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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/616/2019

ATAS/431/2022 du 12.05.2022 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/616/2019 ATAS/431/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 12 mai 2022

5ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à GENÈVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Marco ROSSI

 

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


 

EN FAIT

A.    a. En date du 20 novembre 2015, Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né en ______ 1957, a déposé, par l’intermédiaire de l’assurance-maladie SWICA (ci-après : l’assurance ou SWICA), liée à l’assuré par un contrat fondé sur la LCA, une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI ou l’intimé), en raison de troubles de la santé de nature rhumatologique, notamment des sciatalgies. Le dossier médical qui avait été constitué par SWICA accompagnait la demande de prestations.

b. Par courrier du 20 avril 2016, SWICA a informé l’OAI que l’assuré allait être examiné par un médecin expert, soit le docteur B______, spécialiste en médecine interne et rhumatologie, et a proposé à l’OAI de participer à cette expertise, sous forme conjointe. Par courrier du 26 avril 2016, l’OAI a accepté la proposition de SWICA et a transmis à cette dernière la liste des questions que le médecin-conseil de l’OAI souhaitait poser à l’expert.

c. L’expert a examiné l’assuré en date du 19 mai 2016, pendant une heure ; il a ensuite rendu un rapport d’expertise, daté du 23 mai 2016, dont il ressortait que le patient était en mauvais état général et qu’il souffrait d’un syndrome vertébral sur des troubles importants de la statique du rachis, d'un relâchement de la sangle abdominale, d'une rétractation des ischio-jambiers, d'une coxarthrose droite et d'une gonarthrose droite. Le pronostic était réservé et la capacité de travail dans l’activité habituelle était estimée à 0 %. Une éventuelle capacité de 50 %, au maximum, dans une activité adaptée était envisagée, pour autant que les limitations fonctionnelles soient respectées soit notamment, éviter la station debout, avoir un travail assis avec la possibilité de changer de position, ne pas porter de charges de plus de 15 kg, avoir un travail régulier et une activité prévisible pour éviter le stress.

d. Dans un rapport du service médical régional (ci-après : le SMR) de l’OAI daté du 8 décembre 2016, la doctoresse C______ a examiné la situation de l’assuré suite à l’expertise rendue le 23 mai 2016. Le médecin a considéré que les conclusions du Dr B______ étaient convaincantes et a recommandé de les suivre, reprenant le taux de capacité de travail de 0 % dans l’activité habituelle, et de 50 % dans une activité adaptée.

e. Par note de travail du 15 décembre 2016, le gestionnaire de l’OAI a mentionné que l’assuré était restaurateur indépendant depuis 2001 et qu’il avait cessé son activité indépendante en avril 2015 ; dès lors, une enquête économique n’était pas opportune. Selon les chiffres en possession de l’OAI, l’assuré avait réalisé un gain variant entre CHF 25'400.- et CHF 45'000.- ; la comptabilité des années 2013 et 2014 faisait apparaître un revenu respectivement de CHF 25'962.- et de CHF 36'149.-. Au vu de la dernière activité exercée au sein du café-restaurant à l’enseigne «G______ », il y avait lieu de prendre en considération un revenu hypothétique, sans invalidité, de l’ordre de CHF 40'000.- par année. Dès lors que l’assuré avait cessé son activité habituelle de restaurateur et que celle-ci n’était plus exigible, il y avait lieu d’admettre un préjudice économique total.

f. L’OAI a considéré que l’assuré, âgé de 60 ans en 2017, pouvait être réadapté dans une activité adaptée exercée à 50 % ; le point de départ était fixé au mois de septembre 2016. Un entretien lui a été fixé en date du 11 juillet 2017 à l’issue duquel le gestionnaire de l’OAI a conclu à un dommage économique de 30 %, considérant qu’aucune mesure ne saurait réduire le dommage et que les conditions subjectives pour des mesures d’ordre professionnelle n’étaient pas réunies ; dès lors, il était recommandé d’évaluer la perte de gain selon les tables de l’ESS.

g. Par courrier du 27 juillet 2018, l’avocat de l’assuré a interpellé l’OAI, rappelant que son client ne percevait plus d’indemnités de la part de son assurance perte de gain en raison de la fin de la couverture de celle-ci et qu’il était sans nouvelle de l’office depuis sa rencontre avec l’expert, au mois de décembre 2017. L’OAI était informé de l’aggravation de l’état de santé de l’assuré, comme cela ressortait d’un certificat médical du 22 juin 2018 qui indiquait que sa capacité de travail était désormais de 30 % en lieu et place de 50 %, du 1er juillet au 30 décembre 2018, étant précisé qu’il était probable que ce taux d’incapacité de travail se prolongeât au-delà de la date précitée ; était joint en annexe, le certificat médical rédigé par le docteur D______, généraliste, qui confirmait le taux d’incapacité de travail.

h. À la demande de l’OAI, le Dr D______ a confirmé dans un rapport médical du 3 septembre 2018 une capacité de travail exigible de 0 % dans l’activité habituelle et de 50 % dans une activité adaptée, tout en précisant que depuis le 1er juillet 2018, le taux d’activité avait chuté à 30 % dans une activité adaptée. Il était encore mentionné qu’à l’heure actuelle, l’assuré exerçait un « petit travail dans la restauration-bar ».

B.       a. En date du 4 octobre 2018, l’OAI a fait parvenir au conseil de l’assuré un projet d’acceptation de rente prévoyant l’octroi d’une rente d’invalidité limitée dans le temps et le refus de mesures professionnelles. Le statut retenu était celui d’une personne travaillant à plein temps. La motivation du projet de décision prenait en compte une incapacité totale de travail depuis le 27 mars 2015 ; le délai de carence avait donc pris fin le 27 mars 2016, date à partir de laquelle l’assuré avait droit à une rente entière. Toutefois, dès lors que l’assuré n’avait déposé sa demande qu’en date du 20 novembre 2015, les prestations ne pouvaient lui être allouées qu’à partir du 1er mai 2016. Il était ensuite indiqué qu’une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles et raisonnablement exigible à raison de 50 % était médicalement reconnue dès le 1er septembre 2016, ce qui conduisait à limiter le droit de l’assuré à la rente jusqu’au 30 novembre 2016. S’agissant du revenu annuel professionnel raisonnablement exigible, le revenu sans atteinte à la santé était fixé à CHF 40'000.- et le revenu avec atteinte à la santé, à CHF 26'809.-, entraînant ainsi une perte de revenus de CHF 13'191.- qui permettait d’aboutir à un degré d’invalidité de 33 %. Bien que ce degré d’invalidité soit supérieur aux 20 % exigibles, l’OAI considérait que la mise en place de mesures professionnelles ne permettait pas de réduire le dommage, car les conditions subjectives n’étaient pas remplies. Inférieur à 40 %, le degré d’invalidité ne permettait pas non plus la continuation du versement d’une rente après le 30 novembre 2016.

b. Par courrier du 5 novembre 2018, le médecin traitant de l’assuré, soit le Dr D______, a précisé à l’OAI qu’il avait mentionné une incapacité de travail de 70 % depuis le 1er juillet 2018 jusqu’à la fin de l’année 2018, ce qui avait dû faire l’objet d’un certificat médical qui avait dû être transmis par son patient et qui devait donc être pris en considération par l’OAI.

c. En date du 7 novembre 2018, le conseil de l’assuré s’est opposé au projet de décision du 4 octobre 2018 considérant que la date à partir de laquelle une rente d’invalidité devait être allouée était erronée et que le degré d’invalidité qui avait été retenu était sous-évalué. L’assuré considérait avoir droit à une rente d’invalidité dès l’échéance du délai de carence d’un an, à savoir le 27 mars 2016, ajoutant que le degré d’invalidité avait été mal calculé, car son revenu sans atteinte à la santé s’élevait en moyenne à CHF 50'760.-, comme cela ressortait d’un courrier que l’OAI lui avait adressé le 28 août 2018 au sujet du calcul prévisionnel de sa future rente AVS. De surcroît, la capacité de travail de l’assuré était de 30 % et non pas de 50 %, ce qui ressortait du certificat médical du 22 juin 2018 rédigé par le Dr D______. Compte tenu de tous ces éléments, le mandataire de l’assuré avait refait les calculs et aboutissait à la conclusion que son client avait droit à une rente entière du 27 mars au 31 août 2016, puis un quart de rente du 1er septembre 2016 au 30 juin 2018 et enfin un trois-quarts de rente dès le 1er juillet 2018.

d. Le 14 janvier 2019, l’OAI a rendu une décision d’octroi de rente d’invalidité limitée dans le temps et de refus de mesures professionnelles, motivation à l’appui. Les calculs étaient les mêmes que ceux figurant dans le projet de décision ; il en résultait un degré d’invalidité de 33 % et un refus de mise en place de mesures professionnelles. S’agissant du calcul du revenu, l’OAI précisait qu’il s’agissait d’un revenu annuel moyen, pris en compte durant toutes les années de cotisations et non pas d’un salaire précis à un instant donné, ce qui impliquait que le montant retenu pour le salaire sans invalidité n’avait pas été modifié.

C.      a. Par écriture du 15 février 2019, postée le même jour, le mandataire de l’assuré a interjeté recours contre la décision du 14 janvier 2019 par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans). Il était reproché à l’OAI d’avoir commis une erreur en retenant un revenu moyen, sans atteinte à la santé, de CHF 40'000.-, alors que selon le calcul établi pour la rente AVS, le revenu annuel moyen de l’assuré s’élevait à CHF 59'220.-. Il était encore reproché à l’intimé de n’avoir pas tenu compte de la capacité de travail limitée à 30 % dès le 1er juillet 2018, comme cela ressortait du certificat médical établi par le médecin traitant. Il était mentionné que le médecin traitant pouvait être auditionné et qu’un complément d’expertise pouvait être demandé au précédent expert, soit le Dr B______. L’assuré concluait préalablement à l’audition du médecin traitant et à ce qu’un complément d’expertise soit ordonné afin de confirmer l’étendue exacte des atteintes à la santé du recourant, principalement, à l’annulation de la décision querellée et à ce qu’une nouvelle décision soit rendue par l’OAI dans le sens des considérants, sous suite de frais et dépens.

b. Par réponse du 18 mars 2019, l’OAI a conclu au maintien de sa décision, rappelant qu’il s’était fondé sur le rapport d’expertise du 23 mai 2016 pour établir la capacité de travail du recourant, ainsi que sur les chiffres résultant de la comptabilité des années 2013, 2014 et 2015 pour établir le revenu sans invalidité. L’OAI précisait que le montant de CHF 59'220.- concernait le revenu annuel moyen déterminant qui ne devait pas être confondu avec le revenu hypothétique sans invalidité. Était joint en annexe un avis médical du SMR daté du 14 mars 2019, par lequel le médecin-conseil de l’OAI notait que le médecin traitant de l’assuré avait retenu une incapacité de 70 % allant du 1er juillet au 31 décembre 2018 dans son certificat du 5 novembre 2018, mais ne précisait pas les raisons de cette incapacité de travail et ne précisait pas non plus si cela concernait l’activité habituelle ou une activité adaptée. Dans son rapport du 11 septembre 2018, le même médecin traitant indiquait que la situation était inchangée depuis son rapport du 15 juillet 2016 et que l’état de l’assuré était stationnaire. Il en résultait qu’il n’y avait pas de modification de l’état de santé depuis juillet 2018, moment où le médecin traitant de l’assuré avait attesté d’une diminution de la capacité de travail à 30 %. En conclusion, le SMR maintenait son appréciation, à savoir que l’assuré avait une capacité de travail de 50 % dans une activité adaptée.

c. Par réplique du 12 avril 2019, le recourant a persisté dans ses conclusions tout en demandant l’audition de son médecin traitant, qui serait à même d’expliquer l’évolution de son état de santé. Il demandait également un complément d’expertise réalisé par le précédent expert, soit le Dr B______.

d. Par courrier du 18 décembre 2019, la chambre de céans a informé les parties qu’elle envisageait de mandater un expert, proposant que ce dernier soit le Dr B______, qui semblait convenir aux deux parties.

e. Par courrier du 15 janvier 2020, l’OAI a considéré qu’une expertise judiciaire n’était pas nécessaire, mais que si celle-ci était ordonnée, il s’opposait à ce qu’elle soit confiée au Dr B______, car ce dernier s’était entretenu avec l’assuré de sa situation assécurologique en date du 29 janvier 2019 et que, dès lors qu’il avait été sollicité par l’assuré, il ne pouvait pas être mandaté à titre d’expert.

f. Par courrier du 30 juin 2020, la chambre de céans a proposé de mandater un autre expert en la personne du docteur E______, spécialiste FMH en rhumatologie ; les parties ne se sont pas opposées à cette proposition.

g. Par courrier du 8 janvier 2021, la chambre de céans a fait parvenir aux parties un projet de mission d’expertise avec une liste de questions. Dans le délai qui leur avait été accordé, les parties n’ont pas fait valoir de questions supplémentaires par rapport à la mission d’expertise.

h. Par ordonnance d’expertise du 3 mai 2021, la chambre de céans a mandaté le Dr E______. Ce dernier a rendu son rapport d’expertise en date du 24 janvier 2022.

i. L’assuré a été examiné par l’expert en date du 12 mai 2021. Dans son rapport d’expertise, le Dr E______ a examiné l’ensemble des documents versés au dossier et notamment le précédent rapport d’expertise rhumatologique du Dr B______ daté du 23 mai 2016. Il s’est mis en rapport avec les docteurs B______, F______ et D______. Lors de son examen, le recourant a déclaré que sa situation était stable depuis l’opération, bien que sa jambe reste froide, qu’il ait des fourmillements dans la jambe et qu’il ne puisse pas marcher plus de 45 minutes sans avoir mal à la jambe et au dos. Décrivant une journée-type, l’assuré a déclaré se lever à sept heures, dès son réveil, puis boire son café, aller faire des courses et faire sa promenade de santé d’environ 35 minutes. L’après-midi, il a déclaré faire souvent une sieste, ressortir vers 16 heures et faire petit tour de 15 minutes sur les quais. Le soir, l’assuré a expliqué qu’il s’endormait parfois devant la télévision mais que de toute façon, toutes les deux heures, il se réveillait en raison des douleurs puis marchait 15 minutes et retournait se coucher. L’assuré s’occupait seul de l’entretien de son petit studio, d’une vingtaine de mètres carrés, mais c’est sa compagne qui s’occupait de la lessive et du repassage. Il ne se projetait plus du tout dans le monde du travail et était désormais suivi par le Dr F______, suite au départ à la retraite du Dr D______. Après examen, l’expert a retenu les diagnostics suivants ayant une répercussion sur la capacité de travail : des lombosciatalgies chroniques, depuis mars 2015 ; des signes cliniques de compression radiculaire actuellement ; un status post chirurgie lombaire ; une coxarthrose discrète bilatérale diagnostiquée en 2016, asymptomatique actuellement et une gonarthrose discrète bilatérale, diagnostiquée en 2016, asymptomatique actuellement. L’expert a considéré que la gravité des lombalgies chroniques était de degré moyen chez un assuré qui ne travaillait pas et était actuellement compensée par la prise d’un antalgique, soit du Dafalgan. Les examens radiologiques du mois de novembre 2021 montraient une stabilité des lésions connues depuis l’opération de 2015. La gonarthrose bilatérale était faible et était devenue asymptomatique depuis l’expertise réalisée par le Dr B______. La coxarthrose était faible, il s’agissait d’une atteinte asymptomatique actuellement et sans répercussion à l’examen clinique. Les atteintes et les plaintes de la personne expertisée étaient considérées comme objectivables au status, en ce qui concernait les lombalgies, ainsi qu’en radiologie, étant précisé que la gonarthrose et la coxarthrose étant actuellement asymptomatiques étaient visibles uniquement en radiologie. L’expert considérait que l’état de la personne expertisée était resté stable sur le plan médico-assécurologique, entre le 1er septembre 2016 et le 1er juillet 2018. Selon l’expert, les exacerbations de lombalgies, de gonalgies et de coxalgies, qui avaient été constatées par le Dr D______ en juin 2018, étaient dues à un nouveau poste qui n’était pas adapté aux limitations fonctionnelles de l’expertisé, ce qui expliquait très probablement les douleurs ressenties. Actuellement, sans activité professionnelle, l’expertisé ne souffrait plus de gonalgies et de coxalgies ; les lombalgies qui persistaient étaient stables et pouvaient diminuer avec un programme de physiothérapie adapté et une perte pondérale.

Les atteintes diagnostiquées et notamment les atteintes rhumatologiques actuelles pouvaient empêcher certaines tâches ménagères, comme passer l’aspirateur, nettoyer en se mettant à genoux, étant précisé que l’expertisé ne s’était pas plaint de ces limitations car il avait probablement adapté ses tâches ménagères pour les contourner. Il parvenait à faire ses commissions et souhaitait même se porter bénévole pour aider les personnes âgées de son entourage à faire leurs achats. L’expert n’avait pas constaté d’exagération des symptômes ou une semblable constellation et considérait que le tableau clinique était cohérent avec les diagnostics. L’expert retenait les limitations fonctionnelles suivantes :

-          en raison de la pathologie lombaire, depuis mars 2015 : éviter la station debout statique, éviter les mouvements répétés du rachi, les rotations du tronc, les positions penchées en avant et en arrière ; ne pas porter de charges de plus de 10 kg ; ne pas devoir marcher sur un terrain non plat ; ne pas devoir monter sur une échelle ou sur des échafaudages ; avoir un travail assis avec la possibilité de changer de position toutes les heures ;

-          en raison de la gonarthrose, depuis le 19 mai 2016 : éviter la position à genoux et accroupie et la marche en terrain non plat ;

-          en raison de la coxarthrose, depuis le 19 mai 2016 : éviter la position accroupie.

S’agissant de la capacité de travail de l’expertisé dans son activité habituelle de restaurateur, l’expert a considéré qu’elle était nulle, depuis le 27 mars 2015, date du début des symptômes, en raison des limitations fonctionnelles qui l’empêchaient d’exercer cette activité.

Dans une activité lucrative adaptée à ses limitations fonctionnelles, l’expert a considéré que l’expertisé était capable d’exercer une activité lucrative adaptée à un taux de 50 %, dès le 1er septembre 2016. Le Dr E______ a estimé que les douleurs développées par l’assuré - qui avaient mené le Dr D______ à estimer une incapacité de travail dans la restauration à 70 % - n’auraient pas dû être retenues, dès lors qu’il ne s’agissait pas d’un poste adapté, ce qui avait entraîné une exacerbation, heureusement sans gravité, des symptômes douloureux de l’assuré. L’expert maintenait que la capacité de travail dans la restauration était nulle depuis mars 2015. S’agissant de la capacité de travailler dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles, elle était estimée à 50 % depuis le 1er septembre 2016. L’expert a notamment mentionné, comme activité adaptée, un poste administratif qui semblait correspondre aux limitations fonctionnelles. En tenant compte du taux de 50 % de travail dans cette activité, l’expert a considéré qu’il n’y avait pas de baisse de rendement. S’agissant de l’évolution de la capacité de travail de l’assuré, entre le 1er septembre 2016 et le 1er juillet 2018, l’expert a rappelé que dans son activité habituelle, la capacité de travail de l’assuré était nulle depuis le 27 mars 2015 et que l’expertisé avait une capacité de travail de 50 %, dans une activité adaptée, depuis le 3 octobre 2016. Selon lui, aucune mesure médicale n’était nécessaire pour reprendre une activité lucrative adaptée au taux initial global de 50 % et aucun élément médical objectif ne s’opposait à la reprise d’une activité adaptée à 50 %, comme le préconisait déjà le Dr B______ dans son rapport d’expertise du 23 mai 2016.

L’expert a manifesté son désaccord avec le rapport médical du Dr D______ du 11 septembre 2018 et son courrier du 5 novembre 2018, en raison du fait que le médecin traitant avait retenu une capacité de travail de 50 % qui diminuait à 30 % alors qu’il s’agissait d’une activité non adaptée pour l’assuré. Dès lors, l’expert a déclaré ne pas pouvoir tenir compte de l’appréciation du Dr D______ sur le plan médico-assécurologique. L’expert s’est en revanche rallié à l’avis de la Dresse C______ du 14 mars 2019, faisant état d’une capacité de travail de 50 % dans une activité adaptée, ajoutant même que, selon son évaluation actuelle, il était sur le plan médico-théorique possible d’augmenter la capacité de travail, dans une activité adaptée.

j. Par courrier du 2 février 2022, l’OAI s’est prononcé sur le rapport d’expertise en joignant l’avis du SMR qui considérait que ses conclusions précédentes n’étaient pas modifiées, voire confirmées par cette expertise judiciaire, que le SMR retenait comme convaincante.

k. Par courrier du 18 février 2022, le mandataire du recourant n’a pas émis de critiques à l’encontre de l’expertise, se contentant de relever que l’assuré serait bientôt âgé de 65 ans et certainement jamais à même, sans tenir compte de son âge mais uniquement de ses atteintes à la santé, de travailler un jour, avec un taux d’activité supérieur à 50 %. Il a de plus rappelé qu’il fallait tenir compte d’un revenu annuel moyen, avant invalidité, de CHF 59'220.- et non pas de CHF 40'000.- et qu’ainsi, en retenant un revenu avec atteinte à la santé dans une activité adaptée, de CHF 26'809.- soit celui retenu par l’intimé, on arrivait à la conclusion que la perte de revenus s’élevait à CHF 32’411.-. Il en résultait un degré d’invalidité de 55 %, ce qui donnait le droit à une rente d’invalidité de 55 %, dès le 1er décembre 2016, selon le nouvel article 28b al. 2 LAI, en plus d’une rente entière du 1er mai 2016 au 30 novembre 2016.

l. Par observations spontanées du 1er mars 2022, l’OAI a répété ne pas tenir compte du montant de CHF 59'220.- qui était un revenu annuel moyen déterminant qui ne devait pas être confondu avec le revenu hypothétique sans invalidité, lequel avait fait l’objet d’une évaluation circonstanciée de l’intimé qui renvoyait aux notes du travail du 15 décembre 2016 et du 31 octobre 2017.

m. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées par courrier du 9 mars 2022.

n. Les autres faits seront repris - en tant que de besoin - dans la partie « en droit » du présent arrêt.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.        Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Toutefois, dans la mesure où le recours était, au 1er janvier 2021, pendant devant la chambre de céans, il reste soumis à l'ancien droit (cf. art. 83 LPGA).

4.        Le 1er janvier 2022 sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705).

En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l'état de fait réalisé à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1 et les références).

En l’occurrence, la décision querellée a été rendue antérieurement au 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées ci-après dans leur ancienne teneur.

5.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

6.        Le litige porte sur le bien-fondé de la décision du 14 janvier 2019, limitant la rente octroyée à l’assuré à la période allant du 1er mai au 30 novembre 2016, singulièrement la détermination du taux d’invalidité pouvant éventuellement donner lieu au versement d’une rente au-delà du 30 novembre 2016.

7.        Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

8.        En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70 % au moins, à un trois-quarts de rente s'il est invalide à 60 % au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50 % au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40 % au moins.

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

9.         

9.1 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n’est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu’en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l’affaire sans apprécier l’ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L’élément déterminant pour la valeur probante d’un rapport médical n’est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l’objet d’une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu’il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l’expert soient bien motivées (ATF 125 V 351 consid. 3).

9.2 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d’apprécier certains types d’expertises ou de rapports médicaux (ATF 125 V 351 consid. 3b). Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d’observations approfondies et d’investigations complètes, ainsi qu’en pleine connaissance du dossier, et que l’expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu’aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l’expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l’unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc).

On ajoutera qu’en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n’est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s’apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu’au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d’expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l’administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu’un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n’en va différemment que si ces médecins traitants font état d’éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l’expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l’expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.2).

Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 du règlement sur l’assurance-invalidité, du 17 janvier 1961 [RAI – RS 831.201] ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve ; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

10.    Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

11.     

11.1 En l’espèce, le recourant a remis en cause, dans un premier temps, la capacité de travail retenue par l’OAI dans une activité adaptée, en se fondant, notamment, sur l’avis de son médecin traitant, le Dr D______. Après le complément d’expertise réalisé par le Dr E______, le recourant semble avoir accepté le taux d’incapacité de travail de 50 % dans une activité adaptée, mais maintient ses conclusions quant au revenu devant être pris en compte par l’OAI pour calculer le taux d’invalidité. Étant encore précisé que le statut de travailleur à plein temps n’est pas contesté.

C'est le lieu de rappeler que lorsqu'une appréciation repose sur une évaluation médicale complète - comme l'est celle du Dr E______ - elle ne saurait être remise en cause pour le seul motif qu'un ou plusieurs médecins ont une opinion divergente. Pour qu'il en aille différemment, il appartient à la partie recourante de mettre en évidence des éléments objectivement vérifiables - de nature notamment clinique ou diagnostique - qui auraient été ignorés et qui seraient suffisamment pertinents pour en remettre en cause le bien-fondé.

Le recourant ne met pas en exergue de tels éléments en l’occurrence.

L’expert a notamment expliqué les raisons pour lesquelles il se distançait de l’appréciation du Dr D______, retenant une capacité de travail de 30 %, dès lors que ladite appréciation se fondait sur une activité de restaurateur, non adaptée.

De cette expertise, il ressort notamment que la capacité de travail du recourant dans son activité habituelle est nulle depuis le 27 mars 2015 et qu’une capacité de travail de 50 % dans une activité adaptée est exigible dès le 1er septembre 2016.

La chambre de céans constate que l'expertise du Dr E______ a été établie en pleine connaissance du dossier, qu’elle relate les plaintes du recourant, repose sur des examens cliniques complets et que ses conclusions sont motivées, de sorte qu'elle satisfait aux réquisits jurisprudentiels topiques en matière de valeur probante des rapports médicaux (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

Au vu de ce qui précède, c'est à bon droit que l'intimé s'est rallié aux conclusions de l'expertise réalisée par le Dr B______ et confirmées par l’expertise du Dr E______.

La chambre de céans retiendra donc que la capacité de travail du recourant dans son activité habituelle de restaurateur est nulle depuis le 27 mars 2015 et qu’une capacité de travail de 50 % dans une activité adaptée est exigible dès le 1er septembre 2016.

Compte tenu de ce qui précède la demande préalable du recourant, visant à l’audition de son médecin traitant, le Dr D______, peut être écartée par appréciation anticipée des preuves, la chambre de céans considérant que les faits retenus présentent un degré de vraisemblance prépondérante (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a ; ATF 122 III 219 consid. 3c). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101 ; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; ATF 122 V 157 consid. 1d).

11.2 S’agissant des dates, l’incapacité de travail totale étant reconnue depuis le 27 mars 2015, le délai de carence d’une année a pris fin le 27 mars 2016, date à partir de laquelle le recourant a théoriquement droit à une rente entière de l’OAI.

Toutefois, la demande de prestations invalidité a été déposée en date du 20 novembre 2015, ce qui implique que le droit à la rente entière ne peut prendre naissance, au plus tôt, qu’à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a déposé sa demande de prestations, conformément à l’art. 29 al. 1 LAI. Dans le cas présent, c’est à partir du 1er mai 2016 au plus tôt que le droit à la rente prend naissance.

En ce qui concerne la capacité de travail de 50 % dans une activité adaptée, celle-ci a été reconnue, dès le 1er septembre 2016. En application de l’art. 88a al. 1 RAI, la santé du recourant s’étant améliorée, il convient, à l’issue d’un délai de trois mois, soit dès le 1er décembre 2016, de diminuer le droit aux prestations, dès lors que l’on peut s’attendre à ce que l’amélioration constatée de 50 % se maintienne durant une assez longue période.

En conclusion, le droit à une rente entière d’invalidité, du 1er mai au 30 novembre 2016, doit être confirmé.

12.     

12.1 Pour la période allant au-delà du 30 novembre 2016, il convient de déterminer le degré d'invalidité du recourant en se fondant sur une capacité de travail nulle dans l’activité habituelle et de 50 % dans une activité adaptée.

12.2 Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu réaliser s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA). Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente ; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222).

Pour fixer le revenu sans invalidité, il faut établir ce que l'assuré aurait – au degré de la vraisemblance prépondérante – réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas invalide (ATF 139 V 28 consid. 3.3.2 et ATF 135 V 297 consid. 5.1). Ce revenu doit être évalué de manière aussi concrète que possible si bien qu’il convient, en règle générale, de se référer au dernier salaire que l'assuré a obtenu avant l'atteinte à la santé, en tenant compte de l'évolution des circonstances au moment de la naissance du droit à la rente et des modifications susceptibles d'influencer ce droit survenues jusqu'au moment où la décision est rendue (ATF 129 V 222 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_869/2017 du 4 mai 2018 consid. 2.2). Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières qu'il peut se justifier qu'on s'en écarte et qu'on recoure aux données statistiques résultant de l’ESS éditée par l'office fédéral de la statistique (ci-après : OFS) (arrêts du Tribunal fédéral des assurances I 201/06 du 14 juillet 2006 consid. 5.2.3 et I 774/01 du 4 septembre 2002). Tel sera le cas lorsqu'on ne dispose d'aucun renseignement au sujet de la dernière activité professionnelle de l'assuré ou si le dernier salaire que celui-ci a perçu ne correspond manifestement pas à ce qu'il aurait été en mesure de réaliser, selon toute vraisemblance, en tant que personne valide ; par exemple, lorsqu'avant d'être reconnu définitivement incapable de travailler, l'assuré était au chômage ou rencontrait d'ores et déjà des difficultés professionnelles en raison d'une dégradation progressive de son état de santé ou encore percevait une rémunération inférieure aux normes de salaire usuelles. On peut également songer à la situation dans laquelle le poste de travail de l'assuré avant la survenance de l'atteinte à la santé n'existe plus au moment déterminant de l'évaluation de l'invalidité (arrêts du Tribunal fédéral des assurances I 168/05 du 24 avril 2006 consid. 3.3 et B 80/01 du 17 octobre 2003 consid. 5.2.2).

12.3 Quant au revenu d'invalide, il doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l'intéressé (ATF 135 V 297 consid. 5.2). Lorsque l'assuré n'a pas repris d'activité, ou aucune activité adaptée lui permettant de mettre pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle, contrairement à ce qui serait raisonnablement exigible de sa part, le revenu d'invalide peut être évalué sur la base de données statistiques, telles qu'elles résultent de l’ESS (ATF 126 V 75 consid. 3b/aa et bb). Dans ce cas, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table ESS TA1, à la ligne « total secteur privé » (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 124 V 321 consid. 3b/bb).

En l’occurrence, l’OAI a établi le revenu annuel brut raisonnablement admissible en se fondant sur l’ESS 2014, en prenant le tableau TA1, pour un homme, avec une activité de niveau 1, actualisé en fonction d’une durée de travail hebdomadaire de 41,7 heures et corrigé au taux de variation d’indice. Ce calcul aboutit à un montant, avec invalidité, de CHF 67'022.- à 100 %, soit de CHF 33'511.- à 50 % et ne prête pas le flanc à la critique. L’OAI a réduit ce montant en déduisant un abattement supplémentaire de 20 %, ce qui est admissible en tenant compte des limitations fonctionnelles et de l’âge du recourant. On ajoutera que le recourant ne critique pas le calcul du montant d’invalide raisonnablement admissible.

12.4 Dans le cas d’espèce, le recourant critique le montant du revenu sans invalidité retenu par l’OAI, soit CHF 40'000.-, au motif que c’est le montant de CHF 59'220.- mentionné dans le décompte du 14 janvier 2019 de l’OAI qui doit être pris en compte, en lieu et place.

Le montant de CHF 59'220.- figurant dans la première page de la décision correspond au revenu annuel moyen déterminant et représente la base de calcul utilisée pour calculer la quotité de la rente invalidité (ou AVS) mensuelle.

En vertu de l’art. 36 al. 2 première phrase LAI, les dispositions de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10) sont applicables par analogie au calcul des rentes ordinaires de l’assurance-invalidité, le montant des rentes d’invalidité correspondant à celui des rentes de vieillesse (art. 37 al. 1 LAI). L’art. 32 al. 1 RAI renvoie d’ailleurs aux art. 50 à 53bis du règlement du 31 octobre 1947 sur l’assurance-vieillesse et survivants (RAVS - RS 831.101).

Selon l’art. 29bis al. 1 LAVS, le calcul de la rente est déterminé par les années de cotisations, les revenus provenant d’une activité lucrative ainsi que les bonifications pour tâches éducatives ou pour tâches d’assistance entre le 1er janvier qui suit la date où l’ayant droit a eu 20 ans révolus et le 31 décembre qui précède la réalisation du risque assuré.

À teneur de l’art. 29ter al. 2 LAVS, sont considérées comme années de cotisation, les périodes pendant lesquelles une personne a payé des cotisations (let. a), pendant lesquelles son conjoint au sens de l’art. 3 al. 3, a versé au moins le double de la cotisation minimale (let. b) et pour lesquelles des bonifications pour tâches éducatives ou pour tâches d’assistance peuvent être prises en compte (let. c).

Quant au revenu annuel moyen (ci-après : RAM), selon l’art. 29quater LAVS, il se compose des revenus de l’activité lucrative (let. a), des bonifications pour tâches éducatives (let. b) et des bonifications pour tâches d’assistance (let. c).

Contrairement à ce que soutient le mandataire du recourant, il n’y a pas lieu de se fonder sur le RAM de l’art. 29 quater LAVS, car ce dernier ne sert pas à calculer le degré d’invalidité, mais est utilisé pour calculer la quotité de la rente AVS ou AI devant être versée. Partant et conformément à la jurisprudence citée sous ch. 12.2 supra, le RAM ne peut pas être pris en compte pour établir la perte de gain résultant de l’invalidité.

On ajoutera, pour être complet, que le mandataire du recourant erre également en demandant l’application du nouvel art. 28b al. 2 LAI entré en vigueur le 1er janvier 2022, dès lors que ce dernier n’était pas en vigueur au moment où la décision querellée a été rendue.

Selon la note de travail du 15 décembre 2016, pour établir le montant du revenu sans invalidité, l’OAI s’est fondé sur les bilans et comptes d’exploitation du café- restaurant à l’enseigne « G______ », sis à H______, exploité par le recourant depuis juin 2011 jusqu’au 31 mars 2015.

Selon les données transmises par l’assuré à l’OAI, il est apparu qu’il avait réalisé un gain variant entre CHF 25'400.- et CHF 45'000.- selon les extraits de compte individuel ; la comptabilité des années 2013 et 2014 faisait apparaître un revenu respectivement de CHF 25'962.- et de CHF 36'149.-.

Sur la base de ces chiffres et concernant la dernière activité exercée par le recourant au sein du café-restaurant à l’enseigne «G______ », l’OAI a retenu un revenu hypothétique, sans invalidité, de l’ordre de CHF 40'000.- par année.

Si l’on examine l’extrait de compte individuel, on peut observer des montants extrêmement variables. Ainsi de 1990 à 2000, lorsqu’il était encore employé, ce sont des revenus moyens de CHF 55'000.- qui ont été portés en compte. À partir du moment où le recourant est devenu indépendant, soit à partir de 2001, les montants ont varié considérablement, allant d’environ CHF 26'000.- en 2001 jusqu’à plus de CHF 132'000.- en 2004 puis s’établissant à environ CHF 80’000 jusqu’en 2008, puis ensuite autour de CHF 70'000.-. À partir de 2011 et de la reprise de l’exploitation du café-restaurant « G______ », les revenus crédités sur le compte AVS du recourant ont très nettement diminué, passant de CHF 45'000.- en 2012 jusqu’à CHF 36'000.- en 2014.

Dans sa demande de prestations invalidité déposée auprès de l’OAI le 20 novembre 2015, sous le chiffre 5.4 visant l’activité lucrative, l’assuré a déclaré qu’il était « restaurateur indépendant à 100 % depuis le 1er février 2001 jusqu’au 31 mars 2015 » et qu’il réalisait un revenu brut « mensuel de CHF 4’000.- », ce qui équivaut à un revenu brut annuel moyen de CHF 48'000.-, plus élevé que le montant hypothétique sans invalidité de CHF 40'000.- retenu par l’OAI.

S’agissant du revenu d’un indépendant, le Tribunal fédéral a rappelé, dans son arrêt du 9 mai 2016 (9C_658/2015 consid. 5.1.1), que le point de référence pour la détermination du revenu de personne valide est en principe le dernier gain réalisé avant la survenance de l'atteinte à la santé, adapté à l'évolution du salaire nominal (ATF 139 V 28 consid. 3.3.2 p. 30). Mais il a ajouté qu’il convenait de déroger à cette règle pour les personnes assurées qui exerçaient une activité indépendante avant la survenance de l'atteinte à la santé, lorsque les circonstances permettaient d'admettre avec une vraisemblance prépondérante que, si elle était tombée malade, elle aurait abandonné son activité non rémunératrice et en aurait accepté une autre, mieux rémunérée, ou lorsque l'activité indépendante, en raison de sa courte durée, ne constitue pas une base suffisante pour déterminer le revenu réalisé sans handicap (ATF 135 V 58 consid. 3.4.6 p. 64). Dans ce cas, il a envisagé que le revenu déterminant d’un indépendant pouvait également être déterminé sur la base des inscriptions au compte individuel (ci-après : CI), en tenant compte des fluctuations importantes et relativement brèves et en se basant sur la moyenne de plusieurs années (arrêts du Tribunal fédéral 8C_211/2013 du 3 octobre 2013 consid. 4.2, in : SVR 2014 UV n° 1 p. 1, 8C_576/2008 du 10 février 2009 consid. 6.2, in : SVR 2009 IV n° 28 p. 79), étant encore précisé que la personne assurée ainsi que l'office AI ont toutefois la possibilité d'apporter la preuve contraire que le revenu (soumis à cotisation) effectivement réalisé est plus élevé, resp. plus bas que les revenus CI versés (art. 25 al. 1 RAI ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_9/2009 du 10 novembre 2009 consid. 3.4, in : RSA 2010 IV n° 26 p. 79, et 9C_111/2009 du 21 juillet 2009 consid. 2.1.2 avec renvois).

S’agissant de la durée de l’activité indépendante, le recourant a exploité le café « G_____» pendant une durée inférieure à quatre ans, de juin 2011, date de la reprise de l’établissement, jusqu’au 31 mars 2015, date à partir de laquelle sa santé ne lui a plus permis d’exercer son activité habituelle de restaurateur.

Il apparaît que pendant cette période, le recourant a apparemment réalisé un revenu plus bas que pendant les années antérieures ; de surcroit, l’OAI a pris en compte, à teneur de sa note de travail du 15 décembre 2016, la comptabilité 2014 et 2013 ainsi que les extraits de CI (sans indiquer les années retenues entre 2011 et 2014) pour établir un revenu hypothétique sans invalidité de CHF 40'000.-.

Ce faisant, l’OAI s’est fondé sur une période comptable de deux ans (2013 et 2014), qui correspond aux premières années de reprise de l’exploitation du café G______.

Or, le Tribunal fédéral a clairement visé la situation de la reprise d’une exploitation dans son arrêt du 3 mai 2016 (9C_644/2015 consid. 4.6.2), en rappelant que lors de la reprise d’une entreprise, les bénéfices d'exploitation étaient généralement faibles au cours des premières années suivant le début de l'activité indépendante, et ce pour diverses raisons (taux d'amortissement élevé sur les nouveaux investissements, etc.) (ATF 135 V 58 consid. 3.6.4 p. 64 avec renvois).

Partant, l’OAI s’est, d’une part, fondé sur une durée trop courte pour procéder à l’évaluation des revenus du recourant et n’a, d’autre part, pas tenu compte du fait que ces revenus étaient plus faibles, car réalisés pendant les premières années d’exploitation du café.

Dès lors, le chiffre de CHF 40'000.- de revenu hypothétique sans invalidité ne peut pas être retenu.

Conformément à la solution retenue par le Tribunal fédéral dans l’arrêt susmentionné (9C_644/2015) au consid. 4.9, l’OAI devra procéder à des clarifications supplémentaires. On peut par exemple penser à une enquête auprès de l'assuré concernant le type d'exploitation ou d'activités (dans l'hypothèse où aucune atteinte à la santé ne serait survenue). Entrent également en ligne de compte des renseignements ou des expertises qui peuvent être demandés, par exemple, aux associations professionnelles concernées ou à des services cantonaux compétents. L’OAI pourra également envisager de faire une moyenne du revenu sans invalidité obtenu sur une plus longue période, incluant les années précédant la reprise du café G______ pour calculer un revenu hypothétique. Sur ces indications, le revenu déterminant avant invalidité devra être établi à nouveau par l’OAI puis il conviendra de déterminer le degré d'invalidité en fonction du revenu déterminant retenu.

13.    Partant, le recours sera partiellement admis, par substitution de motifs, la décision du 14 janvier 2019 sera annulée et la cause retournée à l’OAI pour nouvelle décision au sens des considérants.

14.    Le recourant obtenant partiellement gain de cause et étant assisté d’un mandataire, une indemnité de CHF 2’500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 89H al. 3 LPA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]), à charge de l'intimé.

15.    La procédure de recours en matière de contestation portant sur l'octroi ou le refus de prestations de l'assurance-invalidité étant soumise à des frais de justice, un émolument de CHF 200.- sera mis à charge de l'intimé (art. 69 al. 1 bis LAI).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Annule la décision du 14 janvier 2019 et renvoie la cause à l’intimé pour nouvelle décision au sens des considérants.

4.        Alloue au recourant une indemnité de CHF 2’500.-, à titre de dépens, à la charge de l'intimé.

5.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le