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Décisions | Chambre de surveillance

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C/7617/2012

DAS/81/2021 du 29.03.2021 sur DJP/492/2020 ( AJP ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/27504/2009 et C/7617/2012 DAS/81/2021

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU LUNDI 29 MARS 2021

 

Appel (C/27504/2009 et C/7617/2012) formé le 11 décembre 2020 par Monsieur A______, domicilié ______, comparant en personne.

* * * * *

Arrêt communiqué par plis recommandés du greffier
du 12 avril 2021 à :

 

- Monsieur A______
______, ______.

- Madame B______
c/o Me Stéphane PENET, avocat
Quai Gustave-Ador 26, 1207 Genève.

- Madame C______
c/o Me Corinne NERFIN, avocate
Place Longemalle 1, 1204 Genève.

- Monsieur D______
c/o Me E______, avocat
______, ______.

- Monsieur F______
p.a. Monsieur G______
______, ______.

- JUSTICE DE PAIX.

Arrêt (dispositif uniquement) communiqué pour information à :

- Maître H______
______, ______.

 


EN FAIT

A. Par décision DJP/492/2020 du 24 novembre 2020, communiquée aux parties pour notification le 30 novembre 2020, la Justice de paix a arrêté les frais et honoraires de A______, en sa qualité de représentant des communautés héréditaires de I______, décédée le ______ 2009 à J______ [GE], et de L______ décédé le ______ 2012 à K______ [GE], à 93'997 fr. 50, correspondant à 414 heures et 45 minutes d'activité de gestion courante au tarif horaire de 200 fr., 48 heures d'activité de gestion courante au tarif horaire de 120 fr. et 11 heures et 45 minutes d'activité juridique au tarif horaire de 450 fr. (ch. 1 du dispositif), invité en conséquence A______ à restituer aux successions un montant de 46'002 fr. 50, au titre de trop-perçu, l'y condamnant en tant que de besoin (ch. 2), et mis les frais exposés par le greffe et un émolument de 1'400 fr. à la charge de la succession (ch. 3).

En substance la Justice de paix a retenu ce qui suit:

Les honoraires d'un représentant de la succession sont à la charge de la succession et arrêtés par l'autorité de nomination.

En l'absence d'un tarif officiel, elle applique par analogie le Règlement fixant la rémunération des curateurs appliqué par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (RCC - E 1 05.15).

Le tarif en question prévoit pour un avocat chef d'étude un taux horaire de 200 fr. pour les actes de gestion courante et de 200 fr. à 450 fr. pour l'activité juridique.

Ces derniers montants sont, selon sa pratique, modulés selon la masse de l'actif successoral (200 fr. pour une fortune jusqu'à 100'000 fr., à 450 fr. pour une fortune de plus de 1'500'000 fr., avec divers paliers intermédiaires).

Selon ledit règlement, un juriste est rémunéré à 120 fr./heure.

Le tarif considéré appliqué aux diverses rubriques de la note, tenant compte du fait que la masse successorale des deux successions ascendait à une somme de l'ordre de 7'600'000 fr., conduisait à arrêter les montants ressortant de la décision.

B. a) A______ a formé appel contre cette décision en date du 11 décembre 2020, concluant à ce qu'il soit dit qu'il s'était correctement acquitté de sa mission, que son travail avait été celui d'un avocat, à ce que le montant de ses honoraires soit arrêté aux montants qu'il a reçus ou qui sont sous sa garde, soit à 160'000 fr., et qu'il soit enfin dit qu'il ne devait rien aux successions de feue I______ et feu L______.

En substance, il soutient s'être acquitté de sa mission à satisfaction et comme avocat, de sorte que l'activité exercée de 427 heures et 25 minutes (sic), retenue selon lui par la Justice de paix et non contestée, devait être rémunérée intégralement au tarif applicable aux avocats, soit à hauteur de 450 fr./heure, pour un montant global de 192'689 fr.75, qu'il était disposé à voir arrêté à 160'000 fr., montant qu'il avait perçu et dont il disposait.

b) En date du 8 janvier 2021, D______, par la plume de son curateur, s'en est rapporté à justice. Il a considéré en résumé que l'activité déployée n'était pas une activité à proprement parler juridique ou judiciaire, se posant toutefois la question de principe de la pertinence des critères sur lesquels se base la Justice de paix pour calculer les honoraires des mandataires mis en oeuvre par elle dans le cadre de successions.

c) Par réponse du 14 janvier 2021, F______ a conclu à la confirmation de la décision attaquée s'agissant du montant des honoraires arrêtés et à la condamnation de l'appelant au versement aux successions des époux I______/L______ de la somme de 66'005 fr. 50 (sic) (en lieu et place de 46'005 fr. 50 retenus par la Justice de paix), comprenant un montant de 20'000 fr. prélevé par l'appelant sans autorisation de la Justice de paix en sus des montants autorisés par elle. Il critique en outre la gestion effectuée par l'appelant de son mandat de représentant des hoiries.

d) Le 18 janvier 2021, B______ a conclu au rejet de l'appel et à la confirmation de la décision attaquée sous réserve de la modification dans le sens proposé par F______, soit la condamnation de l'appelant à la restitution d'un montant de 66'002 fr. 50, en lieu et place des 46'002 fr. 50 visés dans le chiffre 2 du dispositif de cette décision.

e) Par mémoire du 18 janvier 2021 également, C______ a conclu de même au rejet de l'appel sous suite de frais et dépens. La qualification du type d'activité exercé par l'appelant et les montants retenus par la Justice de paix devaient être confirmés.

f) A______ ayant requis de plaider, une audience de plaidoiries s'est tenue par-devant la Cour de justice le 1er mars 2021, lors de laquelle l'appelant a persisté dans les motifs et les conclusions de son appel. De même, les intimés ont persisté à conclure au rejet de l'appel, aucun d'eux ne contestant le nombre d'heures de travail effectué par A______, tel que retenu par la Justice de paix dans la décision querellée, ni la qualification desdites activités qui ressort de ladite décision.

La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience.

C. Pour le surplus, ressortent de la procédure les faits pertinents suivants:

a) I______, née [I______] le ______ 1918, originaire de Genève, domiciliée à Genève, de son vivant épouse de L______, est décédée le ______ 2009 à J______ [GE].

Selon ses dispositions testamentaires du 7 novembre 2003, la défunte a légué l'usufruit de toute sa succession à son mari, L______, et a institué héritiers ses quatre enfants, B______, C______, D______ et F______, en ajoutant des règles de partage.

Sur requête de B______, une procédure en bénéfice d'inventaire a été ouverte le 22 janvier 2010. Établi par un notaire, l'inventaire de la succession daté du 9 juin 2010 a été clôturé par ordonnance du 24 août 2010 de la Justice de paix. Il contenait plusieurs biens immobiliers.

La succession de I______ a été acceptée sous bénéfice d'inventaire par tous les héritiers.

b) L______, né le ______ 1917, originaire de Genève, domicilié à Genève, époux jusqu'à son décès de I______ en 2009, est décédé le ______ 2012 à K______ [GE].

Par dispositions testamentaires du 7 novembre 2003, le défunt a institué héritiers ses quatre enfants, B______, C______, D______ et F______, ajoutant également des règles de partage.

Par document dactylographié, intitulé "codicille", daté du 10 décembre "2003 + 2010" (sic) et signé par I______ et L______, ceux-ci ont prévu divers legs.

Par document dactylographié intitulé "codicille 2" du 11 décembre 2003, L______ a légué diverses oeuvres d'art en mentionnant une estimation de leur valeur, corrigée au verso le 15 novembre 2011.

Enfin, il a laissé trois lettres explicatives, la première est datée du 12 décembre 2003 et porte la mention "relue le 21 octobre 2004", la seconde est datée du 21 octobre 2004 et la troisième n'est pas datée.

Sur requête de B______ et F______, une procédure en bénéfice d'inventaire a été ouverte par ordonnance de la Justice de paix du 14 mai 2012. Etabli par un notaire, l'inventaire de cette succession, daté des 27 novembre 2012 et 6 février 2013, a été clôturé par décision de la Justice de paix du 20 février 2013.

La succession de L______ a été acceptée sous bénéfice d'inventaire par tous les héritiers.

c) Par ordonnance du 5 novembre 2012, la Justice de paix a institué une représentation d'hoirie dans la succession de I______ et désigné A______, avocat, aux fonctions de représentant.

d) Le 13 février 2013, F______ a donné procuration en faveur de G______, son neveu, fils de B______, pour le représenter dans le cadre de la succession de ses deux parents. G______ n'est ni avocat ni notaire.

e) Par ordonnance du 16 avril 2013, la Justice de paix a institué une représentation d'hoirie dans la succession de L______ et a derechef désigné A______, avocat, aux fonctions de représentant.

f) Le représentant des hoiries a rendu un premier rapport d'activité le 17 juin 2013 concernant les successions des deux défunts, ainsi qu'un autre rapport d'activité, intitulé comme tel, le 16 juillet 2013 dans la succession de L______, mais qui porte également sur la succession de I______.

Le 19 juin 2013, le représentant d'hoirie a requis et obtenu l'autorisation de prélever une avance sur ses honoraires d'un montant de 20'000 fr.

Il a joint à sa requête deux relevés de ses activités déployées entre le 15 août 2012, soit avant sa désignation en qualité de représentant d'hoirie par la Justice de paix, et le 7 juin 2013, sans total d'heures de travail, pour la succession de I______, et du 11 mars 2013, soit un mois avant sa désignation pour la succession de L______, au 7 juin 2013 pour "l'hoirie I______/L______" totalisant 63 heures de travail.

g) Par courriers des 2 et 17 septembre 2013, A______ a signalé à la Justice de paix la situation préoccupante de D______ et les complications engendrées par son comportement, notamment dans le cadre de la succession de ses parents. Il a suggéré l'instauration d'une mesure de curatelle en sa faveur.

Le signalement a été adressé par la Justice de paix au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant. D______ a été placé sous curatelle de représentation et de gestion. E______, avocat, a été désigné curateur, d'abord provisoirement le 4 novembre 2013, puis définitivement le 18 août 2014, après expertise psychiatrique du protégé.

h) Pour répondre à des demandes d'explications concernant le champ de ses activités, A______ a transmis le 1er octobre 2013 à G______ les détails requis, en particulier les raisons qui l'avaient amené à être plus particulièrement en contact avec C______, l'une des héritières. Il a précisé que c'était elle qui lui avait fourni le plus d'informations utiles concernant les deux successions.

Il ressort de cet échange de courriers que le règlement des successions se révélait laborieux et ralenti.

i) A______ a transmis à la Justice de paix, le 9 décembre 2014, un rapport d'activité intermédiaire détaillé, faisant notamment état des importantes difficultés qu'il avait rencontrées pour apaiser les relations entre les héritiers. Il a joint un document intitulé "Tableau des mouvements de fonds sur le compte de la succession", sans pièces comptables.

Le 11 décembre 2014, A______ a adressé à la Justice de paix une demande d'avance sur honoraires de 120'000 fr., qui lui a été accordée sur la base du détail des activités effectuées entre le 15 août 2012 et le 15 octobre (sic) (probablement de l'année 2014), en faveur des deux successions, joint à sa requête. Le total des heures indiqué était de 404 heures et 95 minutes. La Justice de paix en retient 361 heures et 50 minutes pour ladite période.

j) Dès l'année 2013, de nombreux échanges de courriers entre les héritiers, leurs conseils et le représentant de l'hoirie ont été transmis à la Justice de paix pour information ou pour avis, laissant apparaître de profondes divergences de vues et des difficultés relationnelles entre les hoirs entres eux et entre leurs représentants, mais également avec le représentant de l'hoirie.

Une convention de partage partiel des successions a néanmoins été passée par les héritiers à une date inconnue du printemps 2015. Cette convention a semble-t-il été entièrement exécutée.

k) Par demande du 4 juin 2015, A______ a requis de la Commission du Barreau de Genève sa radiation de la profession d'avocat.

l) Par courrier du 12 juin 2015, A______ a informé la Justice de paix de la signature de la convention de partage partiel entre les héritiers et a requis de celle-ci l'autorisation d'engager une procédure en paiement du loyer d'un studio occupé par D______, le curateur de celui-ci s'étant opposé à une demande de sa part en ce sens.

m) Le 19 juin 2015, A______ a adressé un complément de décompte de ses activités entre les 7 février et 27 mai 2015 et a requis en conséquence une nouvelle provision sur honoraires de 20'000 fr.

n) Le 29 juin 2015, la Justice de paix a accusé réception des deux courriers en question et requis la remise du "rapport final" du représentant d'hoirie, ainsi que de sa note de frais et honoraires.

o) Le 6 juillet 2015, le représentant d'hoirie a fait part à la Justice de paix de sa perplexité quant à la demande de cette dernière dans la mesure où il estimait que sa mission n'était pas terminée "tant s'en faut". Néanmoins, il déclarait "accepter avec joie" d'être relevé de son mandat, si tel devait être le sens du courrier de la Justice de paix.

p) Le 4 août 2015, le représentant d'hoirie a remis son rapport final et demandé l'autorisation de prélever les 20'000 fr. d'avance sur ses honoraires, somme qu'il a annoncé avoir déjà provisionnée.

Il a joint un complément de décompte de ses activités pour la période du 30 juin au 14 juillet 2015 et a indiqué estimer être encore créancier de l'hoirie, en sus des 140'000 fr. déjà prélevés, des montants de 21'700 fr. au 11 décembre 2014, 11'400 fr. au 19 juin 2015 et 3'300 fr. au 4 août 2015.

Dans les décomptes successifs, les activités administratives et les activités juridiques effectuées au profit des deux successions [I______; L______] n'ont pas été distinguées. Le représentant de l'hoirie a estimé son activité administrative durant la totalité du mandat à 10 heures de travail, le reste devant être considéré comme activité à rémunérer au tarif ordinaire des tâches juridiques.

Les rapports et comptes du représentant d'hoirie ont été soumis au contrôle financier de la Justice de paix. Le 7 novembre 2015, celle-ci a sommé le représentant d'hoirie de lui transmettre un décompte détaillé de ses activités depuis le début de ses fonctions, lequel devait séparer les activités juridiques des activités administratives. Elle estimait les décomptes déjà fournis incomplets, dans la mesure où ils ne portaient pas sur l'entier de la période visée, et qu'il ne pouvait être déduit des libellés sur quelles activités portaient les heures facturées.

q) Le représentant d'hoirie a transmis à la Justice de paix, les 26 janvier et 4 février 2016, des compléments à ses rapports d'activité avec un tableau des opérations bancaires de la succession et un récapitulatif de ses décomptes de prestations, sans modifier sa façon de les présenter, lesquels ont été soumis aux parties.

S'agissant de ces décomptes, le représentant d'hoirie a d'une part établi une liste des activités administratives effectuées pour les deux successions du 31 janvier 2013 au 17 juin 2014 et a estimé qu'à raison de 200 fr. par heure, ce travail devait être payé 9'800 fr. au total.

Il a, d'autre part, transmis plusieurs décomptes "expurgés des tâches administratives", qu'il estimait devoir lui être payés 400 fr. par heure, soit du 15 août 2012 au 14 mars 2013 pour un total de 93 heures, puis du 11 mars au 15 avril 2013 pour 11 ¼ heures, du 17 avril 2013 au 29 juin 2013 pour 62 heures, du 27 juin au 13 septembre 2013 pour 40 ¾ heures, du 17 septembre au 11 octobre 2013 pour 38 ½ heures, du 18 novembre 2013 au 11 mars 2014 pour 71 ¼ heures, du 15 mars au 14 juin (libellé avril) 2014 pour 18 ¼ heures, du 25 juin au 25 septembre (possiblement 2014, mais sans indication) pour 25 heures, du 16 octobre au 19 novembre 2014 pour 9 ¾ heures, du 16 octobre au 13 novembre 2014 (sic) pour 8 ¼ heures, du 20 novembre 2014 au 22 janvier 2015 pour 17 heures, du 7 février au 5 (libellé 28) mai 2015 pour 22 heures, du 3 août 2015 au 23 (libellé 31) janvier 2016 pour 8 heures, "noté 2 heures et 30 minutes (en réalité 2 heures et 15 minutes)".

Il a estimé qu'en sus des 140'000 fr. déjà perçus, il devait encore recevoir 40'700 fr. et a requis l'autorisation de prélever cette somme.

Suite à la communication par la Justice de paix du rapport final d'activité et du décompte des frais et honoraires, les héritiers ont tous soulevé que les relevés fournis par le représentant d'hoirie, tant concernant les comptes des successions que concernant ses propres prestations ne pouvaient pas, tels que présentés, être contrôlés, a fortiori acceptés, et que le montant horaire des honoraires réclamés paraissait excessif et ne pouvait être appliqué à l'ensemble des activités qualifiées de juridiques.

r) Par courriers des 1er juin et 8 juillet 2016, le représentant d'hoirie a expliqué les difficultés importantes rencontrées au cours de son mandat en raison, principalement, des mésententes et problèmes relationnels entre et avec les héritiers et leurs représentants. Il a adressé son relevé de prestation totalisant finalement 223'400 fr. Il a estimé que la Justice de paix avait suffisamment d'éléments pour prendre une décision de taxation et a conclu à sa relève. Il a encore, par la suite, déposé auprès de la Justice de paix deux classeurs de copies en vrac de pièces diverses, factures, ordres bancaires, relevés bancaires et courriers y relatifs, datées de 2013 à 2015.

s) Par ordonnance DJP/490/2016 du 11 octobre 2016, notifiée le jour-même, la Justice de paix a notamment relevé A______ de sa mission de représentant d'hoirie dans les successions de I______, décédée le ______ 2009, et de L______, décédé le ______ 2012, réservé l'approbation de ses rapport et comptes finaux ainsi que la taxation de ses frais et honoraires et désigné en ses lieux et place H______, avocat.

En substance, la Justice de paix a fait droit à la demande de A______ d'être relevé de ses fonctions de représentant d'hoirie mais a estimé que son activité n'était pas terminée de sorte qu'il s'agissait de désigner un nouveau représentant des successions en question, afin de mener à terme la mission, ainsi que pour reconstituer l'ensemble de la comptabilité des successions, aucun contrôle de gestion n'étant possible en l'état sur la base des seuls documents remis par A______ et par voie de conséquence aucune taxation de ses frais et honoraires.

Cette décision a essentiellement été confirmée par la Cour de justice sur appel du représentant relevé de ses fonctions (DAS/48/2017).

t) En date du 30 juillet 2020, l'appelant a adressé à la Justice de paix sa facture et son rapport d'activité en faveur des successions I______/L______. Ses honoraires doivent, selon lui, être fixés à 180'700 fr., pour 427 heures et 15 minutes d'activité (à 400 fr./heure) et 49 heures de tâches administratives (à 200 fr./heure), qu'il propose d'arrêter à 175'000 fr.

u) La décision querellée a été rendue, après que les parties se soient exprimées.

EN DROIT

1. 1.1 Les décisions du juge de paix, qui relèvent de la juridiction gracieuse et sont soumises à la procédure sommaire (art. 248 let. e CPC) sont susceptibles d'un appel dans le délai de dix jours (art. 314 al. 1 CPC; art. 404 al. 2 CPC) auprès de la Chambre civile de la Cour de justice (art. 120 al. 2 LOJ), si la valeur litigieuse est égale ou supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

L'appel doit être motivé (art. 311 al. 1 CPC).

1.2 En l'espèce, l'ordonnance querellée a été reçue le 1er décembre 2020 par l'appelant, de sorte que l'appel déposé le 11 décembre 2020 est recevable. Il l'est également quant à la valeur litigieuse en jeu au vu de l'actif successoral. Enfin, l'écriture d'appel est motivée à satisfaction.

2. 2.1 Comme déjà rappelé dans la présente cause (DAS/48/2017), selon l'art. 602 al. 1 CC s'il y a plusieurs héritiers, tous les droits et obligations compris dans la succession restent indivis jusqu'au partage. A la demande de l'un des héritiers, l'autorité compétente peut désigner un représentant de la communauté héréditaire jusqu'au moment du partage (art. 602 al. 3 CC). Sauf précision contraire, les pouvoirs du représentant sont ceux d'un exécuteur testamentaire. L'autorité de nomination, à Genève le juge de paix (art. 3 al. 1 let. j LaCC), exerce la surveillance sur le représentant de la succession (art. 3 al. 2 LaCC) et arrête sa rémunération (SPAHR, CR-CC II 2016, no 68 ad art. 602 CC).

La représentation de la succession est une institution de droit privé sui generis. Le représentant de la succession agit comme un mandataire au sens des art 398 ss CO. Il est soumis aux règles du mandat quant à sa responsabilité et à son droit de mettre fin au mandat en tout temps. Il exerce une activité de droit privé. Le fait que le représentant soit désigné par l'autorité n'y change rien (WOLF, Berner Komm. 2014, nos 154 et 165 ad art. 602 CC; STAUFELBERGER/KELLER LÜSCHER, Basler Komm. 2019, no 48 ad art. 602 CC; SPAHR, op. cit. no 77 et 85 ad art. 602 CC).

Les coûts de la représentation, qui sont des dettes de la succession, sont à supporter par celle-ci, c'est-à-dire par tous les héritiers. Les règles du mandat sont applicables (WOLF, op. cit., no 159 et 181 ad art. 602 CC).

La loi étant lacunaire quant à la rémunération du représentant de la succession, on doit se reporter aux principes dégagés pour la rémunération des exécuteurs testamentaires. Ceux-ci ont droit à une "indemnité équitable" au sens de l'art. 517 al. 3 CC, de droit fédéral et fixée selon les seuls critères du droit fédéral, à l'exclusion du droit cantonal, ne se fondant en particulier pas automatiquement sur des usages professionnels ou des tarifs cantonaux. (KARRER, PETER VOGT, LEU, Basler Komm., 2019, no 27 ss ad art 517 CC). La rémunération doit être objectivement proportionnée aux prestations fournies et ne saurait être fixée forfaitairement en fonction de la seule valeur de la succession ou d'un tarif ad valorem (ATF 129 I 330 c.3.2).

Le droit fédéral ne définissant pas le caractère "équitable" de l'indemnité, celle-ci doit se déterminer selon toutes les circonstances du cas d'espèce, notamment le temps passé, la complexité du cas, l'ampleur du mandat et sa durée, la responsabilité encourue. Dans l'application des critères de complexité du cas et de responsabilité, on peut tenir compte des connaissances spéciales d'un avocat ou d'un notaire (ATF 78 II 123 c. 1b) et de la valeur de la succession. On doit aussi pouvoir tenir compte, sans l'appliquer de manière mécanique, de la pratique dégagée de l'art. 394 al. 3 CO pour certaines professions. Il en est de même de certains tarifs qui doivent toutefois tenir compte de la structure des coûts de la profession (p. ex. secrétariat, etc.) (SJ 1992 p. 81, 86; KARRER et alii, op. cit., no 29 et 30 ad art 517 CC).

2.2.

La Loi sur l'organisation judiciaire genevoise (LOJ - E 2 05) est ainsi faite que la Justice de paix est une section du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant, dont les juges exercent la fonction de juges de paix. Le juge de paix exerce les compétences qui lui sont dévolues par la Loi d'application du Code civil (LaCC - E 1 05), soit diverses compétences en matière de juridiction gracieuse, dans le cadre successoral notamment.

Le Conseil d'Etat a édicté le 27 février 2013 un Règlement fixant la rémunération des curateurs (RCC - E 1 05.15, ci-après: le Tarif) désignés par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant.

Le Tarif stipule que les curateurs privés sont rémunérés selon un tarif horaire en fonction de leur qualité (avocat, juriste, fiduciaire, etc) et du type d'activité exercé (gestion courante/activité juridique). Les tarifs horaires pour les avocats chef d'étude sont fixés à 200 fr. pour la gestion courante des curatelles et de 200 fr. à 450 fr. pour les activités juridiques en rapport avec celles-ci.

Le Tribunal fédéral a jugé que le curateur exerce une tâche publique et tire ses pouvoirs primaires d'un acte de l'autorité de protection, ses actes engageant la responsabilité de l'Etat. Il ne peut donc invoquer sa liberté économique dans le cadre de la fixation de sa rémunération. Un tarif cantonal est approprié (ATF
145 I 183 c.4.2.1).

2.3

2.3.1 Dans sa décision, le juge de paix a expressément déclaré "appliquer par analogie" le Tarif, en l'absence de tarif officiel".

Ce faisant, il a erré. En effet, comme rappelé ci-dessus, la rémunération du représentant de la succession ne s'apprécie que sur la base des critères retenus par le droit fédéral, à l'exclusion de tarifs ou critères cantonaux appliqués de manière automatique. L'application par analogie du Tarif est dès lors exclue.

A ce propos, il doit être relevé encore ce qui suit: le Tarif cantonal auquel se réfère le juge de paix a été établi pour fixer les rémunérations de l'activité de tiers (curateurs) pour l'accomplissement d'une "tâche publique", comme l'a rappelé le Tribunal fédéral, au contraire du représentant de la succession exerçant un mandat privé qui relève exclusivement des règles des art. 398 ss CO. En outre, la "tâche publique" en question (curatelle) est exercée dans le cadre de la mise en oeuvre des mesures de protection de la personne (adulte ou enfant) et comporte de ce fait un caractère éminemment social que l'on ne retrouve aucunement dans l'exercice de la représentation de la succession.

Si l'application mécanique par analogie du Tarif est exclue, cela ne signifie toutefois pas encore que le juge de paix ne puisse pas s'inspirer des règles professionnelles relatives au calcul des honoraires des professions des personnes désignées par lui, voire de tarifs cantonaux, comme l'un des critères prévus par le droit fédéral.

2.3.2 Dans le cas présent, toutes les parties intimées concluent à la confirmation de la décision attaquée quant à la quotité de la rémunération fixée, l'appelant devant cependant être condamné à restituer une somme de 66'002 fr. 50 à la succession en lieu et place des 46'002 fr. 50 mentionnés au chiffre 2 du dispositif de ladite décision, l'appelant admettant avoir perçu un montant supplémentaire de 20'000 fr., non pris en compte par le juge de paix. Les intimés ne contestent pas le nombre d'heures retenu, ni le tarif appliqué par le premier juge, comme rappelé par eux en plaidoirie.

L'appelant, quant à lui, conclut à pouvoir conserver la somme de 160'000 fr. perçue et dont il dispose, sollicitant que son activité soit taxée à ce montant. Il fait valoir que sa qualité d'avocat lui permet de recevoir une rémunération fixée au tarif, conforme aux usages de la profession, choisi par lui de 450 fr./heure, pour l'intégralité de son activité.

Dans la mesure où la décision attaquée ne porte pas spécifiquement sur la question de la qualité des prestations effectuées, les conclusions des uns et des autres à ce propos ne sont pas recevables et ne seront pas abordées.

En tenant compte des critères seuls pertinents du droit fédéral pour la fixation de la rémunération rappelés plus haut, on doit retenir dans le cas d'espèce que le mandat exercé était d'une certaine complexité du fait qu'il comportait la représentation de deux successions, comportant plusieurs héritiers aux caractères difficiles, les contestations entre eux étant multiples et répétées. D'autre part, la responsabilité encourue par le représentant des hoiries était importante, au vu notamment de l'attitude entre eux des membres de celles-ci, ainsi que de leur attitude (pour certains) à l'égard de l'appelant lui-même, des discussions et des contestations de son action surgissant à tout bout de champ. En outre, l'ampleur de la tâche n'était pas anodine, du fait non seulement des dissensions entre les héritiers, mais en outre du nombre de biens à attribuer. Enfin, entrent en considération les critères du volume de la masse successorale, qui se montait à plus de 7'600'000 fr. et de la durée des fonctions de représentation, le mandat ayant perduré (sans aboutir finalement) durant quatre ans.

En désignant l'appelant, avocat, comme représentant des successions, le juge de paix pouvait envisager que celui-ci sollicite une rémunération horaire à la hauteur de ce que les règles professionnelles préconisaient. De son côté, en acceptant le mandat, l'appelant pouvait savoir que sa fixation de la rémunération dans le cadre de la représentation des successions devait être fixée sur la base des règles du droit fédéral sus-évoquées, devant en tous les cas être "équitable" (art. 517 al. 3 CC par analogie).

En définitive, s'il n'y avait pas lieu d'opérer les distinctions d'activités (juridique ou non) que le Tarif appliqué à tort par le juge de paix prescrit, puisqu'il s'agissait d'un mandat privé, il n'y a pas lieu non plus d'appliquer sans autre les montants recommandés par les règles professionnelles des avocats. Celles-ci tiennent compte des frais généraux (locaux, secrétariat) que l'avocat doit assumer, alors que dans le cas présent l'appelant, qui a exercé seul toutes les activités relevant de son mandat, a par ailleurs quitté formellement le barreau début juin 2015.

Pour toutes les raisons retenues, un tarif horaire global de 300 fr. sera considéré comme étant la base du calcul de "l'indemnité équitable" et appliqué à l'ensemble de l'activité du représentant des hoiries pour les 454 heures et 30 minutes d'activité retenues par la décision, non contestées en tant que telles. La rémunération sera arrêtée dès lors globalement à 136'350 fr.

L'appel sera admis par conséquent en ce sens, les chiffres 1 et 2 de la décision attaquée seront annulés et l'appelant sera tenu de restituer le trop-perçu, soit la différence entre 160'000 fr. prélevés et le montant de rémunération équitable arrêté.

3. Au vu de l'issue de la procédure, les frais d'appel, arrêtés à frs. 2'000 fr. (art. 26, 67 et 67B RTFMC), partiellement compensés à hauteur de 500 fr. avec l'avance de frais versée par l'appelant, seront mis à charge de chaque partie par moitié, aucune n'ayant entièrement eu gain de cause (art. 106 al. 2 CPC). L'appelant sera condamné à verser à l'Etat la somme de 500 fr.; les intimés, conjointement et solidairement, la somme de 1'000 fr.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel formé le 11 décembre 2020 par A______ contre la décision DJP/492/2020 rendue le 24 novembre 2020 par la Justice de paix dans les causes C/27504/2009 et C/7617/2012.

Au fond :

Annule les chiffres 1 et 2 du dispositif de la décision querellée.

Fixe le montant de la rémunération due à A______ pour sa représentation des communautés héréditaires de I______ et L______, à 136'350 fr.

Le condamne en conséquence à restituer aux communautés héréditaires le montant de 23'650 fr.

Rejette l'appel pour le surplus.

Sur les frais :

Les frais judiciaires d'appel, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de chaque partie pour moitié et compensés partiellement avec l'avance de frais versée par A______, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à l'Etat de Genève la somme de 500 fr.

Condamne B______, C______, F______ et D______, conjointement et solidairement, au paiement à l'Etat de Genève de la somme de 1'000 fr.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 


 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.