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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/388/2022

ATAS/804/2022 du 07.09.2022 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/388/2022 ATAS/804/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 7 septembre 2022

4ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à CHANCY, et Monsieur B______, domicilié à ONEX, représentés par Monsieur C______

 

recourants

contre

 

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur D______ (ci-après le bénéficiaire), né en 1934, a été marié à Madame E______. Ils ont eu deux enfants, A______ (née F______) et B______ (ci-après les intéressés ou les recourants). Dès 1965, ils ont été domiciliés dans le canton de Genève, où Mme E______ est décédée le ______ 2001.

b. Le 6 juin 2006, le bénéficiaire a déposé une demande de prestations auprès du Service des prestations complémentaires (ci-après le SPC ou l’intimé). Dans ses ressources, il a fait état de rentes AVS et de la prévoyance professionnelle, et de trois comptes auprès de la Banque cantonale de Genève et La Poste, ainsi que de deux actions nominatives Swiss Life Holding et d’une assurance-vie Swisscanto Life Invest Garant.

c. Le SPC a versé des prestations complémentaires cantonales ainsi qu’un subside d’assurance-maladie au bénéficiaire dès le 1er juin 2006. Les prestations ont été calculées sans tenir compte d’une fortune, l’épargne de CHF 5'621.80 et la valeur de rachat de l’assurance-vie de CHF 25'634.80 n’atteignant pas la franchise prévue par la loi.

Le SPC a adressé chaque année au bénéficiaire des communications lui rappelant son obligation de le renseigner sur sa situation financière et sur les éventuels changements survenus.

d. Le 7 octobre 2016, le Conseiller d'Etat en charge du Département de l'emploi, des affaires sociales et de la santé a adressé à tous les bénéficiaires de prestations complémentaires un courrier exposant les nouvelles dispositions légales entrées en force le 1er octobre 2016, lesquelles prévoyaient des poursuites pénales à l’encontre des personnes ayant obtenu des prestations d'assurance ou d'aide sociale en fournissant des renseignements inexacts ou incomplets. Il a précisé qu'en accord avec le Ministère public, aucune poursuite ne serait introduite contre les personnes communiquant spontanément des éléments pertinents pour le calcul des prestations avant le 31 décembre 2016.

e. Le 27 décembre 2016, le bénéficiaire a donné suite à ce courrier en informant le SPC qu’il avait hérité d’une maison en France au décès de son épouse, avec ses enfants. Ceux-ci lui avaient laissé la disposition de leur part. Il avait transformé le produit de la vente de cette maison en assurance-vie, conclue auprès de la Banque postale de France, où il possédait également un compte courant. Il a dit avouer sa faute et s’être dit prêt à en assumer les conséquences.

f. Le SPC a requis plusieurs pièces du bénéficiaire par courrier du 31 janvier 2017, qui a fait l’objet de rappels en mars et avril 2017.

g. Le 26 juillet 2017, le bénéficiaire a notamment transmis les pièces suivantes au SPC :

-          acte de vente d’une maison sise à G______, France, pour EUR 186'750.- le 5 juillet 2002, dont les vendeurs étaient le bénéficiaire et les intéressés ;

-          certificat d’adhésion du bénéficiaire au contrat Ascendo, assurance-vie de la Poste française, dès le 28 janvier 2003 moyennant un versement initial de EUR 150'000.- ; les intéressés étaient les bénéficiaires de cette police en cas de décès ; les valeurs minimales de rachat étaient fixées en fonction d’un taux de 2.5 %, passant de EUR 152'212.50 après un an et de EUR 190'092.52 après 10 ans ;

-          fiche de synthèse de ses avoirs auprès de la Poste française de 2004, révélant un avoir de EUR 11'723.60 sur un compte courant et un livret A et EUR 160'024.59 pour la police Ascendo ;

-          fiches de participations aux bénéfices et bulletins de situation pour la police Ascendo, mentionnant à ce titre des revenus de EUR 7'928.70 en 2011 ; un capital de EUR 272'077.83 et des revenus de EUR 6'763.72 en 2012 ; un capital de EUR 273'392.08 et des revenus de EUR 6'093.04 en 2013 ; un capital de EUR 272'561.15 et des revenus de EUR 6'100.08 en 2014 ; un capital de EUR 273'076.18 et des revenus de EUR 4'065.60 en 2015 ;

-          déclaration de succession à l’attention de l’administration française, non signée, non datée. Ce document mentionnait notamment que Mme E______ aurait établi un testament, reçu par un notaire français, laissant au bénéficiaire l’usufruit de l’universalité de ses biens, et indiquait en outre que les intéressés étaient chacun héritiers pour moitié de Mme E______. Cette déclaration faisait état d’un actif brut de succession de EUR 196'087.50, correspondant à l’immeuble sis à G______ et à un montant de EUR 9'337.50 pour le mobilier. Dans la partie relative aux droits à payer, il était indiqué que le bénéficiaire avait recueilli une part de EUR 39'018.-, les intéressés ayant quant à eux chacun obtenu une part de EUR 78'435.-

h. Le bénéficiaire est décédé le 3 mars 2018.

i. Dans un courrier du 5 mars 2018 adressé au feu bénéficiaire, le SPC a indiqué qu’il avait repris le calcul des prestations complémentaires dès le 1er mars 2011, en tenant compte dès cette date de l’épargne en France, soit l’assurance-vie et le compte courant, et des intérêts relatifs à ces avoirs. Il en résultait un montant de CHF 82'227.60 à restituer au SPC, comprenant CHF 41'948.- pour les prestations complémentaires cantonales versées du 1er mars 2011 au 31 décembre 2017, CHF 1'022.- pour les prestations complémentaires cantonales versées du 1er janvier au 28 février 2018, CHF 37'781.20 pour les subsides d’assurance-maladie de 2011 à 2017, CHF 1'164.40 pour les subsides d’assurance-maladie de 2018, et CHF 312.- pour les frais médicaux remboursés.

Les décisions jointes du 27 février 2018 couvrant la période de mars 2011 à février 2018 niaient le droit aux prestations complémentaires. Le SPC y a tenu compte d’une épargne de CHF 5'621.60 et de montants libellés « rachat d’assurance-vie » de CHF 439'028.20 du 1er mars au 31 décembre 2011, CHF 392'990.- en 2012 ; CHF 361'392.20 en 2013 ; CHF 361'250.90 en 2014 ; CHF 353'362.30 en 2015 ; et CHF 321'512.80 de 2016 à 2018.

j. Par courrier du 5 avril 2018 à l’intéressée, le SPC l’a invitée à lui adresser une copie de la déclaration de succession en cas d’acceptation de celle-ci, et l’a informée du fait qu’il produisait au passif de la succession de feu le bénéficiaire une créance de CHF 82'277.60, conformément à ses décisions de remboursement du 27 février 2018, dont il lui a adressé des copies.

k. Dans leur opposition du 6 juin 2018, les intéressés, par leur mandataire, ont contesté les calculs du SPC, qui ne tenaient pas compte du fait que la fortune prise en considération n’appartenait pas seulement au feu bénéficiaire. En effet, celui-ci avait hérité de 50% des biens de son épouse. Les intéressés lui avaient laissé leur part en lui demandant de la conserver pour eux, moyennant un taux de 2%. Ainsi, un montant de CHF 105'000.- pour chacun des intéressés, soit CHF 210'000.- en tout, devait être soustrait de la fortune prise en compte.

Ils ont notamment joint copie d’un courrier qu’ils ont conjointement adressé le 31 août 2002 au notaire ayant instrumenté la vente immobilière pour lui demander de verser le solde du produit de cette vente sur le compte de feu le bénéficiaire.

l. Le 28 juillet 2020, le SPC a déposé une réquisition de poursuite à l’encontre de l’intéressée pour un montant de CHF 82'227.60.

m. Après divers échanges de correspondances et entretiens avec les intéressés, le SPC a déclaré l’opposition irrecevable et retiré l’effet suspensif à un éventuel recours par décision du 18 février 2021. Il a retenu que les intéressés avaient formé opposition le 6 juin 2018, soit plus de 30 jours après la notification des décisions à l’intéressée le 5 avril 2018.

n. Saisie d’un recours des intéressés contre cette décision, la chambre de céans l’a admis par arrêt du 4 octobre 2021 (ATAS/1019/2021). Elle a en substance retenu que les décisions adressées au feu bénéficiaire le 5 mars 2018 étaient nulles, puisque celui-ci était alors déjà décédé. Elles ne déployaient ainsi pas d’effet juridique. Le SPC échouait à démontrer que ces décisions, réexpédiées à l’intéressée le 5 avril 2018, avaient été reçues avant le 7 mai 2018. Partant, la décision déclarant l’opposition irrecevable pour cause de tardiveté devait être annulée et la cause renvoyée au SPC, afin qu’il entre en matière sur le fond du litige et statue sur l’opposition, après avoir procédé aux éventuelles mesures d’instruction nécessaires. Dans ce contexte, il paraîtrait judicieux que le SPC obtienne des documents établissant formellement la qualité d’héritiers des intéressés.

B. a. Le 13 octobre 2021, le SPC a invité les intéressés à lui faire parvenir l’ensemble des relevés des différents comptes, les attestations mentionnant la valeur de rachat de l’assurance-vie, les bulletins de situation, tout document attestant de leur qualité d’héritiers et toute pièce démontrant une dette de feu le bénéficiaire à leur encontre.

b. Le 30 novembre 2021, les intéressés ont notamment produit les pièces suivantes :

-          document selon lequel l’assurance-vie Swisscanto a été rachetée le 31 mai 2013 pour CHF 23'740.53 ;

-          documents dont il ressort que le compte de feu le bénéficiaire auprès de la Banque cantonale de Genève affichait un solde de CHF 12'402.30 lors de son décès ;

-          relevés de la banque postale française, révélant que feu le bénéficiaire détenait sur son compte courant et son livret des avoirs de l’ordre de EUR 600.- au 31 décembre 2012 ;  EUR 3'000.- au 31 décembre 2013 ; EUR 2'115.- au 31 décembre 2014 ; EUR 1'050.- au 31 décembre 2016 ; EUR 9'195.- au 29 décembre 2017 ; EUR 20'627.44, ainsi qu’un avoir d’assurance-vie Ascendo de EUR 211'537.66 au 18 juin 2018 ;

-          relevés d’un des comptes postaux suisses de feu le bénéficiaire affichant CHF 192.11 au 31 décembre 2015, CHF 260.11 au 31 décembre 2016, et CHF 2'358.54 au 31 décembre 2017 ;

-          bulletin de situation du contrat Ascendo au 31 décembre 2016, révélant un avoir de EUR 253'496.36 et des revenus de EUR 22'608.93 cette année.

c. Par décision du 16 décembre 2021, le SPC a écarté l’opposition des intéressés. Il a précisé qu’il avait réclamé les prestations versées à tort de mars 2011 au 28 février 2018, le délai de prescription pénale de sept ans étant applicable en l'espèce. En effet, feu le bénéficiaire n’avait jamais annoncé avant 2017 l’existence d’une assurance-vie. Par son silence, il avait réalisé l’infraction consistant à obtenir des prestations complémentaires indues par des indications fausses ou incomplètes et à manquer à son obligation de communiquer. Les intéressés n’avaient pas fourni certains documents, et le compte courant et le livret auprès de la Banque postale française étaient inconnus du SPC auparavant. S’agissant des avoirs investis dans le contrat Ascendo, leur origine n’était pas déterminante. Seul feu le bénéficiaire était titulaire de cette police, et aucun document attestant une quelconque dette envers les intéressés, tel qu’un contrat de prêt ou une convention de fiducie, n’avait été produit.

C. a. Par recours interjeté le 1er février 2022 auprès de la chambre de céans, les intéressés ont conclu, sous suite de dépens, à l’annulation de la décision, à ce qu’il soit ordonné à l’intimé de rendre une nouvelle décision en déduisant la fortune leur appartenant de celle imputée à feu le bénéficiaire, subsidiairement, à ce qu’il soit ordonné à l’intimé d’appliquer le délai de prescription de cinq ans dès la date de la notification de la décision querellée, et au rétablissement de l’effet suspensif.

Les recourants ont reproché à l’intimé d’avoir enfreint le principe de la bonne foi et adopté un comportement contradictoire en entretenant chez eux la conviction, pendant pratiquement trois ans, qu’il rendrait une décision sur le fond, avant de finalement déclarer leur opposition tardive en février 2021, et de ne pas avoir tenu compte de leur argumentation et des pièces démontrant qu’ils étaient héritiers de la plus grande partie des avoirs liés à la police Ascendo, alors que l’authenticité de ces documents, émanant de l’administration française ou de notaires français, ne soulevait pas de doute. Les fonds nécessaires à la conclusion de la police Ascendo ne pouvaient venir que de la vente de la maison en France, et retenir le contraire était irrespectueux des recourants, qui n’avaient pas établi de contrat avec leur père avec qui ils avaient une relation de confiance. Ainsi, l’intimé violait les principes de la bonne foi et du droit d’être entendu. Les recourants se sont dits non responsables de la situation. Ils n’avaient aucune obligation légale de remettre les documents demandés par l’intimé, dont ils ne disposaient d’ailleurs pas. L’intimé avait en outre violé le principe de la célérité en statuant après près de quatre ans. S’agissant du délai applicable à la prescription, le caractère pénal du comportement de feu le bénéficiaire ne pouvait être imputé aux recourants, et seule la restitution des prestations versées dans les cinq ans précédant la décision du 16 décembre 2021 était exigible, l’intimé devant cependant procéder au calcul du dies a quo et la cause devant lui être renvoyée à cet effet. L’effet suspensif du recours devait être rétabli, dès lors que l’exécution de la décision était de nature à causer un grave préjudice aux recourants.

b. Dans sa réponse du 2 mars 2022, l’intimé a implicitement conclu au rejet du recours. Il a souligné qu’il avait agi dans le délai d’une année après avoir pris connaissance des nouveaux éléments fondant la révision du droit aux prestations.

c. Dans leurs déterminations du 16 mai 2022, les recourants ont persisté dans leurs conclusions. Ils ont reproché à l’intimé de vouloir les pénaliser, alors qu’ils n’avaient rien à voir avec la procédure de restitution. Ils ont répété qu’ils étaient copropriétaires des fonds investis dans l’assurance-vie, que feu le bénéficiaire avait gérés dans leur intérêt. L’intimé n’avait pas apporté la preuve que l’argent sur le compte de la Poste française appartenait exclusivement au bénéficiaire.

d. La chambre a adressé copie de cette écriture à l’intimé le 22 mai 2022.

e. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC -RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             La modification du 21 juin 2019 de la LPGA, entrée en vigueur le 1er janvier 2021, est applicable au présent recours, dès lors qu’il n’était pas pendant à cette date (art. 82a LPGA a contrario).

A la même date, la modification du 22 mars 2019 de la LPC (Réforme des prestations complémentaires) est également entrée en vigueur et a entraîné de nombreuses modifications légales. Cette novelle n’est cependant pas applicable au cas d’espèce, dès lors que sur le plan matériel, sont en principe applicables les règles de droit en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 129 V 226 consid. 1). Les dispositions de la LPC seront ainsi citées dans leur ancienne teneur.

3.             Interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA ; art. 43 LPCC).

4.             Le litige porte sur le droit aux prestations complémentaires de feu le bénéficiaire du 1er mars 2011 au 28 février 2018, et plus précisément sur l’obligation de restituer les prestations complémentaires cantonales et les subsides d’assurance-maladie alloués durant cette période qui découle des nouveaux calculs de l’intimé.

La remise et son étendue font l'objet d'une procédure distincte de la restitution (arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 64/06 du 30 octobre 2007 consid. 4), de sorte que ce point ne fait pas partie du litige.

5.             Au vu du présent arrêt, la requête de rétablissement d’effet suspensif des recourants est sans objet.

6.              

6.1 Les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse et qui remplissent les conditions personnelles prévues aux art. 4, 6 et 8 LPC ont droit à des prestations complémentaires. Ont ainsi notamment droit aux prestations complémentaires les personnes qui perçoivent une rente de vieillesse de l'assurance-vieillesse et survivants à l'art. 4 al. 1 let. a LPC.

6.2 Les prestations complémentaires fédérales se composent de la prestation complémentaire annuelle et du remboursement des frais de maladie et d’invalidité (art. 3 al. 1 LPC). L’art. 9 al. 1er LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants.

6.3 Ont droit aux prestations complémentaires cantonales les personnes dont le revenu annuel déterminant n’atteint pas le revenu minimum cantonal d’aide sociale applicable (art. 4 LPCC). S’agissant des conditions personnelles, le droit aux prestations complémentaires cantonales est notamment subordonné à la condition du domicile et de la résidence habituelle dans le canton de Genève (cf. art. 2 al. 1 let. a LPCC).

7.              

7.1 Au niveau fédéral, les revenus déterminants comprennent notamment le produit de la fortune mobilière et immobilière (art. 11 al. 1 let. b LPC), un quinzième de la fortune nette, un dixième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse, dans la mesure où elle dépasse CHF 37'500.- pour les personnes seules (art. 11 al. 1 let. c LPC), et les rentes, pensions et autres prestations périodiques, y compris les rentes de l’AVS et de l’AI (art. 11 al. 1 let. d LPC).

Les dépenses comprennent notamment le montant forfaitaire annuel pour l'assurance obligatoire des soins ; il doit correspondre au montant de la prime moyenne cantonale ou régionale pour l'assurance obligatoire des soins (couverture accidents comprise) (art. 10 al. 3 let. d LPC).

S’agissant du subside d’assurance-maladie, le SPC procède concrètement au calcul des dépenses du bénéficiaire, sans prendre en considération les primes d’assurance-maladie, puis il admet le droit au subside en fonction du montant de l’excédent de ressources (ATAS/1039/2013 du 29 octobre 2013 consid. 11a/cc).

7.2 Sur le plan cantonal, la LPCC renvoie à la réglementation fédérale pour le calcul du revenu déterminant et des dépenses, sous réserve de certaines adaptations. Ainsi, l’art. 5 let. c ch. 1 LPCC prévoit qu’en dérogation à l’art. 11 al. 1 let. c LPC, la part de la fortune nette prise en compte dans le calcul du revenu déterminant est d’un huitième, respectivement d’un cinquième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse, et ce après déduction des franchises prévues par cette disposition.

Une assurance-vie constitue un élément de fortune déterminant lorsqu’elle a une valeur de rachat, et qu’elle peut alors être vendue. Elle doit être prise en compte dans la fortune à la hauteur de sa valeur de rachat (Ralph JÖHL / Patricia USINGER-EGGER, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], vol. XIV, Soziale Sicherheit, 3ème éd. 2016, n. 169). Selon les chiffres 3443.05 et 3443.06 des Directives concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’assurance-invalidité (DPC) éditées par l’OFAS, dans leur teneur au 1er janvier 2018, les dettes prouvées doivent être déduites de la fortune brute, et les éléments de fortune dont le bénéficiaire de prestations complémentaires est usufruitier ne sont pas pris en considération. L'origine des fonds constituant le capital de l'assuré qui demande une prestation complémentaire est sans importance s'agissant de leur prise en compte à titre de fortune au chapitre des revenus déterminants (arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 43/2004 du 3 décembre 2004 consid. 3).

8.             Aux termes de l’art. 28 al. 2 LPGA, celui qui fait valoir son droit à des prestations doit fournir gratuitement tous les renseignements nécessaires pour établir ce droit et fixer les prestations dues.

8.1 L'art. 43 LPGA régit l'instruction de la demande. Il précise que l'assureur examine les demandes, prend d'office les mesures d'instruction nécessaires et recueille les renseignements dont il a besoin. Les renseignements donnés oralement doivent être consignés par écrit (al. 1). Si l'assuré ou d'autres requérants refusent de manière inexcusable de se conformer à leur obligation de renseigner ou de collaborer à l'instruction, l'assureur peut se prononcer en l'état du dossier ou clore l'instruction et décider de ne pas entrer en matière. Il doit leur avoir adressé une mise en demeure écrite les avertissant des conséquences juridiques et leur impartissant un délai de réflexion convenable (al. 3).

8.2 L'obligation de collaborer ancrée à l'art. 43 LPGA a une portée générale en assurances sociales et vaut ainsi également dans le domaine des prestations complémentaires (arrêt du Tribunal fédéral 9C_180/2009 du 9 septembre 2009 consid. 4.2.1). Lorsque l’assureur se prononce en l’état du dossier, il ne peut se contenter d’examiner la situation sous l’angle du seul refus de collaboration de la personne assurée, mais doit procéder à une appréciation matérielle du cas à la lumière des pièces au dossier. Dans le contexte particulier de la révision d’une prestation durable, une telle appréciation peut toutefois conduire à un résultat singulier. Lorsque la personne assurée ne se conforme pas à son devoir de renseigner ou de collaborer et que le dossier ne contient aucun élément permettant d’admettre que les circonstances déterminantes se sont modifiées, l’absence de renseignements aurait pour résultat, compte tenu de la répartition du fardeau de la preuve, que l’assureur ne pourrait réduire ou supprimer la prestation. En d’autres termes, l’absence de collaboration de la personne assurée n’entraînerait, dans le cadre particulier de la révision, aucune conséquence défavorable pour elle. Une telle solution n’étant pas admissible, il convient d’admettre dans un tel cas un renversement du fardeau de la preuve au détriment de la personne assurée. Il appartient alors à celle-ci d’établir que les circonstances déterminantes n’ont pas subi de modifications susceptibles de modifier le droit à la prestation (Jacques Olivier PIGUET in Commentaire romand LPGA, 2018, n. 54 ad art. 43 LPGA).

En matière de prestations complémentaires fédérales, la loi ne prévoit pas expressément la suppression des prestations en cours en cas de violation de l’obligation de renseigner. Selon la doctrine, si des prestations sont déjà en cours, l’administration apprécie librement les preuves en cas de violation de l’obligation de renseigner et peut décider en l’état du dossier. Elle peut en particulier tirer des conclusions du refus de collaborer (Erwin CARIGIET/ Uwe KOCH, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV, 3ème éd. 2021, p. 91). Le Tribunal fédéral a confirmé la suppression et la restitution des prestations complémentaires lorsque le droit à celles-ci ne pouvait être établi à la suite d’un défaut de collaboration de l’assuré dans le cadre d’une révision (arrêt du Tribunal fédéral 9C_194/2014 du 21 octobre 2014 consid. 4).

Au plan cantonal, l’art. 11 al. 3 LPCC prévoit que le SPC peut suspendre ou supprimer le versement de la prestation lorsque le bénéficiaire refuse de fournir ou tarde à remettre les renseignements demandés.

9.              

9.1 En vertu de l'art. 25 LPGA, dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation difficile (al. 1). Le droit de demander la restitution s'éteint un an après le moment où l'institution d'assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation. Si la créance naît d'un acte punissable pour lequel le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est déterminant (al. 2). Selon la jurisprudence, l'obligation de restituer prévue par l'art. 25 al. 1 LPGA implique que soient réunies les conditions d'une reconsidération (cf. art. 53 al. 2 LPGA) ou d'une révision procédurale (cf. art. 53 al. 1er LPGA) de la décision par laquelle les prestations ont été accordées (arrêt du Tribunal fédéral 9C_341/2017 du 27 septembre 2017 consid. 4.1). Les délais de l'art. 25 al. 2 LPGA sont des délais (relatif et absolu) de péremption, qui doivent être examinés d'office (arrêt du Tribunal fédéral 8C_535/2020 du 3 mai 2021 consid. 3.2). Contrairement à la prescription, la péremption prévue à l’art. 25 al. 2 LPGA ne peut être ni suspendue ni interrompue et lorsque s’accomplit l’acte conservatoire que prescrit la loi, comme la prise d’une décision, le délai se trouve sauvegardé une fois pour toutes, ce même si cette décision n’entre pas en force, par exemple en raison d’un recours (cf. pour un cas d’application arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 271/04 du 21 mars 2006 consid. 2.5).

9.2 Au plan cantonal, aux termes de l'art. 24 LPCC, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation difficile. Conformément à l'art. 43A LPCC, les décisions et les décisions sur opposition formellement passées en force sont soumises à révision si le bénéficiaire ou le service découvre subséquemment des faits nouveaux importants ou trouve des nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient être produits avant (al. 1). Le SPC peut revenir sur les décisions ou les décisions sur opposition formellement passées en force lorsqu'elles sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable (al. 2).

9.3 Selon l'art. 2 al. 1 let. a de l’ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 (OPGA - RS 830.11), sont notamment soumis à l'obligation de restituer le bénéficiaire des prestations allouées indûment ou ses héritiers.

10.          

10.1 S’agissant de la prescription pénale liée à un acte punissable, les dispositions pénales en matière de prestations complémentaires sont contenues à l'art. 31 LPC. L'alinéa premier de cette disposition arrête qu'est puni, à moins qu'il ne s'agisse d'un crime ou d'un délit frappé d'une peine plus élevée par le code pénal, d'une peine pécuniaire n'excédant pas 180 jours-amende : celui qui, par des indications fausses ou incomplètes, ou de toute autre manière, obtient d'un canton ou d'une institution d'utilité publique, pour lui-même ou pour autrui, l'octroi indu d'une prestation au sens de la présente loi (let. a) ; celui qui, par des indications fausses ou incomplètes, ou de toute autre manière, obtient sans droit une subvention au sens de la présente loi (let. b) ; celui qui n'observe pas l'obligation de garder le secret ou abuse, dans l'application de la présente loi, de sa fonction ou tire avantage de sa situation professionnelle au détriment de tiers ou pour son propre profit (let. c) ; celui qui manque à son obligation de communiquer (art. 31 al. 1 LPGA) (let. d).

10.2 Lorsqu'il statue sur la créance de l'institution d'assurance en restitution de prestations indûment versées, le juge doit examiner, à titre préjudiciel, si les circonstances correspondant à une infraction pénale sont réunies et, partant, si un délai de péremption plus long que les délais relatifs et absolus prévus par l'art. 25 al. 2 LPGA est applicable dans le cas particulier. Pour que le délai de péremption plus long prévu par le droit pénal s'applique, il n'est pas nécessaire que l'auteur de l'infraction ait été condamné (arrêt du Tribunal fédéral 8C_592/2007 du 20 août 2008 consid. 5.3 et les références). Les exigences constitutionnelles en matière d'appréciation des preuves en procédure pénale, notamment le principe in dubio pro reo, s'appliquent également dans le cadre d'une procédure en restitution de prestations d'assurances sociales, lorsqu'il convient d'examiner à titre préjudiciel si la créance en restitution naît d'un acte punissable pour lequel le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long que ceux prévus à l'art. 25 al. 2 LPGA (ATF 138 V 74 consid. 7).

10.3 Le Tribunal fédéral a retenu que la non déclaration à l’autorité d’un héritage perçu et de l’acquisition d’un bien immobilier réalise les conditions objectives de l'infraction réprimée à l'art. 31 al. 1 let. d LPC. S’agissant des conditions subjectives de l’infraction, notre Haute Cour a retenu que compte tenu des informations demandées dans le formulaire de demande de prestations, l’intéressé ne pouvait ignorer l’importance de la communication de toute information d'ordre économique le concernant. Il était ainsi conscient qu'il retenait des informations qu'il avait l'obligation de transmettre à l’autorité, agissant ainsi par dol éventuel. Partant, les conditions subjectives de l’infraction étaient réalisées (ATF 140 IV 206 consid. 6.4 et 6.5).

10.4 La prescription de plus longue durée du droit pénal de l'art. 25 al. 2 LPGA est applicable aux héritiers du bénéficiaire de prestations perçues indûment par suite d'un acte pénalement répréhensible, dès lors que cette disposition n’exige pas que l’acte punissable ait été commis par la personne tenue à restitution et qu’elle a pour but de rétablir l’ordre légal. Elle ne saurait être considérée comme une sanction pénale (ATF 147 V 417 consid. 7.3.1 et 7.4)

11.         Selon le principe inquisitoire qui régit la procédure en matière d’assurances sociales (art. 43 al. 1 LPGA), il appartient à l’administration ou au juge d'établir d'office les faits déterminants pour la solution du litige et d'administrer, le cas échéant, les preuves nécessaires. En principe, les parties ne supportent ni le fardeau de l'allégation ni celui de l'administration des preuves. Cette maxime doit cependant être relativisée par son corollaire, soit le devoir de collaborer des parties, lequel comprend l'obligation d'apporter, dans la mesure où cela est raisonnablement exigible, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués. Si le principe inquisitoire dispense les parties de l'obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve, dans la mesure où, en cas d'absence de preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en supporter les conséquences, sauf si l'impossibilité de prouver un fait peut être imputée à la partie adverse (ATF 139 V 176 consid. 5.2 et arrêt du Tribunal fédéral 9C_97/2020 du 10 juin 2020 consid. 3.1). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait dans le doute statuer en faveur de l'assuré, (ATF 126 V 319 consid. 5a). Le défaut de preuve va au détriment de la partie qui entendait tirer un droit du fait non prouvé (arrêt du Tribunal fédéral 8C_591/2015 du 19 janvier 2016 consid. 5.3).

Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2).

12.         En l’espèce, il convient en premier lieu d’examiner les griefs des recourants ayant trait à la violation du principe de la bonne foi et du principe de la célérité.

12.1 S’agissant du premier, les recourants ne peuvent être suivis en tant qu’ils semblent affirmer que l’intimé aurait violé le principe de la bonne foi en les invitant à étayer leurs allégations par des pièces. En effet, le principe de la bonne foi n’implique pas que l’autorité se fie sans autre examen aux allégations d’une partie. La bonne foi est certes présumée. Cette présomption dispense cependant uniquement la personne qui s’en prévaut de la prouver (ATF 143 III 653 consid. 4.3.3), mais elle n’élude pas son obligation de démontrer les autres faits qui fondent ses prétentions. L’intimé est au contraire tenu d’instruire les éléments fondant le droit aux prestations, conformément à l’art. 43 LPGA. La police ayant été établie au seul nom de feu le bénéficiaire, il est conforme aux règles sur le fardeau de la preuve de demander aux recourants d’amener la preuve que celui-ci n’en était pas l’unique titulaire, ou que les fonds ayant servi à sa conclusion ne lui appartenaient pas. Pour le surplus, l’intimé n’a donné aucune garantie aux recourants s’agissant du sort réservé à leur contestation, de sorte que ceux-ci ne sauraient se prévaloir de la protection de la bonne foi au sens où la jurisprudence l’entend (cf. ATF 131 II 627 consid. 6.1).

12.2 En ce qui concerne le principe de la célérité, consacré par l’art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale (Cst. – RS 101), qui prohibe le retard injustifié à statuer (ATF 130 1 312 consid. 5.1), il est violé lorsque l’autorité ne rend pas la décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou dans un délai que la nature de l'affaire et les circonstances font apparaître comme raisonnable (arrêt du Tribunal fédéral 1B_232/2018 du 4 juin 2018 consid. 3).

Dans le cas d’espèce, on ne saurait pas retenir que l’intimé a statué dans un délai inacceptable au vu des circonstances, notamment des renseignements qu’il a tenté de recueillir auprès de feu le bénéficiaire dans un premier temps, puis des recourants.

13.         Il reste à examiner si la restitution exigée par l’intimé est conforme au droit.

13.1 En ce qui concerne les délais, l’intimé a rendu les décisions exigeant la restitution en mars 2018, soit moins d’une année après qu’il a eu connaissance des éléments concrets – ou à tout le moins une partie d’entre eux – fondant la révision, révélés par les pièces remises par feu le bénéficiaire en juillet 2017. Le fait que ces décisions n’aient pas été valablement notifiées ne les prive pas de l’effet conservatoire nécessaire à interrompre la péremption (cf. arrêt précité C 271/04 du 21 mars 2006 par analogie).

S’agissant de l’application du délai de prescription pénale, les éléments tant objectifs que subjectifs de l’infraction réprimée à l'art. 31 al. 1 let. d LPC sont réalisés. En effet, c’est sciemment que le recourant n’a pas déclaré ses avoirs en France, alors qu’il connaissait son obligation de renseigner l’intimé. Il était conscient de ne pas s’y être conformé, comme cela ressort à tout le moins implicitement de son courrier du 27 décembre 2016. C’est ainsi à juste titre que l’intimé a réclamé la restitution des prestations complémentaires versées dès mars 2011. Conformément à la jurisprudence, les héritiers ne peuvent se prévaloir de la nature personnelle de la sanction pénale pour réduire la portée temporelle de la restitution.

13.2 S’agissant des nouveaux calculs, la chambre de céans relève en préambule qu’il semble que l’intimé n’ait pas eu possession de tous les documents nécessaires à établir avec exactitude la fortune du feu bénéficiaire dans ses décisions de février 2018, en particulier des avoirs auprès de la Banque postale française, comme on peut l’inférer de sa décision du 16 décembre 2021. On note à ce sujet que ni le bénéficiaire ni les recourants n’ont remis l’intégralité des documents requis par l’intimé, notamment certains documents de comptes.

Par ailleurs, il est difficile de reconstituer précisément comment l’intimé a établi le montant de la fortune imputée au feu bénéficiaire dès 2011 dans ses nouveaux calculs, et notamment le taux de conversion appliqué. Les montants indiqués à ce titre dépassent les valeurs de rachat minimales stipulées dans le contrat d’adhésion à la police Ascendo. Cela étant, il apparaît que l’épargne liée à cette police a très largement rapidement excédé ces valeurs, si bien que l’intimé était fondé à s’en écarter.

Quoi qu’il en soit, les recourants ne contestent pas les montants de la fortune établis par l’intimé en tant que tels, mais affirment qu’une partie devrait en être retranchée pour tenir compte du fait que l’assurance-vie Ascendo a été conclue grâce au produit de la vente de la maison de G______, qui leur revenait pour moitié. Ils se réfèrent sur ce point à la déclaration de succession. Selon ce document, le produit de cette vente paraissait effectivement revenir dans sa plus grande partie aux recourants (soit deux parts de EUR 78'435.-, le bénéficiaire n’étant censé en tirer que EUR 39'018.-). Toutefois, ladite déclaration est un formulaire destiné aux services fiscaux français. Si ce formulaire doit être rempli par un notaire lorsque la succession comprend un bien immobilier (Déclaration de succession (Formulaire 11277, 12322 et 12321) | Service-public.fr), il n’en demeure pas moins qu’il constitue une simple déclaration de partie. On relève en outre dans cette déclaration des informations intrinsèquement contradictoires : en effet, il y est à la fois fait référence à un testament, dans lequel Mme E______ aurait laissé l’usufruit de ses biens au feu bénéficiaire en instituant héritiers les recourants, alors même que celui-ci aurait selon la même déclaration obtenu une part de la succession et non un simple usufruit, comme on l’a vu. Enfin, bien que ce point ne soit pas déterminant dans le présent litige, on peut également s’étonner du fait que le testament mentionné aurait été remis à un notaire français, étant souligné que Mme E______ vivait en Suisse lors de son décès, et que l’art. 90 de la loi fédérale sur le droit international privé du 18 décembre 1987 (LDIP - RS 291) prévoit que la succession d’un défunt ayant eu son dernier domicile en Suisse est régie par le droit suisse. Au vu de ces éléments, cette déclaration soulève quelques interrogations quant à son contenu.

L’intimé soutient quant à lui que la police Ascendo a été établie au seul nom de feu le bénéficiaire, de sorte qu’il était en droit de la lui imputer dans son intégralité. Au vu du courrier de feu le bénéficiaire de décembre 2016, il est toutefois plausible que la mise initiale de EUR 150'000.- pour la conclusion de la police ait été versée en partie avec le produit de la vente de la maison censé revenir aux recourants. S’il fallait considérer cette hypothèse comme établie au degré de la vraisemblance prépondérante, on peut se demander si l’absence de pièce démontrant qu’il s’agissait d’un prêt pourrait être opposée aux recourants. En effet, la donation ne se présume pas (arrêt du Tribunal fédéral 4A_639/2015 du 28 juillet 2016 consid. 5.1). Cette question n’a cependant pas à être examinée plus avant, pour les motifs suivants.

En effet, même en déduisant EUR 150'000.- de la fortune imputée à feu le bénéficiaire pour tenir compte d’une participation des recourants lors de la conclusion de la police Ascendo – hypothèse extrêmement favorable à ceux-ci – les revenus déterminants incluant la part du capital Ascendo excédant ce montant resteraient supérieurs aux dépenses reconnues. A ce sujet, il faut rappeler que la valeur de cette police a augmenté dans une mesure très importante, puisqu’elle s’est accrue de plus de EUR 120'000.- entre 2003 et 2011. Une telle valorisation ne résulte pas de la seule accumulation des intérêts, et ne peut ainsi s’expliquer que par des paiements supplémentaires. Or, les recourants n’affirment pas qu’ils auraient alimenté cette police par des versements subséquents. A défaut de toute allégation ou indice contraire, il faut ainsi admettre au degré de la vraisemblance prépondérante que ces versements ont été opérés par feu le bénéficiaire, ce qui soulève du reste certaines questions sur l’origine des fonds utilisés à cette fin, en particulier sur le point de savoir si tous ses éléments de fortune ont bien été communiqués à l’intimé.

On peut ainsi procéder aux calculs suivants, en tenant compte des capitaux de la police Ascendo, tels qu’ils ressortent des pièces produites : EUR 265'314.11 en 2011 (ce montant correspondant au capital au 31 décembre 2012 dont sont déduits les intérêts accrus durant cette année), EUR 272'077.83 en 2012 ; EUR 273'392.08 en 2013 ; EUR 272'561.15 en 2014 ; EUR 273'076.18 en 2015 ; EUR 253'496.36 en 2016 ; EUR 262'691.- en 2017 (ce montant correspondant au capital de l’année précédente additionné des intérêts pour 2017) ; et EUR 211'537.6 en 2018. Après déduction de EUR 150'000.-, l’épargne imputable à feu le bénéficiaire pour Ascendo s’élève à EUR 115'314.11 en 2011 ; EUR 122'077.83 en 2012 ; EUR 123'392.08 en 2013 ; EUR 122'561.15 en 2014 ; EUR 123'076.18 en 2015 ; EUR 103'496.36 en 2016 ; EUR 112'691.- et EUR 61'537.60 en 2018.

Selon la pratique administrative en matière de prise en compte de rentes versées par des Etats parties à l’accord sur la libre circulation des personnes CH-UE ou à la Convention AELE, le cours de conversion applicable est le cours du jour publié par la Banque centrale européenne. Est déterminant le premier cours du jour disponible du mois qui précède immédiatement le début du droit à la prestation (Directives DPC ch. 3452.01). Par analogie, on tiendra compte dans le cas d’espèce des taux au 31 décembre précédant la prestation annuelle. Les taux de conversion EUR-CHF étaient les suivants : 1.25 au 31 décembre 2010 ; 1.21 au 30 décembre 2011 ; 1.20 au 31 décembre 2012 ; 1.22 au 31 décembre 2013 ; 1.20 au 31 décembre 2014 ; 1.08 au 31 décembre 2015 ; 1.07 au 31 décembre 2016 ; et 1.17 au 29 décembre 2017 (consultables en ligne sur le site de la Banque centrale européenne Swiss franc (CHF) (europa.eu)).

Les montants ainsi déterminés s’élèvent à CHF 144'142.64 en 2011 ; CHF 147'714.17 en 2012 ; CHF 148'070.5 en 2013 ; CHF 149'524.60 en 2014 ; CHF 147'691.42 en 2015 ; CHF 111'776.07 en 2016 ; CHF 120'579.37 en 2017 et CHF 71'998.99 en 2018.

Il convient encore de déduire de ces montants la franchise de CHF 37'500.- prévue par la loi, d’y ajouter l’épargne en Suisse ainsi que l’assurance-vie Swisscanto déjà retenues par l’intimé dans ses décisions initiales (soit CHF 5'621.60 et CHF 25'634.60 respectivement), et de tenir compte d’un cinquième des chiffres ainsi obtenus à titre de revenus dans le calcul des prestations complémentaires. Cela aboutit aux revenus tirés de la fortune suivants : CHF 27'580.- en 2011 ; CHF 28'294.- en 2012 ; CHF 28'365.- en 2013 ; CHF 28'656.- en 2014 ; CHF 28'289.- en 2015 ; CHF 21'106.- en 2016 ; CHF 22'877.- en 2017 et CHF 13'151.- en 2018.

Le droit aux prestations pour chaque année s’établit comme suit, les autres éléments retenus par l’intimé et non contestés par les recourants étant pour le surplus repris.

En 2011, les dépenses s’élevaient à CHF 38'542.-, le subside LAMal à CHF 4'198.- et les revenus à CHF 59'976.10, soit un excédent de CHF 21'434.10 excluant le droit aux prestations complémentaires cantonales.

En 2012, les dépenses s’élevaient à CHF 38'542.-, le subside LAMal à CHF 5'164.80 et les revenus à CHF 60'690.10, soit un excédent de CHF 22'148.10 excluant le droit aux prestations complémentaires cantonales.

En 2013, les dépenses s’élevaient à CHF 38'755.-, le subside LAMal à CHF 5'270.40 et les revenus à CHF 60'977.10, soit un excédent de CHF 22'222.10 excluant le droit aux prestations complémentaires cantonales.

En 2014, les dépenses s’élevaient à CHF 38'755.-, le subside LAMal à CHF 5'565.60 et les revenus à CHF 61'268.10, soit un excédent de CHF 22'513.10 excluant le droit aux prestations complémentaires cantonales.

En 2015, les dépenses s’élevaient à CHF 38'755.-, le subside LAMal à CHF 5'448.- et les revenus à CHF 60'901.10, soit un excédent de CHF 22'146.10 excluant le droit aux prestations complémentaires cantonales.

En 2016, les dépenses s’élevaient à CHF 38'861.-, le subside LAMal à CHF 6'009.60 et les revenus à CHF 53'838.10, soit un excédent de CHF 14'977.10 excluant le droit aux prestations complémentaires cantonales.

En 2017, les dépenses s’élevaient à CHF 38'861.-, le subside LAMal à CHF 6'124.80 et les revenus à CHF 55'609.10, soit un excédent de CHF 16'748.10 excluant le droit aux prestations complémentaires cantonales.

En 2018, les dépenses s’élevaient à CHF 96'005.-, le subside LAMal à CHF 6'986.40 et les revenus à CHF 108'379.10 compte tenu de la participation de l’assurance-maladie aux frais de pension, soit un excédent de CHF 12'374.10 excluant le droit aux prestations complémentaires cantonales.

Au vu des circonstances, il convient encore de souligner que par souci de simplicité, les calculs qui précèdent n’incluent pas la totalité des revenus du feu bénéficiaire, tels que les revenus annuels de la police Ascendo, l’épargne du compte bancaire postal français. Ils sont donc extrêmement favorables aux recourants, et conduisent néanmoins à la confirmation de la décision de l’intimé en tant qu’elle retient l’absence de droit aux prestations complémentaires cantonales et au subside d’assurance-maladie du 1er mars 2011 au 28 février 2018, et qu’elle réclame la restitution des prestations versées.

Il y a encore lieu de rendre les recourants attentifs à la possibilité de demander une remise. Conformément à l’art. 4 al. 4 OPGA, la demande de remise doit être présentée par écrit. Elle doit être motivée, accompagnée des pièces nécessaires et déposée au plus tard 30 jours à compter de l’entrée en force de la décision de restitution.

14.         Mal fondé, le recours est rejeté.

Les recourants, qui succombent, n’ont pas droit à des dépens.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 89H al. 1 et 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le