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Décisions | Chambre de surveillance

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C/11981/2006

DAS/202/2023 du 28.08.2023 sur DTAE/2323/2023 ( PAE ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/11981/2006-CS DAS/202/2023

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU LUNDI 28 AOÛT 2023

 

Recours (C/11981/2006-CS) formé en date du 4 mai 2023 par Madame A______, domiciliée ______ (Genève), comparant par Me Pierre VUILLE, avocat, en l'Etude duquel elle élit domicile.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 29 août 2023 à :

 

- Madame A______
c/o Me Pierre VUILLE, avocat
Rue des Alpes 15, case postale 1592, 1211 Genève 1.

- Madame B______
Monsieur C______

SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS
Case postale 75, 1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A.           Par décision DTAE/2323/2023 rendue le 23 mars 2023, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: Tribunal de protection) a, par apposition de son timbre humide sur le rapport du 2 février 2023 du Service de protection des mineurs (ci-après: SPMi), autorisé le curateur de la mineure D______ à signer les formulaires indispensables pour entreprendre les démarches AI, ainsi que le document de la Commission cantonale d'indication (CCI) lui permettant d'obtenir un logement à sa majorité, et limité en conséquence l'autorité parentale de A______ sur ce point, ladite décision ayant été déclarée immédiatement exécutoire.

B.            a) Par acte du 4 mai 2023, A______ a formé recours contre cette décision, concluant préalablement à ce que soit ordonnée la représentation de D______ dans le recours, principalement à l’annulation de la décision, au renvoi de la cause au Tribunal de protection afin de procéder aux instructions utiles et nécessaires, notamment les auditions de la mineure, de A______ et de E______, et au déboutement du Département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse, de l’Office de l’enfant et de la jeunesse, et du Service de protection des mineurs de toutes autres ou contraires conclusions.

Elle a produit des pièces nouvelles.

b) Par décision DAS/103/2023 du 11 mai 2023, la Chambre de surveillance de la Cour de justice a rejeté la requête de restitution de l’effet suspensif au recours formée le 4 mai 2023 par A______ contre la décision entreprise, et réservé le sort des frais à la décision sur le fond.

c) Par courrier du 8 juin 2023, le SPMi a conclu au maintien des mesures de protection prises en faveur de D______.

d) A______ a répliqué par courrier du 23 juin 2023 et produit de nouvelles pièces.

C.           Les faits suivants ressortent de la procédure.

a) A______ est la mère de D______ et F______, nés respectivement les ______ 2006 et ______ 2007.

b) Après que le droit de garde et de déterminer le lieu de résidence des mineurs avait été retiré à A______, F______ a été placé en famille d’accueil et D______ au Foyer G______ de juillet 2017 à juillet 2019, avant d’intégrer le Foyer H______, où elle réside à ce jour.

C______, intervenant auprès du SPMi a été désigné curateur de D______.

c) Les relations personnelles entre les mineurs et leur mère ont connu de nombreux aléas, celle-ci ayant été diagnostiquée borderline et rencontrant des problèmes de consommation excessive d’alcool.

d) Lors d’une audience devant le Tribunal de protection du 7 décembre 2022, D______ a exposé qu’elle s’ennuyait au Cycle d’orientation, auprès de I______. Elle souhaitait aller au collège et devenir vétérinaire.

Elle envisageait des relations personnelles avec sa mère une fois par semaine au foyer, sans que personne ne soit présent, mais «avec un filet de sécurité». Elle se trouvait bien en foyer et n’avait pas envie de retourner vivre chez sa mère. Elle a déclaré que sa mère était jalouse du foyer, de la famille d’accueil [de son frère] et de la relation qu’elle entretenait avec son frère.

e) Le 23 janvier 2023 a eu lieu une réunion réseau à l’école de I______, afin de préparer la future orientation professionnelle de D______, ce qui impliquait que soient entreprises des démarches auprès de l’Assurance invalidité (AI) et de la Commission cantonale d’indication (CCI).

A______ a manifesté son désaccord avec les fait que sa fille soit scolarisée auprès de I______, estimant que celle-ci pourrait rejoindre l’Ecole de culture générale, quand bien même elle n’avait pas obtenu des résultats suffisants lorsqu’elle avait passé des tests en blanc dans cette optique. Elle estimait que D______ pourrait être indépendante au moment de sa majorité.

D______ a manifesté qu’elle pourrait aller vivre chez son père à ses 18 ans, celui-ci n’ayant cependant entrepris aucune démarche pour voir sa fille et son lieu de résidence n’étant pas connu.

Selon le Foyer H______, D______ n’avait pas atteint un degré d’autonomie suffisante pour vivre seule à sa majorité.

D______ a quitté la réunion "en claquant la porte", sans signer les documents nécessaires pour que les démarches auprès de l’AI et de la CCI soient entreprises. Sa mère a également refusé de les signer.

f) Suite à la réunion du 23 janvier 2023, le SPMi, par courrier du 2 février 2023, a demandé au Tribunal de protection que le curateur soit autorisé à signer les formulaires pour entreprendre les démarches AI, ainsi que le document CCI, et à ce que l’autorité parentale de A______ soit limitée dans cette mesure.

g) Par courrier du 9 février 2023, le Tribunal de protection a invité A______ à se déterminer sur le courrier précité.

h) A______ n’ayant pas répondu à l’invitation du Tribunal de protection, celui-ci a rendu la décision querellée.

EN DROIT

1. 1.1 Les dispositions de la procédure devant l'autorité de protection de l'adulte sont applicables par analogie pour les mesures de protection de l'enfant (art. 314 al. 1 CC).

Les décisions de l'autorité de protection peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 450 al. 1 CC et 53 al. 1 LaCC).

Interjeté par la mère de la mineure, ayant qualité pour recourir, dans le délai utile de trente jours et suivant la forme prescrite, le recours sera déclaré recevable (art. 450 al. 2 et 3 et 450b CC).

1.2 Compte tenu de la matière, soumise aux maximes inquisitoire et d'office illimitée, la cognition de la Chambre de surveillance est complète. Elle n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 446 CC).

1.3 Les pièces nouvellement déposées devant la Chambre de céans par la recourante sont recevables, sans préjudice de leur pertinence, dans la mesure où l'art. 53 LaCC, qui régit de manière exhaustive les actes accomplis par les parties en seconde instance, à l'exclusion du CPC, ne prévoit aucune restriction en cette matière.

2. La recourante fait grief au Tribunal de protection de ne pas avoir entendu la mineure et de n’avoir pas suffisamment instruit le dossier, en ne sollicitant pas l’avis des médecins, thérapeutes et spécialistes s’occupant d’elle et de la mineure, avant de rendre sa décision.

2.1 L’enfant est entendu personnellement, de manière appropriée, par l’autorité de protection de l’enfant ou le tiers qui en a été chargé, à moins que son âge ou d’autres justes motifs ne s’y opposent (art. 314a al 1 CC).

Le juge du Tribunal de protection dirige la procédure (art. 36 al. 1 LaCC). Le Tribunal de protection procède à l'instruction complète du dossier. Il établit d'office les faits et procède à toutes mesures probatoires utiles, en particulier il auditionne les parties et convoque les témoins dont il estime la déposition nécessaire. Il peut également requérir tout rapport des organes administratifs ou de police, pièces dont les parties peuvent prendre connaissance pour autant qu'aucun intérêt prépondérant ne s'y oppose (al. 2). L'instruction a lieu indépendamment de la présence des parties (al. 5).

2.2 En l’espèce, le Tribunal de protection n’a pas entendu la mineure avant de rendre sa décision limitant l’autorité parentale de la recourante.

Cela étant, lors de la réunion réseau du 23 janvier 2023, les documents nécessaires afin que les démarches auprès de l’AI et de la CCI soient entreprises ont été soumis à la mineure et à la recourante pour signature, ce que celles-ci ont refusé.

Le Tribunal de protection, avant de rendre sa décision, a interpellé la recourante afin qu’elle se détermine sur la nécessité d’entreprendre les démarches précitées, ce qu’elle n’a pas fait.

La recourante soutient que l’audition des médecins et autres spécialistes aurait conduit le Tribunal de protection à considérer qu’elle avait toutes les aptitudes pour exercer son autorité parentale, et que la mineure ne souffrait d’aucun handicap justifiant le recours à l’AI. Or, par son attitude, en particulier lors de la séance du 23 janvier 2023, la recourante a démontré qu’elle n’était pas en mesure de prendre en compte l’intérêt de la mineure. Il appartiendra à l’AI d’examiner l’état de la mineure avant d’entrer en matière sur une éventuelle prise en charge, et de décider de la nature de celle-ci.

Compte tenu de ces éléments, la convocation d’une audience pour entendre la mineure aurait été manifestement inutile et n’aurait fait que retarder des démarches nécessaires pour envisager sans tarder l’avenir scolaire de celle-ci. De même, les auditions sollicitées n’apparaissaient pas utiles.

Le grief est infondé.

3. La recourante reproche au Tribunal de protection d’avoir limité son autorité parentale.

3.1.1 L'autorité parentale constitue à la fois un droit et un devoir: elle permet et oblige les parents à prendre toutes les décisions nécessaires et conformes au bien de l'enfant pendant sa minorité (art. 301 CC). Ils ont ainsi le devoir d'assurer l'entretien, l'éducation, l'assistance et la protection de l'enfant (art. 272, 276, 301 à 303 et 318 CC). Il leur incombe ainsi de prendre toutes les décisions qui le concernent, pouvoir qui découle du fait qu'ils détiennent l'autorité parentale (art. 296 al. 1, 297 al. 1 et 304 al. 1 CC).

Lorsque le développement de l'enfant est mis en danger et que les parents n'y remédient pas d'eux-mêmes ou sont hors d'état de le faire, l'autorité de protection (à Genève : le Tribunal de protection) prend les mesures nécessaires pour le protéger (art. 307 al. 1 CC).

3.1.2 Lorsque les circonstances l'exigent, l'autorité de protection de l'enfant nomme un curateur qui assiste les père et mère de ses conseils et de son appui dans la prise en charge de l'enfant (art. 308 al. 1 CC).

Elle peut conférer au curateur certains pouvoirs tels que celui de représenter l'enfant pour établir sa filiation paternelle et pour faire valoir sa créance alimentaires et d'autres droits, ainsi que la surveillance des relations personnelles (art. 308 al. 2 CC). L'autorité parentale peut être limitée en conséquence (art. 308 al. 3 CC).

L'autorité tutélaire doit clairement indiquer la nature et l'étendue des pouvoirs confiés au curateur. Ceux-ci dépendront des situations de mise en danger de l'enfant et de la façon jugée la plus appropriée d'y faire face (MEIER, Commentaire romand, Code civil I, Pichonnaz/Foëx (éd.), n. 13 ad art. 308 CC).

La loi ne cite, à titre exemplatif, que deux cas de pouvoirs particuliers, en réservant d'autres situations. L'art. 13 al. 2 DPMin mentionne pour sa part des pouvoirs "en rapport avec l'éducation, le traitement et la formation du mineur". Les pouvoirs en question peuvent toucher tous les domaines de la vie et de l'éducation de l'enfant. Dans le respect du principe de proportionnalité, ces pouvoirs particuliers (combinés le cas échéant avec un retrait partiel de l'autorité parentale selon l'art. 308 al. 3 CC) évitent d'avoir à retirer l'autorité parentale dans son entier pour atteindre un but bien spécifique (MEIER, op. cit. n. 14, 24 et 25 ad art. 308).

Dans la mesure de ces pouvoirs particuliers, le curateur représente l'enfant. Ce pouvoir de représentation est concurrent à celui des père et mère; ceux-ci peuvent par conséquent contrecarrer les actes du curateur. Si un tel risque existe ou s'est déjà réalisé, l'autorité tutélaire devra expressément limiter l'autorité parentale (art. 308 al. 3 CC), en décrivant précisément les points sur lesquels les père et mère sont privés de leur pouvoir (MEIER, op. cit. n. 28 ad art. 308).

3.2 En l’espèce, la recourante s’oppose à ce que des démarches soient entreprises auprès de l’AI et de la CCI, estimant que la mineure doit poursuivre sa formation à l’Ecole de culture générale, alors qu’il ressort du dossier que celle-ci n’a pas réussi les examens lui permettant de rejoindre cette école.

Il apparaît ainsi que la recourante n’est pas en mesure de prendre les décisions dans l’intérêt de sa fille mineure en matière de formation.

Comme déjà relevé, il appartiendra aux institutions sollicitées (AI et CCI) d’examiner les capacités et la situation de la mineure dans son ensemble, afin de déterminer les possibilités qui s’offrent à elle en termes de formation.

La mesure ordonnée parait dès lors adéquate et proportionnée. Le recours sera donc rejeté.

4. La procédure est gratuite s'agissant de mesures de protection d'un mineur (art. 81 al. 1 LaCC).


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 4 mai 2023 par A______ contre la décision DTAE/2323/2023 rendue le 23 mars 2023 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/11981/2006.

Au fond :

Le rejette.

Dit que la procédure est gratuite.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Sylvie DROIN et Pauline ERARD, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.