 1 CC).

Les décisions de l'autorité de protection peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 450 al. 1 CC et 53 al. 1 LaCC) dans un délai de trente jours à compter de la notification de la décision (art. 450b al. 1 CC). Le recours doit être dûment motivé et interjeté par écrit auprès du juge (art. 450 al. 3 CC).

En l'espèce, le recours a été formé dans le délai utile et selon les formes prescrites, de sorte qu'il est recevable.

1.2 La Chambre de surveillance examine la cause librement, en fait, en droit et sous l'angle de l'opportunité (art. 450a CC). Elle établit les faits d'office et n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 446 al. 1 et 3 CC).

1.3 Les pièces nouvelles produites par le recourant à l'appui de son écriture de recours sont recevables, l'art. 53 LaCC ne prévoyant aucune limitation au dépôt en procédure de recours de pièces nouvelles.

Il ne sera, en revanche, pas tenu compte des faits nouveaux qu'il a invoqués et des pièces nouvelles produites avec sa réplique déposée spontanément après que la cause a été gardée à juger (ATF 144 III 117 consid. 2 2; 143 III 272 consid. 2.3.2; 142 III 413 consid. 2.2.3-2.2.6), étant ici relevé qu'ils ne sont en tout état pas déterminants pour l'issue de la présente procédure de protection.

2. Le recourant sollicite le maintien de E______ en foyer.

Il considère que son placement en famille d'accueil - considéré à demi-mots comme définitif par les experts - est prématuré, ne respecterait pas le principe de proportionnalité et ne serait pas conforme au bien de la mineure, qui commanderait que soit maintenue la relation positive et solide qu'elle a créée avec lui. Etant en train de remettre en ordre sa vie personnelle et professionnelle, il demande qu'il soit renoncé au placement en famille d'accueil de E______ (qui constitue la mesure la plus incisive) et que ses capacités parentales soient réévaluées six mois après le prononcé de la présente décision, son but étant de pouvoir s'occuper de E______ avec toute l'aide dont il pourra bénéficier. Il s'estime capable de bâtir un projet parental qui soit cohérent et pérenne, et qui permettrait que "soient explorées d'autres pistes que le placement en famille d'accueil de E______ en renforçant [ses] acquis et [ses] points de force". Il soutient que, contrairement à ce qu'a retenu l'expertise, il dispose de la capacité de se remettre en cause, de collaborer avec les divers intervenants et d'interagir de manière positive et appropriée avec la mineure. Il reproche aux experts de ne pas avoir tenu compte de l'impact négatif sur l'évolution de ses capacités parentales et sur sa confiance à l'égard des divers intervenants qu'a provoqué son sentiment d'être constamment observé et jugé, de ne pas avoir tenu compte de certains aspects culturels (tels que la nourriture africaine ou le refus de donner un doudou) et d'avoir évalué négativement ses convictions religieuses. Il relève également que l'instruction est lacunaire en tant qu'elle n'a pas porté sur son cercle social et familial, sa capacité à rechercher l'aide et les conseils de son entourage et son cadre de vie. Soulignant les progrès qu'il estime avoir réalisés quant à sa situation personnelle et professionnelle, mais se déclarant conscient de ses limites, il indique être désireux de s'investir dans le suivi auprès du CAPPI [à] K______ et d'entreprendre une démarche introspective de ses limites et de ses difficultés. S'agissant de la question de la consommation d'alcool, il propose de l'aborder dans le cadre dudit suivi et de procéder à des tests sanguins réguliers.

2.1 Lorsqu'elle ne peut éviter autrement que le développement d'un mineur ne soit compromis, l'autorité de protection de l'enfant retire ce dernier aux père et mère et le place de façon appropriée (art. 310 al. 1 CC).

Le droit de garde passe ainsi au Tribunal de protection, qui détermine alors le lieu de résidence du mineur et choisit son encadrement (arrêt du Tribunal fédéral 5A_335/2012 du 21 juin 2012 consid. 3.1). Le danger doit être tel qu'il soit impossible de le prévenir par les mesures moins énergiques prévues aux art. 307 et 308 CC. La cause de la mesure doit résider dans le fait que le développement corporel, intellectuel ou moral de l'enfant n'est pas assez protégé ou encouragé dans le milieu dans lequel il vit. Les raisons de cette mise en danger du développement importent peu : elles peuvent être liées au milieu dans lequel évolue le mineur ou résider dans le comportement inadéquat de celui-ci, des parents ou d'autres personnes de l'entourage (arrêt du Tribunal fédéral 5A_729/2013 du 11 décembre 2013 consid. 4.1; 5A_835/2008 du 12 février 2009 consid. 4.1).

Toute mesure de protection de l'enfant est régie par les principes de subsidiarité, de complémentarité et de proportionnalité (arrêt du Tribunal fédéral 5A_858/2008 du 15 avril 2009 consid. 4.2).

2.2 H______ est un foyer d’urgence pour des bébés et de très jeunes enfants, afin de les protéger momentanément d’une situation de crise dans leur milieu familial (www.fj.ch/foyers/H______).

2.3 En l'espèce, le recourant ne remet pas en cause le maintien du retrait de la garde de E______ ni son placement. Il conteste, en revanche, le placement de la mineure au sein d’une famille d’accueil, considérant que sa fille devrait demeurer en foyer en attendant l'évolution de ses compétences parentales et la réévaluation de celles-ci dans quelques mois. Ce faisant, il ne conteste pas qu'il n'est pas, en l’état, en mesure d’assumer les soins et l’éducation de sa fille et qu'une mesure de protection s'impose.

Il convient dès lors exclusivement de déterminer s’il se justifie d’ordonner le transfert du placement de la mineure du foyer en famille d’accueil ou s’il apparaît préférable qu’elle demeure placée, comme actuellement, dans un foyer. Le placement hors du milieu familial étant une mesure destinée à protéger l’enfant, seul son intérêt doit être pris en considération.

Si le recourant a critiqué les considérations du rapport d'expertise le concernant, tel n'a pas été le cas s'agissant des considérations concernant E______. Or, il ressort dudit rapport que la mineure présente un trouble réactionnel de l'attachement de l'enfance de type inhibé et un retard dans le développement du langage. Selon les experts, elle a besoin d'un environnement contenant et prévisible, la mise en place de rituels et de routine, ainsi que la présence d'une figure d'attachement sur le long cours étant essentielles pour elle; un placement en famille d'accueil permettrait l'identification à une seule personne de référence, diminuerait les changements dans les réponses éducatives parentales qu'elle n'est pas en état de supporter au vu de son trouble et diminuerait les changements environnementaux liés à la vie en foyer.

Le Foyer H______ est conçu comme un foyer d’urgence, alors que la mineure, âgée d'environ deux ans et demi, y est déjà placée depuis peu après sa naissance. De ce fait tout d'abord, cet établissement n'est pas adapté à un placement qui se prolonge. Au sein d’un foyer, en outre, les enfants sont, en effet, en contact avec plusieurs éducateurs, à tour de rôle, susceptibles de changer au fil du temps. Les éducateurs devant, par ailleurs, s’occuper de plusieurs enfants, ils ne peuvent accorder à chacun autant de soins et d’attention que ceux qu’une famille d’accueil est susceptible d’offrir. L’intégration de E______ au sein d’une telle famille lui assurera l’encadrement attentionné dont elle a besoin. Un tel encadrement est d’autant plus important que personne, pas même le recourant, n’est en mesure de déterminer s'il sera à l’avenir en mesure de s’occuper de sa fille de manière adéquate et, si oui, dans quel délai. Or, la mineure ne saurait demeurer pour une durée indéterminée dans un foyer, dans l’espoir d'une amélioration éventuelle des capacités parentales du père.

Par ailleurs, on rappellera qu'en cas de placement d'un mineur, il appartient au Tribunal de protection de déterminer la structure adéquate aux besoins du mineur. Les parents n'ont, en principe, pas à intervenir à ce propos. Le foyer, qui plus est celui où se trouve l'enfant à l'heure actuelle, n'étant plus un établissement approprié susceptible d'accueillir la mineure et la famille d'accueil étant l'endroit adéquat, l'intérêt de la mineure commande qu'elle y soit transférée comme ordonné par le Tribunal de protection.

L’ordonnance attaquée sera dès lors confirmée sur ce point.

3. Le recourant ne remet pas en cause les droits aux relations personnelles instaurés par le Tribunal de protection en faveur des père et mère, dans l'hypothèse où le placement en famille d'accueil de la mineure E______ serait confirmé.

Ceux-ci apparaissant conformes au bien de la mineure, les chiffres 5 et 6 du dispositif de l'ordonnance entreprise seront confirmés.

4. Le recourant conclut à ce qu'il soit ordonné aux curateurs de veiller à ce que son droit aux relations personnelles avec F______, instauré selon le chiffre 7 du dispositif de l'ordonnance entreprise, soit effectif.

In casu, au vu de l'absence de motivation de son recours sur cette question (art. 450 al. 3 CC) et d'éléments factuels en ce sens, il ne sera pas entré en matière sur ce point, tout en étant relevé que ce point fait partie des missions assumées par les curateurs.

5. S'agissant de mesures de protection d'un mineur, la procédure est gratuite (art. 81 al. 1 LaCC).

Il n'y a pas lieu à l'allocation de dépens.


* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 15 juin 2023 par A______ contre l'ordonnance DTAE/3655/2023 rendue par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant le 20 mars 2023 dans la cause C/10642/2021.

Au fond :

Confirme l'ordonnance entreprise.

Dit que la procédure est gratuite.

Dit qu'il n'y a pas lieu à l'allocation de dépens.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.