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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2723/2022

ATAS/824/2023 du 26.10.2023 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2723/2022 ATAS/824/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 12 octobre 2023

Chambre 3

 

En la cause

Monsieur A______
représenté par l’Association suisse des assurés (ASSUAS), mandataire

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né en 1990, marié et père de deux enfants, travaillait en tant qu’ouvrier agricole depuis janvier 2017, lorsqu’il a été victime d’un accident, le 13 novembre 2019 : il s’est fait happer le bras droit par un rouleau qui servait à réaliser des serres, ce qui lui a occasionné une fracture diaphysaire, une fracture de l’humérus, de l’ulna et du radius à droite.

b. Le 17 juin 2020, l’assuré a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI).

c. L’instruction menée par l’OAI a permis de recueillir, notamment :

-          un compte rendu opératoire rédigé le 19 novembre 2019 par les docteurs B______ et C______, du service de chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil moteur des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), retenant les diagnostics de fracture diaphysaire oblique de l’humérus, fracture diaphysaire distale oblique de l’ulna et fracture diaphysaire distale du radius à droite ;

-          un rapport du 28 mai 2020 de la docteure D______, spécialiste FMH en neurologie, après un examen clinique et neurologique et une électroneuromyographie (ci-après : ENMG), indiquant des résultats quasi normaux s’agissant de la neurographie sensitive du nerf médian droit, hormis un discret ralentissement de la vitesse de conduction sensitive du nerf médian dans le tunnel carpien de moins de 10%, à la limite du significatif, et un allongement discret de la latence distale motrice du nerf médian droit, sans signe de dénervation active ou chronique ; ces résultats parlaient en faveur d’une discrète neuropathie focale du nerf médian droit dans le tunnel carpien ; le médecin évoque également une légère perte axonale des fibres motrices du nerf radial droit destiné à l’extenseur propre de l’index et des paresthésies à droite ;

-          un rapport du 25 juin 2020 du docteur E______, concluant à une ténosynovite de l’extensor carpi ulnaris droit sur frottement avec matériel, avec, comme diagnostic secondaire, un syndrome du tunnel carpien à droite et une ténosynovite des tendons fléchisseurs des doigts longs à droite sur frottement avec matériel, et proposant de planifier une intervention ;

-          un rapport du centre médical de Chêne-Bourg d’octobre 2020 concluant à une pleine capacité de travail, tout en renvoyant à l’avis de la Dre B______ ; il y est fait mention d’une faiblesse du membre supérieur droit résiduelle et de douleurs dans l’épaule et le biceps droits ; il est préconisé d’éviter le port de charges et le travail de force ;

-          un rapport de la Dre B______ du 24 octobre 2020 rappelant que l’assuré a été victime d’un important traumatisme du membre supérieur droit ayant nécessité une ostéosynthèse par plaques, qu’il a bénéficié d’une physiothérapie avec reprise de la mobilisation complète et indolore en décharge, mais algique au moindre effort en regard de l’épaule et de l’avant-bras ; le décours post-opératoire a montré le développement d’un syndrome du tunnel carpien à droite, ne nécessitant pas encore de prise en charge chirurgicale, ainsi qu’une ténosynovite des tendons fléchisseurs des doigts longs à droite, sur conflit avec la plaque cubitale, ayant justifié l’ablation de la plaque en avance, après un contrôle ayant confirmé la consolidation complète ; suite à l’ablation de la plaque cubitale, la plainte principale du patient est demeurée la douleur au moindre effort en regard de l’épaule et de l’avant-bras droits, raison pour laquelle il a été maintenu en arrêt de travail à 100%, puisqu’il travaille comme agriculteur et ne se sent pas prêt à reprendre le travail, vu sa très faible résistance à l’effort ; dans ce contexte, le médecin préconisait une reconversion dans un métier ne nécessitant pas de port de charges prolongé ou la reprise du travail habituel à un pourcentage réduit ;

-          un rapport du docteur F______ du 10 février 2021, concluant à une lésion du nerf cutané antérobrachial latéral au bras droit, un syndrome du tunnel carpien droit et un status post-fracture de l’humérus radius et l’ulna droits ; le patient bénéficiait d’une rééducation sensitive en ergothérapie s’agissant du nerf cutané antérobrachial latéral ; il se plaignait d’un manque de force global du membre supérieur droit – probablement en lien avec le status post-ostéosynthèse –, mais aussi de douleurs neuropathiques du membre supérieur droit, avec des dysesthésies dans le territoire du nerf cutané antérobrachial latéral et au niveau de la branche cutanée palmaire du nerf médian ; l’évolution clinique stagnait depuis décembre 2020 ; l’ablation de la plaque avait permis une amélioration des symptômes et une diminution de l’irritation du tendon, mais le patient continuait à se plaindre ; il ne présentait pas de douleurs au repos, mais souffrait en revanche au moindre appui sur le bras ou percussion en regard du biceps ou à l’avant‑bras et se plaignait de dysesthésies dans le membre supérieur droit ; l’utilisation de machines vibrantes provoquait les mêmes symptômes ; une reprise professionnelle à temps plein ne semblait pas possible, car elle exposerait le patient à des ports répétitifs de charges lourdes et à l’utilisation d’outils vibrants ; en revanche, il pourrait exercer à 100% une activité adaptée.

d. Ces pièces ont été soumises au service médical régional de l’OAI (ci-après : SMR) qui, en date du 11 août 2021, a noté la consolidation complète des fractures du bras et de l’avant-bras droits, ainsi que l’absence de surinfection, de syndromes douloureux régionaux complexes et de douleurs au repos.

Le SMR a relevé une contradiction dans le rapport du Dr F______, lequel faisait état à la fois de l’absence de douleurs neurogènes et de la présence de douleurs neuropathiques.

Compte tenu de la lourdeur de l’activité habituelle manuelle exercée, le SMR a admis une totale incapacité de l’assuré à l’exercer.

En revanche, il a considéré que l’intéressé avait recouvré, dès février 2021, une capacité de travail entière dans une activité adaptée respectant les limitations fonctionnelles engendrées par l’atteinte à la santé incapacitante, c'est-à-dire permettant d’éviter les levage et port de charges, le maniement d’appareils entraînant des vibrations, le travail de force, les mouvements de rotation répétitifs et astreignants (tournevis, par exemple).

e. Par décision du 21 mars 2022, l’assureur-accidents a nié à l’assuré le droit à une rente d’invalidité, mais lui a reconnu le droit à une indemnité pour atteinte à l’intégrité de 10%.

En effet, l’assureur-accidents a considéré que l’assuré pourrait, malgré l’atteinte à sa santé, exercer une activité simple à 100% dans l’industrie légère, par exemple, le montage, le contrôle ou la surveillance d’un processus de production, comme ouvrier à l’établi, ouvrier dans le conditionnement qui lui permettrait de réaliser un revenu de CHF 67'368.- qui, comparé à celui de CHF 41'214.- réalisé en tant qu’ouvrier agricole n’entraînait aucune perte de gain. En revanche, une atteinte à l’intégrité d’une valeur de 10% lui a été reconnue.

f. Par décision du 27 juin 2022, l’OAI a quant à lui reconnu à l’assuré le droit à une rente d’invalidité à compter du 1er décembre 2020 et jusqu’au 31 mai 2021.

L’OAI a admis une totale incapacité de travail à compter du 13 novembre 2019, tout en relevant que, puisque la demande de prestations n’avait été déposée qu’en date du 17 juin 2020, la rente ne pouvait être versée qu’à partir du 1er décembre 2020.

Pour le surplus, l’OAI a considéré que l’état de santé de l’assuré s’était amélioré dès février 2021, date à partir de laquelle il avait recouvré une pleine capacité de travail « dans toute activité » (recte : dans une activité adaptée).

B. a. Par écriture du 29 août 2022, l’assuré a interjeté recours contre cette décision en concluant à ce qu’une rente lui soit accordée au-delà de mars 2021 (recte : 31 mai 2021).

L’assuré fait valoir en substance qu’il est incapable de reprendre la moindre activité lucrative, car il souffre de « lourdes atteintes à sa santé » (…) « toujours en état d’évolution » (sic). Il conteste toute amélioration en février 2021, alléguant que si l’intimé avait poursuivi l’instruction médicale de son dossier, il aurait pu constater que son état de santé était resté instable et qu’il souffrait également d’une tendinopathie de la coiffe supérieure, ainsi que d’une fissure labrale du tendon du sus-épineux. Pour le surplus, il fait remarquer que le Dr F______, chef de clinique au département de chirurgie des HUG, sur le rapport duquel s’est fondé l’OAI pour admettre une amélioration de son état, n’indiquait aucune date de reprise du travail, pas plus qu’il ne mentionnait la liste des limitations fonctionnelles.

À l’appui de sa position, le recourant a produit, notamment :

-          un rapport du 27 août 2020 du docteur G______, du service de chirurgie orthopédique et traumatologie de l’appareil moteur des HUG, concluant à une ténosynovite de l’extensor carpiulnéris droit, à un syndrome du tunnel carpien droit et à une ténosynovite des tendons fléchisseurs des doigts longs à droite, à une évolution lentement favorable au niveau de l’équipe de chirurgie de la main et indiquant que l’atteinte des épaules limitait la quasi-totalité des activités, compte tenu de la « non-possibilité d’utilisation des deux membres supérieurs » (sic) ;

-          un rapport du 14 avril 2022, du docteur H______, du département de chirurgie des HUG, indiquant avoir examiné l’assuré à la consultation spécialisée de l’épaule et se référant à une imagerie par résonance magnétique (ci-après : IRM) réalisée le 5 avril 2022 ayant mis en évidence une tendinopathie interstitielle de la coiffe supérieure sans lésion transfixiante et une lésion SLAP 1, sans indice de tendinopathie sub-luxiante du long chef du biceps ; le médecin préconisait, dans un premier temps, un traitement conservateur avec infiltration et des séances de physiothérapie ciblées pour reconditionner l’épaule.

b. Invité à se déterminer, l’intimé, par écritures des 27 septembre et 20 octobre 2022, a demandé à ce que l’assuré produise toutes les pièces en lien avec l’atteinte à l’épaule alléguée, notamment le rapport médical du 14 avril 2022 faisant référence à une consultation antérieure, ainsi qu’à une consultation subséquente devant avoir lieu en août aux HUG.

L’intimé a souligné qu’en l’absence de pièces documentant la nouvelle atteinte alléguée, il lui était difficile de se prononcer sur l’influence de celle-ci sur la capacité de travail. Il a toutefois rappelé que des limitations fonctionnelles d’épargne du membre supérieur avaient d’ores et déjà été admises, suite à l’accident. La nouvelle atteinte étant manifestement liée au même événement, des éléments cliniques précis étaient nécessaires afin de déterminer les limitations fonctionnelles et la capacité de travail.

c. Le 20 octobre 2022, le recourant a produit quatre rapports de consultation :

-          un rapport du 25 mars 2022 faisant état du fait que l’assuré avait développé des douleurs au niveau de l’épaule droite ;

-          un rapport du 14 avril 2022, relatant que l’IRM effectuée le 5 avril 2022 mettait en évidence une tendinopathie interstitielle de la coiffe supérieure sans lésion transfixiante et une lésion SLAP 1 ;

-          un rapport du 24 juin 2022, faisant état de mobilités complètes avec un léger déficit en rotation interne, d’une force globale à M5, de radiographies sans particularités, d’un espace sous‑acromial préservé, d’une épaule bien centrée et préconisant une infiltration ;

-          un rapport du 8 juillet 2022 indiquant des amplitudes articulaires de 175/90/D12 contre 180/90/D4 et une hyperlaxité globale des épaules, préconisant de traiter le déficit de force et la légère dyskinésie par de la physiothérapie ; s’agissant de la capacité de travail de l’assuré, il convenait d’éviter les travaux répétitifs de longues heures sur l’épaule ; il était fait mention du fait qu’il existait encore des possibilités d’amélioration en physiothérapie qui permettraient d’améliorer l’épaule et de permettre – peut‑être – une activité professionnelle plus physique.

Le recourant souligne que, dans ce dernier rapport, le docteur I______, médecin-chef de clinique aux HUG, indique que sa capacité de travail est incertaine et que les travaux répétitifs de l’épaule semblent pour l’instant « compliqués », en raison d’une fatigabilité indéniable. Le recourant en tire la conclusion que son état de santé ne s’est jamais amélioré, ni même stabilisé et qu’en retenant une capacité de travail dans une activité adaptée, l’intimé a versé dans l’arbitraire.

d. Le 14 novembre 2022, l’intimé a conclu au rejet du recours.

Il rappelle que, selon l’instruction médicale, l’évolution des multiples fractures a été lentement favorable, hormis le développement d’un syndrome du tunnel carpien et d’une ténosynovite. En 2021, les nombreux médecins de l’assuré ont confirmé la consolidation des fractures et attesté d’une capacité de travail dans une activité respectant les limitations fonctionnelles d’épargne du bras droit et de l’épaule.

La nouvelle atteinte de l’épaule droite mise en évidence en avril 2022 peut entraîner de nouvelles limitations fonctionnelles, mais, dans la mesure où les amplitudes articulaires et la force de l’épaule droite sont quasi complètes, la capacité de travail reste totale dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles d’épargne du membre supérieur droit.

e. À la demande de la Cour de céans, a été versée au dossier l’expertise pluridisciplinaire du 20 décembre 2021, réalisée par les docteurs J______, spécialiste FMH en neurologie, et K______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, à l’attention de l’assureur-accidents, lesquels ont conclu à une pleine capacité de travail dans toute activité permettant d’éviter le travail répétitif de force du membre supérieur droit.

f. Par écriture du 7 août 2023, le recourant a rappelé que, dans son rapport du 27 août 2020, le Dr G______ avait, lui, estimé que l’atteinte à ses épaules était très invalidante, puisqu’il lui était impossible d’utiliser ses membres supérieurs. Selon le recourant, l’appréciation des experts, qui s’écarte des conclusions de ce médecin pour admettre une capacité de travail totale, ne peut s’expliquer que par le fait que les experts n’auraient pas eu l’intégralité du dossier à leur disposition.

g. L’intimé, par écriture du 16 août 2023, s’est déterminé en concluant implicitement à l’admission partielle du recours.

Avec le SMR, il considère que l’expertise produite est conforme à la situation de l’assuré et rejoint très majoritairement les résultats de l’instruction médicale.

Il considère toutefois que l’activité habituelle d’ouvrier agricole n’est plus possible, dans la mesure où elle implique des ports de charge.

Par ailleurs, compte tenu de la dernière opération de l’assuré (ablation des plaques en date du 21 juin 2021), l’exercice d’une activité adaptée n’est exigible qu’à compter du 21 juillet 2021. L’intimé en tire la conclusion que sa décision doit être modifiée dans le sens que l’assuré doit se voir reconnaître le droit à une rente entière du 1er décembre 2020 au 30 octobre 2021 (en lieu et place du 31 mai 2021).

Pour le surplus, il maintient sa position.

L’OAI, conformément à la demande de la Cour de céans, a procédé au calcul du degré d’invalidité. S’agissant du revenu avant invalidité, l’intimé, considérant que le gain qu’aurait réalisé l’assuré en sa qualité d’ouvrier agricole en 2021 auprès de son dernier employeur (CHF 41'094.-) était très largement inférieur aux salaires habituellement proposés sur le marché du travail, a préféré s’en écarter pour retenir celui, théorique, de CHF 62'264.- tel que ressortant de l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS : 5'428.- CHF/mois pour un ouvrier agricole travaillant 40 h./sem. en 2020 = CHF 5'659.- pour un ouvrier travaillant 41,7 h./sem. = CHF 67'904.- en 2020 = CHF 67'402.- en 2021, soit une différence, avec le revenu effectivement perçu de CHF 41'094.-, de CHF 26'308.-, correspondant à 39% ; après déduction de 5%, la part du revenu sans invalidité à ajouter en pourcents s’élève à 34%). Ce montant a été comparé à celui qu’aurait pu obtenir l’assuré en exerçant en 2021 une activité simple et répétitive, après réduction de 10%, soit CHF 58'795.- (5'261.- CHF/mois en 2020 pour un horaire de 40 h./sem. = 5'485.- CHF/mois en 2020 pour un horaire de 41,7 h./sem. = CHF 65'815.- en 2020 = CHF 65'328.- en 2021), ce qui l’a conduit à un degré d’invalidité de 5,57%, insuffisant pour ouvrir droit à des prestations.

h. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

 

 

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

4.             Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) ainsi que celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI - RS 831.201 ; RO 2021 706) sont entrées en vigueur.

En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence). Lors de l’examen d’une demande d’octroi de rente d’invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s’applique (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2. et les références).

En l’occurrence, la décision querellée a certes été rendue postérieurement au 1er janvier 2022. Toutefois, le litige porte sur le droit éventuel du recourant à une rente au-delà du 31 mai 2021, rente dont il n’est pas contesté que le droit est né antérieurement au 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021.

5.             Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

6.             Le litige porte sur la question de savoir si c’est à juste titre que l’intimé a limité le versement de la rente d’invalidité dans le temps. Il convient à cet égard de relever que, dans son écriture finale du 14 novembre 2022, l’intimé a admis que le droit à la rente devait être reconnu jusqu’au 30 octobre 2021 (en lieu et place du 31 mai 2021). Il convient d’en prendre acte.

7.             Selon la jurisprudence, une décision par laquelle l'assurance-invalidité accorde une rente d'invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit l'augmentation, la réduction ou la suppression de cette rente correspond à une décision de révision au sens de l’art. 17 LPGA (ATF 130 V 343 consid. 3.5.2 ; ATF 125 V 413 consid. 2d et les références ; VSI 2001 p. 157 consid. 2). Tout changement important des circonstances propres à influencer le degré d'invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l'article 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l'état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 130 V 343 consid. 3.5 ; ATF 113 V 273 consid. 1a ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_1006/2010 du 22 mars 2011 consid 2.2).

Tel est le cas lorsque la capacité de travail s'améliore grâce à une accoutumance ou à une adaptation au handicap (ATF 141 V 9 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_622/2015 consid. 4.1). Il n'y a pas matière à révision lorsque les circonstances sont demeurées inchangées et que le motif de la suppression ou de la diminution de la rente réside uniquement dans une nouvelle appréciation du cas (ATF 141 V 9 consid. 2.3 ; ATF 112 V 371 consid. 2b ; ATF 112 V 387 consid. 1b). Un motif de révision au sens de l'art. 17 LPGA doit clairement ressortir du dossier. La réglementation sur la révision ne saurait en effet constituer un fondement juridique à un réexamen sans condition du droit à la rente (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 111/07 du 17 décembre 2007 consid. 3 et les références). Un changement de jurisprudence n'est pas un motif de révision (ATF 129 V 200 consid. 1.2).

Le point de savoir si un changement notable des circonstances s’est produit doit être tranché en comparant les faits tels qu’ils se présentaient au moment de la dernière révision de la rente entrée en force et les circonstances qui régnaient à l’époque de la décision litigieuse. C’est en effet la dernière décision qui repose sur un examen matériel du droit à la rente avec une constatation des faits pertinents, une appréciation des preuves et une comparaison des revenus conformes au droit qui constitue le point de départ temporel pour l’examen d’une modification du degré d’invalidité lors d’une nouvelle révision de la rente (ATF 133 V 108 consid. 5.4 ; ATF 130 V 343 consid. 3.5.2).

8.             Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique ou mentale et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

L’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins (art. 28 al. 2 LAI).

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28 al. 2 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (Ulrich MEYER-BLASER, Bundesgesetz über die Invaliden-versicherung, 1997, p. 8).

9.             Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir (ATF 125 V 261 consid. 4). La tâche du médecin dans le cadre d'une révision de la rente selon l'art. 17 LPGA consiste avant tout à établir l'existence ou non d'une amélioration de l'état de santé de l'assuré en comparant les faits tels qu'ils se présentaient au moment de la décision initiale avec la situation au moment de son examen (ATF 125 V 369 consid. 2).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3 ; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4. et les références ; ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 8C_755/2020 du 19 avril 2021 consid. 3.2 et les références). 

10.         En ce qui concerne les facteurs psychosociaux ou socioculturels et leur rôle en matière d'invalidité, ils ne figurent pas au nombre des atteintes à la santé susceptibles d'entraîner une incapacité de gain au sens de l'art. 4 al. 1 LAI. Pour qu'une invalidité soit reconnue, il est nécessaire, dans chaque cas, qu'un substrat médical pertinent, entravant la capacité de travail (et de gain) de manière importante, soit mis en évidence par le médecin spécialisé. Plus les facteurs psychosociaux et socioculturels apparaissent au premier plan et imprègnent l'anamnèse, plus il est essentiel que le diagnostic médical précise s'il y a atteinte à la santé psychique qui équivaut à une maladie. Ainsi, il ne suffit pas que le tableau clinique soit constitué d'atteintes qui relèvent de facteurs socioculturels ; il faut au contraire que le tableau clinique comporte d'autres éléments pertinents au plan psychiatrique tels, par exemple, une dépression durable au sens médical ou un état psychique assimilable, et non une simple humeur dépressive. Une telle atteinte psychique, qui doit être distinguée des facteurs socioculturels, et qui doit de manière autonome influencer la capacité de travail, est nécessaire en définitive pour que l'on puisse parler d'invalidité. En revanche, là où l'expert ne relève pour l'essentiel que des éléments qui trouvent leur explication et leur source dans le champ socioculturel ou psychosocial, il n'y a pas d'atteinte à la santé à caractère invalidant (ATF 127 V 294 consid. 5a in fine).

11.         Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

12.         Si les conditions de la révision sont données, les prestations sont, conformément à l’art. 17 al. 1 LPGA, modifiées pour l’avenir dans le sens exigé par le nouveau degré d’invalidité. Chaque loi spéciale peut fixer le point de départ de la modification ou encore exclure une révision en s’écartant de la LPGA (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 806/04 du 15 mars 2005 consid. 2.2.).

Dans le domaine de l’assurance-invalidité, le point de départ d’une modification du droit aux prestations est fixé avec précision. En cas de modification de la capacité de gain, la rente doit être supprimée ou réduite avec effet immédiat si la modification paraît durable et par conséquent stable (première phrase de l'art. 88a al. 1 RAI) ; on attendra en revanche trois mois au cas où le caractère évolutif de l'atteinte à la santé, notamment la possibilité d'une aggravation, ne permettrait pas un jugement immédiat (deuxième phrase de la disposition ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 666/81 du 30 mars 1983 consid. 3, in RCC 1984 p. 137 s.). En règle générale, pour examiner s'il y a lieu de réduire ou de supprimer la rente immédiatement ou après trois mois, il faut examiner pour le futur si l'amélioration de la capacité de gain peut être considérée comme durable (arrêt du Tribunal fédéral 9C_32/2015 du 10 septembre 2015 consid. 4.1).

Aux termes de l’art. 88a al. 1 RAI, si la capacité de gain s’améliore, il y a lieu de considérer que ce changement supprime, le cas échéant, tout ou partie de son droit aux prestations dès qu’on peut s’attendre à ce que l’amélioration constatée se maintienne durant une assez longue période. Il en va de même lorsqu’un tel changement déterminant a duré trois mois déjà, sans interruption notable et sans qu’une complication prochaine soit à craindre.

13.         En l’espèce, l’intimé reconnaît à l’assuré le droit à une rente entière limitée à la période du 1er décembre 2020 au 31 octobre 2021, soit trois mois après l’intervention pratiquée pour procéder à l’ablation du matériel. L’intimé estime que, dès février 2021, date du rapport du Dr F______, l’assuré a recouvré une capacité de travail entière dans toute activité adaptée.

Le recourant soutient pour sa part qu’il est incapable de reprendre la moindre activité lucrative, car il souffre toujours de lourdes atteintes à sa santé. Il invoque en particulier une tendinopathie de la coiffe supérieure, ainsi qu’une fissure labrale du tendon du sus-épineux, attestées par le Dr G______ en date du 27 août 2020 et le fait que ce médecin fasse état d’une « non-possibilité d’utilisation des deux membres supérieurs » (sic). Il produit également un rapport du 14 avril 2022 du Dr H______, confirmant une tendinopathie interstitielle de la coiffe supérieure sans lésion transfixiante et une lésion SLAP 1, sans indice de tendinopathie sub‑luxiante du long chef du biceps.

En l’occurrence, il ressort de l’ensemble des documents médicaux versés au dossier que l’assuré souffre d’atteinte au membre supérieur droit, suite à l’accident dont il a été victime. Les rapports font état d’un status post fractures de l’humérus, de l’ulna et du radius à droite, d’un syndrome du tunnel carpien à droite toujours, d’une ténosynovite à droite. On peine ainsi à comprendre l’allégation du Dr G______ qui fait état d’une « non-possibilité d’utilisation des deux membres supérieurs ». Quant aux rapports produits par le recourant à l’appui de son action, ils font également mention d’une tendinopathie de la coiffe supérieure à droite.

La nature des atteintes dont souffre le recourant n’est pas contestée. Se pose en revanche la question de leurs conséquences en termes de capacité de travail.

La Cour de céans relève qu’en octobre 2020 déjà, le centre médical de Chêne‑Bourg concluait à une pleine capacité de travail de l’assuré, tout comme la Dre B______, qui avait observé une mobilisation complète et indolore en décharge. Ce médecin, tout comme le SMR, excluait la reprise de l’activité habituelle, mais préconisait une reconversion dans un métier ne nécessitant pas de port de charges. En février 2021, le Dr F______ a également écarté l’exercice d’une activité qui impliquerait des ports répétitifs de charges lourdes ou l’utilisation d’outils vibrants. En revanche, il a expliqué que l’état de son patient était stabilisé depuis décembre 2020 et que l’ablation des plaques avait permis une diminution des symptômes.

Le SMR a noté la consolidation complète des fractures du bras et de l’avant-bras droits, ainsi que l’absence de surinfection, de syndromes douloureux régionaux complexes et de douleurs au repos. S’il a exclu la reprise de l’activité habituelle, considérée comme non adaptée, il a en revanche considéré que l’assuré était totalement apte à exercer une activité adaptée (c'est-à-dire permettant d’éviter les levage et port de charges, le maniement d’appareils entraînant des vibrations, le travail de force, les mouvements de rotation répétitifs et astreignants).

Ces conclusions ne paraissent pas critiquables au vu de celles de l’expertise rendue en décembre 2021 à l’attention de l’assureur-accidents.

De ce rapport, il ressort que l’assuré a continué à se plaindre de douleurs et d’hypodysesthésies, le long de la face externe de l’avant-bras jusqu’au niveau du pouce et de l’index, troubles augmentant aux mouvements du membre supérieur droit. De façon générale, le patient avait indiqué ne pas avoir l’impression d’une amélioration significative. Outre les douleurs, il évoquait un manque de force globale du membre supérieur droit et des troubles sensitifs diffus, mais prédominant à la face externe de l’avant-bras avec hypoesthésie, paresthésie, dysesthésie et allodynie.

L’expert orthopédiste a constaté que les fractures avaient consolidé et a noté, à l’examen clinique, une récupération fonctionnelle qualifiée d’« étonnante ».

Il a également relevé l’absence de plaintes ou expressions douloureuses durant toute l’anamnèse, le déshabillage/habillage et l’examen clinique. Il a constaté en particulier que l’assuré se déshabillait et s’habillait à l’aide de ses deux membres supérieurs, rapidement et sans manifestation douloureuse.

À l’examen clinique, il a observé plusieurs cicatrices calmes au niveau du bras et de l’avant-bras droits. La percussion de l’épicondyle et l’épitrochlée droits était peu sensible. À la recherche d’une éventuelle atrophie musculaire, l’expert a noté tout au plus une discrète asymétrie de périmètre des bras et avant-bras de 0,5 cm en défaveur de la droite, ainsi qu’une discrète hypotonie du premier espace interosseux dorsal. Au testing de la force musculaire, contrairement aux déclarations de l’assuré, la force paraissait préservée sur l’ensemble des groupes musculaires du membre supérieur droit, hormis une discrète parésie de l’abduction radiale du pouce droit. Au vu de l’ensemble des éléments observés, il a paru évident à l’expert qu’il existait une discordance entre l’importance persistante des plaintes subjectives et une évolution neurologique objectivement tout à fait favorable, bien que l’on puisse admettre la persistance d’une atteinte partielle d’une aire antébrachiale latérale droite et, éventuellement, d’une atteinte séquellaire discrète du nerf médian droit et du nerf radial droit (discrète parésie de l’abduction radiale du pouce). Les quelques éléments pathologiques observés au bilan n’expliquaient clairement pas l’importance des plaintes et l’évolution subjectivement défavorable, raison pour laquelle les experts ont conclu à des facteurs de majoration jouant un rôle non négligeable dans l’importance des plaintes. Ces conclusions étaient corroborées par le fait que les dosages médicamenteux montraient une prise très faible, alors même que les douleurs étaient annoncées comme invalidantes. Selon les experts, des facteurs extra‑traumatiques jouaient clairement un rôle majeur dans l’évolution défavorable du cas, entraînant une majoration des symptômes et ayant une influence défavorable sur la reprise de l’activité professionnelle.

Sur le plan des limitations fonctionnelles, en dehors d’une activité particulièrement exigeante pour le membre supérieur droit chez un droitier, il a été estimé qu’il n’y en avait pas de significatives et que la capacité à exercer une activité adaptée était complète (plein temps avec un rendement de 100%). Cependant, il a été admis qu’il serait difficile à l’assuré, ne parlant apparemment pas le français et sans formation professionnelle, de se réintégrer sur le marché professionnel, raison pour laquelle il était suggéré de faire appel à l’aide de l’assurance-invalidité.

Les experts ont indiqué ne pouvoir confirmer une incapacité de travail à 100%, dans la mesure où la fonction n’était certes pas encore complètement revenue, mais était très certainement largement suffisante pour une reprise progressive de l’activité professionnelle. Cela étant, l’accident tel qu’il s’était déroulé avait de quoi traumatiser et pouvait expliquer une réaction d’inquiétude, voire d’angoisse à la reprise du travail. Celle-ci était cependant possible, progressivement, sur trois à quatre mois. En effet, sur le plan orthopédique, purement mécanique, il y avait très peu de déficit, aussi bien sur le plan de la force que sur celui des amplitudes articulaires. Une incapacité de travail était justifiée durant au minimum une année, voire plus, étant donné l’ablation subséquente du matériel d’ostéosynthèse. Au jour de l’expertise, néanmoins, une reprise de l’activité professionnelle était envisageable sur une période de trois à quatre mois. La seule limitation fonctionnelle potentielle était l’utilisation répétitive de la force avec le membre supérieur droit. Sur le plan neurologique également, l’assuré avait objectivement retrouvé une capacité de travail complète dans toute activité, à condition d’éviter un engagement particulièrement important physiquement du membre supérieur droit chez un droitier. À cet égard, il a été indiqué que si l’employeur pouvait aménager quelque peu l’activité de l’assuré, ce dernier devait même pouvoir reprendre son activité professionnelle habituelle à plein temps. Néanmoins, vu le laps de temps écoulé depuis l’arrêt de travail, une reprise progressive était préconisée.

Ce rapport, qui remplit les réquisits jurisprudentiels permettant de lui voir reconnaître pleine valeur probante, vient donc corroborer les conclusions du SMR, soit l’admission de l’exigibilité d’une activité adaptée à plein temps. On notera que la position du SMR est favorable à l’assuré dans la mesure où il est renoncé à exiger de lui la reprise de son activité habituelle.

Certes, une atteinte supplémentaire à l’épaule a été documentée postérieurement, en avril 2022 (tendinopathie).

Cependant, comme le font remarquer l’intimé et le SMR, il n’en demeure pas moins qu’en juin et juillet 2022, les médecins – dont le recourant a lui-même produit les rapports – ont constaté des mobilités complètes et des amplitudes articulaires conservées ainsi qu’une force de l’épaule majoritairement préservée. Tout comme les experts, ils ont préconisé d’éviter les travaux répétitifs du membre supérieur droit.

Dans ces conditions, il n’apparaît pas insoutenable de conclure – malgré ce nouveau diagnostic – que l’intéressé a conservé une capacité de travail entière dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles d’épargne du membre supérieur droit, comme déjà retenu dans le rapport du 10 février 2021, auxquelles il faut ajouter les limitations d’épargne de l’épaule droite décrites dans le rapport du Dr I______ (éviter les travaux répétitifs de l’épaule).

En revanche, c’est à juste titre que l’intimé, tenant compte du fait que la dernière opération (ablation des plaques) remontait au 21 juin 2021, conclut que l’exercice d’une activité adaptée n’est exigible qu’à compter du 21 juillet 2021 seulement. Ainsi que l’admet l’intimé, la décision litigieuse doit être modifiée dans le sens que l’assuré doit se voir reconnaître le droit à une rente entière du 1er décembre 2020 au 30 octobre 2021 (en lieu et place du 31 mai 2021).

14.         On relèvera que le calcul du degré d’invalidité auquel s’est livré l’intimé à la demande de la Cour de céans (il y avait en effet renoncé, à tort, en retenant dans sa décision que l’assuré pouvait exercer toute activité alors même que le SMR avait déjà expressément écarté l’éventualité de reprendre l’activité habituelle d’ouvrier agricole) ne prête pas le flanc à la critique. Au contraire, il est favorable à l’assuré dans la mesure où le revenu avant invalidité a été augmenté de 34% pour correspondre aux salaires habituellement proposés dans la branche et où une réduction supplémentaire de 10% a été appliquée au revenu d’invalide pour tenir compte des limitations fonctionnelles retenues. Or, ladite comparaison conduit à un degré d’invalidité de moins de 5,6%, insuffisant pour ouvrir droit aux prestations de l’assurance-invalidité.

Au vu de ce qui précède, c’est donc à juste titre que l’intimé a nié à l’assuré le droit à une rente au-delà d’octobre 2021.

Le recours est partiellement admis en ce sens que le droit à la rente est reconnu jusqu’au 31 octobre 2021 en lieu et place du 31 mai 2021, rejeté pour le surplus.


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement sur proposition de l’intimé en ce sens que le droit à une rente entière est reconnu au recourant du 1er décembre 2020 au 30 octobre 2021 (en lieu et place du 31 mai 2021).

3.        Renvoie la cause à l’intimé pour calcul des prestations dues.

4.        Rejette le recours pour le surplus.

5.         Condamne l’intimé à verser au recourant la somme de CHF 1’000.- à titre de participation à ses frais et dépens.

6.        Renonce à l’émolument.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

Christine RAVIER

 

La présidente

 

 

 

Karine STECK

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le