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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1049/2022

ATAS/733/2022 du 24.08.2022 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1049/2022 ATAS/733/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 24 août 2022

4ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à Genève, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Romain JORDAN

recourant

contre

 

 

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis rue des Gares 16, Genève

 

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né en 1966, s’est inscrit à l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE ou l'intimé) au mois de décembre 2021, après avoir été licencié par son employeur pour le 31 octobre 2021.

b. La date inscrite sur le formulaire de pré-inscription rempli par l'assuré était le 2 décembre 2021. Le tampon humide de l'OCE apposé sur ce document stipulait toutefois le 23 décembre 2021, comme date de réception.

c. La confirmation d'inscription, signée par l'assuré, était datée du 28 décembre 2021 et mentionnait une date d'inscription au 23 décembre précédent.

d. Le 3 janvier 2021, l'assuré s'est opposé à l'enregistrement de son dossier à cette dernière date. Il soutenait avoir envoyé, en courrier A, sa fiche d'inscription au chômage le 2 décembre 2021. Ne recevant pas de réponse de l'OCE, il avait écrit à une employée de cet office qu'il connaissait, Madame B______, laquelle lui avait suggéré de contacter Monsieur C______, chef de groupe à l'office régional de placement (ci-après : l’ORP). Enfin, sur conseil de Madame D______, cheffe du service des inscriptions, il avait redéposé son dossier au guichet de l'OCE le 23 décembre 2021. Il n'avait pas de preuve de son envoi du 2 décembre 2021 mais le formulaire mentionnait cette date.

e. Par message WhatsApp du 19 décembre 2021, l'assuré a informé Mme B______ avoir fait sa pré-inscription au chômage le 2 décembre précédent mais n'avoir reçu aucune réponse à celle-ci.

f. Dans son courriel à M. C______, daté du 22 décembre 2021, l'assuré expliquait avoir envoyé son dossier à l'OCE le 2 décembre précédent.

g. M. C______ a transféré ce courriel, le même jour, à Mme D______, la priant de regarder si elle pouvait trouver « quelque chose ».

h. Après avoir reçu l'opposition de l'assuré, un juriste de l'OCE a, à son tour, demandé à Mme D______, par courriel du 25 février 2022, de lui transmettre tous les avis de passage de l'assuré et tout document le concernant relatif à une éventuelle demande d'inscription entre le 1er et le 2 décembre 2021.

i. Cette dernière lui a répondu le même jour qu'« après vérification auprès des collaborateurs-trices. De [leurs] classeurs contenant les réponses négatives, [ils n'avaient] retrouvé aucune trace de ce courrier ». Elle ne doutait pas de la bonne foi de l'assuré, mais ce courrier n'était jamais arrivé jusqu'à son service.

Elle lui a également transmis les échanges de courriels en sa possession.

j. Par décision du 18 janvier 2022, l'OCE a refusé de prendre en compte l'inscription de l'assuré à la date du 2 décembre 2021, ce dernier n'ayant pas pu apporter la preuve de son envoi à cette date.

k. L'assuré y a fait opposition le 18 janvier 2022.

B. a. Par décision sur opposition du 1er mars 2022, l'OCE a rejeté ladite opposition, l'assuré n'ayant apporté aucun nouvel élément permettant de revoir la décision contestée.

C. a. Le 1er avril 2022, l’assuré a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l’encontre de la décision du 1er mars 2022, concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et à sa réforme en ce sens que son inscription au chômage soit prise en compte à la date du 2 décembre 2021.

b. Le 22 avril 2022, l'intimé a conclu au rejet du recours.

c. Le 17 mai 2022, le recourant a répliqué, reprochant à l'intimé de ne pas avoir communiqué l'identité des collaborateurs auprès desquels la vérification mentionnée dans le courriel de Mme D______ du 25 février 2022 avait été faite, ni la nature de celle-ci. Une recherche dans d'autres classeurs que ceux contenant les réponses négatives, ainsi que dans le système informatique était de mise.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 LPGA).

3.             Le litige porte sur la date d'inscription du recourant au chômage, singulièrement sur la date à laquelle le formulaire idoine a été transmis à l’intimé.

4.             Dans un premier grief, le recourant se plaint d'une violation de la maxime inquisitoire, estimant que l'intimé avait manqué à son obligation de mener les investigations nécessaires et de recueillir les preuves nécessaires de son inscription du 2 décembre 2021.

4.1  

4.1.1 Selon l'art. 29 al. 1 LPGA, celui qui fait valoir son droit à des prestations doit s’annoncer à l’assureur compétent, dans la forme prescrite pour l’assurance sociale concernée.

En vue de son placement, l’assuré est tenu de se présenter à sa commune de domicile ou à l’autorité compétente aussitôt que possible, mais au plus tard le premier jour pour lequel il prétend à l’indemnité de chômage ; il doit ensuite se conformer aux prescriptions de contrôle édictées par le Conseil fédéral (art. 17 al. 2 LACI).

Selon l'art. 29 al. 1 let. a de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (OACI - RS 837.02), l'assuré exerce son droit, notamment, en remettant à la caisse sa demande d’indemnité dûment remplie. La commune ou l’office compétent donne confirmation à l’assuré de la date à laquelle il s’est présenté et de la caisse qu’il a choisie (art. 19 al. 3 phr. 1 OACI).

4.1.2 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b ; ATF 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

La procédure est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire (art. 61 let. c LPGA). Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 I 183 consid. 3.2). Le devoir du juge de constater les faits pertinents ne dispense donc pas les parties de collaborer à l'administration des preuves en donnant des indications sur les faits de la cause ou en désignant des moyens de preuve (ATF 130 I 184 consid. 3.2 ; ATF 128 III 411 consid. 3.2).

Autrement dit, si la maxime inquisitoire dispense les parties de l'obligation de prouver, elle ne les libère pas du fardeau de la preuve. En cas d'absence de preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en supporter les conséquences (ATF 117 V 264 consid. 3), sauf si l'impossibilité de prouver un fait peut être imputée à son adverse partie (ATF 124 V 375 consid. 3). En matière d'indemnités de chômage, l'assuré supporte les conséquences de l'absence de preuve en ce qui concerne la remise des pièces nécessaires pour faire valoir le droit à l'indemnité (cf. arrêt C 294/99 du 14 décembre 1999 consid. 2a, in DTA 2000 no 25 p. 122 ; cf. aussi arrêt 8C_427/2010 du 25 août 2010 consid. 5.1 ; arrêt 8C_591/2012 du 29 juillet 2013).

4.2 En l’occurrence, le recourant a allégué avoir transmis le formulaire de pré-inscription, par courrier A, le 2 décembre 2021. Il a toutefois admis ne pas détenir de preuve de cet envoi.

Le fait qu'il mentionne celui-ci dans divers documents ne permet pas d’établir que le formulaire d'inscription aurait effectivement été communiqué à l’intimé à cette date. En outre, le fait que le formulaire qu'il a déposé à l'accueil le 23 décembre 2021 soit daté du 2 décembre précédent n’est pas une preuve de son envoi à cette même date.

Le recourant ne saurait être suivi lorsqu'il reproche à l'intimé de ne pas avoir procédé aux recherches nécessaires. En effet, il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de leur interpellation par le recourant, M. C______ et le service juridique de l'intimé ont tous deux rapidement contacté le service des inscriptions, lequel a recherché ledit courrier auprès de ses collaborateurs et dans les classeurs contenant les réponses négatives, en vain. Mme D______ mentionne, en outre, dans son courriel du 25 février 2022, être navrée de ne pas pouvoir aider plus et ne pas douter de la bonne foi de l'assuré, mais que ce courrier n'était jamais parvenu à l'ORP. Elle en a également informé le recourant dans un courriel du 18 janvier 2022. Elle a, en outre, transmis à l'intimé tous les courriels en sa possession. Il ressort ainsi du dossier que ce dernier a entrepris toutes les démarches que l'on pouvait raisonnablement attendre de lui.

Le recourant a dès lors échoué à apporter la preuve de son inscription au chômage avant le 23 décembre 2021, sans que cette impossibilité puisse être imputée à l’intimé. Il doit ainsi supporter les conséquences de l'absence d'une telle preuve.

Ce grief sera rejeté.

5.             Dans un second moyen, le recourant a invoqué une violation de son droit d’être entendu, en lien avec une violation du principe de la bonne foi.

5.1 Selon l’art. 29 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable (al. 1). Les parties ont le droit d'être entendues (al. 2).

La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu le droit pour le justiciable de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, celui de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision, celui d'avoir accès au dossier, celui de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 132 V 368 consid. 3.1 et les références), ainsi que le devoir pour l'autorité de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle.

Pour répondre à ces exigences, il suffit que l'autorité mentionne au moins brièvement les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision ; elle n'a toutefois pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les arguments invoqués par les parties. Il n'y a violation du droit d'être entendu que si l'autorité ne satisfait pas à son devoir minimum d'examiner les problèmes pertinents (ATF 129 I 232 consid. 3.2 ; ATF 126 I 97 consid. 2b). La motivation d'une décision est suffisante lorsque l'intéressé est mis en mesure d'en apprécier la portée et de la déférer à une instance supérieure en pleine connaissance de cause (ATF 122 IV 14 consid. 2c). Il suffit que l'autorité mentionne au moins brièvement les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé son prononcé, sans qu'elle soit tenue de répondre à tous les arguments avancés (SJ 1994 p. 163 consid. 1b). La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_603/2015 du 25 avril 2016). En règle générale, l'étendue de l'obligation de motiver dépend de la complexité de l'affaire à juger, de la liberté d'appréciation dont jouit l'autorité et de la potentielle gravité des conséquences de sa décision (cf. ATF 112 Ia 107 consid. 2b). Le juge n’a pas à se prononcer sur tous les arguments juridiques soulevés, tant que la motivation permet de comprendre le raisonnement juridique suivi (ATF 135 III 670 consid. 3.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_782/2020 du 26 mai 2021 consid. 3.3).

5.2  

5.2.1 En l'occurrence, le recourant soutient que l'intimé aurait dû fournir une description détaillée des recherches concrètement effectuées afin qu'il puisse exercer son droit de participation à l'administration des preuves. Par ailleurs, la décision n'était pas suffisamment motivée dès lors qu'elle ne donnait aucune suite aux éléments qu'il avait apportés, à savoir notamment ses échanges avec Mme B______ et M. C______.

Il ressort cependant clairement de la décision entreprise qu'à la suite de ceux-ci, l'intimé a contacté le service des inscriptions, lequel a recherché, en vain, tant auprès de ses collaborateurs que dans les dossiers, le courrier que l'assuré prétendait avoir transmis le 2 décembre 2021.

La description des recherches effectuées est suffisante et a permis au recourant d'apprécier la portée de la décision litigieuse et de la déférer à la chambre de céans en pleine connaissance de cause, comme en atteste le contenu de ses écritures. Force est donc de constater que le droit à une décision motivée a été respecté en l'espèce.

5.2.2 Comme vu précédemment, aucun manque d'investigation ne peut être reproché à l'intimé et le recourant ne peut être suivi lorsqu'il qualifie d'abusif le fait que l'intimé retienne qu'il n'avait pas apporté la preuve complète de l'envoi du formulaire. En effet, l'établissement de ce fait lui revenait.

6.             En conséquence, le recours ne peut qu’être rejeté.

7.             Pour le surplus, la procédure est gratuite.

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le