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Décisions | Chambre de surveillance

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C/423/2019

DAS/161/2023 du 29.06.2023 sur DTAE/8044/2022 ( PAE ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/423/2019-CS DAS/161/2023

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU JEUDI 29 JUIN 2023

 

Recours (C/423/2019-CS) formé en date du 20 décembre 2022 par Monsieur A______, domicilié ______ (Genève), comparant par en personne.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 4 juillet 2023 à :

- Monsieur A______
______.

- Monsieur B______
c/o C______
______.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A.           a) B______, né le ______ 1952 à D______ (Italie), originaire de Genève, divorcé depuis le ______ 2008, a sollicité l'instauration d'une mesure de protection en sa faveur au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : le Tribunal de protection), en date du 7 janvier 2019. Il exposait avoir été victime d'un accident de ski au début de l'année 2017, qui l'avait laissé tétraplégique. Il avait subi une hospitalisation de longue durée puis était entré en résidence au Foyer E______ au début de l'année 2018. Gestionnaire d'une société, il avait dû cesser toute activité suite à son accident et son handicap ne lui permettait pas d'effectuer les démarches nécessaires notamment à la liquidation de sa société et à la vente de son local commercial, ni d'assurer la gestion courante de ses affaires. Il était au bénéfice d'une rente AVS et d'une allocation pour impotent. Une demande de prestations complémentaires pourrait être déposée, dès la mise à jour de sa situation.

b) Le Tribunal de protection a nommé F______, avocate, en qualité de curatrice d'office de la personne concernée, en date du 15 janvier 2019.

c) Par décision du 22 mars 2019, le Tribunal de protection a institué une curatelle de représentation et de gestion en faveur de B______, désigné A______ aux fonctions de curateur, lui a confié les tâches de représenter la personne concernée dans ses rapports avec les tiers, en particulier en matière d'affaires administratives et juridiques, de gérer ses revenus et ses biens et d'administrer ses affaires courantes et a autorisé le curateur à prendre connaissance de sa correspondance, dans les limites du mandat.

d) A______ a déposé au Tribunal de protection son rapport d'entrée en fonction le 19 juillet 2019, accompagné d'une liste de pièces justificatives. Dans ce rapport, il est indiqué que "les frais de pension ainsi que la rente d'impotence facturées (sic) par le Foyer E______ ont été avancés par Mme G______ (ex-G______ [nom de famille de B______]) depuis le 4 janvier 2018. Dès la vente de son local à L______ [GE], M. B______ pourra rembourser(sic) Mme G______ les montants avancés. En juillet 2019, 151'654 fr. auxquels s'ajoutent 10'000 fr. prêtés par un ami, à rembourser également".

Aucune pièce justificative du versement de ces deux montants pour le compte ou en faveur de B______ n'a été jointe au rapport.

Le rapport précise encore: "il s'agit d'une curatelle volontaire et d'accompagnement où M. B______ entend garder ses prérogatives et son pouvoir de décision tout en admettant être aujourd'hui en totale dépendance physique et bientôt économique".

e) Le 6 octobre 2021, A______ a déposé au Tribunal de protection son rapport et comptes couvrant la période du 22 mars 2019 au 31 mars 2021.

f) Par courrier du 5 juillet 2022, le Service de révision et de contrôle du Tribunal de protection a sollicité de A______ la production de documents complémentaires, soit notamment les pièces justifiant les montants qui avaient été remboursés à G______ (ex-épouse) et à H______ (ami), ainsi que les relevés des dépenses effectuées par le biais de la carte de crédit de son protégé. Il a également sollicité des explications sur les frais de réparation liés à un scooter, s'interrogeant sur le fait de savoir si son protégé avait toujours un véhicule à son nom.

Il a également rappelé au curateur que, dans le cadre d'une curatelle de représentation et de gestion, les cartes de crédit de la personne protégée devaient être annulées et une structure financière spécifique mise en place, en ce sens qu'un compte à libre disposition du protégé devait être ouvert, avec un montant mensuel déterminé et adapté à ses besoins et à son patrimoine. Afin de pouvoir valider le montant mensuel mis à disposition de l'intéressé, une proposition devait être faite par le curateur au Service de révision et de contrôle, justifiée au moyen d'un budget actualisé, indiquant les revenus de la personne protégée et les dépenses projetées. Un délai lui a été imparti au 26 juillet 2022 pour ce faire, lequel a été prolongé, à la demande du curateur, au 30 septembre 2022. Il a également été signalé au curateur que les dépenses mensuelles de son protégé devaient être revues à la baisse.

g) Le Tribunal de protection a, de nouveau, rappelé au curateur, dans un courrier du 26 septembre 2022, que l'ordonnance du 22 mars 2019 avait mis en place une curatelle de représentation et de gestion. Il lui était demandé d'appliquer, sans délai, la structure financière indiquée dans le courrier du 5 juillet 2022 du Service de révision et de contrôle.

h) Le 30 septembre 2022, A______ a transmis au Service de révision et contrôle du Tribunal de protection divers documents. Afin de justifier l'origine des sommes versées à G______ (151'636 fr. 40) et à H______ (10'896 fr. 20), résultant respectivement des décomptes [de la banque] I______ et de [la banque] J______ annexés, A______ a adressé au Tribunal de protection un extrait de compte de Fondation Foyer E______ du 22 décembre 2017 au 31 août 2022 (sur lequel ne figure pas que certains paiements auraient été effectués par l'ex-épouse) et une copie d'une lettre adressée à l'Administration fiscale par son protégé le 6 octobre 2019 indiquant que le montant de 10'000 fr. mentionné sur sa déclaration provenait du prêt d'un ami.

A______ a précisé que le montant de 151'636 fr. 60, remboursé le 9 janvier 2020 à l'ex-épouse de son protégé, correspondait aux avances que celle-ci avait effectuées en payant la facture de Foyer E______ dans l'attente de la vente du local commercial de son ex-époux. Le scooter avait été repris par le fils de son protégé, ainsi que la place de parking, que son protégé continuait à régler. Il était prévu, d'ici l'automne 2022, de réduire au maximum les charges superflues, en commençant par les 600 fr. mensuels de garde-meubles, nécessaires suite à la liquidation de l'appartement de son protégé.

Ce dernier utilisait sa carte de crédit pour effectuer des commandes par internet, seul moyen possible pour lui compte tenu de son handicap, mais n'était pas en mesure de classer ses factures, de sorte qu'elles échappaient à tout contrôle rigoureux (sic). Il a persisté à soutenir que la curatelle mise en place était une curatelle volontaire et d'accompagnement dans laquelle "M. B______ entend garder ses prérogatives et son pouvoir de décision". Il "l'encourage(ait) à instruire sa demande de prestations complémentaires qui devra être déposée avant que ses disponibilités n'atteignent 100'000 fr.". Avec la bénévole qui rendait visite une fois par semaine à son protégé, ils avaient prévu de mettre en place un tableau Excel et d'y enregistrer désormais les paiements effectués depuis le compte J______ de son protégé.

Son protégé s'était laissé convaincre de l'opportunité d'une curatelle de représentation et de gestion, de sorte que "ils étaient progressivement en train de se rapprocher de la structure financière" décrite par le Tribunal de protection.

Pour la période du 22 mars 2019 au 30 septembre 2021, A______ a établi une note d'honoraires de 14'450 fr., en sollicitant le versement d'une avance au Tribunal de protection, lequel a autorisé le versement en sa faveur d'une provision de 9'500 fr.

i) Par courrier du 10 octobre 2022, en réponse au courrier du Tribunal de protection du 26 septembre 2022, A______ a persisté dans sa position, précisant de nouveau au Tribunal de protection que son protégé ne pouvait pas retirer d'argent en raison de sa tétraplégie, et que seule une carte bancaire pouvait lui permettre de faire des commandes en ligne à l'aide d'une souris buccale. Une fois par semaine, une bénévole venait l'assister pour les virements et le suivi des paiements effectués à partir de son compte dédié. Selon le contact qu'il avait eu avec la banque de son protégé, le mandat de représentation et de gestion ne permettrait pas de lui retirer l'accès à ses avoirs. Concernant le montant mensuel à disposition, il travaillait avec le protégé sur une réduction des dépenses personnelles qui pour le moment était encore exceptionnelles et d'une grande diversité. L'autodétermination étant un élément essentiel à la raison de vivre de son protégé, il s'employait à favoriser un lien de confiance avec lui, ainsi qu'une bonne collaboration pour instruire au mieux la demande auprès du SPC qui, à terme, devrait prendre le relai pour les frais d'hébergement et les frais médicaux. La santé précaire de son protégé et les perspectives prochaines d'une dépendance économique justifiaient de plus en plus une curatelle de représentation et de gestion, ce vers quoi ils tendaient progressivement avec son protégé.


j) Le 20 octobre 2022, A______ a encore transmis au Tribunal de protection une copie d'un courriel de K______, responsable du Service curatelles de la [banque] J______, lequel indiquait qu'il ne pouvait donner suite à l'instruction du curateur de limiter l'accès de son protégé à son compte bancaire, faute de décision dans ce sens du Tribunal de protection.

k) Par courrier du 23 novembre 2022 adressé à A______, le Tribunal de protection s'est étonné que ce dernier ait formé une demande de restriction d'accès au compte bancaire de son protégé, cette mesure n'ayant pas été ordonnée. L'examen du rapport pour la période du 22 mars 2019 au 31 mars 2021 démontrait que la curatelle de représentation et de gestion prononcée n'avait jamais été mise en place. Ce type de curatelle supposait que le curateur se charge de la gestion du patrimoine de son protégé, mettant en général à disposition de celui-ci un montant mensuel pour son entretien sur un compte séparé, après avoir bien évidemment établi un budget. Or, la personne protégée avait conservé la libre disposition de la gestion de sa fortune, avec possible conséquence que le SPC considère une partie des dépenses comme des "biens dessaisis", et limite ainsi le montant des prestations complémentaires du concerné. Par ailleurs, dans la mesure où la mise en œuvre de la curatelle prononcée impliquait une gestion du patrimoine, ce n'était pas le protégé avec l'aide d'un bénévole qui devait s'en charger, mais le curateur personnellement.

B.            Par décision DTAE/8044/2022 rendue le 22 novembre 2022, le Tribunal de protection a refusé d'approuver les rapport et comptes périodiques de A______, en sa qualité de curateur de représentation et de gestion de B______, pour la période allant du 22 mars 2019 au 31 mars 2021 (chiffre 1 du dispositif), a rendu attentives les personnes aux dispositions des articles 454 et ss du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC-RS 210) relatives à l’action en responsabilité dont elles disposent contre le canton et qui se prescrit dans le délai de trois ans à compter de la connaissance d’un dommage, mais au plus tard dix ans après que ledit dommage s’est produit (ch. 2), fixé l’émolument de contrôle à 1'279 fr. et l’a mis à la charge de la personne concernée (ch. 3).

Il a retenu que la personne concernée continuait à avoir accès à sa carte de crédit et avait effectué des dépenses d’environ 25'000 fr. durant la période couverte par le rapport soumis à approbation, sans que le curateur ne soit en mesure de donner des explications sur les achats intervenus. Le curateur n’avait par ailleurs pas renseigné le Tribunal de protection, suite à la demande formulée le 5 juillet 2022, ne respectant ainsi pas son devoir d’information. L’origine de la dette de 10'000 fr. n’avait pas été documentée. De même, aucun document fourni par le curateur ne permettait de justifier le remboursement de la somme de 151'705 fr. 26 figurant dans son rapport, ni de retenir l’existence d’une telle dette. Le curateur n’ayant pas fourni au Tribunal de protection des rapport et comptes périodiques répondant pleinement et adéquatement à son devoir d’information, le Service de révision et de contrôle n’avait pas pu vérifier exhaustivement l’utilisation des fonds de la personne concernée, de sorte que le Tribunal de protection devait refuser l’approbation de ceux-ci.

C.           a) A______ a formé recours le 20 décembre 2022 contre cette ordonnance, qu’il a reçue le 25 novembre 2022, concluant à son annulation et, cela fait, à ce que son rapport et ses comptes soient approuvés.

S’agissant de l’utilisation de la carte de crédit, il expose que son protégé, tétraplégique, ne peut payer des achats que par internet et a dépensé la somme de 23’418 fr. par carte de crédit en deux ans, soit environ 1'000 fr. par mois pour des dépenses personnelles (abonnements musique et presse, coussin à mémoire de forme, ordinateur portable, restaurants et concerts, etc).

Les dettes de 10'000 fr. et de 151'705 fr. (recte : 151'636 fr. 60 selon décompte bancaire [de la banque] I______), figuraient déjà dans son rapport d’entrée en fonction. Il avait fourni au Tribunal de protection une lettre de son protégé à l'Administration fiscale cantonale et un relevé de compte client de Fondation Foyer E______ et avait obtenu, depuis lors, des attestations des deux créanciers, qu’il produisait à l’appui de son recours. Son rapport intermédiaire indiquait que H______, un ami italien, avait avancé la somme de 10'000 fr. en 2018, pour permettre à son protégé de faire face à ses premières factures, en attendant la vente de son local commercial à L______ [GE]. De même son ex-femme avait réglé la pension du Foyer E______, ainsi que les loyers de garde meuble jusqu’en juin 2019, pour un montant de 151'636 fr. 60.

Il estime que les comptes ont été parfaitement tenus. Son protégé avait encaissé la somme de 846'084 fr., justifiée principalement par la vente du local commercial à Genève et le partage des biens familiaux. Les dépenses de 471'160 fr. se répartissaient entre le compte de J______ pour 54'012 fr. et le compte [de] I______ pour 417'149 fr., dont 338'252 fr. représentaient les frais de Foyer E______ (186’547 + 151'705 fr.). Les autres dépenses concernaient des prélèvements automatiques pour 13'460 fr. et des frais médicaux et de transports pour 22'778 fr. Il restait ensuite la somme de 23'418 fr. de carte de crédit mentionnée plus avant, et une dépense exceptionnelle de 8'802 fr. pour un scooter, un abonnement de tennis, des frais de notaire et un remboursement à la fratrie des charges communes des biens immobiliers.

La structure financière sollicitée avait été mise en place début 2022, à la faveur de la clôture du compte [de] I______ et la carte de crédit J______ restant était plafonnée à 1'000 fr. par mois. L’autonomie financière de son protégé était assurée jusqu’à l’été 2023, après quoi le seuil de fortune de 100'000 fr. serait franchi et le SPC devrait prendre en charge progressivement la pension au Foyer E______ et les frais médicaux.

Il estimait certes qu’on pouvait reprocher à son protégé d’avoir payé la place de scooter pour le plus jeune de ses fils jusqu’en 2020, les loyers des garde-meubles pendant quatre ans, ou encore le co-financement d’un programme de recherche en partenariat avec des étudiants de [l'école] M______ pour développer un chevalet électromécanique qui devait lui permettre de peindre avec la bouche sur de grandes toiles, mais il fallait mettre ces dépenses, modestes et précieuses au moral de son protégé, en regard des 846'084 fr. encaissés pendant la même période (vente du local et liquidation de la succession familiale). Les charges personnelles de son protégé étaient encore à réduire pour rester dans la limite de la somme de 1'460 fr. par mois de rentes qu'il percevait, mais les montants les plus importants, qui étaient liés au remboursement des dettes, n’apparaîtraient plus. Quant aux loyers des garde-meubles, son protégé avait commencé à faire débarrasser les boxes loués (trois à Genève et un dans le canton de Vaud).

Il a produit un chargé de pièces, dont certaines nouvelles.

b) Le Tribunal de protection n’a pas souhaité revoir sa décision.

c) Les participants à la procédure ont été avisés par plis du greffe de la Cour du 14 février 2023 de ce que la cause serait mise en délibération dans un délai de dix jours.

EN DROIT

1.             1.1 Le recours, formé par le curateur contre la décision du Tribunal de protection refusant l'approbation de ses rapport et comptes intermédiaires dans les délai et forme prescrits, est recevable (art. 450 al. 2 ch. 3 et al. 3, 450b al. 1 CC; 53 al. 1 LaCC).

1.2 La Chambre de surveillance examine la cause librement en fait et en droit et sous l'angle de l'opportunité (art. 450a al. 1 CC). Elle établit les faits d'office et n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 446 al. 1 et 3 CC).

1.3 L'acte de recours doit être motivé, à tout le moins de manière sommaire, afin de respecter l'exigence de motivation (art. 450 al. 3 CC), la motivation devant être suffisamment explicite pour que l'instance de recours puisse la comprendre aisément.

Bien que sollicitant l'annulation de l'entier de l'ordonnance contestée, le recourant ne forme aucun grief contre les chiffres 2 et 3 de son dispositif, de sorte que sa conclusion, en tant qu'elle porte sur les deux chiffres susmentionnés, est irrecevable pour défaut de motivation.

1.4 L'art. 53 LaCC, qui régit de manière exhaustive les actes accomplis par les parties en seconde instance, à l'exclusion du CPC (art. 450f CC cum art. 31 al. 1 let. c et let. d a contrario LaCC), ne stipulant aucune restriction en matière de faits et de moyens de preuve nouveaux en deuxième instance, les pièces nouvelles déposées par le recourant sont dès lors admises.

2.             Le recourant reproche au Tribunal de protection d'avoir refusé d'approuver ses rapport et comptes couvrant la période du 22 mars 2019 au 31 mars 2021. Il remet ainsi en cause le chiffre 1 du dispositif de l’ordonnance.

2.1 Aussi souvent qu'il est nécessaire, mais au moins tous les deux ans, le curateur remet à l'autorité de protection de l'adulte un rapport sur son activité et sur l'évolution de la situation de la personne concernée (art. 411 al. 1 CC). Il tient les comptes et les soumet à l'approbation de l'autorité de protection de l'adulte aux périodes fixées par celle-ci, mais au moins tous les deux ans (art. 410 al. 1 CC).

L'autorité de protection approuve ou refuse les comptes; au besoin, elle exige des rectifications (art. 415 al. 1 CC). Elle examine les rapports du curateur et exige au besoin des compléments (art. 415 al. 2 CC). Elle prend, si nécessaire, les mesures propres à sauvegarder les intérêts de la personne concernée (art. 415 al. 3 CC).

L'autorité examine si les comptes sont formellement exacts et si l'administration est appropriée et conforme aux dispositions de la loi (Message, 6688 s.). Pour autant que les tâches du curateur incluent la présentation de comptes, le contrôle porte sur l'état des revenus et des dépenses, de même que sur celui de la fortune et des changements intervenus dans les avoirs et dans les placements; l'inventaire ou les derniers comptes déposés constituent une base de calcul à partir de laquelle on peut juger de la fiabilité des variations annoncées. L'examen des comptes va au-delà d'un simple contrôle des pièces comptables; il va de soi qu'elles doivent être visées. En principe, cela appelle une vérification complète des écritures et des justificatifs correspondants ( ). En outre, l'autorité doit vérifier si d'éventuelles instructions données ont été suivies, des créances échues compensées, des prétentions infondées de tiers écartées, etc. ( ) En ce qui concerne la fortune, l'autorité doit s'assurer que les prescriptions en matière de gestion, de placement et de conservation sont respectées (BIDERBOST, in CommFam, Protection de l'adulte, 2013, ad art. 415 n. 4).

L'art. 415 al. 2 CC traite de l'établissement du rapport ( ). Il conviendra surtout de regarder si le curateur exécute correctement son mandat et applique la mesure en tenant compte de la capacité d'autodétermination de la personne ainsi que des intérêts bien compris, s'il s'en tient aux pouvoirs que la loi lui confère, si les tâches définies et les objectifs fixés sont respectés, le cas échéant si les instructions sont suivies et l'évolution de la situation bien prise en compte, si les objectifs prévus pour l'avenir sont réalistes, etc. Il y a finalement lieu de s'assurer qu'il n'y a pas de contradiction entre le rapport et les comptes (BIDERBOST, op. cit., ad art. 415 n. 6).

Il peut s'avérer nécessaire de demander des précisions ou des compléments, notamment lorsque les pièces font défaut ou lorsqu'un point particulier se trouve insuffisamment documenté (BIDERBOST, op. cit., ad art. 415 n. 8).

Sur la base du résultat des contrôles, l'autorité accorde son approbation ou la refuse. L'approbation n'emporte en principe pas d'effet juridique à l'égard des tiers (message, 6689). Elle ne constitue pas non plus une décharge de responsabilité (BIDERBOST, op. cit., ad art. 415 n. 9).

L'autorité de protection assure la surveillance générale de l'activité des curateurs. Le contrôle est là pour garantir un suivi approprié de la personne concernée et une mise en œuvre optimale de la mesure de protection de l'enfant ou de l'adulte. Il conviendra surtout de regarder si le curateur exécute correctement son mandat. Une attention particulière sera portée à la question de savoir si le curateur est toujours la personne adéquate pour poursuivre l'exécution du mandat et si la mesure continue d'être appropriée dans le cas d'espèce (BIDERBOST, op. cit., ad art. 415 n. 1 et 6).

2.2 En l’espèce, l’autorité de protection a refusé d’approuver les rapport et comptes du curateur portant sur la période du 22 mars 2019 au 31 mars 2021, ce que le recourant conteste.

2.2.1 Dans un premier motif, le Tribunal de protection a reproché au recourant d’avoir laissé à son protégé l’accès à sa carte de crédit, ce qui lui avait permis d'effectuer des dépenses d’environ 25'000 fr. durant la période couverte par le rapport soumis à approbation, sans être en mesure de fournir des justificatifs des achats intervenus.

Le recourant revient abondamment dans son recours sur le bien-fondé des dépenses faites par son protégé, exposant les raisons de celles-ci et les justifiant de son point de vue. Il ne s’en prend cependant pas directement à la motivation du Tribunal de protection portant sur le premier motif de refus d’approbation. En particulier, il ne conteste pas avoir laissé libre accès à ses ressources financières à son protégé. Au contraire, tout au long des échanges intervenus avec le Tribunal de protection, il a persisté à soutenir que son protégé bénéficiait d'une curatelle volontaire d'accompagnement, malgré le texte clair de l'ordonnance du 22 mars 2019 instaurant une curatelle de représentation et de gestion, et les rappels du Tribunal de protection à cet égard. Il ne conteste également pas ne pas avoir mis en place durant cette période la structure financière usuelle dans ce type de curatelle, malgré les divers rappels de l'autorité de protection à ce sujet.

Le recourant ne conteste pas le montant des dépenses effectuées durant la période concernée par son protégé, pas plus qu'il ne conteste ne pas avoir fourni au Tribunal de protection les justificatifs sollicités par celui-ci afin de vérifier la nécessité de ces dépenses. Il a d'ailleurs, dans un courrier du 30 septembre 2022, indiqué au Tribunal de protection que son protégé n'était pas en mesure de classer ses factures (sic), de sorte qu'elles échappaient à tout contrôle rigoureux (sic). Il semble que le recourant n'ait pas appréhendé le fait qu'il lui appartenait de classer les factures de son mandant et de contrôler ses dépenses, afin de préserver son patrimoine et d'éviter qu'il ne tombe prématurément à la charge de la collectivité. A cet égard, le Tribunal de protection a rappelé au recourant, en parallèle de l'ordonnance rendue, qu'il attendait de lui qu'il effectue personnellement les tâches qui lui avaient été confiées et qu'il mette en place la structure financière sollicitée.

La distance géographique qui sépare le recourant de son protégé explique peut-être en partie cette délégation de compétence à une tierce personne et les difficultés rencontrées par le recourant dans l'accomplissement de son mandat. En effet, il ressort des données de l'Office cantonal de la population et des migrations que le recourant a annoncé son départ du Canton de Genève pour N______ (O______/France) le 1er mars 2019, soit avant sa nomination le 22 mars 2019 à la fonction de curateur de la personne concernée, ce dont il n'a jamais avisé le Tribunal de protection, utilisant toujours son ancienne adresse (route 1______ à P______ [GE]), pour recevoir sa correspondance. Ces circonstances devraient amener le Tribunal de protection à investiguer cette question et à s'interroger sur le fait de savoir si cette distance permet un suivi approprié de la personne concernée et une mise en œuvre optimale de la mesure de protection qui a été instituée. Il a d'ailleurs déjà été jugé que la désignation d'un curateur de représentation et de gestion domicilié à l'étranger pouvait apparaître contraire à la capacité du Tribunal de protection d'exercer la surveillance qui doit être la sienne sur les curateurs (DAS/85/2022 consid. 2.2).

2.2.2 Dans un second motif, le Tribunal de protection lui reproche de ne pas avoir suffisamment documenté les versements effectués en faveur de H______ et de G______, au regard de leur origine.

Si certes, le recourant a fourni au Tribunal de protection un extrait des comptes bancaires de son protégé faisant apparaître un versement de 151'636 fr. 60 (et non de 151'705 fr. comme indiqué dans son récapitulatif et repris par le Tribunal de protection dans sa décision), du compte I______ de son protégé en faveur de G______ le 9 janvier 2020, et un versement de 10'896 fr. 20 (et non 10'000 fr.), du compte J______ de son protégé en faveur de H______ le 20 juillet 2020, et a expliqué les raisons de ces versements, il n'a cependant jamais fourni au Tribunal de protection le justificatif bancaire du paiement par G______ des frais de résidence au Foyer E______ de son ex-époux, ni le justificatif bancaire attestant du prêt accordé par H______ à son protégé, qui justifieraient le remboursement de ces sommes. C'est donc à raison, en l'absence de ces documents permettant de vérifier le bien-fondé des virements effectués en faveur de ces deux personnes, que le Tribunal de protection, après avoir sollicité les justificatifs de l'origine de ces obligations de remboursement, a refusé d'approuver le rapport et comptes du curateur pour ce motif également.

Les pièces nouvelles produites par le recourant à l'appui de son recours n'y changent rien, dès lors qu'elles ne suffisent pas à pallier l'absence de documents bancaires, que le curateur aurait pu facilement solliciter et obtenir des personnes concernées. La copie du courrier de G______, attestant de ce qu'elle aurait réglé une somme de 138'656 fr. 25 à Foyer E______ (et non plus 151'636 fr. 60 à ce seul foyer comme allégué) et 12'077 fr. 35 pour les quatre boxes ayant accueilli les affaires de son ex-époux est insuffisante, au regard de la nécessité de vérifier comptablement chaque dépense effectuée. De même, sont insuffisants les courriels échangés entre la personne protégée par la mesure et, respectivement, H______ et le curateur, ainsi que les copies d'extraits peu lisibles et non probants d'une reproduction d'un versement qui serait intervenu le 3 janvier 2018, apparemment en faveur de M______, et non de B______, dont l'origine n'est pas précisée.

2.3 C’est ainsi à raison que le Tribunal de protection a considéré qu’il ne pouvait pas approuver en l'état les rapport et comptes du curateur sur la période concernée, faute d'avoir été suffisamment renseigné, malgré la requête de production de documents relatifs aux montants ci-dessus évoqués.

Le recours sera ainsi rejeté, dans la mesure de sa recevabilité.

3.             La procédure n’est pas gratuite. Les frais judiciaires de celle-ci seront arrêtés à 800 fr. et laissés à la charge du recourant, qui succombe (art. 107 al. 1 CPC). Ils seront compensés, à due concurrence, avec l’avance de même montant versée, laquelle demeure acquise à l’Etat de Genève. Le recourant sera condamné à verser 400 fr. à l'Etat de Genève.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 20 décembre 2022 par A______ contre l’ordonnance DTAE/8044/2022 rendue le 22 novembre 2022 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/423/2019.

Au fond :

Le rejette, dans la mesure de sa recevabilité.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires de recours à 800 fr., les met à la charge de A______ et les compense partiellement avec l’avance effectuée, laquelle reste acquise à l’Etat de Genève.

Condamne A______ à verser la somme de 400 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.