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Décisions | Chambre Constitutionnelle

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A/3504/2022

ACST/19/2022 du 23.11.2022 ( ABST ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3504/2022-ABST ACST/19/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre constitutionnelle

Décision du 23 novembre 2022

sur effet suspensif

dans la cause

 

A______
et
Monsieur B______
et
Monsieur C______
représentés par Me Philippe Ducor, avocat

contre

CONSEIL D’ÉTAT


Attendu, en fait, que :

1) a. A______ (ci-après : A______) est une association au sens des art. 60 ss du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) ayant son siège à Genève. Elle a notamment pour but statutaire de défendre globalement les intérêts de ses membres, à savoir des médecins dans le canton de Genève, qui font preuve d’une qualification professionnelle suffisante et d’une bonne réputation.

b. Messieurs B______ et C______ sont titulaires d’un diplôme fédéral en médecine humaine délivré par l’Université de Genève et poursuivent une formation postgrade respectivement en cardiologie et en chirurgie de la main qu’ils vont achever en 2023. Ils sont respectivement domiciliés dans les cantons de Neuchâtel et du Valais.

2) Le 4 juin 2020, A______ a écrit au Conseiller d’État en charge du département de la sécurité, de l’emploi et de la santé, devenu depuis lors le département de la sécurité, de la population et de la santé (ci-après, respectivement : le Conseiller d’État et le département) pour lui faire part de ce que certains de ses membres constataient, dans leurs spécialités, une augmentation exponentielle de nouveaux médecins et de nouveaux cabinets. Les discussions entamées deux ans plus tôt devaient être reprises à ce sujet afin de définir les moyens à mettre en œuvre pour réguler le nombre de médecins et de cabinets par type de spécialité.

3) Le 27 novembre 2020, le Conseiller d’État a répondu à A______ que les critères et principes méthodologiques permettant de définir les nombres maximaux de médecins fournissant des prestations ambulatoires avaient été définis par le Conseil fédéral, les cantons étant chargés d’évaluer le besoin objectif d’approvisionnement en soins et la capacité d’offre de prestations pour déterminer le taux d’approvisionnement. Ses services prendraient contact avec les personnes concernées dans les meilleurs délais.

4) Le 1er juillet 2021 est entrée en vigueur une modification de l’art. 55a de la loi fédérale sur l’assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10), dont la teneur est la suivante :

« Art. 55a Limitation du nombre de médecins qui fournissent des prestations ambulatoires

1 Les cantons limitent, dans un ou plusieurs domaines de spécialité ou dans certaines régions, le nombre de médecins qui fournissent des prestations ambulatoires à la charge de l’assurance obligatoire des soins. Lorsqu’un canton limite le nombre de médecins, il prévoit :

a. que les médecins ne sont admis que jusqu’à concurrence du nombre maximal déterminé ;

b. que le nombre de médecins suivants est limité au nombre maximal déterminé :

1. les médecins qui exercent dans le domaine ambulatoire d’un hôpital,

2. les médecins qui exercent dans une institution visée à l’art. 35, al. 2, let. n.

2 Le Conseil fédéral définit les critères et les principes méthodologiques pour fixer les nombres maximaux. Il tient compte en particulier des flux de patients entre les cantons et des régions d’approvisionnement en soins ainsi que de l’évolution générale du taux d’activité des médecins.

3 Avant de fixer les nombres maximaux de médecins, le canton entend les fédérations des fournisseurs de prestations, des assureurs et des assurés. Il se coordonne avec les autres cantons pour les fixer.

4 Les fournisseurs de prestations, les assureurs et leurs fédérations respectives communiquent gratuitement aux autorités cantonales compétentes qui en font la demande, en plus des données collectées en vertu de l’art. 59a, les données nécessaires pour fixer les nombres maximaux de médecins.

5 En cas de limitation des admissions à pratiquer dans un canton, les médecins suivants peuvent continuer de pratiquer :

a. les médecins qui ont été admis à pratiquer et qui ont fourni des prestations ambulatoires à la charge de l’assurance obligatoire des soins avant l’entrée en vigueur des nombres maximaux ;

b. les médecins qui exerçaient dans le domaine ambulatoire d’un hôpital ou dans une institution visée à l’art. 35, al. 2, let. n, avant l’entrée en vigueur des nombres maximaux, s’ils poursuivent leur activité dans le domaine ambulatoire du même hôpital ou dans la même institution.

6 Lorsque, dans un canton, les coûts annuels par assuré dans un domaine de spécialité augmentent davantage que les coûts annuels des autres domaines de spécialité dans ce canton ou que la moyenne suisse des coûts annuels dans le domaine de spécialité en question, le canton peut prévoir qu’aucune nouvelle admission à pratiquer à la charge de l’assurance obligatoire des soins n’est délivrée dans ce domaine de spécialité.

 

Dispositions transitoires relatives à la modification du 19 juin 2020

1 Les réglementations cantonales en matière de limitation des admissions à pratiquer à la charge de l’assurance obligatoire des soins doivent être adaptées dans un délai de deux ans à compter de l’entrée en vigueur de la modification du 19 juin 2020. L’ancien droit régissant la limitation de l’admission à pratiquer à la charge de l’assurance obligatoire des soins reste applicable jusqu’à l’adaptation des réglementations cantonales concernées, mais pendant deux ans au plus.

2 Les fournisseurs de prestations visés à l’art. 35, al. 2, let. a à g, m et n, qui étaient admis à pratiquer à la charge de l’assurance obligatoire des soins en vertu de l’ancien droit sont réputés admis au sens de l’art. 36 du nouveau droit par le canton sur le territoire duquel ils pratiquaient à l’entrée en vigueur dudit article. »

5) Le même jour est également entrée en vigueur l’ordonnance sur la fixation de nombres maximaux de médecins qui fournissent des prestations ambulatoires du 23 juin 2021 (OFNMMPA - RS 832.107) adoptée sur la base de l’art. 55 al. 2 LAMal, qui prévoit notamment ce qui suit :

« Art. 1 Principe

1 La fixation par les cantons des nombres maximaux visés à l’art. 55a LAMal se fonde sur le calcul de l’offre de médecins et du taux de couverture des besoins par région.

2 Les cantons fixent les nombres maximaux en divisant l’offre de médecins par le taux de couverture.

3 Ils peuvent prévoir un facteur de pondération pour les fixer.

 

Art. 2 Calcul de l’offre de médecins

1 Les cantons calculent l’offre de médecins à partir du temps de travail effectué par les médecins, exprimé en équivalents plein temps.

2 Les médecins sont identifiés par leur numéro d’identification (Global Location Number, GLN).

3 Le nombre d’équivalents plein temps correspond au rapport entre le temps de travail effectué par le médecin et le temps de travail moyen effectué par un médecin exerçant à plein temps. Une activité est réputée à plein temps lorsqu’elle est exercée à raison de dix demi-journées par semaine.

4 Si, pour certains médecins, les données disponibles ne sont pas de qualité suffisante pour calculer le nombre d’équivalents plein temps, celui-ci peut être présumé proportionnel au volume de prestations totalisées par des fournisseurs similaires de prestations.

 

Art. 3 Méthode de calcul du taux de couverture

1 Le Département fédéral de l’intérieur (DFI) définit un modèle de régression de l’offre en prestations médicales ambulatoires, applicable pour l’ensemble de la Suisse. Il en déduit le besoin en prestations médicales par domaine de spécialisation médicale pour chaque région (volume a de prestations ajusté au besoin). Pour définir le modèle, il prend en compte des indicateurs liés à la démographie et à la morbidité de la population résidant en Suisse et peut inclure d’autres indicateurs qui expliquent l’évolution de l’offre.

2 Il définit les régions après avoir consulté les cantons.

3 Il adapte le volume a de prestations ajusté au besoin sur la base des flux de patients entre les régions, afin d’obtenir le volume de prestations nécessaire pour couvrir les besoins dans chaque région et domaine de spécialisation médicale (volume b de prestations ajusté au besoin).

4 Il obtient pour chaque région le taux de couverture par domaine de spécialisation médicale en divisant le volume de prestations fourni par les médecins par le volume b de prestations ajusté au besoin; il inscrit ce taux dans une ordonnance.

5 Il réexamine périodiquement le taux de couverture et l’adapte si nécessaire.

( )

Art. 5 Fixation des nombres maximaux par les cantons

1 Les cantons divisent, pour chaque domaine de spécialisation médicale, l’offre de médecins (art. 2) par le taux de couverture par domaine de spécialisation médicale pour la région correspondante (art. 3), afin d’obtenir les nombres maximaux nécessaires à une couverture économique des besoins sur leur territoire.

2 Ils peuvent prévoir un facteur de pondération afin de tenir compte de circonstances qui ne sont pas prises en considération dans le calcul du taux de couverture. Pour le fixer, ils se fondent notamment sur des enquêtes auprès de spécialistes, sur des systèmes d’indicateurs ou sur des valeurs de référence.

3 Ils réexaminent périodiquement les nombres maximaux et les adaptent si nécessaire.

( )

Art. 8 Bases de calcul

L’offre de médecins au sens de l’art. 2, le besoin en prestations médicales au sens de l’art. 3, les domaines de spécialisation médicale au sens de l’art. 4 et le facteur de pondération au sens de l’art. 5, al. 2, sont obtenus notamment au moyen des bases de calcul suivantes :

a. le volume de points selon la structure tarifaire pour les prestations médicales obligatoires ;

b. les prestations brutes à la charge de l’assurance obligatoire des soins ;

c. le nombre de consultations ;

d. les relevés de l’Office fédéral de la statistique, notamment les données structurelles des cabinets médicaux et des centres ambulatoires et les données des patients ambulatoires des hôpitaux et des maisons de naissance au sens de l’annexe 1, ch. 193 et 194, de l’ordonnance du 30 juin 1993 sur les relevés statistiques ;

e. les données relatives aux médecins du registre des professions médicales au sens de l’ordonnance du 5 avril 2017 concernant le registre LPMéd.

 

Art. 9 Disposition transitoire

Les cantons peuvent disposer que, jusqu’au 30 juin 2025 au plus tard, l’offre de médecins calculée conformément à l’art. 2 correspond, par domaine de spécialisation médicale et par région, à une couverture économique répondant aux besoins.

( ) »

Selon le commentaire édité par l’office fédéral de la santé publique (ci-après : OFSP), l’OFNMMPA fixait, pour le 1er juillet 2021, les critères et principes méthodologiques pour définir les nombres maximaux de médecins. Les nombres maximaux de médecins autorisés à pratiquer à la charge de l’assurance obligatoire des soins (ci-après : AOS) seraient définis par les cantons et s’appliqueraient aux médecins exerçant dans les cabinets médicaux ou dans le secteur ambulatoire des hôpitaux. Pour fixer le nombre maximal de médecins autorisés à pratiquer à la charge de l’AOS dans un domaine de spécialisation médicale et dans une région particulière, les cantons s’appuyaient sur l’offre effective de médecins qui exerçaient sur leurs territoires dans un domaine et une région et sur des valeurs indicatives du taux de couverture des besoins par domaine et région définies selon une méthode uniforme sur le plan suisse. Ces valeurs indicatives étaient déduites d’un modèle national de régression de l’offre en soins élaboré par le département fédéral de l’intérieur. Concrètement, l’approche impliquait de mettre en relation l’offre de médecins exerçant dans une région avec le taux de couverture calculé pour ladite région. Les cantons avaient aussi la possibilité de prévoir un facteur de pondération afin de compenser des éléments influençant le besoin objectif en soins qui n’auraient pas pu être suffisamment pris en compte dans le cadre du modèle national, l’objectif final étant de garantir l’accès des assurés aux prestations appropriées, de haute qualité tout en étant économiques. L’ordonnance posait un cadre permettant une mise en œuvre de l’art. 55a al. 1 LAMal homogène au niveau national, tout en octroyant aux cantons une marge de manœuvre concernant les domaines et les territoires sur lesquels étaient appliqués les nombres maximaux de médecins autorisés à pratiquer à la charge de l’AOS. Elle s’articulait autour de deux grands axes, à savoir l’estimation des taux de couverture des besoins en soins par région et par domaine de spécialisation médicale avec une modélisation sur le plan suisse et la définition des nombres maximaux de médecins par domaine de spécialisation médicale et par région.

6) Le 4 novembre 2021, la direction générale de la santé du département (ci-après : DGS) a fait part à A______ que certains aspects stratégiques étaient encore en discussion sur le plan national, ce qui ne l’empêchait pas de travailler avec ses homologues romandes afin d’harmoniser la mise en œuvre de la clause du besoin, qui s’appliquerait au plan cantonal dans le courant de l’année 2022. La modification du système actuel dépendait de la possibilité, de ses services, de disposer d’une base de données des médecins à jour et complète. À cette fin, une enquête était prévue au première trimestre 2022, dans le cadre de laquelle elle serait sollicitée.

7) Le 17 décembre 2021, le Conseil d’État a écrit à la DGS, reprenant le courrier de celle-ci du 4 novembre 2021 et précisant qu’aux fins d’intégrer l’expertise des diverses parties prenantes, la DGS procéderait à des consultations auprès des fédérations de fournisseurs de prestations concernées, ainsi que des fédérations des assurés.

8) Par courrier du 7 juin 2022, le Conseiller d’État a félicité A______ du soutien qu’elle avait manifesté pour la réintroduction de la clause du besoin et des rencontres organisées à cette fin avec ses services, qui avaient fait suite à sa proposition consistant à utiliser sa liste de membres détenteurs d’un titre postgrade afin d’envoyer un rappel général concernant le recensement de l’offre de médecins exerçant à la charge de l’AOS dans le canton. Les personnes actuellement en formation auraient certes moins de liberté que sous l’empire du régime actuel pour déployer leurs projets personnels. Les conséquences les plus désagréables seraient toutefois, pour certains d’entre eux, de devoir patienter quelques années de plus à l’hôpital avant de développer un projet d’installation. Par ailleurs, la clause du besoin s’appliquerait également au secteur ambulatoire des hôpitaux, si bien que personne ne se verrait sans travail ou bloqué indéfiniment dans ses projets personnels.

9) Le 17 juin 2022, A______ s’est déterminée au sujet du projet de règlement d’application de l’OFNMMPA. Le formulaire adressé par la DGS aux médecins afin de dresser l’inventaire permettant de fixer de manière provisoire les nombres maximaux ne tenait pas compte des sous-spécialités ni ne permettait aux médecins d’indiquer s’ils étaient au bénéfice d’une double spécialité. L’activité des médecins des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) devait être régulée, au même titre que celle des médecins de « ville » et leur recensement distinct devait ainsi être opéré par rapport à ces derniers.

10) Le 8 juillet 2022, le Conseiller d’État a répondu à A______ que le recensement de l’offre serait mis à jour annuellement et que les taux d’activité en équivalents temps plein (ci-après : ETP) pour chaque titre postgrade détenu par les médecins admis à facturer seraient réévalués dès l’automne 2023. Il serait ainsi possible de renseigner deux spécialités par médecin, ce qui permettrait une analyse fine et évolutive de l’offre disponible dans le canton. Bien que maintenue, la commission quadripartite voyait en outre son rôle modifié, puisqu’elle aurait pour mission de renseigner le département sur les disponibilités dans certaines spécialités. Il n’y avait en tout état de cause pas à remettre en question les principes de la législation fédérale, qui étaient du ressort de la Confédération.

11) Le 14 septembre 2022, le Conseil d’État a adopté le règlement d’application de l’ordonnance fédérale sur la fixation de nombres maximaux de médecins qui fournissent des prestations ambulatoires (RaOFNMMPA - J 3 05.50), dont la teneur est la suivante :

« Chapitre I Dispositions générales

Art. 1 Objet

Le présent règlement a pour objet de mettre en œuvre la limitation du nombre de médecins qui fournissent des prestations ambulatoires à la charge de l’assurance obligatoire des soins au sens de l’article 55a de la loi fédérale, conformément à l’article 9 de l’ordonnance fédérale.

( )

Art. 3 Autorité compétente

1 Sur délégation du département chargé de la santé (ci-après : département), la direction générale de la santé (ci-après : la direction générale) est chargée de l’exécution de l’ordonnance fédérale, sous réserve des compétences que la législation fédérale et cantonale attribue à une autre instance.

2 Une commission quadripartite consultative se réunit au moins une fois par trimestre afin de suivre la mise en œuvre de l’article 9 de l’ordonnance fédérale et d’informer le département de l’évolution des besoins de couverture en soins de la population; elle peut, dans ce contexte, recommander la levée provisoire de la limitation de l’admission pour certains domaines de spécialisation, en précisant, cas échéant, la sous-spécialité concernée, en s’appuyant sur des données factuelles et objectives qu’elle partage avec le département.

 

Chapitre II Modalités de régulation des médecins

Art. 4 Principe

Les médecins visés par la limitation de l’admission sont ceux au bénéfice d’un titre postgrade fédéral ou jugé équivalent au sens de la loi fédérale, qui exercent dans un cabinet une activité dépendante ou indépendante, au sein d’une institution au sens de l’article 35, alinéa 2, lettre n, de la loi fédérale, ou dans le domaine ambulatoire des hôpitaux, au sens de l’article 39 de la loi fédérale.

( )

Art. 6 Détermination des nombres maximaux

1 Les nombres maximaux constituent l’offre cantonale de médecins exerçant à la charge de l’assurance obligatoire des soins en équivalents temps plein dans chaque domaine de spécialisation et correspondent à une couverture économique répondant aux besoins.

2 Cette offre détaillée est annexée au présent règlement (annexe A).

 

Art. 7 Limitation de l’admission

1 Une admission à facturer à la charge de l’assurance obligatoire des soins ne peut être délivrée que si le nombre maximum de médecins par domaine de spécialisation fixé par l’annexe A n’est pas atteint.

2 En fonction des besoins en soins de la population, en particulier dans une sous-spécialité médicale ou pour des raisons d’intérêt public, la direction générale peut décider de ne pas appliquer momentanément de limitation d’admission dans un ou plusieurs domaines de spécialisation, ou dans un périmètre géographique du canton.

 

Art. 8 Liste d’attente

1 Une liste d’attente par domaine de spécialisation est établie par la direction générale.

2 Elle est gérée de manière chronologique, la date de réception du dossier complet déterminant le rang du médecin dans cette liste.

3 Si le premier médecin de la liste renonce à une admission à facturer à la charge de l’assurance obligatoire des soins lorsque celle-ci lui est proposée, il est considéré comme ayant renoncé et son inscription est rayée de la liste. Une information écrite est alors adressée au médecin concerné.

( )

Chapitre III Commission quadripartite consultative

Art. 10 But

La commission quadripartite consultative en matière de limitation de l’admission des fournisseurs de prestations à facturer à la charge de l’assurance obligatoire des soins (ci-après : la commission) a pour but de réunir, aux fins de suivi de mise en œuvre de l’article 9 de l’ordonnance fédérale, les représentants des principaux partenaires de la santé concernés par la limitation.

 

Art. 11 Compétences

1 La commission informe le département de l’évolution des besoins en soins de la population et de l’impact de la mesure en cours.

2 Elle peut, dans ce contexte, recommander la levée provisoire de la limitation de l’admission pour certains domaines de spécialisation, en précisant, cas échéant, la sous-spécialité concernée.

3 Elle apporte au département les données factuelles et objectives concernant les besoins non couverts par domaine de spécialisation lorsqu’ils sont identifiés.

( )

Annexe A Estimation de l’offre de médecins qui fournissent des prestations ambulatoires – Nombres maximaux dès le 1er octobre 2022

Domaine de spécialisation

Nbre max ETP

Allergologie et immunologie clinique

19,00

Anesthésiologie

43,22

Angiologie

9,33

Cardiologie

55,79

Chirurgie

31,41

Chirurgie cardiaque et vasculaire thoracique

2,33

Chirurgie de la main

15,50

Chirurgie orale et maxillo-faciale

5,51

Chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil locomoteur

45,65

Chirurgie pédiatrique

6,00

Chirurgie plastique, reconstructive et esthétique

21,61

Chirurgie thoracique

1,98

Chirurgie vasculaire

5,33

Dermatologie et vénéréologie

52,18

Endocrinologie / diabétologie

18,94

Gastroentérologie

28,68

Génétique médicale

2,40

Gynécologie et obstétrique

99,57

Hématologie

12,19

Infectiologie

16,29

Médecine du travail

6,60

Médecine intensive

17,75

Médecine interne générale

511,08

Médecine légale

2,64

Médecine nucléaire

13,16

Médecine pharmaceutique

0

Médecine physique et réadaptation

17,28

Médecine tropicale et médecine des voyages

1,32

Néphrologie

13,34

Neurochirurgie

5,92

Neurologie

39,43

Oncologie médicale

14,08

Ophtalmologie

72,24

Oto-rhino-laryngologie

29,11

Pathologie

14,30

Pédiatrie

164,08

Pharmacologie et toxicologie cliniques

7,26

Pneumologie

23,23

Prévention et santé publique

4,58

Psychiatrie et psychothérapie

365,55

Psychiatrie et psychothérapie d’enfants et d’adolescents

85,89

Radiologie

79,80

Radio-oncologie / radiothérapie

114,38

Rhumatologie

31,59

Urologie

22,78

Total ETP

2 150,30 »

12) Le RaOFNMMPA a été publié dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève du 20 septembre 2022 et est entré en vigueur le 1er octobre 2022 conformément à son art. 17.

13) Le 27 septembre 2022, se référant à une entrevue ayant eu lieu quelques jours plus tôt, A______ a indiqué à la DGS que le document inventoriant le nombre de médecins genevois fournissant des prestations ambulatoires à la charge de l’AOS n’était pas exhaustif et ne reflétait pas précisément la situation existante, dès lors qu’un certain nombre de ses membres n’avaient pas reçu le formulaire pour répondre à l’enquête et que ce document ne permettait pas de signaler l’exercice quotidien d’une seconde spécialité ni d’une sous-spécialité.

Pour que les HUG puissent facturer à l’AOS l’activité de leurs médecins, ceux-ci devaient être au bénéfice d’un droit de pratique. Or, l’éventuel droit de pratique à charge de l’AOS qui serait délivré aux médecins ayant achevé leur formation était visé par la limitation de l’admission. Si le quota était atteint, ce droit de pratique ne pouvait pas être attribué. Dès lors, le règlement, dans sa configuration actuelle, ne permettait pas aux HUG de régulariser la situation des médecins internes qui finissaient leur formation en leur proposant un poste au sein de l’institution, sauf à ne pas facturer leurs prestations.

Dans certaines circonstances, les HUG devraient recruter un nouveau collaborateur aux spécificités particulières en vue de garantir la pérennité des prestations offertes, sans avoir à « piocher » parmi les médecins genevois déjà au bénéfice d’un droit de pratique à la charge de l’AOS. Si aucun médecin ne correspondait au profil ou n’était disposé à travailler pour les HUG, ces derniers devaient pouvoir être autorisés à recruter en dehors de la sphère cantonale, ce que le règlement ne permettait pas puisque l’art. 8 imposait à la DGS d’attribuer le droit de pratique laissé vacant par le médecin des HUG qui partait à la retraite au premier médecin figurant sur la liste d’attente de la spécialité considérée. Il se justifiait dès lors également de définir des sous-spécialités au sein du milieu hospitalier afin de permettre le remplacement d’un chef de service parti à la retraite par un médecin répondant à des compétences et à une expérience similaires dont ne disposait pas le jeune médecin figurant sur la liste d’attente.

14) Le 11 octobre 2022 la DGS a répondu à A______ que ses services avaient procédé à une enquête aussi exhaustive que possible auprès des médecins en activité pour déterminer l’offre actuelle conformément à l’art. 9 OFNMMPA mais qu’ils n’avaient pas comptabilisé les médecins n’ayant pas souhaité communiquer leurs coordonnées et ceux n’ayant pas répondu à l’enquête. Les sous-spécialités médicales étaient en outre prises en considération par divers biais dans le RaOFNMMPA.

L’art. 8 RaOFNMMPA posait le principe qu’une admission à la charge de l’AOS pouvait être délivrée dans une spécialité uniquement si les chiffres de l’annexe A n’étaient ni atteints, ni dépassés. Toutefois, des ajustements avaient été prévus notamment à l’art. 7 RaOFNMMPA. Ces ajustements avaient une influence sur cette liste d’attente, dans la mesure où la réglementation concernée visait avant tout à couvrir les besoins en soins de la population genevoise. La commission quadripartite aurait ainsi un rôle à jouer dans ce cadre.

Le RaOFNMMPA ne concernait pas le droit de pratique, mais l’autorisation de facturer à la charge de l’AOS, de sorte qu’un médecin pouvait avoir un droit de pratiquer sans pour autant pouvoir facturer à la charge de la LAMal. La problématique des médecins internes serait réglée par le biais de l’art. 7 al. 2 RaOFNMMPA, qui permettait de s’appuyer sur des motifs « d’intérêt public » pour ne pas appliquer la clause dans certaines spécialités. Une telle possibilité avait été introduite précisément pour permettre aux HUG de garder ou engager des médecins n’étant plus en formation lorsque l’institution avait des besoins spécifiques. Ces médecins pourraient donc le cas échéant rester aux HUG et une autorisation de pratiquer leur serait délivrée, limitée aux HUG. Ils ne pourraient toutefois pas s’installer ailleurs sans passer par la liste d’attente.

Le même raisonnement s’appliquait au recrutement des médecins aux spécificités particulières, la notion « d’intérêt public » permettant dans certains cas de déroger au principe de la limitation de l’admission. Sur le plan pratique, les institutions concernées avaient besoin de médecins qui étaient également aptes à enseigner et former la relève. Il était très peu probable que les médecins sur la liste d’attente remplissent cette condition.

15) Par acte expédié le 20 octobre 2022, l’association ainsi que MM. B______ et C______ ont saisi la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (ci-après : la chambre constitutionnelle) d’un recours dirigé contre le RaOFNMMPA, concluant préalablement à l’octroi de l’effet suspensif, principalement à l’annulation de l’acte entrepris, subsidiairement à l’annulation de son art. 6 al. 2 et de l’annexe A et à ce que les mots « ou pour des raisons d’intérêt public » dans le libellé de l’art. 7 al. 2 soient tracés, le tout « avec suite de frais et dépens ».

L’effet suspensif devait être accordé, faute de quoi MM. B______ et C______ n’auraient aucune chance d’obtenir une admission à pratiquer à charge de l’AOS, au vu des nombres maximaux prévus à l’art. 6 et fixés dans l’annexe. En leur refusant toute admission à pratiquer à charge de l’AOS d’une manière contraire au droit fédéral, le RaOFNMMPA menaçait gravement leur liberté économique. En outre, un délai dans la mise en œuvre dudit règlement ne causait pas non plus de rupture dans la réglementation genevoise de la clause du besoin, au vu du délai d’adaptation laissé aux cantons, l’ancien droit restant applicable dans l’intervalle. Dans ces circonstances, aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’opposait à l’octroi de l’effet suspensif.

Sur le fond, les nombres maximaux de médecins avaient été fixés arbitrairement, sur la base d’un recensement bâclé et incomplet, comme le reconnaissait du reste la DGS dans son courrier du 11 octobre 2022, en sous-estimant le nombre réel de médecins actifs, alors même qu’elle savait depuis l’automne 2020 qu’elle devait mener à bien cette tâche. Par exemple, pour la chirurgie pédiatrique, l’annexe A du RaOFNMMPA avait fixé un nombre maximal de 6 ETP, alors que le recensement minutieux et nominatif qu’ils avaient effectué était parvenu à 11,4 ETP, voire 13,2 ETP, ce qui montrait une différence importante entre le calcul de la DGS et la réalité. Les pointages effectués avec des collègues d’autres spécialités avaient mené à un constat identique, démontrant que les chiffres maximaux de ladite annexe avaient grossièrement sous-estimé l’offre existante de médecins. Les besoins en soins de la population risquaient ainsi de ne plus être couverts et aucun nouveau médecin ne pouvait être admis à pratiquer à charge de l’AOS afin de contribuer à couvrir ces besoins, ce d’autant plus au regard des nombreux médecins amenés à prendre leur retraite dans les années à venir. Cette sous-estimation s’apparentait à une constatation inexacte des faits pertinents et aboutissait à une violation de l’OFNMMPA, sous l’angle de la primauté du droit fédéral, dont la mise en œuvre n’avait pas été correctement effectuée. La liberté économique des médecins désireux de s’installer, qui devaient rester pendant une période prolongée sur une liste d’attente, était aussi gravement atteinte, sans justification conforme puisque les bases de la restriction introduite par le RaOFNMMPA étaient viciées.

Il en allait de même de la levée temporaire des effets de la clause du besoin de l’art. 7 al. 2 RaOFNMMPA du fait de l’utilisation des termes « pour des raisons d’intérêt public », qui avaient été ajoutés dans le projet. Cette exception permettait à la DGS d’admettre les médecins de son choix pour des motifs non spécifiés et non précis, en passant outre la liste d’attente alors même que les nombres maximaux étaient déjà atteints. Il en découlait une restriction grave à la liberté économique générant un problème additionnel d’égalité de traitement entre concurrents, puisque la possibilité de levée provisoire, qui n’était ouverte qu’à la DGS et non à la commission quadripartite, avait pour seule fin de permettre aux HUG de garder ou d’engager des médecins qui n’étaient plus en formation lorsqu’il y avait des besoins spécifiques pour l’institution, alors que l’admission de pratiquer à la charge de l’AOS limitée à un seul établissement n’était pas prévue par le droit fédéral. La DGS avait en outre indiqué que la même solution serait appliquée aux médecins expérimentés, au motif qu’ils étaient aptes à enseigner et à former la relève. Une telle situation créait une importante distorsion du marché entre les médecins exerçant dans le domaine ambulatoire des hôpitaux et ceux fournissant des prestations ambulatoires dans un autre contexte, alors même que la nouvelle réglementation de la clause du besoin avait pour but de supprimer ce type de distorsion. Il s’agissait d’une mesure de politique économique visant à favoriser un type d’acteur économique au détriment des autres.

16) Le 4 novembre 2022, le Conseil d’État a conclu au rejet de la demande d’effet suspensif.

Les ETP recherchés ne représentaient que les activités ambulatoires à la charge de l’AOS, ce qui excluait d’une part l’activité stationnaire et d’autre part l’activité à charge d’autres régimes d’assurances. Un certain nombre de médecins n’ayant pas répondu à l’enquête, leur taux d’activité n’avait pas pu être comptabilisé. Les résultats avaient ensuite été pondérés afin d’obtenir une image de l’offre médicale la plus exacte possible. La DGS avait ainsi déterminé le pourcentage d’activité d’un médecin dans la spécialité de prédilection pour laquelle il exerçait à la charge de l’AOS en ambulatoire, dans un cabinet, au sein d’une institution ou dans le domaine ambulatoire des hôpitaux. En résumé, l’enquête avait donc été menée en deux parties, à savoir d’abord des invitations transmises, d’une part, à toutes les personnes physiques et morales détentrice d’un code créancier actif, auxquelles 60,8 % des participants avaient répondu, et d’autre part aux hôpitaux figurant sur la liste hospitalière cantonale concernant les médecins employés fournissant des prestations ambulatoires à la charge de l’AOS. La DGS avait ensuite consolidé les données provenant de ces deux sources, éliminé les doublons et pondéré les résultats afin de compenser au mieux les réponses manquantes. Un taux d’activité moyen avait été calculé pour chaque spécialité sur la base des réponses valides pour être ensuite appliqué au nombre des médecins de ladite spécialité qui n’avaient pas répondu. Il en résultait un calcul de l’offre solide et traçable, qui permettait une analyse des améliorations à mettre en place pour les années à venir. Par ailleurs, à la suite des échanges avec les fédérations médicales genevoises, la DGS avait retenu le besoin de permettre aux médecins de déclarer des taux d’activité pour au moins deux spécialités dès 2023 au lieu d’une spécialité comme pour 2022. Ces améliorations étaient essentielles car la législation fédérale prévoyait que le calcul de l’offre resterait une compétence cantonale même à l’issue de la période transitoire. A______, en tant que membre de la commission quadripartite, avait été régulièrement informée par le département ou la DGS du processus de détermination des ETP maximaux des médecins exerçant à la charge de l’AOS figurant dans l’annexe A du règlement litigieux. Elle n’avait toutefois pas été capable de fournir à l’autorité sanitaire cantonale des statistiques fiables sur le nombre de médecins exerçant effectivement à la charge de l’AOS pour chaque spécialité médicale à Genève, alors qu’elle se trouvait sur le terrain et malgré les demandes répétées des autorités.

Le principal but de la limitation de l’admission était d’avoir une couverture des besoins en soins ambulatoires adéquate dans le canton. Dès lors, la DGS devait pouvoir adapter cette couverture en tout temps, en cas de pénurie avérée des besoins en soins, ce que l’art. 7 al. 2 RaOFNMMPA lui permettait momentanément de faire, n’appliquant plus la limitation de l’admission dans une ou plusieurs spécialités médicales ou dans un secteur géographique particulier du canton, même si les nombres maximaux étaient dépassés par rapport à l’annexe A. Le canton devait par ailleurs s’assurer qu’un établissement médical d’importance nationale en matière de formation de médecins disposait de suffisamment de médecins formateurs admis à facturer à la charge de l’AOS, étant rappelé que le courrier du 11 octobre 2022 visait à répondre à une question au sujet de la situation des HUG et ne signifiait pas pour autant que le département libérerait systématiquement des admissions à facturer en faveur de ces derniers seulement.

MM. B______ et C______ et l’association perdaient en outre de vue que la jurisprudence fédérale avait admis que la clause du besoin instaurée par l’art. 55a aLAMal poursuivait un but de politique sociale admissible au regard de la liberté économique, ce qui était toujours le cas sous l’empire de l’actuelle LAMal. De plus, les médecins concernés ne disposaient d’aucun droit inconditionnel d’obtenir une admission à la charge de l’AOS à Genève, étant précisé qu’ils n’avaient pas encore terminé leur formation postgrade et qu’ils pourraient, le cas échéant, demander une admission à facturer à la charge de l’AOS dans un canton où persistait une pénurie de médecins dans leurs domaines de spécialité, par exemple dans leur canton de résidence. Ils ne démontraient ainsi pas que leurs intérêts seraient particulièrement menacés du fait de l’entrée en vigueur de l’acte entrepris. L’intérêt public à l’entrée en vigueur immédiate du RaOFNMMPA primait ainsi leur intérêt privé afin que l’État puisse appliquer sans délai la nouvelle réglementation fédérale sur la clause du besoin, désormais définitivement ancrée dans la législation fédérale en vue de limiter de manière plus efficiente l’admission à facturer des médecins et contribuer à freiner l’augmentation des coûts de la santé, qui étaient particulièrement élevés à Genève et généraient des primes d’assurance-maladie parmi les plus hautes de Suisse.

17) Le 17 novembre 2022, l’association et MM. B______ et C______ ont persisté dans leur demande d’effet suspensif.

18) Sur quoi, la cause a été gardée à juger sur effet suspensif.

 

Considérant, en droit, que :

1) L’examen de la recevabilité du recours est reporté à l’arrêt au fond, étant toutefois précisé qu’à première vue la qualité pour recourir de l’association n’apparaît pas évidente en l’absence d’indication sur l’intérêt de la majorité de ses membres, du moins d’une grande partie d’entre eux, à l’annulation de l’acte entrepris.

2) Les mesures provisionnelles, y compris celles sur effet suspensif, sont prises par le président ou le vice-président ou, en cas d’urgence, par un autre juge de la chambre constitutionnelle (art. 21 al. 2 et 76 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

3) a. Selon l’art. 66 LPA, en cas de recours contre une loi constitutionnelle, une loi ou un règlement du Conseil d’État, le recours n’a pas d’effet suspensif (al. 2) ; toutefois, lorsqu’aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, restituer l’effet suspensif (al. 3). D’après l’exposé des motifs du projet de loi portant sur la mise en œuvre de la chambre constitutionnelle, en matière de recours abstrait, l’absence d’effet suspensif automatique se justifie afin d’éviter que le dépôt d’un recours bloque le processus législatif ou réglementaire, la chambre constitutionnelle conservant toute latitude pour restituer, totalement ou partiellement, l’effet suspensif lorsque les conditions légales de cette restitution sont données (PL 11'311, p. 15).

b. Lorsque l’effet suspensif a été retiré ou n’est pas prévu par la loi, l’autorité de recours doit examiner si les raisons pour exécuter immédiatement la décision entreprise sont plus importantes que celles justifiant le report de son exécution. Elle dispose d’un large pouvoir d’appréciation, qui varie selon la nature de l’affaire. La restitution de l’effet suspensif est subordonnée à l’existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l’absence d’exécution immédiate de la décision ou de la norme (arrêt du Tribunal fédéral 2C_246/2020 du 18 mai 2020 consid. 5.1). Pour effectuer la pesée des intérêts en présence (arrêt du Tribunal fédéral 8C_239/2014 du 14 mai 2014 consid. 4.1), l’autorité de recours n’est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (ATF 145 I 73 consid. 7.2.3.2 ; 117 V 185 consid. 2b).

L’octroi de mesures provisionnelles – au nombre desquelles figure l’effet suspensif (Philippe WEISSENBERGER/Astrid HIRZEL, Der Suspensiveffekt und andere vorsorgliche Massnahmen, in Isabelle HÄNER/Bernhard WALDMANN [éd.], Brennpunkte im Verwaltungsprozess, 2013, 61-85, p. 63) – présuppose l’urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l’intéressé la menace d’un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3 = RDAF 2002 I 405). Elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper le jugement définitif, ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, pas plus qu’aboutir abusivement à rendre d’emblée illusoire la portée du procès au fond (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ACST/18/2022 du 31 octobre 2022 consid. 3b).

En matière de contrôle abstrait des normes, l’octroi de l’effet suspensif suppose en outre généralement que les chances de succès du recours apparaissent manifestes (Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, n. 835 ss ; Claude-Emmanuel DUBEY, La procédure de recours devant le Tribunal fédéral, in François BELLANGER/Thierry TANQUEREL [éd.], Le contentieux administratif, 2013, 137-178, p. 167).

4) En l’espèce, le recours est dirigé contre le RaOFNMMPA, plus précisément les art. 6 al. 2 et de l’annexe A et de l’art. 7 al. 2, seules dispositions à l’encontre desquelles les recourants émettent des griefs. Il s’agit de dispositions d’un règlement du Conseil d’État, acte visé à l’art. 57 let. d LPA, à l’encontre duquel le recours n’a pas d’effet suspensif (art. 66 al. 2 LPA). Il convient donc d’examiner s’il y a lieu de l’octroyer, ce qui, en matière de contrôle abstrait des normes, suppose généralement que les chances de succès du recours soient manifestes.

Tel n’apparaît toutefois pas être le cas. En effet, à première vue, il ne semble pas, d’après les explications de l’intimé, que l’offre de médecins exerçant à la charge de l’AOS dans le canton ait été grossièrement sous-estimée et que le recensement de ceux-ci soit manifestement contraire à l’art. 55a LAMal ou aux dispositions de l’OFNMMPA, voire, pour autant qu’un tel grief soit invocable en matière de contrôle abstrait des normes, que l’intimé aurait constaté de manière inexacte les faits pertinents. Au contraire, les autorités sanitaires cantonales apparaissent avoir sollicité le concours de A______ pour ce faire, lui ayant expliqué la méthode appliquée, et pris en considération ses remarques au sujet des sous-spécialités et domaines de spécialisation des médecins. Toujours prima facie, la restriction alléguée à la liberté économique semble davantage liée à la réintroduction de la clause du besoin qui figure à l’art. 55a LAMal et lie les autorités judiciaires (art. 190 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101), qu’à l’édiction du RaOFNMMPA.

Il ne paraît a priori pas non plus évident que la levée temporaire des effets de la clause du besoin « pour des raisons d’intérêt public » au de l’art. 7 al. 2 RaOFNMMPA serait contraire à la liberté économique, dès lors que cette mesure semble précisément alléger le caractère restrictif de la clause du besoin dans certains cas. L’on ne saurait en outre d’emblée affirmer, toujours à première vue, que ladite disposition emporterait une violation de l’égalité entre concurrents, ni qu’il s’agirait d’une mesure de politique économique, au vu des déterminations de l’intimé sur effet suspensif, étant précisé que le courrier du 11 octobre 2022 semble répondre aux questions de l’association au sujet de la situation des médecins internes des HUG uniquement, sans pour autant refléter la manière dont l’autorité entend appliquer cette levée temporaire. S’agissant enfin des médecins expérimentés des HUG, il semblerait que l’association elle-même ait demandé l’application de l’art. 7 al. 2 RaOFNMMPA en leur faveur.

Les médecins recourants n’apparaissent manifestement pas non plus, prima facie, subir de dommage irréparable du fait de l’entrée en vigueur immédiate des dispositions qu’ils contestent, dommage qui semble, pour l’heure, hypothétique, dès lors que l’art. 55a LAMal ne leur est pas encore applicable étant donné qu’ils ne seront pas titulaires d’un titre postgrade fédéral avant 2023, selon leurs propres indications. Au contraire, l’intérêt public paraît commander l’application immédiate du RaOFNMMPA afin de mettre en œuvre la législation fédérale sur la clause du besoin.

Il ne se justifie dès lors pas de déroger au principe voulu par le législateur d’absence d’effet suspensif dans le cadre d’un contrôle abstrait des normes, ce qui conduit au rejet de la demande d’octroi de l’effet suspensif au recours.

5) Le sort des frais sera, quant à lui, réservé jusqu’à droit jugé au fond.

 

LA CHAMBRE CONSTITUTIONNELLE

refuse d’octroyer l’effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision, en copie, à Me Philippe Ducor, avocat des recourants, ainsi qu’au Conseil d’État.


Le président :

 

Jean-Marc Verniory

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le la greffière :