Skip to main content

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/1456/2021

ATAS/350/2022 du 11.04.2022 ( LAA ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 02.06.2022, rendu le 11.10.2022, REJETE, 8C_343/2022
En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1456/2021 ATAS/350/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 11 avril 2022

6ème Chambre

 

En la cause

 

Monsieur A______, domicilié c/o B______, à THONEX, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Thomas BÜCHLI

 

 

recourant

contre

 

SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS, sise Fluhmattstrasse 1, Postfach 4358, LUZERN, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Jeanne-Marie MONNEY

 

 

intimée

 


EN FAIT

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né le ______ 1970, marié, originaire du Kosovo, exerçait comme manœuvre auprès de l’entreprise de maçonnerie C______ et était assuré à ce titre contre le risque accident auprès de la Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents (ci-après : la SUVA). Le 19 décembre 1996, il a reçu une pierre sur la jambe droite ayant entrainé une fracture de celle-ci, traitée chirurgicalement. Une nouvelle intervention a eu lieu en 1998 (complication par un hématome et une vis cassée et la nécessité d’une résection du nerf péronier). Le 25 février 2005, une intervention pour séquestre osseux du tibia droit a été pratiquée.

b. Le 25 mai 2000, l’assuré s’est fracturé le scaphoïde droit et a été mis au bénéfice d’une rente d’invalidité de la SUVA de 15 %.

c. L’assuré a séjourné à la clinique romande de réadaptation (CRR) du 8 au 22 novembre 2005, laquelle a posé les diagnostics de probable syndrome somatoforme douloureux persistant (F 45.4) ; séquestrectomie et curage de la cavité médiale du tibia droit le 22 février 2005 ; fracture tibiopéronière ostéosynthésée en 1996 ; fracture du scaphoïde carpien droit, le 25 mai 2000, traitée conservativement ; rupture spontanée du long extenseur du pouce droit, traitée par un transfert de l’extenseur propre de l’index, le 6 février 2001. Aucune amélioration n’avait été obtenue et aucune évaluation fiable des capacités fonctionnelles n’avait pu être réalisée par manque de coopération de l’assuré.

d. Le 2 mars 2006, le médecin-conseil de la SUVA a considéré, après examen de l’assuré, qu’il n’y avait pas de limitation fonctionnelle de la jambe droite mais des troubles irritatifs et que la marche avec deux cannes n’était pas nécessaire.

e. Une expertise du 27 août 2008 du docteur D______, médecin-adjoint au service de traumatologie du centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), a conclu à une plainte persistante de douleurs dans la jambe droite et aux diagnostics suivants : séquelles douloureuses d’une fracture des deux os de la jambe droite avec contusion cutanée appuyée traitée par ostéosynthèse en urgence par plaque et vis, malgré l’ablation du matériel d’ostéosynthèse une année et demi après et enfouissement du nerf péronier profond dans la loge antéro-externe pour suspicion de conflit cicatriciel post-opératoire ; insuffisance artérielle stade I diagnostiquée en 2002, associée à une occlusion de l’artère tibiale antérieure au foyer de fracture, mise en évidence par l’artériographie faite le 21 janvier 2008 par le service de radiodiagnostic et radiologie interventionnelle du CHUV à Lausanne ; neuropathie du nerf péronier profond droit après sa résection en 98. Status post séquestrectomie du tibia droit en 2005 pour ostéomyélite chronique ; suspicion actuelle d’ostéite chronique à bas bruit pandiaphysaire du tibia droit, associée à une éventuelle hernie musculaire de la loge antéro-externe droite. Il a proposé un alésage de propreté du tibia, lequel n’a par la suite plus été jugé nécessaire, en l’absence de signe d’une infection chronique au niveau du tibia.

f. L’assuré a séjourné à la CRR du 11 au 25 mai 2011, pour un diagnostic de douleurs chronique de la jambe droite d’origine multifonctionnelle ; selon le rapport de la CRR, la capacité de travail de l’assuré était totale dans une activité adaptée ; sur cette base, la SUVA a limité sa prise en charge à un traitement médicamenteux. Un consilium psychiatrique du 17 mai 2011 a conclu à des capacités adaptatives faibles de l’assuré, sans psychopathologie avérée.

g. Le 8 mai 2012, le médecin d’arrondissement de la SUVA (le docteur E______, FMH médecine physique et réadaptation et rhumatologie) a examiné l’assuré ; celui-ci se plaignait de douleurs résiduelleS à la jambe droite ; il présentait un syndrome douloureux chronique, sans lien avec l’accident de 1996.

h. Par décision du 29 juin 2012, confirmée sur opposition le 23 juillet 2013, la SUVA a mis un terme à la prise en charge du traitement médical, les troubles de l’assuré étant exclusivement de nature maladive. La décision sur opposition a exclu un lien de causalité adéquate entre le syndrome douloureux chronique et les accidents de 1996 et 2000.

i. Le 8 septembre 2015, le docteur F______, à Annecy, a suggéré, à la suite d’une scintigraphie osseuse, une ostéomyélite chronique et proposé une intervention d’hyperalégage.

B. a. Le 13 décembre 2017, l’assuré – alors employé comme plâtrier-peintre par G______ et assuré par la SUVA – a été victime d’un accident (chute sur du carrelage). Il s’est fait mal à la jambe droite. Les 10 et 15 janvier 2018, le docteur H______, FMH pneumologie, a attesté d’une probable ostéomyélite chronique en relevant que l’affection de l’assuré était une suite de l’accident de 1996.

b. Le 23 janvier 2018, le Dr I______ a estimé que les troubles actuels de l’assurés étaient en relation de causalité probable avec l’accident de 1996.

c. Le 20 mars 2018, la consultation multidisciplinaire d’orthopédie infectieuse des HUG a attesté d’un SPECT-CT de la jambe droite qui faisait fortement penser à une procédure d’ostéomyélite chronique à bas bruit, nécessitant une intervention chirurgicale.

d. L’assuré a bénéficié d’une cure d’ostéomyélite au niveau du tibia droit le 18 novembre 2018 aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG – docteurs J______, médecin chef de clinique au département de chirurgie des HUG). Il a été constaté, après prélèvement, un staphylococcus epidermidis traité par antibiotiques.

e. Le 27 novembre 2018, le Dr I______ a confirmé qu’il s’agissait d’une résurgence du cas accident de 1996.

f. Le 28 janvier 2019, le Dr J______ a attesté d’une ostéomyélite chronique du tibia droit avec un pronostic moyen, l’assuré présentant des douleurs.

g. Le 18 juillet 2019, la SUVA a alloué à l’assuré une indemnité journalière de CHF 70.95 dès le 16 décembre 2017 et le 19 juillet 2019 elle l’a informé que les troubles actuels de sa jambe droite n’étaient plus en relation de causalité avec l’accident du 31 décembre 2017, mais avec celui du 19 décembre 1996.

h. Une IRM du 5 août 2019 a conclu à des signes d’ostéomyélite chronique.

i. Le rapport du Dr I______ du 15 janvier 2020 relève que l’assuré se plaint de douleurs persistantes depuis plus de 10 ans, et d’un résultat nul de la dernière intervention. Il a posé le diagnostic de séquelles d’ostéomyélite stabilisée après intervention en 2005, reprise en 2018, sans diagnostic formel à ce jour, en lien probable avec l’accident de 1996. Une ostéomyélite était douteuse même avant l’intervention. Le 25 mars 2020, il a indiqué que l’incapacité de travail n’était pas justifiée et que la situation médicale était stabilisée ; c’était à tort qu’une reprise pour ostéomyélite avait été effectuée.

j. Le 26 mars 2020, le docteur K______, chef de clinique au département de chirurgie des HUG, a indiqué au médecin-conseil de la SUVA que les prélèvements effectués lors de la cure d’ostéomyélite avaient montré des staphylocoques epidermis, traité par antibiothérapie ; les douleurs de l’assuré étaient difficilement expliquées mais une ostéomyélite chronique ne pouvait être formellement exclue ; une reprise chirurgicale devait être discutée.

k. Le 6 avril 2020, le médecin conseil de la SUVA a estimé que les problèmes d’ostéomyélite chronique étaient difficiles et que des reprises de nouvelles infections pouvaient survenir de nombreuses années après un épisode initial. Un deuxième avis avant une nouvelle intervention était nécessaire, auprès du Professeur L______, FMH orthopédie et traumatologie, du CHUV, lequel a indiqué le 14 avril 2020 que des examens complémentaires pouvaient permettre de confirmer ou d’exclure une infection en lien avec le problème orthopédique. Il était primordial de faire une scintigraphie osseuse ou un SPECT-CT de la jambe.

l. Le 13 mai 2020, le docteur M______, médecin-conseil de la SUVA, FMH psychiatrie et psychothérapie, a estimé, sur dossier, que l’assuré présentait un comportement d’invalidation et qu’il s’agissait d’un syndrome douloureux somatoforme chronique ou encore d’une majoration de symptôme physique pour des raisons psychologiques, non incapacitant.

m. Le 16 septembre 2020, la consultation d’orthopédie infectieuse des HUG a constaté que la récente IRM retrouvait des signes d’ostéomyélite chronique du tibia droit et une intervention chirurgicale était discutée (alésage avec prélèvement bactériologique et antibiothérapie adaptée).

n. Le 18 septembre 2020, le Prof. L______ a indiqué que, sur la base des examens complémentaires effectués, il était impossible de confirmer avec certitude absolue l’absence d’une infection chronique, de sorte qu’une scintigraphie aux leucocytes marqués était nécessaire ; celle-ci a été effectuée le 30 novembre 2020, montrant l’absence d’argument en faveur d’une ostéomyélite du tibia droit.

o. Le 8 décembre 2020, la consultation multidisciplinaire d’orthopédie infectieuse des HUG, dont le Dr K______, a estimé qu’il n’y avait pas d’indication à une prise en charge chirurgicale, après avoir effectué toutes les investigations nécessaires dont un CT-scan aux leucocytes marqués.

p. Le 16 décembre 2020, le Dr I______, médecin-conseil de la SUVA, a conclu qu’il n’existait pas d’infection active et que rien n’expliquait une incapacité de travail ; le cas était stabilisé depuis 2012 ; dans le contexte du syndrome douloureux chronique, la relation de causalité avec l’évènement initial n’était plus donnée ; il n’y avait pas de droit à une IPAI.

q. Par décision du 21 décembre 2020, la SUVA a mis fin à ses prestations, frais médicaux et indemnités journalières, au 3 janvier 2021, faute de lien de causalité entre le syndrome douloureux chronique et l’accident du 19 décembre 1996. L’assuré, représenté par un avocat, a fait opposition à la décision précitée le 1er février 2021, en faisant valoir qu’une analyse psychiatrique et physiologique complète était encore nécessaire.

r. Par décision incidente du 22 février 2021, la SUVA a refusé de restituer l’effet suspensif à l’opposition ; le recours dirigé contre cette décision a été déclaré sans objet par arrêt du 12 avril 2021 (ATAS/324/2021).

s. Par décision du 18 mars 2021, la SUVA a rejeté l’opposition de l’assuré, au motif que les troubles de l’assuré n’étaient plus en lien avec l’accident de 1996 ou de 2017, étant relevé que le lien de causalité entre les troubles psychiques de l’assuré et l’accident avait été nié dans la décision du 23 juillet 2013, entrée en force. Il n’y avait pas d’indication à une reprise chirurgicale et le cas était stabilisé ; un suivi par des spécialistes de la douleur n’était pas un traitement à la charge de l’assureur-accidents.

t. Le 22 avril 2021, la doctoresse N______, FMH médecine interne, a attesté d’un suivi de l’assuré depuis janvier 2019, lequel présentait des douleurs constantes, sous forme de brulure, une faiblesse et lâchage du membre inférieur droit, de l’angoisse, de l’asthénie et des troubles du sommeil ; il était en investigation à la consultation de la douleur.

C. a. Le 28 avril 2021, l’assuré, représenté par son avocat, a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l’encontre de la décision sur opposition du 18 mars 2021, en concluant, préalablement, à la restitution de l’effet suspensif au recours et, principalement, à l’annulation de la décision et à ce que la SUVA continue de fournir ses prestations légales, subsidiairement au renvoi de la cause à la SUVA. Il fait valoir qu’une pathologie organique objectivée subsiste, ce d’autant que les HUG avaient préconisé une reprise chirurgicale ; par ailleurs, l’absence d’infection active ne permettait pas à la SUVA de cesser d’investiguer. Une expertise était nécessaire ; l’avis du Dr M______ n’était pas probant, de surcroit sans l’avoir examiné. La situation n’était pas stabilisée ; une expertise orthopédique, neurologique, pharmacologique et psychologique était nécessaire. Il paraissait équitable que, durant la procédure, la SUVA continue de verser ses prestations.

b. Le 12 mai 2021, la SUVA, représentée par une avocate, a conclu au rejet de la demande de restitution de l’effet suspensif au recours ; le recourant ne produisait aucun élément médical qui mettait en doute les appréciations médicales sur lesquelles elle s’était fondée, de sorte que l’issue favorable du litige n’était pas crédible et le recouvrement éventuel des prestations versées s’avérerait vraisemblablement difficile.

c. Le 2 juin 2021, le recourant a répliqué en estimant que la prévision sur l’issue de la procédure lui était favorable ; l’analyse de la causalité dépendait du diagnostic qui n’était pas encore établi et la SUVA avait soudainement posé un diagnostic psychologique pour nier toute causalité.

d. Par arrêt du 4 juin 2021 (ATAS/569/2021), la chambre de céans a rejeté la demande de restitution de l’effet suspensif au recours.

e. Le 23 juin 2021, le Dr I______ a rendu une appréciation médicale. L’ostéomyélite du tibia droit avait été présente au tout début du cas mais plus depuis de très nombreuses années ; la scintigraphie aux polynucléaires marqués n’avait pas mis en évidence cette affection ; plus aucune investigation n’était donc à prendre en charge du point de vue orthopédique.

f. Le 25 juin 2021, la SUVA, représentée par une avocate, a conclu au rejet du recours, au motif que l’assuré présentait un syndrome douloureux chronique, relevant de la maladie et non pas une ostéomyélite. Quant à l’aspect psychiatrique, l’évaluation du Dr M______ du 13 mai 2020 était probante et toute affection psychique n’était en tout hypothèse pas en relation de causalité adéquate avec l’accident de 1996.

g. Les 3 et 13 septembre 2021, l’assuré a répliqué, en produisant un rapport du Dr O______, FMH chirurgie orthopédique, du 29 juin, selon lequel le 28 juin 2021, l’assuré présentait un érythème à la jambe droite avec une température légèrement élevée, des douleurs à la palpation ; or, l’examen aux leucocytes du 30 novembre 2020 n’était pas fiable, selon la littérature médicale, pour diagnostiquer une ostéomyélite chronique ; en revanche, un examen FDG-PET ou un prélèvement avec analyse bactériologique des tissus était nécessaire. En l’état, on ne pouvait exclure la persistance d’une ostéomyélite chronique.

Par ailleurs, selon l’assuré le dossier de la SUVA était incomplet ; la situation n’était pas stabilisée depuis 2012 ; les explications du Dr O______ mettaient en doute l’avis de la SUVA ; il convenait d’effectuer les examens préconisés par le Dr O______.

h. Le 21 septembre 2021, le Dr I______ a rendu une appréciation médicale, relevant que les spécialistes romands excluaient la nécessité d’une intervention chirurgicale, avec biopsie, et considéraient avoir effectué toutes les investigations nécessaires.

i. Le 28 septembre 2021, la SUVA a dupliqué, en se ralliant à l’avis du Dr I______ et en soulignant que le Dr O______ considérait uniquement comme « probable » l’existence d’une ostéomyélite.

j. Le 12 octobre 2021, l’assuré a observé que le Dr K______ avait changé d’avis sur la nécessité d’une biopsie, après avoir été influencé par le Dr I______. La SUVA estimait que le dossier était très complexe, de sorte qu’une expertise était nécessaire ; le dossier de la SUVA était encore incomplet.

k. Le 29 novembre 2021, l’assuré a requis de la chambre de céans que la SUVA fasse procéder à un prélèvement de tissu pour déterminer l’origine de l’inflammation, qu’elle complète son dossier et qu’une audience soit convoquée pour entendre les médecins.

l. Le 13 décembre 2021, la chambre de céans a entendu les parties en audience de comparution personnelle. Le recourant a déclaré que depuis son accident de 2017, les douleurs à la jambe, présentes depuis 1996, s’étaient aggravées et que, lors de l’intervention de novembre 2018, une ostéomyélite chronique avait été confirmée.

m. Le 21 décembre 2021, la SUVA a versé au dossier une copie du dossier concernant l’accident de 2017.

n. Le 22 décembre 2021, l’assuré a communiqué un bon de radiodiagnostic établi par le Dr O______, pour un examen FTG tibia droit

o. Le 14 janvier 2022, le Dr I______ a rendu une appréciation médicale selon laquelle le FDG-PET bénéficiait, en littérature, de publications favorables mais ne permettait pas mieux d’affirmer ou d’infirmer s’il s’agissait d’une infection ; le dossier était long, complexe et devait pouvoir bénéficier d’une expertise bidisciplinaire en orthopédie et infectiologie ; potentiellement, l’examen FDG-PET devait être pris en charge par la SUVA mais à la demande des experts.

p. Le 24 janvier 2022, la SUVA a considéré qu’il n’y avait pas d’indication à mettre en œuvre l’examen FDG-PET ; si la chambre de céans devait considérer qu’une instruction médicale se justifiait, seule une expertise bidisciplinaire serait opportune.

q. Le 27 janvier 2022, l’assuré a observé qu’il rejoignait l’avis du Dr I______ concernant la nécessité de mettre en œuvre une expertise multidisciplinaire indépendante, avec un volet psychiatrique, et concluait au renvoi de la cause à la SUVA pour ce faire.

Par ailleurs, le rapport du CT-scan aux leucocytes marqués n’était toujours pas au dossier, de sorte que la SUVA n’en avait pas eu connaissance avant de clore le cas. Il a relevé que le dossier de l’accident de 2017 comprenait :

·         un rapport de radiographie de la jambe droite du 10 janvier 2019, mentionnant sur « indication » une réactivation d’une ostéomyélite à staphylocoque epidermidis

·         un rapport de CT de la jambe droite du 11 janvier 2018, concluant à une image compatible avec une ostéomyélite étendue du tibia

r. Le 14 février 2022, la SUVA a observé qu’un renvoi de la cause auprès d’elle ne se justifiait pas.

s. Le 21 février 2022, la SUVA a communiqué le rapport des HUG de la scintigraphie aux granulocytes du 30 novembre 2020, concluant à l’absence d’arguments scintigraphiques pour une ostéomyélite du tibia droit.

t. le 25 février 2022, l’assuré a observé qu’il était regrettable que la SUVA refuse d’instruire alors que son médecin-conseil estimait qu’une expertise était nécessaire ; un accès digital aux images de l’examen du 30 novembre 2020 devait encore être donné par la SUVA et le Dr O______ avait persisté à dire que cet examen n’était pas suffisamment spécifique.

u. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.         

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]). Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

2.         

2.   

2.1 Selon l'art. 6 al. 1 LAA, les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA; ATF 129 V 402 consid. 2.1, ATF 122 V 230 consid. 1 et les références).

La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 119 V 335 consid. 1; ATF 118 V 286 consid. 1b et les références) et adéquate avec l’événement assuré (ATF 125 V 456 consid. 5a et les références).

Le droit à des prestations découlant d'un accident assuré suppose d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Cette condition est réalisée lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans cet événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Il n'est pas nécessaire que l'accident soit la cause unique ou immédiate de l'atteinte à la santé: il suffit qu'associé éventuellement à d'autres facteurs, il ait provoqué l'atteinte à la santé, c'est-à-dire qu'il apparaisse comme la condition sine qua non de cette atteinte (ATF 142 V 435 consid. 1).

Savoir si l'événement assuré et l'atteinte à la santé sont liés par un rapport de causalité naturelle est une question de fait, que l'administration ou, le cas échéant, le juge examine en se fondant essentiellement sur des renseignements d'ordre médical, et qui doit être tranchée en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante, appliquée généralement à l'appréciation des preuves dans l'assurance sociale. Ainsi, lorsque l'existence d'un rapport de cause à effet entre l'accident et le dommage paraît possible, mais qu'elle ne peut pas être qualifiée de probable dans le cas particulier, le droit à des prestations fondées sur l'accident assuré doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1, ATF 119 V 335 consid. 1 et ATF 118 V 286 consid. 1b et les références).

Le fait que des symptômes douloureux ne se sont manifestés qu'après la survenance d'un accident ne suffit pas à établir un rapport de causalité naturelle avec cet accident (raisonnement «post hoc, ergo propter hoc»; ATF 119 V 335 consid. 2b/bb; RAMA 1999 n° U 341 p. 408, consid. 3b). Il convient en principe d'en rechercher l'étiologie et de vérifier, sur cette base, l'existence du rapport de causalité avec l'événement assuré.

2.2 Le droit à des prestations de l'assurance-accidents suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate entre l'accident et l'atteinte à la santé. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2 et ATF 125 V 456 consid. 5a et les références). En présence d'une atteinte à la santé physique, le problème de la causalité adéquate ne se pose toutefois guère, car l'assureur-accidents répond aussi des complications les plus singulières et les plus graves qui ne se produisent habituellement pas selon l'expérience médicale (ATF 118 V 286 consid. 3a et ATF 117 V 359 consid. 5d/bb; arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 351/04 du 14 février 2006 consid. 3.2).

3.        Lorsque le cas d'un assuré a été liquidé par une décision de refus de prestations entrée en force, celui-ci peut toujours invoquer la survenance d'une modification dans les circonstances de fait à l'origine de sa demande de prestations (cf. RAMA 1994 n° U 189 p. 138). Alors que dans le domaine de l'assurance-invalidité, cette situation est réglée par le biais de la nouvelle demande de prestations, l'assurance-accidents prévoit la possibilité pour l'assuré d'annoncer en tout temps une rechute ou des suites tardives d'un accident assuré (voir arrêts du Tribunal fédéral 8C_501/2014 consid. 4.3 et 8C_207/2014 du 13 mars 2015 consid. 5.1). Dans cette hypothèse, un nouvel examen illimité ne peut pas être effectué. Il faut bien plutôt partir de la décision entrée en force et l'admission d'une rechute ou de séquelles tardives suppose une modification de l'état de fait déterminant sous l'angle du droit à la prestation (arrêt du Tribunal fédéral 8C_148/2018 du 6 juillet 2018 consid. 6.2 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 55/07 du 13 novembre 2007 consid. 4.1).

Selon l'art. 11 de l'ordonnance sur l'assurance-accidents du 20 décembre 1982 (OLAA - RS 832.202), les prestations d'assurance sont également allouées en cas de rechutes et de séquelles tardives. Conformément à la jurisprudence, les rechutes et les séquelles tardives ont ceci en commun qu'elles sont attribuables à une atteinte à la santé qui, en apparence seulement, mais non dans les faits, était considérée comme guérie. Il y a rechute lorsque c'est la même atteinte qui se manifeste à nouveau. On parle de séquelles tardives lorsqu'une atteinte apparemment guérie produit, au cours d'un laps de temps prolongé, des modifications organiques ou psychiques qui conduisent souvent à un état pathologique différent (ATF 123 V 137 consid. 3a ; ATF 118 V 293 consid. 2c et les références).

Les rechutes et suites tardives se rattachent donc par définition à un événement accidentel effectif. Corrélativement, elles ne peuvent faire naitre une obligation de l'assureur-accidents (initial) de verser des prestations que s'il existe un lien de causalité naturelle et adéquate entre les nouvelles plaintes de l'intéressé et l'atteinte à la santé causée à l'époque par l'accident assuré (ATF 118 V 296 consid. 2c et les références ; RAMA 2006 n° U 570 p. 74 consid. 1.5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 80/05 du 18 novembre 2005 consid.1.1).

4.         

4.1 La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l'accident, l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité physique ou mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical. Or, pour pouvoir établir le droit de l'assuré à des prestations, l'administration ou le juge a besoin de documents que le médecin doit lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1).

4.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. A cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

4.3 Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Etant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Dans une procédure portant sur l'octroi ou le refus de prestations d'assurances sociales, lorsqu'une décision administrative s'appuie exclusivement sur l'appréciation d'un médecin interne à l'assureur social et que l'avis d'un médecin traitant ou d'un expert privé auquel on peut également attribuer un caractère probant laisse subsister des doutes suffisants quant à la fiabilité et la pertinence de cette appréciation, la cause ne saurait être tranchée en se fondant sur l'un ou sur l'autre de ces avis et il y a lieu de mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l'art. 44 LPGA ou une expertise judiciaire (ATF 135 V 465 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 9C_301/2013 du 4 septembre 2013 consid. 3).

4.4 Une appréciation médicale, respectivement une expertise médicale établie sur la base d'un dossier n’est pas en soi sans valeur probante. Une expertise médicale établie sur la base d'un dossier peut avoir valeur probante pour autant que celui-ci contienne suffisamment d'appréciations médicales qui, elles, se fondent sur un examen personnel de l'assuré (RAMA 2001 n° U 438 p. 346 consid. 3d). L’importance de l’examen personnel de l’assuré par l’expert n’est reléguée au second plan que lorsqu’il s’agit, pour l’essentiel, de porter un jugement sur des éléments d’ordre médical déjà établis et que des investigations médicales nouvelles s’avèrent superflues. En pareil cas, une expertise médicale effectuée uniquement sur la base d’un dossier peut se voir reconnaître une pleine valeur probante (arrêt du Tribunal fédéral 8C_681/2011 du 27 juin 2012 consid. 4.1 et les références).

4.5 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C/973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

4.6 On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. A cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4; SVR 2008 IV n. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_751/2010 du 20 juin 2011 consid. 2.2).

5.              

5.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3, ATF 126 V 353 consid. 5b, ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

5.2 Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, les autorités administratives et les juges des assurances sociales doivent procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raison pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Ils ne peuvent ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, ils doivent mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 283 consid. 4a; RAMA 1985 p. 240 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3).

5.3 Le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a; RAMA 1985 p. 240 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

6.        En l’occurrence, s’agissant de l’objet du litige, il convient de rappeler ce qui suit :

6.1 Par décision du 29 juin 2012, confirmée sur opposition le 23 juillet 2013, l’intimée a mis fin à la prise en charge du traitement en lien avec l’accident de 1996. Suite à l’annonce de l’accident de 2017, l’intimée a considéré que la lésion présentée par le recourant à la jambe droite était en réalité en lien avec l’accident de 1996 ; elle a pris en charge, à ce titre, les frais de traitement et le versement de l’indemnité journalière.

Ce faisant, l’intimée a reconnu la survenance d’une rechute, voire d’une séquelle tardive en lien avec l’accident de 1996, justifiant le versement de nouvelles prestations. Par décision du 21 décembre 2020, confirmée sur opposition le 18 mars 2021, l’intimée a ensuite mis fin à la prise en charge du traitement et au versement de l’indemnité journalière au 3 janvier 2021, au motif que le recourant présentait un syndrome douloureux chronique qui n’était pas en lien avec l’accident de 1996 (ni par ailleurs avec celui de 2017). Elle s’est fondée sur l’avis de ses médecins-conseils, dont ceux du Dr I______ des 15 janvier et 16 décembre 2020 ; par ailleurs, l’avis du Dr M______ était probant et il n’existait pas de lien de causalité entre un trouble psychiatrique et l’accident de 1996 ; enfin, le cas était stabilisé selon le Dr I______ depuis 2012 et il n’y avait aucune indication à une reprise chirurgicale, suite à l’examen du 30 novembre 2020.

6.2 Le litige porte ainsi sur le bienfondé de la cessation de la prise en charge du traitement et du versement de l’indemnité journalière au 3 janvier 2021, suite à une rechute ou séquelle tardive de l’accident de 1996, admise par l’intimée, singulièrement sur la question de la stabilisation de l’état de santé du recourant et le lien de causalité entre les troubles qu’il présente et l’accident de 1996.

7.        L’intimée se fonde sur l’avis de ses médecins-conseils, principalement sur ceux du Dr E______ du 8 mai 2012 et du Dr I______ des 15 janvier et 16 décembre 2020.

7.1 Dans son avis du 8 mai 2012, le Dr E______ considère que la problématique de la jambe droite a été très largement prise en compte et traitée selon les règles de l’art ; le contexte était dorénavant celui d’un syndrome douloureux chronique et la situation personnelle et sociale du recourant, dans le contexte de l’immigration, venait se surajouter à la problématique ; il n’y avait aucun événement objectif qui permettait de suspecter la poursuite de phénomènes pathologiques et d’origine purement organique au niveau du membre inférieur et de la jambe droite ; il n’existait plus de trouble résiduel lié directement à l’accident de 1996.

Le 16 janvier 2020, le Dr I______ a considéré qu’aucun élément ne justifiait une reprise chirurgicale en 2018 de l’ostéomyélite, les douleurs étaient les mêmes depuis plus de 10 ans ; il était étonnant que les infectiologues, dans une affaire aussi complexe, ne demandaient pas une scintigraphie spécifique, polynucléaire marquée ou autre technique. Le 16 décembre 2020, le Dr I______ a observé que la scintigraphie aux polynucléaires marqués qu’il avait préconisée établissait qu’il n’existait pas d’infection active ; il n’y avait pas d’infection, pas d’ostéomyélite et pas d’indication chirurgicale ; la dernière intervention, vingt-cinq mois auparavant, était stabilisée ; ce dossier était la suite d’évènements qui, sur une fracture de jambe droite, s’était compliquée initialement d’infection et qui était stabilisée maintenant depuis 2012 ; il confirmait le syndrome douloureux chronique relevé par le Dr E______ le 8 mai 2012 et il n’existait plus de trouble résiduel lié à l’accident de 1996 ; le recourant était à la recherche inlassable d’une infection qui n’existait pas ; le cas était stabilisé déjà depuis le 15 janvier 2020.  La capacité de travail était totale comme plâtrier-peintre.

 

7.2 La chambre de céans constate que les avis précités sont sérieusement mis en doute, d’une part par l’avis étayé du Dr O______ du 29 juin 2021, lequel a relativisé la pertinence de la scintigraphie aux leucocytes du 30 novembre 2020, dans le cadre de la recherche d’une ostéomyélite chronique, en expliquant qu’un examen de type FDG-PET serait plus adéquat, d’autre part par le Dr I______ lui-même. En effet, celui-ci, dans sa dernière appréciation du 14 janvier 2022, tout en soulignant que l’examen aux polynucléaires marqués du 30 novembre 2020 éliminait « quasiment » la présence d’une ostéomyélite chronique, a relevé que l’examen préconisé par le DR O______ – FDG-PET – bénéficiait de publications favorables mais pourrait aboutir à seulement ajouter un autre résultat aux deux examens des 13 juillet et 30 novembre 2020, sans permettre de donner une réponse concluante. Malgré cela, il a considéré que le dossier était long et complexe et nécessitait finalement d’être analysé de façon indépendante, par le biais d’une expertise bidisciplinaire, en orthopédie et en infectiologie et que l’examen FDG-PET devait potentiellement être pris en charge par l’intimée si les experts désignés le demandaient.

Cet avis du Dr I______ ne permet ainsi plus de considérer que les avis précédents de celui-ci des 15 janvier et 16 décembre 2020 – qui écartaient de façon péremptoire la présence d’une ostéomyélite chronique – sont probants. Par ailleurs, le Dr I______ ne détermine pas clairement le moment où il considère que l’état de santé est stabilisé. Il semble se référer à l’année 2012, tout en citant ensuite le 15 janvier 2020. Or, à cet égard, l’intimée, par la prise en charge de la rechute / séquelle tardive annoncée par le recourant, a admis que l’état de santé n’était, depuis cette date, pas stabilisé. Elle a d’ailleurs versé des indemnités journalières et remboursé les frais de traitement du recourant. On ne saurait, dans ces conditions, admettre que l’état de santé est resté stabilisé depuis 2012.

7.3 Au vu de la position du Dr I______ et de l’avis du Dr O______, il convient de constater que le cas est insuffisamment instruit et qu’une expertise médicale est nécessaire, laquelle devra, du point de vue orthopédique, examiner l’opportunité de faire procéder à l’examen FDG-PET pour déterminer si le recourant présente une ostéomyélite chronique. Comme indiqué par le Dr I______, un expert infectiologue devra également être désigné.

7.3.1 Enfin, un volet psychiatrique devra également être mis sur pied. En effet, l’avis succinct et uniquement sur dossier du Dr M______ du 13 mai 2020 est insuffisant pour permettre une appréciation du cas. Tel est également le cas du consilium psychiatrique du 17 mai 2011 de la CRR, lequel est sommaire et ancien.

7.3.2 Le Tribunal fédéral considère que dans la mesure où le caractère naturel et le caractère adéquat du lien de causalité doivent être remplis cumulativement pour octroyer des prestations d'assurance-accidents, la jurisprudence admet de laisser ouverte la question du rapport de causalité naturelle dans les cas où ce lien de causalité ne peut de toute façon pas être qualifié d'adéquat. Il n'est en revanche pas admissible de reconnaître le caractère adéquat d'éventuels troubles psychiques d'un assuré avant que les questions de fait relatives à la nature de ces troubles (diagnostic, caractère invalidant) et à leur causalité naturelle avec l'accident en cause soient élucidées au moyen d'une expertise psychiatrique concluante. D'une part, un tel procédé est contraire à la logique du système. En effet, le droit à des prestations découlant d'un accident suppose tout d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. Ainsi, on ne peut pas retenir qu'un accident est propre, sous l'angle juridique, à provoquer des troubles psychiques éventuellement incapacitants sans disposer de renseignements médicaux fiables sur l'existence de tels troubles, leurs répercussions sur la capacité de travail et leur lien de causalité avec cet accident. D'autre part, la reconnaissance préalable d'un lien de causalité adéquate est un élément de nature à influencer, consciemment ou non, le médecin psychiatre dans son appréciation du cas, et donc le résultat d'une expertise psychiatrique réalisée après coup s'en trouverait biaisé (ATF 147 V 207 consid. 6.1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_421/2021 du 27 janvier 2022).

En l’occurrence, vu la complexité du cas, il n’est pas possible d’exclure le lien de causalité adéquate entre un éventuel trouble psychique du recourant et l’accident de 1996. Partant, une expertise psychiatrique permettant d’établir l’existence ou non d’un tel trouble et ses conséquences sur la capacité de travail du recourant apparaît d’autant plus nécessaire.

8.        L’instruction médicale complémentaire précitée est nécessaire pour déterminer si l’état de santé du recourant est stabilisé, s’il présente une ostéomyélite chronique ou tout autre affection somatique et psychique en lien de causalité avec l’accident de 1996 et, cas échéant, les conséquences de celles-ci sur sa capacité de travail.

8.1 En l’état, l’intimée n’a pas établi que l’état de santé du recourant était stabilisé au 3 janvier 2021, de sorte que le recourant a droit, dès cette date, à la poursuite du versement de l’indemnité journalière et le remboursement de ses frais de traitement.

8.2 Enfin, en l’absence d’instruction médicale indépendante de la part de l’intimée, suite à la rechute / séquelle tardive annoncée, il se justifie de renvoyer la cause à l’intimée, comme le requiert le recourant, afin qu’elle mette en œuvre l’expertise tridisciplinaire susmentionnée, en respectant les principes jurisprudentiels du Tribunal fédéral, soit une désignation des experts de manière consensuelle (Arrêt du Tribunal fédéral 9C_908/2012 du 22 février 2013 consid. 5.1, ATF 137 V 210 consid. 3.4.2.6).

8.3 Partant, le recours sera partiellement admis, la décision litigieuse annulée et la cause sera renvoyée à l’intimée pour instruction complémentaire par le biais d’une expertise avec volets orthopédique, infectiologique et psychiatrique et nouvelle décision.

Vu l’issue du litige une indemnité de CHF 2'500.- sera allouée au recourant, à charge de l’intimée.


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Annule la décision de l’intimée du 18 mars 2021.

4.        Renvoie la cause à l’intimée pour instruction complémentaire et nouvelle décision dans le sens des considérants.

5.        Alloue au recourant une indemnité de CHF 2'500.- à charge de l’intimée.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le