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Décisions | Chambre civile

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C/14186/2020

ACJC/874/2023 du 27.06.2023 sur JTPI/7613/2022 ( OO ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/14186/2020 ACJC/874/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 27 JUIN 2023

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, France, appelante d'un jugement rendu par la 3ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 23 juin 2022, comparant par Me Ninon PULVER, avocate, NP & VS AVOCATES, rue des Alpes 15, case postale, 1211 Genève 1, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié ______[GE], intimé, comparant par Me Daniela LINHARES, avocate, MALBUISSON AVOCATS, galerie Jean-Malbuisson 15, case postale 1648, 1211 Genève 1, en l'Étude de laquelle il fait élection de domicile.


EN FAIT

A.           Par jugement JTPI/7613/2022 du 23 juin 2022, reçu par les parties le lendemain, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant par voie de procédure ordinaire, a dissout par le divorce le mariage contracté le ______ 1993 à C______ (Genève) par B______, né le ______ 1968, et A______, née A______ [nom de jeune fille] le ______ 1965 (chiffre 1 du dispositif), ordonné à B______ de transférer sa part de copropriété d'une demie sur l'immeuble sis no. ______ route 1______, [code postal] D______ (France), à A______, à charge pour elle de s'acquitter de tous les frais liés à ce transfert de propriété (ch. 2), ordonné à CP CAISSE DE PREVOYANCE E______ de prélever 441'577 fr. du compte de prévoyance de son assuré B______ et de transférer cette somme auprès de FONDATION INSTITUTION SUPPLETIVE LPP au bénéfice de A______ (ch. 3), mis les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr. et laissés provisoirement à la charge de l'état, à charge de chacune des parties pour moitié (ch. 4), décidé qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 5) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6).

B.            a. Par acte expédié à la Cour le 24 août 2022, A______ a formé appel contre ce jugement, concluant, avec suite de frais et dépens, à ce que la Cour condamne B______ au versement d'une contribution en sa faveur de 3'000 fr. par mois, jusqu'à ce qu'elle atteigne l'âge de la retraite, et confirme le jugement entrepris pour le surplus.

b. Dans sa réponse, B______ a conclu, avec suite de frais et dépens, au rejet de l'appel.

c. Dans sa réplique, A______ a persisté dans ses conclusions et allégué des faits nouveaux (allégués 47 et 51).

d. B______ a dupliqué, concluant à l'irrecevabilité des allégués 47 et 51 précités et persistant, pour le surplus, dans ses conclusions.

e. A______ a encore déposé des observations, auxquelles B______ a renoncé à répondre.

f. Par plis du 27 décembre 2022, le greffe de la Cour a informé les parties de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivant ressortent de la procédure :

a. B______, né le ______ 1968, et A______, née A______ [nom de jeune fille] le ______ 1965, tous deux originaires de H______ [GE] et de F______ (Berne), se sont mariés à C______ (Genève) le ______ 1993.

Un enfant est issu de cette union, soit G______ né le ______ 1996. Il est aujourd'hui majeur et financièrement indépendant. A______ est également mère de trois autres enfants, de longue date majeurs, issus d'une précédente union.

b. Les époux A______/B______ ont mis un terme définitif à leur vie commune en mars 2017, époque à laquelle A______ a quitté l'appartement conjugal pour s'installer dans la résidence secondaire des époux, sise en France, dont ils sont copropriétaires.

c. Les mesures protectrices de l'union conjugale, requises par l'épouse le 9 mai 2018 et définitivement arrêtées par arrêt de la Cour ACJC/470/2019 du 10 mai 2019, lequel a été confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 5A_384/2019 le 29 août 2019, sont notamment les suivantes :

- la jouissance exclusive de l'appartement conjugal sis à Genève a été attribuée à B______ et celle de la résidence secondaire sis en France à A______;

- B______ a été condamné à payer à A______ une contribution d'entretien de 2'450 fr. par mois dès le 1er janvier 2018.

d. Le 17 juillet 2020, B______ a déposé une demande de divorce, concluant notamment, sur la question de la contribution d'entretien encore litigieuse en appel, et au dernier état de ses conclusions, à ce que le Tribunal dise que les parties ne se doivent aucune contribution d'entretien post-divorce et, subsidiairement, à ce qu'il soit condamné à verser une contribution d'entretien à A______ de 1'400 fr. par mois jusqu'en février 2026, date de sa retraite.

e. Dans sa réponse, A______ a conclu à ce que B______ soit condamné à lui verser 3'000 fr. par mois à titre de contribution à son entretien.

f. Les parties, qui avaient d'ores et déjà été entendues par le Tribunal à plusieurs reprises, ont plaidé lors de l'audience de comparution personnelle et de plaidoiries finales du 2 mars 2022.

A l'issue de cette audience, le Tribunal a gardé la cause à juger.

g. La situation financière et personnelle des parties est la suivante :

g.a B______ travaille en qualité de fonctionnaire de ______ à temps plein. Il réalise à ce titre un revenu mensuel net moyen de 10'420 fr.

Le Tribunal a retenu que son minimum vital élargi du droit de la famille s'élevait à 5'575 fr., comprenant son entretien de base OP (1'200 fr.), son loyer (1'095 fr.) (loyer effectif en 1'595 fr. dont devait être déduit la participation exigible de son fils majeur en 500 fr.), la location d'un parking (180 fr.), ses primes d'assurance maladie obligatoire (490 fr.) et complémentaires (160 fr.), ses primes d'assurance RC et ménage (30 fr.), ses frais de motocycle, dont les frais de plaque, d'assurance responsabilité civile et les frais d'essence estimés (100 fr. dont à déduire 70 fr. de transports publics), ses frais de repas hors domicile en 220 fr. (10 fr. * 22 jours ouvrables par mois) ainsi que sa charge fiscale (2'070 fr.).

A______ soutient que le loyer de B______ ainsi que son montant de base OP auraient dû être diminués de moitié, dès lors qu'il partageait l'appartement avec leur enfant majeur. Aussi, selon elle, son minimum vital de droit des poursuites s'élèverait à 2'471 fr. 15 et son minimum vital de droit de la famille à 5'067 fr. Elle soutient également que ses frais de transport public en 70 fr. n'auraient pas dû être comptabilisés (sic), car il serait notoire que les ______ [fonction] bénéficient de la gratuité des transports publics.

g.b Le Tribunal a retenu que A______, secrétaire de formation, avait travaillé durant pratiquement toute la vie conjugale commune pour différents employeurs dans des domaines variés tels que le secrétariat, le courtage, le nettoyage, l'entretien, la conciergerie, les soins aux personnes et la garde d'enfants. A______ a indiqué ne pas avoir travaillé entre 2000 et 2007 pour s'occuper des enfants et n'avoir ensuite occuper que des "petits jobs", jusqu'à cesser de travailler en 2017, en raison d'une incapacité de travail causée par une dépression.

Il ressort cependant de la procédure que, en dernier lieu, entre septembre 2010 et fin août 2019, A______ était fonctionnaire cantonale et travaillait en qualité d'huissière pour un traitement mensuel net moyen d'environ 4'855 fr. Elle a été licenciée de cet emploi à fin août 2019 pour cause d'arrêt de travail ininterrompu depuis février 2017. En décembre 2019, elle a été reconnue invalide à 40 % (avec une capacité résiduelle de travail de 50%). Elle perçoit actuellement un quart de rente AI en 460 fr. nets par mois et une demi-rente d'invalidité LPP en 600 fr. nets par mois, soit des revenus totaux de 1'060 fr. nets par mois.

Son minimum vital élargi du droit de la famille, retenu par le Tribunal, s'élève à 2'775 fr., comprenant son entretien de base OP (1'020 fr. en raison de sa résidence en France), les frais liés à cette résidence (eau, énergie, taxes, assurances, etc. en 675 fr.), ses primes mensuelles d'assurance maladie obligatoire, subsides déduits (435 fr.) et complémentaires (205 fr.), ses primes d'assurance RC et ménage (25 fr.), ses frais de véhicule, soit taxe, assurance et essence estimée, dont à déduire 70 fr. de transports publics (260 fr.), ses frais de téléphonie (130 fr.) et d'impôts (25 fr.).

A______ soutient que ses primes d'assurance maladie obligatoire seraient en réalité de 522 fr. 70 et qu'elle percevrait des subsides en 90 fr. Elle allègue en outre des frais médicaux mensuels non-remboursés en 100 fr., des frais mensuels de leasing pour son véhicule en 326 fr. 25, ainsi que des frais mensuels pour l'entretien de ses animaux domestiques en 50 fr. Elle soutient également que sa charge fiscale serait de 300 fr. par mois.

C.           Dans le jugement querellé, le Tribunal a retenu que l'entretien convenable de A______, calculé selon le minimum vital élargi du droit de la famille, s'élevait à 2'775 fr et que, réalisant un revenu mensuel net moyen de 1'060 fr. par mois composé de son quart de rente AI et de sa demi-rente d'invalidité LPP, elle subissait un déficit d'entretien de 1'715 fr. par mois.

Cependant, ce déficit ne résultait pas de conséquences, pour elle négatives, du mariage contracté et rompu, pendant lequel elle avait, jusqu'à la rupture conjugale survenue en 2017, toujours travaillé - en dernier lieu et depuis 2010 dans la fonction publique à 80% pour un traitement mensuel net de 4'855 fr. -, de sorte que sa capacité de travail et de gain n'avait pas été péjoré par le mariage. Son déficit résultait en réalité de son incapacité partielle de travail et du fait qu'elle n'avait, depuis lors, entrepris aucune démarche quelconque en vue de mettre pleinement en œuvre et à profit sa capacité résiduelle de travail de 50%.

Or, si elle le faisait - ce qui pouvait être attendu d'elle dès lors qu'elle devait s'y préparer depuis le début de la procédure de divorce et compte tenu de ses nombreuses et diverses expériences professionnelles dans des domaines variés – elle pourrait couvrir son déficit d'entretien en 1'717 fr. par mois.

Quoi qu'il en soit, le déficit d'entretien de A______ ne résultant pas des conséquences financièrement négatives du mariage, il n'était pas de ceux qu'une contribution d'entretien avait vocation à combler.

EN DROIT

1. 1.1 Les jugements de divorce sont susceptibles d'appel si l’affaire est non pécuniaire ou si, pécuniaire, la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant le Tribunal de première instance atteint 10'000 fr. (art. 308 CPC).

En l'espèce, le litige porte sur une question patrimoniale, soit la contribution d'entretien de l’épouse. Compte tenu des conclusions financières prises par l'appelante au dernier état des conclusions devant le premier juge, la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.2 Interjeté dans les 30 jours suivant la notification de la décision entreprise et dans la forme prescrite par la loi (art. 130 al. 1, 131 et 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable de ces points de vue.

1.3.1 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). Elle applique le droit d'office (art. 57 CPC). Cela étant, elle le fait uniquement, en vertu de l'art. 311 al. 1 CPC, sur les points du jugement que l'appelant estime entachés d'erreurs et qui ont fait l'objet d'une motivation suffisante - et, partant, recevable -, pour violation du droit ou pour constatation inexacte des faits (arrêts du Tribunal fédéral 4A_349/2015 du 5 janvier 2016 consid. 1.5 et 4A_263/2015 du 29 septembre 2015 consid. 5.2.2).

La maxime de disposition (art. 58 al. 1 CPC) et la maxime des débats atténuée (art. 55 al. 1, 277 al. 1 et 2 CPC) s’appliquent à la procédure concernant les contributions d’entretien post-divorce.

1.3.2 L'intimé soutient, dans un premier grief, que la présentation par l'appelante de quarante-deux allégués en appel ne satisfait pas aux exigences de motivation, faute de formuler un grief d'établissement arbitraire des faits.

Bien que présentées dans une partie en fait sous forme d'allégués, et non pas comme un grief d'établissement inexact des faits – ce qu'elles sont en réalité – les critiques soulevées par l'appelante sont compréhensibles et présentées clairement. Aussi, elles sont en principe recevables, étant précisé qu'il sied de ne pas se montrer trop formaliste au vu de la maxime de débat atténué qui s'applique à la présente procédure. Elles sont cependant sans portée sur le résultat de la présente procédure.

2. L'intimé conclut à ce que les faits contenus dans les allégués complémentaires 47 et 51 de la réplique de l'appelante soient déclarés irrecevables.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

S'agissant des vrais nova (echte Noven), la condition de nouveauté posée par la lettre b est sans autre réalisée et seule celle d'allégation immédiate doit être examinée. En ce qui concerne les pseudo nova (unechte Noven), il appartient au plaideur qui entend les invoquer devant l'instance d'appel de démontrer qu'il a fait preuve de la diligence requise, ce qui implique notamment d'exposer précisément les raisons pour lesquelles le moyen de preuve n'a pas pu être produit en première instance (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1; 143 III 272 consid. 2.3; 143 III 42 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_451/2020 du 31 mars 2021 consid. 3.1.1).

La procédure d'appel ne sert pas à compléter la procédure devant l'instance précédente, mais à examiner et corriger la décision de première instance au regard des critiques concrètes formulées à son encontre (ATF 142 III 413 consid. 2.2.2).

2.2 En l'espèce, sous l'allégué 47, l'appelante indique suivre des séances de thérapie par Skype, et sous l'allégué 51, elle prétend que l'expertise de la résidence secondaire que l'intimé a produite est lacunaire.

Elle soutient qu'elle était en droit d'alléguer ces faits "nouveaux" dès lors qu'ils constitueraient une contre-preuve aux arguments développés par l'intimé dans sa réponse. La question de savoir si tel est effectivement le cas peut souffrir de demeurer indécise, au vu du sort du présent litige (voir consid. 3 infra).

3. L'appelante reproche au Tribunal de lui avoir imputé un revenu hypothétique à hauteur de 50%, alors qu'elle serait totalement incapable de travailler en raison de son état de santé. Elle soutient qu'il lui serait au demeurant impossible de retrouver un travail en raison notamment de son éloignement géographique, de son âge, du fait que ses diplômes ne sont pas reconnus en Suisse et que ses expériences professionnelles sont trop anciennes. Le Tribunal aurait par ailleurs retenu qu'elle pouvait réaliser un revenu d'au moins 1'717 fr. à temps partiel, sans préciser le taux d'occupation, ni le domaine d'activité. Elle formule en outre diverses critiques sur les charges des parties, telles qu'établies par le Tribunal, en particulier l'absence de prise en considération de ses frais médicaux non remboursés.

L'intimé soutient quant à lui que c'est à bon droit que le Tribunal a imputé à l'appelante un revenu hypothétique de 3'034 fr. 45 (correspondant au prorata du dernier salaire qu'elle percevait), celle-ci étant capable de travailler à 50%. Elle aurait par ailleurs droit à des mesures de reclassement ou de réadaptation offerte par l'assurance-invalidité. Quant à son lieu de vie en France, elle l'avait librement choisi et ne pouvait s'en prévaloir pour refuser de travailler en Suisse. Elle pourrait par ailleurs réaliser un revenu en sous-louant une partie de la maison qu'elle occupe.

3.1.1 Aux termes de l'art. 311 al. 1 CPC, la motivation constitue une condition de recevabilité de l'appel prévue par la loi, qui doit être examinée d'office (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1). Lorsque la partie appelante ne satisfait pas à l'exigence susmentionnée le tribunal supérieur n'entre pas en matière sur l'appel (arrêts du Tribunal fédéral 5A_209/2014 du 2 septembre 2014 consid. 4.2.1; 4A_659/2011 précité, ibidem).

Selon la jurisprudence fédérale constante, si une décision comporte plusieurs motivations indépendantes, alternatives ou subsidiaires, et chacune suffisante pour sceller le sort de la cause, il incombe à l'appelant, sous peine d'irrecevabilité, de démontrer que chacune d'entre elles est contraire au droit (ATF 138 III 728 consid. 3.4; 138 I 97 consid. 4.1.4; 136 III 534 consid. 2; 133 IV 119 consid. 6.3; arrêts du Tribunal fédéral 5A_1017/2015 du 23 mars 2016 consid. 2.2; 4A_310/2012 du 1er octobre 2012 consid. 2.1; 2C_469/2012 du 22 mai 2012 consid. 4; pour un cas d'application sous l'empire du CPC par une autorité cantonale: arrêt du Tribunal fédéral 4A_525/2014 du 5 mai 2015 consid. 3).

L'appelant n'a en effet pas d'intérêt à faire examiner ses griefs dûment motivés, alors que la décision attaquée conserve toute son assise en raison d'une autre argumentation qu'il ne conteste pas (arrêt du Tribunal fédéral 4A_113/2018 du 12 juin 2018 consid. 3.4).

3.1.2 Selon la jurisprudence, la partie qui conteste un jugement doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée et son argumentation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'elle attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1 p. 375). Même si l'instance d'appel applique le droit d'office (art. 57 CPC), le procès se présente différemment en seconde instance, vu la décision déjà rendue. L'appelante doit donc tenter de démontrer que sa thèse l'emporte sur celle de la décision attaquée. Elle ne saurait se borner à simplement reprendre des allégués de fait ou des arguments de droit présentés en première instance, mais elle doit s'efforcer d'établir que, sur les faits constatés ou sur les conclusions juridiques qui en ont été tirées, la décision attaquée est entachée d'erreurs. Elle ne peut le faire qu'en reprenant la démarche du premier juge et en mettant le doigt sur les failles de son raisonnement. Si la motivation de l'appel est identique aux moyens qui avaient déjà été présentés en première instance, avant la reddition de la décision attaquée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_97/2014 du 26 juin 2014 consid. 3.3), ou si elle ne contient que des critiques toutes générales de la décision attaquée ou encore si elle ne fait que renvoyer aux moyens soulevés en première instance, elle ne satisfait pas aux exigences de l'art. 311 al. 1 CPC et l'instance d'appel ne peut entrer en matière (arrêts du Tribunal fédéral 5A_438/2012 du 27 août 2012 consid. 2.2; 4A_97/2014 précité consid. 3.3; 4A_376/2016 du 2 décembre 2016 consid. 3.2.1).

En d'autres termes, si ces conditions ne sont pas remplies, l'appel est irrecevable (arrêt du Tribunal fédéral 5A_577/2020 précité, consid. 5). La jurisprudence admet qu'on fasse preuve de souplesse en fonction des qualifications du plaideur qui appellerait sans l'aide d'un avocat. En tout état de cause, l'instance supérieure doit pouvoir comprendre ce qui est reproché au premier juge sans avoir à rechercher des griefs par elle-même, ce qui exige une certaine précision quant à l'énoncé et à la discussion des griefs (Jeandin, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2019, n. 3a ad art. 311 CPC).

3.1.3 Aux termes de l'art. 125 al. 1 CC, si l'on ne peut raisonnablement attendre d'un époux qu'il pourvoie lui-même à son entretien convenable, y compris à la constitution d'une prévoyance vieillesse appropriée, son conjoint lui doit une contribution équitable. Dans son principe, comme dans son montant et sa durée, l'obligation d'entretien doit être fixée en tenant compte des éléments énumérés de façon non exhaustive à l'art. 125 al. 2 CC (ATF 138 III 289 consid. 11.1.2;
137 III 102 consid. 4.1.1; 132 III 598 consid. 9.1).

Cette disposition concrétise deux principes: d'une part, celui de l'indépendance économique des époux après le divorce, qui postule que, dans toute la mesure du possible, chaque conjoint doit désormais subvenir à ses propres besoins; d'autre part, celui de la solidarité, qui implique que les époux doivent supporter en commun non seulement les conséquences de la répartition des tâches convenue durant le mariage (art. 163 al. 2 CC), mais également les désavantages qui ont été occasionnés à l'un d'eux par l'union et qui l'empêchent de pourvoir à son entretien (ATF 137 III 102 consid. 4.1.1; 132 III 598 consid. 9.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_78/2020 du 5 février 2021 consid. 4.1).

Lorsque l'union conjugale a durablement marqué de son empreinte la situation de l'époux bénéficiaire ("lebensprägende Ehe"), le principe est que le standard de vie choisi d'un commun accord durant la vie commune doit être maintenu pour les deux parties, dans la mesure où leur situation financière le permet (art. 125 al. 2 ch. 3 CC; ATF 147 III 249 consid. 3.4.3; 141 III 465 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_510/2021 précité, ibidem et les arrêts cités). Dans cette hypothèse, on admet en effet que la confiance placée par l'époux créancier dans la continuité du mariage et dans le maintien de la répartition des rôles, convenue librement par les conjoints, mérite objectivement d'être protégée (ATF 147 III 249 consid. 3.4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_510/2021 précité, ibidem et les arrêts cités).

Un mariage ayant influencé la situation financière d'un conjoint ne donne toutefois pas automatiquement droit à une contribution d'entretien : le principe de l'autonomie prime le droit à l'entretien, ce qui se déduit directement de l'art. 125 CC; un époux ne peut prétendre à une pension que s'il n'est pas en mesure de pourvoir lui-même à son entretien convenable et si son conjoint dispose d'une capacité contributive (ATF 137 III 102 consid. 4.1.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_968/2017 du 25 septembre 2018 consid. 4.1).

Lorsque le mariage a eu un impact décisif sur la vie des époux, l'état de santé doit être pris en considération pour déterminer le droit à une contribution et son étendue (art. 125 al. 2 ch. 4 CC), même si l'atteinte subie est sans lien avec le mariage. Le moment auquel survient l'atteinte à la santé n'est pas déterminant, tant qu'elle survient avant le jugement de divorce. Le principe de solidarité implique en effet que les conjoints sont responsables l'un envers l'autre non seulement des effets que le partage des tâches adopté durant le mariage a pu avoir sur la capacité de gain de l'un des époux, mais aussi des autres motifs qui empêcheraient celui-ci de pourvoir lui-même à son entretien (arrêts du Tribunal fédéral 5A_1008/2017 du 7 mars 2018, consid. 4.2.2; 5A_800/2016 du 18 août 2017 consid. 6.3; 5A_128/2016 du 22 août 2016 consid. 5.1.3.2 et les références).  

3.1.4 Selon la teneur littérale claire de l'art. 125 al. 1 CC, le principe de l'indépendance financière prime le droit à l'entretien post-divorce. Il en découle pour l'époux un devoir de se (ré) intégrer sur le marché du travail ou d'étendre une activité lucrative déjà existante. Un époux ne peut ainsi prétendre à une contribution d'entretien que si, en dépit des efforts que l'on peut raisonnablement exiger de lui, il n'est pas ou pas totalement en mesure de pourvoir lui-même à son entretien convenable (ATF 147 III 308 consid. 5.2, 249 consid. 3.4.4; 141 III 465 consid. 3.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_510/2021 précité, consid. 3.2.3; 5A_191/2021 du 22 février 2022 consid. 5.1.1).

S'agissant de la capacité des époux à financer leur entretien convenable, le juge tient en principe compte du revenu effectif des parties, tant le débiteur d'entretien que le créancier pouvant néanmoins se voir imputer un revenu hypothétique supérieur. Il s'agit ainsi d'inciter la personne à réaliser le revenu qu'elle est en mesure de se procurer et qu'on peut raisonnablement exiger d'elle afin de remplir ses obligations (ATF 143 III 233 consid. 3.2; 137 III 102 consid. 4.2.2.2). Le juge doit examiner deux conditions, à savoir si l'on peut raisonnablement exiger d'une personne qu'elle exerce une activité lucrative ou augmente celle-ci - ce qui est une question de droit - et si la personne a la possibilité effective d'exercer l'activité ainsi déterminée et quel revenu elle peut en obtenir - ce qui est une question de fait (ATF 147 III 249 consid. 3.4; 143 III 233 consid. 3.2 et la référence; arrêt du Tribunal fédéral 5A_510/2021 précité, ibidem et les arrêts cités).

Afin de déterminer si un revenu hypothétique doit être imputé, les circonstances concrètes de chaque cas sont déterminantes. Les critères dont il faut tenir compte sont notamment l'âge, l'état de santé, les connaissances linguistiques, la formation (passée et continue), l'expérience professionnelle, la flexibilité sur les plans personnel et géographique, la situation sur le marché du travail, etc. (ATF 147 III 308 consid. 5.6; arrêt du Tribunal fédéral 5A_510/2021 précité, ibidem et les arrêts cités).

3.2 En l'espèce, le Tribunal a débouté l'appelante de ses prétentions en fixation d'une contribution à son entretien, dans un double raisonnement. En premier lieu, il a retenu que le mariage n'était pas lebensprägend. Il a considéré que la situation déficitaire dans laquelle se trouvait l'appelante ne résultait pas des conséquences négatives du mariage, lequel n'avait pas eu un impact décisif et concret sur sa capacité et ses perspectives, puisqu'elle avait travaillé durant quasiment toute la vie commune, mais de ses problèmes de santé survenus au moment de la séparation. En second lieu, il a estimé que, même à supposer que le mariage soit lebensprägend, l'appelante ne pouvait prétendre à une contribution d'entretien car un revenu hypothétique pouvait lui être imputé à hauteur de son déficit au moins.

La motivation du Tribunal relative au revenu hypothétique de l'appelante est donc subsidiaire à celle de l'examen du caractère lebensprägend du mariage, ce qui est correct. En effet, ainsi qu'il ressort de la jurisprudence du Tribunal fédéral citée supra, la fixation d'une contribution d'entretien suppose que le mariage soit lebensprägend. A défaut, il n'y a pas lieu de fixer une contribution d'entretien, de sorte que la question de la fixation d'un éventuel revenu hypothétique ne se pose, dans cette hypothèse, pas.

En l'espèce, le fait que le Tribunal ait retenu, sans être critiqué, que le mariage n'était pas lebensprägend suffit à sceller le sort du litige, indépendamment de la fixation critiquée par l'appelante d'un revenu hypothétique.

En effet, l'appelante ne reproche pas au Tribunal d'avoir retenu que le mariage n'était pas lebensprägend. Elle ne s'attaque pas à la motivation du jugement sur cette question, lequel a retenu que l'appelante avait travaillé pendant quasiment toute la durée du mariage, célébré en 1993, dans divers domaines, et en dernier lieu comme huissière depuis 2010 jusqu'à son arrêt de travail en 2017, générant à ce titre un revenu net de 4'855 fr. par mois. Elle ne s'attaque pas plus au raisonnement du Tribunal qui a retenu que le déficit de sa situation financière actuelle ne résultait pas des conséquences du mariage contracté et rompu, mais de son incapacité partielle de travail intervenue ultérieurement, de sorte que ce déficit n'était pas de ceux qu'une contribution d'entretien avait vocation à combler. S'agissant de l'impact du mariage, elle reprend seulement son exposé de première instance et indique que "[d]urant la vie de couple, elle n'a pas travaillé durant sept ans, le couple ayant adopté le système traditionnel. Ainsi, A______ ne s'est pas formée. Preuve en est, lorsqu'elle a repris une activité lucrative – à temps partiel uniquement – [sic]. Par ailleurs, ses diplômes de [sic] sont pas reconnus en Suisse", concluant plus loin qu'"aucun revenu hypothétique de [sic] peut lui être imputé". A supposer que ce passage dût être interprété comme une critique du fait que le Tribunal ait retenu que le mariage n'était pas lebensprägend – ce qui apparaît douteux – il ne constitue en tout état pas une motivation suffisante eu égard aux exigences en la matière, d'autant plus que l'appelante était représentée par un avocat.

Aussi, la Cour ne peut revenir sur le jugement querellé en tant qu'il retient que le mariage n'était pas lebensprägend, faute de grief suffisamment motivé sur ce point. En conséquence, il n'y a pas lieu de se pencher sur les critiques de l'appelante qui portent exclusivement sur les éléments du calcul de la contribution d'entretien (revenu hypothétique et montant des charges).

En effet, en application de la jurisprudence mentionnée supra, faute d'avoir contesté chacune des motivations indépendantes du Tribunal, chacune suffisante pour sceller le sort de la cause, dont la question du caractère lebensprägend était l'élément central - unique dans le premier raisonnement et préalable dans le second - le grief de l'appelante, qui s'attaque uniquement à la question de la fixation d'un revenu hypothétique la concernant, pour requérir une contribution d'entretien en sa faveur, est irrecevable.

L'appelante n'ayant formulé de conclusions qu'à l'encontre du prononcé du jugement rejetant sa demande de fixation d'une contribution à son entretien, l'appel doit être déclaré intégralement irrecevable.

4. 4.1 Les frais - qui comprennent les frais judiciaires et les dépens (art. 95 al. 1 CPC) - sont mis à la charge de la partie qui succombe (art. 106 al. 1 1ère phrase CPC). La Cour peut cependant s'écarter des règles générales et répartir les frais selon sa libre appréciation, notamment lorsque le litige relève du droit de la famille (art. 107 al. 1 let. c CPC).

4.2 En l'espèce, les frais de la procédure d'appel seront arrêtés à 2'000 fr. (art. 30 et 35 RTFMC) et seront mis à la charge des parties par moitié chacune, compte tenu de la nature familiale du litige (art. 106 al. 2 et 107 al. 1 let. c CPC).

Dès lors que l'appelante plaide au bénéfice de l'assistance judiciaire (art. 122 al. 2 CPC), aucune avance de frais n'a été versée. La part des frais à sa charge, de 1'000 fr., sera provisoirement laissée à la charge de l'Etat de Genève, qui pourra en demander le remboursement ultérieurement (art. 123 CPC). L'intimé, quant à lui, sera condamné à verser à l'Etat de Genève, soit aux Services financiers du pouvoir judiciaire, un montant de 1'000 fr. Au vu de la nature du litige, il ne sera pas alloué de dépens d'appel (art. 107 al. 1 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare irrecevable l'appel interjeté le 24 août 2022 par A______ contre le jugement JTPI/7613/2022 rendu le 23 juin 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/14186/2020.

Sur les frais :

Arrête les frais de la procédure d'appel à 2'000 fr et les met par moitié à charge de A______ et B______.

Condamne B______ à verser 1'000 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Laisse provisoirement la part de frais de A______ à charge de l'Etat de Genève, qui pourra en demander le remboursement ultérieurement.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.