Skip to main content

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/2489/2021

ATA/870/2021 du 27.08.2021 sur JTAPI/773/2021 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2489/2021-MC ATA/870/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 27 août 2021

en section

 

dans la cause

 

M. A______
représenté par Me Magali Buser, avocate

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 4 août 2021 (JTAPI/773/2021)


EN FAIT

1) M. A______, né le ______ 1980, est originaire de B______. Il est connu des autorités suisses sous plusieurs autres identités, la dernière étant celle d'C______, né le ______ 1987, D______.

2) M. A______ a été renvoyé de Suisse à destination de la B______ les 14 mai 2008 et 11 octobre 2012.

3) Depuis 2004, il a aussi fait l'objet de trois interdictions d'entrée en Suisse, la dernière interdiction ayant été valable jusqu’au 21 décembre 2017.

4) Entre 2011 et 2017, M. A______ a été condamné à de nombreuses reprises par les instances pénales lucernoises, bernoises et neuchâteloises, principalement pour des vols au sens de l'art. 139 al. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), violation de domicile au sens de l'art. 186 CP et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121).

5) Le 5 mars 2019, le commissaire de police a notifié à M. A______ une interdiction de pénétrer sur l'ensemble du territoire genevois pour une durée de douze mois, à laquelle il ne s’est pas opposé.

6) Le 29 avril 2019, M. A______ a été interpellé par la police genevoise.

7) a. Le 27 juin 2019, le Tribunal de police (ci-après : TP) a déclaré M. A______, sous le nom d’C______, coupable de vol (art. 139 ch. 1 CP), de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP), d'entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20), de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), d'exercice d'une activité lucrative sans autorisation (art. 115 al. 1 let. c LEI) et de non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une autre interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 119 al. 1 LEI) et l'a condamné à une peine privative de liberté de huit mois sous déduction de soixante-trois jours de détention avant jugement.

Le TP a simultanément ordonné son expulsion de Suisse pour une durée de trois ans (art. 66abis CP).

b. Par arrêt du 16 septembre 2019, la chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice (ci-après : CPAR) a pris acte du retrait de l’appel de M. A______ contre le jugement du 27 juin 2019.

8) a. Le 22 février 2020, M. A______ a été libéré de la prison de E______ par les autorités pénales.

b. Le même jour, le commissaire de police l'a assigné au territoire de la commune de Carouge pour une durée de douze mois conformément à l'art. 74 LEI, dans l'attente de l'arrêt de la chambre pénale de recours de la Cour de justice (ci-après : CPR) suite au recours interjeté contre la décision de non-report de son expulsion judiciaire.

9) Le 10 mars 2021, la CPR a rejeté le recours de M. A______, considérant en droit ce qui suit :

« Le recourant s'opposait à son expulsion pour des motifs liés à sa maladie et à ses liens avec sa fille.

« Or, dans son jugement, le Tribunal de police a statué, s'agissant de ces derniers, qu'ils étaient ponctuels et que de tels contacts – qui n'étaient pas assimilables à une vie de famille ne pouvant être maintenue ailleurs qu'en Suisse – pourraient continuer si l'intéressé devait retourner dans son pays d'origine. Sous l'angle médical, il a également relevé que le suivi médical obtenu à Genève ne paraissait pas indispensable à sa survie et que rien n'indiquait qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié dans un autre pays.

« Le recourant ne saurait ainsi aujourd'hui, au détour de sa contestation de l'exécution de son expulsion, faire réexaminer ces questions, qui sont définitivement tranchées.

« À l'instar du Ministère public, il y a lieu de relever qu'à teneur de la jurisprudence du Tribunal fédéral, le système de santé B______ permet de s'y faire traiter médicalement (arrêt 2C_411/2015 du 24 juin 2015, consid. 5.2). L'avis contraire de son médecin n'y change donc rien, de sorte que son audition est inutile. Que le recourant considère n'avoir pas les ressources financières pour recevoir les soins nécessaires en B______ n'est enfin pas démontré.

« Le recourant a, devant l'OCPM, sollicité son renvoi vers l'F______. Il ne revient pas là-dessus dans son recours. Son renvoi vers un État "Dublin" est de toute manière exclu à teneur du dossier. Sa nationalité B______ est également établie. La B______ l'a reconnu comme étant l'un de ses ressortissants et est disposée à lui délivrer un laissez-passer, de sorte qu'il n'y a aucun obstacle matériel à son renvoi dans ce pays.

« Enfin, le recourant ne prétend pas que son renvoi vers la B______ l'exposerait à des persécutions ou à d'autres traitements inhumains ou dégradants.

« Son renvoi ou son expulsion n'étant pas impossible, le recourant ne peut continuer à séjourner en Suisse. La mesure n'avait pas à être différée. L'OCPM a statué à bon droit ».

10) Les services de police ont demandé à swissREPAT, en date du 12 mai 2021 de prévoir un vol avec escorte policière à destination de la B______ afin de permettre de refoulement de M. A______. 

Une place sur un vol à destination de la B______ a été réservée et confirmée pour le 9 juin 2021 à 12h20 au départ de Genève.

11) Le 19 mai 2021, à 15h10, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de six semaines.

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi en B______.

12) Lors de l’audience devant le TAPI, M. A______ a déclaré qu'il ne s'appelait pas A______ mais C______. Il était d’origine D______ et s’opposait à son renvoi tant en D______ qu'en B______. Il n’avait toutefois pas de document d’identité en cours de validité au nom d’C______. Il n'avait pas de lieu de résidence à Genève ni de source de revenu. Sa fille, G______, habitait avec sa mère à H______ : il la voyait deux fois par mois. Il n’était pas en bonne santé, ayant dû entamer un traitement pour soigner sa spondylarthrite ankylosante, laquelle avait commencé quinze à vingt ans plus tôt. Il avait également une prothèse à la hanche et était asthmatique. Il devait être immédiatement libéré : son renvoi était impossible en raison du fait de son origine D______, de ses gros problèmes de santé et de la présence de sa fille en Suisse.

Le représentant du commissaire de police a indiqué qu'il n'avait aucun élément concernant la nationalité D______ de l'intéressé, lequel avait été reconnu par les autorités B______ comme étant un de leurs ressortissants, sous le nom de A______ – nom apparaissant dans les extraits SYMIC, lesquels étaient les seuls à faire foi. Dans le cas de la demande de soutien, faite au secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM), les autorités avaient adressé la liste des alias de l’intéressé, ses empreintes digitales ainsi que la copie des deux premières demandes de soutien puisqu'il s'agissait de la troisième procédure de renvoi, et une photo récente. Le SEM avait pris contact avec les autorités B______ en vue de la délivrance d'un laissez-passer – lequel serait remis quelques jours avant la date du vol. La situation médicale de l'intéressé n'atteignait pas la gravité nécessaire pour faire obstacle à l'expulsion.

13) Par jugement du 21 mai 2021, le TAPI a rejeté le recours.

Le recourant avait été reconnu par les autorités B______ sous le nom de A______, lesquelles avaient délivré, à deux reprises, un laissez-passer en sa faveur pour son renvoi en B______ en 2008 et 2012, sans qu’il s’y soit opposé. Lors de son audition par la police le 4 mars 2019, il avait reconnu que son véritable nom était A______ et l’utilisation d’alias. Par ailleurs, le rapport médical établi le 29 mars 2019 par les hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) l’avait été sous le nom de A______, identité sous laquelle le suivi médical s’était très probablement poursuivi. Enfin, il n’était titulaire d’aucun document d’identité en cours de validité permettant de confirmer qu’il se nommerait effectivement C______ et serait D______. Le TAPI tenait pour établi qu’il s’appelait A______ et était ressortissant de B______.

M. A______ faisait l'objet d'une mesure d'expulsion pénale et avait été condamné pour vols par le TP le 27 juin 2019 et le Ministère public de Berne le 5 janvier 2021, soit des infractions qualifiées de crimes. Sa détention administrative se justifiait donc sous l'angle de l’art. 75 al. 1 let. h LEI par le renvoi de l’art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, ce motif permettant à lui seul le prononcé d'une telle mesure. Le principe de la légalité était donc respecté.

L'assurance de son départ de Suisse répondait par ailleurs à un intérêt public certain et toute autre mesure moins incisive que la détention administrative serait vaine pour assurer sa présence au moment où M. A______ devrait monter dans l'avion devant le reconduire dans son pays d'origine, étant notamment observé qu'à teneur du dossier, il ne disposait pas en Suisse de moyens de subsistance ni de lieu de résidence. La détention respectait par conséquent le principe de la proportionnalité.

La CPR avait retenu, dans son arrêt du 10 mars 2021, que le renvoi de l’intéressé était possible, après avoir analysé ses situations médicale et personnelle, notamment ses relations avec sa fille. Aucun nouvel élément n’avait été apporté dans le cadre de la procédure en cours.

14) Par acte du 31 mai 2021 M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement du TAPI précité. Il a conclu à son annulation, au constat d'une violation de l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) et à ce que sa mise en liberté soit immédiatement ordonnée.

15) Le commissaire a conclu au rejet du recours.

Le vol du 9 juin 2021 avait dû être annulé, à cause des démarches entreprises par le recourant auprès de l’ambassade de B______ (ci-après : l’ambassade). Celle-ci avait, dans l'attente d'informations complémentaires du SEM au sujet de la famille de M. A______, refusé de délivrer le laissez-passer nécessaire à cette fin. Ce refus n'était toutefois pas définitif, le SEM étant en discussions avec l’ambassade pour la suite de la procédure.

16) Par réplique du 9 juin 2021 M. A______ a persisté dans ses conclusions.

a. Les relations avec sa fille étaient concrètes et effectives. Elles étaient « empreintes d'amour et d'affection » selon son ex-compagne, Mme I______. Il joignait une attestation dans ce sens et copie du passeport de cette dernière.

Il n'invoquait plus une quelconque nationalité D______ ou l'identité d'C______ et s'excusait d'avoir donné de fausses informations. Il était décidé à collaborer avec les autorités « sur cette question ».

b. Il ressortait de l'attestation de Mme I______ qu'elle connaissait M. A______ depuis 2005 environ. Il avait toujours entretenu des relations empreintes d'amour et d'affection, bienveillantes à l'égard de sa fille. Malgré sa situation et les coupures que celle-ci avait entraînées au niveau de la relation avec sa fille, M. A______ avait toujours témoigné beaucoup d'amour et d'intérêt pour celle-ci. Il avait également fait de son mieux pour entretenir ce lien par des téléphones, des contacts épistolaires, des cadeaux pour son anniversaire notamment. Il se souciait de la santé, de la scolarité et du bien-être de son enfant. Elle avait soutenu ce bon rapport entre le père et sa fille et avait pu observer régulièrement tout au long des années « ce que je décris ci-dessus ». « Ma fille d'ailleurs a du plaisir à rencontrer son père, malgré le fait qu'elle ne le connait que relativement peu, ayant habité avec lui que lorsqu'elle était un bébé ».

17) Par arrêt du 11 juin 2021, la chambre administrative a rejeté le recours.

C'était à tort que le recourant essayait de remettre en question le jugement du TP, définitif et exécutoire, à l'instar de celui de la CPR du 10 mars 2021 à l'encontre duquel il n'était pas allégué qu'un recours avait été interjeté. Aucun élément nouveau et pertinent n’était par ailleurs intervenu depuis l’analyse faite par les juridictions pénales.

En tant que le recourant faisait valoir sa relation avec sa fille vivant en Suisse, pour autant que son renvoi soit contraire et au droit à la vie familiale, il faisait valoir un argument se rapportant au droit d'obtenir, à certaines conditions, un titre de séjour. Or, cette question ne pouvait être examinée dans le cadre de la procédure de renvoi. Le juge de la détention administrative devait en principe seulement s'assurer qu'une décision de renvoi existait, sans avoir à vérifier la légalité de cette dernière. Ce n'était que lorsque la décision de renvoi apparaissait manifestement inadmissible, soit arbitraire ou nulle, que le juge de la détention pouvait, voire devait, refuser ou mettre fin à la détention administrative. Tel n'était pas le cas en l'espèce ; le recourant ne le faisait d'ailleurs pas valoir.

De surcroît, tant le TP que la CPR avaient tranché cette question par des jugements définitifs et exécutoires, considérant que le renvoi du recourant ne violait pas l’art. 8 CEDH.

La mère de sa fille relevait que cette dernière ne connaissait que relativement peu son père. Entretenir des relations empreintes d'amour et d'affection pour son enfant pouvait être attendu de tout parent et était sans incidence sur l’objet du litige. Dans la mesure où les relations actuelles du recourant avec sa fille, selon l’attestation de la mère de celle-ci, l’étaient par téléphone, lettres et envoi de cadeaux pour son anniversaire, un renvoi dans son pays d'origine ne modifierait pas leurs habitudes.

L'ambassade n'était pas intervenue au motif de l’état de santé du recourant mais de son lien avec sa fille, lequel méritait vérification conformément au courriel du SEM du 3 juin 2021. Ledit courriel invoquait « des clarifications au sujet de la situation familiale de l'intéressé ». Il ne pouvait en tirer aucun argument quant au bien-fondé de son recours.

18) Par requête motivée du 17 juin 2021, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de six semaines.

19) Le 21 juin 2021, l'OCPM a transmis au TAPI un courriel du SEM du même jour l’informant des démarches prévues par les autorités en vue de la délivrance d'un document de voyage en faveur de l'intéressé. Suite au refus d'émission de laissez-passer, celles-ci avaient souhaité davantage de clarifications quant à la situation personnelle de l'intéressé. Divers échanges et rencontres étaient prévus d'ici le début du mois de juillet avec les autorités B______, aux cours desquels il serait réitéré que l'intéressé demeurait sous l'obligation de quitter la Suisse et qu'un document supplétif de voyage était attendu.

20) Lors de l’audience du 22 juin 2021 devant le TAPI, le représentant de l'OCPM a indiqué que depuis ce courriel datant de la veille, il n'avait pas de détails s'agissant de la date exacte « début juillet » des échanges annoncés.

Sur questions de son conseil, M. A______ a exposé qu'il avait de bons contacts avec sa fille, âgée de bientôt quinze ans, et qu'il la voyait souvent. C'était sa décision si sa fille ne venait pas le voir en prison car il ne voulait pas qu'elle le voie « derrière les barreaux ».

21) Par jugement du 23 juin 2021, le TAPI a prolongé la détention administrative de M. A______ pour une durée de six semaines, soit jusqu'au 9 août 2021 inclus.

La légalité de la détention avait déjà été examinée par la chambre administrative et il suffisait de se référer aux motifs de son arrêt.

L’assurance du départ de M. A______ répondait toujours à un intérêt public et le principe de diligence avait été respecté. Enfin, le renvoi était possible et aucun élément pertinent n’était intervenu depuis l’arrêt de la chambre administrative qui permettrait de remettre en question cette analyse.

La durée de six semaines respectait pleinement le principe de proportionnalité.

22) Par requête motivée du 23 juillet 2021, l’OCPM a sollicité une nouvelle prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de deux mois, indiquant que selon les dernières informations reçues du SEM le 19 juillet 2021, le cas de M. A______ avait été soumis à l'Ambassadeur et que la personne en charge du dossier prendrait prochainement contact avec l'ambassade afin de clarifier si une décision avait été prise.

23) Lors de l’audience du 3 août 2021 devant le TAPI, M. A______ a précisé que lors des deux derniers renvois, il était en possession d'un passeport valable.

Le représentant de l'OCPM a indiqué que le SEM avait pu obtenir un rendez-vous avec l'ambassade le 9 juillet 2021. Lors de cet entretien, les représentants du SEM avaient rappelé l'intérêt public prépondérant du renvoi de M. A______ en B______ et la pratique en matière de renvoi entre les deux pays. Les autorités étaient maintenant dans l'attente d'une décision de l'ambassade mais étaient confiantes de recevoir une réponse dans les semaines à venir, étant précisé qu'ils étaient en pleine période de vacances. Il a rappelé qu'il ne manquait que le laissez-passer des autorités B______ pour pouvoir procéder au renvoi de M. A______. Celui-ci avait déjà bénéficié de deux laissez-passer lors de ses deux renvois précédents. Si M. A______ contactait l'ambassade pour l'informer être volontaire au départ, il pensait qu'ils obtiendraient le laissez-passer plus rapidement. Il a déposé un échange de courriels du 29 juillet 2021 dans lequel le SEM indiquait ne pas avoir pu atteindre l'ambassade malgré ses tentatives depuis le début de la semaine précédente. Il a demandé la confirmation de la prolongation de la détention administrative de M. A______ déposée le 23 juillet 2021 pour une durée de deux mois.

M. A______ a confirmé n’avoir déposé aucune demande auprès des autorités afin de régulariser sa situation ni entrepris de démarches en vue de quitter le territoire suisse.

24) Par jugement du 4 août 2021, le TAPI a prolongé la détention administrative de M. A______ pour une durée de deux mois, soit jusqu’au 8 octobre 2021 inclus.

Le courrier rédigé par la mère de sa fille le 4 juin 2021 avait déjà été pris en compte dans l’arrêt de la chambre administrative du 11 juin 2021. Selon le rapport de consultation de rhumatologie des hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) du 30 juillet 2021, l’intéressé souffrait des mêmes pathologies que celles retenues notamment dans l’arrêt de la CPR du 10 mars 2021. Le recourant ne rendait pas vraisemblable qu’un retour en B______ le mettrait personnellement et concrètement en danger en raison d’un risque sécuritaire auquel il devrait faire face. Enfin, aucun élément du dossier ne permettait de retenir que l’ambassade ne serait pas disposée à délivrer le laissez-passer sollicité en raison de la situation politique dans le pays.

25) Par acte du 16 août 2021, M. A______ a interjeté recours contre ce jugement auprès de la chambre administrative. Il a conclu à l’annulation du jugement du TAPI du 4 août 2021, au constat de la violation de l’art. 8 CEDH et à sa mise en liberté immédiate. Subsidiairement, la détention devait être prolongée d’un mois, soit jusqu’au 8 septembre 2021.

L’art. 80 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) avait été violé. Il était établi par pièces qu’il ne pourrait pas suivre son traitement en B______. Son état de santé ne lui permettrait pas non plus de travailler. Il n’aurait aucun moyen de subsistance ni de possibilité de se faire soigner. Il entretenait une relation effective avec sa fille. Les autorités B______ n’avaient pas répondu à l’OCPM malgré les diverses relances dont elles avaient fait l’objet, ce qui démontrait qu’elles n’avaient pas l’intention de délivrer un laissez-passer.

L’art. 8 CEDH avait été violé et il ne pouvait être demandé à sa fille, avec qui il entretenait un lien effectif, de le suivre en B______ en cas de renvoi. Elle était scolarisée depuis sa naissance en Suisse dont elle avait la nationalité. Son ex-compagne était également suisse. Il ne pouvait pas non plus être requis de celle-ci d’aller vivre en B______. L’intérêt de M. A______ à rester en Suisse auprès de sa fille primait l’intérêt public de l’État à son renvoi.

Le principe de proportionnalité avait été violé. Aucun laissez-passer ne lui avait été délivré depuis le 19 mai 2021 malgré diverses tentatives des autorités suisses. Depuis le 23 juillet 2021, l’ambassade ne répondait même plus à l’OCPM. Le renvoi ne pourrait en conséquence pas être exécuté.

26) Le commissaire de police a conclu au rejet du recours.

Le recourant s’était adressé à l’ambassade en indiquant être désespéré de devoir se séparer définitivement de sa fille qu’il aimait profondément et en implorant l’ambassade de bien vouloir l’aider à faire suspendre ou annuler son expulsion. Les efforts qu’il avait déployés avaient amené les autorités de son pays à ne pas respecter leurs obligations conventionnelles envers la Suisse et à retarder la délivrance du laissez-passer. Des clarifications étaient en cours. Si M. A______ se montrait coopératif, rien ne s’opposerait à l’établissement de documents de voyage. Il ne s’agissait dès lors pas d’une impossibilité mais seulement d’un retard dans le processus, exclusivement imputable au recourant et contrevenant aux obligations de la République de B______ envers la Confédération helvétique. Cette situation constituait une première dans le cadre du partenariat migratoire liant les deux pays. Si les autorités B______ devaient, en violation de leurs obligations conventionnelles, refuser définitivement de délivrer le laissez-passer sollicité, M. A______ devrait être placé en détention pour insoumission, étant à la fois seul responsable de la situation de blocage rencontrée par les services suisses chargés de l’exécution de son expulsion et cela à même de la dénouer.

27) Dans sa réplique, le recourant a relevé que manifestement les autorités B______ n’entendaient pas délivrer de laissez-passer. Il n’avait pas été concerné par le vol spécial à destination de la B______ du 17 août 2021. Son renvoi n’était pas possible, sans qu’il ne puisse lui être reproché d’avoir contacté son ambassade, ce qu’il avait le droit de faire.

28) Par écritures spontanées, le commissaire a précisé que le vol du 17 août 2021 n’était pas un vol spécial mais ordinaire avec un accompagnement policier (DEPA). Seul le comportement d’obstruction du recourant empêchait son renvoi.

29) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) La légalité de la détention du recourant a été analysé, la dernière fois, dans l’arrêt de la chambre administrative du 11 juin 2021. Le recourant ne conteste pas que cette condition est remplie compte tenu principalement des condamnations pour des crimes et l’expulsion pénale dont il a fait l’objet selon le jugement du TP du 27 juin 2019.

3) a. Selon l’art. 80 al. 6 let. a LEtr, la détention administrative doit être levée si l’exécution du renvoi ou de l’expulsion s’avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles, ou qu’elle ne peut être raisonnablement exigée, cette dernière disposition légale renvoyant à l’art. 83 al. 1 à 4 LEtr.

b. Tant que l’impossibilité du renvoi dépend de la volonté de l’étranger de collaborer avec les autorités, celui-ci ne peut se prévaloir de cette impossibilité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_639/2011 du 16 septembre 2011). Cette jurisprudence, rendue dans le cadre d’une détention pour insoumission, en rapport avec l’obligation de collaborer de l’art. 78 al. 6 LEtr, est a fortiori valable dans un cas de détention en vue du renvoi, phase à laquelle s’applique l’obligation de collaborer de l’art. 90 al. 1 let. c LEtr (ATA/881/2015 du 28 août 2015 et les références citées).

c. Le renvoi ne peut être raisonnablement exigé si l’expulsion de l’étranger dans son pays d’origine le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile ou de violence généralisée, ou de nécessité médicale, sa vie étant mise en danger du fait de l’impossibilité de poursuivre dans son pays un traitement médical indispensable (art. 83 al. 4 LEtr ; ATA/881/2015 précité).

d. L'art. 83 al. 4 LEtr vise non seulement les personnes qui, sans être individuellement victimes de persécutions, tentent d’échapper aux conséquences de guerres civiles, de tensions, de répressions ou d’autres atteintes graves généralisées aux droits de l’homme, mais également celles pour lesquelles un retour dans leur pays d’origine reviendrait à les mettre concrètement en danger, notamment parce qu’elles ne pourraient plus recevoir les soins dont elles ont besoin, soit les soins de médecine générale d’urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine. Il ne suffit pas en soi de constater, pour admettre l'inexigibilité de l'exécution du renvoi, qu'un traitement prescrit sur la base de normes suisses ne pourrait être poursuivi dans le pays de l'étranger (arrêt du TAF D-3819/2010 du 21 novembre 2011 consid. 4.2.3). Si les soins essentiels nécessaires peuvent être assurés dans le pays d’origine ou de provenance de l’étranger concerné, l’exécution du renvoi dans l’un ou l’autre de ces pays sera raisonnablement exigible (ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; ATA/227/2015 du 2 mars 2015 consid. 5c).

e. Le recourant fait valoir que l'exécution de son renvoi vers la B______ ne serait plus possible les autorités B______ n’ayant pas l’intention de délivrer le laissez-passer.

Les autorités suisses ont agi avec célérité et régularité auprès des autorités B______. Elles ont, le 19 août 2021 encore, soit il y a une semaine environ, eu un entretien avec la Consule de l’ambassade. Les clarifications souhaitées par l’ambassade étaient encore en cours. Elles portent sur le lien entre le recourant et sa fille. S’il ne peut certes pas être reproché au recourant d’avoir contacté son ambassade, la teneur précise de la demande du recourant auprès de sa représentation n’est pas connue. Le courriel du SEM du 20 août 2021 fait mention de pressions du recourant auprès de l’ambassade pour empêcher celle-ci de délivrer le laissez-passer. En l’absence de preuves, ce fait ne peut toutefois pas être retenu. Toutefois, les clarifications demandées par l’ambassade portant sur la relation qu’il entretient avec sa fille, il lui serait loisible de coopérer, ce qu’il n’indique pas avoir fait. Pour le surplus, rien au dossier n’indique que le retard va se prolonger exagérément ou que le recourant ne pourrait y mettre fin en collaborant. Le recourant pouvant, sur une base volontaire, quitter la Suisse et rejoindre son État d'origine, le renvoi est possible.

f. Quant à une inexigibilité du renvoi pour raisons de santé, elle ne peut être retenue à ce stade. Le certificat médical du 10 août 2021 mentionne certes une spondylarthrite ankylosante active malgré un traitement associant des anti-inflammatoires au long cours et salazopyrine. Outre que le traitement biologique injectable préconisé par le service de rhumatologie n’a pas été prescrit en l’absence de couverture assécurologique, le traitement représentant plusieurs milliers de francs, les conséquences décrites, soit des difficultés de mobilisation et des douleurs chroniques invalidantes, ne sont en l’état qu’hypothétiques et il n’est pas démontré que le recourant n’obtiendrait aucun médicament en B______. Pour le surplus, la situation médicale est identique à celle analysée le 11 juin 2021 par la chambre de céans. À juste titre, le TAPI a considéré que le certificat médical des HUG n’apportait aucun élément nouveau. Le recourant ne démontre d’ailleurs pas que les soins dont il manquerait doivent être qualifiés « d’urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine » au sens de la jurisprudence.

La prolongation de la détention sollicitée, soit jusqu’au 8 octobre 2021 inclus, reste proportionnée et le renvoi du recourant possible.

En tous points infondé, le recours sera rejeté.

4) La procédure étant gratuite, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA). Vu l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 août 2021 par M. A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 4 août 2021 ;

 

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Magali Buser, avocate du recourant, au commissaire de police, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, au secrétariat d'État aux migrations, ainsi qu'au centre Frambois LMC, pour information.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Verniory et Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

C. Marinheiro

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :