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Décisions | Chambre de surveillance

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C/8187/2019

DAS/47/2023 du 28.02.2023 sur DTAE/7407/2022 ( PAE ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/8187/2019-CS DAS/47/2023

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU MARDI 28 FÉVRIER 2023

 

Recours (C/8187/2019-CS) formé en date du 7 décembre 2022 par Madame A______, domiciliée ______, comparant par Me Mélanie MATHYS DONZÉ, avocate, en l'Etude de laquelle elle élit domicile.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 8 mars 2023 à :

- Madame A______
c/o Me Mélanie MATHYS DONZÉ, avocate.
Boulevard de Saint-Georges 72, 1205 Genève.

- Monsieur B______
c/o Me Henri NANCHEN, avocat.
Boulevard des Philosophes 14, 1205 Genève.

- Madame C______
Madame D
______
SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS
Case postale 75, 1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.


EN FAIT

A.           a.a Par jugement du 12 mars 2018, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures protectrices de l’union conjugale, a notamment autorisé A______ et B______ à vivre séparés et a attribué à la mère la garde des enfants E______, née le ______ 2006, F______, née le ______ 2010 et G______, née le ______ 2016 ; le Tribunal a renoncé à fixer un droit de visite en faveur du père.

Il ressort de ce jugement que les parties se sont rencontrées en 2000 dans leur pays d’origine, le Bénin. En 2003, B______ s’est installé à Genève, A______ étant, pour sa part, restée au Bénin. Leurs deux filles aînées sont nées dans ce pays, où le couple s’est marié le ______ 2013. A______ et les deux enfants sont venues rejoindre leur époux et père en septembre 2015. Le 23 juin 2016, le couple a donné naissance à sa troisième fille, G______, avant de se séparer en août 2017. A______ reproche notamment à B______ différents épisodes de violence conjugale, qu’il conteste ; chaque partie affirme par ailleurs que l’autre s’est montrée violente à l’égard des enfants.

Le 30 août 2017, A______ a sollicité le prononcé de mesures protectrices de l’union conjugale. Elle a notamment revendiqué l’attribution de la garde des enfants, un droit de visite en journée devant être réservé au père, selon des modalités à définir. B______ pour sa part a demandé à pouvoir exercer un droit de visite à raison d’un week-end sur deux et de la moitié des vacances scolaires.

Selon le rapport du Service d’évaluation et d’accompagnement de la séparation parentale du 5 janvier 2018, il avait été constaté que A______ avait, au moins à une reprise, maltraité sa fille E______ en octobre 2017, alors qu’elle était hébergée dans un foyer. Elle avait accepté un appui éducatif et un soutien auprès d’associations traitant des aspects relatifs à la violence. Elle était, pour le surplus, une mère adéquate et les trois filles évoluaient bien. En ce qui concernait le père, les déclarations de la mère et des deux filles aînées étaient concordantes et faisaient état de sanctions physiques importantes. Depuis la séparation du couple, les enfants n’avaient plus eu aucun contact avec leur père, lequel entretenait par ailleurs une liaison avec une autre femme, avec laquelle il avait eu deux enfants (désormais quatre enfants). L’emploi du temps très chargé de B______, qui travaillait aussi bien la semaine que le week-end, ne permettait pas d’organiser des visites dans un Point rencontre ; pour le surplus, les filles aînées ne demandaient pas à revoir leur père.

Le Tribunal de première instance avait ainsi renoncé à fixer un droit de visite en faveur du père, tout en précisant qu’aussitôt qu’il disposerait d’un horaire de travail prévisible, il conviendrait d’instaurer un droit aux relations personnelles en milieu protégé, afin que les enfants se sentent en sécurité et qu’un climat de confiance puisse s’instaurer.

a.b Sur appel de B______, ce jugement a été annulé par arrêt de la Cour de justice du 30 octobre 2018 et la cause retournée au Tribunal de première instance.

a.c Au terme de l’audience du 8 avril 2019, le Tribunal de première instance a, d’entente entre les parties, instauré un droit de visite de quelques heures par mois, en journée, dans un Point rencontre, à organiser par le curateur ; une curatelle d’organisation et de surveillance du droit de visite a été instaurée.

a.d Par jugement du 28 janvier 2020, le Tribunal de première instance, statuant à nouveau sur mesures protectrices de l’union conjugale, a notamment attribué à A______ la garde des trois enfants et a suspendu le droit aux relations personnelles du père.

La reprise desdites relations personnelles avec les deux aînées s’était avérée très difficile, celles-ci refusant de voir leur père. En ce qui concernait G______, le droit de visite s’était bien déroulé, mais les parties refusaient l’option d’un droit de visite différencié entre les enfants.

a.e Par arrêt du 21 juillet 2020, la Cour de justice a réservé au père un droit de visite sur ses trois filles devant s’exercer à raison d’une heure par mois au Point rencontre, en présence constante d’un intervenant pendant quatre rencontres, puis à raison d’une heure trente par mois, hors la présence d’un intervenant pendant quatre rencontres supplémentaires, puis à l’extérieur du Point rencontre à raison d’un après-midi par quinzaine, avec passage des enfants par le Point rencontre. La curatelle d’organisation et de surveillance du droit de visite a été maintenue.

b. Selon un rapport du Service de protection des mineurs du 30 novembre 2020, les visites mensuelles entre B______ et ses trois filles avaient repris le 13 septembre 2020 au sein du Point rencontre. Toutefois, la mineure E______ avait eu l’occasion de dire à son pédiatre qu’elle ne souhaitait plus voir son père. Quant à G______, elle avait souffert de maux de ventre au retour d’une visite, apparemment dus à une consommation excessive de sucre, de sorte que sa mère souhaitait qu’un contrôle soit opéré sur ce que le père lui donnait à manger et à boire.

Le Service de protection des mineurs préconisait la suspension des relations personnelles entre le père et ses deux filles aînées, l’instauration d’un suivi thérapeutique desdits enfants afin d’aborder la relation à leur père et le maintien des visites sur G______, à raison d’une fois par mois, « en un pour un », au Point rencontre.

c. Le Tribunal de protection a tenu une audience le 4 mars 2021.

B______ a indiqué avoir vu ses filles pour la dernière fois le 11 octobre 2020 ; il s’était rendu au Point rencontre en novembre, décembre et janvier, mais la mère et les enfants ne s’y étaient pas présentées. Il n’avait pas davantage de contacts téléphoniques avec elles.

Selon A______, ses filles aînées craignaient leur père et ne souhaitaient plus le voir ; quant à G______, elle « entendait » ce que disaient ses sœurs. A______ a précisé qu’avec toutes les menaces que B______ lui avait adressées, elle ne pouvait laisser les enfants seules avec lui. Elle-même avait peur et ne pouvait pas lui parler.

A l’issue de l’audience, la cause a été gardée à juger.

d. Le 17 mars 2021, le Tribunal de protection a procédé à l’audition des mineures E______ et F______. Toutes deux ont fait état du fait que du temps de la vie commune avec leur père, celui-ci leur infligeait des sanctions physiques. Aucune des deux ne souhaitait entretenir de relations avec lui ; elles n’étaient par contre pas opposées à ce que leur sœur G______ continue de se rendre au Point rencontre.

e. Par ordonnance DTAE/3703/2021 du 17 mars 2021, le Tribunal de protection a notamment suspendu en l’état le droit de visite fixé en faveur de B______ sur ses filles E______ et F______, ordonné le suivi thérapeutique individuel des deux mineures, afin d’aborder la relation à leur père et ensuite travailler la reprise du lien père-fille, conditionné la reprise des visites entre les mineures E______ et F______ et leur père au préavis de leur thérapeute, maintenu le droit de visite du père sur l’enfant G______, devant s’exercer au Point rencontre, en modalité « un pour un », une fois par mois, et invité les curatrices à faire part au Tribunal de protection, le moment venu, de leurs propositions pour des passages en accueil, soit lorsqu’il serait constaté que le père se montre capable de favoriser un apaisement des relations familiales et de se concentrer sur le bien de l’enfant, en mettant de côté ses propres besoins et intérêts personnels et en s’abstenant de tout commentaire ou questionnement au sujet de A______.

S’agissant du droit de visite sur l’enfant G______, le Tribunal de protection a relevé que les relations personnelles avec son père se déroulaient bien. La mineure acceptait ses gestes affectueux et ses sollicitations et elle ne paraissait pas éprouver, contrairement à ses sœurs, de crainte à son égard. Toutefois, dans la mesure où il ressortait du dossier que le père avait tenu en présence des aînées des propos dénigrant leur mère, il convenait de protéger G______ du risque concret d’être également exposée à des propos inadéquats et à un conflit de loyauté délétère pour son bon développement. Il apparaissait dès lors prématuré d’autoriser des visites non surveillées.

f. Dans un nouveau rapport du 20 juin 2022, le Service de protection des mineurs a préavisé que le droit de visite du père sur l’enfant G______ puisse s’exercer une fois à quinzaine, en modalité « accueil » au Point rencontre.

Les intervenants du Point rencontre n’avaient relevé aucun élément permettant de justifier le maintien des modalités de visite « un pour un ». L’enfant G______ transitait facilement entre son père et sa mère et ses rencontres avec le premier étaient chaleureuses. La mineure parlait facilement de son quotidien et son père ne tenait pas de propos inadéquats ; il se montrait capable de favoriser le lien avec sa fille en évitant tout commentaire ou questionnement sur la mère de l’enfant.

A______ était catégoriquement opposée à ce que les visites entre G______ et son père se déroulent sans la présence d’un intervenant. Elle était convaincue que B______ parlerait d’elle à l’enfant et craignait qu’il ne retourne au Bénin avec cette dernière. Pour qu’elle puisse lui faire confiance, elle avait besoin que B______ reconnaisse le tort qu’il lui avait causé. Elle soulignait l’importance de pouvoir communiquer avec lui et se montrait ouverte à l’idée d’entreprendre une médiation.

B______ souhaitait pour sa part pouvoir aller chercher sa fille au Point rencontre et sortir avec elle ; il demandait également une augmentation de la fréquence et de la durée des visites.

g. Le Tribunal de protection a tenu une audience le 29 septembre 2022.

La curatrice a confirmé que selon les observations du Point rencontre, aucun motif objectif ne justifiait le maintien des modalités du droit de visite en vigueur.

Selon A______, G______ était encore trop petite pour être seule avec son père. Une médiation avec lui pourrait s’avérer utile.

Pour le surplus, des divergences sont apparues entre les parents lors de l’audience au sujet des cadeaux offerts par le père à l’enfant et des goûters qu’il lui apportait.

Au terme de l’audience, la cause a été gardée à juger.

B.            Par ordonnance DTAE/7407/2022 du 29 septembre 2022, le Tribunal de protection a réservé à B______ un droit de visite sur sa fille G______ devant s’exercer à raison d’une fois par quinzaine, en modalité « accueil », au sein du Point rencontre (chiffre 1 du dispositif), exhorté A______ et B______ à entreprendre une médiation auprès [du cabinet de médiation] I______ pour les aider à améliorer leur communication, dans l’intérêt évident de leurs trois filles (ch. 2), dit que les trois première séances de médiation seraient à la charge du Pouvoir judiciaire (ch. 3), exhorté A______ à poursuivre un suivi thérapeutique individuel (ch. 4), invité les curatrices à adresser un rapport de situation au Tribunal de protection au 30 mars 2023 (ch. 5), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6) et renoncé à la perception d’un émolument de décision (ch. 7).

Le Tribunal de protection a considéré que le père avait démontré, au cours des six derniers mois, être capable de se centrer sur le bien de sa fille cadette, de sorte qu’il n’était plus à craindre qu’il l’expose à des propos inadéquats et à un conflit de loyauté. Il était par ailleurs dans l’intérêt de la mineure, compte tenu de son jeune âge, de conserver un lien régulier avec son père. Il n’y avait pas de contre-indication à ce que les relations personnelles se poursuivent et évoluent progressivement, sans surveillance d’un tiers, dans la mesure où le bien de l’enfant n’apparaissait, pour l’heure, pas menacé. Toutefois, afin notamment d’entendre les inquiétudes de la mère, les visite devaient continuer à se dérouler au sein du Point rencontre, de manière à maintenir un garde-fou et de s’assurer qu’elles se déroulent de la meilleure manière. Le Tribunal de protection a en outre exhorté les parties à mettre en place une médiation parentale, afin de travailler sur leur communication, de manière à la rendre plus fonctionnelle et apaisée, dans l’intérêt de leurs filles, et notamment afin de permettre un exercice du droit de visite du père plus serein.

C.           a. Le 7 décembre 2022, A______ a formé recours contre cette ordonnance, reçue le 7 novembre 2022, concluant à l’annulation des chiffres 1 et 2 de son dispositif et, cela fait, à ce qu’un droit de visite soit réservé en faveur de B______ sur sa fille G______ devant s’exercer au Point rencontre en modalité « un pour un », une fois tous les quinze jours, les frais de la procédure devant être laissés à la charge de l’Etat.

En substance, la recourante fait grief au Tribunal de protection de ne s’être fondé que sur les propos des intervenants du Point rencontre, relayés par la curatrice du Service de protection des mineurs, pour modifier les modalités du droit de visite du père sur l’enfant G______. Or, dans son ordonnance du 17 mars 2021, le même Tribunal de protection avait retenu qu’il était nécessaire de protéger G______ du risque concret d’être exposée à des propos inadéquats de la part de son père et à un conflit de loyauté délétère à son bon développement. Or, il n’apparaissait pas que le père était prêt à apaiser les relations familiales, bien au contraire, puisque la curatrice et le Tribunal de protection avaient relevé qu’il n’était pas disposé à initier une médiation avec la mère, avec laquelle il refusait de communiquer en dehors du Tribunal. Dès lors, aucune évolution de son comportement ne pouvait être attestée. Les premiers juges avaient perdu de vue le fait que si des propos inadéquats étaient tenus par le père devant G______, le développement de celle-ci en serait entravé. Par conséquent, sans la présence d’un intervenant lors de l’exercice du droit de visite, l’intérêt de la mineure G______ n’était plus protégé. Il convenait dès lors d’attendre un changement dans le comportement du père avant d’élargir son droit de visite. Or, si la recourante avait été exhortée à suivre une thérapie, aucune exhortation n’avait été prononcée s’agissant de B______, alors que le dossier contenait plusieurs éléments relatifs à des propos inadéquats et dénigrants tenus par ce dernier.

b. Le Tribunal de protection a persisté dans les termes de l’ordonnance attaquée.

c. Dans son écriture du 20 décembre 2022, le Service de protection des mineurs a indiqué que selon ses observations, aucun élément ne justifiait de ne pas faire évoluer le droit de visite entre B______ et sa fille G______ en modalité « accueil » au Point rencontre ; le préavis du 20 juin 2022 était dès lors maintenu.

d. Le 23 décembre 2022, B______ s’en est rapporté à justice s’agissant du recours formé par A______. Il s’est toutefois étonné que cette dernière ait pu, par courrier du 10 août 2022 adressé au Tribunal de protection, proposer d’entreprendre avec lui une médiation, puis solliciter, dans le cadre de son recours, l’annulation du chiffre 2 du dispositif de l’ordonnance attaquée.

e. Le 16 janvier 2023, la recourante a répliqué et a produit une pièce complémentaire, soit une attestation du Dr H______, pédiatre, du 13 janvier 2023, selon lequel « en raison du contexte général et surtout suite à l’examen de l’enfant ce jour, je prononce un préavis négatif au changement du régime de droit de visite du père pour G______ ».

Le 20 janvier 2023, la recourante a adressé à la Chambre de surveillance une nouvelle pièce complémentaire, soit une attestation de suivi pour elle-même par l’Unité interdisciplinaire de médecine et de prévention de la violence des HUG, établie le 19 janvier 2023.

EN DROIT

1. 1.1. Les dispositions de la procédure devant l'autorité de protection de l'adulte sont applicables par analogie pour les mesures de protection de l'enfant (art. 314 al. 1 CC).

Les décisions de l'autorité de protection peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 450 al. 1 CC et 53 al. 1 LaCC).

Interjeté par une personne ayant qualité pour recourir, dans le délai utile de trente jours et suivant la forme prescrite, le recours est recevable (art. 450 al. 2 et 3 et 450b CC).

1.2. Compte tenu de la matière, soumise aux maximes inquisitoire et d'office illimitée, la cognition de la Chambre de surveillance est complète. Elle n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 446 CC).

2. La recourante conteste la modalité « accueil » prévue pour l’exercice du droit de visite du père, en lieu et place de la modalité « un pour un ».

2.1.1 Le père ou la mère qui ne détient pas l'autorité parentale ou la garde ainsi que l'enfant mineur ont réciproquement le droit d'entretenir les relations personnelles indiquées par les circonstances (art. 273 al. 1 CC).

Autrefois considéré comme un droit naturel des parents, le droit aux relations personnelles est désormais conçu à la fois comme un droit et un devoir de ceux-ci (art. 273 al. 2 CC), mais aussi comme un droit de la personnalité de l'enfant; il doit servir en premier lieu l'intérêt de celui-ci (ATF 127 III 295 consid. 4a;
123 III 445 consid. 3b). C'est pourquoi le critère déterminant pour l'octroi, le refus et la fixation des modalités du droit de visite est le bien de l'enfant, et non une éventuelle faute commise par le titulaire du droit (Vez, Le droit de visite – Problèmes récurrents, in Enfant et divorce, 2006, p. 101 ss, 105). Le rapport de l'enfant avec ses deux parents est essentiel et peut jouer un rôle décisif dans le processus de sa recherche d'identité (ATF 127 III 295 consid. 4a; 123 III 445 consid. 3c; 122 III 404 consid. 3a et les références citées).

2.1.2 A teneur de l'art. 274 al. 2 CC, si les relations personnelles compromettent le développement de l’enfant, si les père et mère qui les entretiennent violent leurs obligations, s’ils ne se sont pas souciés sérieusement de l’enfant ou s’il existe d’autres justes motifs, le droit d’entretenir ces relations peut leur être refusé ou retiré. Le droit de visite peut aussi être restreint.

D'après la jurisprudence, il existe un danger pour le bien de l'enfant si son développement physique, moral ou psychique est menacé par la présence, même limitée, du parent qui n'a pas l'autorité parentale. La jurisprudence cite la maltraitance psychique ou physique (arrêt 5P_131/2006 du 25 août 2006 consid. 3 s., publié in FamPra.ch 2007 p. 167). Quel que soit le motif du refus ou du retrait du droit de visite, la mesure ne doit être envisagée que si elle constitue l'ultime moyen d'éviter que le bien de l'enfant ne soit mis en péril. Un refus des relations personnelles doit ainsi respecter les principes de subsidiarité et de proportionnalité, et ne saurait être imposé que si une autre mesure d'encadrement ne suffit pas à écarter efficacement et durablement le danger. En revanche, si le risque engendré pour l'enfant par les relations personnelles peut être limité grâce à d'autres mesures moins incisives telles que la présence d'un tiers ou l'exercice du droit dans un milieu protégé, le principe de la proportionnalité et le sens des relations personnelles interdisent la suppression complète de ce droit (ATF
122 III 404, consid. 3b, JdT 1998 I 46; arrêts du Tribunal fédéral 5C_244.2001, 5C_58/2004; Kantonsgericht SG in RDT 2000 p. 204; Vez, Le droit de visite, problèmes récurrents, in Enfant et divorce, 2006 p. 122 et réf. citées; MEIER/STETTLER, Droit de la filiation, 6ème éd. n. 1014 ss).

Pour imposer de telles modalités (en particulier un droit de visite accompagné), il faut également des indices concrets de mise en danger du bien de l'enfant (il ne suffit pas que celui-ci risque abstraitement de subir une mauvaise influence): la différence réside uniquement dans le fait que ce danger paraît pouvoir être écarté autrement que par un retrait pur et simple du droit (Meier/Stettler, op. cit. n. 1015).

Le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans la fixation du droit de visite (ATF 122 III 404 consid. 3d = JdT 1998 I 46).

2.2 En l’espèce, le père exerce un droit de visite sur sa fille G______ depuis de nombreux mois au sein du Point rencontre, en modalité « un pour un », soit en présence d’un intervenant. Le maintien de modalités aussi strictes et contraignantes doit être justifié par un risque manifeste pour l’intérêt de l’enfant.

S’il a certes été retenu que le père a pu, par le passé, infliger des sanctions physiques à ses deux filles aînées, tel n’a pas été le cas pour G______. Celle-ci n’a dès lors pas, à l’égard de son père, les mêmes appréhensions que ses deux sœurs. Il ressort au contraire du rapport du Service de protection des mineurs du 17 mars 2021 déjà, confirmé par celui du 20 juin 2022, que leurs relations se déroulaient bien, que la mineure acceptait les gestes affectueux et les sollicitations de son père et qu’elle parlait facilement de son quotidien.

Dès lors, la seule crainte est que le père tienne, en présence de l’enfant, des propos inadéquats au sujet de la recourante, ce qui ne peut certes être totalement exclu compte tenu des relations délétères que les parties continuent d’entretenir, en dépit de l’écoulement du temps. Le droit de visite ne saurait toutefois, pour ce seul motif, continuer à être exercé indéfiniment en présence d’un intervenant. Il ressort par ailleurs du dernier rapport du Service de protection des mineurs que B______ s’est montré capable d’éviter, tout au long des visites, exercées régulièrement depuis de nombreux mois, tout commentaire ou questionnement sur la recourante. La présence d’un intervenant a sans doute contribué à le dissuader de tenir de tels propos ; le comportement de B______ permet toutefois également de retenir qu’il est capable de maîtriser ses propos. Il sera en outre rappelé que le Tribunal de protection a prévu que le droit de visite soit désormais exercé en modalité « accueil », ce qui signifie que père et fille continueront à se voir au sein du Point rencontre. Les intervenants pourront ainsi facilement relever, au terme des visites, si l’enfant devait se montrer perturbée ou si son attitude à l’égard de son père devait se modifier. Le Service de protection des mineurs en serait alors informé et pourrait intervenir auprès du Tribunal de protection, qui procéderait à une nouvelle évaluation de la pertinence des modalités de l’exercice du droit de visite.

Il ressort de ce qui précède que l’exercice d’un droit de visite au sein du Point rencontre, en modalité « accueil », ne représente pas un danger pour la mineure. Sur ce point, l’avis du pédiatre versé à la procédure par la recourante ne paraît pas déterminant, dans la mesure où il se contente d’émettre un préavis négatif, sans fournir la moindre explication utile et motivée sur les raisons de ce préavis, en renvoyant au « contexte général » et à « l’examen de l’enfant », dont on ignore ce qu’il aurait révélé.

Au vu de ce qui précède, le recours apparaît infondé et sera rejeté sur la question des modalités du droit de visite.

3. La recourante a également conclu à l’annulation du chiffre 2 du dispositif de l’ordonnance attaquée.

3.1 La motivation est une condition de recevabilité de l’appel et du recours, prévue par la loi, qui doit être examinée d'office (arrêts du Tribunal fédéral 5A_438/2012 du 27 août 2012 consid. 2.2 et 2.4; 4A_651/2012 du 7 février 2013 consid. 4.2; 4A_659/2011 du 7 décembre 2011 consid. 3).

3.2 En l'espèce, la recourante s’est contentée de motiver son recours en tant qu’il porte sur la question des modalités du droit de visite du père sur la mineure G______. Elle n’a en revanche pas exposé pour quels motifs l’ordonnance attaquée serait critiquable en tant qu’elle a exhorté les deux parents à entreprendre une médiation auprès du Collectif interculturel de médiation.

Le recours est par conséquent irrecevable sur ce point.

Quoiqu’il en soit, la position adoptée par la recourante est contradictoire, voire teintée de mauvaise foi, dans la mesure où elle a, à plusieurs reprises, appelé de ses vœux une médiation (notamment rapport du Service de protection des mineurs du 20 juin 2022, audience devant le Tribunal de protection du 29 septembre 2022). Il est par conséquent pour le moins incohérent qu’elle conclue à l’annulation du chiffre 2 du dispositif de l’ordonnance attaquée, par lequel le Tribunal de protection a exhorté les deux parties à s’engager dans un processus de médiation.

4. La procédure, qui porte essentiellement sur les modalités d’exercice du droit de visite, n’est pas gratuite (art. 54, 67 A et B RTFMC).

L’émolument sera fixé à 400 fr. et mis à la charge de la recourante, qui succombe. Il sera provisoirement supporté par l’Etat de Genève, compte tenu du bénéfice de l’assistance judiciaire.

Compte tenu de la nature familiale du litige, chaque partie supportera ses propres dépens de recours (art. 107 al. 1 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ contre l’ordonnance DTAE/7407/2022 rendue le 29 septembre 2022 par le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant dans la cause C/8187/2019.

Au fond :

Le rejette.

Sur les frais :

Arrête l’émolument de décision à 400 fr., le met à la charge de A______ et dit qu’il est provisoirement pris en charge par l’Etat de Genève.

Dit qu’il n’est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.