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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3417/2022

ATAS/190/2024 du 26.03.2024 ( LAA ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3417/2022 ATAS/190/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 26 mars 2024

Chambre 15

 

En la cause

A______

 

recourante

 

contre

BÂLOISE ASSURANCE SA

représentée par Me Michel D'ALESSANDRI, avocat

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l'assurée ou la recourante), née en 1968, domiciliée en France, était employée depuis plusieurs années par l'institution genevoise de maintien à domicile (ci-après : l'IMAD) en qualité d'infirmière et était à ce titre assurée contre les accidents professionnels et non professionnels auprès de la BÂLOISE ASSURANCE SA (ci-après : la BÂLOISE ou l'intimée) lorsqu'elle a été victime d'un accident de la voie publique le 17 avril 2021 : son véhicule a été percuté sur la gauche par un autre automobiliste ne lui ayant pas accordé la priorité et a été renversé sur le toit.

b. L'assurée a été conduite aux urgences de la CLINIQUE DES GRANGETTES, où des contusions diffuses au niveau de la musculature paravertébrale cervicale et lombaire ont été constatées. Un scanner cervical réalisé le 17 avril 2021 a conclu à l'absence de fracture et à une cervicarthrose C4-C5 et C5-C6.

c. Le cas a été pris en charge par la BÂLOISE et les indemnités journalières ont été versées dès le 20 avril 2021.

B. a. Dans un rapport médical du 23 avril 2021, le docteur B______, spécialiste FMH en médecine interne générale et médecin généraliste de l'assurée, a relevé que cette dernière se plaignait d'un choc crânien du côté gauche, de l'épaule, des cervicales et de la hanche gauche. Il a diagnostiqué un accident de la voie publique avec contusions diffuses multiples.

b. Dans un rapport subséquent du 15 juin 2021, le même médecin a fait état d'une évolution lentement favorable et d'une reprise envisagée à quatre ou six semaines.

c. Une imagerie par résonnance magnétique (ci-après : IRM) de l'épaule gauche réalisée le 4 août 2021 a révélé une bursopathie sous-acromio-deltoïdienne, l'absence de lésion traumatique de la coiffe des rotateurs ou des structures osseuses, ainsi qu'une absence de signe de capsulite, dans les limites d'un examen réalisé sans injection du produit de contraste.

d. L'assurée, dont l'arrêt de travail à 100% avait été réduit à 50% dès le 6 juillet 2021 et levé dès le 14 novembre 2021, a de nouveau été en arrêt total de travail dès le 1er mars 2022.

e. Une échographie de la hanche gauche réalisée le 2 mars 2022 sans injection d'un produit de contraste a mis en évidence une tendinopathie insertionnelle de la bandelette de Maissiat, avec quelques calcifications internes et sans déchirure, et l'absence d'altération significative au niveau de l'articulation coxo-fémorale et des tendons de la région péri-trochantérienne.

f. Se prononçant sur la demande de l'assurée de prise en charge d'un séjour de réadaptation musculo-squelettique pour soigner les atteintes à l'épaule et à la hanche gauches, le docteur C______, spécialiste FMH en médecine interne générale et médecin-conseil de la BÂLOISE, a indiqué, dans une notice du 14 mars 2022, qu'au vu des problèmes algiques décrits et au vu de l'IRM du 4 août 2021, il n'y avait pas de lien de causalité établi entre les plaintes actuelles et l'accident. Il n'y avait pas de documents suffisamment détaillés pour définir un statu quo ante/sine.

g. Le 16 mars 2022, l'IMAD a annoncé à la BÂLOISE une rechute suite à l'accident du 17 avril 2021, indiquant que l'assurée avait de nouveau des douleurs au dos.

h. Dans un rapport médical du 31 mars 2022, le Dr B______ a posé le diagnostic d'atteinte ostéoarticulaire multiple, relevant la réapparition de douleurs à la hanche, au bassin et aux côtes, principalement lors de mobilisations et de mises en charge, ainsi qu'une diminution de la mobilisation de l'épaule. Il a répondu par l'affirmative à la question de savoir si les lésions étaient dues uniquement à l'accident.

i. Sollicité par la BÂLOISE, le docteur D______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur et médecin-conseil de cette assurance, a indiqué, le 3 mai 2022, qu'il n'y avait « pas de causalité vraisemblablement prépondérante pour les troubles annoncés en mars 2022 » en relation avec l'accident du 17 avril 2021. Des troubles dégénératifs cervicaux étaient présents et il n'existait plus d'incapacité de travail dans l'activité habituelle d'infirmière depuis mars 2022.

j. Par décision du 5 mai 2022, la BÂLOISE a nié que les troubles ayant conduit à l'incapacité de travail dès le 1er mars 2022 soient en relation de causalité naturelle pour le moins probable avec l'accident du 17 avril 2021 et a donc mis fin à la prise en charge des traitements et de l'incapacité de travail dès le 1er mars 2022. Elle a au surplus indiqué que le droit à d'éventuelles prestations de l'assurance d'indemnité journalière en cas de maladie conclue par l'IMAD auprès de la BÂLOISE allait être examiné.

k. Par courriel du 11 mai 2022, la BÂLOISE a précisé qu'elle ne reviendrait pas sur la prise en charge d'une série de neuf séances de physiothérapie qui avait été accordée, ainsi que sur la prise en charge de l'échographie de la hanche réalisée le 2 mars 2022 à titre de mesure d'investigation.

l. Le 20 mai 2022, l'assurée s'est opposée à la décision du 5 mai 2022, soulignant la violence de l'accident et le fait qu'elle n'avait jamais eu de problèmes au niveau de la hanche, de l'épaule et des côtes avant l'accident. L'avis du médecin-conseil ne prenait en compte que le rapport des urgences, alors qu'elle était en traitement depuis un an pour soigner les différentes atteintes et suivait assidûment ses séances de physiothérapie.

À ses lignes, l'assurée a joint une lettre du Dr B______ du 13 mai 2022, par laquelle il s'étonnait de la décision de la BÂLOISE de ne plus prendre en charge les soins de l'assurée en raison de l'absence de causalité. Selon lui, les douleurs et limitations que celle-ci décrivait étaient en lien direct avec l'accident. Sous l'angle chronologique, une amélioration des symptômes avait d'abord été constatée sous traitement antalgique ou physiothérapeutique et les symptômes avaient ensuite augmenté sans qu'il y ait entretemps de nouvel élément influençant la symptomatologie. L'imagerie effectuée aux urgences montrait des troubles dégénératifs au niveau cervical qui n'avaient pas d'influence sur les douleurs de hanche, ni sur la mobilité de l'épaule. L'assurée a également produit une attestation de sa physiothérapeute, Madame E______, faisant état d'une bonne évolution au niveau de l'épaule gauche, avec disparition des douleurs, mais persistance d'une raideur dans les amplitudes d'élévation antérieure et d'abduction, d'une évolution correcte au niveau cervical et d'une évolution très moyenne au niveau de la hanche gauche. L'assurée souffrait d'une tendinopathie du tenseur du fascia lata gauche, conséquence de l'accident, et il était nécessaire de poursuivre les soins de physiothérapie.

m. Le 30 juin 2022, une arthro-IRM et radiographie de la hanche gauche a été réalisée. Les conclusions en étaient les suivantes : remaniements fissuraires du labrum antérieur et supérieur gauche avec une déchirure transfixiante du labrum antérieur entre les rayons de deux et trois heures avec un décollement de la base d'implantation labrale à ce niveau, discrète enthésopathie calcifiante au niveau de l'enthèse proximale du moyen fessier gauche sur la crête iliaque avec un discret œdème intra spongieux en regard, sans déchirure secondaire, et discret foyer d'enthésopathies fissuraires des petits et moyens fessiers en zone d'insertion trochantérienne de façon bilatérale sans déchirure secondaire et sans bursite surajoutée. Les radiographies ont par ailleurs montré des remaniements dégénératifs modérés des articulations coxo-fémorales avec une discrète sclérose des berges articulaires sans pincement articulaire significatif, sans arthrose manifeste.

n. À la demande de l'assurée, la BÂLOISE a sollicité les rapports de consultation de la docteure F______, spécialiste FMH en médecine physique et réadaptation, qu'elle avait consultée. Il en ressort que, le 14 juin 2022, la Dre F______ suspectait une lésion du labrum et une surcharge de la musculature périhanche, justifiant la réalisation d'une arthro-IRM ; les notes de suite de la consultation du 5 juillet 2022 indiquent que cette imagerie a mis en évidence une lésion transfixiante du labrum avec enthésopathie calcifiante du moyen fessier et du tenseur fascia lata.

o. Dans un rapport du 29 août 2022, le Dr D______ a fait valoir que les imageries réalisées en mars et juin 2022 n'avaient pas démontré la présence de lésion structurelle imputable à l'accident, mais en revanche la présence d'un état dégénératif/maladif ou de surcharge chronique, sous forme de remaniements fissuraires du labrum avec déchirure transfixiante, d'une discrète enthésopathie calcifiante de l'enthèse proximale du moyen fessier gauche sur la crête iliaque, sans déchirure secondaire, et d'un discret foyer d'enthésopathies fissuraires des petits et moyens fessiers en zone d'insertion trochantérienne, bilatéral, sans déchirure secondaire. Les éléments objectifs du dossier lui permettaient de dire que l'accident du 17 avril 2021 n'avait pas provoqué de lésion structurelle, et notamment pas de lésion du rachis cervical, du thorax, de l'épaule gauche, de la hanche gauche et du bassin. La cervicarthrose étagée de C4 à C6 était manifestement d'étiologie dégénérative/maladive, tout comme les remaniements fissuraires du labrum avec une déchirure transfixiante, en l'absence de fracture ou de luxation de la hanche gauche susceptible d'engendrer ces pathologies. Il en allait de même des foyers d'enthésopathie. Le raisonnement post hoc ergo propter hoc tenu par l'assurée dans son opposition ne pouvait pas être avalisé. En conclusion, le traumatisme du 17 avril 2021 avait vraisemblablement occasionné un traumatisme crânien simple et des contusions multiples (épaule et coude gauches, thorax, bassin et hanche gauche), sans lésion structurelle, et avait cessé de déployer ses effets au 1er mars 2022.

p. Par décision sur opposition du 9 septembre 2022, la BÂLOISE a rejeté l'opposition de l'assurée et confirmé sa décision du 20 mai 2022, se fondant sur les conclusions du Dr D______, lesquelles étaient claires, motivées et non remises en cause par d'autres éléments médicaux. Le raisonnement post hoc ergo propter hoc ne suffisait pas à admettre un lien causal dans le domaine de l'assurance sociale et ne fondait pas un droit aux prestations de l'assurance-accident.

q. Dans un rapport de consultation orthopédique du 21 septembre 2022, le docteur G______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur qui avait été consulté par l'assurée, a indiqué que l'enthésopathie fissuraire des fessiers mise en avant par les examens radiologiques était probablement plutôt compensatoire. Il pensait par ailleurs que l'origine des douleurs était imputable à l'accident, compte tenu de l'anatomie osseuse de l'assurée. Elle avait effectivement une hanche parfaitement fonctionnelle sans déformation CAM, PINCER ou subspine. S'agissant de la prise en charge, un traitement conservateur devrait suffire avec éventuellement une infiltration.

C. a. Par acte déposé auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) le 18 octobre 2022, l'assurée a interjeté recours contre la décision du 9 septembre 2022, sollicitant le réexamen de son dossier et la reconnaissance d'un lien de causalité entre l'accident et son état de santé dès le 1er mars 2022.

Dans son premier rapport médical, le Dr D______ se concentrait essentiellement sur les lésions cervicales, alors que dans les semaines qui suivaient l'accident, son traitement avaient été principalement axé sur l'épaule et la hanche gauches. Dans son second rapport, le médecin-conseil avait conclu que l'accident n'avait pas causé de lésion structurelle. Or, s'il y avait certes un état dégénératif au niveau de la hanche, inconnu jusqu'alors et révélé par l'accident, la lésion du labrum avait été provoquée par le choc de l'accident. Celui-ci avait par ailleurs aggravé l'état de ses cervicales et révélé une bursopathie. Lors de la consultation du 5 juillet 2021, la Dre F______ l'avait informée qu'il y avait certes un état dégénératif au niveau de la hanche, mais que la lésion du labrum était liée au choc de l'accident. Elle avait ensuite consulté un spécialiste de la hanche, le Dr G______, qui pensait lui aussi que la lésion du labrum était imputable à l'accident et qui envisageait une intervention sous arthroscopie pour le cas où le traitement conservateur ou une infiltration resteraient sans effet. Elle était encore actuellement en arrêt de travail et ses problèmes au niveau de la hanche n'étaient pas encore stabilisés. Les autres membres touchés lors de l'accident restaient fragiles, notamment lors d'activités avec manutention. Elle poursuivait ses exercices de physiothérapie, devait encore respecter des temps de repos durant la journée pour soulager ses douleurs, avait dû arrêter ses activités sportives et avait besoin d'aide dans les tâches domestiques lourdes. Elle avait déposé une demande auprès de l'assurance-invalidité en mai 2022 afin de pouvoir bénéficier de mesures professionnelles, en vue d'obtenir un poste de travail adapté à son état de santé. La recourante a au surplus souligné qu'elle n'avait jamais eu de problèmes à la hanche et à l'épaule avant l'accident, n'ayant qu'occasionnellement des cervicalgies et lombalgies en lien avec la pénibilité de son travail. Elle requérait par ailleurs un délai complémentaire pour fournir des pièces médicales, l'assurance perte de gain maladie ayant notamment mandaté un expert, le docteur H______, spécialiste FMH en rhumatologie.

b. Par mémoire de réponse du 2 décembre 2022, l'intimée a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision entreprise. Tous les médecins concordaient sur les diagnostics, à savoir l'absence de toute lésion d'origine traumatique au niveau de l'épaule et du coude gauches, du thorax, du bassin et des cervicales. En ce qui concernait la hanche gauche, il y avait également un consensus sur le diagnostic, à savoir un remaniement fissuraire du labrum avec une déchirure transfixiante, une discrète enthésopathie calcifiante de l'enthèse proximale du moyen fessier gauche sur la crête iliaque, sans déchirure secondaire, et un discret foyer d'enthésopathie fissuraire des petits et moyens fessiers. Les conclusions du Dr D______, qui retenait que l'atteinte avait une étiologie dégénérative/maladive vu l'absence de fracture ou de luxation de la hanche gauche, étaient convaincantes et sérieusement motivées, au contraire de l'avis du Dr G______, contredit par sa propre constatation de ce que la hanche de la recourante était parfaitement fonctionnelle et sans déformation, et qui se fondait au surplus sur un raisonnement post hoc ergo propter hoc. L'évolution de la capacité de travail de la recourante démontrait par ailleurs que l'accident avait cessé de déployer tout effet le 1er mars 2022 au plus tard, car celle-ci avait retrouvé une pleine capacité de travail durant trois mois et demi, entre le 14 novembre 2021 et le 1er mars 2022. Il apparaissait ainsi, sous l'angle de la vraisemblance prépondérante, que le lien de causalité entre les troubles et l'accident s'était éteint au plus tard le 1er mars 2022, de sorte que c'était à bon droit qu'elle avait mis fin à la prise en charge des prestations à cette date, étant relevé qu'elle avait néanmoins remboursé les séances de physiothérapie effectuées du 2 mars au 20 avril 2022, ainsi que l'échographie de la hanche réalisée le 2 mars 2022.

c. Par réplique du 2 février 2023, la recourante a persisté dans ses conclusions, faisant valoir que depuis le mois de décembre 2022, il y avait eu une très bonne évolution des douleurs présentes sur la face latérale de la cuisse et de la crête iliaque, liées à la tendinite. Il persistait des douleurs au pli de l'aine en lien avec la lésion du labrum ainsi qu'une limitation au niveau de l'épaule gauche avec des douleurs ponctuelles récurrentes. Elle avait réalisé une infiltration de la hanche gauche le 18 novembre 2022 qui avait eu des effets bénéfiques durant trois semaines et avait reconsulté le Dr G______ à fin décembre, celui-ci lui conseillant de poursuivre la physiothérapie avant de se lancer dans une mesure invasive de type arthroscopie. Le rapport du Dr D______ était basé sur l'étude du dossier, sans examen clinique et les lésions du labrum pouvaient aussi être d'origine traumatique, comme l'attestaient les Drs G______, F______ et B______. Les deux premiers médecins précités n'étaient pas ses médecins traitants, mais des spécialistes de leurs domaines travaillant en milieu hospitalier et dont l'objectivité pouvait difficilement être remise en doute, qu'elle avait consultés à la demande du Dr B______. L'intimée voyait une contradiction dans le fait que le Dr G______ retenait que sa hanche gauche était parfaitement fonctionnelle et sans déformation, alors que ceci permettait au contraire d'expliquer que la lésion du labrum n'était pas liée à un problème antérieur de malformation ou de dysfonctionnement de ce membre. Quant à sa reprise de travail à plein temps depuis le 14 novembre 2021 (dans les faits dès le 21 novembre 2021, dans la mesure où elle avait pris une semaine de vacances), elle s'expliquait par le fait qu'elle avait donné la priorité à son engagement dans son travail vu le souhait de son employeuse, et non pas par une prétendue absence de causalité depuis le 1er mars 2022. La recourante a par ailleurs fait savoir que ses médecins restaient à disposition pour tout renseignement complémentaire, proposé la réalisation d'une expertise judiciaire et produit de nouvelles pièces, soit notamment :

-       Rapport du Dr G______ du 26 décembre 2022 expliquant que l'infiltration avait eu des effets bénéfiques pendant quelques semaines, mais que des douleurs assez importantes au niveau de l'aine étaient désormais réapparues. Au niveau des fessiers, il y avait clairement une tendinite, mais les douleurs avaient bien diminué avec la physiothérapie. L'examen clinique et les douleurs confirmaient les résultats des examens radiologiques. Le traitement de physiothérapie devait être poursuivi avant de se lancer dans une procédure invasive de type arthroscopie.

-       Rapport du Dr G______ du 17 janvier 2023 faisant état de ce que la désinsertion labrale, les lésions au niveau des tendons fessiers ainsi que les calcifications mises en évidence par l'arthro-IRM pouvaient être reliées à un état maladif antérieur, mais qu'une nouvelle composante post-traumatique s'était rajoutée et avait déclenché les symptômes, auparavant absents. L'accident de la voie publique s'était caractérisé par une percussion latérale, notamment au niveau de la hanche gauche de la recourante.

-       Rapport du Dr B______ du 24 janvier 2023 mentionnant que la recourante s'était plainte de douleurs touchant le côté gauche de son corps suite à l'accident. Les investigations menées avaient mis en évidence des lésions au niveau des tendons fessiers, et surtout une lésion avec désinsertion du labrum. Il s'agissait d'une lésion post-traumatique qui pouvait expliquer la symptomatologie de la recourante. Malgré les différentes thérapies (physiothérapie, infiltration), les douleurs au niveau de la hanche gauche persistaient et la recourante était toujours en cours de traitement. Au niveau professionnel, à la demande de cette dernière, un retour au travail avait été tenté, qui s'était avéré non concluant en raison de la recrudescence des douleurs, surtout au niveau du membre inférieur et lors des tâches physiques en charge.

-       Rapport de Monsieur I______, physiothérapeute, du 25 janvier 2023 expliquant la prise en charge et mentionnant que les symptômes de la tendinopathie glutéale avaient disparu et que les paramètres de mobilité étaient favorables, au contraire de la région du pli de l'aine, où des symptômes restaient présents de manière récurrente et influençaient encore les loisirs de la recourante et la reprise de son activité professionnelle. L'épaule gauche restait limitée fonctionnellement et présentait encore des douleurs ponctuelles récurrentes.

-       Un certificat du docteur J______, médecin en France, attestant de ce qu'il avait suivi médicalement la recourante depuis plusieurs dizaines d'années, au moins jusqu'en novembre 2020, et de ce qu'elle n'avait jamais présenté la moindre pathologie ou gêne fonctionnelle de hanche, ni de pathologie tendineuse ou osseuse au niveau de la coiffe.

d. Par duplique du 28 février 2023, l'intimée a persisté dans ses conclusions et produit un rapport du 27 février 2023 de son médecin-conseil, le docteur K______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, aux termes duquel le bilan avait mis en évidence au niveau de la hanche gauche des lésions dégénératives, préexistantes, inconnues jusqu'alors, de tendinopathie et d'enthésopathie qui étaient en faveur d'un processus d'usure articulaire. Au niveau du labrum, l'IRM relevait un état maladif préexistant avec surcharge chronique, remaniement et déchirure transfixiante. Une pathologie constitutionnelle osseuse de type CAM ou PINCER qui aurait pu provoquer une usure prématurée du labrum était en effet absente, mais l'aspect fibrillaire de celui-ci plaidait en faveur d'une usure articulaire mécanique qui avait pu s'aggraver progressivement et provoquer une déchirure plus importante. En effet, la déchirure complète du labrum se voyait dans les lésions de luxation de la hanche, ce qui n'était pas du tout le cas en l'espèce. Comme le confirmait le Dr G______, il existait un état dégénératif qui avait pu être déstabilisé par l'accident, mais celui-ci n'avait probablement pas créé de nouvelles lésions traumatiques. Au vu des rapports du Dr G______, on pouvait conclure que l'évènement avait déstabilisé de façon temporaire un état antérieur et le statu quo sine était atteint quatre mois après cet évènement, soit le 17 août 2021. Les troubles persistant au-delà étaient en rapport avec l'état préexistant. L'intimée a encore fait valoir que dans son nouveau rapport du 17 janvier 2023, le Dr G______ fondait à nouveau son appréciation sur un raisonnement post hoc ergo propter hoc et qu'il ne décrivait pas la nouvelle composante post-traumatique qui aurait déclenché des symptômes. Quant aux appréciations du Dr B______, elles n'étaient nullement motivées au regard de l'état dégénératif antérieur finalement retenu par le Dr G______. En définitive, les rapports des Drs D______ et K______, parfaitement documentés et motivés, permettaient d'établir l'absence de lien de causalité naturelle et adéquate entre les troubles et l'accident, postérieurement au 1er mars 2022.

e. Le 13 juin 2023, la recourante a déposé des nouvelles pièces et indiqué qu'elle allait prochainement être licenciée. Il ressort des documents transmis que l'assurance perte de gain maladie a mis fin au versement des indemnités journalières au 31 mai 2023, le Dr H______ ayant jugé que la recourante était apte à travailler dans une activité adaptée depuis le 28 septembre 2022, l'activité habituelle d'infirmière n'étant plus possible en raison de l'atteinte dégénérative cervicale. À la suite d'un rapport du Dr B______ du 1er mars 2023, l'assurance perte de gain maladie a admis d'inclure la coxalgie gauche aux limitations fonctionnelles retenues, cela ne modifiant toutefois pas la capacité de travail de la recourante dans une activité adaptée et la fin des prestations au 31 mai 2023.

f. Le 26 juin 2023, l'intimée a persisté dans ses conclusions et souligné que la nouvelle documentation médicale produite était irrelevante s'agissant de la question de la causalité naturelle.

g. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence matérielle pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 La compétence ratione loci de la chambre de céans est également donnée compte tenu du domicile à Genève de l'IMAD, dernier employeur de la recourante, domiciliée en France (art. 58 al. 2 LPGA).

2.             À teneur de l’art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’assurance-accidents, à moins que la loi n’y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2017 est entrée en vigueur la modification du 25 septembre 2015 de la LAA. Dans la mesure où l'accident est survenu après cette date, le droit de la recourante aux prestations d'assurance est soumis au nouveau droit (cf. dispositions transitoires relatives à la modification du 25 septembre 2015 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_662/2016 du 23 mai 2017 consid. 2.2). Les dispositions légales seront citées ci-après dans leur teneur en vigueur au 1er janvier 2017.

4.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 et 60 LPGA ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme (art. 61 let. b LPGA) et le délai prévus par la loi au vu de la notification de la décision querellée le 19 septembre 2022, le recours est recevable.

5.             Le litige porte sur le droit aux prestations de la recourante postérieurement au 1er mars 2022, singulièrement sur la question de savoir si c'est à juste titre que l'intimée a nié l'existence d'un lien de causalité entre l'accident et les atteintes à la santé de la recourante à compter de cette date.

6.              

6.1 Aux termes de l'art. 6 al. 1 LAA, l'assureur-accidents verse des prestations à l'assuré en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle.

Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA ; ATF 142 V 219 consid. 4.3.1 ; 129 V 402 consid. 2.1).

6.2 Les prestations que l'assureur-accidents doit cas échéant prendre en charge comprennent le traitement médical approprié des lésions résultant de l'accident (art. 10 al. 1 LAA), les indemnités journalières en cas d'incapacité de travail partielle ou totale consécutive à l'accident (art. 16 LAA), la rente en cas d'invalidité de 10% au moins à la suite d'un accident (art. 18 al. 1 LAA), ainsi qu'une indemnité pour atteinte à l'intégrité si l'assuré souffre par la suite de l'accident d'une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique (art. 24 al. 1 LAA).

6.3 L’art. 6 al. 2 LAA, dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2017, contient une liste de lésions corporelles pour lesquelles l’assurance verse également des prestations, pour autant qu’elles ne soient pas dues de manière prépondérante à l’usure ou à une maladie.

6.4 En l’espèce, l’intimée ne conteste à juste titre pas que l'évènement du 17 avril 2021 constitue un accident. Dans un tel cas, le droit aux prestations s’analyse exclusivement en vertu de l’art. 6 al. 1 LAA, même si l’atteinte causée par l’accident est une lésion corporelle énumérée à l’art. 6 al. 2 LAA (arrêt du Tribunal fédéral 8C_520/2020 du 3 mai 2021 consid. 5.1 et les références). La question de savoir si les lésions de la recourante correspondent à une lésion de la liste de l’art. 6 al. 2 LAA n’est donc pas déterminante. On peut néanmoins souligner que le Tribunal fédéral a exclu qu’une déchirure du labrum relève d’une telle lésion, qualifiée de lésion assimilée sous l’ancien droit (art. 9 de l’ordonnance sur l'assurance-accidents du 20 décembre 1982 [OLAA – RS 832.202] dans sa teneur jusqu’au 31 décembre 2016) (arrêt du Tribunal fédéral 8C_118/2011 du 9 novembre 2011 consid. 4).

7.              

7.1 La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 119 V 335 consid. 1 ; 118 V 286 consid. 1b et les références) et adéquate avec l’événement assuré (ATF 125 V 456 consid. 5a et les références).

Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette condition est réalisée lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé : il suffit qu'associé éventuellement à d'autres facteurs, il ait provoqué l'atteinte à la santé, c'est-à-dire qu'il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte (ATF 142 V 435 consid. 1).

Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1 ; 119 V 335 consid. 1 et 118 V 286 consid. 1b et les références).

Le fait que des symptômes douloureux ne se sont manifestés qu'après la survenance d'un accident ne suffit pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident (raisonnement « post hoc, ergo propter hoc » ; ATF 119 V 335 consid. 2b/bb ; RAMA 1999 n° U 341 p. 408 consid. 3b). Il convient en principe d'en rechercher l'étiologie et de vérifier, sur cette base, l'existence du rapport de causalité avec l'événement assuré.

7.2 En vertu de l'art. 36 al. 1 LAA, les prestations pour soins, les remboursements de frais ainsi que les indemnités journalières et les allocations pour impotent ne sont pas réduits lorsque l'atteinte à la santé n'est que partiellement imputable à l'accident. Lorsqu'un état maladif préexistant est aggravé ou, de manière générale, apparaît consécutivement à un accident, le devoir de l'assurance-accidents d'allouer des prestations cesse si l'accident ne constitue pas la cause naturelle (et adéquate) du dommage, soit lorsque ce dernier résulte exclusivement de causes étrangères à l'accident. Tel est le cas lorsque l'état de santé de l'intéressé est similaire à celui qui existait immédiatement avant l'accident (statu quo ante) ou à celui qui existerait même sans l'accident par suite d'un développement ordinaire (statu quo sine). A contrario, aussi longtemps que le statu quo sine vel ante n'est pas rétabli, l'assureur-accidents doit prendre à sa charge le traitement de l'état maladif préexistant, dans la mesure où il s'est manifesté à l'occasion de l'accident ou a été aggravé par ce dernier (ATF 146 V 51 consid. 5.1 et les références). En principe, on examinera si l'atteinte à la santé est encore imputable à l'accident ou ne l'est plus (statu quo ante ou statu quo sine) sur le critère de la vraisemblance prépondérante, usuel en matière de preuve dans le domaine des assurances sociales (ATF 129 V 177 consid. 3.1 et les références), étant précisé que le fardeau de la preuve de la disparition du lien de causalité appartient à la partie qui invoque la suppression du droit (ATF 146 V 51 précité consid. 5.1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_606/2021 du 5 juillet 2022 consid. 3.2).

8.             La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l'accident, l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité physique ou mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical. Or, pour pouvoir établir le droit de l'assuré à des prestations, l'administration ou le juge a besoin de documents que le médecin doit lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1).

9.              

9.1 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1b ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux (ATF 125 V 351 consid. 3b).

9.2 Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Lorsqu'un cas d'assurance est réglé sans avoir recours à une expertise dans une procédure au sens de l'art. 44 LPGA, l'appréciation des preuves est soumise à des exigences sévères : s'il existe un doute même minime sur la fiabilité et la validité des constatations d'un médecin de l'assurance, il y a lieu de procéder à des investigations complémentaires (ATF 145 V 97 consid. 8.5 et les références ; 142 V 58 consid. 5.1 et les références ; 139 V 225 consid. 5.2 et les références ; 135 V 465 consid. 4.4 et les références). En effet, si la jurisprudence a reconnu la valeur probante des rapports médicaux des médecins-conseils, elle a souligné qu'ils n'avaient pas la même force probante qu'une expertise judiciaire ou une expertise mise en œuvre par un assureur social dans une procédure selon l'art. 44 LPGA (ATF 135 V 465 consid. 4.4 et les références).

Dans une procédure portant sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurances sociales, lorsqu'une décision administrative s'appuie exclusivement sur l'appréciation d'un médecin interne à l'assureur social et que l'avis d'un médecin traitant ou d'un expert privé auquel on peut également attribuer un caractère probant laisse subsister des doutes même faibles quant à la fiabilité et la pertinence de cette appréciation, la cause ne saurait être tranchée en se fondant sur l'un ou sur l'autre de ces avis et il y a lieu de mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l'art. 44 LPGA ou une expertise judiciaire (ATF 139 V 225 consid. 5.2 et les références ; 135 V 465 consid. 4).

9.3 Une appréciation médicale, respectivement une expertise médicale établie sur la base d'un dossier n’est pas en soi sans valeur probante. Une expertise médicale établie sur la base d'un dossier peut avoir valeur probante pour autant que celui-ci contienne suffisamment d'appréciations médicales qui, elles, se fondent sur un examen personnel de l'assuré (RAMA 2001 n° U 438 p. 346 consid. 3d). L’importance de l’examen personnel de l’assuré par l’expert n’est reléguée au second plan que lorsqu’il s’agit, pour l’essentiel, de porter un jugement sur des éléments d’ordre médical déjà établis et que des investigations médicales nouvelles s’avèrent superflues. En pareil cas, une expertise médicale effectuée uniquement sur la base d’un dossier peut se voir reconnaître une pleine valeur probante (arrêt du Tribunal fédéral 8C_681/2011 du 27 juin 2012 consid. 4.1 et les références).

9.4 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

10.         La procédure dans le domaine des assurances sociales est régie par le principe inquisitoire d'après lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par l'assureur (art. 43 al. 1 LPGA) ou, éventuellement, par le juge (art. 61 let. c LPGA). Ce principe n'est cependant pas absolu. Sa portée peut être restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation de ces dernières d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 ; VSI 1994, p. 220 consid. 4). Si le principe inquisitoire dispense les parties de l'obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve, dans la mesure où, en cas d'absence de preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en supporter les conséquences, sauf si l'impossibilité de prouver un fait peut être imputée à la partie adverse. Cette règle ne s'applique toutefois que s'il se révèle impossible, dans le cadre de la maxime inquisitoire et en application du principe de la libre appréciation des preuves, d'établir un état de fait qui correspond, au degré de la vraisemblance prépondérante, à la réalité (ATF 139 V 176 consid. 5.2 et les références).

Dans le contexte de la suppression du droit à des prestations d'assurance sociales, le fardeau de la preuve incombe en principe à l'assureur-accidents (cf. ATF 146 V 51 consid. 5.1 et les références). Cette règle selon laquelle le fardeau de la preuve appartient à la partie qui invoque la suppression du droit entre seulement en considération s'il n'est pas possible, dans le cadre du principe inquisitoire, d'établir sur la base d'une appréciation des preuves un état de fait qui au degré de vraisemblance prépondérante corresponde à la réalité (ATF 117 V 261 consid. 3b et les références). La preuve de la disparition du lien de causalité naturelle ne doit pas être apportée par la preuve de facteurs étrangers à l'accident. Il est encore moins question d'exiger de l'assureur-accidents la preuve négative, qu'aucune atteinte à la santé ne subsiste plus ou que la personne assurée est dorénavant en parfaite santé (arrêt du Tribunal fédéral 8C_441/2017 du 6 juin 2018 consid. 3.3). À cet égard, est seul décisif le point de savoir si, au degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 146 V 271 consid. 4.4), les causes accidentelles d'une atteinte à la santé ne jouent plus aucun rôle, ne serait-ce même que partiel (cf. ATF 142 V 435 consid. 1), et doivent ainsi être considérées comme ayant disparu (arrêt du Tribunal fédéral 8C_343/2022 du 11 octobre 2022 consid. 3.2 et les références).

11.         Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, les autorités administratives et les juges des assurances sociales doivent procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raison pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Ils ne peuvent ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, ils doivent mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 283 consid. 4a ; RAMA 1985 p. 240 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3).

12.          

12.1 En l'espèce, l'intimée s'est fondée sur l'avis de son médecin-conseil, le Dr D______, pour nier l'existence d'un lien de causalité entre l'accident et les troubles de la recourante dès le 1er mars 2022 et a produit, en cours de procédure, un avis du Dr K______ allant également dans ce sens concernant la hanche gauche de la recourante. Quant à cette dernière, elle s'appuie sur l'appréciation de ses médecins traitants pour affirmer qu'un tel lien est donné, essentiellement en ce qui concerne la déchirure transfixiante du labrum.

12.2 S'agissant des rapports du Dr D______, la chambre de céans observe qu'ils sont peu informatifs : le rapport du 3 mai 2022 est très succinct, ses conclusions ne sont pas motivées et il n'est également pas clair de savoir si le médecin-conseil se prononce uniquement sur les cervicalgies de la recourante ou sur l'ensemble de ses atteintes, seuls les troubles dégénératifs cervicaux étant mentionnés à titre d'état maladif préexistant ; quant au rapport du 29 août 2022, s'il est certes un peu plus détaillé, il consiste pour l'essentiel en un résumé des pièces au dossier et en l'affirmation que les atteintes à la santé sont des pathologies dégénératives/maladives. De plus, ces rapports ont été établis avant que le Dr G______ ne se prononce. Ils ne discutent en conséquence pas de la position de ce dernier. Or, les deux médecins tirent des conclusions divergentes des examens menés puisque, pour le médecin-conseil, ceux-ci établissent l'absence de causalité entre l'accident et les atteintes à la santé, tandis que l'orthopédiste traitant estime que la désinsertion labrale, les lésions des tendons fessiers et les calcifications constatées sur l'imagerie résultent d'une composante post-traumatique s'étant rajoutée à l'état dégénératif antérieur, et ayant déclenché les symptômes. En outre, alors que le Dr G______ estime que l'absence de déformation osseuse de la hanche gauche est un signe plaidant en faveur de l'origine traumatique des lésions, le médecin-conseil soutient au contraire qu'en l'absence de fracture ou de luxation de la hanche, seule une étiologie maladive est susceptible d'engendrer de telles pathologies.

Concernant le rapport du Dr K______ du 27 février 2023, il n'apparaît pas que ce médecin aurait directement pris connaissance du certificat du Dr G______ du 17 janvier 2023, puisqu'il ne cite pas ce document dans les pièces consultées, mais uniquement l'écriture de la recourante du 2 mars 2023 qui s'y réfère. Contrairement à l'avis du Dr D______, le Dr K______ admet par ailleurs que l'accident du 17 avril 2021 a déstabilisé un état maladif préexistant, mais fixe le statu quo sine à quatre mois, soit au 17 août 2021. Cependant, le médecin-conseil ne donne aucune motivation qui permettrait de comprendre comment une telle durée a été fixée. S'il va par ailleurs dans le sens de l'orthopédiste traitant en ce qui concerne l'absence de pathologie constitutionnelle osseuse qui aurait pu provoquer une usure prématurée du labrum, il retient néanmoins que l'aspect fibrillaire de celui-ci soutient la thèse d'une usure articulaire mécanique ayant pu s'aggraver progressivement et provoquer une déchirure plus importante.

Quant au Dr G______, ses rapports sont eux aussi relativement succincts et peu motivés. Par ailleurs, dans son rapport du 21 septembre 2022, le médecin semblait imputer les douleurs de hanche de la recourante exclusivement à l'accident (y compris, par compensation, l'enthésopathie fissuraire des fessiers), alors que dans celui du 17 janvier 2023 il admet la présence d'un état dégénératif antérieur, qui aurait été décompensé par l'accident. L'orthopédiste traitant ne spécifie cependant pas si le statu quo sine vel ante a été atteint, respectivement à quelle date, mais requiert une nouvelle évaluation de la décision de l'intimée.

Les avis du Dr B______, outre qu'ils ne proviennent pas d'un spécialiste, se bornent par ailleurs eux aussi à affirmer que l'accident est la cause des atteintes à la santé de la recourante, sans motivation et sur la base d'un raisonnement post hoc, ergo propter hoc insuffisant à démontrer l'existence d'un lien de causalité. Quant aux rapports de consultation de la Dre F______, ils n'abordent pas la question litigieuse, bien que, d'après la recourante, cette médecin se serait oralement prononcée en faveur de l'admission d'un tel lien dans le cas présent.

12.3 Au vu des pièces médicales au dossier, la chambre de céans se trouve dans l'impossibilité de se déterminer sur les points litigieux de la cause. Il n'est pas clair de savoir si l'étiologie des lésions de la hanche – singulièrement de la déchirure du labrum – est dégénérative ou traumatique, étant précisé que, quand bien même les atteintes seraient d'origine maladive, il serait nécessaire de savoir si l’accident du 17 avril 2021 a, au degré de la vraisemblance prépondérante, provoqué une aggravation de l’état antérieur et, dans l’affirmative, jusqu'à quelle date (pour un cas où le Tribunal fédéral a renvoyé la cause à l'assurance-accident pour mise en œuvre d'une expertise indépendante sur la question de la causalité dans le cas d'une atteinte au labrum, voir par exemple l'arrêt 8C_423/2012 du 26 février 2013). À cet égard, il sera en effet rappelé que tant que le statu quo sine vel ante n'est pas atteint, l'assureur-accidents est tenu de verser des prestations et qu'il lui appartient de prouver la disparition du lien de causalité, à tout le moins sous l'angle de la vraisemblance prépondérante (cf. consid. 5.2 et 7 ci-dessus). Or, en l'occurrence, le Dr K______ affirme qu'après quatre mois le statu quo sine a été atteint, sans toutefois motiver son propos. Cette appréciation est par ailleurs contestée par le Dr G______ qui, encore en janvier 2023, requérait une nouvelle évaluation de la décision de l'intimée.

Il s'agit par ailleurs de rappeler que, selon la jurisprudence, des doutes minimes quant à la fiabilité et à la validité des constatations d'un médecin de l'assurance doivent conduire à procéder à d'autres investigations complémentaires et à mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant (cf. consid. 6.3 ci-dessus). Si le fait que la recourante n'ait pas été examinée par les médecins-conseils ne rendent pas leurs rapports dénués de force probante pour ce motif, la question litigieuse portant exclusivement sur le lien de causalité et non la détermination des diagnostics ou l'évaluation de la capacité de travail, il n'en demeure pas moins que ces rapports – en eux-mêmes peu motivés – sont mis en doute de façon suffisante par les prises de position du Dr G______.

L'assertion du Dr D______ selon laquelle les atteintes à la santé ne sont pas en relation de causalité avec l'accident car celui-ci n'a pas causé de lésions structurelles contrevient en outre à la jurisprudence, qui souligne que l'obligation de prester de l'assurance-accidents existe aussi lorsque l'accident n'est qu'une cause partielle de l'atteinte et qu'il n'est pas nécessaire que celui-ci entraîne directement une lésion structurelle (par exemple en cas de sursollicitation d'un membre sain, cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_302/2023 du 16 novembre 2023 consid. 6.4.1 et 6.4.2).

12.4 La chambre de céans constate par ailleurs que l'instruction menée par l'intimée est lacunaire. Il est en particulier surprenant que celle-ci n'ait jamais soumis de questions spécifiques aux médecins traitants de la recourante concernant la problématique précise du lien de causalité entre l'accident et les diverses affections dont elle souffre. Ce n'est par ailleurs qu'à la demande réitérée de la recourante que les rapports de consultation de la Dre F______ lui ont été envoyés. Dans la mesure où ceux-ci consistaient en des simples notes de suite qui ne se prononçaient pas sur le point litigieux, il appartenait à l'intimée d'interroger spécifiquement cette spécialiste, ce d'autant plus que le Dr C______ avait déjà relevé le manque de documentation pour se prononcer sur le statu quo ante/sine et que l'arthro-IRM réalisée ultérieurement n'avait pas délivré des conclusions univoques à ce propos.

Au vu des manquements dans l'instruction de la cause, celle-ci sera renvoyée à l'intimée afin qu'elle mandate un expert orthopédiste indépendant, dans le respect des prescriptions de l'art. 44 LPGA, ce dernier devant se prononcer sur l'existence d'un lien de causalité entre l'accident du 17 avril 2021 et les atteintes à la santé de la recourante à partir du 1er mars 2022. Bien que les pièces au dossier soulèvent des doutes quant aux conclusions de l'intimée pour ce qui a trait à la hanche gauche de la recourante, par souci d'exhaustivité, l'expert devra se prononcer sur l'ensemble des pathologies de la recourante (épaule et côtes gauches, bassin et cervicales, en sus de la hanche gauche). Dans l'hypothèse où l'expert venait à conclure à une origine maladive des affections, il lui reviendrait d'analyser la question du statu quo sine vel ante, et de déterminer précisément si, et depuis quand, l'accident n'est plus une cause (même partielle) du dommage.

Si les conclusions de l'expert venaient à admettre que les troubles de la recourante postérieurs au 1er mars 2022 étaient encore en lien de causalité avec l'accident, l'intimée devrait ensuite reprendre l'instruction du cas pour se prononcer sur les diverses prétentions découlant de l'assurance-accidents.

13.         Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis et la décision du 9 septembre 2022 sera annulée, la cause étant renvoyée à l'intimée pour instruction complémentaire et nouvelle décision.

Il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure à la recourante qui n'était pas représentée et n’a pas fait valoir de frais engendrés par la procédure (art. 61 let. g LPGA).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision de l'intimée du 9 septembre 2022.

4.        Lui renvoie la cause pour instruction complémentaire et nouvelle décision dans le sens des considérants.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière :

 

 

 

 

Nathalie KOMAISKI

 

La présidente :

 

 

 

 

Marine WYSSENBACH

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le